Prise en charge initiale d`un patient polytraumatisé aux

MISE AU POINT
Prise en charge initiale d’un patient polytraumatisé
aux urgences
C. Savry
1
*, L. Dy
2
, P. Quinio
2
1
Samu 29, unité de déchocage, CHU la Cavale Blanche, boulevard Tanguy-Prigent, 29609 Brest cedex, France;
2
réanimation chirurgicale, CHU, 5, avenue Foch, 29200 Brest, France
(Reçu le 29 juin 2002 ; accepté le 19 juillet 2002)
Résumé
La prise en charge initiale du patient polytraumatisé est axée sur le dépistage et le traitement précoce d’une hémorragie
et de ses conséquences. Il n’y a pas de place pour l’improvisation et l’expérience de l’équipe a une incidence
pronostique. La concentration des moyens dans des structures spécialisées (trauma centers) répond à cette qualité de
prestation mais leur éloignement potentiel du lieu initial de l’accident, dans une pathologie où le facteur temps est
essentiel, donne aux hôpitaux de proximité un rôle déterminant dans la prise en charge initiale. En effet, tout retard peut
avoir une incidence pronostique péjorative immédiate mais aussi retardée par le biais de l’hypoperfusion tissulaire : ceci
justifie une réanimation symptomatique précoce dès la phase préhospitalière et une stratégie chirurgicale initiale
restrictive limitée au contrôle de l’hémorragie. Le cathétérisme artériel pour mesure continue de la pression artérielle est
l’élément central du monitorage. Un bilan radiologique initial simple au lit du malade permet de prendre des décisions
thérapeutiques urgentes adaptées ce qui lui confère une place de choix en amont du bilan exhaustif secondaire en
radiologie. L’échocardiographie et le Doppler transcrânien sont des techniques non invasives prometteuses dans
l’évaluation et le monitorage initial de ces malades. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS
choc hémorragique / évaluation initiale / traumatisme grave / urgence
Summary – Initial management of severe trauma patients at the emergency room.
The initial management of severe trauma patients is based on the search and early treatment of an hemorrhage and its
consequences. There is no room for improvising and extensive team experience gathered in trauma centers improves
outcome. But their potential distance from the accident scene in a pathology where time is essential gives a key role to
the nearest hospitals in the initial management. Indeed any delay can have short and long term pejorative consequences
because of tissular hypoperfusion which justifies advanced life-support procedures in prehospital setting and damage
control surgical approach. Arterial catheterization for continuous measurement of arterial pressure is the cornerstone of
monitoring. A simple and rapid initial imaging assessment at bedside enables appropriate emergency decisions before
further imaging assessment is performed. Echocardiography and transcranial Doppler ultrasounds are non invasive
promising techniques for initial assessment and monitoring of severe trauma patients. © 2002 Éditions scientifiques
et médicales Elsevier SAS
hemorrhagic shock / initial management / severe trauma / emergency
*Correspondance et tirés à part.
Adresse e-mail : [email protected] (C. Savry).
Réanimation 2002 ; 11 : 486-92
© 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés
S1624069302002840/SSU
La mortalitéhospitalière du patient polytraumatisésur-
vient essentiellement au cours des premières heures [1],
doùlimportance dune prise en charge rapide préhos-
pitalière et aux Urgences. Elle est essentiellement liéeà
une atteinte cérébrale et/ou une hémorragie. Elle néces-
site un plateau technique complet disponible 24 h/
24 h, capable de dépister et de faire face àla nécessité
dune hémostase chirurgicale et/ou radiologique inter-
ventionnelle en urgence. Une équipe rodée, bien coor-
donnée, multidisciplinaire est indispensable et permet
daméliorer le pronostic [2]. Le facteur temps est central
dans la prise en charge tant au plan du monitorage
initial que dans le choix raisonnédes investigations
complémentaires. Ce bilan doit seffectuer sans inter-
rompre la continuitéde la réanimation.
