Comité de rédaction Claude BOURQUE, Jocelyne LAVOIE, Muriel MURRAY et Gilbert TOUSIGNANT Sous la coordination de Claude BOURQUE 29 avril 2008 POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Supervision scientifique : Claude Bourque Denis Paquette Infographie de la page couverture: Carole Bouchard Photographies de la page couverture : Valérie Fuzeau et Michel Fortier Qualité linguistique : Chantal Bodinel Imprimé sur papier contenant 100% de fibres recyclées -2- POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Mot d’appui de Jacques Languirand au projet du CRPF « Dans un monde devenu "village global", il nous faut d'autant plus agir localement. La municipalité demeure l'entité la plus proche de nous, un gouvernement de proximité auprès duquel nous pouvons intervenir en tant que citoyens pour en influencer les orientations et les décisions politiques... Faisons entendre notre voix. » Jacques Languirand -3- POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE L’OCTOBRE « … nous te ferons, Terre de Québec lit des résurrections et des milles fulgurances de nos métamorphoses de nos levains où lève le futur de nos volontés sans concessions les hommes entendront battre ton pouls dans l'histoire c'est nous ondulant dans l'automne d'octobre c'est le bruit roux de chevreuils dans la lumière l'avenir dégagé l'avenir engagé » Gaston Miron -4- POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE SIGLES ABRINORD Agence de bassin versant de la rivière du Nord CCE Comité conseil en environnement CCU Comité conseil en urbanisme CLD Centre local de développement CNC Conservation de la Nature Canada CRAL Centre de réhabilitation de la Faune aviaire des Laurentides CRÉ Conférence régionale des élus des Laurentides CRPF Comité régional pour la protection des falaises ERS Corporation pour le développement de la jeunesse ERS FAPAQ Ministère des Ressources naturelles et de la Faune MDDEP Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs MOC McGill Outdoors Club MRC Municipalité régionale de comté PRDIRT Plan régional de développement intégré des ressources et du territoire -5- POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Table des matières Mot d’appui de Jacques Languirand au projet du CRPF ..............................3 L’OCTOBRE....................................................................................4 SIGLES..........................................................................................5 Introduction ..................................................................................7 1. Le massif des escarpements, un patrimoine hors du commun .................9 Un patrimoine culturel.............................................................................................9 Une richesse écologique exceptionnelle : la faune et la flore .........................12 La faune ...............................................................................................................12 La faune terrestre ..............................................................................................12 La faune aviaire, préséance aux oiseaux de proie .........................................14 Les faunes ichtyologique et herpétologique...................................................15 La flore.................................................................................................................16 Un patrimoine hydrologique ..................................................................................18 2. Un milieu menacé par le développement immobilier.......................... 20 Historique de l’urbanisation du massif ................................................................20 Situation actuelle et perspectives d’avenir ........................................................20 Une situation qui s’explique..................................................................................21 3. La solution proposée : doter le massif d’un statut de conservation et d’une gestion adéquate .......................................................................... 22 Des propriétaires qui font partie de la solution..................................................22 Activités et statut de protection-conservation...................................................23 Volet récréatif ....................................................................................................23 Volet éducatif .....................................................................................................23 Gestion.................................................................................................................23 Plan directeur .....................................................................................................24 4. Protéger l’intégrité des écosystèmes du massif des escarpements de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte : une solution pertinente, cohérente et structurante. ............................................................................... 25 Conserver, une des dimensions du développement durable .............................25 Corridor faunique et impacts sur la biodiversité ................................................26 Impacts sur les changements climatiques ...........................................................26 En viendrons-nous à dire, « ce qui manque à la campagne, ce sont les espaces verts! » ......................................................................................................27 Conclusion .................................................................................. 27 Médiagraphie ............................................................................... 