Mini-revue mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie 2010 ; 12 (3) : 249-55 Place des traitements urologiques dans la prise en charge de l’infertilité masculine Urological treatments in male infertility 1 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Nicolas Thiounn Jean-Philippe Wolf2 1 Service d’urologie, Hôpital Européen Georges-Pompidou, Université Paris-Descartes, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France <[email protected]> 2 Service de biologie de la reproduction, Hôpital Cochin, Université Paris-Descartes, 27 rue du Faubourg Saint-Jacques, 75014 Paris, France Résumé. Le diagnostic étiologique de l’infertilité masculine permet, dans certains cas de pathologies excrétoires ou sécrétoires, de proposer des traitements urologiques médicaux ou chirurgicaux qui peuvent améliorer la spermatogenèse et/ou le spermogramme et faciliter ainsi la prise en charge de ces couples. Dans d’autres cas, seul le prélèvement chirurgical de spermatozoïdes avec cryoconservation permet la réalisation d’une fécondation in vitro avec micro-injection (ICSI), avec plus de 50 % de chance d’obtenir une grossesse dans les causes excrétoires et moins de 10 % dans les causes sécrétoires. Mots clés : infertilité masculine, diagnostic, traitement, prélèvement chirurgical de spermatozoïdes, cryoconservation, ICSI, grossesse Abstract. Male infertility diagnosis allows treatment in obstructive or non-obstructive selected cases in order to improve spermatogenesis and sperm. Sperm improvement increases pregnancy results, naturally or with medically assisted procedure. When sperm cannot achieve intra-cytoplamic sperm injection (ICSI), surgical sperm retrieval is recommended for ICSI if positive. Procreation prognosis is according to etiology with more than 50% pregnancy rate in obstructive cases versus less than 10% in non-obstructive. Key words: male infertility, diagnosis, treatment, sperm retrieval, cryopreservation, ICSI, pregnancy D doi: 10.1684/mte.2010.0297 médecine thérapeutique Médecine de la Reproduction Gynécologie Endocrinologie Tirés à part : N. Thiounn. epuis les années 1990, la prise en charge de l’infertilité masculine, présente chez la moitié des couples infertiles [1], a été transformée par l’avènement de la micro-injection du spermatozoïde dans l’ovocyte (intra cytoplasmic sperm injection ou ICSI). L’ICSI permet d’obtenir des grossesses au sein de couples infertiles dans des situations très diverses, à tel point que le diagnostic étiologique de l’infertilité masculine et son éventuel traitement pourraient passer au second plan au profit d’une ICSI systématique [2, 3]. Le diagnostic étiologique des infertilités masculines reste d’actualité, car lorsque des traitements urologiques sont possibles, l’amélioration des paramètres spermatiques peut permettre d’éviter l’ICSI et d’avoir recours à des techniques plus simples comme les inséminations intra-utérines (IIU), voire d’obtenir des grossesses naturelles. Si l’ICSI reste nécessaire, l’optimisation des paramètres spermatiques, lorsque des traitements urologiques sont indiqués, peut améliorer ses résultats ou la rendre réalisable alors qu’elle était impossible. Les pathologies de la voie séminale et des glandes annexes peuvent être responsables d’infertilité masculine de type excrétoire (obstructif) ou inflammatoire. Cette infertilité masculine, présente chez la moitié des couples infertiles, peut également être liée à une atteinte sécrétoire ou mixte. Les traitements urologiques de l’infertilité masculine, notamment chirurgicaux, peuvent avoir pour but de restaurer l’intégrité de la voie séminale, mais ils peuvent permettre également d’améliorer les conditions de la spermatogenèse en cas d’atteinte sécrétoire (non obstructive) associée ou isolée. En cas d’échec de ces différents traitements, le recueil chirurgical de spermatozoïdes dans les atteintes excrétoires ou sécrétoires peut permettre la réalisation d’une assistance médicale à la procréa- mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie, vol. 12, n° 