Il était une fois Douleur et Mobilisation… Christine

Il était une fois Douleur et Mobilisation…
Christine AUTISSIER, infirmière, formatrice en manutention,
Stéphanie ESCANEZ, Violette MORALES, cadres de santé
Centre hospitalier Vienne (38)
Il était une fois Mobilisation ….
Il a fallu longtemps avant que la manutention soit considérée par les soignants comme un soin.
La mobilisation signifie mettre en mouvement une partie de l’appareil locomoteur de la personne.
La manutention est un terme plus global qui comprend l’ensemble des techniques permettant
mobilisation, changement de position et déplacement du patient tout en préservant le soignant.
De nombreuses douleurs sont provoquées aux patients lors des mobilisations ou manutention.
Il existe aujourd’hui des méthodes de manutention et de plus en plus de matériel d’aide aux
transferts pour supprimer sinon limiter ces douleurs provoquées par les mobilisations.
Un patient à qui on a « fait mal » en gardera le souvenir et refusera qu’on le mobilise à nouveau.
D’où l’importance de le mobiliser avec douceur pour gagner sa confiance.
La mobilisation présente de nombreux atouts dont celui de diminuer les contractures, prévenir
l’enraidissement, l’impotence fonctionnelle et donc la douleur.
Il était une fois Douleur
Historique du projet :
Au centre hospitalier de Vienne (Isère), le CLUD (Comité de Lutte contre la Douleur) est né en
1999 avec la mission d’agir en observatoire de la douleur. Son rôle est de favoriser une prise de
conscience et une réflexion de tous les professionnels sur la prise en charge de ce symptôme.
Pour répondre à un des objectifs prioritaires, « créer et maintenir une dynamique évolutive de la
prise en charge de la douleur dans tous les services hospitaliers », a été décidé de mener tous les
5 ans une enquête auprès du personnel sur l’existant et les besoins en matière de douleur pour
pouvoir ajuster et prévoir des actions d’amélioration.
Résultats de l’enquête
La dernière enquête de 2005 se centrait, pour une part, sur les douleurs induites par les soins.
Une des questions demandait aux soignants de « Classer par ordre croissant 3 soins infirmiers
douloureux les plus fréquents dans votre unité »
- La Population : 303 agents ont participé à l’enquête. Tous les services de l’hôpital ont été
représentés : services de médecine, de chirurgie, d’urgences, soins continus, bloc opératoire,
maternité, pédiatrie, gériatrie, rééducation, soins de suite, psychiatrie, service de kinésithérapie.
La répartition par fonction était la suivante :
AS IDE Cadres Médecins Internes
Chefs
service
Kinés IADE Autres
117 148 3 7 7 0 9 7 2 étudiants IDE
3 non renseigné
- Résultats: 80% des 304 soignants ont considéré que les mobilisations étaient douloureuses,
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
escarre mobilisation toilette perfusions pansements
escarre
mobilisation
toilette
perfusions
pansements
Pour les professionnels, le soin douloureux le plus fréquemment rencontré dans tout service
confondu est la mobilisation des patients à 80%, c'est-à-dire que 8 fois sur 10 ce soin a été mis en
priorité dans le classement, un geste douloureux prévalent.
….. Et si nous mobilisions autrement ?
La rencontre entre Douleur et Mobilisation…
o Le groupe de référents douleur
Le groupe de référents douleur est composé d’infirmiers, kinésithérapeute, manipulateur en
électroradiologie, préparateur en pharmacie, sage femme, infirmière anesthésiste, cadres de santé…
chaque service est représenté.
A partir de l’enquête ont été dégagés des axes d’amélioration dont un projet mené par le groupe de
référents douleur : 12 mois / 12 soins. L’idée est de diffuser dans tous les services de l’hôpital,
chaque mois, une affiche et une fiche de recommandations pratiques au regard d’un soin spécifique
afin d’intégrer des procédures de soins ou d’examens permettant de les rendre moins douloureux.
