Relativité par la Force. Introduction.

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Une étude rigoureuse de la relativité générale avec des mathématiques de base.
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INTRODUCTION
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1 - Approche intuitive
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1 - APPROCHE INTUITIVE
1.1 - Formalismes classique et relativiste
La théorie de la relativité fait rêver par bien des aspects. On peut citer notamment
le génie de son concepteur Albert Einstein, les applications modernes qui
l'utilisent, et les œuvres de science-fiction qu'elle nourrit. Elle constitue une
rupture très importante dans l'histoire de la science en introduisant le fait que le
temps et les longueurs peuvent varier suivant l'endroit où l'on se trouve. Cette
rupture est apparue aussi par le besoin d'outils mathématiques très sophistiqués,
lesquels rendent l'abord de cette théorie très difficile d'accès aux non-spécialistes.
Commençons par brosser quelques étapes qui ont jalonné l'évolution de la
mécanique au cours des siècles. Dans les années 1600, Johannes Kepler élabore, à
partir d'observations, les lois qui décrivent le mouvement des planètes sur leur
orbite. En 1687, Isaac Newton formalise les lois de la gravitation, jetant ainsi les
bases de ce que nous appelons maintenant la mécanique classique (ou mécanique
newtonienne), capable d'expliquer et de calculer les lois précitées de Kepler. C'est
la mécanique que chacun d'entre nous a apprise dès son plus jeune âge, qui
concerne la plupart des situations que l'on rencontre dans la vie courante.
Le début des années 1900 voit une avancée majeure dans ce domaine avec les
publications d'Albert Einstein à propos de sa "théorie de la relativité" dans laquelle
on distingue :
* la relativité restreinte, qu'il publie en 1905, applicable lorsque la vitesse des
corps n'est pas négligeable par rapport à celle de la lumière, pour des repères non
accélérés sans gravité,
* la relativité générale qu'il présente en 1915, à utiliser lorsqu'il faut tenir compte
des effets de l'accélération ou de la gravité.
Dans la suite, nous distinguerons au sein de la théorie de la relativité :
* le formalisme einsteinien qui utilise divers concepts tels que la courbure de
l'espace-temps nécessitant des mathématiques très spécialisées. La notion de force
(définie à partir de la quantité de mouvement) y est très peu présente.
* le formalisme de la RpF (Relativité par la Force) qui met en œuvre une tout
autre définition de la force, et des notions très proches de celles de la mécanique
classique.
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Relativité par la Force
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1.2 - Bases de la relativité restreinte
Originalité de la RpF
Depuis notre enfance nous avons acquis des réflexes qui nous apparaissent
évidents. Par exemple, si l'on mesure la vitesse d'une onde sonore qui se déplace
dans l'air à une vitesse égale à 340 mètres par seconde, cette mesure sera modifiée
si on la réalise sur la plateforme (à l'air libre) d'un train qui roule à 30 mètres par
seconde. Suivant que le train se déplace dans le sens de l'onde ou dans le sens
contraire de l'onde, on mesurera respectivement 310 mètres par seconde ou 370
mètres par seconde. La nature nous a ainsi habitués à additionner (ou à soustraire)
les vitesses suivant la vitesse du référentiel dans lequel on effectue les mesures,
ces vitesses étant mesurées par rapport à "l'éther" qui supporte les ondes (l'air,
dans ce cas).
À la fin du XIXe siècle, une expérience est réalisée, avec une très grande
précision, par Michelson et Morley pour mesurer la différence de vitesse de la
lumière dans la direction du mouvement de la Terre et dans une direction
perpendiculaire. Contrairement à toute attente, cette expérience effectuée dans
l'espoir de caractériser "l'éther" supportant les ondes lumineuses ne montre aucune
différence de vitesse. Si l'on se réfère à la plateforme du train, on aurait pu
s'attendre à soustraire ou à additionner la vitesse de la Terre suivant que celle-ci se
déplace dans le sens de la propagation de la lumière, ou dans le sens contraire. En
fait, il n'en est rien : la vitesse de la lumière reste constante quelle que soit la
direction dans laquelle on la mesure. Lors de discussions, il est par exemple
imaginé que l'éther est entraîné par la matière (comme l'air dans le wagon d'un
train). Très rapidement, sous l'impulsion d'Einstein, la vitesse de la lumière
devient une constante et la notion d'éther est abandonnée (abandon généralement
toujours en vigueur à ce jour) pour la remplacer par un formalisme mathématique
(notamment fondé sur les équations de Lorentz).
