MISE AU POINT
La Lettre du Neurologue - n° 3 - vol. III - juin 1999
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de baclofène, ou à la neurochirurgie fonctionnelle. Pour les
problèmes de spasticité très localisée, les injections muscu-
laires de toxine botulinique s’avèrent très efficaces (Barnes,
1997), au point de réduire les indications de la neurotomie
sélective.
LES TROUBLES VÉSICO-SPHINCTÉRIENS
Les troubles urinaires doivent faire l’objet d’une vigilance
constante en raison du retentissement possible sur le haut appa-
reil urinaire. L’interrogatoire, l’examen clinique, la recherche et
la quantification d’un résidu vésical post-mictionnel, la bande-
lette réactive urinaire (leucocytes, nitriturie) éventuellement
complétée par un examen cytobactériologique des urines avec
compte de germes, doivent être pratiqués régulièrement. En cas
de difficultés, il faut recourir à un bilan urodynamique et mor-
phologique (échographique ou radiologique).
Le traitement de l’hyperactivité du détrusor (urgences miction-
nelles) passe d’abord par celui d’éventuelles “épines irritatives”
(infections urinaires, lithiase, constipation, etc.), puis par l’ad-
ministration d’anticholinergiques (oxybutynine : Ditropan®ou
Driptane®) et d’autres antispasmodiques (flavoxate : Urispas®;
toltérodine : Détrusitol®). Lorsque les anticholinergiques sont
contre-indiqués ou mal tolérés, on peut recourir aux instillations
vésicales de capsaïcine ou d’un analogue, la résinifératoxine. La
capsaïcine, extraite du piment, a un effet toxique sur les fibres
afférentes C de la paroi vésicale, mises en jeu dans le réflexe
spinal anormal du détrusor (Fowler et coll., 1994). Le risque de
ces techniques est de favoriser une rétention urinaire. Lorsque
les anticholinergiques sont insuffisants pour contrôler une nyc-
thurie, on peut supprimer les apports hydriques dans la soirée et
prescrire une ou deux pulvérisations nasales (10 à 20 µg) de
desmopressine au moment du coucher (Minirin®Spray)
(Eckford et coll., 1995). Il convient alors de surveiller le iono-
gramme sanguin. Les techniques d’électrostimulation à l’aide
d’électrodes vaginales, anales ou cutanées, voire intravésicale et
transuréthrale, facilitent le remplissage vésical en inhibant la
contractilité. L’électrostimulation relève encore de services spé-
cialisés, mais elle semble prometteuse.
Le traitement des troubles de la vidange vésicale (dysurie) varie
selon leurs causes. Les α-bloquants (alfuzosine : Urion®ou
Xatral LP®; tamsulosine : Josir LP®ou Omix®) diminuent les
résistances urétrales. Les antispastiques (baclofène, dantrolène)
réduisent l’hyperactivité du sphincter strié de l’urètre, mais avec
l’inconvénient d’agir sur l’ensemble de la musculature. Dans
tous les cas où un résidu vésical post-mictionnel est observé, la
pratique d’autosondages intermittents quotidiens doit être envi-
sagée. Elle permet d’éviter la distension de la vessie et en favo-
rise ainsi la rééducation. Elle apporte souvent une amélioration
considérable de l’autonomie et de la qualité de vie.
Très souvent, il y a combinaison d’une hyperactivité vésicale et
d’une insuffisance de vidange. Il est alors de règle d’associer les
techniques précédemment décrites.
Lorsque le contrôle reste insuffisant ou lorsque ces traitements
ne sont pas réalisables, il faut envisager la mise en place d’une
sonde à demeure ou des techniques plus invasives. Il s’agit
notamment de techniques de déafférentation vésicale (rhizoto-
mie sacrée sélective, cystolyse), qui transforment une vessie
spastique en une vessie aréflexique, de l’agrandissement vési-
cal, qui associe en général une cystectomie partielle sus-trigo-
nale à un patch iléal, et des techniques de dérivation urinaire,
soit de type Briker (urétérostomie cutanée transiléale), soit de
type poche de Kock ombilicale (néovessie intestinale avec réim-
plantation urétérale antireflux).
LES TROUBLES SEXUELS
Les troubles sexuels sont souvent négligés par les médecins.
Ils peuvent être primaires (atteinte génito-sexuelle de la sclé-
rose en plaques), secondaires (interférence de symptômes
comme la fatigue ou la spasticité), ou tertiaires (conséquences
psychologiques, sociales et culturelles pouvant interférer avec
la sexualité). Enfin, il ne faut pas négliger les effets secon-
daires des traitements (anticholinergiques, sédatifs, etc.). Chez
l’homme, les érections insuffisantes peuvent être améliorées
par la Yohimbine Houdé®, ou provoquées par les injections
intracaverneuses de prostaglandine E1(alprostadil :
Caverject®ou Edex®; moxisylyte : Erecnos®ou Icavex®). Les
instillations urétrales de gel de prostaglandine (alprostadil)
sont plus douloureuses et moins efficaces que les injections
intracaverneuses. Contrairement aux drogues érectogènes pré-
cédentes, le sildénafil (Viagra®) (inhibiteur de la cGMP-phos-
phodiestérase) ne provoque une érection qu’en réponse à une
stimulation mécanique. Il a de plus l’avantage d’une bonne
efficacité, d’une administration orale, et présente peu d’effets
secondaires (Goldstein et coll., 1998). Les résultats de son uti-
lisation dans la sclérose en plaques restent préliminaires.
Enfin, la chirurgie permet l’implantation de différents types de
prothèses.
Chez la femme, les moyens médicamenteux sont plus limités.
La sécheresse vaginale relève des gels lubrifiants. La spasticité
des muscles du sphincter du plancher pelvien ou des muscles
adducteurs repose sur les antispastiques.
Dans tous les cas, la psychothérapie et la rééducation sexuelle
du patient, ou mieux du couple, est indispensable.
LES TROUBLES DU TRANSIT
La constipation ne doit pas être négligée puisqu’elle est sus-
ceptible de constituer une “épine irritative” qui peut aggraver
notamment la spasticité, dont le traitement risque de dimi-
nuer le péristaltisme intestinal conduisant ainsi à un cercle
vicieux. Le traitement, non spécifique à la sclérose en
plaques, repose d’abord sur les conseils hygiéno-diététiques,
la verticalisation des patients qui ont perdu la marche, voire
les laxatifs provoquant le réflexe exonérateur (Éductyl®sup-
positoires). À l’inverse, le lopéramide (Imodium®) peut être
utilisé dans les défécations urgentes voire les incontinences
fécales.