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Une recherche de la Commission inter-IREM (CII) didactique soutenue par
l’INRP : « Dynamiser l’étude des mathématiques dans l’enseignement
secondaire (collège et lycée) par la mise en place d’AER et de PER 1»
Yves MATHERON, ERTe 64 - GRIDIFE, IUFM Midi-Pyrénées, UMR-ADEF, IREM
d’Aix-Marseille
Robert NOIRFALISE, IREM de Clermont-Ferrand
Sommaire
Résumé ....................................................................................................................................... 2
I. Motifs de la recherche : redonner du sens aux mathématiques enseignées dans le secondaire.
.................................................................................................................................................... 2
1. Les mathématiques, discipline qui contribue à apporter un éclairage sur le monde ? ....... 2
2. « La désaffection pour les études scientifiques ». .............................................................. 3
3. Nécrose des objets d'enseignement et activités insignifiantes ........................................... 4
II Deux exemples de propositions pour un enseignement fondé sur des questions
problématiques, génératrices d’étude et de recherche. ............................................................... 6
1. Vers un autre type de processus d’étude ............................................................................ 6
2. Un premier exemple : une AER en 5e (élèves de 12 à 13 ans) .......................................... 7
3. Un P.E.R. pour le théorème de Thalès en 4e… et ce qui en découle ultérieurement ....... 10
Première étape .................................................................................................................. 12
Deuxième étape ................................................................................................................ 13
Troisième étape ................................................................................................................ 13
Quatrième étape ................................................................................................................ 15
Cinquième étape : Recherche d’une preuve du théorème de Thalès dans un cas
particulier. ........................................................................................................................ 15
III. Conclusion .......................................................................................................................... 16
Bibliographie : .......................................................................................................................... 17
1 Texte d’une conférence au II congrès international sur la Théorie anthropologique du didactique
(TAD) : »Diffuser les mathématiques et autres savoirs comme outils de connaissance et d’action ». Uzès, 31
octobre au 3 novembre 2007.
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Résumé
La Commission inter-IREM de Didactique a engagé cinq équipes, quatre au sein d’IREM et
une dans un IUFM2, avec l’appui de L’INRP3, dans une recherche intitulée « Dynamiser
l’étude des mathématiques dans l’enseignement secondaire (collège et lycée) par la mise en
place d’Activités ou de Parcours d’études et de recherches ». Dans cet article, nous présentons
tout d’abord les motifs qui nous ont conduit a proposé et développé cette recherche : ils
reposent pour un bonne part sur un constat insatisfaisant de l’organisation de l’enseignement
actuel nombre d’études d’objets mathématiques apparaissent insuffisamment motivées. A
titre d’exemple du travail réalisé, nous développons deux exemples de propositions pour un
enseignement dynamique fondé sur des questions problématiques et génératrices d’études et
de recherches ?
I. Motifs de la recherche : redonner du sens aux mathématiques
enseignées dans le secondaire.
1. Les mathématiques, discipline qui contribue à apporter un éclairage sur le monde ?
En 2005, les rédacteurs des programmes de mathématiques pour le Collège français (élèves de
11 à 15 ans), notent en introduction : « A l’école primaire, une proportion importante d’élèves
s’intéresse à la pratique des mathématiques et y trouve du plaisir. Le maintien de cet intérêt
pour les mathématiques doit être une préoccupation du collège ». Est-ce à dire
qu’actuellement, intérêt et plaisir s’étiolent au fur et à mesure de la progression des élèves
dans leur cursus secondaire ? Cette appréciation relève-t-elle seulement d’un sentiment qu’on
pourrait croire nourri d’idéologie, et donc sujet à discussion et polémique ? Au contraire,
parce qu’il est objectivable, le samour des lycéens français pour les mathématiques lèves
de 15 à 18 ans) apparaît de façon nette à partir de la consultation de 1998. A cette époque, et
afin d’instruire une réforme du Lycée, près de 2 millions de lycéens remplissent un
questionnaire dont des synthèses partielles sont produites au niveau national. En 2005, un
échantillon représentatif de 10 000 de ces questionnaires est constitué et analysé par une
équipe de sociologues dirigée par Roger Establet4.