Utilisant cette constance de la vitesse de la lumière, Einstein élabore alors sa
théorie de la relativité restreinte permettant d'expliquer comment il est possible de
concevoir le fait que la lumière conserve la même vitesse, quel que soit le
référentiel dans lequel on la mesure.
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1 - Approche intuitive
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Définition des unités de longueur et de temps
Il importe de bien se représenter ce que sont une mesure de longueur et une
mesure de temps. Ces grandeurs sont liées directement aux propriétés de la
matière, elles-mêmes liées aux lois de la physique. Dans la suite, on aura tout
intérêt à se représenter :
- un "mètre" comme un cristal (parfait) constitué d'une succession d'atomes que
l'on peut compter tout au long du mètre,
- une "seconde" comme un multiple du "temps" constitué par une "révolution" des
électrons autour d'un atome d'un corps particulier (dans une image très simplifiée
et naïve de l'atome).
Ce "mètre" est donc défini intrinsèquement par les lois de la physique qui assurent
la distance entre les atomes. Si en deux endroits différents les lois de la physique
changent, localement on ne se rendra pas compte des modifications de longueur,
dans la mesure où tous les constituants de la matière au voisinage de ces endroits
seront comprimés (ou dilatés) dans le même sens et selon la même quantité.
1 mètre
Les lois de la physique déterminent la distance "d" entre les atomes
de la matière constituant le mètre
Cette "seconde" est définie de manière très naïve par rapport à nos connaissances
actuelles en matière de constitution des atomes. Elle présente l'avantage d'être
visuellement très simple et de bien montrer sa liaison avec la matière, et donc avec
les lois de la physique.
Pour une image (très simplifiée), l'unité de temps élémentaire peut être représentée par la
durée de révolution d'un électron autour du noyau d'un atome
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Relativité par la Force
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Compression de la matière en mouvement et ralentissement
du temps
Pour arriver à ce que la vitesse de la lumière soit constante quelle que soit la
vitesse du mobile dans lequel on fait la mesure, les relations mathématiques mises
au point par Lorentz et les réflexions d'Einstein, conduisent à admettre que :
- la matière est comprimée quand elle se déplace par rapport à un repère non
accéléré de référence, cette compression étant mesurée dans ce repère,
- les horloges associées à cette matière en mouvement sont ralenties : les électrons
des atomes de cette matière "tournent" moins vite.
Cette compression et ce ralentissement du temps se font suivant un coefficient que
l'on appellera alpha, représenté par la lettre grecque α. Ce coefficient, égal à 1
lorsque la matière est fixe par rapport au repère, devient d'autant plus petit que la
vitesse v de la matière approche de la vitesse c de la lumière. Chacun peut tracer
facilement le diagramme ci-dessous, représentant la valeur du coefficient α en
fonction du rapport v/c, puisqu'il s'agit d'un arc de cercle.
Coefficient alpha représentatif de la compression de la matière et du ralentissement du temps,
en fonction du rapport v/c
En fonction de sa vitesse, la matière est comprimée dans le rapport alpha
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Conséquences du coefficient de contraction alpha
Les équations de Lorentz précitées seront précisées au chapitre 15. Elles
permettent d'établir la relation entre les longueurs et le temps mesuré suivant que
l'on se place dans un repère de référence ou dans le repère de la matière en
mouvement. On se bornera, pour le moment, à mentionner que la connaissance de
ces relations entre les unités de base (longueur et temps) permet de déduire
diverses relations entre d'autres quantités mesurées dans ces deux repères : vitesse,
accélération, force, énergie.
C'est ainsi qu'Einstein découvre sa formule célèbre :
E = m c2
Cette formule, dont nous retrouverons la démonstration au chapitre 16, présente la
grande originalité de faire apparaître qu'une masse au repos dispose d'une énergie
propre très importante.
Originalité de la Relativité par la Force (RpF)
Tout ce qui vient d'être présenté sur la relativité restreinte est applicable autant à la
méthode traditionnelle einsteinienne qu'à la RpF.