30 -6- POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Introduction Au Québec, c'est dans la région des Laurentides que l'on observe la plus forte croissance démographique, ce qui s’explique en grande partie par un phénomène d'étalement urbain. On ne s'installe plus seulement en banlieue proche comme à Laval, mais aussi dans la deuxième voire la troisième couronne de Montréal. Ainsi, des municipalités comme Blainville, Boisbriand, Mirabel et même Saint-Jérôme voient leur population croître à un rythme vertigineux. Et tout indique que cette croissance se poursuivra, puisque les projections quinquennales de l'Institut de la statistique du Québec1 annoncent une croissance démographique soutenue des Laurentides jusqu'en 2026! Par ailleurs, des municipalités comme Saint-Sauveur, Piedmont et Sainte-Adèle connaissent aussi la même croissance de population, en raison notamment du départ à la retraite des baby boomer, qui sont nombreux à choisir les « Paysd’en-Haut » comme lieu de résidence permanent. Peu à peu, les « chalets » rénovés deviennent des résidences principales, les terrains boisés sont achetés pour servir d’écrin à de vastes maisons de campagne et les mises en chantier de condos de luxe se multiplient. Les baby-boomers voient dans les Laurentides la perspective d'une retraite de rêve, entre une saison de golf et une saison de ski alpin et ce, sans avoir à sacrifier la proximité culturelle de la grande ville de Montréal. Ce phénomène d’« urbanisation » des MRC de la Rivière-du-Nord et des Pays-d’en-Haut n'est pas sans créer une pression importante sur la préservation des sites naturels et des paysages. Le moindre espace vert est désormais convoité et les amateurs de plein air constatent avec inquiétude que les sentiers qu’ils sillonnaient jadis librement au cours de leurs randonnées à pied ou en ski de fond sont de moins en moins accessibles à cause des nombreux lotissements qui poussent à un rythme effréné. Préoccupé par la préservation des sites naturels de ce coin de pays, un groupe de citoyens de la région de Prévost, Piedmont et Saint-Hippolyte a mis sur pied, en mars 2003, le Comité régional pour la Protection des Falaises (CRPF). Son but : protéger l'intégrité écologique d'un territoire qui s’étend sur une superficie d'environ 16 km2. Depuis des décennies, ce territoire appartient à des propriétaires privés soucieux de la protection du milieu naturel, mais les pressions qu’exercent les promoteurs immobiliers afin d’acquérir une part importante des terrains pour en faire des lotissements se font de plus en plus fortes. 1 www.stat.gouv.qc.ca -7- POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Jusqu'à ce jour, le travail de sensibilisation et de mobilisation de notre comité de citoyens a permis à une partie importante de ce patrimoine d’échapper à la convoitise des promoteurs immobiliers. Mais pour combien de temps encore? En déposant ce projet de préservation, le CRPF souhaite sensibiliser la communauté et les décideurs des divers paliers de gouvernement à l'importance et à l'urgence de préserver l'intégrité écologique de ce territoire. Dans le présent document, nous expliquerons en quoi le massif des escarpements de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte constitue un patrimoine culturel et écologique hors du commun dans la région des Laurentides. Si nous n’agissons pas maintenant, des dommages irréparables seront causés. Pour le sauvegarder, la solution que nous vous proposons est de doter le plus rapidement possible le massif des escarpements d'un statut de conservation et d'une gestion adéquate afin de préserver l'un des seuls et derniers écosystèmes laurentiens aux portes de Montréal. Un pays où il fait bon vivre se construit en grande partie grâce aux collectivités locales et à leur vision d'avenir. Le projet de conservation du massif des escarpements de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte est l'un de ces grands projets qui, à l'instar d'autres projets de conservation comme celui du Parc Dufresne à Val-Morin et Val-David dans les Laurentides et celui du Corridor appalachien (ACA) en Estrie, devrait s'inscrire dans une stratégie globale de conservation des milieux naturels du Québec. -8- POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE 1. Le massif des escarpements, un patrimoine hors du commun Depuis fort longtemps, nos regards se portent sur ce milieu naturel remarquable pour sa valeur patrimoniale sur le plan culturel, écologique et hydrologique. Regardons de plus près ce qu’il renferme. Un patrimoine culturel Véritable joyau naturel, le massif des escarpements de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte recèle aussi un patrimoine historique et culturel qu’évoquent les noms légendaires de Jack Rabbit, du Centre Boy’s Farm, du McGill Outdoors Club et du Club alpin du Canada. Voyons de quelle manière les utilisateurs ont marqué le milieu depuis plusieurs décennies et comment nous avons su, jusqu’à ce jour, le préserver. Photo: Michel Fortier -9- POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Le légendaire Jack Rabbit Le fondeur norvégien-canadien, Herman SmithJohannsen (1875-1987), surnommé Jack Rabbit, a été l’un des premiers à croire au potentiel récréotouristique de la région des Laurentides et c’est pour lui rendre hommage que le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs a donné son nom à une réserve écologique d'une superficie de 750 hectares. La réserve écologique Jack Rabbit se trouve entre les municipalités de Sainte-Agathe-des-Monts et Huberdeau. Photo : Le Soleil, 1965 Rappelons que c’est en 1932 que Jack Rabbit s’établit à Piedmont. On lui doit la création du premier réseau de sentiers de ski de fond dans la région permettant à bon nombre de randonneurs et de fondeurs de sillonner cette partie des Laurentides. La réaffectation, en 1996, du P’tit Train du Nord en parc linéaire a ajouté un trajet de 200 km. Le p’tit fils de Jack Rabbit se souvient “I am Jack Rabbit’s eldest grandson. I can remember the times when we would ski up the Station Hill in Shawbridge and around the back to the top of the cliffs. This was always a special event because the view from the lookout was magnificent. We could look over the valley towards Shawbridge where he lived at that time and northwards toward Piedmont where he lived the last years of his life. Below us was Paradise Valley, a wonderful pristine expanse of trees and streams that I also remember very well. Many times I would go with my grandfather, on skis in the winter and on foot in the summer through the Boy’s Farm into Paradise Valley. Of course, as we went through the farm, I was reminded what would happen to me if I didn’t behave. I remember that my grandfather had a very good relationship with those who ran the farm and we always stopped to talk to someone on the way. In paradise valley we would spend the time fishing in the summer. We would sneak up on the stream with a fly rod and my grandfather would teach me how to be a successful fisherman. In the winter we would ski through the woods, stopping for lunch with warm wieners and tea that we would cook over a campfire. It was an area very close to his home that my grandfather held very dear." - 10 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE D’ailleurs, le magazine National Geographic, qui vient de publier un reportage sur les dix plus belles pistes de cyclotourisme du monde, souligne l’existence de la Route verte québécoise qui traverse les Laurentides2. Le Centre Boy’s Farm Fondé en 1908 à Shawbridge (aujourd’hui Prévost) et surnommé "The Paradise", le