SYSTEME FISCAL FRANÇAIS Licence 3 AES Leçon n° 2 (Notes de

UNIVERSITÉ PANTHÉON-ASSAS (PARIS II)
Année universitaire 2009-2010
SYSTEME FISCAL FRANÇAIS
Licence 3
AES
Cours de Philippe COSSALTER
Leçon n° 2
(Notes de cours)
L’impôt
Bibliographie :
Ouvrages classiques
- Stourm (René), Systèmes généraux d'impôts: impôt sur le capital, impôt sur le revenu, impôt
unique, en nature, capitation..., Paris, Guillaumin, 1893, 415 pp.
- Surrey (Stanley), Pathways to Tax Reform, The concept of Tax Expenditures, Harvard
University Press, 1973, 417 pp.
Autres références
- Godbout (Luc), L’intervention gouvernementale par la politique fiscaleLe rôle des
dépenses fiscales, Paris, Economica, 2006.
- Ribes (Didier), « Principe d'égalité », Dalloz, 2001 (23), somm., pp. 1842-1843.
SOMMAIRE
I. La notion d’impôt ....................................................................................................... 3
A./ Constitution de la notion ...................................................................................... 3
B./ Utilité de la notion................................................................................................ 5
1) Droit fiscal et droit de la sécurité sociale................................................... 5
2) Impositions de toutes natures et redevances .............................................. 6
3) Les taxes parafiscales................................................................................. 9
1. Le destinataire de la taxe........................................................................ 9
2. L’intérêt défendu.................................................................................. 10
L’absorption des taxes parafiscales par les impositions de toute nature.. 10
II. Les fonctions de l’impôt.......................................................................................... 11
III. Les formes de l’impôt ............................................................................................ 13
A./ Classification des impôts................................................................................ 13
1) La classification administrative ............................................................... 13
2) Les classifications techniques.................................................................. 13
3) Classification économique....................................................................... 14
a) La taxation des revenus........................................................................ 14
b) La taxation de la dépense..................................................................... 15
c) La taxation du capital........................................................................... 15
B./ Énumération des impôts ................................................................................. 15
1) Impôts d’État............................................................................................ 15
2) Les impôts locaux .................................................................................... 16
I.
L
A NOTION D
IMPOT
A./ Constitution de la notion
L’impôt est un fait avant d’être l’objet d’une science. Il répond à une nécessité.
L’étude scientifique de l’impôt n’est pas absente sous l’Ancien régime. Mais cette étude est
essentiellement le fait d’économistes, tels Adam Smith, qui étudient le système fiscal dans ses
aspects économiques et, dans une perspective normative, en prescrivent le meilleur usage
pour accroître la « richesse des nations ».
L’étude de l’impôt en tant que tel se concentre alors essentiellement sur la nature de ce
prélèvement.
De Montesquieu à Mirabeau, l’impôt est envisagé comme une « prime d’assurance ». Émile
de Girardin fait sienne cette théorie et l’expose avec la plus grande netteté : « … l’impôt doit
être la prime d’assurance payée par ceux qui possèdent pour s’assurer contre les risques de
nature à les troubler dans leur possession ou leur jouissance ».
Pour d’autres auteurs, tels que Proudhon, l’impôt est payé en contrepartie de services rendus :
« L’impôt est un échange. De même que, pour certaines utilités, l’échange se fait de personne
à personne, de même, pour certaines autres utilités, l’échange ne peut se faire que de
particuliers à une personne collective qui a nom l’État » (Proudhon (Pierre-Joseph), Œuvres
complètes, Paris, A. Lacroix, Verboeckhoven et Cie, 1850-1871, 26 tomes, tome 15, Théorie
de l’impôt, 1868, p. 40). Et ces services doivent être rendus à leur coût de revient, sans
bénéfice.
Bien que Proudhon condamne Girardin, il appartient au même courant qui lie l’impôt à une
contrepartie : la sécurité ou la force publique pour l’un, des « services publics » plus
diversifiés pour l’autre.
Cette vision de l’impôt comme échange ou prime d’assurance est bien évidemment liée à une
vision des fonctions de l’État : ce dernier ne doit prélever que l’impôt qui lui est nécessaire
pour remplir les fonctions qui lui sont assignées. Dans la vision de l’impôt-échange de
Proudhon, les services rendus par l’État, qui ne sont pas productifs de richesse, sont
secondaires et doivent être limités au strict minimum.
Cette vision de l’impôt et donc de la société se retrouve à l’article 14 de la déclaration des
droits de l’homme et du citoyen de 1789, qui établit que « Pour l'entretien de la force
publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable :
elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés »
.
Aucun de ces auteurs ne donne de définition de l’impôt, mais bien plutôt une conception
philosophique (malgré la prétention de Proudhon d’élaborer une véritable théorie universelle
de l’impôt). Certes, la définition de l’impôt n’a pu être donnée, à la fin du XIXème et au début
du XXème siècle, qu’au prix d’un cheminement idéologique. Mais celui-ci n’est pas exempt
de visées scientifiques.
Ce cheminement a d’abord été accompli par des auteurs tels que Stroum. René Stourm, dans
un ouvrage classique Systèmes généraux d'impôts dont la première édition paraît en 1893,
réfute les théories de l’impôt-contrepartie de Proudhon et de l’impôt-assurance de Girardin. Il
opte pour une vision de l’impôt-solidarité. Il n’existe pas en effet de contrepartie entre l’impôt
acquitté et un service rendu au contribuable.
« L’impôt est un prélèvement opéré sur les facultés individuelles des contribuables pour
subvenir aux besoins des services publics » (p. 25).