La principale originalité de la Relativité par la Force est d'utiliser une définition de
la force totalement nouvelle, en rupture avec la définition adoptée en relativité
depuis Einstein jusqu'à nos jours. Cette "nouvelle force" présente le gros avantage
d'être colinéaire avec l'accélération qu'elle produit sur une masse, ce qui n'est pas
le cas en mécanique einsteinienne. Son utilisation devient alors, dans son principe,
aussi simple qu'en mécanique classique, avec la différence que les formules de la
mécanique classique sont complétées par des termes correcteurs pour tenir compte
de la relativité.
Le lecteur pourra observer dans les chapitres suivants que les calculs utilisant la
Relativité par la Force sont strictement calqués dans leur principe sur ceux de la
mécanique classique.
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Relativité par la Force
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1.3 - Bases de la relativité générale
Quant au début du XXe siècle, Einstein élabore la théorie de la Relativité Générale
pour étudier les lois de la physique en présence de gravitation, celle-ci n'est pas
immédiatement comprise, ni adoptée par la communauté scientifique, loin s'en
faut. Deux éléments expérimentaux majeurs viennent l'étayer qui contribuent alors
à la renommée du célèbre savant :
- la déviation des rayons lumineux issus d'étoiles lointaines et rasant le Soleil,
prévue et calculée par Einstein, est observée en 1919 par l'astrophysicien Arthur
Eddington. Même s'il reste quelques polémiques sur la précision des mesures de
l'époque, ce phénomène ne saurait à l'heure actuelle être remis en cause.
Rayon lumineux
Soleil
Déviation de la lumière dans le champ gravitaire du Soleil
- l'avance du périhélie de la planète Mercure, observée dès les années 1850 par Le
Verrier, est restée inexpliquée jusqu'à ce qu'Einstein, en 1915, la calcule avec sa
théorie de la relativité générale. Le périhélie correspond au point de la trajectoire
d'une planète où elle est au plus proche de l'astre qui l'attire. Suivant les lois
établies expérimentalement par Kepler, cette trajectoire est une ellipse pour
laquelle le périhélie retrouve la même position lors de chaque révolution. En fait,
après avoir éliminé toutes les influences des autres planètes, Le Verrier observe
que les axes de l'ellipse tournent très lentement lors de chaque révolution de la
planète Mercure autour du Soleil. Cette rotation très faible correspond à un
décalage du périhélie appelé "avance du périhélie".
Mercure
Périhélie
Avance du
périhélie
Aphélie
Avance du périhélie de la planète Mercure
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Ces résultats sont alors suivis d'une longue période plutôt calme jusqu'à
l'avènement des calculateurs numériques et l'évolution de la technologie moderne.
De nouveaux moyens de mesure très précis (radars, satellites, lasers, GPS...)
apportent alors un regain d'intérêt, particulièrement pour confronter plus avant la
théorie aux résultats expérimentaux. C'est ainsi qu'au début du XXIe siècle, on
trouve divers livres, références, et articles traitant de la confrontation précise de la
théorie avec les résultats expérimentaux.
Le train de l'espace
Afin de développer la RpF en présence de gravité, domaine correspondant à la
théorie de la relativité générale, je me suis longtemps "immergé" dans une "fusée"
accélérée que j'ai aussi appelée indifféremment "laboratoire" ou "train de
l'espace". Cette immersion constitue un moyen pour étudier comment s'y déroule
le temps, pour connaître l'accélération ressentie en fonction de l'abscisse des
"wagons", et pour réaliser diverses expériences de physique. Comparant la
gravitation ressentie dans cette fusée à celle d'un champ de gravitation (tel que
celui qui est ressenti sur Terre), le principe d'équivalence (utilisé par Einstein)
permet de déduire les lois de la physique en présence de gravitation. Ce principe
considère que ces lois dans le champ de gravitation d'un astre sont identiques à
celles qui existent dans la fusée accélérée.
Alors que l'approche d'Einstein nécessite des notions difficiles à appréhender
(Einstein lui-même le reconnaissait), l'originalité de la présente approche tient
dans le fait que les développements correspondants sont plutôt simples parce qu'ils
sont calqués sur ceux de la mécanique classique.
1.4 - Mécanisme de courbure des rayons lumineux
Pour vérifier cette nouvelle méthode que constitue la Relativité par la Force, nous
marcherons dans les traces d'Einstein en calculant notamment la déviation des
rayons lumineux par le Soleil et l'avance du périhélie de Mercure.