Centre Boy’s Farm est l’ancêtre de l’actuel Centre de la Jeunesse et de la famille Batshaw. L’université McGill, la corporation pour la jeunesse ERS et le Centre de la Main-d’œuvre du Canada lui offrent leur appui. Sa mission principale est de réhabiliter des jeunes délinquants par le travail en plein air et son programme d’apprentissage du ski de fond s’adressant aux enfants porte le nom de Jack Rabbit. À l’époque, le Centre accueillait des garçons non catholiques et non francophones. Un siècle s’est écoulé depuis sa fondation et l’institution est toujours en activité. Photo: Archives CFCP 2 Journal des Pays-d’en-Haut, mercredi 16 avril 2008, page 35. - 11 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Le McGill Outdoors Club et le Club alpin du Canada3 Le McGill Outdoors Club (MOC) est le club de plein air de l’Université McGill. Il a dressé une carte du territoire depuis Prévost jusqu’à Sainte-Adèle. Celle-ci est très appréciée des aventuriers désireux de sillonner la région hors des sentiers battus. Le MOC organise fréquemment des activités dans la région et gère un gîte pour ses membres situé dans le Vieux-Shawbridge. Quant au Club alpin du Canada, il propose, entre autres, des cours d’accès aux sites d’escalade de glace et organise des activités sociales toute l’année. Il gère à Sainte-Adèle un gîte pour ses membres et pour les adeptes du plein air. Plusieurs de ses membres fréquentent régulièrement les escarpements du massif. Il est à noter que les sentiers étant situés sur des terrains privés, certains propriétaires accordent un droit de passage aux randonneurs tandis que d’autres refusent l’accès tant aux randonneurs qu'aux véhicules motorisés, protégeant l'intégrité écologique du site. Malgré les contraintes, ce réseau est unique dans la région des Laurentides, car il attire de nombreuses personnes ravies d’admirer la grande variété de plantes et d’animaux, tout en s'adonnant à une activité de plein air. Une richesse écologique exceptionnelle : la faune et la flore Sur le plan de la biodiversité faunique et floristique, différentes études font état de la très grande valeur écologique du massif des escarpements de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte. La faune4 La faune terrestre Dans le massif même, maintes observations nous confirment la présence de l’ours noir, du coyote, du castor, de l’écureuil noir, du porc-épic, du raton-laveur, du chevreuil, de la loutre, du pékan et du vison, etc. 3 4 La falaise de Prévost aussi connue sous le nom de l’escarpement de Shawbridge (lat. : 45° 53’, long. – 74°04’), est un élément déterminant dans le paysage laurentien local et régional. Les parois rocheuses bien souvent verticales et en grande partie dénuées de végétation s’étirent en direction est-ouest sur près de 1,5 kilomètre de longueur. Le sommet le plus élevé, le mont Belvédère est à une altitude de 350 mètres. Le dénivelé par rapport aux basses terres de la vallée immédiate de la rivière du Nord au sud-ouest est de l’ordre de 175 mètres. Un imposant éboulis de blocs rocheux résultant de la gélifraction fait le lien entre cette vallée et la falaise, enrichissant le paysage. Au sud, le mont Shaw d’une altitude de 290 mètres se colle au milieu urbanisé de Prévost. Source : Pierre Dupuy, FAPAQ, avis du 29 octobre 2003. Le Club alpin du Canada comprend plus de 500 membres affiliés (2002). Inventaire faunique du massif forestier remis au ministère de l’Environnement en mars 2004. - 12 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Plus de 20 espèces de mammifères trouvent gîte dans ces forêts de peuplements mixtes de pins et de pruches, de milieux humides, de terres agricoles en pleine succession écologique. En mars et en avril 2008, des pistes de loup ont été relevées dans le massif5. Lors d’un inventaire aérien réalisé par le CRPF pour le compte du MEQ, le 28 mars 2004, on a recensé huit orignaux sur l’ensemble du massif (d’une superficie 2) d’environ 16 km : deux ravages comptaient deux orignaux et quatre orignaux ont été vus dans un autre ravage. De nombreuses pistes de cerf de Virginie ont aussi été observées à plusieurs endroits du territoire. Orignaux observés lors de l’inventaire aérien de mars 2004. Photo: Guy D’Anjou En outre, M. Pierre Dupuy, biologiste à la FAPAQ, souligne les « caractéristiques biophysiques particulières sinon exceptionnelles » de l’escarpement de Shawbridge (voir encadré à la page précédente). Cet avis de la FAPAQ confirme la valeur du patrimoine naturel à protéger. Pour la faune terrestre, les éboulis au pied des différents escarpements forment un formidable dédale d’abris sous roches et de labyrinthes dont profitent plusieurs espèces de mammifères carnivores de la famille des mustélidés (pékan, belette,…) à la recherche de petits rongeurs. Les porcs-épics n’y sont pas rares et la FAPAQ soupçonne aussi la présence du campagnol 5 Claude Bourque, observations personnelles. - 13 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE des rochers, une espèce susceptible d’être désignée menacée ou vulnérable. Les efforts de recherche consentis à ce jour ne confirment toutefois pas cette hypothèse. D’autres études devront être réalisées. Il faut souligner que l’avis de la FAPAQ ne tient compte que de l’escarpement de Shawbridge, qui est l’escarpement principal du massif. Comme l’indique la carte ci-dessus, le massif comporte plusieurs escarpements et chacun de ces escarpements présente le même profil géomorphologique que celui étudié, tout en renfermant des écosystèmes uniques. Aux yeux du CRPF, c’est l’ensemble qu’il faut protéger. La faune aviaire, préséance aux oiseaux de proie Les nombreuses observations du Centre de réhabilitation de la faune aviaire des Laurentides (CRAL)6 illustrent l’abondance et la diversité de la faune aviaire de l’escarpement de Shawbridge (tableau 1). Tableau 1. Synthèse du nombre d’oiseaux de proie et d’espèces observés dans le secteur de l’escarpement de Prévost et Piedmont selon les années par rapport au nombre de jours d’observation. 2001 2002 2003 2004 Jours d’observation 39 45 38 35 Rapaces observés 97 208 227 199 Rapaces identifiés 82 172 194 182 Nombre d’espèces 19 15 16 14 Observateurs : Luc Lefebvre, Guy d’Anjou et Claude Bourque Les données d’observation de 2001 et 2004 donnent un aperçu intéressant de la diversité des espèces de rapaces qui fréquentent les abords de l’escarpement de Shawbridge. Sur un total de 26 espèces de rapaces identifiées au Québec, 22 ont été observées. Comme le corrobore la FAPAQ7, la lecture des données d’observation échelonnées sur quatre années montre que l’escarpement de Shawbridge ainsi que sa région immédiate représentent un point d’intérêt pour les rapaces. Trois facteurs seraient à l’origine de cette abondance, la présence de courants ascendants que l’on retrouve en bordure d’une telle structure géomorphologique et qui favorisent le vol plané des oiseaux de proie, les qualités de l’habitat convenant à ces espèces et l’abondance de nourriture disponible. Il est certain que cet endroit offre, surtout en période de migration 6 Étude des données d’observation des oiseaux de proie fréquentant la région de l’escarpement de Prévost et Piedmont. CRAL, décembre 2004. 