syphilis primaire et secondaire

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Annales de dermatologie et de vénéréologie (2008) 135S, F64—F70
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
I. MODULES TRANSDISCIPLINAIRES
Module 7 : Santé et environnement, maladies transmissibles
Item 95 — Maladies sexuellement transmissibles :
syphilis primaire et secondaire
CEDEF1,2
Objectifs pédagogiques
• Diagnostiquer une syphilis.
• Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.
Points clés
• Depuis quelques années, on assiste à une recrudescence de la syphilis.
• La transmission est sexuelle après tout rapport avec pénétration non protégé ; la
durée moyenne d’incubation est de 3 à 4 semaines.
• Aucun signe clinique n’est pathognomonique de l’origine syphilitique d’une
ulcération génitale.
• Un chancre syphilitique doit être systématiquement évoqué devant une ulcération
muqueuse (génitale, anale ou buccale).
• La roséole syphilitique ne doit pas être confondue avec une éruption virale ou une
toxidermie. La prescription d’un sérodiagnostic TPHA-VDRL est obligatoire dans ces
circonstances.
• Les éruptions de la syphilis secondaire sont polymorphes, il faut rechercher des
lésions papuleuses de couleur cuivrée.
• Des papules palmo-plantaires évoquent très fortement une syphilis.
• TPHA et VDRL peuvent être négatifs au tout début du chancre (7 premiers jours).
• TPHA et VDRL sont toujours fortement positifs au stade de syphilis secondaire.
• Le TPHA affirme ou infirme une tréponématose et c’est le VDRL qui en précise
l’évolutivité.
• Aucun examen sérologique ne peut différencier une syphilis d’une tréponématose
non vénérienne (pian, béjel. . .).
• Une fausse sérologie syphilitique (VDRL+, TPHA−) se voit dans certaines maladies
dysimmunitaires comme le lupus ou le syndrome des AC anticardiolipines.
DOI de l’article original : 10.1016/j.annder.2008.07.001.
La liste des auteurs et collaborateurs, publiée dans ce numéro, est également disponible à l’adresse suivante :
doi:10.1016/j.annder.2008.07.021.
2 Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J.M. Bonnetblanc).
1
0151-9638/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annder.2008.07.021
Item 95 — Maladies sexuellement transmissibles : syphilis primaire et secondaire
• Le traitement de la syphilis primo-secondaire
précoce est : benzathine benzylpénicilline
(Extencilline) 2,4 millions d’unités en une
injection IM.
• Le suivi biologique d’une syphilis traitée se fait
sur le VDRL quantitatif, qui doit diminuer puis se
négativer sous traitement.
• Les sujets contacts doivent être examinés et
traités.
• La syphilis est grave chez la femme enceinte
(risque
d’atteinte
fœtale
par
passage
transplacentaire après le 4e mois de grossesse).
• L’évolution de la syphilis précoce chez les patients
séropositifs pour le VIH est globalement habituelle
sur le plan clinique et sérologique. Cependant,
sa prise en charge sera faite au mieux par un
spécialiste, en particulier en cas d’allergie à la
pénicilline.
• Contracter une syphilis témoigne d’une sexualité
à haut risque. Vérifier la sérologie VIH, hépatites
B et autre IST. Une information sur la prévention
des IST est indispensable.
Des recommandations diagnostiques et thérapeutiques
ont été établies en 2006 par la section MST de la Société
française de dermatologie.
La syphilis est une infection sexuellement transmissible
(IST) due à un spirochète Treponema pallidum.
Il s’agit d’une maladie non immunisante très contagieuse.
Épidémiologie
Il existe une recrudescence de la syphilis depuis
quelques années en France et dans la majorité des pays
industrialisés. L’épidémie intéresse principalement les
homosexuels masculins dont plus de la moitié est
infectée par le VIH. Cette recrudescence de la syphilis
témoigne d’un relâchement dans la prévention des
pratiques sexuelles à risque.
La transmission de la syphilis est essentiellement
sexuelle. Elle peut se contracter après tout rapport
avec pénétration non protégée, y compris la fellation.
Ce sont les lésions muqueuses qui sont contagieuses
(chancre de la syphilis primaire et syphilides érosives
de la syphilis secondaire).
La transmission materno-fœtale peut survenir
surtout vers les 4e et 5e mois de grossesse.
Les transmissions post-transfusionnelles ou après
greffe d’organe sont possibles mais très marginales.