Nous allons commencer par une explication aussi intuitive que possible avec
toutes les limites d'une telle approche. Comparons un des mécanismes provoquant
la courbure de la trajectoire des rayons lumineux à celui qui pourrait dévier la
trajectoire d'une chenille marchant en ligne droite. Le mécanisme présenté ici, à
titre d'exemple, est fondé sur une notion temporelle qui n'est pas la seule à
intervenir dans la courbure des rayons lumineux.
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Relativité par la Force
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Trajet d'une chenille
En temps normal, dans un monde que l'on pourrait qualifier de normal (euclidien)
une chenille fait des pas de même longueur, cadencés à la même fréquence à
gauche et à droite : elle va en ligne droite.
Une chenille "normale" avance en ligne droite
Supposons que l'on ait mis un peu d'anesthésiant sur la piste réservée aux pattes de
droite. Ces dernières étant alors un peu endormies, la chenille fait maintenant des
pas de même longueur à gauche et à droite, mais la cadence des pas de droite est
ralentie. La chenille avance un tout petit peu moins vite à droite qu'à gauche.
Quelle trajectoire suit alors la chenille ? Bien sûr, elle va tourner lentement vers la
droite et ceci d'autant plus que la cadence des pas à droite est plus faible. Elle suit
un arc de cercle.
Si les pas de droite se font moins rapidement que les pas de gauche,
la chenille tourne à droite
Notons que si la chenille mesure ses pas, en plaçant une règle matérielle le long du
chemin, elle vérifie que chacun de ses pas a la même longueur que le précédent et
le suivant. Si elle se fie à son sens de la mesure du temps, et qu'elle ne sait pas
qu'elle est anesthésiée à droite, elle a le sentiment d'aller en ligne droite. Il en
serait de même si une "entité magique" faisait s'écouler le temps plus lentement à
droite qu'à gauche (sans que la chenille en ait conscience).
Bien que la chenille ait le sentiment d'aller en ligne droite (elle va effectivement
en ligne droite dans son propre espace, avec ses propres mesures de longueur et de
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temps), un observateur extérieur la voit tourner à droite (dans son espace
d'observateur où il est capable de mesurer des différences de cadences des pas
entre pistes).
Supposons maintenant qu'un observateur ait l'habitude de voir la chenille arriver
en ligne droite, toujours suivant la même direction. Imaginons qu'un jour soit
plantée, sur le chemin de la chenille, une tente circulaire ayant la propriété très
particulière de dispenser d'autant plus d'anesthésiant que l'on s'approche de son
centre. Ainsi sous la tente, si celle-ci était transparente, l'observateur verrait le
trajet de la chenille se courber. Mais si maintenant la tente masque la vue de
l'observateur, ce dernier saura quand même que la chenille a tourné, en observant
que la direction à la sortie de la tente n'est pas la même que la direction qu'il avait
l'habitude de voir empruntée par la chenille à l'entrée dans la tente.
Un observateur extérieur ne voit pas la marche de la chenille
sous la tente circulaire, mais il voit la déviation en sortie
Trajet de la lumière
Pour étudier le trajet d'un rayon lumineux lorsqu'il rase le Soleil, nous verrons
qu'il peut être comparé à celui de la chenille, en considérant les propriétés de
l'espace en présence de gravitation, lesquelles seront mises en évidence dans les
chapitres suivants. Notamment, les horloges sont d'autant plus ralenties que l'on
approche du Soleil ; ceci permet une comparaison avec "l'entité magique" dont il
était question pour la chenille.
De la même façon que l'on imagine facilement le mécanisme de courbure du trajet
de la chenille, on peut comprendre le mécanisme de déviation d'un rayon
lumineux près du Soleil analogue à celui de la chenille :
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Relativité par la Force
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- la lumière va en ligne droite dans son propre espace physique (avec ses propres
mesures de longueur et de temps), à tout moment et en tout lieu,
- pour un observateur lointain qui serait capable d'apprécier les changements de
vitesse d'horloge et de dimension des unités de longueur (règles), la lumière suit
une trajectoire courbe.
En fait, comme pour la chenille cachée sous une tente, un observateur extérieur
situé à grande distance du Soleil n'a pas accès au suivi permanent du trajet du
rayon lumineux. En revanche, il sait de quelle étoile lointaine provient la lumière,
et il connaît sa position en temps normal.
