FIVATE : le transfert impossible

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Journée FIVATE
FIVATE :
le transfert impossible
Bernard Broussin
Aquitaine Santé Médecine de la Reproduction, Ifreares Bordeaux, Polyclinique Jean Villar,
33520 Bruges
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Mots clés : FIVATE, transfert d’embryon
L
a situation clinique de transfert
impossible est une situation peu
fréquente. Dans un travail publié en
1998 sur notre expérience de huit ans
[1] nous avions dénombré pour 3 667
transferts 1 % d’échecs. Beaucoup de
travaux ont été publiés en vue de
l’amélioration de la qualité du transfert mais il est très difficile de connaître dans la littérature le taux exact
d’échec total de transfert rencontré. Il
faut peut-être rattacher à l’échec complet le transfert difficile qui s’accompagne d’un taux significativement
moindre de grossesses [1,2].
Les causes
Trois situations peuvent correspondre à un transfert impossible : soit
il n’y a pas d’embryon, soit les embryons ne sont pas transférables, soit
le geste est impossible pour des raisons techniques.
– Il n’y a pas d’embryon si la tentative a été abandonnée avant la
ponction (2,3 % en 2002 dans FIVNAT) en raison de la mauvaise qualité de la réponse à la stimulation ou
de l’absence de spermatozoïde, si la
ponction était blanche (2,6 % de 1998
à 2002 dans FIVNAT) ou enfin si
aucun embryon n’a été obtenu après
fécondation.
– Les embryons ne sont pas transférables soit en raison de leur qualité
insuffisante soit en raison de l’état phy-
30
sique de la patiente (en particulier en
cas d’hyperstimulation).
– Le geste est impossible ou très
difficile pour des raisons techniques.
Ce sont les anomalies anatomiques de
l’appareil génital féminin qui sont responsables de cette situation. Certaines
anomalies malformatives qui sont audelà de toute possibilité de grossesse
auront été écartées par le bilan préalable. D’autres qui auront été considérées comme accessibles à la possibilité d’une grossesse peuvent poser des
difficultés sérieuses : c’est le cas par
exemple de certains « utérus DES ». Il
existe aussi des difficultés en rapport
avec un état acquis en raison par
exemple d’une chirurgie du col ou
d’une synéchie cervicale secondaire à
une infection ou à une intervention
chirurgicale endo-utérine. Un certain
nombre d’échecs peuvent aussi être
en rapport avec une angulation excessive de l’axe cervico-utérin. Enfin il
semble nécessaire de considérer le
rôle de l’opérateur. Si le degré de difficulté du transfert paraît être un facteur indépendant dans la prédiction
des chances de grossesse [2], celle-ci
est certainement dépendante de l’opérateur [3, 4]. La composante opérateur
dépendance sous-tend les résultats de
nombreuses publications même si
cela n’est pas toujours exprimé clairement. Il suffit de regarder les discordances exprimées dans l’utilisation
des ultrasons pour guider le transfert.
Certaines équipes considèrent cette
mt médecine de la reproduction, vol. 8, n° 1, janvier-février 2006
Tableau 1. Comparaison de la qualité du transfert et du résultat de grossesses selon l’opérateur en 2005
Opérateur 1
Opérateur 2
Opérateur 3
Opérateur 4
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Transferts
Assez facile
9,9 %
12,2 %
11,1 %
11,5 %
Facile
87,2 %
82,7 %
77,8 %
77,0 %
utilisation très bénéfique et d’autres pas. L’analyse de leurs
résultats montre que ceux qui considèrent le guidage peu
utile ont sans le guidage un taux de grossesse par transfert
bien supérieur aux autres. Par exemple, entre les transferts
échoguidés ou non pour Kojima [5], les résultats sont
15,2 % contre 7 % de grossesses cliniques, pour Coruleu
[6] 25,3 % contre 18,1 % alors que pour Garcia-Velasco
[7], la différence est jugée non significative (30,6 % contre
26,3 %). Pourtant, cela n’est pas si clair que ça. En 2005,
dans notre équipe (Ifreares Bordeaux), 710 transferts ont
été pratiqués jusqu’au 10 décembre par dix praticiens
différents. Quatre opérateurs ont réalisé, à peu près à part
égale, 88 % des gestes. La qualité du geste a été appréciée
et notée (de façon indépendante) par le biologiste présent
selon les critères de FIVNAT (facile, assez facile, difficile
ou échec). Il existe des différences significatives entre les
résultats. Pourtant, quand on regarde le taux de grossesses,
ce n’est pas l’opérateur qui a le plus de facilité dans le
geste qui a les meilleurs résultats de grossesse par transfert
(tableau 1).
Les solutions
Le bilan pré-FIV comporte une exploration complète
de l’appareil génital féminin. Cette exploration est capitale
car c’est elle qui permet de suspecter les difficultés éven-
Grossesses/transferts
Difficile
2,9 %
5,1 %
11,1 %
11,5 %
22,7 %
35,9 %
28,2 %
31,9 %
tuelles qui risquent être rencontrées lors du transfert. La
simulation du transfert lors d’un cycle précédent est indispensable, bien que, dans notre expérience, elle ne rende
pas toujours compte des conditions qui sont rencontrées
lors du geste réel.