3, juillet-août-septembre 2010 249 Mini-revue Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. tion (AMP) grâce à l’ICSI, avec des pronostics de réussite nettement meilleurs pour les causes excrétoires que pour les causes sécrétoires où ils restent faibles. Nous aborderons les différentes formes cliniques, leurs diagnostics ainsi que leurs traitements urologiques selon qu’il s’agisse de pathologies excrétoires ou sécrétoires. Dans certains cas, il peut parfois s’agir de formes mixtes avec atteintes sécrétoire et excrétoire sur les deux testicules, voire d’une atteinte sécrétoire d’un côté et excrétoire de l’autre, rendant plus complexe l’étape diagnostique. 250 Diagnostic des différentes causes d’infertilité masculine Causes excrétoires L’atteinte excrétoire est soit congénitale, soit acquise ; et dans ces deux cas, le diagnostic repose sur l’association d’un volume testiculaire normal et d’un taux de FSH normal. Les antécédents sont parfois évocateurs : mucoviscidose avérée ou forme fruste suspectée à l’interrogatoire (épisodes de bronchite récidivante), infections urogénitales notamment épididymite et/ou prostatite, cure de hernie inguinale ou autres chirurgies de la voie séminale (vasectomie, exérèse de kyste de l’épididyme). À l’examen clinique, le volume testiculaire est normal ainsi que sa consistance. Typiquement, la voie séminale présente des anomalies : nodule ou dilatation de l’épididyme, dilatation des canaux déférents, absence d’une partie de la voie excrétrice (corps et queue de l’épididyme, déférent). Par ailleurs, le degré d’imprégnation androgénique est normal. Le spermogramme montre généralement une azoospermie et une hypospermie avec un volume spermatique pouvant être nettement inférieur à 2 mL. La biochimie séminale montre une diminution des marqueurs épididymaires : α1-4 glucosidase et carnitine en cas d’obstacle épididymaire. Le fructose est également abaissé ou absent, et le pH est acide en cas d’atteinte des vésicules séminales. Les marqueurs prostatiques sont perturbés et le pH alcalin en cas de prostatite chronique. Un taux élevé d’élastase est en faveur de la prostatite chronique ainsi que la présence d’un taux de leucocytes anormalement élevé (leucospermie). La spermoculture peut montrer des germes responsables de l’infection urogénitale chronique d’autant plus significative qu’il existe une leucospermie. La confrontation de la spermoculture à l’examen cytobactériologique urinaire sur le premier jet et en milieu de miction permet de localiser l’origine de l’infection lorsqu’elle est détectée. L’antibiogramme permet au mieux de guider le choix du traitement antibiotique. Les dosages hormonaux sont normaux : FSH, LH, testostérone. Les autres dosages hormonaux sont inutiles. L’échographie [4] des bourses permet de confirmer la normalité des testicules (taille et aspect du parenchyme) et peut montrer une dilatation épididymaire. L’échographie du carrefour urogénital recherche une anomalie des vésicules séminales (absence notamment en cas d’agénésie déférentielle ou au contraire dilatation et aspect pseudokystique), des canaux éjaculateurs (dilatation, calcifications intracanalaires), de la prostate (volume, aspect du parenchyme, vascularisation, calcifications, kystes centraux müllériens ou latéraux wolffiens pouvant comprimer les canaux éjaculateurs) et de la vessie (résidu postmictionnel). L’échographie des reins peut montrer une agénésie rénale homolatérale à une agénésie déférentielle unilatérale, une polykystose rénale parfois associée à un aspect polykystique des vésicules séminales, des cavités rénales dilatées et un rein détruit en cas d’abouchement ectopique de l’uretère dans la vésicule séminale, etc. Dans certains cas d’anomalies complexes du carrefour urogénital, une IRM avec si possible antenne endorectale et parfois une urétrocystoscopie peut permettre un diagnostic plus précis. En cas d’agénésie bilatérale des canaux déférents, une enquête génétique portant sur les éventuelles mutations du gène CFTR (cystic fibrosis transmembrane conductance