Classification de la Syphilis
On distingue :
• la syphilis précoce : elle regroupe la syphilis primaire,
la syphilis secondaire et la syphilis sérologique précoce
(découverte d’une sérologie syphilitique positive sans
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lésion clinique datant de moins d’un an) ;
• la syphilis tardive : elle regroupe la syphilis tertiaire et
la syphilis sérologique tardive (non datable ou datant de
plus d’un an).
Le diagnostic de syphilis primaire est souvent méconnu :
• lorsque le chancre n’est pas visible (chancre vaginal,
chancre du col utérin, chancre anorectal, chancre pharyngé) ;
• au stade de syphilis secondaire, le diagnostic n’est pas
toujours évoqué du fait du polymorphisme des lésions
cliniques (la syphilis a été qualifiée de « grande simulatrice »).
Les syphilis sérologiques précoces sont plus fréquentes
que les syphilis cliniques précoces.
Syphilis primaire
L’incubation est de durée variable, en moyenne de
3 semaines.
La syphilis primaire est caractérisée par :
• un chancre au point d’inoculation ;
• une adénopathie satellite.
Le chancre est contagieux car il fourmille de tréponèmes.
Chancre syphilitique
Chancre
Le chancre est typiquement :
• une exulcération (ou érosion) ou plus rarement une ulcération muqueuse (Fig. 1) ;
• de 5 à 15 mm de diamètre en moyenne ;
• unique, plus rarement multiple ;
• à fond propre, rosé ;
• induré : c’est le seul caractère sémiologique vraiment
évocateur. Il se traduit par l’impossibilité de plisser entre
deux doigts la surface de l’ulcération qui ne fait qu’un
bloc avec l’induration sous-jacente ;
• indolore (différent de l’herpès +++).
Aucune de ces caractéristiques n’est cependant pathognomonique. Un chancre syphilitique doit systématiquement être évoqué devant toute ulcération muqueuse aiguë
(génitale, orale ou anale) (Fig. 1).
Siège
Chez l’homme : le siège du chancre est assez électivement
dans le sillon balano-préputial, plus rarement sur le gland
ou sur le fourreau.
Chez la femme : le siège du chancre est le plus souvent
sur la partie externe de la vulve (petites lèvres, grandes
lèvres, fourchette), plus rarement vaginal et, (comme il est
indolore) passe alors volontiers inaperçu.
Dans les deux sexes, le chancre peut siéger sur :
• la muqueuse buccale ou pharyngée (fellation) ;
• la muqueuse anorectale.
Adénopathie satellite
Le chancre s’accompagne d’une adénopathie satellite non
inflammatoire (Fig. 2), le plus souvent unilatérale.
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I. MODULES TRANSDISCIPLINAIRES
Dans certaines localisations (col utérin, rectum),
l’adénopathie n’est pas cliniquement visible.
Évolution
L’évolution se fait vers la régression spontanée du chancre
sans séquelle en quelques semaines.
Si le patient n’est pas traité, il sera apparemment guéri
mais son état peut évoluer vers les stades plus tardifs de la
syphilis :
• environ 30 % des patients ayant présenté un chancre syphilitique vont présenter des signes de syphilis secondaire ;
• des patients non traités peuvent également évoluer vers
les stades de syphilis tardive (neurosyphilis) sans forcément présenter des signes de syphilis secondaire.
Figure 3.
Syphilis secondaire : roséole.
Syphilis secondaire
Sa durée est en règle inférieure à un an.
Elle est liée à la diffusion systémique du tréponème.
Elle est marquée par plusieurs éruptions cutanéomuqueuses entrecoupées de phases asymptomatiques de
quelques semaines ou mois. À ces « floraisons » s’associent
des signes généraux et parfois viscéraux d’intensité
variable.
Roséole syphilitique et syphilides papuleuses
Roséole syphilitique
La roséole syphilitique est la première éruption de la syphilis
secondaire (Fig. 3).
Elle passe souvent inaperçue car peu intense et transitoire (elle disparaît spontanément en 7 à 10 jours). Elle se
caractérise par :
• des macules rose pâle, de 5 à 15 mm de diamètre, disséminées sur le tronc ;
• une absence de signes fonctionnels à ce stade.
Syphilides papuleuses
Figure 1. Syphilis primaire : ulcération génitale à fond propre et
à base indurée.
Les syphilides papuleuses (Fig. 4) sont polymorphes, mais
la lésion élémentaire en est presque toujours une papule.