Lorsque le Soleil passe suffisamment près des rayons lumineux issus de cette
étoile lointaine, une déviation de ces rayons est observable du fait de la gravitation
du Soleil. La mesure de cette déviation est effectuée lors d'une éclipse de Soleil,
de façon à pouvoir observer l'étoile sans être ébloui par le Soleil.
Étoiles
Étoiles
Soleil
Lune
Terre
En temps normal, les étoiles 1
et 2 puis 2 et 3 sont vues avec
un décalage angulaire identique
depuis la Terre.
Terre
Lorsque les rayons de l'étoile 2
rasent le Soleil, ils sont déviés
du fait des modifications des
longueurs et du temps par la
gravité du Soleil. Sur Terre,
l'angle observé entre 1 et 2 est
diminué, l'angle entre 2 et 3 est
augmenté. L'éclipse due à la
lune permet d'observer les
étoiles sans être ébloui par le
Soleil.
Observation du décalage de la position des étoiles lors d'une éclipse de Soleil
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1.5 - Avance du périhélie de la planète Mercure
Kepler a observé que la trajectoire d'une planète est une ellipse fixe dans l'espace.
Dans le cas de la planète Mercure, le Soleil est situé à l'un des foyers de cette
ellipse. Le périhélie, qui correspond au point de la trajectoire le plus proche de cet
astre, se répète lors des révolutions successives, toujours au même endroit. Cette
fixité du périhélie est-elle vraiment une évidence ?
En mécanique classique, on trouve relativement facilement, à partir de la force
exercée par le Soleil sur la planète, l'équation de la trajectoire correspondante (cf.
chap. 12). On peut ainsi identifier cette équation avec celle d'une ellipse, ce qui
permet de déduire que le positionnement des extrema (périhélie et aphélie) est fixe
au cours des révolutions successives.
En mécanique relativiste, le calcul est plus complexe. Einstein a calculé la
variation d'angle polaire dΘ en fonction de la variation de distance dR. En
sommant toutes ces variations entre la distance du périhélie et celle de l'aphélie, et
en doublant ce résultat pour revenir au périhélie, il obtient la variation d'angle
polaire Θ lors d'une révolution complète. Cette variation est égale à 360 degrés,
plus un très petit angle ε qui constitue l'avance du périhélie.
L'aphélie (ou le périhélie) survient après une rotation de 360° de la planète ;
il avance à chaque révolution
Ainsi, lorsque les conditions de la mécanique classique sont satisfaites (loi de
gravité en 1/R2, force orientée en direction de l'astre attracteur), le périhélie et
l'aphélie sont fixes. Si ces conditions ne sont pas satisfaites, le problème se
complique et on observe un décalage progressif des axes de l'ellipse au cours des
révolutions. Mais au fait, l'équation de la trajectoire en relativité correspond-elle à
une vraie ellipse (dont les axes tourneraient) ? À défaut quelle est l'équation de
cette trajectoire ?
Pour répondre à la première question que nous nous sommes posée dans ce
paragraphe, il n'était donc pas évident que le périhélie et l'aphélie se reproduisent
de manière fixe en mécanique classique. Pour répondre à la question de savoir si
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Relativité par la Force
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la trajectoire relativiste est toujours une ellipse, vous trouverez la réponse au
chapitre 13.
Avec la Relativité par la Force, nous verrons immédiatement que la force en
relativité n'est pas centrale : elle n'est pas orientée vers l'astre. On ne sera donc pas
surpris a priori de voir apparaître des différences avec les résultats de la
mécanique classique. Celles-ci se manifestent notamment par le décalage
angulaire ε lors de chaque passage au périhélie.
1.6 - Exploration relativiste
Nous avons vu avec la chenille comment le temps peut faire évoluer sa trajectoire.
Nous allons ici élargir cette notion en nous "immergeant" dans un monde qui,
parce que les instruments de mesure évoluent en fonction du lieu où ils sont
placés, peut constituer une première approche du monde de la relativité générale.
