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Synergies
CHAMBRE TUNISO-FRANÇAISE DE COMMERCE ET D’INDUSTRIE
www.ctfci.org
BULLETIN D’INFORMATION - N° 88 - DECEMBRE 2014
COLOCALISATION
EN MÉDITERRANÉE
La panacée pour
un partenariat
collaboratif
QUARANTIÈME ANNIVERSAIRE DE LA CTFCI
Engagement pour servir et accompagner l’entreprise
BAROMÈTRE DE LA CONJONCTURE ÉCONOMIQUE DE LA CTFCI : 2014-2015
Les promesses d’une démocratie naissante
Sommaire
N° 88 - Décembre 2014
Synergies
est un magazine économique publié par la CTFCI
39, Av. du Japon - 1073 Tunis- Montplaisir
Tél . : (216) 71 90 43 29 - Fax : (216) 71 90 09 66
E-mail
: [email protected]
Site web : http://www.ctfci.org
P. 3
EDITORIAL
• Promesses et exigences
Association tunisienne, créée en juin 1974, la Chambre
Tuniso-Française de Commerce et d’industrie a pour objet :
• De mettre en relation les hommes d’affaires tunisiens
et français et de donner aux uns et aux autres toutes
les indications utiles à l’effet de favoriser entre eux la
conclusion des affaires.
• D’assurer une liaison permanente avec les organismes
tunisiens, officiels et privés, responsables du développement
des échanges et des implantations industrielles .
• D’organiser des rencontres, colloques, missions à
caractères économique et professionnel.
• De promouvoir des manifestations économiques
destinées à développer les échanges (foires - expositions
- journées commerciales, ect.).
• D’aider au règlement des différends et des litiges
pouvant survenir entre ressortissants des deux pays.
P. 4
40ÈME ANNIVERSAIRE DE LA CTFCI
• Engagement pour servir et
accompagner l’entreprise
• D’analyser les réglementations du commerce extérieur
et des investissements, de les diffuser, ainsi que toutes
informations économiques permettant une meilleure
connaissance et une approche plus facile des marchés
tunisiens et français.
• De mettre en œuvre des mesures de coopération
technique, à l’échelon des entreprises.
• D’émettre des avis, de faire des suggestions permettant
de mieux adapter les réglementations aux besoins d’un
développement harmonieux des échanges commerciaux
entre la Tunisie et la France.
P. 29
• La Chambre Tuniso-Française de Commerce et
d’Industrie offre, en outre, à ses adhérents :
- Un bureau équipé pour contacter et recevoir
les relations d’affaires ;
- Une documentation variée sur l’économie et les
législations tunisienne et française ;
- Un secrétariat compétent et efficace pour l’organisation
de contacts en France et en Tunisie.
BAROMÈTRE DE LA CONJONCTURE
ÉCONOMIQUE DE LA CTFCI : 2014-2015
• Les promesses d’une démocratie naissante
BUREAU EXECUTIF
Président d’Honneur : M. R. BENMANSOUR
Président : M. F. LAKHOUA
Vice-Présidents :
M. S. BENSAID - M. J. M. MERCIER
Mme A. ZENAIDI
Secrétaire Général : M. K. ZRIBI
Trésorier Général : M. H. DOGHRI
Membres Institutionnels :
Mme Christel PERIDON, Chef du Service
Economique, M. Bertrand Divone
DE LA FOREST / UBI-France
P. 35
DOSSIER
• Colocalisation en méditerranée :
La panacée pour un partenariat
collaboratif
Synergies est une publication de la CTFCI
Directeur de la publication : Foued LAKHOUA
Rédaction / coordination : Med Néjib OUERGHI
Publicité : Héla TRIFI
Réalisé par SCRIPT
11, av. Abderrahmen Azzam - Montplaisir - 1002 TUNIS
Tél. : (+216) 71 906 155 (L.G) - Fax : (+216) 71 901 973
E-mail : [email protected]
Synergies N° 88 - Décembre 2014
P. 66
NOUVEAUX MARCHÉS
• Tout ce qu’il faut savoir sur les marchés
publics en Algérie
1
EDITORIAL
Foued Lakhoua
Président de la CTFCI
Promesses et exigences
L
e marathon des élections législative et
présidentielle que le pays a connu depuis la
fin du mois d’octobre dernier a été porteur
d’espoirs, de promesses et de messages clairs.
Incontestablement, à travers ces rendez-vous
électoraux rapprochés un grand pas a été franchi par
la Tunisie sur la voie de la consécration de la pratique
démocratique. Le peuple tunisien a renforcé son
engagement démocratique au moyen de l’organisation
d’élections crédibles et transparentes qui ont permis
aux Tunisiens de réaffirmer leur pleine citoyenneté et
de voter librement.
Au terme de cette grande messe qui a consacré le
principe de l’alternance pacifique au pouvoir dans
notre pays, l’heure est au travail et à l’effort.
A l’évidence, la Tunisie aborde, en cette nouvelle
année 2015, une nouvelle étape cruciale dans la
construction de son modèle démocratique et social.
Auréolée d’une bonne image de marque et d’un
inestimable crédit de la part de ses partenaires et des
pays frères et amis, la Tunisie est tenue à capitaliser
ces avancées engrangées et de les traduire en
réalisations physiques à même de faire renaître
l’espoir, de renforcer la confiance et de la mettre sur la
bonne orbite.
Si le chemin reste encore tortueux et semé d’embuches,
au regard de l’ampleur des demandes sociales, des
risques qu’encourt le pays, des attentes persistantes
d’une jeunesse à la recherche de repères et de l’effort
qui reste à déployer pour venir à bout des obstacles
qui bloquent sa marche, il est fort à croire que ces
défis ne sont pas infranchissables.
Pour cela, il importe de prendre conscience du prix à
payer par toute la communauté nationale pour que le
navire Tunisie arrive à bon port. Rebâtir la confiance,
faire renaître l’espoir et aller de l’avant sur la voie des
réformes exigent de se mettre vite à l’ouvrage. Cela est
d’autant plus impérieux, qu’il y a urgence de sauver
l’économie du pays, d’impulser l’investissement, de
soutenir l’initiative, de chasser tout flou et tout
attentisme. Le nouveau gouvernement issu des
élections se trouve dans l’obligation d’agir vite et
d’émettre des signaux clairs pour arrêter cette spirale
infernale qui risque de tout emporter avec elle et de
proposer un modèle alternatif de développement. Un
Synergies N° 88 - Décembre 2014
développement qui réhabilite les valeurs de l’effort et
du travail, qui a pour socle le partage et l’inclusion et
qui se ressource du génie des Tunisiens.
Il est certain que sur le court terme, il n’existe pas de
potion magique qui permet au pays de rebondir et de
répondre à toutes les sollicitations avec la célérité
requise, mais il importe d’opter derechef pour les bons
choix et les meilleures réformes qui suscitent et
l’adhésion et la confiance du plus grand nombre. Des
réformes censées générer une dynamique vertueuse
où la confiance contribue à la création de nouvelles
richesses, le travail devient le seul ascenseur social et
l’espoir se traduit par l’inclusion des jeunes dans la
sphère productive.
Afin de concourir, un tant soit peu, à la reprise de
l’activité économique, la CTFCI s’attèlera au cours de
la prochaine période avec les autres structures de
promotion du site tunisien des affaires (CEPEX, ONTT,
FIPA, UTICA…) ainsi que les services de l’ambassade
de France en Tunisie à rendre effectif ce processus.
Véhiculer un message sur une jeune démocratie en
construction exigera de nous une action et un effort
soutenus afin de transmettre chez les opérateurs
étrangers et nos partenaires, en particulier, l’image
d’un pays qui avance et qui offre, de surcroît, de
bonnes perspectives d’avenir.
Tout en se prévalant comme une force de proposition
à l’intérieur du pays, la Chambre, notamment à travers
ses commissions de réflexion jouera son rôle de
vecteur crédible de communication et d’information de
ses partenaires français notamment dans cette
période cruciale que connait le pays.
Rebâtir l’image de marque du pays passe, en toute
évidence, par le renforcement de la confiance des
opérateurs et des chefs d’entreprises par des actions
continues sur le terrain que la CTFCI est engagée à
assurer au cours de l’année 2015.
Nous saisissons cette occasion pour souhaiter, au nom
du Bureau directeur de la CTFCI et en mon nom
personnel, à l’ensemble de nos adhérents une bonne
et heureuse année 2015. Une nouvelle année pleine
de réussites, de prospérité et d’aboutissements
heureux à l’ensemble de vos projets personnels,
familiaux et professionnels.
3
40 ÈME ANNIVERSAIRE DE LA CTFCI
40 ÈME ANNIVERSAIRE DE LA CTFCI
Engagement pour
servir et accompagner
l’entreprise
La CTFCI, qui a su se prévaloir en un interlocuteur privilégié et écouté des
opérateurs, est résolue à explorer toutes les pistes favorisant un partenariat
tunsiso-français d’excellence.
L
a Chambre TunisoFrançaise de Commerce
et d’Industrie (CTFCI) a
célébré, les 16 et 17 octobre
2014, le 40 ème anniversaire
de sa création. Deux moments
forts ont caractérisé cet
événement qui a enregistré
une présence remarquable
de personnalités politiques
tunisiennes (les ministres de
l’Industrie, des Mines et de l’Énergie et de
l’Economie et des Finances, le Secrétaire d’Etat
auprès du Ministre des Affaires étrangères) et
françaises (l’ambassadeur de France à Tunis),
d’experts dans le domaine économique (Jean
Louis Guigou, Radhi Meddeb et Dominique
Bocquet), d’invités d’honneur et des adhérents
de la Chambre.
Le premier temps fort fut l’organisation, le 16
octobre 2014 à Tunis, avec l’appui de l’IPEMED
(Institut de la prospective économique du
monde méditerranéen) de la Conférence
économique sur la colocalisation en
méditerranée. Cette conférence dont
l’ouverture officielle a été assurée par M. Fayçal
Gouiaa, Secrétaire d’Etat auprès du Ministre
des Affaires étrangères, a été une opportunité
4
pour approfondir la réflexion
autour de cette thématique
d’intérêt et pour définir les
préalables nécessaires pour
jeter les fondements d’une
coopération d’un type
nouveau basée sur la coproduction et la création de
valeurs entre les opérateurs
économiques des deux rives
de la Méditerranée.
Cette conférence qui a été animée
respectivement par M. Radhi Meddeb,
Président de Comète Engineering, Jeau Louis
Guigou, Délégué général de l’IPEMED et
Dominique Bocquet Inspecteur général
économique et financier au ministère français
des Finances, a permis de dissiper bien des a
priori et de faire la distinction entre le concept,
souvent décrié en France, de délocalisation et
celui de la colocalisation. ce dernier processus
avait été un catalyseur du renforcement de la
compétitivité de l’économie allemande et du
développement des pays de l’Europe Centrale.
Le Président de la CTFCI a indiqué que la
participation d’imminents spécialistes à cette
conférence offre la possibilité de mieux cerner
ce processus, dont la finalité n’est autre que
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Ouverture de la conférence de la CTFCI sur la colocalisation.
l’établissement des relations de type nouveau
entre les opérateurs économiques du Nord et
du Sud de la Méditerranée, faire valoir les
gains induits par son adoption et approfondir
les études engagées, dont la plupart ont
convergé vers un même constat : le temps de
la colocalisation en méditerranée est bel et
bien venu.
L’Alliance pour le numérique :
un exemple à suivre
L’action continue engagée par l’IPEMED
(Institut de Prospective Economique du Monde
Méditerranéen) qui, en combinant études,
rencontres débat, action de communication et
lobbying a réussi à créer une véritable
conscience sur l’impératif de rompre avec les
relations asymétriques qui ont longtemps
prévalu entre les pays du Nord et du Sud de la
Méditerranée et de converger vers un modèle
coopératif.
Cet événement a fourni l’opportunité de passer
en revue des expériences réussies de
colocalisation en Tunisie. Le témoignage de
Synergies N° 88 - Décembre 2014
trois entreprises, dont l’une tunisienne, a été
édifiant dans la mesure où, leurs itinéraires
croisés ont montré tous les gains qui peuvent
être glanés une fois la démarche de
coproduction est judicieusement suivie.
Le témoignage de chefs d’entreprise a
confirmé l’idée que la Tunisie pouvait
constituer un levier de croissance et permettre
de générer des emplois des deux côtés de la
Méditerranée.
Le modèle de partenariat «gagnant/gagnant»
commence à s’imposer entre entreprises
tunisiennes et françaises et que des synergies
peuvent se développer dans l’industrie du
luxe, l’agro-industrie, les textiles techniques,
les biotechnologies, ou encore les énergies
renouvelables.
L’expérience prometteuse de l’Alliance francotunisienne pour le Numérique (AFTN) qui
permet aux opérateurs d’aller au-delà des
flux traditionnels d’export ou d’investissement
de France vers la Tunisie en développant les
bases d’un partenariat équilibré constitue
aujourd’hui un témoignage édifiant.
5
40 ÈME ANNIVERSAIRE DE LA CTFCI
40 ÈME ANNIVERSAIRE DE LA CTFCI
La Chambre honore ses membres fondateurs
et son équipe dirigeante
Les trophées de la CTFCI
Le deuxième temps fort de
la célébration du 40ème
anniversaire de la CTFCI fut
l’organisation, le 17 octobre
2014, d’une soirée de gala à
laquelle ont pris part 350
convives et dont le point
d’orgue a été la distribution
des trophées du 40ème anniversaire
à des personnalités illustres
qui ont été à l’origine de
la création de la Chambre, ont
soutenu et appuyé son activité.
Ces trophées ont été une sorte
d’hommage rendu à des
personnalités politiques, de
dirigeants d’entreprises et de
figures qui ont marqué la vie
de la Chambre.
La CTFCI attribue son Trophée à des personnalités politiques...
Par la même occasion, la Chambre a décerné
un trophée à l’Université Tunis Carthage (UTC)
pour la collaboration active de son cadre
enseignant (branche architecture) à l’organisation d’un concours pour la conception du
trophée commémoratif du 40ème anniversaire.
Elle a décerné également des Prix à trois
étudiantes qui ont conçu le logo commémorant cet événement.
Ils ont été décernés, à feu
Habib Bourguiba Jr (Premier
Président de la CTFCI), à
Feu Hédi Mabrouk, ancien
ambassadeur de Tunisie en
France et ancien Ministre des
Affaires étrangères dont l’appui
et l’apport à la Chambre furent
déterminants, à Feu Mahmoud
Belhassine (Deuxième Président
de la CTFCI), à Monsieur
Ridha Benmansour, Président
d’honneur de la Chambre.
Des trophées ont été décernés ... et à des membres fondateurs.
à d’autres personnalités
en reconnaissance de leur
M. Hachemi Kooli, l’un des pères de l’industrie
rôle dans le renforcement de la crédibilité
du textile.
et le prestige de la CTFCI. Dans cette catégorie
on peut classer des fondateurs de la CTFCI,
à l’instar de feu Said Chenik (PDG de la
Des ambassadeurs français et tunisiens ont
Banque du Sud à l'époque) et M. Jacques
reçu le trophée de la CTFCI en reconnaissance
Bellanger, du groupe linéaire de Paris et
de leur appui à la Chambre.
6
La célébration par la CTFCI du 40 ème
anniversaire de sa création s’est poursuivie
jusqu’au mois de décembre. Après l’organisation à Tunis, le 16 octobre 2014, d’une
conférence économique sur la colocalisation en
méditerranée en collaboration avec l’IPEMED
(Institut de prospective économique du Monde
méditerranéen) et d’un grand dîner-gala le
17 octobre 2014 au cours duquel le trophée de
la CTFCI a été décerné à des personnalités
illustres (du monde politique, diplomatique et
des membres fondateurs), la Chambre a
organisé le 10 décembre dernier une cérémonie
pour honorer des anciens et nouveaux membres
de son Comité directeur et certains membres de
l’équipe dirigeante de la CTFCI.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Il est à signaler que parmi les récipiendaires
des trophées du 40 ème anniversaire, figurent
des personnalités qui ont contribué, dès les
premiers jours, à sa création, à la promotion
de ses activités et au raffermissement de son
rôle en tant qu’interlocuteur privilégié de la
communauté des affaires.
Dans une ambiance conviviale et bon enfant,
le Président de la CTFCI, M. Foued Lakhoua a
attribué les trophées du 40 ème anniversaire à
Feu Tahar Makni (trophée remis à son épouse),
Slaheddine Ferchiou (ancien dirigeant de la
CTAMA) qui ont fait partie du premier comité
directeur de la Chambre dès sa création en 1974.
D’autres personnalités ont été honorées
Synergies N° 88 - Décembre 2014
dont M. Norbert Deguillebon, ancien
Président des CCEF et Feu Mohamed Ali
Dargouth (trophée remis à son fils).
Des trophées du 40 ème anniversaire ont été
décernés également aux membres actuels
du Comité directeur de la CTFCI ainsi qu’à
M. Abdelfattah Jemal (ancien Directeur de la
Chambre) et Mme Latifa Jalloul (actuelle
directrice principale à la Chambre).
Le Président de la CTFCI remet le Trophée de Feu Tahar Makni à son
épouse.
Remise du Trophée du 40ème anniversaire à M. Norbert de Guillebon
Remise du 1er Prix de création du Trophée de la CTFCI.
7
LA VIE DE LA CTFCI
LA VIE DE LA CTFCI
LOI DE FINANCES 2015 ET RÉFORME FISCALE
L’investissement et la
stabilisation du cadre
macroéconomique,
priorités de 2015
8
animé, le jeudi 11 décembre 2014, un débat
organisé par la Chambre Tuniso-Française de
Commerce et d’Industrie sur la Loi de Finances
2015 et la réforme fiscale, cette approbation
traduit autant un nouvel état d’esprit des
députés qu’un engagement pour respecter la
Constitution. «C’est un signal fort, dira-t-il,
qui reflète une prise de conscience de la
nécessité de dégager un consensus large pour
engager des réformes profondes dont le pays
a si besoin».
Quelques heures seulement après son
adoption, M. Hakim Ben Hammouda qui
n’arrive pas à dissimuler sa satisfaction, affirme
qu’aujourd’hui la situation économique du
pays est stabilisée. Ceci est corroboré par le
regain du sentiment de confiance chez les
investisseurs et l’atténuation de l’intensité des
pressions exercées sur le budget de l’Etat,
même si elles restent quelque peu fortes. «Le
prochain gouvernement, ajoute-t-il, aura la
possibilité de travailler dans de meilleures
conditions dans la mesure où il aura la latitude
d’agir pour combler tout gap qui pourrait se
manifester».
M. Hakim BENHAMOUDA anime le débat sur la Loi de Finances.
Cette amélioration relative de la situation
économique, note le Ministre, ne doit pas
pousser à un optimisme démesuré. Beaucoup
reste à faire pour relever un certain nombre de
défis au premier rang desquels on trouve celui
de la relance de l’investissement, qui marque
encore le pas et la restructuration du système
bancaire, actuellement en bute à des
difficultés sérieuses.
«La fiscalité ne sera plus un avantage
déterminant dans l’attraction des IDE,
d’où l’impératif d’une réflexion approfondie pour déterminer les avantages
que pourra offrir le site tunisien
des affaires, affirme le Ministre de
l’Economie et des Finances.
La stabilisation du cadre macroéconomique au
cours de l’année 2014 est un fait patent,
puisqu’au moment où le pays s’acheminait
vers un déficit budgétaire à deux chiffres,
précise M. Ben Hammouda, la feuille de route
adoptée par le gouvernement a permis, en
neuf mois, de gagner quatre points de déficit
(qui ne dépassera pas 6% du PIB) sans tailler
dans le social».