Leurs caractéristiques sont :
Figure 2. Syphilis primaire : adénopathie inguinale satellite d’un
chancre génital.
Figure 4.
Syphilis secondaire : syphilides papuleuses du tronc.
Item 95 — Maladies sexuellement transmissibles : syphilis primaire et secondaire
Figure 5.
Syphilis secondaire : syphilides papuleuses palmaires.
• une lésion élémentaire qui est une papule de couleur
« cuivrée » ;
• une fine desquamation périlésionnelle (collerette de
Biett) qui est évocatrice mais ni constante, ni spécifique ;
• les syphilides papuleuses :
◦ qui siègent sur le visage, le tronc ou les membres ;
◦ qui sont au nombre de quelques unes à plus d’une centaine ;
◦ qui peuvent être rarement nécrotiques, croûteuses ou
ulcérées.
Syphilides palmo-plantaires
Elles sont très évocatrices car (Fig. 5) :
• elles siègent électivement à cheval sur les plis palmaires ;
• elles sont inconstantes (environ 30 % des cas de syphilis
secondaire) et souvent discrètes.
Leur constatation suffit à porter le diagnostic.
Leur absence n’élimine pas le diagnostic de syphilis
secondaire.
Syphilides génitales et périnéales
Elles sont :
• indolores et non prurigineuses ;
• en général, multiples, molles, papuleuses ou érosives ;
• très contagieuses (+++).
La recherche de tréponèmes par le microscope à fond
noir est très souvent positive en cas de lésions érosives.
Autres symptômes
Symptômes cutanéo-phanériens plus trompeurs
On distingue :
• la fausse perlèche (papule commissurale fendue en deux
et non simple fissure sans relief du fond du pli) ;
• les lésions d’allure séborrhéique des sillons nasogéniens ;
• les papules acnéiformes du menton ;
• la dépapillation en aires de la langue (plaques
« fauchées ») (Fig. 6),
• la dépilation des sourcils ;
Figure 6.
chées ».
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Syphilis secondaire : érosions linguales en « plaques fau-
• l’ alopécie récente faite de plusieurs aires incomplètement dépilées sur un cuir chevelu intact (dite en
« fourrure mitée »).
Signes généraux
Ils traduisent la dissémination de l’infection. Ils sont le plus
souvent discrets mais peuvent être sévères :
• fièvre le plus souvent 38—38,5 ◦ C, pouvant atteindre
39—39,5 ◦ C ;
• céphalées (qui ne sont pas synonymes d’une atteinte neuroméningée) ;
• syndrome méningé ;
• raucité de la voix ;
• polyadénopathies ;
• hépato-splénomégalie (avec hépatite biologique cytolytique ou cholestatique) ;
• polyarthralgies ;
• douleurs lancinantes « osseuses » ;
• altération variable de l’état général ;
• manifestations ophtalmiques (papillite, uvéite, névrite
optique) justifiant un examen ophtalmologique systématique au cours des syphilis secondaires. Leur présence
modifierait le traitement au même titre qu’une atteinte
neurologique et nécessiterait un traitement par pénicilline G IV.
Diagnostic biologique
Le tréponème ne se cultivant pas in vitro, le diagnostic de
syphilis ne peut se faire que :
• par la mise en évidence du tréponème lui-même au microscope à fond noir ;
• ou indirectement, par la mise en évidence de la réponse
spécifique anticorps.
Examen au microscope à fond noir
L’examen au microscope à fond noir doit être pratiqué sur
des lésions érosives (chancre de la syphilis primaire, syphilides érosives muqueuses).
La sensibilité au niveau du chancre est de 50 %. Elle n’a
aucune valeur au niveau buccal du fait de la possibilité de
faux positifs (spirochètes saprophytes).
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I. MODULES TRANSDISCIPLINAIRES
Tableau 1 Interprétation simplifiée de la sérologie de
la syphilis.
Type
Interprétations
TPHA−
VDRL−
Absence de tréponématosea
Tréponématoseb très récente (incubation,
5 à 15 premiers jours du chancre)
Tréponématose guérie (traitée
précocement)
TPHA+
VDRL+b
Tréponématosea traitée ou
non, guérie ou non
TPHA−
VDRL+
Faux positif (cf. Tableau
11.II)
TPHA+
VDRL−
Tréponématose guérie
Tréponématose très précoce (premiers
jours du chancre)
Syphilis tertiaire très ancienne (rare)
a
Avec impossibilité de différencier la syphilis des tréponématoses non vénériennes.
b Quel que soit le titre du VDRL.
