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Biotechnologie
Décembre 2002
Fasken Martineau DuMoulin s.r.l.
Le clonage humain sera interdit au Canada
Par Paul Marcotte
Le 9 mai 2002, le gouvernement fédéral présentait le projet de loi C-56 portant sur la procréation assistée. Depuis
plus d'une dizaine d'années, des consultations avaient cours sur la controversée question du clonage humain. Par ce
nouveau projet de loi, différentes activités faisant un usage inopportun des technologies de reproduction seront
dorénavant interdites parce que contraires à la dignité humaine ou aux valeurs sociétales partagées par la grande
majorité des Canadiens.
Le projet de loi remplacera les lignes directrices régissant la recherche sur les cellules souches annoncées en début
d'année par les Instituts de recherche en santé du Canada, qui sont la principale source de fonds distribués par le
gouvernement du Canada. Ces Instituts avaient en effet fixé des paramètres applicables obligatoirement aux
chercheurs dont ils financent les travaux. La nouvelle loi ira plus loin car elle s'appliquera également aux
scientifiques qui ne reçoivent pas de fonds fédéraux.
Ces nouvelles normes législatives étaient attendues depuis longtemps. Déjà un certain nombre de pays comme la
France, le Royaume-Uni, le Danemark et l'Australie possédaient des politiques pour encadrer de façon très serrée la
recherche génétique. Au Canada, c'était encore, jusqu'à tout récemment, le vide juridique sur cette question. Les
inquiétudes étaient donc grandes que des chercheurs étrangers viennent délibérément au Canada se livrer à des
manipulations génétiques pouvant conduire vers le clonage. Avant ce projet de loi, le gouvernement canadien était
totalement impuissant pour empêcher la poursuite de semblables expériences sur son territoire.
L'alinéa 5(1)a) du projet de loi est on ne peut plus clair :
« Nul ne peut, sciemment, créer un clone humain ou le transplanter dans un être humain. »
L'interdiction du clonage à des fins de reproduction s'appuie sur un large consensus au sein de la population selon
lequel chaque être humain est singulier et que, dès lors, il est inacceptable que l'on prenne des mesures scientifiques
faisant en sorte que deux personnes aient exactement le même bagage génétique et soient en tous points identiques.
Tout en reconnaissant l'importance des progrès scientifiques réalisés, notamment quant à l'utilisation de cellules
souches dans le traitement de certaines maladies dégénératives comme la maladie de Parkinson, d'Alzheimer et la
dystrophie musculaire, le législateur entend édicter qu'il ne sera désormais pas permis que des embryons soient
conçus uniquement à des fins de recherche pour que l'on en tire des cellules souches. Il faut bien comprendre
toutefois que seules les cellules souches embryonnaires et non les cellules souches adultes, ni celles du cordon
ombilical, sont visées par le projet de loi.
Fasken Martineau DuMoulin S.R.L.
Biotechnologie
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L'alinéa 5(1)b) du projet de loi stipule en effet que :
« Nul ne peut, sciemment, créer un embryon in vitro à des fins autres que la création d'un être humain ou que
l'apprentissage ou l'amélioration des techniques de procréation assistée. »
Dans le cadre de la procréation assistée, les embryons rejetés au tout début de leur développement pourront être
utilisés pour la recherche sur les cellules souches dans la mesure où ils n'ont pas été produits pour l'unique raison de
favoriser ou de faciliter des expériences scientifiques. En d'autres mots, les chercheurs ne pourront utiliser que des
embryons qui ont été créés pour des traitements de problème de fertilité et qui sont excédentaires. Le projet de loi a
donc choisi d'appuyer la thèse voulant qu'il est préférable de faire bon usage des embryons qui ne sont pas
implantés plutôt que de simplement les supprimer.
L'utilisation de cellules souches embryonnaires à des fins de recherche devient toutefois une activité réglementée.
En effet, pour ce faire, les chercheurs devront obtenir une autorisation de la nouvelle Agence canadienne de
contrôle de la procréation assistée avant d'entreprendre un projet de recherche sur des embryons in vitro. Il
appartiendra à qui veut obtenir cette autorisation de démontrer clairement à l'Agence que l'utilisation d'un embryon
est nécessaire aux fins du projet de recherche. Dans le but d'assurer la sécurité et la santé des gens qui font appel à
la procréation assistée, on exige aussi que le donneur donne son consentement éclairé en ce qui concerne le sort à
réserver aux embryons excédentaires.
Une autre prohibition a trait à la présélection du sexe de l'enfant. Aujourd'hui, grâce à des techniques de sélection
génétique, il serait possible pour un couple de décider d'avoir un enfant d'un sexe plutôt que de l'autre. Ces
pratiques ne seront plus tolérées parce que jugées contraires à l'égalité des individus consacrée dans les chartes et
les instruments liés aux droits de la personne. Une seule exception toutefois, lorsqu'il s'agit de prévenir,
diagnostiquer ou traiter des maladies ou des anomalies liées au sexe.
Il est de plus devenu moralement, médicalement et socialement inacceptable de permettre la modification des
cellules germinales pour avoir, finalement, ce qu'il est convenu d'appeler des « enfants à la carte ». Qu'il s'agisse de
science-fiction ou de réalité, même si la technologie devait permettre de faire en sorte que l'on puisse avoir des
enfants ayant, à titre d'exemple, des cheveux blonds et des yeux bleus, les parents ne pourront pas recourir à ce
genre de technologie. Pas question donc de modifier un embryon de manière à ce qu'il corresponde à l'image que
les parents se font personnellement de la perfection.
Au chapitre des pénalités, les délinquants seront sévèrement punis. Un contrevenant reconnu coupable par mise en
accusation sera exposé à une amende maximale de 500 000 $ et un empri-sonnement maximal de dix ans, tandis
que s'il est reconnu coupable par procédure sommaire, l'amende maximale sera de 250 000 $ et l'emprisonnement
maximal de quatre ans.
Comme on peut le deviner, ce projet de loi C-56 soulève de nombreuses questions d'éthique et de morale. Il s'agit
d'assurer un juste équilibre entre la protection et la promotion de la santé et de la sécurité de tous les Canadiens tout
en leur donnant l'assurance que la recherche très prometteuse qui y est rattachée se fasse dans le respect de la
morale et des convenances.
On peut communiquer avec Paul Marcotte au 514 397 5152 ou à l'adresse suivante :
[email protected]
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