regulator) est indispensable au sein du couple afin de connaître le risque de mucoviscidose chez l’enfant [5]. Une consultation de conseil génétique est nécessaire pour informer le couple. En cas de mutation du gène CFTR sans mucoviscidose connue, des explorations pneumologiques sont conseillées à la recherche d’une forme fruste de mucoviscidose (test à la sueur, différence de potentiel nasal, tomodensitométrie thoracique recherchant des signes de dilatation des bronches), notamment en cas d’épisodes bronchiques répétés. Au terme de ces explorations, il existe parfois des solutions thérapeutiques pour améliorer le spermogramme : réparation chirurgicale de la voie séminale, traitement d’une pathologie inflammatoire et/ou infectieuse de la voie séminale, traitement d’une cause sécrétoire associée (varicocèle). Dans les autres cas, il faut décider si la qualité de l’éjaculat permet d’envisager soit une grossesse naturelle en optimisant les rapports selon le bilan féminin, soit le recours à l’AMP par inséminations artificielles, par fécondation in vitro, voire par ICSI avec si besoin autoconservation de spermatozoïdes, notamment en cas d’obstacle intermittent. En cas d’azoospermie ou d’oligospermie incompatible avec une AMP, il faut envisager un recueil chirurgical de spermatozoïdes pour permettre le recours à l’ICSI. Causes sécrétoires L’atteinte sécrétoire ou testiculaire est également soit congénitale, soit acquise. Dans ces deux cas, le diagnostic repose sur la présence d’une hypotrophie testiculaire mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie, vol. 12, n° 3, juillet-août-septembre 2010 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. et un taux de FSH élevé. Exceptionnellement, la taille testiculaire peut être normale ainsi que le taux de FSH dans certains cas de blocage tardif de la spermatogenèse. Les antécédents de cryptorchidie, d’hypospadias ou d’autres anomalies urogénitales sont évocateurs d’une atteinte congénitale. Les antécédents d’orchite, notamment ourlienne après la puberté, de cancer avec chimiothérapie, de traumatisme des bourses ou de torsion négligée du cordon spermatique sont également évocateurs d’une atteinte sécrétoire acquise. L’examen clinique précise le degré d’hypotrophie testiculaire. Le volume normal d’un testicule varie de 15 à 25 mL. Le degré d’hypotrophie peut être corrélé à la sévérité de l’oligospermie. Dans les formes sévères, le volume testiculaire peut être réduit à moins de 3 mL. La consistance du testicule, qui est normalement ferme, peut être molle dans les atteintes sécrétoires. La présence d’une tumeur testiculaire doit être recherchée systématiquement à l’examen clinique et par échographie, car elle n’est pas exceptionnelle en cas d’hypotrophie testiculaire [6]. La voie séminale est normale (épididymes, déférents). Le reste de l’examen clinique recherche une varicocèle avec manœuvre de Valsalva en position debout, un hypospadias, un micropénis et apprécie le niveau d’imprégnation androgénique parfois diminué avec faible pilosité et, dans certains cas, répartition des graisses de type féminin (hanches) évocateur d’un syndrome de Klinefelter. Le spermogramme montre au maximum une azoospermie à volume conservé avec parfois présence de cellules germinales. Dans les autres cas, le spermogramme montre une oligospermie parfois sévère. L’importance de la nécrospermie, de l’asthénospermie et de la tératospermie doit être précisée. Le test de migration survie encore appelé test de sélection des spermatozoïdes mobiles permet de concentrer les spermatozoïdes mobiles et de donner ainsi la réserve fonctionnelle de l’éjaculat. La tératospermie peut se corriger lors de la sélection. L’isolement de plus d’un million de spermatozoïdes mobiles permet d’envisager le recours aux IIU en fonction du bilan féminin. Lorsque l’oligospermie est plus importante, il faut savoir si l’ICSI est possible à partir des spermatozoïdes de l’éjaculat. Il est parfois nécessaire de réaliser une autoconservation de spermatozoïdes préalablement à la tentative d’ICSI, notamment