S
on adoption dans les délais et en un
temps, jugé record, par la nouvelle
Assemblée des représentants du peuple
(ARP) était considéré difficile, sinon inespéré.
Ce qui fut fait, rubis sur l’ongle, à une large
majorité. Pour M. Hakim Ben Hammouda,
Ministre de l’Economie et des Finances qui a
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Un préalable : l’accélération des
réformes
Si la croissance est restée en 2014 atone et la
reprise de l’investissement n’a pas été au
rendez-vous, il va falloir déployer un effort
supplémentaire au courant de la prochaine
année en termes de relance de l’investissement,
de la maitrise du déficit budgétaire et de
l’inflation, de l’amélioration de la productivité
et, enfin, de la réduction du déficit de la
balance courante.
Cela requiert, à n’en point douter, l’accélération
des réformes de la fiscalité et du système
bancaire, cela va sans dire. A cet effet, la
recapitalisation des banques publiques, en
l’occurrence la Société Tunisienne de Banque,
la Banque de l’Habitat et la Banque Nationale
Agricole constitue un aspect important d’un
programme de restructuration dont la finalité
est de remettre à flot, en l’espace de deux
ans, ces trois banques. L’adoption presque
consensuelle de ce programme par l’ARP dans
le cadre de la Loi de Finances 2015 est un
indicateur qui ne trompe pas et atteste que la
réforme du système bancaire est un dossier
qui mérite qu’on s’y attèle. D’ores et déjà,
l’idée de création d’un fonds de restructuration des banques suit son chemin. Il serait
alimenté par le produit de cession des
participations minoritaires de l’Etat dans huit
banques qui sont de surcroit en difficulté.
Convergence off-shore on-shore
Même si elle est considérée comme la première
grande réforme mise en place ces derniers
temps en Tunisie, la réforme fiscale suscite
toujours quelques interrogations se rapportant
sur les moyens de consacrer une réelle
réconciliation entre l’administration et le
contribuable. Deux cas ont été avancés lors de
ce débat par M. Rached Fourati, Président de
la Commission de la fiscalité à la CTFCI. Ils se
rapportent respectivement aux pénalités
dont les taux restent figés et injustes et à la
9
LA VIE DE LA CTFCI
LA VIE DE LA CTFCI
La Loi de Finances 2015 : les dispositions relatives
à l’investissement et à l’entreprise
La Loi de Finances pour l’année 2015 adoptée, le 10 décembre 2014, à une large majorité par
l’Assemblée des Représentants du Peuple contient 46 articles prévoyant des dispositions
portant sur le renforcement de la compétitivité, la relance de l’investissement, la poursuite de
la réforme fiscale, cela outre de mesures sociales.
Mesures pour la consolidation de la compétitivité
La Loi de Finances prévoit la baisse du taux de déduction sur les recettes d’exportations de 5 à
2,5% et de 1,5 à 0,5% afin d’éviter l’excédent d’impôt. Le projet permet aux entreprises
totalement exportatrices d’écouler 50% de leur production sur le marché local au lieu de 30%
de leur chiffre d’affaires en 2014, en plus de la réduction à 7 jours du délai de recouvrement
de l’excédent d’impôt sur la valeur ajoutée pour ce qui est des grandes entreprises et ce, à partir
de la date de demande de recouvrement.
Dispositions pour la poursuite de la réforme fiscale
La Loi de Finances 2015 d’étendre l’impôt sur les sociétés aux associations qui ne s’adonnent
pas à leur activité conformément à la législation y afférent, tout en supprimant la possibilité de
considérer l’impôt de 0,2% minimum exigé sur le chiffres d’affaires comme avance déduite de
l’impôt annuel.
La nouvelle Loi de Finances se propose de poursuivre le recouvrement de la contribution
exceptionnelle et conjoncturelle pour les personnes physiques non concernées par la loi de
finances complémentaire de 2014, outre la soumission des opérations de passation des biens
immobiliers aux mêmes dispositions fiscales appliquées lors des ventes de biens immobiliers
(frais d’enregistrement, timbre fiscal).
La loi stipule la réduction de 4 mois à 90 jours, la durée de dépôt après laquelle, la direction de
la douane est autorisée, par le président du tribunal de première instance, à gérer les
marchandises saisies et vendre les marchandises encombrantes et celles dont la valeur pourrait
régresser et ce, après l’obtention de l’autorisation du président du tribunal de première
instance.
La loi prévoit aussi l’augmentation de mille dinars à 10 mille dinars du plafond de la valeur des
marchandises considérées comme biens cédés au profit de l’Etat après l’expiration des délais
de dépôt.
Le nouveau texte prolonge les délais fixés par la loi pour que les contribuables répondent aux
services fiscaux concernant les opérations de révision fiscale et lors de la discussion des résultats
avec les services fiscaux. En vertu cette loi, les personnes physiques réalisant des recettes en
matière d’agriculture et de pêche seront exempts de la retenue à la source de 1,5%.
La Loi de Finances prévoit aussi l’exonération de l’or pur importé au profit des artisans bijoutiers
des tarifs douaniers et stipule la poursuite de la mise en application de la mesure relative à
l’intégration des produits des métaux précieux non poinçonnés jusqu’au 31 décembre 2015.
10
Synergies N° 88 - Décembre 2014
L’ARP adopte à une large mojorité la Loi de Finances 2015.
régularisation par les entreprises de la retenue
à la source qui devient un véritable écueil au
regard de la complexité des textes.
A ce propos la réponse du Ministre a été sans
équivoque. En période de transition, affirme-til, le plus important c’est l’investissement. c’est
pourquoi, poursuit-il, l’Administration œuvrera
à favoriser la réconciliation fiscale et à faciliter
aux entreprises toutes les démarches leur
permettant de s’acquitter au mieux de ce
devoir. La nouvelle disposition contenue dans
la Loi de Finances 2015 en matière de
restitution du crédit d’impôt se propose, à
bon escient, de soulager la trésorerie des
entreprises. La philosophie de la réforme
fiscale consiste à réduire la pression sur les
entreprises, non l’augmentation des impôts
mais l’élargissement de l’assiette à d’autres
catégories.
L’autre question de préoccupation se réfère
à la taxation à partir de 2015 des entreprises
off-shore et à la nécessité de garantir des
Synergies N° 88 - Décembre 2014
contrôles qui ne feront pas fuir ces entreprises.
Ces dernières font face à des écueils :
l’obligation de s’adapter à l’exigence
tunisienne en matière de règlementation
fiscale et aux exigences de leurs entreprises
mères.
Pour le Ministre de l’Economie et des Finances,
il va falloir impérativement engager une
réflexion approfondie sur les avantages autres
que fiscaux qui conditionnent la décision
d’un investisseur de choisir le site tunisien.
Aujourd’hui, une orientation générale se
dessine de par le monde plaidant pour la
convergence entre l’on shore et l’off-shore, ce
dernier système a tendance à disparaitre.
Partant, la fiscalité ne sera plus un avantage,
ce qui déterminera la décision d’un
investisseur et son choix pour un site bien
déterminé sera fonction d’autres critères
compétitifs à l’instar de la qualité des
infrastructures et des ressources humaines, la
maitrise des technologies et de la sécurité.
11
LA VIE DE LA CTFCI
LA VIE DE LA CTFCI
MED BUSINESS DAYS 2014 (MARSEILLE 6-7 NOVEMBRE 2014)
L’entreprise, moteur
de la Méditerranée
Participation tunisienne active et de qualité
L’édition 2014 des Med Business Days tenue
à Marseille les 6 et 7 novembre 2014 a
rencontré un vif succès. En témoigne la
présence de 500 entrepreneurs du bassin
méditerranéen venus de près de 20 pays
d’Europe et de Méditerranée.
La présence tunisienne a été remarquable de
point de vue qualité (présence de deux
ministres, d’un secrétaire d’Etat et du
gouverneur de la BCT), de participation et des
contacts établis par les opérateurs présents à
ce rendez vous d’affaires. En effet, La CTFCI
(Chambre Tuniso-Française de Commerce et
d’Industrie) et l’UTICA (Union Tunisienne de
l’Industrie du Commerce et de l’Artisanat)
ont conduit la délégation tunisienne à MED
Business Days.
L’Europe et la Méditerranée : un
destin commun
Une dizaine d’entreprises tunisiennes ont
participé à cette manifestation. Parallèlement
aux rencontres B to B, plusieurs ateliers ont été
organisés traitant notamment du bilan et
perspectives des Révolutions arabes, les TIC
et l’innovation, l’approche des affaires
en méditerranée, les aspects juridique et
financier.
Réunis à Marseille à l’occasion du premier
rendez-vous Med Business Day de la Semaine
Economique de la Méditerranée les représentants du patronat de plusieurs pays
méditerranéens sont convaincus que la relance
de l’économie méditerranéenne se fait au
moyen de la promotion de l’investissement au
Maghreb.
La plénière d’ouverture des Med Business Days a
permis de démontrer que «le business» ne
connait pas la politique, ne connait pas les
religions : il inscrit les relations dans la durée,
pour la renaissance d’une croissance commune.
Même si le discours géopolitique est en panne,
les entreprises continuent d’avancer ensemble.
12
Un débat profond a ponctué toutes les réunions de MED Business Days.
d’Azur conclut : «Certes, le commerce,
l’industrie et l’économie ont besoin de paix,
mais ce sont eux-mêmes des facteurs de paix».
Dominique Brunin, Délégué général de CCI
France International, précisait que «les pays
du sud méditerranéen sont particulièrement
présents dans la stratégie des entreprises
françaises. Avant d’aller cibler les marchés russes
ou chinois, il faut privilégier la proximité».
Quoiqu’il en soit, les relations d’affaires sur nos
rives méditerranéennes continuent de se tisser
et se renforcer, et ce, malgré les instabilités
politiques. A ce propos, Michel Vauzelle,
président de la Région Provence-Alpes-Côte
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Malgré les soubresauts d’une conjoncture
économique difficile et le jaillissement
de problèmes d’ordre sécuritaires, une idée
a dominé les débats : C’est le moment
d’investir et de faire du business ensemble.
L’Europe et la Méditerranée, a-t-on affirmé,
ont un destin commun.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Le Maghreb se présente de plus en plus comme
le futur relais vers l’Afrique subsaharienne. Il
ne faut pas imaginer, rappellent plusieurs
intervenants, que le développement du
business se joue uniquement du Nord au
Sud, il doit se faire dans tous les sens et le
plus vite.
Algérie, Maroc, Tunisie, les pays évoqués dans
cette conférence, proposée par le Medef
international, l’Union patronale des Bouchesdu-Rhône et la CCI International ProvenceAlpes-Côte d’Azur, restent les plus à même de
recevoir ces investissements.
Cela partant du fait que l’investissement
accompagne la marche des pays de la
Méditerranée vers une stabilité politique et
sociale. Les principaux bénéficiaires seront les
grands groupes et les PME qui anticipent et
qui ont déjà des implantations ou des marchés
dans ces pays, mais aussi des entreprises qui
diversifient leurs débouchés.
13
LA VIE DE LA CTFCI
Rencontres B to B
QUALITÉ :
Durant deux jours, 400 entrepreneurs ont
noué et approfondi des contacts qualifiés
dans le cadre des RDV en B to B. Pour
Thierry Modica, Président Directeur-général
de Atem, «Les rendez-vous B to B me
permettent de rencontrer des contacts qui
m’apportent une vision du marché très
précise, d’ouvrir ma réflexion sur le
développement export de mon entreprise et
d’affiner ainsi ma sélection des pays pour le
développement de ma stratégie».
Le Prix 2014 décerné à Plastic
Electromechanic Company
Comment formation,
financement et innovation
impactent le business ?
Ces thématiques ont animé trois des six
ateliers programmés aux Med Business Days.
Le premier, «Ressources Humaines et
Formation» : quels moyens pour intégrer
la jeunesse du Sud dans le développement
économique ?» animé par Paul Chaffard,
élu de la Commission CCI International, a
démontré la priorité de la gestion des
compétences dans les pays du Maghreb, afin
de résoudre le problème du chômage chez les
jeunes diplômés; la question étant de mieux
mettre en adéquation le besoin des
entreprises, notamment des investisseurs
étrangers, et les formations proposées. Wafa
Makhlouf a identifié par exemple un manque
de valorisation de la culture d’entreprise. Au
sein du CJD Tunisie, elle a mis en place un
programme attractif de promotion des métiers
d’avenir auprès des jeunes et des parents.
Le 2 ème atelier, animé par Philippe Gautier,
Directeur général-adjoint du Medef
International, abordait les questions de
«Financements des projets méditerranéens».
Le 3 ème thème abordé portait sur «Les TIC
et l’innovation pour favoriser l’intégration
économique du Bassin méditerranéen».
14
LA VIE DE LA CTFCI
Des rencontres B to B utiles
Les trois autres ateliers qui portaient sur
«transport et logistique : la Méditerranée,
un carrefour d’échanges à optimiser»,
«l’approche des affaires dans les différents
pays de la Méditerranée» et «se développer
en méditerranée : les aspects juridique et
financier» ont permis de partager une
approche opérationnelle pour démarcher et
pérenniser son business à l’étranger.
Samedi 8 novembre 2014 l’Economie
Sociale et Solidaire a été à l’honneur des
10ème Rendez-vous économiques de la
Méditerranée. Organisés par le Cercle des
économistes et le FEMISE (Forum euroméditerranéen des instituts de sciences
économiques), avec comme thème «quelle
contribution l’économie sociale et solidaire
peut-elle apporter au développement en
Méditerranée ?», cette manifestation a vu la
participation de MM Foued Lakhoua, Ahmed
El Karam et Radhi Meddeb, respectivement
Président de la CTFCI, Directeur général à
Amen Bank et PDG de Comete Engineering.
L’économie sociale et solidaire (ESS), a-t-on
affirmé, peut être le nouvel atout de la
Méditerranée. Coopératives, associations,
mutuelles et fondations s’évertuent à prôner
ce modèle économique dont le but est de
créer de l’emploi et du lien social.

Synergies N° 88 - Décembre 2014
L
e premier Prix national de la Qualité
pour 2014 a été remis, le 18 Novembre
2014 à L’UTICA (Union Tunisienne de
l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat)
par M. Kamel Bennaceur, Ministre de
l’Industrie, de L’Energie et des Mines à La
société Plastic Electromechanic Company
(membre de la CTFCI).
La société Plastic Electromechanic Company
est spécialisée dans la sous-traitance de
l’injection de pièces techniques en
thermoplastiques. Le deuxième et troisième
Prix sont revenus respectivement aux societés
CHO Company (conditionnement et le
raffinage de l’huile alimentaire) et Warda
(production de pâtes).
Le Ministre a souligné, à cette occasion, que
la qualité est garante de la pérennité et de
l’expansion de l’entreprise, dans la mesure où
elle lui permet de surmonter les difficultés et
d’améliorer ses chances d’exportation sur les
marchés extérieurs.
M. Bennaceur a lancé un appel aux hommes
d’affaires et chefs d’entreprise tunisiens pour
intégrer la démarche qualité, améliorer leur
productivité, ancrer la culture de l’excellence
et investir davantage dans l’innovation... qui
sont des piliers de compétitivité et de survie
d’une société.
Il est à noter que le nombre d’entreprises
tunisiennes certifiées est passé de cinq en
1995 à 5000 entreprises actuellement
Synergies N° 88 - Décembre 2014
1er Prix attribué à la société Plastic Electromecanic Company (plasturgie).
Le Directeur général de l’unité de gestion du
Programme national de promotion de la
qualité, a fait savoir que ce Prix comporte
une prime financière de 20.000 de dinars
(1er Prix), 15.000 dinars (2ème) et de 10.000
dinars (3ème), mais offre, aussi, une notoriété
aux lauréats aussi bien sur le plan national
qu’international.
Il est à rappeler que Le Programme National de
la Qualité (PNQ) s’inscrit dans le cadre des
efforts visant à doter le tissu industriel tunisien
des méthodes modernes de management de
la qualité et offre la possibilité, aux entreprises
industrielle et de services, d’avoir une
certification selon les normes et référentiels
internationaux.
Le Programme National de la Qualité met à la
disposition des entreprises bénéficiaires,
des experts tunisiens et internationaux
chargés d’assurer l’assistance technique et
l’accompagnement durant la phase de mise en
place du système de management de la
qualité.
15
ÉCONOMIE
ÉCONOMIE
CONJONCTURE ÉCONOMIQUE ( RÉSULTATS DES ONZE PREMIERS MOIS 2014)
Evolutions contrastées
Aggravation du déficit commercial qui a atteint 12 566,3 millions de dinars, soit
une augmentation de plus de 2000 MD par rapport à la même période 2013.
A
u terme des onze premiers mois 2014,
des évolutions divergentes des
principaux indicateurs économiques
et sectoriels ont été enregistrées.
La production du secteur de l’agriculture et de
la pêche a enregistré des résultats globalement
positifs. En même temps, des prémices de
redressement commencent à apparaitre au
niveau de la production des secteurs manufacturier et non manufacturier, après la baisse
enregistrée au mois de juillet 2014.
Les évolutions négatives ont concerné essentiellement le secteur extérieur avec l’aggravation
du déficit commercial (12.566,3 millions de
dinars), au cours des onze premiers mois de
l’année, contre 10.541,7 MD au cours de la
période correspondant en 2013.
Ceci provient de la décélération du rythme des
exportations (1,6% contre 5,2% l’an passé)
contre une accélération de celui des
importations (6,7% contre 3,4%), avec une
détérioration continue, à la fois, de la balance
énergétique et de la balance alimentaire.
Exportations / Importations
dont 9,9% sur le marché français. Dans l’autre
sens, 52,7% de nos importations proviennent
de l’Union Européenne où la France figure
premier fournisseur de la Tunisie en accaparant
15,8% de nos importations.
et électriques (+11,4%), les autres industries
manufacturières (+8,6%) et le textile et
habillement (+3,7%). En revanche, les
exportations agricoles et agroalimentaires ont
chuté de 22,6% en raison notamment de la
baisse drastique des exportations d’huile
d’olive dont la valeur a atteint 315,3 MD
contre 786,5MD une année auparavant.
Le marché européen demeure le premier en
matière d’exportation des produits tunisiens
absorbant à lui seul 74,4% de nos produits,
Evolution des échanges
Le seul bémol, est apparu au courant du mois
de novembre où les échanges commerciaux
avec l’extérieur ont affiché, une certaine
amélioration avec la hausse du rythme des
exportations et la consolidation des importations
des biens d’équipement et des matières
premières et demi-produits. En effet, on a
enregistré une amélioration relative des exportations du groupe des industries mécaniques
16
En dépit de l’aggravation du déficit commercial,
les avoirs nets en devises ont pu être
maintenus à un niveau satisfaisant en
se situant à 12.759 MDT ou l’équivalent de
111 jours d’importation, en date du 26
novembre 2014, contre 107 jours à la même
date de l’année précédente et ce, grâce à un
recours continu à la mobilisation des crédits
extérieurs (environ 5,4 milliards de dinars
depuis le début de l’année).
Concernant l’inflation, on a constaté une
poursuite de la tendance positive qui est
reflétée par la décélération du rythme
d’évolution des prix à la consommation
depuis le mois de juillet, lorsqu’il atteignait
son plus haut niveau de l’année en cours (6%),
pour s’établir à 5,5% en glissement annuel,
en novembre 2014, contre 5,4% un mois
plus tôt.
Pour ce qui est de l’activité du secteur
bancaire, on a relevé une amélioration du
rythme d’évolution des dépôts, au cours des
dix premiers mois de l’année courante (6,1%
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Synergies N° 88 - Décembre 2014
contre 5% pour la même période de 2013),
ayant concerné surtout les dépôts à terme.