ORIENTATION ET ACCUEIL
La définition classique du polytraumatiséest un blessé
porteur de deux lésions traumatiques ou plus dont une
au moins met en jeu le pronostic vital. Le diagnostic
étant rétrospectif, toute victime dune situation trau-
matique susceptible de mettre en jeu le pronostic vital
est un polytraumatiséjusqu’à preuve du contraire. Doù
limportance de ne pas sarrêter aux seules conséquences
physiologiques immédiates visibles du traumatisme
mais aussi de connaître le mécanisme lésionnel et la
violence du traumatisme [3] pour décider dorienter en
salle de déchocage ces blessés dont la symptomatologie
initiale peut être parfois frustre.
Une concertation avec le Samu qui a engagéune
équipe de réanimation préhospitalière est très impor-
tante pour préparer laccueil en salle de déchocage et
mettre en alerte opérationnelle les différents interve-
nants (réanimateur, urgentiste, radiologue, chirurgien,
centre de transfusion). Àlarrivée du blessé, deux
situations sont possibles : il existe une insuffisance cir-
culatoire aiguërebelle àla réanimation préhospitalière
dans le cadre dun traumatisme ouvert avec identica-
tion de lorigine de lhémorragie (cas rare), cela justie
une hémostase chirurgicale immédiate an de lever
lhypothèque vitale ; dans tous les autres cas, une éva-
luation préalable en salle de déchocage est requise.
MONITORAGE INITIAL
Il nécessite des techniques non opérateur dépendantes,
les moins invasives possibles et dont la mesure puisse
être obtenue facilement et rapidement (tableau I).Cest
le monitorage hémodynamique précoce qui passe par
une surveillance de la fréquence cardiaque (FC), de la
pression artérielle moyenne (PAM) non invasive et de
loxymétrie de pouls. La mise en place dun cathéter
artériel (radial ou fémoral) pour mesure continue de la
pression artérielle doit rapidement être envisagée. Cest
un élément central du monitorage qui permet une
surveillance continue de la pression artérielle et facilite
les prélèvements biologiques. Par ailleurs, lanalyse des
variations de la pression artérielle liées àla ventilation
mécanique permet une estimation able des besoins
volémiques chez le patient en rythme sinusal, intubéet
ventilé[4]. Cet indice dynamique tenant compte non
seulement du volume circulant mais aussi des contrain-
tes liées àla ventilation mécanique a montréson intérêt
pour estimer le remplissage dans des situations dhypo-
volémie vraie [5].
Le monitorage continu de la pression télé-expiratoire
en CO
2
par capnographie est indispensable àla phase
initiale chez le patient polytraumatiséen ventilation
mécanique. Sous réserve de labsence de modications
de l’état respiratoire, cest aussi une méthode non inva-
sive de monitorage indirect des modications aiguësdu
débit cardiaque [6]. Son intérêtaétédémontréau cours
de larrêt cardiorespiratoire chez lhomme [6] et dans
des modèles animaux de choc hémorragique [7].Sa
facilitéde mise en œuvre en fait un outil complémen-
Tableau I. Conduite à tenir devant un patient polytraumatisé aux
Urgences.
Les 30 premières minutes : premiers soins et bilan en salle de
déchoquage :
- maintien du collier cervical rigide
- monitorage scopique (FC, PAM non invasive, SpO
2
, PetCO
2
)et
de la température
- contrôle des voies aériennes (intubation, ventilation), optimisa-
tion des voies veineuses
- cathétérisme de lartère radiale ou fémorale surveillance conti-
nue de la pression artérielle
- biologie en urgence
- bilan radiologique initial systématique (sur brancard) :
- radiographie du thorax de face (nécessitéde drainage ? thora-
cotomie ?)
-échographie abdominale (épanchement
péritonéal ? laparotomie ?)
- radiographie du bassin de face (fracture
grave ? angiographie ? embolisation ?)
- radiographie du rachis cervical de prol incluant C7/D1
±échographie cardiaque (traumatisme thoracique avec instabilité
hémodynamique)
±Doppler transcrânien
- TDM encéphalique sans injection si traumatisme crânien avec
signe de localisation clinique.