Nous retenons de ce dernier travail quelques traits saillants. Il apparaît tout d’abord que pour
les lycéens, les sciences ont avant tout un intérêt scolaire, et non culturel ; ce qui peut paraître
paradoxal quand ces mêmes lycéens se disent simultanément attachés aux disciplines qui leur
parlent du monde dans lequel ils vont entrer. Les sciences ne parleraient-elles plus du monde,
ou bien la partie du monde qu’elles décrivent ne relèverait-elle plus que d’un faible intérêt ?
Le graphique suivant fournit des indices pour apprécier quelques éléments du rapport aux
disciplines établi par ces élèves.
2 IREM de Bordeaux, Clermont-Ferrand, Marseille et Poitiers, IUFM de Toulouse. D’autres équipes dans les
IREM de Dijon, Montpellier et Nice, rejoignent également les cinq équipes qui ont initié ce travail. Nous avons
également des contacts avec des équipes belges et espagnoles qui ont des problématiques communes aux nôtres.
3 Voir une présentation du partenariat avec l’INRP sur le site :
http://educmath.inrp.fr/Educmath/partenariat/partenariat-inrp-08-09/Cdamperes/
4 Roger Establet, Jean-Luc Fauguet, Georges Felouzis, Sylviane Feuilladieu, Pierre Vergès, Radiographie du
peuple lycéen. Pour changer le lycée, ESF, Paris, 2005
3
Il représente, pour chacune des disciplines enseignées, la différence entre citations positives et
négatives. On peut noter qu’il est cruel pour les mathématiques et leur enseignement (op. cit
p.65). Elles arrivent bonnes dernières, avec 46 %, suivies en gatif par la physique et le
sport ; les sciences sociales obtenant quant à elles le meilleur score : + 56 %.
On a aussi établi la valeur que les lycéens attribuent aux mathématiques. Ennui et inutilité
prédominent, et l’importance de leur étude est trouvée dans leur nécessité pour réussir dans la
vie… professionnelle, et non dans l'éclairage qu’elles fourniraient sur le monde. Le contraste
est saisissant avec les proclamations des auteurs des programmes scientifiques du Collège :
« Elles [les mathématiques] se nourrissent des problèmes posés par la recherche d'une
meilleure compréhension du monde. »
2. « La désaffection pour les études scientifiques »5.
Ces dernières années ont vu l’émergence d’un débat vigoureux sur l’enseignement des
mathématiques, et plus généralement sur celui des sciences. Des formules telles que « la
désaffection pour les sciences ou pour les études scientifiques » en constituent des emblèmes.
Il conviendrait sûrement de regarder les chiffres de cette désaffection de plus près. On peut
néanmoins voir dans les conclusions du travail d’Establet et al. ce que l’on nommera
provisoirement « un désamour » pour l’étude des mathématiques. Les considérations
précédentes portent sur les lycéens français ; on pourrait croire le mal circonscrit à ce seul
pays. Il semble pourtant qu’il sévisse au-delà de ses frontières.
Un « High Level Group on Science Education », présidé par M. Rocard, a récemment remis à
la Commission européenne un rapport faisant le point sur l’état de l’enseignement des
sciences en Europe6. Après avoir relevé que l’enseignement scientifique est loin d’attirer les
foules européennes et que, dans de nombreux pays, cette tendance empire, certaines des
causes du phénomène sont mises en avant dans l’observation 3 : « The origins of this situation
can be found, among other causes, in the way science is taught ». Un site français, consacré à
5 Voir sur le sujet, l'étude bien documentée de Pierre Arnoux sur le site :
http://educmath.inrp.fr/Educmath/etudes/pierre-arnoux/
6 http://ec.europa.eu/research/science-society/index.cfm?fuseaction=public.topic&id=1100
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l’École, résume ainsi le rapport : « la recommandation principale du groupe concerne un
revirement de l’enseignement des sciences dans les écoles pour passer d’une méthode
principalement déductive à une méthode basée sur le questionnement »7.
3. Nécrose des objets d'enseignement et activités insignifiantes
Sur bien des points, le constat rédigé en d’autres termes pour ce rapport rejoint par d’autres
voies la conclusion de l’analyse produite il y a déjà quelques années depuis la didactique des
mathématiques8.