Un monde surprenant
Des explorateurs viennent de découvrir un monde vallonné dans lequel les
habitants ne disposent que de matériaux mous. Ces derniers se plaisent à sculpter
des ballons à modeler pour en faire toutes sortes d'animaux, tels que des chiens,
des lions, des girafes.... D'autres, moins joueurs, gonflent ces ballons pour en faire
une sorte de mètre qu'ils comparent à une baudruche de longueur étalon : ils
peuvent ainsi mesurer leurs champs, leurs maisons... Certains ont même construit
des horloges : pour le balancier, ils utilisent une baudruche verticale, identique à
celle qui leur sert de mètre, au bout de laquelle ils attachent un poids. Chaque
battement d'horloge leur permet de rythmer leur temps.
Mètres et horloges sur le haut plateau (à gauche) et dans la vallée (à droite)
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Lorsqu'un habitant des montagnes descend dans la vallée avec ses ballons, ces
derniers rapetissent du fait de la pression atmosphérique accrue. Sa baudruche
mesurant le mètre est donc plus courte. Le balancier des horloges étant raccourci
dans la vallée, le temps s'y déroule plus vite qu'en montagne. Les explorateurs ont
observé un fait étonnant : la dimension des habitants diminue au même rythme
que la longueur du mètre raccourcit. Peu importe la raison de ce phénomène (les
habitants seraient-ils constitués de matériaux gonflés ?), l'important est qu'ils n'ont
absolument aucun repère local pour voir que leurs unités de mesures (mètre et
seconde) changent. Dans leur tête, ils vivent dans un monde dans lequel rien ne
bouge : tout est stable.
Je vous laisse imaginer que sur un haut plateau en altitude tous les habitants n'ont
aucune difficulté pour se donner rendez-vous à une heure donnée puisque toutes
leurs horloges battent au même rythme. Dans la vallée, les habitants d'une région
de même altitude n'ont pas non plus de difficulté pour établir des rendez-vous. Il
n'est pas besoin d'expliquer longtemps que les rendez-vous vont être beaucoup
plus difficiles à organiser entre les habitants des hauts plateaux et ceux de la
vallée. Mettez-vous à la place d'un chef de gare qui devrait établir et gérer les
horaires de trains entre ces deux régions...
Il n'est pas facile pour ces divers habitants de comprendre ce qui leur arrive.
Pourquoi ne peuvent-ils plus appliquer leurs règles de rendez-vous quand ils
changent d'altitude ? Et pourtant les instruments de mesure des hauts plateaux se
comparent sans difficulté à ceux de la vallée quand on les rapproche les uns des
autres. La difficulté vient du fait que ces habitants n'ont aucune conscience des
modifications de leurs unités de mesure en fonction de l'altitude, parce qu'ils n'ont
aucun autre repère que les baudruches étalon gonflées.
Gageons que si un "Einstein" se trouve parmi eux, il suffira qu'il leur explique que
leurs unités changent en fonction de l'altitude pour qu'ils trouvent une bonne
solution à leur problème. Par tâtonnements ou par méthodes scientifiques, ils
découvriront vite la solution.
Supposons qu'un habitant des hauts plateaux synchronise son horloge avec celles
de la vallée et remonte rapidement chez lui où il reste un mois : redescendant dans
la vallée, il observe un certain retard de son horloge par rapport à celles de la
vallée. S'il recommence en restant deux mois chez lui, il observe alors un
doublement du décalage de temps. Très rapidement, il déterminera le rapport à
établir entre le déroulement du temps de la vallée et celui du haut plateau, et ainsi
pourra-t-il commencer à établir des rendez-vous.
Pour illustrer les problèmes posés par les mesures de longueur, regardons un
habitant qui délimite, sur la partie pentue entre les hauts plateaux et la vallée, des
carrés de 1 mètre de côté pour planter ses salades.
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Relativité par la Force
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La figure suivante montre 3 carrés qu'il a tracés en partant de la gauche vers la
droite :
altitude la plus élevée
altitude la plus basse
Carrés de salades tracés sur la pente entre les hauts plateaux et la vallée
Observez la perplexité de cet habitant très méticuleux quand il se rend compte que
les côtés verticaux (autres que le premier) mesurent plus d'un mètre et qu'ils ne
suivent pas la ligne de plus grande pente. Rien ne se passe comme sur les hauts
plateaux. Tant qu'il n'aura pas établi un rapport dépendant de l'altitude, pour
compenser la contraction du mètre quand l'altitude baisse, cet habitant n'arrivera
pas à tracer des carrés qui ressemblent à des carrés.