Diagnostic sérologique (Tableau 1)
Le sérodiagnostic de la syphilis est bien standardisé, peu
coûteux et fiable. Dans la majorité des cas, l’association
d’un test spécifique de tréponématose (TPHA) et d’un test
non spécifique (VDRL) est suffisante pour affirmer ou infirmer
un diagnostic de syphilis.
L’association TPHA-VDRL est le plus souvent prescrite en
France.
Il n’existe aucun test sérologique permettant de différencier les anticorps de la syphilis de ceux des tréponématoses
endémiques non vénériennes.
TPHA (Treponema pallidum Haemagglutination
Assay)
Objectif
La réaction est spécifique des tréponématoses.
Elle ne permet pas de différencier les anticorps syphilitiques des anticorps dirigés contre les tréponématoses
endémiques (zones tropicales) non vénériennes (pian, béjel,
pinta). (On devrait donc parler de sérologie des tréponématoses et non de sérologie de la syphilis).
Tableau 2
Cinétique
Le TPHA se positive autour du 8e —10e jour du chancre.
L’intensité de la réaction est cotée en croix. Il atteint
rapidement +++ et, en l’absence de traitement, restera à
+++ jusqu’à la fin de la vie. Il est donc à +++ durant la syphilis
secondaire et après le 8e —10e jour du chancre.
Le TPHA ne se négative que très inconstamment si le traitement a été bien conduit et si celui-ci a été institué dans
l’année qui suit le chancre. Au-delà de ce délai, le TPHA
restera positif.
Le titre du TPHA quantitatif n’est pas un bon marqueur
de l’évolutivité de la maladie, ni de la réponse au traitement
car il varie de façon importante d’un examen à l’autre pour
un même patient.
Seul le TPHA qualitatif (0 à +++) est donc intéressant par
sa positivité ou sa négativité.
VDRL (Venereal Disease Research Laboratory)
Objectif
Il met en évidence, dans le sérum du patient, des anticorps
anticardiolipidiques.
Le VDRL n’est pas une réaction spécifique des tréponématoses (+++).
Une sérologie syphilitique faussement positive (VDRL
positif, TPHA négatif) s’observe au cours de maladies dysimmunitaires, notamment au cours du lupus et du syndrome
des anticorps antiphospholipides, ainsi que dans certaines
maladies infectieuses à Mycoplama pneumoniae ou dans les
borrélioses (Tableau 2).
Cinétique
Le VDRL se positive en moyenne 8 à 10 jours après
l’apparition du chancre.
Le titre augmente ensuite rapidement pour atteindre
un plateau durant la phase secondaire, variable selon les
patients, généralement situé entre 256 U et 1 024 U.
Le VDRL reste donc très positif durant toute la phase
secondaire.
La surveillance biologique de l’efficacité du traitement
se fait sur le VDRL quantitatif (+++).
On considère que le traitement est efficace quand le titre
du VDRL est divisé par 4, 3 à 6 mois après le traitement.
En l’absence d’une décroissance de ce type, le traitement doit être repris.
Inversement, une recontamination syphilitique (la maladie n’étant pas immunisante) peut être diagnostiquée non
« Fausses sérologies de la syphilis » (causes non tréponémiques d’une positivité du VDRLa ).
Causes infectieuses
Causes non infectieuses
Bactériennes : lèpre, tuberculose, pneumococcie, leptospirose, borréliose, scarlatine Grossesse
Virales : varicelle, oreillons, mononucléose infectieuse, hépatite virale, rougeole, VIH Toxicomanie intraveineuse
Parasitaires : paludisme. . .
Hépatopathie chronique
Gammapathie monoclonale
Lupus érythémateux systémique
Syndrome des antiphospholipides
Cancers
a
Les positivités non tréponémiques du TPHA et du FTA sont exceptionnelles (lupus systémique, maladie de Lyme. . .).
Item 95 — Maladies sexuellement transmissibles : syphilis primaire et secondaire
seulement sur la clinique, mais aussi sur la remontée significative du VDRL quantitatif (titre multiplié au moins par
4).
Résultat des tests TPHA-VDRL au cours des
différents stades de la syphilis
Au cours de la syphilis primaire : le TPHA et le VDRL sont
négatifs dans les 7 premiers jours du chancre. Passé ce délai,
le TPHA est rapidement positif à +++ et le VDRL grimpe
progressivement pour atteindre son maximum vers le 3e —6e
mois de la maladie.