7 Pierre Dupuy, FAPAQ, avis du 29 octobre 2003. - 14 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE printanière, une diversité impressionnante de rapaces. Au printemps, de la fin mars au début de mai, il est possible d’y observer, certains jours, de 25 à 30 individus appartenant à une dizaine d’espèces. Le nombre élevé d’observations de rapaces en migration printanière porte à croire que ces lieux constituent une halte de migration bien définie pour certaines espèces (petite buse, buse à queue rousse, crécerelle d’Amérique). Par ailleurs, deux héronnières sont visibles dans la région. Au moment du relevé, la plus importante, dans le secteur du lac Renaud, abritait 5 nids8. Les faunes ichtyologique et herpétologique Au lac Paradis, un lac artificiel montrant des signes d’eutrophisation, la présence de nasses a permis de constater9 une grande abondance de barbotte brune et la présence d’un cyprinidé : le mulet à corne. Lac Paradis. Photo : Guy D’Anjou Le mené jaune serait aussi présent. Une abondante végétation aquatique diversifiée et bien distribuée sur toute la surface du lac indique une faible profondeur de l’ordre de 0 à 5 mètres d’eau. L’omble de fontaine fréquenterait les principaux ruisseaux environnants. La faune herpétologique n’a pas Talus d’éboulis au pied de l’escarpement de Shawbridge. été étudiée, mais les Photo : Valérie Fuzeau nombreux milieux humides sont de bons habitats pour les grenouilles, les crapauds et les salamandres. 8 Lac Renaud, (Municipalités de Prévost et de Saint-Hippolyte) rapport de la FAPAQ, le 20 février 2004. 9 Pierre Dupuy, FAPAQ, avis du 29 octobre 2003. - 15 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE La flore Le massif comporte la majorité des essences forestières laurentiennes. On y trouve principalement des érables à sucre, des chênes rouges, des hêtres, des bouleaux jaunes et quelques rares noyers cendrés. Au sommet du massif, du côté nord-ouest et au centre, les pins rouges et les pins blancs dominent le paysage. Du côté sud-est, s’étend une chênaie rouge mature parsemée d’érables et de hêtres qui atteignent parfois une grande taille. Une coupe intensive est en cours et menace cet habitat exceptionnel. Dans l’escarpement proprement dit, les thuyas dominent (certains individus sont centenaires), suivis du bouleau à papier, du tilleul et de l'ostryer. La richesse floristique de l’éboulis au pied de l’escarpement a été découverte en 1985, par des botanistes membres de l’association FloraQuebeca (Sabourin et Paquette, 1987)10. Ils y ont recensé deux espèces qui pourraient être désignées menacées ou vulnérables (ESDMV), soit l'arabette à fruits réfléchis (Boechera retrofracta) et le millepertuis ascyron (Hypericum ascyron)11, ainsi que six espèces de plantes rares ou d'intérêt phytogéographique pour le Québec ou la région des Laurentides, soit la cardamine parviflore (Cardamine parviflora), le cryptogramme de Steller (Cryptogramma stelleri), l’herbe à robert (Geranium robertianum), Draba var. cana, Hackelia virginiana et Silene antirrhina, qui indiquent clairement un milieu calcicole. On notera que certaines de ces plantes sont tellement rares qu’aucun nom français ne leur a été attribué. De plus, en 1994, Denis Paquette a découvert dans une érablière au sommet de cet escarpement une orchidée remarquable observée à 5 endroits seulement au Québec, la platanthère à grandes feuilles (Platanthera macrophylla) qui pourrait aussi être une espèce menacée ou vulnérable. Enfin, lors d’une excursion de FloraQuebeca en 2002, à laquelle participaient Denis Paquette et André Sabourin, une autre plante, ayant déjà été sous surveillance en raison de sa rareté (Labrecque, J. et G. Lavoie. 2002)12, a été trouvée au pied de cet escarpement, soit le carex de Back (Carex backii). Souvent d’origine cordillérienne de l'ouest du continent, ces plantes sont rares dans l'Est; il s’agit de reliques de la dernière déglaciation, il y a environ 8 000 ans. 10 Sabourin, A. et D. Paquette. 1987. Plantes vasculaires d'intérêt phytogéographique sur l'escarpement de Shawbridge (Prévost), Québec. Naturaliste canadien 114 : 513-516. 11 Gouvernement du Québec. 2008. Liste des espèces floristiques menacées ou vulnérables susceptibles d'être ainsi désignées. - Annexe de l'Arrêté de la ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs et du ministre des Ressources naturelles et de la Faune. Gazette officielle du Québec, partie 2, volume 140, no 9, 27 février 2008, pages 967-970. 12 Labrecque, J. et G. Lavoie. 2002. Les plantes vasculaires menacées ou vulnérables du Québec. Gouvernement du Québec, ministère de l'Environnement, Direction du patrimoine écologique et du développement durable, Québec, 200 pages. - 16 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE « Ces escarpements rocheux comportent des caractéristiques chimiques d’enrobage de carbonate de calcium provenant de la dissolution de marbres précambriens » (Denis Paquette, consultant botanique, 2001)13. Ces plantes qui nécessitent un ensoleillement élevé persistent grâce à l’éboulis qui limite le reboisement. Le milieu qui leur est propice est devenu particulièrement rare par suite du reboisement du territoire après le retrait des glaciers. Le retour de ces plantes rares, même après une coupe forestière, est impensable puisque les conditions particulières qui ont permis leur survie n’existent plus. En résumé, trois espèces de plantes susceptibles d'être désignées menacées ou vulnérables au Québec ont été observées près de cet escarpement, de même que sept espèces rares ou d'intérêt phytogéographique. Il est à noter que les espèces susceptibles d'être désignées menacées ou vulnérables (ESDMV) sont aussi des plantes rares et souvent en situation précaire3, en attente d’un statut jusqu’à ce que des études plus poussées à l’échelle de la province aient été réalisés. Lorsqu’elles seront désignées selon la loi du Québec adoptée en 1989 (L .R .Q ., c. E-12,01), elles seront protégées en vertu de cette même loi. Platanthera macrophylla Des études sur les milieux humides qui avoisinent l’escarpement restent à faire, mais il s’agit d’un milieu riche et très prometteur. L’étude Photo : Denis Paquette. Photo : Valérie Fuzeau. 