Aussi, les concours à l’économie se sont
consolidés au cours de la même période, avec
une hausse de 6,8% contre 5,5% en 2013, en
relation avec l’accroissement de l’encours des
crédits à court et moyen termes, après la
baisse enregistrée au cours des dix premiers
mois de l’année précédente.
S’agissant des évolutions monétaires, une
certaine amélioration de la situation de la
liquidité des banques a été observée, au cours
du mois de novembre, ce qui a engendré une
baisse du volume de refinancement qui s’est
établi à 4.220 MDT le 25 du même mois,
contre 5.095 MDT en octobre dernier. Pour sa
part, le taux d’intérêt moyen sur le marché
monétaire s’est stabilisé, au cours de la même
période, au niveau de 4,93%, soit le même
taux enregistré le mois précédent.
Au niveau du marché des changes, le cours du
dinar a connu une stabilité vis-à-vis des principales
devises, au mois de novembre courant. En effet,
il a atteint, le 26 du mois, 1,8435 dinar et
2,2892 dinars, respectivement, par rapport au
dollar et à l’euro. Depuis le début de l’année, le
taux de change s’est déprécié de 0,6% contre
l’euro et de 9,9% par rapport au dollar.
17
CONJONCTURE NATIONALE
CONJONCTURE NATIONALE
RAPPORT DU FMI SUR LES PERSPECTIVES ÉCONOMIQUES
RÉGIONALES DU MOYEN-ORIENT ET DE L’AFRIQUE DU NORD
La Tunisie atteint
la zone de stabilité
économique
Le FMI rassure que
«l’amélioration
graduelle de la
confiance en Tunisie
devrait soutenir la
demande intérieure à
mesure que l’incertitude
politique se dissipera».
de santé et à l’éducation. Cependant, dans les
pays importateurs de pétrole, le ratio dette/PIB
continue d’augmenter et les besoins bruts de
financement extérieur devraient atteindre 100
milliards de dollars l’année prochaine.
Selon le rapport du FMI, l’économie tunisienne
se démarque de celle des autres pays de la
région. En effet, notre pays ne se positionne
plus dans la zone des grandes turbulences
économiques et a atteint actuellement la zone
de stabilité économique. La Tunisie s’attend à
réaliser un taux de croissance de 2,8% au titre
de 2014, proche de celui réalisé par l’Egypte
2,2% et relativement plus élevé que celui
enregistré par le Maroc : 1,1%. Quant aux
projections pour l’année 2015, le FMI prévoit
pour la Tunisie, un taux de croissance à hauteur
de 3,7% ce qui marque effectivement sa sortie
de la zone de turbulences économiques. Le
déficit de la balance commerciale s’inscrira en
2015 dans une tendance légèrement progressive
passant de -7,7% en 2014 à -6,6% en 2015.
Amélioration graduelle
de la confiance
Le rapport impute la faible croissance observée
en 2014 à la persistance des tensions sociopolitiques. Le FMI explique à ce titre que : «Les
revers des transitions politiques, l’intensification des tensions sociales et sécuritaires et les
retombées des conflits régionaux, de même
qu’une croissance économique plus faible que
prévu chez les principaux partenaires commerciaux sont autant de facteurs qui pourraient
compromettre la reprise».
Toutefois, le FMI rassure en indiquant que
«l’amélioration graduelle de la confiance devrait
soutenir la demande intérieure à mesure que
l’incertitude politique se dissipera». ces éléments
Projections de croissance du PIB réel
(pourcentage de variation par rapport à l’année précédente)
L
a situation économique
de la région MOANAP
(Moyen-Orient, Afrique du
Nord, Afghanistan et Pakistan)
a continué d’évoluer au gré des
diversités régionales. Les pays importateurs de
pétrole, continuent d’avancer dans la mise en
œuvre de leur programme économique, à un
rythme inégal, souvent dans un contexte de
transition politique et dans des conditions
sociales difficiles. Dans la plupart de ces pays,
en l’absence de réformes économiques et
structurelles de grande envergure, l’évolution
attendue de l’économie à moyen terme ne
permettra toujours pas de réduire un chômage
encore élevé ni d’améliorer les niveaux de
vie, révèle le rapport annuel sur les
perspectives économiques régionales de
l’Afrique du Nord du Fonds Monétaire
international présenté lundi 8 décembre
2014 à Tunis pour la première fois.
18
Le rapport note qu’une amélioration graduelle
de la confiance devrait soutenir la demande
intérieure à mesure que l’incertitude politique
se dissipera.
En effet, les pays commencent à maîtriser leurs
lourds déficits budgétaires, ce qui leur permettra
de reconstituer progressivement une marge de
manœuvre et de renforcer leur capacité de
résistance aux chocs. Dans un grand nombre
de pays (dont la Tunisie), la réforme graduelle
des systèmes de subventions a permis de
dégager des économies, dont une partie sert à
financer des programmes ciblant les catégories
vulnérables et à accroître les dépenses
consacrées aux infrastructures, aux services
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Synergies N° 88 - Décembre 2014
19
CONJONCTURE NATIONALE
CONJONCTURE NATIONALE
La croissance à moyen terme est trop faible pour permettre des
progrès notables en termes de chômage et de niveaux de vie
A fin 2014, la Tunisie s’inscrit dans l’espace du
40ème centile inférieur en termes de commerce
et de bureaucratie, et dans le 60ème centile
inférieur en matière d’éducation, de finance, de
cadre juridique, de réglementation ainsi que de
corruption. Le FMI rapporte que pour sortir du
sentier du 40 ème centile inférieur, il faudra
opérer nécessairement de vastes réformes
structurelles. Des investissements supplémentaires en infrastructure de l’ordre de 15 milliards
de dollars par an pourraient permettre à la
Tunisie de gagner 1 point et demi de croissance.
Une reprise modérée et chômage persistant...
ne constitueront pas une condition suffisante
pour faire baisser le taux de chômage au
demeurant élevé. Pour générer une croissance
plus élevée et inclusive, estime Mme Giorgia
Albertin, Représentante Résidente pour la Tunisie
du Fonds Monétaire International, notre pays
est appelé à poursuivre les réformes dans les
finances publiques, particulièrement dans les
secteurs bancaire et de la fiscalité ainsi qu’à
préserver les équilibres macroéconomiques.
En effet, le déficit budgétaire de la Tunisie a
avoisiné les 5% au titre de l’année 2014 et
frôlera, selon les projections du FMI pour
2015, les 6%. En comparaison à l’année 2013,
une légère progression a été enregistrée en
termes de déficit budgétaire, lequel pourrait
être réduit grâce à la mise en place des
réformes de subvention et par la même
conduire à l’épargne d’un point de PIB en
moyenne en 2014-2015.
20
Dans la classe des déséquilibres extérieurs, une
amélioration progressive a été notée au niveau
des exportations, du tourisme et des investissements directs étrangers (IDE). Cette amélioration
est justifiée selon le FMI par la dissipation des
incertitudes politiques de manière graduelle.
Les déséquilibres extérieurs s’améliorent
donc mais demeurent toutefois importants.
L’institution internationale indique, dans son
rapport, qu’une réduction du prix du pétrole,
soit de 10 dollars par rapport au scénario de
base, pourrait réduire le déficit budgétaire et
extérieur.
Afrique du Nord, Moyen-Orient, Afghanistan et Pakistan
Dans le registre du chômage, le FMI indique
dans son rapport, que la croissance à moyen
terme est trop faible pour permettre la
réalisation de progrès de haute facture en
termes de chômage ainsi que de niveau de vie.
Le taux de croissance de référence étant de
l’ordre de 5%, le chômage diminue de 1%
pour s’établir à 11%.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Synergies N° 88 - Décembre 2014
21
CONJONCTURE NATIONALE
ZOOM
IDE : DIX PREMIERS MOIS 2014
Des résultats en demi-teinte
Les chiffres de Synergies
8
Baisse de 14,6% des IDE suite à la chute de 39,7% des investissements dans les
industries manufacturières.
A
u terme des dix premiers mois de
l’année 2014, les investissements
étrangers ont atteint le montant
de 1 481 MTND. Comparés aux trois dernières
ème
9,9%
années, ces investissements ont enregistré des
variations de -12,5% par rapport à 2013,
2,8% par rapport à 2012 et 7,4% par rapport
à 2011.
Flux des investissements étrangers au cours des dix premiers mois des années 2010 à 2014 - Source : FIPA
Octobre
Unité : million de TND
Evolution 2014
2010
220,3
2011
76,1
2012
74,3
2013
123,5
2014
139,8
2013
13,2%
2012
88,2%
2011
93,7%
2010
-36,5%
IDE
1 729,7
1 303,1
1 366,3
1 569,7
1 341,2
-14,6%
-1,8%
2,9%
-22,5%
Energie
1 110,0
850,0
765,0
929,9
800,0
-14,0%
4,6%
-5,6%
-27,3%
Industrie
429,2
292,9
401,1
436,4
263,1
-39,7%
-34,4%
-10,2%
-38,7%
Services*
197,9
157,9
195,6
193,3
271,9
40,7%
39,0%
72,2%
37,4%
2,6
2,3
4,6
10,1
6,2
-38,8%
34,2% 168,5%
137,5%
1 950,0
1 379,2
1 440,6
1 693,2
1 481,0
-12,5%
Portefeuille**
Agriculture
Total
2,8%
7,4%
-24,1%
* Augmentation du capital Ettijari Bank : 25,1 MDT en 2012 / * Acquisition de 50% du capital de la TQB : 99,41 MDT en 2013 / * Acquisition des parts
sociales Polyclinique Taoufik par le groupe Abraaj 49 MTND en juin 2014 / * Augmentation du capital de la QNB en juillet 2014 : 100,7 MTND
** Augmentation de capital de l’Amen Banque en juin 2013 = 73,5 MTND.
Les IDE ont suivi la même courbe descendante,
enregistrant des variations respectives de 14,6%, -1,8% et 2,9% par rapport aux années
2013, 2012 et 2011. La baisse des IDE trouve
son origine dans fort repli des investissements
dans les industries manufacturières qui a atteint
le seuil de -39,7% par rapport à 2013.
Les investissements de portefeuille, ont
enregistré une évolution de 13,2 % par rapport
à 2013, 88,2% par rapport à 2012 et 83,7%
par rapport à 2011, suite à l’entrée en bourse
du groupe Délice.
Les autres secteurs de l’industrie sont en baisse,
à l’instar du secteur des matériaux de
construction (-72%) et de la plasturgie (-91%).
Cinq des secteurs des services n’ont enregistré
aucun investissement en 2014. Les centres
d’appels qui ont marqué leur présence depuis
des années, n’ont pas réalisé d’investissement
en 2014. Seuls les secteurs financiers, suite à
l’augmentation de capital de l’QNB, et
touristiques, suite à l’acquisition de l’hôtel
Tabarka Beach par des qataris, ont évolué en
2014 respectivement de 13,5% et 178%.
La répartition des IDE par secteur montre que
les énergies représentent (59,65%) du total des
IDE suivies des services (20,28%), des industries
manufacturières (19,62%) et enfin de
l’agriculture (0,46%).
22
Alors que les exportations de textile et
d’habillement du Maroc vers l’Union
européenne reprennent des couleurs (+10 %),
celles en provenance de la Turquie sont molles
(+5%) et celles de la Tunisie se trainent (+2%),
soit : 1 572 900 (à fin septembre dernier) de
même que celles de l’Egypte (+2%).
On notera que la Tunisie recule dans le
classement des fournisseurs d’habillement
de l’U.E. En 2013 elle était encore le 5 ème
fournisseur. Elle est maintenant tombée au
huitième rang, doublée cette année par le
Maroc, le Vietnam et le Cambodge. Elle sera
peut être dépassée par le Pakistan en fin
d’année.
7%
Il est fort probable que les tarifs de l’électricité
et du gaz augmenteront de 7% à partir de
janvier 2015.
Ce niveau d’augmentation reste tributaire du
maintien des niveaux actuels des prix internationaux du gaz et du prix du baril de pétrole,
qui sont autour de 70 dollars actuellement.
Les variations annuelles par rapport à 2013 au
cours des dix premiers mois, affichent une
évolution dans les secteurs de l’agro-alimentaire
(107%) et des industries diverses (59,2%).
A noter que, selon la Loi de Finances 2015
adoptée par l’ARP, les subventions destinées
Synergies N° 88 - Décembre 2014
au secteur énergétique pourraient diminuer
de 150 MDT.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Même s’li a connu une certaine stabilité vis-à-vis
des principales devises au cours du mois de
novembre 2014, le cours du dinar change s’est
déprécié de 0,6% contre l’euro et de 9,9% par
rapport au dollar. En effet, le coût du dollar a
atteint, le 26 novembre dernier, 1,8435 dinar et
celui de l’Euro 2,2892 dinars, respectivement,
par rapport au dollar et à l’euro.
29
milliards
de dinars
Le budget de l’Etat pour l’exercice 2015
atteindra 29,163 milliards de dinars, enregistrant
une hausse de 3,7% (environ 1,053 million de
dinars) par rapport au budget 2014. Le budget
2015 prévoit notamment des dispositions
visant à rationaliser la subvention d’une
valeur de 356 MDT dont 206 MDT au titre
de l’ajustement de la facture de l’électricité et
150 MDT au titre de l’ajustement des prix des
hydrocarbures.
Ce budget prévoit la réalisation d’une
croissance du PIB de 3% pour 2015 contre
2,5% prévue pour toute l’année 2014. Ces
estimations sont basées sur un nombre
d’indicateurs, notamment une hausse de la
valeur ajoutée dans les secteurs agricole
(8%), les industries manufacturières
(3,9%), les industries non manufacturières
et les hydrocarbures (2,3%), outre les services
offshore (2,7%).
23
ZOOM
LA VIE DE LA CTFCI
79
ème
Le 20 ème rapport annuel de Transparency
International récemment publié établit un
classement de 175 pays, du plus corrompu
au plus vertueux, sur une échelle de 0 à
100. En tête de ce classement on retrouve le
Danemark avec un score de 92, suivie par la
Nouvelle Zélande (91) et la Finlande (89). En
bas du classement, la Somalie et Corée du
Nord clôturent la marche en 174ème position
avec un score de 8. Sur 175 pays, la Tunisie se
classe 79 ème (avec un score de 40 points),
perdant 2 places par rapport à l’édition 2013.
La Tunisie est le 8ème pays arabe et le premier
en Afrique du Nord devançant le Maroc (80ème),
l’Egypte (94 ème), l’Algérie (100 ème) et la Libye
(166 ème). Concernant le classement au MoyenOrient, elle devance, le Liban 136ème, la Syrie
159 ème, le Yémen 16 ème et l’Irak 170 ème.
COMPÉTITIVITÉ LOGISTIQUE DE LA TUNISIE
Signaux positifs, mais
le plus dur reste à faire
Plus de deux tiers des 175 pays figurant dans
l’Indice de perceptions de la corruption 2014
obtiennent une note inférieure à 50, sur une
échelle allant de 0 (secteur public perçu comme
extrêmement corrompu) à 100 (secteur public
perçu comme extrêmement intègre).
l’indice de perception de la corruption est
élaboré à partir de l’opinion d’experts sur la
corruption dans le secteur public. Les pays
obtenant une note élevée disposent souvent
d’une administration transparente permettant
aux citoyens de demander des comptes à leurs
responsables.
2,3%
Le taux de croissance du troisième trimestre
2014 a atteint 2,3% en glissement annuel,
contre 2,2% au deuxième trimestre et 2,3% au
premier trimestre. La faiblesse du taux de
croissance du troisième trimestre 2014 est due
essentiellement à la décroissance des industries
non manufacturières (-2,7%) résultant du recul
de la production des secteurs de l’extraction du
pétrole et du gaz (-7,6%) et des mines (-4,2%).
La croissance a tout de même été tirée par les
services : les services marchands (+3,3%) qui ont
bénéficié de la bonne croissance du secteur des
télécommunications (+8,1%) et par les services
non marchands (+3,9%). En ce qui concerne les
industries manufacturières, elles ont cru de
1,3%, notamment grâce aux industries agricoles
et agroalimentaires (+3,1%) et aux industries
mécaniques et électriques (+2,4%).
24
Synergies N° 88 - Décembre 2014
M. Chiheb Ben Ahmed, ministre du Transport à l’ouverture des travaux de la Conférence.
I
l n’y a rien de mieux pour rapprocher des
structures d’accompagnement et de soutien
des opérateurs économiques que l’adversité.
L’initiative commune engagée en novembre
dernier (13 novembre 2014) par les quatres
Chambres Mixtes TunisoFrançaise, Tuniso-Allemande,
Tuniso-Italienne et TunisoBritannique s’inscrit en
droite ligne dans cette
optique. L’organisation
d’une conférence débat
sur la compétitivité logistique de la Tunisie est venu
à point nommé répondre
à des inquiétudes des
opérateurs et, non moins
“
adhérents à ces chambres, qui restent
circonspects quant à l’avenir d’un secteur qui,
au demeurent, devrait être la locomotive pour
tirer vers le haut la compétitivité de l’économie.
Les sources d’inquiétude et de dysfonctionnement sont multiples. Les
acteurs dans le domaine de
la logistique présents lors de
cette conférence les ont
résumés en quelques points
qui en disent long, sur le
travail qui reste à accomplir
pour restructurer ce secteur
et avoir une vision consensuelle pouvant le placer au
cœur du futur modèle de
développement de la Tunisie.
Restructurer
le secteur et avoir
une vision consensuelle
sont les préalables
pour placer la logistique
au cœur du futur modèle
de développement.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
”
25
LA VIE DE LA CTFCI
LA VIE DE LA CTFCI
cohérente pour la restructuration de ce secteur
sur des bases à la fois saines et solides.
M. Ben Ahmed reconnait que le chantier de
développement de la compétitivité logistique
en Tunisie passe pour l’essentiel dans le Port
de Radès.
A cet effet, le plan d’action de court terme
engagé dans ce port comprend plusieurs
actions prévoyant l’amélioration du taux de
disponibilité des équipements de manutention
portuaire, afin de réduire le coût d’exploitation,
l’augmentation du taux de disponibilité des
engins de 30 à 70%, la maintenance préventive
et la conclusion de contrats de services avec
les constructeurs, avec une mobilisation du
personnel de la STAM (société tunisienne
d’acconage et de manutention) par la mise en
œuvre du régime de travail 24h/24 et 7j/7 et la
mise en place d’un plan de circulation visant à
fluidifier le transit de marchandises dans
l’enceinte portuaire.
Pérenniser les acquis
En termes plus concrets, à la faveur de ces
efforts engagés dans l’urgence, les cadences
de traitement des conteneurs à quai ont été
multipliées par cinq depuis le début de
l’année, divisant par dix le nombre de bateaux
en rade.
L’Agence tunisienne de maitrise de la chaîne logistique
La création envisagée de l’ATMCL répond à plusieurs conditions objectives. Cette structure
sera appelée à jouer le rôle de locomotive pour l’instauration d’un système logistique
permettant à la Tunisie de s’intégrer dans la chaine de valeurs mondiales.
Le Président de la Commission de la logistique à la CTFCI présente les attentes des opérateurs.
On décèle, en effet, pour le cas du port de
Radès, un rythme de déchargement et de
chargement des navires parmi le plus lent des
ports méditerranéens, une attente en rade des
navires très longue, une désorganisation
manifeste et, surtout, une grande difficulté à
identifier l’emplacement des conteneurs, une
sécurité qui laisse à désirer, une multiplication
des avaries des remorques et conteneurs, une
vétusté et indisponibilité fréquente de matériel
de manutention, une inadéquation des coûts
imposés aux intervenants avec le service
rendu, un recours facile à la saisie des
navires… et la liste est encore longue.
Pourtant, le port de Radès est l’un des plus
importants maillons de la chaine logistique en
Tunisie. A travers ce port transite plus de 90%
des marchandises unitarisées à l’import et à
l’export.
