Introduction.+Thatcher+et+le+libéralisme+
Faire baisser les dépenses publiques de 100 milliards d’euros, supprimer 500 000 postes dans
la fonction publique, favoriser les modalités du licenciement et déréguler la durée du travail,
mais aussi promouvoir une plus grande autonomie scolaire, autant de propositions de
François Fillon, candidat à la primaire de la droite, qui le rapprochent, nous dit-on, de
Margaret Thatcher, dont il s’est lui-même plusieurs fois réclamé.
En France, Thatcher évoque pêle-mêle l’« ultra-libéralisme », la mise à genoux des syndicats
ou encore la toute puissance de la City. Mais loin d’avoir été ultra-libérale – terme d’ailleurs
aussi flou que peu scientifique – Thatcher a pensé et mis en œuvre un programme tout
simplement libéral, pour accentuer la concurrence et combattre les rentes dans le plus
grand nombre de secteurs possible. Inquiète, comme nombre de ses compatriotes, de la
situation d’un pays rongé par l’inflation et engoncé dans la bureaucratie, elle voyait dans le
secteur privé le seul véritable créateur de richesses. Il fallait donc mettre un terme au
« consensus de l’après-guerre », où Travaillistes comme Conservateurs s’accordaient non
seulement sur une approche keynésienne de l’économie, mais aussi sur sa régulation étroite.
La passion de Thatcher pour le libéralisme se développa progressivement. Jusqu’à 1975, elle
s’exprima peu sur l’économie, et son élection à la tête du Parti en 1975 s’expliqua davantage
par la désaffection des Tories envers son prédécesseur, Edward Heath, que par son
radicalisme. Mais ses convictions s’affirmèrent : en 1974, elle cofonda le think tank libéral
Centre for Policy Studies et se rapprocha d’un autre think tank, l’Institute for Economic
Affairs.
Parmi les penseurs libéraux, c’est Friedrich Hayek qui exerça la plus grande influence sur
elle. Comme Hayek, elle était convaincue qu’aucun compromis avec le socialisme n’était
possible, parce que cette idéologie tendait toujours, selon lui, vers des résultats totalitaires.
Mais sa vision du libéralisme était aussi équilibrée par une forme de sagesse quotidienne,
accessible à tous, voire triviale : « Ma politique (est) fondée (…) sur des principes que des
millions de personnes (…) ont reçus dans leur éducation : (…) vivre selon ses moyens ;
épargner pour les mauvais jours ; payer ses factures à temps (…). ».1
1 Interview pour News of the World, 20 septembre 1981.