13 Paquette, Denis. Note concernant la préservation du milieu naturel de l’escarpement de Shawbridge (Prévost), 2001, Rapport remis au CRPF en 2003 en appui à la création d’un éventuel «Parc des Escarpements». - 17 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE complète du territoire n’a pas encore été réalisée et pourrait certainement livrer des surprises. Ces richesses naturelles à sauvegarder portent à notre attention le système hydrologique à protéger. Un patrimoine hydrologique Le massif des escarpements est formé essentiellement de roc précambrien, sur lequel une mince couche de terre s’est déposée. Quand la mer de Champlain s’est retirée, après la dernière glaciation, de multiples ruisseaux et étangs se sont formés dans les vallées. Comme le souligne Catherine Deveault, la « station de Piedmont est située dans la région physiographique du plateau laurentien qui est caractérisée par la présence d’un relief accidenté de collines, de dépressions et de plateaux. C’est dans cette région que se retrouve la majorité du couvert forestier constitué principalement de feuillus. Ainsi, le plateau laurentien est composé de roches sédimentaires où se retrouve une majorité de dépôt glaciaire que l’on nomme "till". Les sols sont constitués en majorité de sable et de blocs. Ce sont des sols qui se drainent et s’aèrent plus difficilement que ceux présents dans les bassesPhoto : Valérie Fuzeau terres. Ils sont également moins résistants à la compaction, principalement causée par la machinerie lourde des exploitants forestiers. Ainsi, les sols qui présentent un drainage d’imparfait à très mauvais risquent, par la réduction de leur couvert forestier, d’engendrer des impacts importants sur la qualité de l’eau et des écosystèmes aquatiques14. » 14 Vers une gestion intégrée du bassin versant de la rivière du Nord : portait des activités forestières. Essai présenté au Centre universitaire de formation en environnement en vue de l’obtention du grade de maître en environnement, Université de Sherbrooke, 2005, page 35. - 18 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Comme en témoigne M. Roger Morin, ingénieur15, compte tenu de ces caractéristiques, le développement résidentiel de ce secteur ne peut être que risqué. En effet, la présence de roc à moins de 1 mètre du sol crée une couche imperméable ce qui empêche l’installation de fosses septiques et de champs d’épuration sécuritaires, car les polluants qu’ils renferment (notamment le phosphore) viendraient contaminer les cours d’eau avoisinants. De plus, le coût d’aménagement des infrastructures municipales (aqueducs et égouts) serait prohibitif en raison de la nécessité de creuser le roc pour atteindre la profondeur nécessaire. Signalons aussi que l’utilisation de fertilisants et de produits chimiques par les résidents augmenterait les risques de dommages écologiques. Enfin, le sol particulièrement perméable de la vallée de la rivière du Nord (gravier et sable laissés par les glaciers) garantit une alimentation en eau d’une qualité exceptionnelle - et ce sans aucun traitement - aux municipalités de Piedmont et de Prévost, dont les puits sont situés à proximité. Le moindre déséquilibre aquifère pourrait obliger ces villes à se doter d’infrastructures coûteuses de filtration et de purification de l’eau. L’organisme Eau Secours, coalition québécoise pour une gestion responsable de l’eau, abonde dans le même sens et, en juin 2006, dans une lettre adressée à M. Claude Béchard alors ministre du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs, il soulignait l’excellente qualité de la réserve d’eau souterraine du massif qui permet de faire l’économie d’une usine de filtration. Dans cette lettre, M. André Bouthillier, président, y allait d’un appui sans équivoque au CRPF et réclamait un statut de protection. L’impact économique d’une telle protection est donc majeur pour la région. Les milieux humides constituent de véritables usines de filtration qui permettent d’épargner des dizaines de millions de dollars. 15 Résident de Sainte-Adèle depuis plusieurs années, Roger Morin est ingénieur spécialisé en assainissement des eaux. Après avoir travaillé à la direction des Eaux de la Ville de Montréal durant une quinzaine d’années, il a été associé à la firme Dupuis, Morin, Routhier, devenue depuis la firme CIMA+, une entreprise de génie québécoise de 1 100 employés. Au cours de sa carrière, il a été affecté à des travaux de traitement des eaux dans plusieurs régions au Nord de Montréal, notamment à Joliette, Repentigny, Sainte-Agathe et Oka. - 19 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE 2. Un milieu menacé par le développement immobilier Le fragile équilibre de cet habitat faunique et floristique, situé sur des terres privées, risque d’être perturbé sérieusement dans un avenir rapproché si l’on n’agit pas rapidement. Historique de l’urbanisation du massif La menace que représente l’urbanisation du massif est évidente. Les deux cartes ci-dessous, datant de 1959 et 2006, illustrent à quel rythme les contours du massif ont vu se multiplier les projets immobiliers : construction d’environ 75 maisons à la Réserve Ogilvy (Saint-Hippolyte), lotissements multiples à Prévost au nord-ouest du chemin de la Station et autour du lac Renaud, et lotissements nombreux au nord-est du chemin de la Rivière à Piedmont. 1959 : section des municipalités de Prévost et Saint-Hippolyte 2006 - section des municipalités de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte Situation actuelle et perspectives d’avenir La carte de 2006 montre à quel point la pression ne cesse de s’amplifier : le territoire des massifs est aujourd’hui presque entièrement enclavé entre les terres habitées des trois municipalités et sa superficie diminue continuellement. De plus, de nombreux autres projets à l’étude ou en voie de réalisation un peu partout réduiront encore fortement l’espace demeuré vierge. Mentionnons, à cet égard, le nouveau règlement d’urbanisme de Piedmont qui autorise la construction au pied et même sur les escarpements (à - 20 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE certaines conditions), l’acquisition par la Réserve Ogilvy d’un lot constructible entre deux ravages d’orignaux identifiés ces dernières années, et des projets domiciliaires non achevés près des escarpements du côté de Prévost. Une héronnière est menacée, près du lac Renaud. Malgré des règlements parfois sévères adoptés par les élus municipaux, l’histoire nous enseigne que l’intégrité des écosystèmes du