Des raisons de satisfaction
Cette situation est une résultante directe de
la mauvaise planification, d’une mauvaise
26
gouvernance des politiques publiques et du
grand retard qu’a accusée la mise en œuvre de
projets stratégiques. Dans l’actuelle phase de
fin de la période de transition, il est encore
prématuré d’espérer l’engagement de
réformes structurelles susceptibles de faire de
la logistique un catalyseur de la croissance et
un facteur compétitif pour les entreprises.
Face à la paralysie de l’activité dans le port de
Radès qui prévalait au cours du premier
semestre de l’année 2014, on a procédé, dans
l’urgence, à des actions concertées et bien
étudiées, qui ont fini par décongestionner ce
port et améliorer ses performances.
Sur ce plan, M. Chiheb Ben Ahmed, ministre
du Transport, ne dissimule pas ses raisons de
satisfaction, estimant que l’effort collégial
paye lorsqu’il s’inscrit dans une démarche
structurée et bien gouvernée.
Les avancées accomplies ces derniers temps,
pour venir à bout des dysfonctionnements et
des sources de faiblesse, constituent un
préalable pour l’engagement d’une stratégie
Synergies N° 88 - Décembre 2014
La création de cette agence permettra la pérennisation des résultats et l’extension de la
capacité du système logistique global, par la prise en charge de la responsabilité
d’implémentation de la stratégie de développement de la Logistique.
La création d’une telle Agence va permettre de :
• doter la Tunisie d’une structure de coordination des projets d’amélioration de la
compétitivité logistique ;
• de favoriser l’émergence de la logistique comme vecteur de compétitivité en collaboration
avec les différentes parties concernées.
Cette structure jouera le rôle de front office aux services des acteurs économiques notamment
les sociétés exportatrices et les investisseurs étrangers.
Le rôle :
• L’instauration d’un système logistique performant et interconnecté ;
• La mise en œuvre et le suivi des différents axes de la stratégie de développement par la
chaîne logistique.
La mission :
• Définir et mettre en place une plateforme de gestion de la chaine logistique globale selon
les standards et les références internationales ;
• Développer l’ingénierie des projets PPP dans le domaine de la Logistique ;
• Recenser les capacités matérielles et immatérielles du système logistique national et veiller
à l’optimisation de son exploitation et son développement ;
• Etre au diapason des nouvelles évolutions technologiques (e-logistique) et instaurer la
veille technologique.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
27
LA VIE DE LA CTFCI
ENQUETE DE LA CTFCI
Le Conseil National des Chargeurs (CNC).
La réactivation du CNC se présente aujourd’hui comme une entreprise à la fois urgente et
nécessaire. Ce conseil se présentera comme un partenaire de l’administration et constituera
une force de propositions notamment en matière de simplification des procédures et
d’amélioration de l’efficacité de la chaîne logistique.
Missions :
• Mieux représenter les intérêts des chargeurs et répondre efficacement aux attentes du
secteur productif, notamment dans les instances de décision et comités de pilotage de
projets logistique comme la Liasse Transport, appelée à s’étendre sur de nouveaux
maillons de la chaine logistique ;
• jouer pleinement son rôle d’assistance et de conseil auprès des chargeurs et de concourir
à la stabilisation des coûts de transport et de la logistique ;
• veiller au respect des normes et conventions établies avec l’ensemble des parties
prenantes ;
• capitalisation des connaissances et des bonnes pratiques dans le secteur Transport &
Logistique ;
• servir d interface entre les pouvoirs publics et les milieux professionnels de la chaîne logistique.
Ce plan d’action prévoit également l’accélération du projet de dématérialisation des
procédures de logistique du commerce
extérieur en imposant la liasse transport dans
les formalités portuaires à Radès, la révision
du statut du personnel de la STAM afin
d’instaurer d’une manière permanente le
travail continu et la mise en œuvre d’un plan
de formation visant la mise à niveau des
compétences.
La dernière phase relative à l’extension de la
capacité du port de Radès, encours de
planification, suppose, la mise en place d’un
programme de restructuration et développement de
la STAM, le développement
de zones d’activités logistiques et l’extension des
fonctionnalités de la Liasse
transport et sa généralisation à tous les ports de
Tunisie.
“
La pérennisation de ces
résultats et l’extension de
la capacité du système
28
logistique global, nécessite la création d’une
agence tunisienne de maitrise de la chaine
logistique, qui prendra en charge la
responsabilité d’implémentation de la stratégie
de développement de la Logistique.
La conférence organisée par les quatre
chambres mixtes a eu le mérite de favoriser un
échange direct entre opérateurs économiques
et premiers responsables de la chaine
logistique sur les enjeux et les défis qui se
profilent. Avoir une vision commune sur
l’avenir pour renforcer la compétitivité
logistique passe nécessairement par une
bonne communication, un
renforcement du rôle de
l’Etat régulateur et l’institution de mécanismes d’incitation à la performance.
Cela requiert, comme l’a si
bien affirmé un intervenant
à la conférence, d’inverser
l’ordre qui prévaut actuellement faisant de la supply
chaine de l’informel plus
performante que la supply
chaine du secteur formel.
Avoir une vision
commune sur l'avenir
requiert une bonne
communication et le
renforcement du rôle
de l’État régulateur.
”
Synergies N° 88 - Décembre 2014
BAROMÈTRE DE LA CONJONCTURE ÉCONOMIQUE DE LA CTFCI : 2014-2015
Les promesses d’une
démocratie naissante
L
e baromètre de la conjoncture économique 2014-2015 réalisé en décembre
2014 par la Chambre Tuniso-Française
de Commerce et d’Industrie (CTFCI) a permis
d’avoir une perception du climat d’affaires en
Tunisie et une appréciation, un peu plus claire,
sur le sentiment des entreprises notamment en
matière d’investissement et une énumération
des obstacles qui bloquent encore l’initiative.
En dépit de ce vent d’optimisme qui souffle
et qui se perçoit à travers la disposition des
opérateurs à investir davantage en 2015, que
d’obstacles restent à lever et d’actions à
entreprendre pour que cet optimisme cède la
place à la confiance et cette confiance se
traduit en actions concrètes qui viendraient
impulser la croissance et soutenir le
développement du pays.
D’emblée, les évolutions enregistrées au plan
politique dans le pays, à commencer par la
formation d’un gouvernement de technocrates
(janvier 2014), l’adoption
de la nouvelle Constitution
et, pour en finir, par l’organisation d’élections démocratiques et transparentes,
ont fait renaitre l’optimisme
et renforcer le sentiment
de confiance chez les
opérateurs économiques.
Incontestablement, ce que les opérateurs
attendent le plus c’est de voir apparaitre une
administration performante, qui accompagne
et soutient les entrepreneurs,
non de la voir se transformer en obstacle à l’initiative.
Aller de l’avant sur la voie
de la simplification et la
transparence des procédures
devient non seulement une
priorité, mais une urgence.
Cela concerne, au premier
chef, les services douaniers,
la logistique du transport et
le secteur bancaire qui, en
raison des graves difficultés
qu’il est en train de traverser, risque de devenir
une citadelle infranchissable pour l’investisseur.
“
L’avènement
de la démocratie
un catalyseur
pour renforcer
la confiance
et impulser
l’initiative.
Malgré la persistance des
difficultés économiques,
du risque terroriste et
des tensions sociales, et la
dégradation du climat des affaires, les chefs
d’entreprises voient venir, enfin, le bout du
tunnel. Même s’ils admettent que la fin de la
période transitoire ne sera pas de tout repos,
Ils sont persuadés que l’avènement de la
démocratie représente un facteur important
pour renforcer la stabilité et la sécurité et, en
même temps, impulser la croissance et
l’investissement dans le pays.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
”
Les grèves à répétition, la fréquence des sit-in
dans les entreprises, l’exacerbation des
demandes sociales demeurent un sujet qui
préoccupe les entreprises qui n’arrivent plus
à concilier entre leur souci de renforcer leur
compétitivité et l’impératif de créer les
conditions d’un climat social sain.
29
ENQUETE DE LA CTFCI
Le panel des entreprises
114 entreprises ont répondu au sondage
élaboré par la CTFCI, sur une population totale
estimée à 1800 (contre 116 en février 2014).
Cet échantillon aléatoire peut être considéré
comme représentatif des entreprises adhérentes
à la CTFCI.
Répartition géographique du panel :
ENQUETE DE LA CTFCI
Appréciation de
l’environnement des affaires
(73 entreprises) prévoient une consolidation
de leur chiffre d’affaires en 2015. En même
temps, on décèle un recul du nombre
d’entreprises dont le chiffre d’affaires tend
vers la baisse (22% en 2014 et 5% en 2015).
Enfin, on relève une certaine stabilisation au
niveau des entreprises dont le chiffre d’affaires
connait une stagnation (36% en 2013 et
39% en 2014).
Depuis 2011, l’environnement de l’entreprise a
observé une détérioration continue, cela se
perçoit à travers la qualité des infrastructures et
de la qualité des services assurés. Cela apparait,
surtout, à travers l’insatisfaction presque
générale des chefs d’entreprise, en effet :
- 95% des entreprises sont soit mécontentes
ou très peu satisfaites de la qualité des
services assurés par le réseau portuaire
tunisien ;
- 86% considèrent le réseau aérien peu
adapté à leurs besoins ;
- 91% voient constatent la poursuite de la
dégradation du réseau routier.
- 88 sur le Grand Tunis,
- 7 de la région du Nord Est,
- 14 de la région du Sahel,
- 5 de la région du Sud
Résultat net de l’exercice
Presque la moitié (47%) des entreprises
touchées par cette enquête présentent un
exercice équilibré en 2014, contre 38% en
2013 et 33% en 2015.
La part des entreprises qui réalisent des
bénéfices a tendance à se renforcer : 38% en
2014 et 60% en 2015 (projection) confirmant
une tendance à l’optimisme et au regain de
confiance.
Les secteurs d’activité
Sur les 114 entreprises qui ont répondu :
- 59 opèrent dans l’industrie,
- 54 opèrent dans les services,
- 1 opère dans l’agriculture,
Tendances des investissements
Tendances du chiffre d’affaires
Sur les 114 entreprises sondées 44% (46
entreprises) s’attendent à une amélioration
de leur chiffre d’affaires en 2014 et 65%
30
En revanche, la distribution électrique (92%), le
réseau téléphonique (89%) et le réseau internet
(80%) sont considérés comme satisfaisants.
Malgré le doute, le manque de visibilité et
la persistance du risque sécuritaire, il existe
chez les entreprises sondées une propension
à engager de nouveaux investissements
que ce soit en 2014 ou 2015. En effet, 41%
des entreprises sondée ont annoncé de
nouveaux investissements en 2014 et 60%
envisagent d’investir plus en 2015. Le taux
d’interruption des investissements qui
atteindrait le seuil de 39% en 2014 devrait
être ramené à 23% en 2015, en revanche
20% ont annoncé une baisse de leurs
investissements en 2014, chiffre qui se réduira
à 19% en 2015.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Le taux des entreprises déficitaires ne cesse de
se rétrécir, passant successivement de 25% en
2013, à 15% en 2014 et à 7% en 2015.
Appréciation des performances
de l’Administration
L’action administrative soulève de nombreuses
critiques de la part des opérateurs économiques qui sont unanimes sur la toute urgence
d’imprimer à son action efficacité et
transparence.
- 97% des entreprises sondées jugent
l’administration peu efficace, et un même
pourcentage considère les procédures
douanières fastidieuses et peu productives.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
31
ENQUETE DE LA CTFCI
ENQUETE DE LA CTFCI
- 94% estiment l’environnement fiscal
défaillant ou incompatible avec les réalités
de l’entreprise ;
- 98% jugent les procédures administratives
(fiscales essentiellement) bloquantes ;
- 95% estiment que le système actuel
d’incitation à l’investissement est inadapté
et pousse à l’attentisme.
comble le système d’incitation à l’investissement, d’assainir le climat social au moyen
de l’amélioration de la productivité et de la
réduction des revendications et des mouvements de grèves, et de consolider la sécurité
dans le pays.
Pour ce qui concerne le financement de
l’entreprise, 89% des réponses concluent que
la qualité des services bancaires est juste
moyenne sinon mauvaise.
- 91% des entreprises sondées considèrent
l’accès au crédit difficile et son coût élevé ;
- 89% n’arrivent pas à expliquer l’aversion
des banques à financer leurs opérations
d’importation.
Coûts des facteurs de production
Les facteurs qui concourent directement au
renforcement de la compétitivité de l’entreprise
sont considérés en panne.
- 90% des entreprises considèrent moyen
ou excessif le coût de l’énergie ;
- 88% estiment le prix de l’électricité
moyen ou élevé ;
- Les coûts du transport routier, maritime et
aérien sont jugés par la majorité (environ
80%) élevés ;
- 80% jugent les coûts des télécommunications moyens ou satisfaisants ;
- 70% estiment que le coût de la main
d’œuvre est moyen ou satisfaisant.
32
Les préoccupations majeures des
chefs d’entreprise
Les commentaires des chefs d’entreprise sont,
à cet égard, sans équivoque. «La fin de la
période transitoire en Tunisie, estime un
opérateur, sera un peu dur mais avec un
nouveau gouvernement stable et décisif sur
certains dossiers, il est possible d’améliorer le
climat d’affaires». Il est fort à espérer qu’après
ces échéances électorales, la Tunisie gagne
en stabilité et observe une reprise de
l’investissement surtout dans les régions
intérieures.
L’action administrative soulève toujours critiques et commentaires. La relation entrepriseadministration demeure l’objet de critiques
acerbes et d’insatisfactions profondes. Face à la
lenteur des procédures, des longs délais, les
opérateurs se sentent résignés, voire désarmés
en l’absence de voies de recours. Cette situation
concerne les services de douane, le secteur
bancaire (lenteur de rapatriement des
dividendes) et les structures chargées de la
promotion de l’investissement (absence d’un
nouveau code adapté aux nouvelles réalités du
secteur productif).
Un sentiment mitigé se dégage chez les chefs
d’entreprise qui ont répondu au questionnaire.
L’optimisme mesuré des opérateurs qui se
fonde sur les évolutions positives récentes
observées au plan politique est douché par
des appréhensions qui trouvent leur source
dans l’incertitude, l’insécurité et, surtout,
la détérioration de l’environnement de
l’entreprise.
Il est un fait certain, relèvent de nombreux
opérateurs, l’avènement de la démocratie en
Tunisie est un facteur important qui participe à
renforcer le sentiment de confiance et à
donner de la visibilité aux investisseurs. Même
s’ils admettent la difficulté et la complexité de
la prochaine étape, ils considèrent la fin de la
période de transition et la mise en place d’un
nouveau gouvernement issu des élections
comme l’une des conditions à même de
renforcer la stabilité dans le pays, d’améliorer
le climat d’affaires, d’impulser l’investissement
et de favoriser la reprise de la croissance et de
la production.
Pour atteindre cet objectif, il faut satisfaire un
certain nombre d’exigences, au premier rang
desquelles figurent la nécessité de renforcer la
performance et la transparence des services
de l’administration, d’améliorer l’accompagnement des entreprises, de revoir de fond en
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Synergies N° 88 - Décembre 2014
33
DOSSIER
COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
LA PANACÉE POUR UN
PARTENARIAT COLLABORATIF
Synergies N° 88 - Décembre 2014
35
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
La panacée pour un
partenariat collaboratif
M
ême si ce processus vertueux de
partage de fonctions et de création
de valeur a prouvé son efficience
sous d’autres cieux, il continue à marquer le
pas en France, en raison d’un déficit notoire en
termes de communication et de fortes
hésitations qui se nourrissent de la persistance
d’a priori et de fausses idées sur le risque de
prédation des entreprises.
Pourtant, la vigueur dont se prévalent aujourd’hui
les entreprises industrielles allemandes se
ressource du transfert de
20% à 30% de leurs fonctions de production aux
pays de l’Europe centrale.
L’Allemagne a intégré dans
son développement toute
cette région (120 millions
d’habitants) parvenant à
renforcer la compétitivité de
son économie et à tirer vers
le haut son développement.
“
entrepreneurs français dans tous les domaines
d’activités ne sont pas encore suffisamment
exploitées au moment où elles font face à de
grands soucis pour gagner en compétitivité et
conquérir de nouveaux marchés.
La Tunisie, de l’avis de nombreux experts,
possède tous les atouts pour devenir un hub
intéressant pour les entreprises françaises pour
conquérir de nouveaux marchés que ce soit en
Afrique ou dans les pays du Golfe.
Outre le fait de proximité, élément déterminant
dans la gestion et le
contrôle des chaines de
production, la Tunisie
dispose d’un gisement
important en termes
de ressources humaines
qualifiées, un avantage
compétitif au niveau des
coûts de production et un
environnement favorable
qui permet de tirer vers le
haut l’économie du pays et
d’enclencher un processus
gagnant-gagnant.
Pour que la Tunisie
se hisse en un hub
pour les entreprises
françaises, il va falloir
la considérer comme
partenaire et non
un exécutant et
mettre en valeur
les complémentarités
qu’elle offre.
Idem pour les Etats Unis
dont le processus de relocalisation de leurs entreprises
de la Chine a profité au
Mexique, devenu la zone
tampon pour les activités
industrielles des grands
groupes américains. Les chiffres parlent d’eux
même : en huit ans environ 5000 entreprises
se sont installées au Mexique favorisant la
création de deux millions d’emplois.
Même si sur le plan politique la question de la
colocalisation est devenue à l’ordre du jour en
France et que des accords ont été conclus avec
les pays du Maghreb, sur le plan physique les
réalisations restent timides et le processus a
encore du plomb dans l’aile. Les opportunités
qu’offrent les pays du Maghreb pour les
36
Tout le monde s’accorde à
dire que le moment est
venu de passer de relations
commerciales
asymétriques à des relations de collaboration
en allant plus loin dans la co-production et le
travail ensemble et la segmentation du
processus productif.
”
En dépit des difficultés actuelles, la colocalisation doit être perçue comme une opportunité
porteuse de promesses pour le court, moyen
et long termes et sa construction devrait
traduire une ardente obligation des opérateurs
des deux rives de la Méditerranée. Ces derniers
sont dans l’obligation de s’engager dans un
Synergies N° 88 - Décembre 2014
M. Bocquet Contrôleur général au ministère des Finances en France présente son point de vue.
processus de coproduction susceptible de
booster les entreprises du Nord et de tirer vers
le haut les économies de la rive Sud.
Créer un nouveau modèle de partenariat
productif exige de prendre en considération
de nombreux préalables, l’existence d’une
volonté politique et aussi une stratégie claire
pour venir à bout du déficit de communication
qui perdure. Il requiert de considérer la Tunisie
comme un relai de croissance pour les
entreprises françaises, de mettre en valeur les
complémentarités et de considérer une fois
pour toutes la Tunisie en tant que partenaire et
non un exécutant.
Pourquoi le temps de la
colocalisation est venu?
Plusieurs conditions sont réunies pour une véritable stratégie de colocalisation des
entreprises sur les deux rives de la Méditerranée, ce qui favorisera l’intégration
économique par la production et le partage de la chaîne de valeur.
Après la sous-traitance puis la co-traitance, voici
venu le temps de la colocalisation avaient prédit
de nombreux experts en développement.
Pour ces derniers, le passage au modèle de
Synergies N° 88 - Décembre 2014
colocalisation permet de remodeler les notions
de chaîne de valeur, de partenariat gagnantgagnant, d’innovation pour un redéploiement
sur les marchés dans une vision d’avenir.