La voie était ouverte à Gaston Jèze, qui donnera de l’impôt sa définition la plus classique dans
son Cours de Finances publiques de 1936 (Jèze (Gaston), Cours de finances publiques,
LGDJ, 1936).
Selon l’auteur, l’impôt est une « prestation pécuniaire requise des particuliers, par voie
d’autorité, à titre définitif, et sans contrepartie, en vue de la couverture des charges
publiques ».
Le travail accompli par des auteurs comme Stourm et Jèze n’a pas seulement consisté à
donner une finition fonctionnelle de l’impôt. Ils permettent également d’en établir une
définition juridique, dont la pertinence ne s’est pas démentie depuis.
La notion d’impôt sous la plume de Gaston Jèze n’est plus en effet envisagée comme chez de
nombreux auteurs avant lui au sens large. Jusqu’au début du XXème siècle sont désignés par
le terme « impôt » tous types de prélèvements, en argent ou en nature, qu’ils soient perçus au
passage d’un pont ou d’une porte, ou qu’ils constituent un prélèvement proportionnel sur les
récoltes.
La définition moderne de l’impôt se nourrit d’une vision politique de la société, mais aussi de
l’observation. L’impôt ne se confond plus avec la redevance ou tout autre type de
contribution perçue par l’État. Le terme impôt est entendu dans un sens technique, et se
distingue de la taxe ou de la redevance.
Le plus significatif des critères retenus par Jèze est l’absence de contrepartie.
La redevance rémunère un service rendu par l’Administration publique.
La taxe parafiscale (qui a disparu depuis le 1
er
janvier 2003) et la cotisation sociale doivent
également être destinés à un organisme particulier et être la condition d’ouverture de certains
droits au néfice du contribuable, même si ces droits ne sont pas proportionnels au
prélèvement.
Les taxes fiscales et quasi-fiscales sont également destinées à financer un service particulier,
bien qu’il n’existe pas de proportion entre le service et le « prix » acquitté.
Mais commençons par le commencement, et examinons comme il se doit la question de
l’identification de l’impôt en nous référant à la norme suprême : la Constitution.
Aux termes de l’article 34 alinéa 6 de la Constitution, « La loi fixe les règles concernant : …
l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ».
Il est fréquent, lorsque l’on cherche à identifier la notion d’impôt en France, que l’on
utilise l’expression « impositions de toutes natures », qui est l’expression utilisée par la
Constitution elle-même.
Dans les développements qui suivent, les notions d’ « impositions de toutes natures » et
d’ « impôt » seront tenues pour équivalentes.
Le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État procèdent par élimination. Selon le Conseil
constitutionnel, constituent des impôts les prélèvements obligatoires qui ne sont ni des taxes
parafiscales, ni des cotisations sociales, ni des redevances. La définition des « impositions de
toutes natures », également appelées taxes fiscales est donc réalisée de manière négative, par
élimination (V. GAJF, 4
ème
édition, p. 5 ).
Il convient par ailleurs de noter qu’un même prélèvement ne peut pas être un « hybride »
(GAJF 4
ème
édition p. 5). Cette prohibition des hybrides est à la fois la cause et la conséquence
de la méthode éliminatoire : les catégories sont hermétiques.
Nous verrons en outre que cette frontière étanche est une nécessité eu égard aux substantielles
différences de régimes s’appliquant à ces différents types de prélèvements.
Bien que leur définition soit résiduelle, le champ d’application des impositions de toutes
natures est particulièrement large. Cette notion en a progressivement absorbé d’autres, et a
étendu son champ dans celui des cotisations sociales et d’une grande partie des prélèvements
que l’on aurait pu croire constituer des redevances pour services rendus.
B./ Utilité de la notion
Notons, et ceci n’est pas un détail, que la définition de l’impôt permet par voie de
conséquence de délimiter l’objet du droit fiscal.
Le droit fiscal est le droit de l’impôt. Il a pour objet d’étudier les sources et le contenu de la
norme fiscale, à l’exclusion des redevances dont l’étude relève plus généralement des finances
publiques et du droit administratif, et des cotisations sociales, dont l’étude relève plus
généralement du droit de la sécurité sociale.
Mais les branches du droit ne sont évidemment pas hermétiques.
1) Droit fiscal et droit de la sécurité sociale
Dès les années 1970, puis dans les années 1980, de manière répétée puis dans les années
1990 de manière systématique, les pouvoirs publics confrontés aux déficits croissants des
branches maladie et vieillesse de la Sécurité sociale, ont non seulement majoré les taux des
cotisations des régimes obligatoires ou en ont déplafonné les assiettes, mais encore créé des
prélèvements complémentaires.
Parmi ceux-ci, le plus notable est l’institution par la loi de finances pour 1991 d’une
contribution sociale généralisée au taux initial de 1,1 % comprenant trois contributions
frappant l’une les revenus d’activité et de remplacement, la deuxième les produits de
placement et la troisième les revenus du patrimoine, touts destinées à la Caisse nationale des
allocations familiales.
À la CSG dont le taux est aujourd’hui porté à plus de 7 % s’est ensuite ajoutée la Contribution
au remboursement de la dette sociale, CRDS.
Le Conseil constitutionnel a qualifié ces contributions d’impositions de toutes natures (v.
pour la CSG : Décision du 28 décembre 1990, 285 DC Loi de finances pour 1991, cons. 4.
Pour la Contribution sociale de solidarité : CC 30 décembre 1991, n° 91-302 DC, rec. 137,
RJF 1992.2.244).
Contrairement aux impôts, les cotisations sociales ouvrent droit à une contrepartie, même si
celle-ci n’est, évidemment, pas exacte.
Au-delà des simples questions de définition et de fonctions, les cotisations sociales ne sont
pas créées de la même manière que les impôts.
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