Malade stabilisé: bilan lésionnel :
- Bilan TDM : (selon signes dappel)
encéphalique sans injection
thorax, abdomen, pelvis, après injection : en un temps : TDM
spiralée
rachis ±topogramme osseux
- Bilan radiographique osseux : rachis complet systématique (poly-
traumatiséinconscient) + bilan radiographique orientéselon la cli-
nique
-ECG
Polytraumatisme àla phase initiale 487
taire possible dans l’évaluation hémodynamique ini-
tiale du polytraumatiséen état de choc. Enn, la prise
de la température est un élément incontournable étant
donnéla valeur pronostique péjorative de lhypother-
mie chez le polytraumatisé[8].
Lensemble de ce monitorage se fait parallèlement au
traitement symptomatique des détresses vitales.
TRAITEMENT SYMPTOMATIQUE DES DÉTRESSES
VITALES
La mise en place rapide de deux cathéters courts et de
gros calibre (16 ou 14 Gauge) dans le réseau périphéri-
que est systématique. En cas d’échec, la voie veineuse
fémorale est la plus sûre. Le traitement de la détresse
circulatoire implique un remplissage vasculaire. Le choix
entre cristalloïdes et colloïdes de synthèse nest pas
tranché. Deux méta-analyses sur des études comparati-
ves randomisées ne montrent pas deffet favorable en
terme de gain de mortalitépour lun ou lautre type de
solutévoire même une surmortalitédans le sous groupe
des traumatisés avec lutilisation des colloïdes [9, 10].
Mais lhétérogénéitéméthodologique des études ne
permet pas de conclure et rend nécessaires de nouveaux
essais contrôlés. Lutilisation rationnelle passe par
ladministration du solutéàune dose correspondant à
son espace de diffusion. La perfusion de volumes impor-
tants participe àla survenue dune hypothermie qui
peut être prévenue efficacement par lutilisation dun
réchauffeur.
Le mélange sérum saléhypertonique (SSH) associéà
un dextran (Rescueowt) est un solutéintéressant pour
ses effets dexpansion du volume plasmatique et ses
propriétés veinoconstrictrices ainsi que sur la contrac-
tilitémyocardique. Lhypernatrémie quil induit en
limite la posologie (4 mL.kg
1
non renouvelable) mais
permet un remplissage vasculaire avec de faibles volu-
mes. Comparéàlutilisation de solutions isotoniques, il
naméliore pas signicativement la mortalitédu poly-
traumatiséen état de choc hémorragique [11].Ilnya
pas d’étude disponible comparant SSH et colloïdes.
Lutilisation associéedecatécholamines en phase ini-
tiale peut aider àcorriger une hypotension délétère
notamment en cas de traumatisme crânien associé[12].
La stratégie transfusionnelle est précisée ailleurs. Des
mesures thérapeutiques symptomatiques non médica-
menteuses doivent être associées autant que possible :
gestes dhémostase sur des hémorragies extériorisées,
utilisation dun pantalon antichoc pour les victimes en
état de choc hémorragique rebelle dorigine sous-
diaphragmatique.
La prise en charge de la détresse respiratoire passe par
une intubation trachéale avec ventilation contrôlée
dindication large. Il en est de même pour la détresse
neurologique qui impose un contrôle des voies aérien-
nes (donc de la capnie) lorsque le score de Glasgow
(GCS) inférieur ou égal à8 et un soutien de la pression
artérielle andeprévenir la survenue de lésions cérébra-
les secondaires dorigine systémique [13].Enn, la
suspicion dun traumatisme du rachis rend obligatoire
le port dun collier cervical rigide chez toute victime
suspecte de polytraumatisme jusqu’à preuve radiologi-
que du contraire.