12 mois / 12 soins
Par mois :
-une fiche « technique » pour les soignants à
conserver dans le classeur douleur de chaque unité
-Une affiche couleur par service
1 soin par mois
Dans la liste des soins choisis, la mobilisation des patients a été une des priorités au regard des
résultats de l’enquête.
Le petit groupe de travail, centré sur ce soin, appelle le groupe de formateurs à la manutention pour
les aider à l’élaboration.
o Le groupe de formateurs à la manutention
L’équipe de formateurs en manutention des malades existe depuis 1990 sur l’établissement.
Auparavant la formation était assurée par un organisme extérieur (en 1986). Ce projet institutionnel
de formation en interne s’est pérennisé dans le temps et est devenu à caractère obligatoire pour les
agents.
La douleur étant un des axes de sensibilisation dans la formation à la manutention, un des
formateurs à la manutention intègre le groupe de travail des référents douleur avec enthousiasme.
o Les professionnels
Au centre hospitalier de Vienne, le personnel se compose de 930 paramédicaux.
Comme le démontre les statistiques nationales, la population soignante est vieillissante : la moyenne
d’âge sur notre établissement est de 42 ans.
La médecine du travail a fait le constat, entre 1987 et 2005, de la diminution du nombre d’accidents
de travail dus aux manutentions et du nombre de jours d’arrêt de travail, ce qui indique une baisse de
la gravité des accidents :
0
5
10
15
20
25
30
35
40
accidents
1987
2005
0
200
400
600
800
1000
1200
Jours d' arrêt travail
1987
2005
- En 1987, 37 accidents dus aux manutentions ont générés 1142 jours d’arrêt de travail
- En 2005, 27 accidents dus aux manutentions ont générés 443 jours d’arrêt de travail
Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants…
- la fiche élaborée en collaboration entre le groupe de référents Douleur et le groupe de formation à
la Manutention est sortie en mars 2007. Elle s’intitule Douleur et Mobilisation. Elle précise une
chronologie dans la prise en charge : avant la mobilisation, pendant et après, l’évaluation du soin :
fiche en annexe.
- l’école du dos a vu le jour en octobre 2005 : il s’agit d’un groupe de professionnels (Infirmiers,
aides soignantes, kinésithérapeute) constitué en association (loi 1901) qui propose de « Faire plaisir
à votre dos » afin de permettre aux agents de bénéficier d’outils pour se remuscler, se protéger et se
détendre.
Les intervenants sont rémunérés et assurés par l’établissement, grâce à une démarche volontaire de
notre direction qui met également deux salles à disposition gracieusement.
Pour le soignant, la démarche est personnelle et l’activité se réalise hors temps de travail. Une
participation symbolique de 5€ est demandée aux agents, c’est une façon de s’engager et surtout
c’est un tarif accessible à tous.
Le programme se compose de 20 séances d’une heure.
Au menu : reprogrammation musculaire par un kinésithérapeute (étirements, gainage, stretching,
méthode de Mézières), séances de détente (massages, modelage, relaxations de groupe) et de
prévention (rappel des gestes et postures).
- les perspectives pour 2009 :
Dans un avenir proche :
- Formation à la mobilisation sans douleur des brancardiers et ambulanciers de l’établissement
- Ouverture sur l’extérieur avec la formation à la manutention des personnels d’aide à domicile
intervenants auprès des personnes âgées dépendantes.
Moralité de l’histoire…
Cette collaboration « Douleur et Mobilisation » a su donner une place importante à la prise en
charge de la douleur et à la manutention, technique de base de la profession, dans un prendre soin
du patient et également du soignant.
Elle a mobilisé les expériences des soignants et mis en éveil les compétences de chacun.
Elle a revalorisé la lutte contre la douleur et placé cette préoccupation au cœur des soins et au
quotidien dans une optique de douceur et de chaleur humaine. Comme disait R.Leriche *, « l’étude
de la douleur conduit à une médecine humaine en ses moindres gestes ».
Mais l’histoire entre douleur et manutention ne se termine pas là car c’est une histoire qui n’a pas de
fin !
* R.Leriche, 30 novembre 1939, La chirurgie de la douleur Masson- 1940- 2ème édition.
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