La dilatation cervicale, en cas d’impossibilité de passage du col par le cathéter, a été longtemps utilisée. Nous
continuons de penser, bien qu’un travail récent [8] semble
montrer le contraire, qu’un tel geste est délétère et inefficace, qu’il soit pratiqué avant ou au moment du transfert
(tableaux 2A et 2B).
L’utilisation de cathéters rigides préformés est préférable à toute instrumentation cervicale [9]. Cette pratique
peut se faire d’emblée si la difficulté est attendue (difficulté
lors d’une précédente tentative ou lors de la simulation
préalable) ou dès qu’un transfert facile n’est pas réalisable.
Enfin, en cas d’impossibilité physique totale de transfert par voie transcervicale, il reste le transfert d’embryon
par voie transmyométriale. Il s’agit d’une situation très
rare, en rapport soit avec l’absence d’orifice cervical (malformatif ou post-chirurgical), soit avec une difficulté anatomique insoluble. Notre expérience montre que dans
cette dernière situation le transfert au bloc chirurgical sous
neuroleptanalgésie est presque toujours possible (et le
plus souvent facile ou assez facile), ce qui fait que nous
n’avons plus utilisé le transfert transmyométrial depuis
Tableau 2A. Différences de répartition des difficultés des transferts embryonnaires
avec ou sans dilatation cervicale de 1989 à 1996 (p < 0,001)
Transfert normal
Parfait
Moyen
Difficile
Échec
3 497
381
183
14
85,8 %
9,35 %
4,5 %
0,34 %
Transfert après dilatation
170
60,5 %
57
20,4 %
43
15,4 %
11
3,9 %
Tableau 2B. Nombre d’embryons nécessaires pour obtenir une grossesse en fonction de la difficulté
et du mode (classique ou dilatation) du geste de 1989 à 1996
Parfait
Moyen
Difficile
Échec
Ensemble transferts
Transf. normal
10,4 emb./gross.
11,9 emb./gross.
14,9 emb./gross.
10,7 emb./gross.
Transf. après dilatation
14 emb./gross.
20 emb./gross.
21 emb./gross.
16,5 emb./gross.
mt médecine de la reproduction, vol. 8, n° 1, janvier-février 2006
p
<0,01
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Tableau 3. Résultats des transferts transmyométriaux par guidage échographique transvaginal (1992-1997)
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1992
1993
1994
1995
1996
1997
Total
32
nb. transferts
11
10
6
9
11
3
50
nb. embryons
28
30
19
24
33
10
144
l’année 2001. Malgré tout, il s’agit d’une technique qu’il
faut savoir garder dans son arsenal thérapeutique et qui
nous a permis d’obtenir des grossesses dans des situations
désespérées (tableau 3).
grossesses
1
3
2
2
1
0
9
% G./transf.
9%
30%
33%
22%
9%
0
18 %
nb.Embr./G
28
10
9,5
12
33
16
4. Rhonda MH, Bradley TM, Lynette S, David C, Prabir KC,
James HS. Pregnancy rates after embryo transfer depend on the
provider at embryo transfer. Fertil Steril 2000 ; 74 : 80-6.
5. Kojima K, Nomiyama M, Kumamoto T, Matsumoto Y, Iwasaka T.
Transvaginal ultrasound-guided embryo transfer improves pregnancy
and implantation rates after IVF. Hum Reprod 2001 ; 16 : 2578-82.
6. Coroleu B, Carreras O, Veiga A, et al. Embryo transfer under ultrasound guidance improves pregnancy rates after in-vitro fertilization.
Hum Reprod 2000 ; 15 : 616-20.
Références
1. Broussin B, Jayot S, Subtil D, et al. Difficult embryo transfers :
contribution of echography. Contracep Fertil Sex 1998 ; 26 : 492-7.
2. Toma´s C,
Tikkinen K,
Tuomivaara L,
Tapanainen J-S,
Martikainen H. The degree of difficulty of embryo transfer is an
independent factor for predicting pregnancy. Hum Reprod 2002 ;
10 : 2632-5.
3. Karande VC, Morris R, Chapman C, Rinehart J, Gleicher N. Impact of the « physician factor » on pregnancy rates in a large assisted
reproductive technology program : do too many cooks spoil the
broth? Fertil Steril 1999 ; 71 : 1001-9.
7. Garcia-Velasco JA, Isaza V, Martinez-Salazar J, et al. Transabdominal ultrasound-guided embryo transfer does not increase pregnancy rates in oocyte recipients. Fertil Steril 2002 ; 78 : 534-9.
8. Prapas N, Prapas Y, Panagiotidis Y, Prapa S, Vanderzwalmen P,
Makedos G. Cervical dilatation has a positive impact on the outcome
of IVF in randomly assigned cases having two previous difficult
embryo transfers. Hum Reprod 2004 ; 8 : 1791-5.
9. Mansour RT, Aboulghar MA. Optimizing the embryo transfert
technique. Hum Reprod 2002 ; 5 : 1149-53.
mt médecine de la reproduction, vol. 8, n° 1, janvier-février 2006
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