territoire n’est pas garantie. Une situation qui s’explique La région des Laurentides affiche le taux de croissance démographique le plus élevé du Québec depuis plusieurs années selon le Conseil régional des élus des Laurentides (CRÉ)16. D’après les chiffres de l’Institut de la statistique du Québec publiés par la MRC des Pays-d’en-Haut et portant sur la période de 2001 à 2021, à terme la population des Laurentides aura crû de plus de 24 %, tandis que celle de la MRC devrait augmenter de 43 %, de 2011 à 2026 17. Par rapport à la moyenne du Québec, qui se situe à environ 8 % pour cette même période, ce taux est fort élevé. Mais pourquoi donc existe-t-il une telle attirance pour notre région ? Le même document18 nous indique que cet apport de population vient de professionnels en quête d’un lieu où la qualité de vie répond à leurs attentes, de retraités qui souhaitent vivre dans un environnement naturel et de gens qui décident de faire de leur résidence secondaire une résidence permanente. Tous ces éléments induisent une forte pression sur les terres vierges nécessitant de multiplier les infrastructures : ils entraînent la construction de maisons, de condos ou de chalets ainsi que l’aménagement de routes, d’égouts, de systèmes d’adduction d’eau et de canalisations pour le confort des habitants. Nous savons déjà que la pollution agricole cause des dommages bien réels. Nous sommes à même d’observer les dégâts causés à nos lacs par les cyanobactéries. Pouvons-nous nous poser le même postulat à propos du développement immobilier? Si nous laissons la région se développer au rythme prévu, il est à craindre que dans moins de vingt ans, une grande partie de ce qui constitue aujourd’hui son attrait aura disparu! 16 CRE des Laurentides, Plan d’action Laurentides 2007-2012, page 12. 17 CLD des Pays-d’en-Haut, Profil socioéconomique des Pays-d’en-Haut , 2008, page 23. 18 CLD des Pays-d’en-Haut, Profil socioéconomique des Pays-d’en-Haut, 2008, page 14. - 21 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE 3. La solution proposée : doter le massif d’un statut de conservation et d’une gestion adéquate Des propriétaires qui font partie de la solution Il faut rappeler que, collectivement, nous devons une fière chandelle aux propriétaires d’antan et d’aujourd’hui qui ont su participer à la réalisation de cet objectif de conservation. En effet, si le massif renferme des écosystèmes en assez bonne santé, c’est grâce à eux qu’il en est ainsi. Il est de notre devoir de préserver ce qu’ils ont créé car le statut de conservation propre à garantir la pérennité de l’intégrité écologique de ces terres demeure l’objectif. Et, reconnaissons-le, les menaces sont réelles. Pour soustraire le massif à tout développement immobilier, le CRPF envisage deux options : Conclure des ententes de conservation avec des organismes comme Conservation de la Nature Canada (CNC). Cela permettrait aux propriétaires de bénéficier d'importantes exemptions fiscales, tout en conservant la propriété de leur bien selon des clauses particulières (p. ex., continuer à couper le bois de chauffage ou à faire les sucres, être dégagé de la responsabilité civile pour l’accès public aux sentiers). Acheter purement et simplement les terres et les doter d’un statut de conservation approprié. Selon les règles du marché, le processus d’acquisition de « gré à gré » s’effectue par l’intermédiaire d’un organisme comme CNC et/ou le CRPF en collaboration avec la ou les municipalités concernées. Le financement des acquisitions peut se faire à l’aide de plusieurs sources : le fonds du Gouvernement du Québec pour la définition d’aires protégées en milieu privé, le Gouvernement du Canada, les administrations municipales, des donations déductibles d’impôt par des individus et des organismes tels CNC, Hydro-Québec, MEC, La Cordée, le Club Alpin du Canada, etc. Rappelons que le CRPF regroupe près de 500 personnes, que plus de 60 organismes ont signifié leur appui et que la pétition déposée à l’Assemblée nationale en février 2007 compte aujourd’hui plus de 14 000 noms. Soulignons également que le CRPF a fait des démarches pour devenir un organisme de bienfaisance et que le potentiel de levée de fonds pour ce projet nous semble très prometteur. Depuis ses débuts, le CRPF fait la promotion des deux mécanismes susmentionnés, pour assurer la pérennité de l’intégrité écologique du massif des escarpements de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte. - 22 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Activités et statut de protection-conservation Volet récréatif Le CRPF souhaite le maintien des activités de plein air non motorisées qui sont pratiquées depuis des décennies dans le massif : randonnée pédestre, ski de fond, raquette, vélo de montagne, escalade (été comme hiver). Volet éducatif Outre le volet récréatif, le CRPF propose un volet éducatif dédié à la sensibilisation environnementale. Parmi les partenaires possibles, citons les comités conseil en environnement (CCE) et comités conseil en urbanisme (CCU) des villes, les comités verts des écoles de la région, les commissions scolaires, les divers collèges. Ce volet inclut des activités de recherche scientifique et d'information au grand public, telle la série de conférences inaugurée en 2007 dans le but d'informer la population sur la richesse des écosystèmes, la valeur des milieux humides, les bienfaits de la pratique du sport pour la santé, etc. Gestion Le CRPF croit en un mode de gestion simple dans le but d’assurer la pérennité de l’intégrité écologique du massif et d'en garantir l'accès démocratique. Il est évident que les sentiers actuels et futurs en milieu fragile devront être « consolidés » si possible et leur tracé remanié pour éviter les milieux sensibles. Quant aux zones d’escalade, elles seront balisées pour protéger les aires fréquentées par les oiseaux de proie en période de nidification. Bien entendu, des études de terrain seront nécessaires. Des aménagements particuliers tels belvédères, pavillons pour l’observation des oiseaux de proie seront envisagés. Le CRPF s’adjoindra les expertises requises en matière de recherche scientifique, de surveillance écologique, d’éducation en matière d’environnement, de traçage de sentiers et de voies d’escalade. Au besoin, des superficies pourront être soustraites à toute activité autre que scientifique. D’après les catégories de l’UICN (1994) utilisées par le gouvernement du Québec dans son répertoire des aires protégées et des aires de conservation, le CRPF observe que la catégorie III « Monument naturel / élément naturel marquant » 19 correspond très bien au but visé soit « assurer la pérennité de l’intégrité écologique du massif ». 