Mise en page 1 (Page 1)

publicité
ADHD - A LIFE-LONG PERSPECTIVE. COPENHAGUE, 6/04/06
Le TDAH,
une affaire d’adultes aussi
"Le trouble déficitaire de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) de l'adulte
ne fait l'objet de l'intérêt des chercheurs et des cliniciens que depuis peu, et il n'est
pas encore assez reconnu," affirmait le Pr Per Hove Thomsen (Aarhus, Danemark),
en guise de préambule à un symposium organisé à Copenhague par Novartis.
"On se rend compte de plus en plus de ce que le TDAH n'affecte pas que les enfants. Des études à long terme ont montré qu'une forte proportion des enfants présentant ce trouble continueront à présenter des symptômes à l'âge adulte,
ce qui aura un impact considérable sur leur carrière
académique, leur fonctionnement social, leur bien-être et
leur qualité de vie. Outre un risque augmenté de développer
des problèmes d'abus de substances et/ou de devenir des
criminels, les adultes souffrant de TDAH connaîtront aussi
un large spectre d'autres problèmes psychiatriques tels que
troubles de la personnalité, dépression, idées suicidaires."
On estime actuellement que le TDAH affecte de 3 à 5% de
tous les enfants, et qu'il passera à chronicité chez au moins
la moitié d'entre eux, c.-à-d. qu'il concerne 2 à 4% des
adultes. Si la plupart des enfants TDAH sont du sous-type
combiné, associant inattention et hyperactivité, certains
seront plutôt hyperactifs et impulsifs, et d'autres surtout
inattentifs, sans hyperactivité manifeste. Les filles sont plus
souvent de ce sous-type non-hyperactif, ce qui expliquerait
pourquoi elles sont moins reconnues, moins diagnostiquées,
et sous-représentées dans les études épidémiologiques.
La réalité du TDAH adulte
Les comorbidités, les déficits neuropsychiques, les études
familiales et génétiques, les études d'imagerie, les difficultés
fonctionnelles, l'efficacité du traitement, tout concourt à
soutenir la réalité de la continuité du TDAH à l'âge adulte.
L'héritabilité du trouble est d'environ 70%, l'une des plus
élevées en psychiatrie. Les études de génétique moléculaire suggèrent très fortement que certains gènes candidats
augmentent la susceptibilité au TDAH, notamment le gène
du récepteur D4 de la dopamine, le gène du transporteur de
la dopamine, le gène du récepteur D5 de la dopamine, le
gène SNAP25. Le schéma des déficits neuropsychologiques trouvés dans le TDAH impliquent les fonctions
exécutives et la mémoire de travail à court terme, expliqué
par une dysfonction du cortex frontal ou de régions se projetant vers le cortex frontal. Les études de neuro-imagerie
montrent des anomalies cérébrales structurelles et fonctionnelles dans le cortex frontal, le cervelet et les structures subcorticales. Des études d'imagerie, réalisées sur des enfants
atteints du TDAH et suivis jusqu'à l'âge de 20 ans, montrent
des différences persistantes au niveau du cerveau, ne se
normalisant pas avec l'âge. Par ailleurs, ces études ont aussi
montré que les médications stimulantes n'affectent pas la
croissance cérébrale. Le trouble déficitaire de l'attention est
supposé être lié à une dysrégulation catécholaminergique
de la dopamine et de la norépinephrine. Des études ont
montré une élévation de la densité du transporteur de la
dopamine dans le striatum. Or, il s'agit là du site d'action
des médications stimulantes utilisées dans le traitement
du TDAH. Il est à noter que les techniques de neuroimagerie ne sont pas des outils valides de diagnostic du
TDAH: les mesures d'imagerie ne sont ni assez sensibles ni
assez spécifiques pour pouvoir poser le diagnostic.
34%, d'une dépression majeure chez 35%, d'un trouble
bipolaire chez 10%, d'un trouble de l’apprentissage chez
20%, d'un trouble de l’humeur chez 20%, d'un trouble des
conduites chez 14%, d'une personnalité antisociale chez
10%, de tabagisme et d'abus de substances chez 20% à
50%. Des tics, notamment le syndrome de Gilles de la
Tourette, sont présents chez 11% des patients TDAH.
De l'enfant à l'adulte
"On pensait autrefois que les enfants victimes du TDAH
guérissaient en grandissant," poursuit le Pr Thomas Spencer
(Harvard Medical School, Boston, USA). "Jusqu'il y a une
dizaine d'années, la validité du TDAH chez l'adulte était controversée. On estime maintenant que la majorité de ces
enfants continueront à avoir d'importantes difficultés liées
au TDAH à l'âge adulte." Les études montrent que ces
adultes sont à risque d'un moindre statut socioéconomique, de plus de difficultés professionnelles, de
changements d'emploi plus fréquents, de divorce, d'implication dans des accidents de la route, d'abus de substances et
d'abandon des études.