BILAN BIOLOGIQUE INITIAL
Il se limite aux examens requis en vue dune transfusion
chez le sujet en instabilitéhémodynamique : hémo-
gramme, groupe sanguin, rhésus, recherche daggluti-
nines irrégulières, hémostase (numération des
plaquettes, taux de prothrombine, brinogène). Les
délais dobtention des résultats de lhémogramme ren-
dent intéressants le dosage extemporanéde lhémoglo-
bine (HemoCuet)oudelhématocrite (microméthode)
pour décider rapidement de lindication dune transfu-
sion. Il est possible de transfuser du sang de groupe O
rhésus négatif en labsence de groupage. Il en est de
même pour lhémostase où, mis àpart la numération
des plaquettes, les délais dobtention des facteurs de
coagulation sont encore plus longs, mais peuvent être
raccourcis par lutilisation de tests diagnostiques instan-
tanés[14].
La gazométrie artérielle a un intérêt pour apprécier
lhématose et adapter la ventilation mécanique.
Limportance de lacidose métabolique initiale a une
valeur pronostique chez le polytraumatisé[15].Le
dosage des lactates artériels permet dapprécier le degré
dhypoxie tissulaire et a un intérêt pronostique [16, 17].
Le ionogramme sanguin, le dosage de la myoglobine
et de la créatine phosphokinase (CPK) permettent de
quantier limportance des lésions musculaires et
dentreprendre précocement le traitement des consé-
quences dune éventuelle rhabdomyolyse. Si lisoen-
zyme MB des CPK peut s’élever en cas datteinte du
muscle squelettique, la spécicitécardiaque de la tro-
ponine I circulante en font le marqueur àutiliser dans
la recherche dune contusion myocardique [18].
STRATÉGIE DU BILAN RADIOLOGIQUE À LA PHASE
INITIALE
Dans le cas dun traumatisme crânien avec signe clini-
que dengagement cérébral, la pratique dembléedune
tomodensitométrie (TDM) encéphalique sans injec-
tion de produit de contraste est indiscutable pour éli-
miner un hématome extradural pouvant nécessiter un
geste chirurgical immédiat.
488 C. Savry et al.
En dehors de cette situation, le perfectionnement des
techniques dimagerie médicale pose la question de la
nature du bilan initial du polytraumatisé. Le choix
existe aujourdhui entre la pratique dun bilan lésionnel
primaire standard préalable «au lit du malade »(com-
prenant une radiographie du rachis cervical de prol,
une radiographie du thorax de face, une radiographie
du bassin de face et une échographie abdominale) avant
un examen TDM ou deffectuer demblée une TDM
spiralée«corps entier ».
Bilan standard au lit du malade
Le principe du bilan standard vise àdétecter rapide-
ment (en moins de 30 minutes) des lésions en général
de nature hémorragique mettant en jeu le pronostic
vital et justiant dun traitement immédiat (tableau I).
Il présente lavantage de pouvoir se faire pendant le
temps incompressible de la mise en condition dèslarri-
vée en salle de déchocage et donc en préservant une
continuitédans les soins de réanimation. Une étude
récente [19] aévaluélintérêt de la pratique dun bilan
radiologique standard (radiographie pulmonaire, radio-
graphie du bassin et échographie abdominale) au lit du
malade dans la décision de mesures thérapeutiques
urgentes. Ce travail monocentrique sur une population
de 400 patients adultes victimes dun traumatisme
fermésévère montre quil existe une excellente adéqua-
tion entre le bilan radiologique standard et la décision
thérapeutique prise en urgence (tableau II). Il montre
aussi que certaines variables cliniques (fréquence
cardiaque >105 b.min
1
, pression artérielle systolique
(PAS) <105 mmHg, GCS <13) sont significativement
associées àla nécessitédun traitement urgent. Cepen-
dant cette relation nest pas constante puisque 17
(16 %) des patients ayant eu un traitement urgent
navaient aucun des signes critères cliniques, hémody-
namiques et neurologiques. Même sil se base sur un
«interventionisme »chirurgical loin d’être indiscutable
[20], ce travail montre que le bilan radiologique initial
au lit du malade permet de prendre de bonnes décisions
thérapeutiques. Cela peut avoir une incidence sur cer-
tains centres hospitaliers qui ne disposent pas dun
plateau technique suffisant ou de ressources humaines
adéquates et qui peuvent, sur la base des résultats de ce
bilan lésionnel primaire, pratiquer une thérapeutique
urgente avant un transfert vers une structure de réfé-
rence. La radiographie du rachis cervical de prol peut
être avantageusement associée dans ce bilan initial bien
que la visualisation de la charnière C7/D1 savère régu-
lièrement difficile ce qui impose le maintien du collier
cervical rigide jusquau contrôle TDM de la charnière.