Croyez-vous que ce soit un problème difficile ? A priori non : qu'il habite en
plaine ou en montagne, chacun d'entre nous sait utiliser des cartes géographiques.
Lors d'un voyage en montagne, nous ne sommes pas étonnés de voir que les
distances reportées sur la carte entre chaque ville ou village sont plus grandes que
celles qui sont mesurées sur la carte. Avec quelques mathématiques simples, on
sait calculer cet accroissement de distance en fonction de la pente des diverses
portions de terrain traversées (pente mesurée à partir des courbes de niveau).
Alors pourquoi les habitants des hauts plateaux n'arriveraient-ils pas à procéder
d'une manière analogue en établissant des rapports adéquats entre les mesures,
suivant qu'elles sont faites à telle ou telle altitude. Avec une carte dressée selon
des mesures "universelles" de référence, les habitants pourront alors utiliser toutes
les règles simples et les calculs qu'ils ont appris à gérer dans un espace "normal"
tel que le plan que constitue le haut plateau.
Notre monde réel
Dans notre monde réel, l'étude de la relativité générale ressemble beaucoup au
problème des baudruches car nous n'avons localement aucune conscience des
modifications de nos instruments de mesure lorsque l'on se déplace dans le champ
de gravité créé par un astre.
À grande distance de l'astre, la gravité est très faible et tout se passe comme dans
un espace "normal". Lorsque l'on s'en approche, des modifications du temps et des
longueurs apparaissent d'autant plus que la gravité augmente. Ainsi, si l'on veut
établir une correspondance de temps entre deux "habitats" à des distances
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différentes de l'astre (par exemple sur deux planètes différentes), il faut établir un
rapport correctif de temps entre ces deux habitats dépendant de leurs distances
respectives à l'astre. De la même façon, si nous voulons installer un maillage carré
dans l'espace, nous allons rencontrer des problèmes analogues à ceux qui sont
observés pour les carrés de salades ci-dessus.
Comment allons-nous résoudre ces difficultés ?
Nous venons de parler d'un voyage en montagne et d'une carte géographique qui
permet de calculer les distances réelles parcourues en utilisant en tous lieux la
pente (calculée à partir des courbes de niveau). Une telle carte n'existe pas en
grandeur réelle sur le terrain. Il s'agit en fait d'un espace virtuel "construit par
notre intelligence" en tant que projection des données du terrain sur un plan. Une
telle carte directement représentative du terrain existe au niveau de la mer : les
distances mesurées sur la carte correspondent alors exactement à celles qui sont
mesurées sur le terrain. Mais dès que l'on gravit une montagne à proximité de la
mer, la distance mesurée entre deux points n'est plus proportionnelle à celle
mesurée sur la carte : il faut tenir compte de la pente. Si la montagne était une île,
on pourrait dire que l'on sait parfaitement construire la carte géographique pour
toute la partie maritime et que par "notre intelligence" nous savons prolonger cette
carte à l'intérieur, dans la partie montagneuse, en imaginant que cette montagne
aurait été aplanie.
De la même façon, l'espace à grande distance d'une planète est pratiquement sans
gravitation. Il se comporte comme un espace "normal" auquel nous sommes
habitués (comme la mer de l'exemple précédent). Comme pour la carte
géographique, nous allons construire un espace virtuel "normal" en prolongeant,
vers l'intérieur, l'espace "normal" à grande distance. Cet espace peut alors être
considéré comme celui qui existerait sans la présence de l'astre et de sa gravité ; il
permet d'utiliser toutes les lois applicables à un espace "normal" avec des horloges
universelles battant au même rythme et des longueurs identiques en tous lieux. Les
temps et les longueurs réellement mesurés quand on considère à nouveau la
présence de l'astre (comme si on les mesurait sur la montagne de l'exemple
précédent) à diverses distances sont alors calculés par des rapports définis à
chaque distance de l'astre (comme le font les habitants avec leurs baudruches en
fonction de l'altitude).
Voilà, vous connaissez le "secret" pour tenir compte des variations de mesures
dans un champ de gravité. Ce secret consiste à tout faire pour réaliser les calculs
dans l'espace "normal" que nous venons d'imaginer parce que nous savons bien
raisonner et calculer dans un tel espace.
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