COMBINATOIRE IFT1065 – SEMAINE 8 – AUT. 2007 1. L’ ORDRE LEXICOGRAPHIQUE L’ordre lexicographique généralise l’ordre alphabétique ; il sert a comparer des listes ou des chaînes. Que l’on ait des chiffres, des lettres, des lettres accentuées ou autre, on suppose que deux caractères sont toujours comparables (par leur code ASCII, leur numéro unicode ou autre, c’est sans importance). Définition 1. Soient α = s 1 . . . s p et β = t 1 . . . t q deux chaînes, on dit que α est lexicographiquement inférieur à β et on note α < β si a. p < q et s i = t i pour 1 ≤ i ≤ p b. sinon, si pour le plus petit i pour lequel s i 6= t i , on a s i < t i On écrit α ≤ β pour dire α < β ou α = β. Exemple 1. (1) Si α = 132 et β = 1324, alors α < β (2) Si α = 13246 et β = 1342, alors α < β (3) Si α = 1324 et β = 1342, alors α < β Pour deux chaînes de chiffres de 1 à 9 de même longueur, l’ordre lexicographique correspond à l’ordre entre les entiers représentés. Pour dénoter une r combinaison s 1 . . . s r , on utilisera la chaîne qui liste les éléments en ordre croissant. Par exemple, la 4 combinaison correspondant à l’ensemble {5, 3, 2, 6} est notée 2356. Exemple 2. Si l’on met les 5-combinaisons de {1, 2, 3, 4, 5, 6, 7} en ordre lexicographique, quelle est la chaîne qui suit 13467 ? Exemple 3. Trouver la chaîne qui suit 2367 parmi les 4-combinaisons de {1, 2, 3, 4, 5, 6, 7}. 2. P ERMUTATIONS ET COMBINAISONS GÉNÉRALISÉES 2.1. Permutations avec répétitions. On s’intéresse ici aux permutations de n objets dont certains ne peuvent être distingués, par exemple les permutations des bits 11100 donnent toutes les chaînes de 5 bits avec trois bits égaux à 1 (on sait qu’il y en a C(5, 3)). Comment fait-on en général ? Exemple 4. Combien de chaînes peut-on faire en utilisant les lettres suivantes MISSISSIPPI Rem : on a 11 lettres : 4 “S”, 4 “I”, 2 “P” et 1 “M”. 1 Théorème 1. Si on a une suite S de n éléments contenant n 1 éléments de type 1, . . . , n t ééments de type t et si n = n 1 + . . . + n t , alors le nombre de façon de les ordonner est n! n 1 !n 2 ! . . . n t ! Exemple 5. Combien y a-t-il de facons de donner 5 livres à trois personnes A, B et C si A recoit 4 livres et B et C en recoivent chacun 2. 2.2. Sélections non ordonnées avec répétitions. Exemple 6. Une bibliothèque a au moins 6 copies des livres A, B et C. De combien de façons peut-on choisir 6 livres parmi ces derniers ? [C(8,2) = 28.] Théorème 2. Le nombre de « partitions » d’un entier k comme somme de t entiers (ou encore le nombre de façons de mettre k objets identiques dans t tiroirs) est C(k + t − 1, t − 1) = C(k + t − 1, k) = (t + k − 1)! k!(t − 1)! Une autre formulation utile (celle de Johnsonbaugh) : Théorème 3. Si un ensemble X contient t éléments, alors le nombre de façon d’en choisir k sans ternir compte de leur ordre est C(K + t − 1, t − 1) = C(k + t − 1, k) = (t + k − 1)! k!(t − 1)! Démonstration. X = {x 1 , . . . , x t }. Si n i est le nombre de fois qu’on choisit x i , il faut compter le nombre de façons que n 1 + . . . + n t est égal à k, qui est donné par le théorème précédent. Exemple 7. Combien y a-t-il de facons de distribuer 12 livres identiques à Alf, Bill, Ca et D. [C(15, 3) = 455.] Exemple 8. On a une pile de billes rouges, une de billes bleues et une de billes vertes. Chaque pile a au moins 8 billes (1) De combien de façon peut-on choisir 8 billes ? [45] (2) De combien de façon peut-on choisir 8 billes si on doit en choisir au moins une de chaque couleur ? [21] Exemple 9. Soit l’équation x 1 + x 2 + x 3 + x 4 = 29 (1) Combien cette équation a-t-elle