19 http://www.menv.gouv.qc.ca/biodiversite/aires_protegees/repertoire/partie1.htm - 23 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Il s’agit d’une aire protégée, administrée principalement dans le but de préserver des éléments naturels spécifiques. La catégorie III désigne une aire contenant un ou plusieurs éléments naturels ou naturels et culturels particuliers d'importance exceptionnelle ou unique, qui mérite d'être protégée du fait de sa rareté, de sa représentativité, de ses qualités esthétiques ou de son importance culturelle intrinsèque. Les objectifs de gestion sont les suivants : • • • • protéger ou préserver, à jamais, des éléments naturels particuliers, exceptionnels du fait de leur importance naturelle, leur caractère unique ou représentatif, ou de leur connotation spirituelle; dans une mesure compatible avec l'objectif susmentionné, offrir des possibilités de recherche, d'éducation, d'interprétation et de loisir; éliminer et, ultérieurement, prévenir toute forme d'exploitation ou d'occupation incompatible avec l'objectif du statut de conservation; offrir à la population résidante des avantages compatibles avec les autres objectifs de gestion (ex. : activité récréative, telle que la spéléologie, ou culturelle, telle qu’une cérémonie traditionnelle chez les peuples autochtones). Au Québec, bon nombre de sites appartenant à de multiples désignations sont classés dans cette catégorie. Ce sont des aires de petite superficie dont les caractéristiques naturelles, esthétiques et parfois uniques sont mises en valeur par une utilisation exclusivement récréotouristique. Plus particulièrement, on y trouve diverses chutes d'eau, de nombreuses îles du Saint-Laurent et les parcs régionaux urbains, lesquels sont souvent des vestiges de forêt ayant échappé à l'urbanisation. Plan directeur A court terme, en collaboration avec l’organisme Loisirs Laurentides, le CRPF prévoit de détailler toutes les composantes inhérentes à un tel projet. Loisirs Laurentides a d’ailleurs sollicité la contribution des MRC concernées et a déjà reçu une réponse favorable de la part de la MRC de la Rivière-du-Nord mais le financement est encore à finaliser. - 24 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE 4. Protéger l’intégrité des écosystèmes du massif des escarpements de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte : une solution pertinente, cohérente et structurante. Conserver, une des dimensions du développement durable L’objectif de conservation du CRPF s’inscrit de manière cohérente dans les orientations Le « développement durable » de la Politique nationale de l’eau du Québec s'entend d'un développement qui et du Plan d’action 2007-2112 de la répond aux besoins du présent conférence régionale des élus des sans compromettre la capacité Laurentides (CRÉ). Cette dernière reconnaît des générations futures à que « la protection des lacs et cours d’eau, répondre aux leurs. Le des collines et des paysages représente un développement durable s'appuie enjeu autant social qu’économique et 20 environnemental . » La proposition du CRPF sur une vision à long terme qui prend en compte le caractère vient donc « contribuer à la mise en œuvre indissociable des dimensions d’une stratégie régionale de protection et environnementale, sociale et de mise en valeur des paysages de la région et à la mise en œuvre de la Politique sur les économique des activités de aires protégées ». Dans le même document, le CRÉ pose la protection de l’environnement comme principe et énonce que « pour parvenir à un développement durable, la protection de l'environnement doit faire partie intégrante du processus de développement ». L’objectif du CRPF prend aussi appui sur le plan de mise en valeur des paysages du corridor de l’autoroute 15 et de la route 117 de la direction régionale du ministère des Transports du Québec et sur la Charte des paysages du Conseil régional de l’environnement des Laurentides (CRELA). Ces éléments témoignent de la justesse et de la pertinence de la démarche proposée par le CRPF. Il faut aussi souligner que le Gouvernement du Québec, pour la mise en œuvre de la Stratégie québécoise sur la diversité biologique et de la Convention sur la diversité biologique des Nations Unies, a fixé à 8 % du territoire la superficie à doter d’un statut de conservation en milieu urbain, périurbain et agricole21. « Il faut se rappeler, qu’il y a moins de 10 ans, on en était à moins de 1% de protection des milieux naturels. Alors qu’à l’échelle canadienne les aires protégées atteignent 8,5 %, le Québec atteint 4,8 % d’aires protégées. 20 Conférence régionale des élus des Laurentides (CRÉ), 2007, Plan d’action 2007-2112. http://www.crelaurentides.qc.ca/doc///Memoire_Developpement_durable.pdf 21 Plan d’action québécois sur la diversité biologique, 2004-2007 http://www.menv.gouv.qc.ca/biodiversite/2004-2007/planaction.pdf - 25 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE « On a donc fait du chemin » constate Christian Simard, de l’organisme Nature Québec22. « Depuis 2002, ce sont 66 173 km2 qui ont été protégés ». Mais près des zones urbaines, presque rien ne l’a été. Corridor faunique et impacts sur la biodiversité Avec le parc Doncaster à Ste-Adèle, le Parc régional Dufresne à Val-David et Val Morin, le massif des escarpements de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte se pose comme pierre angulaire du développement d’un réseau d’aires protégées dans les Laurentides méridionales et, à ce titre, s’insère concrètement dans le Plan d’action québécois sur la diversité biologique. Comme l’a mentionné M. Jacques Allard23 dans son allocution à la Gare de Prévost le 7 mai 2006, lors de la manifestation à l’appui du CRPF, ce grand biotope, caractérisé par des forêts mixtes, est sous-représenté dans le réseau québécois de parcs et d’aires protégées. En protégeant les 16 km2 comme le propose le CRPF, on assure l’intégrité des écosystèmes et leur pérennité. Une telle protection préservera leur diversité biologique dont certaines composantes floristiques, d’ailleurs répertoriées dans le Centre de données sur le patrimoine naturel du Québec (CDPNQ)24, sont des espèces rares. Impacts sur les changements climatiques Les forêts du massif contribuent à lutter efficacement contre les changements climatiques. À l’inverse de certaines forêts boréales du nord du Canada qui sont devenues des sources de carbone, les forêts du massif sont des forêts en pleine croissance et par conséquent, des puits de carbone. À ce titre, elles piègent le gaz carbonique de l’atmosphère et contribuent à lutter efficacement contre les changements climatiques (Villeneuve, 2007)25 . Sans compter l’effet de filtration qui procure un air plus sain à respirer. De plus, le secteur du massif des escarpements se trouve à proximité de centres urbains. Sa protection est une solution qui réduira la dépendance à l’automobile, car sa proximité offrira aux adeptes du plein air des sites exceptionnels pour y pratiquer leurs activités. 