La place accordée à l'étude des triangles au Collège et au Lycée est, à titre de seul exemple,
significative. Suivant la logique du questionnement préconisée par le rapport européen, mais
en l’appliquant à d’autres qu’aux élèves, qui parmi les professeurs de mathématiques peut-il
encore donner les raisons justifiant d’accorder tant d’importance à la géométrie du triangle
dans le secondaire ? Les connaissances professionnelles enseignantes ne sont sûrement pas
seules en cause. L’utilité des triangles pour des problèmes ayant trait aux affaires de hommes
(la triangulation précisément) paraît désormais socialement peu visible aux citoyens, et par
conséquent aux professeurs ; si tant est que la société considère que cette utilité demeure.
Certains contenus de programme semblent alors perdurer parce que dans la tradition,
l’héritage scolaire, que les enseigner apparaît « bel et bon ». Sur ce seul cas, et il y en a bien
d’autres, on a perdu l’une des questions fondamentales : par exemple « pourquoi l’honnête
homme du XXIe siècle se devrait-il de savoir que la somme des angles d’un triangle vaut
180°? », et son corollaire « en quoi est-ce utile de le savoir ? »
Même si cela est parfois dur à l’oreille de ceux qui ne veulent entendre, l’une des raisons du
« désamour » des lycéens pour les mathématiques non pas la seule mais en tout cas l’une
des principales tient aussi, pour une bonne part et en liaison avec la cause précédente, à la
forme actuelle de l’enseignement des mathématiques. Lorsqu’on observe cet enseignement
depuis la France, quelques phénomènes peuvent être relevés qui contribuent à expliquer pour
partie cette crise : « perte » des questions fondatrices de divers domaines des mathématiques
induisant en retour une perte de sens des mathématiques chez les élèves, cloisonnement
thématique « autisme thématique », a pu dire Y. Chevallard9 –, recours massif à l’ostension
déguisée10 qui ne trompe personne, et surtout pas les élèves à travers le recopiage et la
passation en classe d’activités dites « introductives » trouvées dans les manuels.
Beaucoup des activités mathématiques proposées aux élèves apparaissent non signifiantes,
purement formelles. A titre d’exemple, que l’on pourrait multiplier à l’envi, nous
reproduisons une page d'un manuel en ligne (pour la classe de 5e, élèves de 12 à 13 ans)
éclairante d’un enseignement où l’on cherche en vain le sens du savoir.
7 http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/18062007Accueil.aspx
8 Voir dans le bulletin APMEP n° 471, pages 439 à 461, le texte de la conférence d’Yves Chevallard donnée lors
des journées 2006 de cette association de professeurs de mathématiques (APMEP)
9 « Domaines » et « thèmes » sont ici à considérer dans le sens qu’ils ont en théorie anthropologique
10 Voir Berthelot R. & Salin M-H. (1992) : L’enseignement de l’espace et de la géométrie dans la scolarité
obligatoire, thèse de l’Université Bordeaux I.
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Par ailleurs, le coupage horaire des séquences confère à l'heure le rôle de mètre-étalon du
temps d'enseignement : les mathématiques rencontrées dans l’heure se doivent en
conséquence de former un tout. Si d’aventure une question problématique est soumise à
l’étude en début d’heure, l’impératif catégorique découlant de la « tyrannie de l’heure »
implique que la réponse soit donnée dans cette même heure, accompagnée si possible des
exercices d'entraînement qui lui sont relatifs. On conçoit que ce déterminant pédagogique,
dont on ne perçoit pas toujours l'importance, conduise souvent à des propositions d'activités
insignifiantes, dans lesquelles on engage plus ou moins les élèves, parce qu'il convient de le
faire dans le cadre du respect de la doctrine officielle, mais qui ne contribuent en aucune
façon à enclencher dans la classe une dynamique d'étude et de recherche.
La TAD fournit un outil permettant la classification des conditions et contraintes sous
lesquelles peut se dérouler l’étude d’un objet de savoir (Chevallard, 2005). On sait qu’en
suivant l’échelle des niveaux de co-détermination didactique, et en allant du générique vers le
spécifique, on rencontre les niveaux de la civilisation, la société, l’école, la pédagogie, la
discipline, le domaine, le secteur, le thème et le sujet. Les lignes qui précèdent ont permis de
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