de solutions entières non négatives ? [C(32, 3) = 4960.] (2) Combien y a-t-il de solutions entières telles que x 1 ≥ 1, x 2 ≥ 2, x 3 ≥ 3 et x 4 ≥ 0 ? [C(26, 3) = 2600.] Exemple 10. Combien de fois est exécutée l’instruction println dans l’algorithme suivant ? for i 1 = 1 to n for i 2 = 1 to i 1 for i 3 = 1 to i 2 ... for i k = 1 to i k−1 println(i 1 , i 2 , . . . , i k ) Les sorties sont les entiers i 1 , . . . , i k tels que n ≥ i 1 ≥ i 2 . . . ≥ i k ≥ 1. C’est donc le nombre de façon de choisir k entiers parmi n avec répétitions possibles. Il y en a donc C(k + n − 1, k). 2 3. C OEFFICIENTS BINOMIAUX Rappel : à ! à ! n! n n = = C(n, n − k) C(n, k) = = k!(n − k)! n −k k 3.1. Le théorème du binôme. Il généralise les formules connues (a + b)2 = a 2 + 2ab + b 2 et (a + b)3 = a 3 + 3a 2 b + 3ab 2 + b 3 : Théorème 4. n (a + b) = n X C(n, k)a à ! à ! n n X X n n−k k n−k k b = a b = a b k=0 k k k n−k k k=0 Remarque : puisque (a + b)n = (b + a)n et le produit est commutatif, on peut aussi écrire : à ! à ! n n n X n k n−k X X k n−k n k n−k a b = a b (a + b) = C(n, k)a b = k k k=0 k=0 k Exemple 11. Développer (3x − 2y)4 avec le binôme de Newton. Exemple 12. Quel est le coefficient de x 2 y 3 z 4 dans le développement de (x + y + z)9 ? [1260] Exemple 13. Montrez que n X C(n, k) = 2n k=0 3.2. Le triangle de Pascal. Pascal a remarqué qu’on pouvait obtenir les coefficients binomiaux en remplissant un triangle, appelé triangle de Pascal. En haut il y a C(0, 0) = 1. Sur la ligne suivante il y a C(1, 0) = 1 et C(1, 1) = 1. La ligne 2 contient C(2, 0) = 1, C(2, 1) = 2, C(2, 2) = 1. 1 1 1 1 1 1 3 4 5 1 2 1 3 6 10 1 4 10 1 5 1 On remarque que chaque terme est la somme des deux immédiatement au dessus. Seuls les 1 en bordure semblent venir de nulle part ; de fait, si on ajoute des 0 à l’infini à gauche et à droite sur chaque ligne, même les 1 “en bordure” sont la somme des deux entiers (0 et 1) juste au dessus et on génère tout à partir de la première ligne. Théorème 5 (Pascal). Pour tout n ≥ 0 et tout k ∈ Z on a à ! à ! à ! n +1 n n = + k k −1 k 3 4. L E PRINCIPE DES TIROIRS OU DU PIGEONNIER 4.1. Le pigeonnier simple. Théorème 6. Si n pigeons s’installent dans un pigeonnier avec k trous, k < n alors il y a un trou avec au moins deux pigeons. Théorème 7. Si X et Y sont finis avec |Y| < |X| et si f : X → Y est une fonction, alors il existe x 1 et x 2 tels que f (x 1 ) = f (x 2 ) et x 1 6= x 2 . Exemple 14. Si on a 20 processeurs qui sont interconnectés, au moins deux sont interconnectés au même nombre de processeurs. Exemple 15. Démontrez que s’il y a 151 cours d’info numérotés de 1 à 300, il y a au moins deux cours avec numéros consécutifs. Exemple 16. On a une liste de 80 items, numérotés de 1 à 80, et marqués “disponible” ou “non disponible” et tels qu’exactement 45 sont marqués “disponible”. Montrez qu’il y a au moins deux items disponibles dont les numéros diffèrent de 9. 4.2. Le pigeonnier général. Théorème 8. Si f : X → Y, |X| = n et |Y| = m et k = dn/me alors il existe au moins k éléments x 1 , . . . , x k de X tels que f (x 1 ) = f (x 2 ) = . . . = f (x k ) Une autre façon de dire est qu’il existe au moins un y tel que | f −1 ({y})| ≥ dn/me i.e. tel que le nombre de x pour lequel f (x) = y est au moins dn/me. Exemple 17. On veut envoyer des invitations de la même couleur à 334 personnes. Le magasin solde un paquet de 1000 feuilles mélangées jaunes, vertes et roses. Va t-on acheter ? Exemple 18. Un cadre reçoit une paye toutes les deux semaines (le jeudi). Montrez qu’il y a au moins un mois où il reçoit trois payes. 4