37
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
Inversement, la rive sud offre à l’Europe
d’énormes marchés potentiels (dynamisme
démographique, urbanisation croissante, essor
d’une classe moyenne urbaine, dynamisme
économique) et des capacités de financement,
qui peuvent représenter un relais de croissance
pour l’Europe.
Raisons technologiques. La véritable révolution
technologique, qui pourrait engendrer un
nouveau cycle Kondratieff long (les énergies
renouvelables et l’informatisation), favorise la
synchronisation productive entre territoires
voisins confrontés aux mêmes enjeux.
Un modèle coopératif Nord Sud
Mme Bourguiba présente l'expérience réussie du groupe Business Decision.
Les liens artificiels entre l’Europe et les pays du
Maghreb sont restés longtemps centrés sur le
bilatéralisme, contrairement à ce qui s’est fait
en europe de l’Est. En clair, le Nord se contente
de délocaliser les activités d’assemblage à faible
valeur ajoutée au lieu de permettre au pays du
Sud de pouvoir monter en gamme. Pourtant, la
construction d’une stratégie de colocalisation
serait bénéfique pour tout le monde.
Plusieurs conditions sont aujourd’hui réunies
pour une véritable stratégie de co-traitance et
de colocalisation des entreprises sur les deux
rives de la Méditerranée. Cette stratégie
permettra aux dirigeants d’entreprises de
valoriser au mieux les avantages comparatifs
des deux rives, dans un souci de coresponsabilité économique et sociale.
À une situation de crise profonde, il faut
répondre par des solutions nouvelles. La
France a besoin aujourd’hui, plus que jamais,
de nouveaux relais de croissance pour faire
face à ses limites, tant conjoncturelles
(consommation atone, investissement ralenti,
exportations en berne) que structurelles
(population vieillissante, croissance faible).
38
D’autre part, les pays du Sud et de l’Est de
la Méditerranée (PSEM) ne disposent pas
individuellement de tous les moyens nécessaires
pour poursuivre leur décollage économique. Un
nouveau modèle de partenariat productif peut
être mis en place entre les deux rives de la
Méditerranée fondé sur la co-traitance et la
colocalisation, qui favorisent l’intégration
économique par la production et le partage de
la chaîne de valeur.
La plupart des raisons sont liées aux avantages
de la proximité géographique et culturelle.
Raisons politiques. Les pays du Sud doivent
être considérés comme des partenaires et non
plus comme des exécutants.
Raisons économiques. A ce jour, la
Méditerranée reste la grande région du
monde la moins intégrée et la moins régulée,
par conséquent la plus soumise aux grandes
puissances trop souvent prédatrices. La
spécialisation industrielle de la France et
de l’Europe (eau, énergie, agriculture, biens
d’équipement, BTP, TIC, etc.) correspond aux
besoins des économies de la rive sud.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
On peut considérer que la colocalisation est
une implantation stratégique, faite dans une
logique de système productif, valorisant la
proximité géographique et culturelle, managée
de manière équilibrée entre Nord et Sud.
La colocalisation s’inspire du modèle allemand
avec les pays d’Europe centrale et orientale
(PECO), consiste à externaliser des fragments de
la chaîne de valeur dans les pays voisins dont les
coûts sont moindres et les complémentarités
évidentes. Dans ce modèle coopératif, les
entreprises de taille intermédiaire (ETI)
concluent des accords avec des distributeurs
allemands de taille plus ou moins équivalente
qui s’engagent à se fournir majoritairement
auprès de fabricants allemands dans les filières
de biens de consommation. Forts de cette
stabilité dans leurs débouchés, les fabricants
(ETI) externalisent dans les PECO la production
de biens intermédiaires et de biens d’équipements. Cette stratégie de coproduction des
biens intermédiaires leur permet d’importer
des biens intermédiaires de qualité grâce
à l’utilisation d’ingénieurs et de techniciens
des PECO, ce qui octroie en outre à l’industrie
allemande un avantage de coût de près
de 20%.
Ce deal gagnant-gagnant a été rendu possible
entre l’Allemagne et les PECO parce que des
conditions historiques étaient remplies :
• investissements importants de l’UE dans les
infrastructures des PECO afin de préparer la
chaîne logistique, ce qui a facilité l’acheminement en Allemagne des biens produits
dans les PECO ;
• prise en charge par les entreprises allemandes
de la restructuration du tissu industriel des
PECO afin de l’adapter aux modes de
production en vigueur en Allemagne ;
• convergence normative des PECO avec
l’Europe par le transfert de l’acquis communautaire dans la perspective de l’intégration
européenne.
LE MODÈLE COOPÉRATIF
Le modèle coopératif, ou modèle gagnant-gagnant, s’inspire du modèle allemand au sien
duquel les entreprise de taille intermédiaire (ETI) concluent des accords avec des
distributeurs allemands de taille plus ou moins équivalente qui s’engagent à se fournir
majoritairement auprès de fabricants allemands dans les filières de biens de consommation.
Forts de cette stabilité dans leurs débouchés, les fabricants (ETI) externalisent dans les Peco
la production de biens intermédiaires et de biens d’équipements. Cette stratégie de
coproduction des biens intermédiaires leur permet d’importer des biens intermédiaires de
qualité grâce à l’utilisation d’ingénieurs et de techniciens des Peco ce qui octroie, en outre,
à l’industrie allemande un avantage de coût de près de 20%. Dans ce modèle, les ETI
allemandes gardent la conception et l’assemblage et font la coproduction des fragments de
la production dans les pays à bas coûts. L’assemblage en Allemagne induit de l’innovation
par l’usage. Ce modèle a été bénéfique pour les Peco, car il permet l’apprentissage et
progressivement, la montée en gamme et l’emploi des diplômés.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
39
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
Rompre avec la relation
asymétrique
En dépit de la crédibilité qu’ils ont acquise
depuis 2005 et qui s’est traduite par une
rapide augmentation de l’accueil d’investissements directs étrangers (IDE), les Psem restent
des acteurs secondaires dans ce domaine. La
dernière décennie a vu les pays émergents
jouer un rôle tout à fait nouveau en matière
d’IDE, puisqu’ils attirent presque la moitié des
IDE mondiaux. Si l’on considérait l’Europe
comme une zone unique (c’est à-dire si l’on ne
tenait pas compte des multiples IDE intraeuropéens), cette proportion serait largement
majoritaire. En outre, les pays émergents sont
devenus des émetteurs notables d’IDE, puisque
le quart des investissements transnationaux
viennent désormais de chez eux.
Or les Psem suivent ce mouvement de très
loin. Rapportés à leur PIB, les IDE entrants y
restent notablement plus faibles que dans les
autres pays émergents ou en développement.
Il y a donc un fort potentiel à exploiter en
matière de partenariats productifs transnationaux en méditerranée.
Pour cela, il faut rompre avec la relation
asymétrique Nord-Sud qui considère les Psem
comme des satellites des entreprises du Nord
et les cantonne à un marché de consomma-
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
tion ayant des avantages de différentiels de
coûts de main-d’œuvre sans formation et avec
peu de perspective d’apprentissage.
Or, la colocalisation suppose des échanges
denses entre les pays concernés : partage des
objectifs, partage de la chaîne de valeur et
intégration de la production, mise sur pied de
systèmes d’information communs, formation,
transferts de savoir-faire, développement
stratégique concerté… La proximité géographique et culturelle due à l’appartenance à
une même région favorise cette interaction.
Ce modèle ferait des Psem des fournisseurs de
fragments intermédiaires de la chaîne de
valeur et non des exécutants des phases
d’assemblage à faible valeur ajoutée et faible
qualification, en élargissant de manière
progressive des segments de la chaîne de
valeur implantés dans une logique de filières et
en intégrant les compétences locales.
INTERVIEW : M. JEAN LOUIS GUIGOU,
DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL DE L’IPEMED À «SYNERGIES» :
La colocalisation n’est
plus un concept mais
un projet pertinent
A une situation de crise profonde, au Nord comme au Sud, il faut répondre par
des solutions nouvelles. Les pouvoirs politiques ont compris l’intérêt qu’un tel
modèle représente.
Les Psem seraient un marché d’investissement
permettant aux entreprises du Nord d’y
produire et d’y localiser les processus de
production à destination du marché régional
du Sud et de l’Est de la Méditerranée et de
l’Afrique subsaharienne.
Cela contribuerait à l’intégration Sud-Sud
pour décloisonner les marchés des Psem, afin
de créer un marché plus attractif pour les IDE.
LE NOUVEAU MODÈLE :
Colocalisation pour une croissance partagée – co-responsabilité
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
40
Croissance inclusive
Démocratie et transparence
Entités publiques et privées opérant sur la base d’une charte de droit
Favoriser le financement à long-terme au lieu de la subvention et des aides
Financer les projets de développement, d’infrastructures et de formation à long-terme
Les Etats du Nord doivent rompre avec l’approche centre-périphérie
Privilégier la coopération avec le voisinage
Accords de joint-venture, Public-Privé avec le Sud
Partenariats Public-Privé
Favoriser le rôle des acteurs décentralisés publics ou privés
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Certains avancent que le temps de la
colocalisation en méditerranée est venu,
ne pensez-vous pas que le déficit de
communication qui existe notamment en
France où la hantise des délocalisations
est encore exploitée pour annihiler tout
processus de coproduction ?
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Effectivement, les conditions sont réunies
aujourd’hui pour une véritable stratégie de
co-traitance et de colocalisation des entreprises
sur les deux rives de la Méditerranée. Cette
stratégie permet aux dirigeants d’entreprises de
valoriser au mieux les avantages comparatifs des
deux rives, dans un souci de co-responsabilité
41
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
(économique et sociale). A une situation de
crise profonde, au nord comme au sud, il faut
en effet répondre par des solutions nouvelles.
Les entreprises l’ont bien compris. Elles
sont les précurseurs et les bénéficiaires de ce
mouvement. Les pouvoirs politiques,
notamment français, ont compris eux aussi
l’intérêt qu’un tel modèle représente.
La France a déjà signé des accords de
colocalisation industrielle avec l’Algérie, le
Maroc et la Tunisie. La France a également
nommé un haut responsable
à la coopération industrielle
et technologique francoalgérienne dont la mission
est d’identifier avec les
autorités algériennes, les
possibilités de coopération
technique, les partenariats
en matière de recherche
et développement et de
filières industrielles, les
coproductions envisageables
entre entreprises, les circuits
de commercialisation communs ainsi que les outils de
financement des entreprises
susceptibles d’être mobilisés.
Au Maroc, la colocalisation,
portée par des entreprises
françaises a trouvé son
expression la plus complète dans certains
secteurs, tels que l’aéronautique, l’automobile, la relation-client. La colocalisation
n’est donc plus un concept mais un projet
pertinent. Cela étant, nous devons, vous avez
raison, renforcer notre travail pédagogique et
valoriser les expériences réussies, car elles sont
porteuses d’espoir et de création d’emploi au
nord comme au sud.
“
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
favorables, et sur un engagement clair
et responsable des parties concernées. Quand
le Japon, dans les années 60 a lancé cette
opération de coproduction avec la Corée
du Sud, l’île de Taïwan, Singapour et
Hong Kong – les futurs dragons – il y a eu
un effort important de préparation. Dans
la région méditerranéenne, au nord,
les entreprises doivent s’engager pour
s’implanter dans un esprit de responsabilité
économique, sociale et environnementale,
apporter leur appui pour
améliorer la gouvernance
des sociétés partenaires
au sud, partager la valeur
ajoutée, favoriser la
mobilité des cadres,
apporter leur appui à
la mise en place de
programmes de formation professionnelle et
d’apprentissage…
«Nous allons créer
un EMCC à Tunis,
pour sensibiliser le plus
grand nombre d’acteurs
économiques tunisiens
aux enjeux du
rapprochement
euro-méditerranéen et
nourrir le débat national
tunisien en traitant aussi
de projets spécifiques
à la Tunisie»
Quels sont les préalables qui devraient être
satisfaits pour que les pays des deux rives
parviennent à promouvoir la coproduction
dans un esprit gagnant-gagnant ?
La colocalisation doit s’appuyer sur un
environnement politique, et économique
42
La colocalisation s’inspire, en effet, du modèle
allemand avec les pays d’Europe centrale et
orientale, modèle qui consiste à externaliser
des fragments de la chaîne de valeur dans les
pays voisins dont les coûts sont moindres et les
complémentarités évidentes. Cette expérience
fut un succès. Après seulement quinze ans de
coopération industrielle avec l’Allemagne, les
PECO sont dorénavant développés et intégrés
à l’Europe.
L’espace méditerranéen se prête particulièrement à la coproduction car il permet de
valoriser trois atouts principaux : la proximité
géographique, culturelle,
linguistique ; la complémentarité des compétences et
des niveaux de développement ; enfin la solidarité
des réseaux humains et des
connexions logistiques et
énergétiques.
“
«A une situation
de crise profonde,
au Nord comme au Sud,
il faut répondre par
des solutions nouvelles.
Les entreprises l’ont bien
compris. Les pouvoirs
politiques, notamment
français, ont compris eux
aussi l’intérêt qu’un tel
modèle représente».
Les déterminants de la
colocalisation ne se limitant
pas au seul coût du travail
et au prix des matières
premières, les Psem
doivent mettre en œuvre
quelques orientations
fortes, pour lesquelles ils
pourraient bénéficier de
l’expertise de la France et de l’Europe :
sécuriser les investissements à long terme,
encourager l’émergence d’un secteur
privé local dynamique, promouvoir un
modèle administratif déconcentré, mettre à
niveau le système éducatif, accentuer l’effort
en matière d’infrastructures, décloisonner les
marchés Sud / Sud etc.
La fragmentation de la
chaîne de valeur existe
déjà entre certains pays
européens voisins, notamment la France et l’Allemagne,
et certains Psem, tout
particulièrement le Maroc
et la Tunisie. Les entreprises
françaises se lancent avec
un peu de retard mais avec
détermination. Avec l’appui
d’entrepreneurs marocains, algériens, et
tunisiens bien sûr, elles développent leurs
activités au Maghreb et ensemble réussissent à
créer de l’emploi, et à conquérir de nouveaux
marchés en Afrique.
La France ne peut-elle pas s’inspirer du
modèle allemand en matière de colocalisation pour impulser la compétitivité
de ses entreprises, créer de la valeur
et conquérir de nouveaux marchés
en Afrique avec l’appui d’entrepreneurs
tunisiens ?
IPEMED a un grand rôle à jouer pour
rassurer les politiques et favoriser une
conscience sur la nécessité pour les pays
des deux rives de la Méditerranée de
construire ensemble un destin commun.
Qu’en est-il de votre projet de création
d’un club de prospective en Tunisie ?
”
Synergies N° 88 - Décembre 2014
IPEMED est une association reconnue d’intérêt
général, dont le but est de rapprocher,
par l’économie, les pays des deux rives
de la Méditerranée et d’apporter une
contribution concrète à la construction d’un
espace euro-méditerranéen intégré. Cette
contribution passe par la mobilisation des
grosses PME, des ETI, qui se trouvent dans
les régions, souvent réunies en clusters.
C’est pourquoi IPEMED a signé des contrats
d’animation avec cinq régions françaises
situées sur l’axe Lille, Paris, Lyon, Marseille,
et Montpellier. Le travail est riche, notamment
au niveau des clusters
de ces régions, que nous
mettons en relation avec
les clusters du Maghreb.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Nous sommes également
convaincus que les entreprises du sud, par leur
capacité à prendre des
risques et à créer de la
valeur seront les fers de
lance de cette dynamique.
C’est la raison pour
laquelle nous avons initié
un mouvement d’entrepreneurs, EMCC, EuroMediterranean competitiveness Confederation.
EMCC est une organisation souple et décentralisée. Dans chaque pays de
la région, nous prévoyons de créer des EMCC
locaux. Après avoir créé un EMCC à Beyrouth,
nous allons créer un EMCC à Tunis, pour
sensibiliser le plus grand nombre d’acteurs
économiques tunisiens aux enjeux du
rapprochement euro-méditerranéen et nourrir
le débat national tunisien en traitant aussi de
projets spécifiques à la Tunisie, tels que les TIC,
les énergies renouvelables ou la sécurisation
des investissements…
”

43
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
Une exigence stratégique
A
ujourd’hui, il est important de considérer que la colocalisation est un
stade possible de l’évolution des
partenariats productifs, et qu’elle montre que
ces partenariats peuvent être équilibrés entre
Nord et Sud. Ce processus est susceptible de
changer la vision jusque là dominante dans la
mesure où le Sud n’est pas voué à rester en
position subalterne et les remontées en
gamme sont possibles.
Les projections donnent qu’en 2040, la
Méditerranée sera peuplée d’environ 1 milliard
d’habitants ce qui offre une masse critique,
notamment économique qui pourrait peser
face à la Chine, à l’Inde et aux Amériques.
Pour ce faire, les Psem disposent d’atouts
pouvant favoriser la co-traitance et la colocalisation en particulier dans certaines filières à
haut potentiel : agriculture et agroalimentaire,
énergie, automobile, TIC, aéronautique et
activités de l’innovation en général.
Une main d’œuvre bien formée
La main-d’œuvre des pays du Maghreb est
bien formée et dispose d’une grande
proximité géographique et culturelle avec
l’Europe. Elle dispose d’un bon niveau de
formation générale, malgré des lacunes en ce
qui concerne les catégories intermédiaires de
travailleurs.
Une population jeune et un marché
local potentiel
Si les marchés des Psem ne sont pas comparables aux marchés asiatiques, la jeunesse de la
population (près de la moitié de la population
a moins de 20 ans) laisse entrevoir un fort
dynamisme de la consommation. La population de ces pays devrait atteindre 450 millions
à l’horizon 2030 et 500 millions en 2050, alors
44
que la population européenne commencera
bientôt à décliner. De surcroît, l’Afrique du
Nord est un tremplin pour aller en Afrique
subsaharienne.
Positionnement stratégique commun
Dans de nombreux secteurs concernés par la
concurrence des pays à bas salaires d’Asie, il y
pourrait y avoir une complémentarité entre les
industries européennes et celles des Psem.
L’exemple de la filière textile est révélateur.
Face à la menace des exportations chinoises,
l’Europe et les Psem spécialisés dans ce secteur
pourraient avoir intérêt à adopter une
stratégie commune de montée en gamme et
d’investissement dans les aspects immatériels
des produits textiles : marketing, réactivité de
la production, innovation dans les matières,
etc. Par ailleurs, une alliance productive entre
l’Europe et les Psem pourrait favoriser leur
progression conjointe sur les marchés rapidement évolutifs de l’Afrique subsaharienne.
SOCOMEC-TIMELEC
Une véritable success
story
Avec le développement du site tunisien, le groupe a gagné en compétitivité et a
continué à créer des emplois en France.
Accompagnement des stratégies de
création de clusters promues par
certains Psem
Cela permettrait d’accompagner la montée en
gamme des PME dans des secteurs existants
(textile habillement, cuir et chaussures,
agroalimentaire, industrie mécanique, électrique, des matériaux de construction, industrie
chimique des phosphates) ; de faciliter l’émergence des nouveaux secteurs (composants
automobiles et aéronautiques, plastiques
techniques, industrie pharmaceutique et
paramédicale, industrie électronique et
informatique, TIC et centres de service). Dans
l’ensemble du bassin méditerranéen, les parcs
technologiques se développent : 3 en Egypte,
1 en Jordanie, 4 au Maroc, 2 en Syrie et
5 en Tunisie.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Benjamin LECAER, Directeur de TIMELEC présente le cas réussi de colocalisation de son groupe.
C
CTFCI sur la colocalisation en méditerranée est
quelque peu édifiant.
onstructeur indépendant offrant des
solutions expertes pour la performance
énergétique des réseaux électriques,
SOCOMEC-TIMELEC qui a implanté une
filiale en Tunisie depuis 2001 est un cas de
colocalisation réussie en Tunisie.