L’échographie abdominale bénéficie dun protocole
rapide adaptéàla traumatologie (FAST : Focused Asses-
sment with Sonography for Trauma [21]) dont lappren-
tissage est àla portéedemédecins non radiologues [22].
Il sagit dun examen ciblé, standardisé, de plusieurs
régions anatomiques abdominales àla seule recherche
dun épanchement intrapéritonéal. Ses sensibilitéet
spécicitédiagnostiques dans la détection dun épan-
chement péritonéal sont comparable àla TDM ou la
ponction lavage du péritoine [23]. Il permet de poser
lindication de laparotomie avec une grande abilité
[24]. Certains travaux ont montréque l’échographie
abdominale permet de diminuer le recours àla TDM
[25]. Cependant, cela expose àune sous évaluation de
lésions traumatiques potentiellement hémorragiques
des organes pleins [26]. Le recours secondaire àla
TDM pour lanalyse des lésions traumatiques des orga-
nes pleins est donc nécessaire.
Tomodensitométrie spiralée
La TDM spiralée est un moyen d’évaluation rapide du
polytraumatiséqui dépiste avec une grande précision
des lésions invisibles au cours du bilan standard [27,
28]. La technologie permet deffectuer très rapidement
(quelques minutes) en un passage et après une seule
injection de produit de contraste un scanner combiné
corps entier thoracoabdominopelvien [27]. Cette
séquence doit être précédée par des coupes TDM
encéphaliques sans injection de produit de contraste en
cas de traumatisme crânien associé. La TDM spiralée
est un outil diagnostique able adaptéàla détection de
la plupart des lésions traumatiques [27] y compris celles
de listhme aortique pour laquelle la valeur prédictive
négative des données TDM est de 100 % [27, 29].La
TDM spiralée a montréson intérêt diagnostique en
première intention chez le patient hémodynamique-
ment stable [30]. Chez le patient instable, lexamen est
Tableau II. Bilan radiologique standard et décision thérapeutique urgente (d’après [19]).
Traitement urgent Thérapeutique appropriée Abstention thérapeutique appropriée
Radiographie pulmonaire 78 (19 %)
a
78 (100 %) 320 (99 %)
Radiographie de bassin 8 (2 %)
b
5 (62 %) 392 (100 %)
Échographie abdominale 48 (12 %)
c
47 (98 %) 360 (99 %)
Les traitements urgents étaient :
a
un drainage thoracique et/ou une thoracotomie dhémostase ;
b
une artériographie des artères hypogastri-
ques avec embolisation,
c
une laparotomie exploratrice.
Polytraumatisme àla phase initiale 489
théoriquement possible étant donnéla rapiditédacqui-
sition, mais le temps incompressible de préparation, la
mobilisation du patient et la perturbation du cours de la
réanimation en font une pratique àrisque qui reste à
évaluer.
Place de l’échocardiographie
Il sagit dune technique non invasive disponible au lit
du malade qui présente un grand intérêt tant au plan
diagnostique des lésions myocardiques, péricardiques
et thoraciques quen terme de monitorage hémodyna-
mique. Au plan diagnostic, il sagit dune technique
alternative àla TDM pour lexploration des lésions du
traumatiséthoracique. L’échocardiographie transtho-
racique (ETT) a une valeur diagnostique supérieure à
celle de la radiographie du thorax pour le dépistage des
hémothorax (sensibilité: 96,2 %, spécicité: 100 %)
[31] Elle permet une détection able des épanchements
péricardiques. Si la pratique de lETT dans la détection
des épanchements pleuraux et péricardique peut sins-
crire comme une extension du protocole FAST de
détection des épanchements intrapéritonéaux, il nen
est pas de même pour la pratique de l’échocardiogra-
phie transœsophagienne (ETO) qui nécessite un opé-
rateur expérimenté. Plusieurs études ont montré
lintérêtdelETO dans la détection des lésions trauma-
tiques de laorte thoracique : lune [32] montre un léger
avantage par rapport aux techniques dangiographie,
dans la détection de lésions mineures dont limplication
clinique reste àdéterminer. LETO est aussi utile àla
détection des contusions myocardiques et permet den
gérer les conséquences hémodynamiques.
