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Bulletin Financier ING Belgique SA Mars - avril 2004
Graphique 4 : Evolution des loyers et
des prix des habitations en Belgique
Sources : Stadim, FOD Economie, traitement ING.
prix des habitations
loyers
rapport cours/bénéfice (échelle de droite)
0,0%
2,0%
4,0%
6,0%
8,0%
10,0%
12,0%
14,0%
16,0%
95
105
115
125
135
145
155
165
1985 88 90 92 94 96 98 00 02
Il existe aussi une importante diffé-
rence entre les marchés financiers
et le marché immobilier en ce qui
concerne les coûts de transaction.
Les coûts de transaction élevés in-
hérents à une habitation ne sont,
en effet, pas contrôlables, tandis
que l’on détermine soi-même com-
bien de temps on conserve une va-
leur financière. Lors de la vente d’un
logement, l’acheteur paie des frais
de notaire et des droits d’enregis-
trement (10% ou 5% pour les ha-
bitations modestes en Flandre avec
une exonération des premiers
12.500 euros; 12,5% et 6% en
Wallonie). A ceci s’ajoutent encore
les éventuels coûts de l’agence im-
mobilière. D’aucuns argumentent
que ce sont justement ces coûts de
transaction élevés qui diminuent le
risque de formation d’une bulle
spéculative (dans la lignée du rai-
sonnement du prix Nobel Tobin vi-
sant à mettre un grain de sable dans
les transactions financières inter-
nationales). Le fait que le marché
immobilier soit moins liquide, moins
efficient et plus segmenté que les
marchés financiers a cependant
pour conséquence qu’une fois le
seuil des coûts de transaction fran-
chi, l’éclatement d’une bulle spé-
culative risque d’avoir des répercus-
sions beaucoup plus drastiques.
Enfin, pour acquérir un bien immo-
bilier, on emprunte souvent , ce qui
est de nature à augmenter signifi-
cativement le rendement immobi-
lier par le biais d’un effet de levier.
Ceci constitue toutefois une épée
à double tranchant : en cas de re-
pli des prix immobiliers, la valeur
du nantissement diminue et l’écla-
tement d’une bulle peut causer des
dégâts macroéconomiques beau-
coup plus importants puisque les
biens immobiliers sont davantage
financés par endettement que les
investissements financiers.
D’autre part, les avantages fiscaux
qu’un investissement immobilier
procure, tels que la déductibilité
fiscale du remboursement du ca-
pital et des intérêts des prêts hy-
pothécaires, la non-taxation des
plus-values et la limitation de la
réévaluation du revenu cadastral
aux habitations louées, ne sont pas
à négliger. Il n’est cependant pas
certain que ceci favorise spécifique-
ment l’acheteur d’une habitation :
cet avantage peut aussi disparaître
sous la forme d’une marge plus éle-
vée pour le vendeur. Cette problé-
matique joue également lors de
l’attribution de subsides à la loca-
tion aux plus défavorisés : il n’est
pas exclu que ce soient les proprié-
taires qui en profitent finalement
le plus (c’est ce que l’on appelle l’ef-
fet de capitalisation des avantages
fiscaux). Une autre politique sociale
consiste en la vente d’immobilier à
un prix inférieur à celui du marché
à des particuliers répondant à cer-
tains critères en matière notam-
ment de revenus. Une enquête3
révèle que pour les personnes affi-
chant au départ des dépenses de
logement assez considérables, la
probabilité est relativement élevée
qu’elles ne soient plus confrontées
par la suite à cette situation. Parmi
les chefs de ménage et les
cohabitants dont les dépenses de
logement dépassaient 20% du
budget lors du premier sondage
(1985), deux tiers n’étaient plus
dans le cas en 1992. Un suivi dy-
namique s’intéressant aux glisse-
ments de catégorie relativise donc
quelque peu les problèmes de paie-
ment ressortant de simples analy-
ses en coupe transversale.
Faible rendement
Pour déterminer s’il est question de
hausses de prix excessives dans le
domaine immobilier, il faut d’abord
trouver un critère permettant d’en
juger. Tout comme on utilise le rap-
port cours/bénéfice pour évaluer les
valorisations des actions, on peut
vérifier si le prix d’un logement est
encore proportionnel aux revenus
qu’il génère. Il faudrait alors con-
naître le loyer de chaque logement
ou type de logement. L’évolution
relative des loyers et des prix des
habitations telle qu’illustrée au gra-
phique 4 donne dans cette optique
une indication de la situation. Le
fait que les prix des habitations
aient crû beaucoup plus rapide-
ment que les loyers devrait ainsi
nous mettre la puce à l’oreille. Le
phénomène s’explique en partie
par la baisse des taux réels et par
la sévère réglementation régissant
les loyers : vu que les loyers des con-
trats en cours sont liés à l’indice des
prix à la consommation, leur
hausse est freinée. En outre, la
seule flexibilité en matière de prix
consiste à augmenter le loyer ini-
tial, ce qui décourage les ménages
de déménager. Il n’empêche que
l’augmentation plus forte des
loyers des nouveaux baux éloigne
le spectre d’une véritable explosion
du rapport cours/bénéfice (voir gra-
phique 4). On constate ainsi que
les loyers ont, en réalité, augmenté
plus rapidement que l’indice santé,
les propriétaires ayant conclu plu-
sieurs contrats de location succes-
sifs de courte durée, dont le loyer
de départ pouvait chaque fois être
fixé librement.
Depuis 1997, la liberté d’adapta-
tion du loyer initial a cependant
également été limitée en Belgique,
alors que dans la plupart des pays
européens, le marché de la loca-
tion a, au contraire, été libéralisé.
Entre 1997 et 2001, les loyers bel-
ges n’ont progressé que de 2% par
an, ce qui est à peine supérieur à
l’inflation (il n’y a qu’au Portugal
que les loyers ont moins augmenté
qu’en Belgique). Par conséquent,
nombre de propriétaires se sentant
privés de leur liberté ont décidé de
se séparer de leur bien immobilier.
Le nombre d’habitations louées
s’est dès lors replié structurellement
de 38% du total en 1980 à 28%
en 2000. Pourtant, un marché lo-
catif d’une certaine ampleur est
considéré comme une composante