Au cours de la syphilis secondaire : les 2 tests (TPHA et
VDRL) sont toujours positifs.
FTA (Fluorescent Treponemal Antibody) et FTA
absorbé
Objectif
Le FTA est comme le TPHA, une réaction spécifique des tréponématoses.
Cinétique
Le FTA se positive vers le 5e jour du chancre. C’est donc le
premier test à se positiver, quelques jours avant le VDRL et
le TPHA.
En l’absence de traitement, le FTA reste positif à un titre
élevé tout au long de la phase primo-secondaire.
Son intérêt se limite :
• au diagnostic sérologique chez le nouveau-né en cas de
suspicion de transmission pendant la grossesse (FTA-IgM) ;
• et dans la syphilis primaire au tout début du chancre si
les 2 tests TPHA et VDRL sont négatifs.
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• la roséole peut faire évoquer une virose, une toxidermie
(exanthème maculeux) ;
• au visage, elle peut mimer une dermatite séborrhéique,
une acné, un psoriasis ;
• les lésions papuleuses peuvent simuler un psoriasis
(érythémato-squameux), un lichen plan, un eczéma.
Sérologique
Interpréter un sérodiagnostic tréponémique est facile si l’on
respecte le schéma suivant (Tableaux 1 et 2).
On commence par le résultat du TPHA :
• un TPHA positif (+++) signifie que le patient a contracté
une tréponématose (syphilis ou tréponématose endémique non vénérienne). On s’intéresse alors au VDRL dont
la positivité et le titre donnent une idée de l’évolutivité
de la maladie (cf. supra). Un titre élevé (16 unités par
exemple) témoigne toujours d’une maladie évolutive
(sauf si celle-ci est déjà traitée avec décroissance progressive du titre) ;
• un TPHA négatif (0) signifie que le sujet n’a pas contracté
de tréponématose ou qu’il en est guéri. Le VDRL est alors
lui-même négatif. Si le VDRL est positif, c’est qu’il s’agit
d’une fausse sérologie tréponémique, comme on le voit
au cours du syndrome des anticorps antiphospholipides
primaire ou secondaire (lupus) (Tableau 2) ;
• la seule exception à cette démarche s’observe dans les
sept premiers jours du chancre où les 2 tests (TPHA et
VDRL) peuvent être négatifs (intérêt du FTA).
Traitement
Recommandations générales
OMS
Diagnostic différentiel
Clinique
Syphilis primaire
Au stade de chancre, le diagnostic différentiel est celui des
autres causes d’ulcération génitale (item 343). Il faut systématiquement évoquer la syphilis devant toute ulcération
muqueuse, génitale, anale ou buccopharyngée.
Il faut éliminer :
• un herpès, ulcérations superficielles douloureuses à
contours polycycliques ;
• un chancre mou, terrain (Africain(e)), lésions multiples,
fond sale, douleurs (+++), adénopathies inflammatoires ;
• une donovanose, terrain (Africain(e)), lésions peu douloureuses granulomateuses ;
• une maladie de Nicolas-Favre, terrain (Africain(e), homosexuels), anorectite, ulcérations anogénitales, diarrhées
trompeuses.
Syphilis secondaire
La syphilis secondaire est la « grande simulatrice » et doit
être évoquée devant toute éruption maculo-papuleuse,
fugace ou persistante :
Ce sont celles de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) :
• devant une ulcération génitale, il ne faut pas attendre le
résultat du TPHA-VDRL pour traiter (+++) ;
• de même, l’examen au microscope à fond noir ne doit pas
retarder la mise en route du traitement.
Syphilis précoce
Si le diagnostic de syphilis précoce est évoqué :
• faire un examen clinique soigneux (rechercher notamment des signes neurologiques) ;
• rechercher une autre IST (gonocoque, C. trachomatis,
VIH, hépatite B. . .) ;
• faire une ordonnance pour un TPHA-VDRL ;
◦ soit traiter d’emblée, (approche probabiliste) ce qui
est souvent le cas devant une ulcération muqueuse, et
revoir le patient avec le résultat du TPHA et du VDRL ;
◦ soit revoir le patient avec les résultats (surtout si syphilis secondaire) ;
• ne pas hésiter à contacter un spécialiste dans certaines
situations délicates :
◦ femme enceinte,
◦ sujet séropositif pour le VIH,
◦ allergie à la pénicilline ;
• faire systématiquement un examen ophtalmologique en
cas de syphilis secondaire (une atteinte ophtalmologique
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éventuelle modifierait la prise en charge thérapeutique
au même titre qu’une atteinte neurologique).