En 2001, il a été procédé à la création de la
société (statut offshore, totalement exportateur)
et lancement de la construction de l’usine qui
est entrée en exploitation en 2003.
Son itinéraire présenté le 16 octobre 2014 lors
de la conférence économique organisée par la
Les bons résultats étaient au rendez-vous.
«Les très bonnes performances économiques
Synergies N° 88 - Décembre 2014
45
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
du site Tunisien nous permettent de rester
compétitifs par rapport à nos concurrents»,
témoigne le directeur de SOCOMEC-TIMELEC
Benjamin Lecaer. En effet, précise-t-il, la forte
croissance enregistrée au cours des dernières
années a permis de développer le site Tunisien.
«Les performances industrielles et le climat
social de l’usine sont aujourd’hui très bons»,
ajoute M. Lecaer.
Cette entreprise qui emploie 300 personnes
offre une bonne complémentarité avec le site
français. Le site tunisien est devenu rapidement
la base technologique du groupe et participe à
hauteur de 80% de la VA des produits portant
son label.
Un choix de colocalisation réussi, en ce sens
qu’à la faveur du développement du site
tunisien, le groupe a gagné en compétitivité et
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
a continué à créer des emplois en France.
En effet, l’implantation de TIMELEC a favorisé
l’installation en Tunisie du plasturgiste NIEF
Plastic, la soutraitance de pièces électroniques
auprès de LACROIX Electronics et l’acquisition
d’emballages en carton sur le marché tunisien.
Levier de croissance du groupe et véritable
partenaire du groupe , le site tunisien possède
des bonnes perspectives. Dans un avenir
proche, il est même envisagé le doublement
de la surface de production dans ce site afin
d’absorber la croissance attendue dans les
années à venir.
Le Groupe, a conclu le directeur de TIMELEC,
reste confiant dans l’avenir de la Tunisie et
considère ce pays comme un maillon essentiel
de son développement.
LU DANS LA PRESSE FRANÇAISE
«En 2009, nous avons craint la
délocalisation en Tunisie»
Agostino Chanca, employé chez Solaufil depuis 1984.
C
répy-en-Valois. Arrivé en 1984 chez
Solaufil, Agostino Chanca a connu les
différents propriétaires qui se sont
succédés à la tête de l’entreprise.
Il n’est pas le plus ancien des salariés, mais
Agostino Chanca est une figure chez Solaufil.
Arrivé le 2 avril 1984 dans l’entreprise
crépynoise, au bureau des méthodes, il en est
trente plus tard le directeur des opérations.
Autant dire qu’il a vu la société évoluer. Et
surtout changer de propriétaires. En 1994,
d’abord. «L’arrivée des Monégasques a été
bien accueillie, se rappelle-t-il. De toute façon,
c’était soit ça, soit on fermait».
La donne était quelque peu différente en 2009
avec le rachat de Solaufil par le groupe
tunisien Misfat. «Mecaplast, notre ancienne
société mère, devait se séparer de Solaufil
pour des raisons économiques. Quand nous
avons appris que Misfat, une société
tunisienne, nous rachetait, nous avons craint
la délocalisation. Nous nous sommes
demandés s’ils ne voulaient pas simplement
racheter le nom, pour tout transférer
chez eux».
Finalement, le contraire s’est produit. «Misfat
souhaitait, et souhaite toujours, jouer sur le
Made in France. Au point de délocaliser de la
46
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Tunisie vers Crépy. C’est rassurant. Ils nous
disent que notre savoir-faire est précieux. Ils
nous font confiance et ont même encore un
projet de nouvelle ligne pour l’avenir. Leur
stratégie se confirme. Ce sont eux qui, au
final, auront le plus investi. Tout en gardant les
mêmes méthodes de travail et en se
préoccupant du bien-être de leurs employés».
De quoi, espère Agostino Chanca, ne plus
connaître un nouveau propriétaire pour
Solaufil d’ici sa retraite, dans dix ans. Car,
reconnaît-il tout de même, «un changement
de société mère fait toujours peur».
Article paru le 20 octobre 2014
http://www.leparisien.fr/espace-premium/oise-60/en-2009-nousavons-craint-la-delocalisation-en-tunisie-20-10-2014-4225765.php
47
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
DOSSIER : COLOCALISATION EN MÉDITERRANÉE
LU DANS LA PRESSE FRANÇAISE
29 décembre 2014 (supplément Eco &Entreprises, P 7)
Le numérique, secteur d’avenir pour
la France et le continent africain
Par Alexandre Zapolsky*
Depuis 2013, les deux pays ont structuré leur
action de colocalisation autour de l’Alliance
franco-tunisienne pour le numérique. Elle
rassemble à ce jour quelque soixante-dix
partenaires français et tunisiens. Ces
entreprises en retirent un impact positif sur
leur compétitivité-coût et hors coût, ce qui leur
permet de gagner des parts de marché, d’investir,
et donc de créer des emplois. Cette alliance
constitue un exemple à suivre en la matière.
2 milliards d’habitants en 2050
La colocalisation d’entreprises dans
l’Hexagone et en Afrique dans le
digital permettrait un nouveau
partage de la chaîne de valeur à
l’avantage des deux rives de la
Méditerranée.
Dans un contexte de crise et de croissance
atone, il est aussi temps de prendre conscience
que notre profondeur stratégique et nos
nouvelles parts de marché se trouvent au
Moyen-Orient, dans les pays du Golfe et surtout
en Afrique. Car, en dépit de la mondialisation,
force est de constater que partager une culture,
une langue, être géographiquement proches restent
des avantages comparatifs
de taille dans le commerce
international.
“
A
l’image de Renault installant
une usine à Oran, en Algérie, les
entreprises françaises, et l’économie
française dans son ensemble, ont tout à
gagner à se projeter dans les pays francophones
du sud de la Méditerranée. Comme en
témoigne la présence, à l’ouverture de cette
usine, le 10 novembre, du ministre des Affaires
étrangères, Laurent Fabius, et du ministre de
l’Économie, Emmanuel Macron, la France
soutient fortement cette dynamique, et
plus largement celle de la «colocalisation»,
c’est-à-dire des partenariats productifs entre
entreprises françaises et entreprises sudméditerranéennes.
Le numérique se prête particulièrement bien
à ces «colocalisations» pour deux raisons
essentielles. D’une part, le secteur contribue à
près de 25 % de la croissance du produit
intérieur brut français. D’autre part, la France
dispose d’un savoir-faire mondialement
reconnu, comme l’a souligné le récent
classement de l’ONU sur l’e-administration qui
situe l’Hexagone au 1er rang européen et au
4 ème mondial.
48
Il est temps d’envisager les pays de la rive sud
de la Méditerranée, et singulièrement la
Tunisie, comme des pays non plus seulement
de soustraitance, mais aussi et surtout de
cotraitance. C’est en partageant la chaîne des
valeurs que les entreprises françaises pourront
conquérir de nouveaux débouchés au
Maghreb, au Proche et au Moyen-Orient, dans
les pays du Golfe et en Afrique.
Les entreprises du sud de la Méditerranée
offrent à leurs partenaires du nord des
compétences métiers, des viviers d’ingénieurs
et un accès à ces marchés d’avenir. Dans ce
cadre, la Tunisie se démarque de ses voisins,
comme en atteste le classement de l’ONU sur
l’e-administration, selon lequel la Tunisie est
leader dans ce domaine en Afrique. La France
a tôt identifié la Tunisie comme un partenaire
privilégié pour aller à la conquête des marchés
du numérique.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Or, la France partage une langue commune
avec des centaines de millions d’Africains, une
histoire commune, des valeurs communes. De
nombreux binationaux sont attachés tant à la
France qu’à leur pays d’origine. Les destins de
la France et de l’Afrique sont sans doute
étroitement liés. Autant d’atouts sur lesquels
la France doit capitaliser pour prendre toute sa
place dans la croissance et le développement
de l’économie africaine. C’est aussi tout le
sens de la francophonie économique, dont le
premier sommet se déroulera à Dakar les 1er
et 2 décembre.
L’Afrique, forte de sa population jeune et
dynamique, qui atteindra les 2 milliards
d’habitants en 2050, constitue un potentiel
immense, que nous aurions tort de négliger. Les
Chinois l’ont compris, eux dont les produits
représentent déjà 16% des importations dans
les pays d’Afrique. A l’inverse,
l’Afrique ne demande qu’à
se développer en partenariat
avec nous.
Il est temps
d’envisager les pays
de la rive sud de la
Méditerranée comme
non plus seulement
des sous-traitants
mais aussi et surtout
des cotraitants.
Une étude réalisée par
l’Institut de prospective
économique du monde
méditerranéen (Ipemed) sur
l’industrie allemande dans
les pays de l’Europe centrale
et orientale a d’ailleurs mis
en avant les bénéfices que
l’Allemagne a retirés de
l’implantation de greffons dans son voisinage
oriental. D’une part, en réimportant jusqu’à
46% de la valeur ajoutée des biens d’équipement produits dans son hinterland, elle a tiré
les exportations de ces pays tout en bénéficiant de biens intermédiaires importés bon
marché, ce qui a contribué à préserver sa
compétitivité à la réexportation de produits
finis ; d’autre part, ce processus de partage de
la chaîne de valeur a créé, en Allemagne, des
emplois industriels de qualification croissante,
le pays gardant ainsi le contrôle sur l’ensemble
de la chaîne.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
”
Dans cette perspective,
l’objectif affiché doit être de
créer une véritable dynamique franco-africaine, un
axe France - Méditerranée Moyen-Orient - Afrique
dans le numérique.
Ce nouveau modèle de
coopération par la colocalisation mis en place avec la Tunisie est un premier
pas vers la mise en oeuvre d’une grande
initiative Afrique numérique, dont le départ sera
donné début 2015, sous les auspices de la
French Tech, à l’occasion d’une rencontre entre
chefs d’entreprise du numérique français,
tunisiens et africains, qui se tiendra dans un
grand pays d’Afrique de l’Ouest. Le rendez-vous
est donc pris pour la construction de l’Afrique de
demain grâce à la filière d’avenir qu’est le
numérique.
* Alexandre Zapolsky
est PDG de Linagora, référent français de l’Alliance
franco tunisienne pour le numérique et président de la
Commission «international» du Syntec numérique.
49
ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES
ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES
DOING BUSINESS 2015
d’entreprise, octroi de permis de construire,
raccordement à l’électricité, transfert de
propriété, obtention de prêts, protection des
investisseurs minoritaires, paiement des
impôts, commerce transfrontalier, exécution
des contrats et règlement de l’insolvabilité.
La difficile quête
de l’attractivité
Doing Business mesure également la régulation
du marché du travail, ce qui n’est pas inclus
dans le classement de cette année.
En épluchant les réglementations locales et en
agrégeant les résultats obtenus auprès de plus de
10.000 professionnels, la Banque mondiale
établit un classement de l’attractivité des pays. Le
classement 2015 consacre à peu près le même
quinté que dans l’édition 2014 : Singapour, reste
en tête, suivis par la Nouvelle-Zélande, Hong
Kong, le Danemark et la Corée du Sud. La Tunisie
(classée 60ème) garde un classement somme
toute satisfaisant, même si elle recule de quatre
places. Notre pays reste tout de même le premier
dans la région du Maghreb offrant un
environnement des affaires attractif.
Le rapport montre que le Tunisie reste, en
dépit du climat d’instabilité politique et social
qui a prévalu dans le pays, l’un des meilleurs
sites d’affaires en Afrique et au Maghreb (le
Maroc occupe la 71 ème place et l’Algérie
la 154 ème position).
Classée en 56 ème position dans l’édition
2014 du rapport, la Banque mondiale
positionne la Tunisie en 60ème position. Le
classement de la Tunisie a marqué le pas dans
sept indicateurs sur dix pris en considération
par le rapport. Les domaines dans lesquels
le classement de la Tunisie a baissé sont
respectivement la création d’entreprises, le
transfert de propriétés, l’obtention de prêts, la
protection des investisseurs minoritaires, le
paiement de taxes et impôts, le commerce
frontalier et l’exécution des contrats.
Doing Business révèle que la Tunisie offre
globalement un environnement favorable aux
affaires. Notre pays, note le rapport, a rendu le
paiement des impôts moins coûteux pour les
entreprises en réduisant le taux d’imposition
du revenu des sociétés. Cependant, le
commerce transfrontalier est devenu plus
difficile en raison de la détérioration de
l’infrastructure portuaire (par exemple, matériel
de chargement et déchargement) et un
manque d’espace de terminaux.
Doing Business 2015 constate que 11 pays au
Moyen-Orient et en Afrique du Nord ont
engagé des reformes dans au moins un
domaine mesuré par le rapport en 2013/14 : la
Tunisie, l’Algérie, le Bahreïn, Djibouti, la
Classée 60 ème la Tunisie perd quatre places par rapport à l’édition 2014
mais reste le site d’affaires le plus attractif au Maghreb.
L
’édition 2015 du rapport du groupe de
la Banque mondiale «Doing Business»
passe au crible le cadre réglementaire
s’appliquant aux petites et moyennes
entreprises dans 189 économies.
50
Doing Business mesure les réglementations
affectant 11 domaines de la vie d’une
entreprise. Dix de ces domaines sont inclus
dans le classement de cette année sur
la facilité de faire des affaires : création
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Synergies N° 88 - Décembre 2014
51
ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES
REGARDS CROISÉS
RAPPORT :
«L’investissement en faveur de la montée en gamme
de la Tunisie dans les chaînes de valeur mondiales»
Les opportunités
et les préalables
République arabe d’Egypte, la République
islamique d’Iran, la Jordanie, Malte, le Maroc,
les Émirats arabes unis, la Cisjordanie et Gaza.
Avec 55 pour cent des économies de la région
ayant réformé la réglementation des affaires,
contre 60 pour cent en Asie de l’Est et le
Pacifique et 74 pour cent en Afrique SubSaharienne - les réformes engagées dans la
règlementation des affaires restent limitées.
Les réformes effectivement engagées ne
touchent pas tous les domaines mesurés par
Doing Business, tels que l’exécution des
contrats et le règlement de l’insolvabilité.
«Au-delà de l’efficience»
Le rapport intitulé «Doing Business 2015 :
au-delà de l’efficience», révèle que les
entrepreneurs locaux de 123 pays ont constaté
une amélioration de l’environnement
règlementaire dans leur pays au cours de
l’année écoulée. Entre les mois de juin 2013
et juin 2014, le rapport qui couvre 189
économies à travers le monde, a recensé 230
réformes relatives aux affaires, dont 145 visant
à réduire la complexité et les coûts liés à la
règlementation des entreprises, et 85 autres
52
visant à renforcer les institutions juridiques. Le
rapport constate que les économies capables à
la fois d’améliorer l’efficacité des procédures
réglementaires et de renforcer les institutions
juridiques qui soutiennent l’entreprise, le
commerce et l’échange, sont mieux à même
de favoriser la croissance et le développement.
Pour les dix indicateurs pris en considération,
la Tunisie se classe à la :
- 100 ème place pour la création d’entreprises
(89 ème dans le classement Doing Business
2014) ;
- 85 ème place l’obtention des permis de
construire ;
- 82 ème place pour le paiement des impôts
et taxes ;
- 78 ème place pour l’exécution des contrats ;
- 38 ème place pour le raccordement à
l’électricité ;
- 116 ème place pour l’obtention d’un crédit ;
- 54 ème place pour le règlement de
l’insolvabilité ;
- 71 ème place pour le transfert de propriété ;
- 78 ème place pour la protection des
investisseurs minoritaires ;
- 50 ème place pour le commerce transfrontalier.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
L’intégration dans les chaînes de valeur
mondiales, exige que les réformes
de la politique d’investissement et
du commerce aillent de pair pour se
renforcer mutuellement.
L
e modèle de développement adopté
par la Tunisie depuis quelques décennies
a atteint aujourd’hui ses limites. Que ce
soit en matière de promotion des investissements ou des activités à forte valeur ajoutée,
de diversification de la base productive ou de
création d’emploi, les stratégies mises en
œuvre notamment au cours de la dernière
décennie se sont avérées en en net décalage
avec la sphère réelle. Créer de la valeur et
permettre au système productif national de
monter en gamme et d’intégrer la chaîne
mondiale de valeur se présentent pourtant
comme les pistes les plus sûres pour
enclencher un processus vertueux de développement soutenu, qui se ressource de son fort
contenu de savoir, de création de richesses et
d’impulsion d’une croissance inclusive.
A cet effet, le rapport récemment présenté par
l’OCDE : «l’investissement en faveur de la
montée en gamme de la Tunisie dans les
chaines de valeur mondiales» vient jeter un
Synergies N° 88 - Décembre 2014
éclairage sur les opportunités de montée en
gamme de l’économie tunisienne dans les
chaînes de valeur mondiales (CVM).
Il évalue l’intégration actuelle de la Tunisie
dans les CVM et propose des recommandations
pour les politiques publiques en vue de
permettre à la Tunisie de monter en gamme et
de bénéficier de son intégration dans les CVM.
53
REGARDS CROISÉS
Le concept de chaîne de valeur fait référence à
l’ensemble des activités liées à la production
d’un bien, effectuées par différentes entreprises
éparpillées dans plusieurs pays et connectées
les unes aux autres par des flux de commerce
et d’investissement. Les travaux de l’OCDE
montrent que le degré et la qualité de la
participation des pays aux CVM dépendent
non seulement de facteurs géographiques, de
la taille du marché ou de la structure
économique, mais aussi en grande partie de
l’action des pouvoirs publics.
Au cours des dernières décennies, la Tunisie a
centré sa stratégie de développement autour
de son intégration dans l’économie mondiale
grâce à l’attraction d’investissements directs
étrangers (IDE) et la libéralisation progressive
de son régime commercial. Cette stratégie,
fondée essentiellement sur un système
d’incitations fiscales destiné aux entreprises
totalement exportatrices a connu un succès
relatif, notamment dans les filières du textile,
de l’électronique, du tourisme et dans certains
secteurs informatiques. Les exportations et les
importations tunisiennes ont été multipliées
par deux depuis 1995 et ont vu leur structure
changer. Actuellement, les biens intermédiaires et les biens d’équipement représentent
deux tiers des exportations totales tunisiennes,
ce qui a permis à de nouvelles branches
d’activités d’émerger, notamment dans les
filières mécaniques, électriques et électroniques,
et dans certains secteurs des technologies de
l’information et de la communication.
Libéralisation des échanges et
politique d’investissement
Malgré cela, la Tunisie n’a pas réussi à
développer un nombre suffisamment important
d’activités à forte valeur ajoutée pour satisfaire
la demande d’emploi, y compris de jeunes
diplômés. Le rapport élaboré par l’OCDE révèle
que les exportations en valeur ajoutée de la
Tunisie sont beaucoup moins importantes que
ses exportations brutes. De plus, la teneur
54
REGARDS CROISÉS
moyenne en valeur ajoutée domestique des
exportations tunisiennes ne rend pas totalement
compte de la dépendance à l’importation de
certains secteurs exportateurs clés du pays.
Ainsi, au cours de la période 2007-2012, les
secteurs du textile et de l’électronique ont
affiché une teneur en éléments importés de
près de 50%.
A l’évidence, il est prouvé que des politiques de
l’investissement et du commerce ouvertes ont
des effets sur la compétitivité et l’attractivité de
certains segments des CVM pour les investisseurs et, inversement, l’investissement étranger
à des effets sur la croissance économique et la
performance du commerce extérieur du pays.
Les facteurs liés au commerce et à l’investissement peuvent représenter jusqu’à 20 ou 30 %
de la valeur des indicateurs d’intégration en
amont et en aval. Ces aspects sont particulièrement importants pour la Tunisie dont la
stratégie d’attraction des IDE doit prendre en
compte l’accès aux grands marchés étrangers de
proximité. Ces éléments mettent en évidence
l’importance de considérer les chaînes d’approvisionnement dans leur globalité pour maximiser
les gains associés à l’intégration dans les CVM.
