Compétitivité et régime de change en Europe Centrale
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RÉSUMÉ
La Hongrie, la République tchèque, la Pologne ont réussi leur stabilisation nominale
tôt dans la décennie et sont bien engagées dans la modernisation de leurs structures. Ce
processus est conduit dans des économies ouvertes et dans la perspective de l'intégration à
l'Union européenne. On étudie les performances de ces trois pays dans une approche macro-
économique qui s'intéresse aux conditions de la croissance à moyen terme.
On choisit le degré d'ouverture au commerce international comme indicateur
synthétique de la modernisation des structures productives et le taux de change réel comme
expression de la compétitivité. On construit un modèle qui relie le degré d'ouverture et le taux de
change réel aux variables représentant l'équilibre interne (la croissance réelle) et l'équilibre
externe (la balance commerciale rapportée au PIB). On compare les structures des trois pays en
estimant les relations du modèle et en simulant l'impact de la variation du taux de change réel
sur le double équilibre.
La mesure du taux de change réel en niveau et en évolution permet de conjecturer une
appréciation tendancielle, sauf peut-être en Hongrie, au fur et à mesure que la productivité
augmente dans les secteurs modernisés et que la structure des prix relatifs dans ces économies se
rapproche de celle des pays auxquels elles s'intègrent.
L'estimation des relations entre les prix et les fonctions du commerce extérieur d'une
part, la simulation d'autre part, permettent de repérer les différences entre les trois pays. La
Pologne a une faible élasticité-prix des exportations de sorte que sa croissance est moins
stimulée et sa balance commerciale moins améliorée que celles des deux autres pays pour une
même dépréciation réelle du taux de change. La Hongrie et la République tchèque se distinguent
par les différences d'intensité de concurrence sur les marchés intérieurs. Il s'ensuit que pour une
même dévaluation, les termes de l'échange s'améliorent en Hongrie, alors qu'ils se détériorent en
République tchèque et en Pologne. Enfin, la répercussion d'une variation nominale du taux de
change sur les prix intérieurs dépend de l'indexation entre salaires et prix. La rigidité nominale
parait très élevée en République tchèque, moins importante dans les deux autres pays, surtout en
Pologne où une politique de revenus a été mise en place.
Les caractéristiques macro-économiques se traduisent par un dilemme entre
désinflation et compétitivité qu'on retrouve dans nombre de pays émergents. L'inflation est sous
contrôle, mais elle est fort au dessus de la norme excessivement basse des pays de l'Union
européenne. Ces taux d'inflation sont compatibles avec les profits qui permettent de financer
l'investissement intérieur sans recours excessif aux entrées de capitaux. La politique de change
doit donc éviter des cycles de sous-évaluation et de surévaluation autour d'une tendance du taux
de change réel qui résulte des progrès de productivité et de la convergence de la structure des
prix relatifs vers celles des pays de l'Union européenne. Cela incite à recommander des régimes
de change de flottement géré ou de glissement d'une bande de fluctuation large. Comme les
entrées de capitaux sont trop sensibles aux hausses de taux d'intérêt, il revient aux politiques
budgétaires et éventuellement à des politiques de revenu de calmer la pression de la demande
excédentaire.