Traitement des syphilis précoces (primaire,
secondaire, latente précoce)
Le diagnostic de « syphilis latente précoce » n’est acceptable que si le patient peut fournir une sérologie syphilitique
négative datant de moins d’un an, avant la découverte d’une
sérologie positive alors qu’il est asymptomatique.
Le schéma thérapeutique recommandé est le même pour
les 3 situations (syphilis primaire, secondaire précoce ou
latente précoce). En l’absence d’allergie à la pénicilline
et de contre-indication aux injections intramusculaires (cf.
infra), une injection intramusculaire unique de 2,4 millions
d’unités de benzathine benzylpénicilline G (Extencilline).
La réaction d’Herxheimer dans la syphilis primaire est
sans gravité.
Au stade de syphilis secondaire, une réaction
d’Herxheimer est possible quelques heures après l’injection.
Elle associe : fièvre, céphalées, myalgies, accentuation des
signes locaux.
Toujours bénigne, elle ne doit pas être interprétée
comme une allergie à la pénicilline.
Aucun protocole thérapeutique ne la prévient réellement.
Un antipyrétique peut être prescrit.
Il faudra prévenir le patient du risque et des caractéristiques de cette réaction.
En cas d’allergie à la pénicilline chez un patient ayant
une syphilis primo-secondaire, on peut remplacer la ou les
injection(s) de benzathine benzylpénicilline G par une ou
des cures de 14 jours de doxycycline (100 mg per os matin et
soir), sauf chez la femme enceinte et le patient séropositif
pour le VIH (indication d’une désensibilisation).
I. MODULES TRANSDISCIPLINAIRES
Rappelons enfin que contracter une syphilis témoigne
d’une activité sexuelle à haut risque (+++). La recherche
d’une IST concomitante est nécessaire, incluant la
recherche d’une primo-infection VIH (antigénémie p24,
charge virale plasmatique), hépatites B et C, gonocoque.
Sujets contacts sexuels
L’idéal est de pouvoir examiner cliniquement et de faire une
sérologie chez tous les sujets contacts sexuels, en se rappelant que si le contact est récent (jusqu’à 1 mois), la sérologie
peut être encore négative. Cela n’est pas toujours possible.
On peut être amené à proposer un traitement systématique des sujets contacts par une injection de 2,4 millions
d’unités de benzathine benzylpénicilline G.
Femmes enceintes
Le risque est celui de la syphilis congénitale. Classiquement,
le tréponème ne passe la barrière placentaire qu’à partir du
4e —5e mois de la grossesse.
Le traitement de la syphilis est identique, pour un même
stade de la maladie, à celui préconisé chez la femme non
enceinte. Certains auteurs préconisent une deuxième injection à J8.
Le suivi clinique et biologique est mensuel.
La surveillance échographique est essentielle à la
recherche de signes de fœtopathie très évocateurs.
En cas d’allergie à la pénicilline, un avis spécialisé
est obligatoire et le plus souvent une désensibilisation
à la pénicilline sera nécessaire. Les tétracyclines sont
contre-indiquées et les macrolides, passant mal la barrière
placentaire, ne sont pas préconisés.
Traitement de la syphilis du sujet séropositif
pour le VIH
Suivi du traitement
L’efficacité du traitement doit être contrôlée cliniquement
et biologiquement à 3 mois et à 6 mois.
Le suivi biologique se fait sur le VDRL quantitatif.
Le titre du VDRL doit être divisé par 4 (2 dilutions) à trois
mois et par 16 (4 dilutions) à six mois.
Si ce n’est pas le cas, l’avis d’un spécialiste est justifié.
Le VDRL doit être négatif un an après le traitement d’une
syphilis primaire, et dans un délai de 2 ans après traitement
d’une syphilis secondaire.
Le traitement standard par la pénicilline est le même en cas
de syphilis primaire ou secondaire du sujet séropositif pour
le VIH.
Une étude du LCR préalablement au traitement n’est pas
justifiée sauf en cas de manifestations neurologiques ou ophtalmologiques patentes (comme chez le patient séronégatif
pour le VIH), ce qui nécessiterait un traitement par pénicilline G IV : 20 millions d’unités/j pendant 10 à 15 jours.
Les cyclines ne sont pas validées chez le patient séropositif pour le VIH.
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