Pour cette raison, estile le rapport de l’OCDE, la
libéralisation des échanges et la réforme de la
politique d’investissement doivent aller de pair
pour se renforcer mutuellement et exigent des
infrastructures et services de base efficaces.
Ainsi, le régime d’entreprises totalement exportatrices du Code d’incitations aux investissements de 1993 a contribué à faciliter l’intégration de certaines entreprises aux CVM en leur
offrant un éventail d’avantages, notamment
des procédures douanières simplifiées, un bon
accès au marché européen et des avantages
fiscaux aux investissements. Or, ces régimes sont,
par définition, conçus comme des dispositifs
temporaires visant à attirer les investisseurs
internationaux, avant que l’économie toute
entière arrive à maturité. Leur importance doit
graduellement s’atténuer, à mesure que se
développe le reste de l’économie et que le pays
Synergies N° 88 - Décembre 2014
se prépare à une ouverture plus globale.
Aujourd’hui, le secteur offshore représente
90% des IDE et des exportations manufacturières dans les principaux secteurs
économiques tunisiens, produit un tiers de
l’emploi formel du secteur privé et accapare
presque deux tiers des incitations fiscales
accordées à l’ensemble des entreprises
tunisiennes.
Le pays souffre également de l’abandon des
plans de développement permettant d’identifier
les projets et les réformes prioritaires. Des
projets et des réformes essentiels à la montée
en gamme de la Tunisie dans les CVM ont été
freinés et les situations de certaines infrastructures sont devenues particulièrement
préoccupantes. Les problèmes du transport de
marchandises par voie maritime, qui représente
98% des échanges extérieurs tunisiens, obèrent
la capacité des industriels
à satisfaire les délais de
livraison exigés dans les
chaînes de production
et d’échange. Outre les
restrictions liées à l’accès
au marché dans ces
secteurs, la position dominante des entreprises
publiques et les questions
de concurrence grèvent
la compétitivité de ces
secteurs. La préparation
d’un nouveau Code de
l’investissement devrait
consacrer une ouverture
graduelle de ces secteurs
à la concurrence internationale, tandis que l’établissement d’un cadre légal
pour la coopération
public-privé et une plus
grande séparation structurelle des industries de
réseau pourront aider à
renforcer la concurrence
dans le secteur des services
en Tunisie.
Stimuler les échanges,
l’investissement et l’innovation
Cette situation met en lumière la nécessité
d’une réforme globale, destinée à stimuler les
échanges, l’investissement et l’innovation
dans l’ensemble de l’économie tunisienne,
et susceptible de favoriser la croissance et
la création d’emplois. Cette réforme devrait
s’attaquer aux nombreux obstacles réglementaires qui compliquent les décisions commerciales des entreprises et grèvent leurs coûts de
fonctionnement, tels que les barrières aux flux
d’IDE et la durée des procédures douanières,
ainsi que les obstacles au développement d’un
secteur des services efficace.
Pour permettre à l’Economie nationale une
meilleure intégration dans les chaines de
“
Le secteur offshore représente 90%
des IDE et des exportations manufacturières
dans les principaux secteurs économiques
tunisiens, produit un tiers de l’emploi formel
du secteur privé et accapare presque
deux tiers des incitations fiscales accordées
à l’ensemble des entreprises tunisiennes.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
”
55
REGARDS CROISÉS
REGARDS CROISÉS
valeur mondiales, les réformes de la politique
d’investissement et du commerce doivent aller
de pair pour se renforcer mutuellement. Ainsi,
le cadre institutionnel de l’investissement et du
commerce en Tunisie pourrait être révisé afin
de faciliter une telle coordination. Pour cela , il
est devenu impérieux d’Intensifier les synergies
entre les institutions en charge de la
promotion de l’investissement et du
commerce, de façon à ce que leurs rôles soient
complémentaires et leurs activités cohérentes.
Au plan règlementaire, la préparation d’un
nouveau Code de l’investissement est plus que
nécessaire. Ce cadre est de nature à permettre
de fournir de la clarté, de la visibilité et de la
transparence aux investisseurs potentiels.
Par ailleurs, et afin d’optimiser l’intégration
des PME locales dans les CVM, notamment au
travers d’activités de fournisseurs d’entreprises
exportatrices et / ou multinationales, il importe
de rationnaliser le cadre institutionnel pour la
Qu’entend-on par «échanges en valeur ajoutée» ?
La mesure des échanges en valeur ajoutée correspond à une nouvelle approche statistique
visant à estimer l’origine (ou les origines) de la valeur (par pays et par secteur d’activité) qui
est ajoutée dans la production de tout bien ou service destiné à l’exportation (ou à
l’importation). Cette nouvelle approche s’intéresse à l’intensification des chaînes de valeurs
mondiales qui se traduit, pour un pays exportateur, par une plus forte dépendance à l’égard
des importations de produits intermédiaires (et, ainsi, de la valeur ajoutée par les secteurs
d’autres pays situés en amont de la chaîne). Appréhender les échanges en valeur ajoutée
consiste à identifier la valeur qu’ajoute chaque secteur d’activité et chaque pays intégré dans
la chaîne de production, et à attribuer cette valeur ajoutée à ces secteurs et pays d’origine.
promotion de l’investissement, de manière à
ce que les institutions
compétentes puissent
coordonner leurs activités
autour d’une stratégie
cohérente, tout en concentrant l’attraction et
le réinvestissement des
investisseurs étrangers sur
des créneaux porteurs,
des activités innovantes
et des segments de
production à plus haute
valeur ajoutée.
Plus la politique du commerce extérieur de la
Tunisie deviendra ouverte, plus il s’avérera
important de compléter le processus de
libéralisation du commerce grâce à une
réforme plus ample, visant à réduire les
obstacles réglementaires à l’investissement et
au commerce.
Cela exige notamment une réduction des
délais associés aux procédures douanières et
autres procédures frontalières et des obstacles
réglementaires au commerce et à l’investissement dans les secteurs de services.
Source : OCDE
Pourquoi est-ce important ?
Échanges, croissance et emploi
Les importations comme menace pesant sur l’emploi domestique suscitent bien des
inquiétudes; en réalité, les chaînes de valeurs mondiales participent à la création d’emplois
en grand nombre. Les flux des échanges mesurés en termes de valeur ajoutée indiquent où
sont créés les postes et mettent en lumière les avantages qu’ont les États à commercer avec
des pays tiers intégrés dans la chaîne de valeur.
Déséquilibres mondiaux
Lorsqu’on s’intéresse généralement à l’excédent (ou au déficit) commercial d’un pays avec le
reste du monde, qu’il soit évalué en termes de valeur commerciale brute ou de valeur
ajoutée, il demeure inchangé. Cependant, le concept des échanges bilatéraux fondés sur la
valeur brute peut en fin de compte donner une image trompeuse des pays à qui profitent le
commerce et exagérer l’importance des pays producteurs situés en aval des chaînes de
valeurs. Les échanges bilatéraux mesurés en valeur ajoutée permettent de mieux repérer les
pays bénéficiaires, tant d’un point de vue monétaire qu’au regard de l’emploi.
Gestion des chocs macro-économiques
Une meilleure compréhension de la mesure des échanges en termes de valeur ajoutée
constituerait un outil permettant aux décideurs politiques d’identifier les canaux de
transmission des chocs macro-économiques et de choisir ainsi des mesures politiques
appropriées.
56
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Synergies N° 88 - Décembre 2014
57
ECLAIRAGE
ECLAIRAGE
RAPPORT DE LA BANQUE MONDIALE : «LA RÉVOLUTION INACHEVÉE»
Le courage de réformer
une économie déficiente
Elle réclame ainsi la fin de la séparation de
l’économie en deux secteurs «offshore» et
«on shore», le cœur du modèle tunisien.
La Tunisie a une opportunité unique :
procéder à des réformes profondes
de ses politiques économiques et promouvoir un développement partagé et
inclusif.
Dans le premier domaine, dédié à
l’exportation, la Tunisie est cantonnée à des
activités d’assemblage à faible valeur ajoutée;
dans le second, qui recouvre les activités
dédiées au marché intérieur, le protectionnisme et les monopoles font la loi, si bien
que la concurrence y est quasi-absente,
freinant l’innovation et la productivité selon
la Banque.
L
e modèle économique tunisien datant
des années 1970 est resté sclérosé
par la bureaucratie, l’absence de
concurrence et un système bancaire défaillant,
révèle un récent rapport de la Banque
mondiale intitulé «La Révolution inachevée».
En janvier 2011, les Tunisiens ont surpris le
monde avec l’audace de la Révolution qui a
chassé Ben Ali du pouvoir. Une audace
similaire est nécessaire maintenant pour les
réformes économiques, estime la Banque
mondiale qui met en avant l’urgence
d’entreprendre de profondes réformes pour
sortir la Tunisie de l’ornière.
Le rapport met en évidence une économie qui
est restée bloquée dans des activités à faible
valeur ajoutée, où les entreprises stagnent en
termes de productivité et de création
d’emplois.
En effet, alors que la Tunisie développait
l’enseignement supérieur pour préparer
la montée sur l’échelle de la chaîne de
valeurs, l’économie n’a pas été en mesure
de progresser au-delà des activités à
basses qualifications et bas salaires.
58
économique. De nombreuses politiques et
réglementations mises en place à l’origine
pour diriger et accompagner le développement économique du pays en attirant les
investissements, ont eu un effet de distorsion
de plus en plus fort sur le développement des
marchés et ont généré des barrières non
intentionnelles à la concurrence.
Résultat : les nouveaux chômeurs se
recrutent principalement parmi les jeunes et
les personnes instruites, traduisant une
inadéquation structurelle entre la demande du
marché du travail.
La Banque, qui admet avoir glorifié à tort le
système économique durant le régime de Ben
Ali, souligne la toute urgence d’entreprendre,
«des réformes économiques ambitieuses».
Le modèle mis en œuvre a engendré de plus
en plus d’inefficacité, de distorsions et de
recherche de rente qui ont entravé l’activité
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Cette dichotomie a aussi conduit à la
concentration des entreprises sur le littoral,
creusant les inégalités avec l’intérieur du pays.
La Banque mondiale estime ainsi que seule
50% de l’économie est ouverte à la concurrence, tandis que les lourdeurs administratives
coûtent aux entreprises 13% de leur chiffre
d’affaires. Par ailleurs, les entreprises peinent à
arracher les crédits bancaires nécessaires à
leurs investissements, en raison des grandes
difficultés dont souffre le système bancaire
tunisien.
«Des changements à la marge des politiques
économiques ne seront pas suffisants pour
redresser les profonds dysfonctionnements de
ce modèle économique», met en garde la
Banque mondiale.
L’incapacité de la Tunisie à réformer son
système économique est à la racine de la
Révolution de janvier 2011. Le grand risque
conclut la Banque Mondiale est de se
contenter de simples expédients. A la croisée
des chemins, la Tunisie a une opportunité
Synergies N° 88 - Décembre 2014
unique de procéder à des changements
profonds de ses politiques économiques. Ceci
implique une volonté politique réelle et une
nouvelle vision pour un développement
partagé et inclusif. Cette volonté constituera
le principal stimulant pour créer un environnement économique à même de promouvoir
l’investissement et permettre aux entreprises
d’accroitre leur productivité et d’être
hautement compétitives, tout en accélérant la
création d’emplois. Cela suppose invariablement un consensus national et, surtout, une
conver-gence de vues de toutes les forces
politiques nationales et des acteurs économiques dans cette nouvelle phase cruciale que
connait le pays.
59
ECLAIRAGE
ECLAIRAGE
OPINION :
Pour un modèle de
développement renouvelé
Par Afif CHELBI*
La parution, au courant de l’année 2014, du rapport de la Banque mondiale intitulé «la
révolution inachevée» n’est pas passée inaperçue. Ce document a retenu l’attention des
économistes en Tunisie, des médias et fait l’objet d’un débat public..
Le Cercle Kheireddine, qui regroupe en son sein des économistes, des experts et des
hommes politiques de renom, a organisé, le 10 décembre 2014, une table ronde consacrée
à ce rapport. M. Afif Chelbi, président du Comité d’orientation stratégique du Cercle et
ancien ministre de l’Industrie a lors d’une pertinente intervention fait une lecture critique
de ce rapport. Vu son intérêt, nous avons jugé utile de reproduire, ci-dessous de larges
extraits de cette intervention.
L
a discussion de «La révolution inachevée» est
en fait un débat sur la politique économique de
la Tunisie pour les prochaines années durant
lesquelles notre pays devra compter en premier lieu
sur ses propres forces, mais aussi sur l’appui de ses
partenaires internationaux au premier rang desquels
figure la Banque mondiale qui a accompagné, sans
discontinuité durant les 50 dernières années, le
développement de la Tunisie, son premier client
dans la région en termes de financement par tête
d’habitant…
60
niveau du diagnostic où, contrairement aux
habituelles évaluations des politiques publiques, les
auteurs élaborent un véritable rapport à charge
réduisant plusieurs décennies de développement à
une succession de lacunes.
Ensuite, les solutions proposées par ce rapport
relèvent d’un libéralisme d’un autre temps. Cela est
d’autant plus étonnant que la Banque mondiale a
procédé, depuis la fin des années 90, à un
recentrage idéologique important, laissant de côté
ses dérives néolibérales des années 80, et retrouvant
son rôle de banque de développement, fidèle à
l’esprit de Keynes, l’inspirateur de sa création (voir
rapport BM 2006 «Equité et développement»)….
…Au moment où le pays a grand besoin d’analyses
sereines et avisées sur son modèle de développement
tirant objectivement les leçons des réussites et des
échecs passés, voilà qu’une équipe de la Banque
publie «La révolution inachevée», rapport souvent
présenté comme incontournable, alors qu’il ne
cadre pas avec la rigueur d’analyse à laquelle nous
a habitués la Banque mondiale. Il contribue à
l’exacerbation du débat au lieu d’aider à sa
modération. Nous sommes profondément
convaincus que ce rapport ne représente pas la
véritable Banque mondiale, l’Institution éclairée
que nous avons toujours appréciée comme
catalyseur des réformes quand elle a fonctionné en
synergie avec l’Administration tunisienne.
Ce n’est pas que nous prônions des politiques
étatistes, nous nous situons bien dans le cadre
libéral, mais comme le soulignait Michel Albert dans
«Capitalisme contre capitalisme», lorsqu’on adopte
le cadre libéral, le débat n’est pas clos mais ne fait
que commencer.
Nous procéderons donc à une analyse critique de ce
rapport selon deux axes principaux. D’abord, au
…Cette divergence sur le rôle de l’Etat a rythmé les
rapports entre la BM et les pouvoirs publics en
…Ce rapport nous ramène donc à la BM des
années 80. Notre divergence avec les solutions
qu’il propose est systémique, elle concerne toutes
les politiques sectorielles : agricole, industrielle,
commerciale, financière… et tient en un seul mot :
l’Etat et son rôle dans le développement.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Tunisie durant des décennies, elle a toujours été
résolue après d’âpres débats qui, en général,
commencent par une opposition de la Banque à un
programme volontariste proposé, pour finir par
son appui suite à sa mise en œuvre effective, la
Banque relayant même certains de ces programmes
dans des pays arabes et africains…
Cela étant dit, il n’est pas question de nier ou
de sous-estimer les lacunes, soulignées à juste titre
par le rapport, car il est avéré que, de 1960 à
2010, le développement de la Tunisie s’est heurté
à un «plafond de verre», du fait de l’absence de
démocratie et de transparence, qui lui a fait perdre
2 à 3 points de croissance. Nous ne sommes donc
pas les adeptes de la poursuite des politiques du
passé qui ne répondent plus aux nouveaux enjeux
du pays, mais nous ne sommes pas non plus les
tenants de la table rase qui soutiennent que rien
n’a été fait en Tunisie durant les 50 dernières
années.
Pour schématiser, nous pouvons dire que de 1960
à 2010, avec un taux de croissance moyen de 5 %,
le véhicule du développement a plafonné à 60
km/h alors qu’il aurait pu rouler à 100 km/h.
C’était significatif, mais insuffisant pour atteindre
un nouveau palier à même de résoudre les
problématiques du chômage, des inégalités
sociales et régionales qui ont été les principales
causes de la révolution. Cela n’a pas été possible
car ces lacunes ont fini par «brider» les capacités
et les compétences du pays…
1- La pseudo-autocritique
Extrait : «Ce que la Banque mondiale a appris de
la Tunisie… Jusqu’en 2010, la Tunisie était
considérée par la Banque comme un modèle à
suivre, …et Davos a plusieurs fois classé la Tunisie
comme l’économie la plus compétitive en
Afrique… En fait, au-delà de la façade brillante
présentée par l’ancien régime, l’environnement
économique en Tunisie était profondément
défaillant…».
Commentaire : Est-ce que ces institutions
internationales étaient manipulées alors que leurs
experts bénéficiaient de toutes les informations
disponibles auxquelles n’avaient pas toujours accès
des experts et même des responsables nationaux?
Cela n’a t-il pas permis de percer «la façade» de ce
«crony capitalism» allègrement financé?
En effet, le rapport ne dit pas un mot des milliards
de dollars de crédits accordés par la BM à la Tunisie
pour financer des centaines de projets durant des
Synergies N° 88 - Décembre 2014
décennies... Les auteurs savent bien qu’il s’agissait
de bons projets, mais le reconnaître nuirait à leur
prétendue démonstration. Les générations de
cadres nationaux qui ont conçu et mis en œuvre
ces projets se sentent agressées par ce rapport
émanant d’un partenaire historique de la Tunisie,
comme doivent l’être également les nombreux
experts de la BM qui ont évalué, approuvé et suivi
ces projets…
2-Les exportations et les industries
offshore
Extrait : «Faible évolution des exportations,
comparaisons défavorables par rapport au Mexique,
à la Chine, aux pays de l’Est... Les huit pays de l’Est
qui ont accédé à l’UE en 2004 ont augmenté
l’exportation à hauteur de 26 % du PIB en 1995 à
57 % en 2011, alors que la Tunisie a connu un
progrès beaucoup plus limité avec des exportations
passant juste de 30 % à 39 % du PIB».
Commentaire : Le rapport fait des comparaisons
qui ne tiennent pas. Le Mexique et les pays de
l’Est ont bénéficié d’appuis très forts des USA et
de l’UE, sans parler de la taille de la Chine ! Il ne
cite pas les comparaisons, toutes favorables,
avec les pays méditerranéens ayant signé des
accords de libre-échange avec l’UE, en particulier
avec le Maroc, dont les exportations vers l’UE ont
évolué de 6,2 milliards d’euros en 2000 à 7,7
milliards en 2010, alors que celles de la Tunisie
sont passées de 5,6 milliards d’euros en 2000 à
9,5 en 2010 et ce d’après Eurostat.
Extrait : «Même la faible amélioration de
l’intensité technologique des produits exportés
induit en erreur car elle reflète l’assemblage de
produits dont le contenu n’est pas fabriqué en
Tunisie. Par exemple, alors que, depuis 2009,
Aérolia, une filiale d’Airbus, a ouvert une usine en
Tunisie qui exporte des composants pour la
production de l’Airbus 320, seules les tâches à
basse qualification ont été délocalisées en Tunisie...
Le régime offshore n’a attiré que des investissements «délocalisables» concentrés sur des activités
à basse valeur ajoutée».
Commentaire : Que même un succès tel
qu’Aérolia soit ainsi présenté laisse pantois. D’autre
part, le rapport occulte le fait que, dans un monde
interdépendant, la notion d’intégration et de
remontée des filières ne peut être que progressive et
pas forcément verticale.