Avec l'âge, les manifestations extériorisées et dérangeantes
du TDAH, comme l'hyperactivité, diminuent. C'est sans
doute pourquoi le TDAH de l'adulte est resté longtemps plus
caché et sous-diagnostiqué. De leur côté, les difficultés de
l'attention persistent, mais elles peuvent devenir plus évidentes en termes de déficits de fonctions exécutives, telles
que la gestion des tâches multiples et la gestion du temps.
Hyperactivité
L'hyperactivité de l'enfant se métamorphosera en nervosité
et impatience chez l'adulte. Ce dernier sera souvent un
workaholic, à l'emploi du temps surchargé, très bavard,
débordant d'activité, ce qui créera des tensions sociales et
familiales.
Impulsivité
L'impulsivité deviendra un manque de tolérance à la frustration. La personne perdra aisément son sang-froid, changera
fréquemment d'emploi, sera perpétuellement à la recherche
de changement et de nouveauté. Elle aura des problèmes
avec ses supérieurs et ses collègues. Elle mettra souvent fin
à ses relations. Elle se verra fréquemment condamnée pour
excès de vitesse. Le médecin atteint de TDAH travaillera plus
volontiers au service d'urgences qu'en consultation de
médecine préventive.
Inattention
Le trouble de l'inattention soutenue se manifestera par de la
distraction lors des réunions de travail, par exemple. La personne n'écoute pas. Il ne s'agit pas d'un déficit de l'attention à proprement parler: la personne a du mal à trier les
stimuli, à faire attention à ce qu'il faudrait, au profit de ce
qui lui semble plus intéressant d'un moment à l'autre. Elle
aura tendance à la procrastination, pourra paraître lente et
inefficace, aura du mal à gérer son temps, à s'organiser.
Comorbidités
Abus de substances
Diverses études évaluent à 30% la prévalence du TDAH seul.
Il s'accompagne d'un trouble oppositionnel avec provocation chez 40% des patients, d'un trouble de l’anxiété chez
Une étude a montré que chez les patients TDAH sous traitement, 10% avaient un trouble de l'usage de substances,
alcool et autres drogues, ce qui est relativement similaire à
ce que l'on
observe dans la
population générale.
Chez les patients TDAH non
traités, cette proportion était de plus de 30%.
Intériorisation
L'évolution naturelle du TDAH vers l'âge adulte sera
mauvaise dans 40 à 60% des cas, avec notamment une consommation de drogues et un comportement antisocial.
"Certains des symptômes centraux du TDAH se modifient
lorsque l'enfant grandit," poursuit le Dr Søren Dalsgaard,
Aarhus (Danemark). "Vers 14 ou 15 ans, lorsque l'enfant
devient un adolescent, son éventuelle hyperactivité devient
plus subtile, moins dérangeante pour les autres. On le voit
moins quitter son siège et courir partout. Mais sa nervosité,
son agitation et ses pulsions intérieures continuent de plus
belle." L'inattention aussi évolue avec l'âge. En grandissant,
l'enfant a plus besoin d'un bon fonctionnement exécutif; les
difficultés d'organisation et de planning deviennent alors
plus importantes chez l'adolescent et l'adulte souffrant du
TDAH. Le manque d'inhibition de la réponse devient aussi
plus évident.
Criminalité
De même, alors que l'enfant TDAH a des problèmes à
soutenir son attention, l'adulte aura des difficultés à mener
une vie sociale soutenue. Il sera plus à risque de développer
d'autres troubles psychiatriques et d'être impliqué dans des
activités criminelles. Par rapport à la population générale,
une étude danoise a constaté une élévation du risque de
condamnation pour activités criminelles (RR: 5,6), pour vol
(RR: 5,9), pour violences (RR: 12,0), pour conduite en état
d'ivresse (RR: 12,4). Chez les hommes, il convient d'y ajouter
les agressions sexuelles (RR: 11,7), la possession illégale
d'armes (RR: 11,7), ainsi que les crimes sous l'influence
d'euphorisants, une particularité dans la loi danoise (RR: 7,6).
"Cette évolution naturelle des symptômes n'est pas incorporée dans les critères diagnostiques de l'ICD-10 et du
DSM-IV, qui sont destinés à l'évaluation des symptômes
chez l'enfant," conclut le Dr Dalsgaard. "Une difficulté de
plus pour le psychiatre dans le diagnostic du TDAH chez
l'adulte."
Rédaction: Roularta Medica.
Téléchargement