LE RÔLE DE LA GENDARMERIE DANS LA RECONSTRUCTION DE
L’IDENTITÉ NATIONALE FRANÇAISE
EN ALSACE ET LORRAINE APRÈS LA PREMIÉRE GUERRE MONDIALE
Résumé de la conférence prévue le 12 novembre 2015
Comment réintégrer l’ex « Elsass Lothringen » dans la nation française, à la fin de la
Première Guerre mondiale ? La question est posée bien avant la fin de la guerre. Elle est
notamment traitée par la Conférence d’Alsace-Lorraine instituée, à Paris, dès 1915, pour
« étudier des solutions en vue du rattachement de l’Alsace-Lorraine à la France ». Parmi ces
« solutions » : la création d’une gendarmerie d’Alsace-Lorraine. Cette gendarmerie, préparée
dès mars 1917, expérimentée, pendant la guerre, dans les Territoires d’Alsace, est
officiellement créée sous l’appellation de « Légion de Gendarmerie d’Alsace et Lorraine » le
31 décembre 1918 (décret du 31 décembre 1918). Elle est placée sous les ordres du
lieutenant-colonel Albert Michel. Organisée en trois compagnies (Bas-Rhin, Haut-Rhin,
Moselle) et 109 brigades, elle est prévue à un effectif de 18 officiers et 1.000 gendarmes..
Comment cette légion de Gendarmerie très particulière va-t-elle contribuer à rétablir
l’identité nationale française en Alsace et Lorraine ? La réponse à cette question est l’objet de
cette conférence. Pour atteindre cet objectif de reconstruction d’une identité nationale
française, les actions de la gendarmerie d’Alsace-Lorraine, au cours des années qui suivent
immédiatement la fin de la guerre, vont prendre des formes particulières, multiples, adaptées à
la situation, mais inhabituelles pour l’institution. Elles convergent naturellement vers deux
grandes missions : le contrôle des populations et « la pénétration des idées françaises »,
autrement dit la propagande.
Le contrôle des populations
Début 1919, toute la population d'Alsace et Lorraine est sous contrôle. Le recensement
complet de toute la population, effectué nominativement dans chaque commune, tel que prévu
à l'article 1er de l'arrêté du 04 décembre 1918, est terminé en janvier. Le classement de la
population en 4 catégories, à l'aide d'une carte d'identité, est fait à l'issue. On ne peut ni entrer
ni sortir d'Alsace et Lorraine, ni y circuler, sans un titre, une pièce d'identité, un sauf-conduit.
Pour exercer le contrôle des mesures prises : les gendarmes de la légion d’Alsace et Lorraine,
pour l’essentiel.
Une autre forme de contrôle des populations va absorber ces gendarmes pendant une
bonne partie de l’année 1919 : le triage des suspects et indésirables. A la base du système : la
délation. Ensuite, les gendarmes sont impliqués à tous les stades de la procédure. A
l’instruction : 2.500 enquêtes effectuées de décembre 1918 à avril 1919. Aux arrestations ou
convocations devant les commissions de triage, aux expulsions…
« La pénétration des idées françaises »
A partir d’avril 1919, la propagande nationale va devenir l’une des tâches prioritaires
des gendarmes d’Alsace et Lorraine. Si les missions de contrôle des populations sont
imposées par les arrêtés en vigueur que doivent faire appliquer les gendarmes, la propagande
est un choix de leur chef : le lieutenant-colonel puis colonel Albert Michel. Ce chef
« Alsacien-Français-Gendarme », ancien chef du service du renseignement du 2ème bureau de
la 7ème armée, soutenu dans ses propositions par les deux commissaires généraux successifs,
va utiliser ses gendarmes comme des agents de propagande pour « faire pénétrer en Alsace et
Lorraine les idées françaises ». Pour atteindre son objectif, le colonel Michel élabore une
stratégie, définit des objectifs, met au point une méthode, précise les modalités d’exécution…
Il mobilise à cette fin, avec l’accord du commissaire général, d’autres administrations. Il
intervient, à travers la presse, dans des débats publics. Il organise, à l’occasion, de véritables
opérations de contre-propagande dans lesquels il implique ses subordonnés… Il ne faut pas
oublier qu’au 2ème bureau de la 7ème armée, le chef d’escadron Albert Michel était responsable
de la propagande.
Ces deux missions exceptionnelles (qui ne furent pas les seules), l’une imposée, l’autre
choisie, n’auraient pu être conduite avec succès, sans la configuration tout à fait particulière
de cette légion de gendarmerie d’Alsace et Lorraine. Son chef tout d’abord : Albert Michel, né
à Strasbourg en 1869, officier de gendarmerie, passionné de France, dont la plus grande partie
de la carrière se déroule près des frontières de l’Est, à Lunéville, à Belfort, à Remiremont, à
Lure,… qui rêve, pendant des années, de rentrer un jour à Strasbourg avec ses gendarmes. La
composition de sa légion ensuite. Habilement, le colonel Albert Michel se fera une légion à sa
main, composée, en 1922, de 1200 gendarmes dont 70% sont des Alsaciens ou des Lorrains.
Par ses actions, dont seulement quelques-unes sont ici très succinctement résumées,
les gendarmes de la légion d’Alsace et Lorraine ont largement contribué à la reconstruction de
l’identité nationale française en Alsace et Lorraine, après 1918.
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