En Tunisie, la valeur ajoutée industrielle a plus que
triplé entre 1995 et 2010, passant de 3.250 MD
61
ECLAIRAGE
ECLAIRAGE
RECENSEMENT GÉNÉRAL DE LA POPULATION ET DE L’HABITAT 2014 :
(millions de dinars) à 10.730 MD et le contenu
technologique des exportations est passé de 12%
à 30% durant la même période. Ainsi, les
exportations des industries mécaniques et
électriques, qui n’étaient que de 110 MD en 1980
et 750 MD en 1995, ont été, en 2010, de plus de
6.000 MD. Ces mutations technologiques sont
illustrées par un grand nombre de «success
stories» dans le textile, les IME, les TIC, ou par
des cas d’entreprises tunisiennes rachetant leurs
partenaires européens.
Cette remontée des filières pourrait, certes, être
plus rapide, mais ce n’est pas la baisse des
incitations qui l’accélérerait ni une politique
industrielle moins active. …
Extrait : «L’UE absorbe 80% des exportations.
Cette concentration n’est que le symptôme d’un
problème plus profond, c’est que la Tunisie ne
produit que très peu de ses exportations largement
restreintes à l’assemblage de produits venant de
France et d’Italie, puis exportés vers ces marchés.»
Commentaire : Réduire l’industrie tunisienne à
«l’assemblage de produits venant de France et
d’Italie» est pour le moins un raccourci. Ensuite,
comment présenter le fait que l’UE absorbe 80%
de nos exportations comme une grande tare alors
que, quelques pages plus loin, le rapport note que
«la diversification géographique est bien sûr un
objectif, mais le potentiel offert par les 28 pays de
l’UE reste de loin la plus grande opportunité pour
la Tunisie» et alors que l’UE représente de 70 à
80% des exportations de la plupart des pays
européens?
Extrait : «Le régime de l’offshore est à l’origine
des problèmes de développement en Tunisie
…notamment en diminuant le processus de
«destruction créatrice»…
Commentaire : «La Loi 72, c’est à travers
une exonération fiscale, une exonération des
tracasseries administratives». C’est ce que disaient
ses concepteurs Feu Hédi Nouira et Tijani Chelly.
Ce régime a généré près de 400 000 emplois, soit
plus de 3/4 de notre industrie.
Venir à ce moment de dégradation de nos
notations, de baisse des exportations, des IDE,… et
le supprimer est proprement absurde. D’autant
plus que les recettes qui en résulteraient seraient
minimes au regard des enjeux et risqueraient de
se réduire comme peau de chagrin car, pour
beaucoup d’entreprises, une telle mesure ferait
déborder le verre de leurs hésitations à se
maintenir, ou à venir, en Tunisie.
62
En fait, cette mesure part d’une position purement
idéologique et non d’une analyse sereine des
intérêts du pays….
3-Le coût des incitations
Extrait : «Le coût total des incitations se monte à
2,2% du PIB, soit 1.296 MD répartis comme suit :
- Avantages fiscaux : 1198 MD (92%), dont près de
1.000 MD pour l’export
- Avantages financiers : 98 MD (8%)».
Commentaire : si on comprend bien le rapport :
les incitations, jugées trop élevées, n’ont attiré
que des investisseurs bas de gamme, réduisons-les
pour attirer plus d’IDE et plus d’investissements
technologiques !
En outre, le coût des incitations est largement
surestimé par le rapport, car les 1.000 MD
d’incitations à l’export sont un manque à gagner par
rapport à une imposition de l’offshore à 35% que
personne ne propose, et non à 10% comme cela
est proposé. Sur cette dernière base, ce coût
est ramené à environ 300 MD soit un coût total
des incitations de l’ordre de 600 MD et 1% du PIB.
Mais le rapport ne se limite pas à cette
surestimation du coût des incitations, il va
beaucoup plus loin :
Les principales
caractéristiques de la
population tunisienne
Forte concentration de la population dans le Grand Tunis où vit
le 1/4 des Tunisiens.
Extrait : «Lorsqu’interrogés sur l’importance
des incitations fiscales dans leur décision, 51%
répondent qu’ils n’auraient pas investi sans.
Une autre question est alors posée pour vérifier
«a véracité» de ces réponses qui montrent
qu’uniquement 21% des entreprises n’auraient
pas investi. Par conséquent, le coût des incitations
fiscales est estimé à 6362 dinars / an / emploi créé.
De plus, si nous ne prenons en considération que
les emplois additionnels (les 21% qui n’auraient
pas été créés sans les incitations) le coût augmente
pour atteindre environ 30.000 dinars / emploi / an.
Ce coût exceptionnellement élevé par emploi créé
reflète l’impact généralement faible du système
d’incitations ».
Commentaire : 30.000 dinars de subventions /
emploi / an. Qui peut croire cela ? Alors que les
estimations approfondies donnent un chiffre plus
de dix fois inférieur sans compter les effets
induits ! Ce qui est plus que raisonnable et très
inférieur aux incitations octroyées dans beaucoup
d’autres pays.
* Président du Comité d’orientation stratégique
du Cercle et ancien ministre de l’Industrie
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Les premiers résultats du recensement général
de la population et de l’habitat effectué, du
23 avril au 20 mai 2014, et publiés par l’INS
(Institut national de la statistique) n’ont pas
surpris outre mesure. Ils viennent confirmer
Synergies N° 88 - Décembre 2014
de nombreux postulats, notamment la
poursuite de la baisse du croit démographique
de la population tunisienne, la forte
concentration de la population en milieu
communal. Cela est d’autant plus vrai que le
63
ECLAIRAGE
quart de la population se trouve dans les
quatre gouvernorats du grand Tunis alors
que les trois gouvernorats du Nord Ouest
(Jendouba, Siliana et le Kef), sous l’effet de
l’exode, enregistrent, pour la première fois, un
croit négatif de leur population. Résultat : les
gouvernorats de l’Ariana et de Ben Arous
ont connu les plus forts taux de croissance
démographique, soit respectivement (3,16%)
et (2,25%).
ECLAIRAGE
La croissance démographique a fléchi durant la
décennie 2004-2014 atteignant 1,03% contre
1,21% au cours de la décennie 1994-2004 et
2,35% durant la décennie 1984-1994.
Une surprise néanmoins, et pour la première
fois, le nombre de femmes (50,2%) dépasse
légèrement celui des hommes (49,8%).
Un croit démographique faible
Les résultats préliminaires du recensement
révèlent que la Tunisie compte en 2014 près
de 10.982.754 habitants contre plus de
9,9 millions en 2004.
Le 1/4 de la population tunisienne est implanté
dans les quatre gouvernorats du Grand Tunis
(Tunis, Ariana, Ben Arous et Manouba) et 60%
de cette population réside dans le Grand Tunis
et les régions situées sur le littoral.
La capitale, Tunis, se trouve en première
position en terme de nombre d’habitants avec
1.056.000, suivie de Sfax avec 955.400 et
Nabeul avec 787.900. Les gouvernorats de
Tataouine et de Tozeur sont en queue de
peloton avec un nombre d’habitants estimé
respectivement à 149.000 et à 107.000.
Le nombre des habitants recensés en milieu
communal (7 447 mille personnes) dépasse de
loin ceux recensés en milieu non communal
(3 535,3 mille).
Parallèlement, le processus de nucléarisation
des ménages s’est accentué puisque la taille
moyenne des ménages s’est réduite, tombant
de 4,53 membres en 2004 à 4,05 en 2014. En
même temps, le nombre de familles s’est élevé
à 2 millions 712 mille 976 familles contre
2 millions 185 mille 800 familles en 2004,
(+2,12%).
64
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Le recensement 2014 révèle que le nombre
de logements a atteint 3 millions 289 mille
903 unités, contre 2 millions 500 mille
800 habitations en 2004..
Les résultats définitifs du recensement seront
publiés d’ici la fin de l’année 2014 ou le début
de 2015.
65
NOUVEAUX MARCHÉS
NOUVEAUX MARCHÉS
Tout ce qu’il faut savoir
sur les marchés publics
en Algérie
professionnel, technique, industriel et
commercial lorsque ceux-ci sont chargés de la
réalisation d’une opération financée, sur
concours temporaire ou définitif de l’Etat.
Cependant les contrats qui sont conclus entre
deux administrations publiques ne sont pas
tenus par l’application du présent décret.
La règlementation en vigueur définit les seuils
des montants des commandes, rendant
obligatoire la passation d’un marché public. En
vertu de ces règlements, peut être concerné
par la passation d’un marché public tout
contrat ou commande dont le montant
est supérieur à 8 000 000 DA (80 000) pour
les prestations de travaux ou de fournitures
4 000 000 DA (40 000) pour les prestations
d’études ou de services.
En dessous de ces seuils, le contractant se
trouve dans l’obligation de procéder à une
consultation d’au moins trois prestataires
qualifiés.
Les marchés publics sont régis par
décrets présidentiels. Le dernier
promulgué le 13 janvier 2013 est
venu modifier et compléter le décret
du 7 octobre 2010. Les mesures de
ce nouveau texte sont applicables
exclusivement aux marchés, objet
des dépenses des administrations
et entreprises publiques.
L
es marchés publics en Algérie sont régis
par décrets présidentiels. Le dernier décret
présidentiel promulgué en matière de
réglementation des marchés publics du 13
janvier 2013 est venu modifier et compléter le
66
Il est à signaler que les commandes de
prestations dont les montants cumulés, durant
le même exercice budgétaire, sont inférieurs à
(500.000 DA TTC - 5 000) pour les travaux ou
les fournitures et (200.000 DA TTC - 2 000)
pour les études ou les services, ne font pas
l’objet de consultation. Par ailleurs, le
fractionnement des commandes, dans le but
d’échapper à la consultation est interdit.
décret présidentiel n° 10-236 du 07 Octobre
2010 régissant pareil matière.
Les mesures de ce nouveau texte sont applicables
exclusivement aux marchés, objet des
dépenses des administrations et entreprises
publiques. Ces administrations sont définies
dans ce décret comme étant, les institutions
nationales autonomes, les wilayas, les
communes, les établissements publics à
caractère administratif, les centres de recherche
et de développement. Il en est aussi de même
des établissements publics spécifiques à
caractère scientifique, technologique, culturel,
Synergies N° 88 - Décembre 2014
La règle générale et l’exception
Pour ce qui concerne la passation de marchés
publics, l’avis d’Appel d‘offre est la règle
générale et le gré à gré l’exception. L’appel
d’offre qui peut-être national et / ou
international se fait sous l’une des formes
suivantes :
L’appel d’offres ouvert / L’appel d’offres restreint
(sur critères) / La consultation sélective (minim
3 Ets). La passation selon la procédure du
Gré à Gré qui est une passation de contrat
exceptionnelle soumise à conditions.
Synergies N° 88 - Décembre 2014
En effet, dans ce cas de figure, le contractant
peut y recourir dans le cas ou l’appel à la
concurrence s’avère infructueux ou si seule
une offre est reçue et si une seule offre est pré
qualifiée techniquement, après évaluation. Le
contractant relance généralement un second
appel d’offres avant de passer à la consultation
gré à gré.
L’avis d’appel d’offres est rédigé en langue
arabe et, au moins, dans une langue étrangère.
Il est publié obligatoirement dans le BOMOP
(Bulletin Officiel des Marchés des Opérateurs
Publics) et au moins dans deux quotidiens
nationaux.
L’avis d’attribution provisoire du marché est
inséré dans les organes de presse qui ont
assuré la publication de l’avis d’appel d’offres,
lorsque cela est possible, en précisant le prix,
les délais de réalisation et tous les éléments
qui ont permis le choix de l’attributaire du
marché.
Les procédures à suivre
La durée de préparation des offres est fixée
par le service contractant par référence à la
date de sa première publication dans le
Bulletin officiel des marchés de l’opérateur
public ou la presse. Elle est insérée également
dans le cahier des charges.
Le service contractant peut, quand les
circonstances le justifient, proroger la durée de
préparation des offres. Dans ce cas, il en
informe les candidats par tout moyen.
Chaque offre doit être insérée dans une
enveloppe fermée et cachetée, indiquant la
référence et l’objet de l’appel d’offres ainsi
que la mention «technique» ou «financière»,
selon le cas.
Les deux enveloppes sont mises dans une autre
enveloppe anonyme, comportant la mention
«à ne pas ouvrir - appel d’offres n°– … l’objet
de l’appel d’offres».
67
NOUVEAUX MARCHÉS
NOUVEAUX MARCHÉS
cahier des charges de l’appel d’offres. Ce choix
doit s’appuyer sur un système de notation
basé notamment sur :
- les garanties techniques et financières ;
- le prix, la qualité et les délais d’exécution ;
- les conditions de financement et la réduction
de la part transférable, (service après vente,
maintenance et formation) ;
- l’origine algérienne ou étrangère du produit,
l’intégration à l’économie nationale et
l’importance des lots ou produits sous-traités
sur le marché algérien.
D’autres critères peuvent être utilisés, à
condition qu’ils soient spécifiés dans le cahier
des charges de l’appel d’offres.
Une marge préférentielle
Les offres doivent comporter une offre technique
et une offre financière.
L’offre technique doit contenir :
- une déclaration à souscrire ;
- une caution de soumission (La caution de
soumission de l’attributaire du marché est
libérée après la mise en place de la caution
de bonne exécution) ;
- l’offre technique proprement dite établie
conformément au cahier des charges de
l’appel d’offres ;
- tous les documents de qualification et les
références professionnelles ;
- statuts de l’entreprise soumissionnaire, RC, les
bilans financiers, les références bancaires ;
- les attestations fiscales, les attestations
d’organismes de sécurité sociale pour
les soumissionnaires nationaux et les
soumissionnaires étrangers ayant travaillé en
Algérie ;
- le numéro d’identification fiscale (NIF), pour les
soumissionnaires nationaux et les soumissionnaires étrangers ayant déjà travaillé en Algérie ;
68
L’offre financière doit contenir :
- la lettre de soumission (suivant model) ;
- le bordereau des prix unitaires (libellée en
devises étrangères pour éviter le risque de
change 1 = 110 DA) ;
- le détail estimatif et quantitatif.
Une marge de préférence d’un taux de
25% est accordée aux produits d’origines
Algérienne manufacturés localement. Cette
marge est appliquée est accordée aux
entreprises ou bureaux d’études de droit
algérien, ainsi qu’aux groupements mixtes à
concurrence de la part que détient l’entreprise
algérienne dans le groupement.
Calcul de la marge de préférence :
L’hypothèse d’un soumissionnaire qui présente
une offre financière qui comprend 100 produits
dont 50 sont d’origine algérienne, l’application
de la marge se fera non pas sur la majorité des
produits (100) mais sur les 50 manufacturés
localement (50 + 50 x 25% = 62.5).
En cas de groupement : la marge est appliquée
sur deux bases :
Sur la base de la part que détient le partenaire
algérien dans le groupement.
Elle est calculée en toutes taxes comprises
(TTC) à l’étape d’évaluation financière sous
forme de majoration.
La règlementation apporte les précisions
suivantes sur les modalités de paiement :
1- Caution de soumission : en moyenne 1%
du montant du marché.
2- Caution de bonne exécution : 10 à 15%
du montant du marché.
3- Caution de restitution d’avances forfaitaire : max 15% du total du marché.
4- Caution de restitution d’avance sur
approvisionnement : (contractuelle).
5- Retenue de garantie : en moyenne de
10% (restituée un mois après la réception
définitive du marché).
Les cautions doivent être établies par une
banque algérienne.
Les critères de choix du cocontractant doivent
être obligatoirement mentionnés dans le
Synergies N° 88 - Décembre 2014
Synergies N° 88 - Décembre 2014
69
PROMOSALONS
NOUVEAUX MARCHÉS
Une avance forfaitaire : max 15% du
montant total du marché (après établissement
d’une caution de restitution d’avance).
SALONS FRANCAIS PROMUS PAR LA CTFCI
LES RENDEZ-VOUS 2015
Avance sur approvisionnement : montant
contractuel (le montant des deux avances ne
doit pas excéder 50% du montant total du
marché).
Acomptes : contractuel (marchés de travaux)
sur présentation des justificatifs de réalisation.
Paiement du solde : après déduction des
avances et cautions.
Délais de paiement : suivant clauses contractuelles prévues dans le marché, compter 4 à 5
mois en moyenne après le dépôt de l’ensemble
des documents demandés (factures, PV de
réalisation, etc..).
Certains projets peuvent soumettre l’entreprise
étrangère soumissionnaire à une obligation
d’investir en Algérie (sous la règle du 49/51).
Les cahiers des charges des appels d’offres
internationaux lancés pour ces projets
doivent prévoir / mentionner, cette obligation.
Les projets concernés par cette obligation sont
fixés par décision ministérielle.
La sous-traitance doit être expressément
prévue dans le marché. Elle doit être
mentionnée dans le cahier des charges. Le
choix du sous-traitant est obligatoirement et
préalablement approuvé par le service
contractant. Celui-ci doit vérifier que le soustraitant n’est pas exclu de la participation aux
marchés publics et que ses qualifications, ses
références professionnelles et ses moyens
humains et matériels sont conformes aux
tâches à sous-traiter.
Le montant de la part transférable doit être
diminué du montant des prestations à sous
traiter localement. La possibilité pour le soustraitant d’être payé directement par le service
contractant sera précisée peut être envisagée
dans certains cas et après accord du
contractant.
70
DATE
NOM
Le nouveau décret introduit des mesures d’assouplissement dans les
procédures de passation des marchés publics.
Le soumissionnaire qui conteste le choix opéré
par le service contractant dans le cadre
d’un appel d’offres ou d’un gré à gré après
consultation, peut introduire un recours. Dans
un délai de 10 jours à compter de la première
publication de l’avis d’attribution provisoire du
marché, dans le Bulletin officiel des marchés
de l’opérateur public (BOMOP) ou la presse,
auprès de la commission des marchés
compétente.
- Délai de 30 jours pour introduire un recours
auprès de la commission nationale des
marchés ;
- Commission d’ouverture des plis (Réception) ;
- Commission d’évaluation des offres
(Evaluation) ;
- Commission des marchés (Recours).
Source : Chambre de Commerce et
d’Industrie Algéro-Française (CCIAF)
Synergies N° 88 - Décembre 2014
OBJET
LIEU
PÉRIODICITÉ
FÉVRIER
22-26 Fév. 2015
SIMA
Salon mondial des fournisseurs
de l’agriculture et de l’élevage
2-5 Mars 2015
EQUIP AUTO ALGERIA
(filiale EQUIP AUTO PARIS)
Salon international des équipements
et services pour tous les véhicules
Paris
Nord Villepinte
Biennal
Safex Alger
Annuel
Paris
Nord Villepinte
Triennal
Paris Nord Villepinte
Annuel
MARS
AVRIL
20-25 Avril 2015
INTERMAT
Salon international de matériels et
techniques pour les industries de la
construction et des matériaux
SEPTEMBRE
25-28 Sept. 2015 SILMO
Salon international de l’optique, lunetterie
OCTOBRE
13-16 Oct. 2015
WORL EFFICIENCY
Salon des solutions pour les
(POLLUTEC HORIZONS PARIS) ressources et le climat
Paris
Porte de Versailles
Biennal
13-17 Oct. 2015
EQUIP AUTO PARIS
Salon international des équipements
et services pour tous les véhicules
Paris
Nord Villepinte
Biennal
2-6 Nov. 2015
BATIMAT
IDEO BAIN
INTERCLIMA+ ELEC
Salon mondial du bâtiment
et de l’architecture
Paris
Nord Villepinte
Biennal
NOVEMBRE
Synergies N° 88 - Décembre 2014
71
NOUVEAU
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