22 François Cardinal, La Presse, 22 avril 2008. M. J. Allard, directeur général de Loisirs Laurentides 24 http://www.cdpnq.gouv.qc.ca/index.htm 25 Villeneuve, Claude et François Richard, Vivre les changements climatiques. Réagir pour l’avenir, Éditions Multimondes, 2007, 449 pages. 23 - 26 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE En viendrons-nous à dire, « ce qui manque à la campagne, ce sont les espaces verts! » Les auteurs d’une récente étude sur la volonté des villes à atteindre leurs objectifs en matière d’environnement, Andréanne Chevalier, Kathryn Jastremski, Gilles Sénécal et Nathalie Vachon de l’Institut National de la recherche scientifique (INRS)26 constatent qu’aucune des 38 municipalités interrogées ne mérite le titre de ville verte. Le CRPF croit que les trois municipalités concernées par le massif souhaiteraient probablement mériter ce « Les villes sont des attardées titre. Les données sur les espaces verts de l’aménagement du montrent le retard des municipalités. M. territoire ». Éric Duchemin, professeur associé à Alexandre Turgeon, directeur général l’Institut des sciences de l’environnement de l’organisme Vivre en ville de l’UQAM, note que les municipalités n’ont aucune obligation à cet égard et que la tendance est plutôt à la réduction des espaces verts. Ce constat est aussi celui du CRPF et il est la raison d’être du projet de conservation des écosystèmes du massif des escarpements de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte. Un changement de paradigme s’impose. Si nos espaces laurentiens qui s’urbanisent donnent encore l’impression que nous sommes entourés de bois, de montagnes et de grands espaces, ce n’est qu’illusion. Et peut-être en viendrons-nous à dire, comme l’enfant vivant dans une commune rurale du film d’Éric Rohmer L’arbre, le maire et la médiathèque «… ce qui manque à la campagne, ce sont les espaces verts! » Conclusion L’objectif proposé par le CRPF s’inscrit de manière tout à fait pertinente et cohérente dans les plans d’action des différentes instances régionales CRÉ, CRELA, ABRINORD. Sur le plan national, notre intervention rejoint les priorités de la politique nationale de l’eau ainsi que celles de la stratégie et du Plan québécois sur la diversité biologique. Par ses qualités écologiques exceptionnelles, par sa fragilité, par les valeurs sociales, culturelles et économiques qu’il porte, le massif — tel qu’il est et tel qu’il doit demeurer — est de toute évidence un patrimoine garant d’une santé environnementale qu’il nous faut léguer à nos petits-enfants. 26 Sénécal, G. et al. 2008. L’État de l’environnement urbain au Québec : un coup de sonde auprès des municipalités, Institut national de la recherche scientifique, Urbanisation, Culture et Société (Université du Québec), 69 pages. www.ucs.inrs.ca - 27 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Le CRPF invite toutes les personnes et les organisations qui croient à la pertinence de sauvegarder l’intégrité du massif des escarpements de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte à être partenaires de ce projet rassembleur pour la communauté et profitable pour la région. De manière toute particulière, le CRPF réitère sa disponibilité et son ouverture à toute discussion avec les autorités municipales et régionales concernées. Faudra-t-il constater son dépérissement pour réaliser, après coup, à quel point le massif des escarpements de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte est précieux? … était précieux? - 28 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Pour Jeanne et Samuel Et tous nos petits-enfants Afin qu’ils puissent eux aussi avoir le plaisir De s’emplir les poumons, les yeux et le cœur Du merveilleux que nous procure une tranquille Nature. Claude Bourque, coordonnateur du comité de rédaction - 29 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Médiagraphie • • • • • • • • • • • • BOURQUE, Claude. Inventaire faunique du massif de Piedmont, Prévost et Saint-Hippolyte, 2004, Étude réalisée pour le ministère de l’Environnement du Québec. CLD des Pays-d’en-Haut (Le). Profil socio-économique des Pays-d’en-Haut, 2008, pages 14 et 23. CRAL. Étude des données d’observation des oiseaux de proie fréquentant la région de l’escarpement de Prévost et de Piedmont, 2004, document présenté à la Direction du patrimoine écologique et du développement durable, ministère de l’Environnement du Québec, 9 pages. CRÉ Laurentides. Plan d’Action Laurentides 2007-2012, 28 pages. DEVEAULT, Catherine. Vers une gestion intégrée du bassin versant de la rivière du Nord : portait des activités forestières, 2005, Essai présenté au Centre Universitaire de Formation en Environnement en vue de l’obtention du grade de maître en environnement. Université de Sherbrooke. 166 pages. DUPUY, Pierre. Avis écologique sur l’escarpement de Shawbridge, 2003, FAPAQ, ministère des Ressources naturelles et de la Faune du Québec (29 octobre 2003). GAZETTE OFFICIELLE DU QUÉBEC. Liste des espèces floristiques menacées ou vulnérables de l’environnement et des parcs du ministère des Ressources naturelles et de la Faune, partie 2, volume 140, no 9, 27 février 2008. 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VILLENEUVE, Claude et RICHARD François., Vivre les changements climatiques, Réagir pour l’avenir, Éditions Multimondes, 2007, page 49. - 30 - POUR LE MAINTIEN DE L’INTÉGRITÉ ÉCOLOGIQUE DU MASSIF DES ESCARPEMENTS DE PIEDMONT, PRÉVOST ET SAINT-HIPPOLYTE Revues et articles de presse : • • Journal des Pays d’en-Haut, mercredi 16 avril 2008, page 35. CARDINAL, François. La Presse, 22 avril 2008. Références Internet : http://laurentian.quebecheritageweb.com http://www.menv.gouv.qc.ca/biodiversite/reserves/jackrabbit/res_07.htm http://www.mddep.gouv.qc.ca/regions/region_15/aires-protegees.htm http://www.menv.gouv.qc.ca/biodiversite/2004-2007/planaction.pdf http://www.cdpnq.gouv.qc.ca/index.htm http://www.ucs.inrs.ca http://www.crelaurentides.org/actions/tcpl.shtml http://www.mddep.gouv.qc.ca/eau/politique/politique-integral.pdf http://www.batshaw.ca/home_r800.asp http://www.ersyouth.ca/fr/index.php http://www.accmontreal.ca/home_f.html http://www.mcgilloutdoorsclub.ca/ http://www.apcor.ca/newversion/fran/start.htm - 31 -