Aussi, lautre intérêt majeur de l’échocardiographie
est de lordre du monitorage : le recueil dindices
dhémodynamiques permet de guider la réanimation
cardiovasculaire : remplissage vasculaire, utilisation
damines pressives. La limite essentielle de lETO est le
caractère opérateur dépendant. Sa place dans la prise en
charge initiale des polytraumatisés reste donc àévaluer
par rapport àla TDM spiralée. En cas de traumatisme
thoracique décompensé, difficile àtransporter, elle
représente une alternative diagnostique de premier choix
permettant deffectuer une évaluation able au lit du
malade.
Électrocardiogramme (ECG)
Il garde son intérêt dans le diagnostic de la contusion
myocardique. Les décalages du segment ST ont la
meilleure valeur diagnostique. Malgréune faible sensi-
bilité(58 %), lECG a une spécicité(76 %) et une
valeur prédictive négative (90 %) élevées dans le dia-
gnostic dune contusion myocardique ce qui le rend
indispensable dans l’évaluation du traumatisédu tho-
rax. En outre, les anomalies ECG ont aussi une valeur
prédictive dans la survenue de complications cardiovas-
culaires précoces, en particulier des arythmies.
Doppler transcrânien
Leffet Doppler permet une estimation non invasive des
ux sanguins qui trouve un intérêt naissant en neuro-
traumatologie. Le Doppler transcrânien est prometteur
pour dépister précocement et rapidement les situations
de bas débit sanguin cérébral susceptibles de bénéficier
de thérapeutique symptomatique préventive [33].
PRINCIPES THÉRAPEUTIQUES INITIAUX
La mortalitépost-traumatique a une répartition trimo-
dale [34] comprenant :
une mortalitépréhospitalière attribuéeàdes lésions
léthales demblée;
une mortalitéhospitalière précoce (48 heures et sur-
tout avant la quatrième heure) liée essentiellement à
une atteinte cérébrale et/ou une hémorragie ;
une mortalitétardive par défaillance multiviscérale,
en rapport àdes phénomènes infectieux et inamma-
toires non spéciques.
Lhémorragie a ainsi des conséquences précoces en
terme hémodynamique [34], mais elle inuence aussi
l’évolution ultérieure du polytraumatisépar les consé-
quences inammatoires, immunitaires liées àune hypo-
perfusion [15, 17] ainsi qu’à la survenue de lésions
ischémiques cérébrales secondaires en cas de trauma-
tisme crânien associé[12].Cest dire limportance de la
précocitédu traitement du choc hémorragique. Si les
lésions neurologiques centrales sont rarement accessi-
bles àun traitement étiologique, lhémorragie et son
cortège de signes associés (insuffisance circulatoire aiguë,
hypocoagulabilité, hypothermie) représentent ainsi le
déterminant précoce essentiel du pronostic accessible à
la thérapeutique, déterminant sur lequel doit être axéla
prise en charge initiale.
Quels objectifs thérapeutiques ?
La réanimation symptomatique (cf. infra) est pratiquée
sans discontinuitédepuis la phase préhospitalière
jusquau contrôle de lhémorragie. Se pose alors la
question des buts àatteindre qui ne sont toujours pas
définis avec certitude. La correction symptomatique du
choc hémorragique est une question de dosage entre
«le trop peu »exposant àune hypoperfusion délétère et
lexcès inverse pouvant aggraver lhémorragie, générer
des troubles de lhémostase et compliquer la prise en
490 C. Savry et al.
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