en cas de fortes variations du spermogramme. Les dosages hormonaux montrent typiquement une élévation du taux de FSH. Celle-ci est normalement inférieure à 5 UI/L. En cas d’atteinte sécrétoire, le taux s’élève en fonction de la sévérité de l’atteinte et peut atteindre jusqu’à 50 UI/L. Le taux de FSH peut être normal dans certains blocages tardifs de la spermatogenèse. Il est bas, inférieur à 1 UI/L en cas d’insuffisance hypothalamohypophysaire. Le taux de LH est généralement voisin de la normale. Il est élevé en cas d’insuffisance endocrine associée (testostérone basse). Il est bas en cas d’insuffisance hypothalamohypophysaire. Le taux de testostérone totale prélevé entre huit et dix heures le matin est souvent normal, mais il est parfois abaissé dans les atteintes sécrétoires sévères. Le taux d’inhibine B est souvent abaissé. Sur le plan génétique, le caryotype peut montrer des anomalies, la plus fréquente étant le syndrome de Klinefelter XXY, mais le syndrome de Turner est parfois présent (XO) et dans de rares cas, il peut s’agir d’un caryotype féminin XX. D’autres recombinaisons génétiques sont parfois rencontrées. En cas d’azoospermie, il est important de rechercher une microdélétion du chromosome Y qui peut conditionner la probabilité de trouver des spermatozoïdes dans le prélèvement testiculaire. Il est dans tous les cas important de faire part au couple des limites des connaissances médicales sur les anomalies génétiques impliquées dans les atteintes sécrétoires congénitales qui pourront être transmises à l’enfant, notamment si c’est un garçon. La consultation de conseil génétique est donc parfois nécessaire. Au terme de ces explorations, il existe parfois des solutions thérapeutiques pour améliorer la spermatogenèse (traitement hormonal, cure de varicocèle, etc.). Il faut ensuite savoir si la qualité de l’éjaculat permet d’envisager le recours à l’AMP par inséminations artificielles, par fécondation in vitro, voire par ICSI avec si besoin autoconservation de spermatozoïdes. En cas d’azoospermie, de nécrospermie totale ou d’oligospermie incompatible avec une AMP, il faut envisager un prélèvement chirurgical de pulpe testiculaire qui permet parfois de trouver des spermatozoïdes pour le recours à l’ICSI. Traitements urologiques Causes excrétoires Le rétablissement chirurgical de la continuité de la voie séminale [7] doit être réalisé lorsqu’il est possible. – anastomose épididymodéférentielle en cas d’obstacle épididymaire avec canal épididymaire d’amont dilaté et non fibrosé utilisable pour réaliser l’anastomose, ce qui devient rare en pratique en raison du type actuel des infections génitales très fréquentes par Chlamydiae trachomatis qui entraînent généralement une fibrose de l’ensemble de l’épididyme ; – vasovasostomie après vasectomie dont le pronostic est lié au délai après vasectomie, la perméabilité déférentielle devenant plus aléatoire après dix ans de vasectomie. Après cette intervention, les spermatozoïdes sont présents dans l’éjaculat dans 70 % des cas mais avec parfois des anticorps, et une grossesse naturelle est obtenue dans 50 % des cas ; mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie, vol. 12, n° 3, juillet-août-septembre 2010 251 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Mini-revue 252 – réparation déférentielle après lésion iatrogène (cure de hernie par exemple), avec anastomose souvent délicate ou impossible en raison de la rétractation du segment déférentiel d’aval, notamment lorsque la hernie a été opérée dans l’enfance ; – résection trans-urétrale de la partie distale des canaux éjaculateurs au niveau prostatique, d’indication plus discutée en raison du risque d’éjaculation rétrograde et de resténose. En cas d’intervention chirurgicale réparatrice, il faudra conseiller au patient d’effectuer lors de cette intervention un prélèvement de liquide déférentiel ou épididymaire ou de pulpe testiculaire afin de conserver des paillettes de spermatozoïdes utilisables secondairement dans le cadre de l’ICSI en cas d’échec. Dans certains cas, un traitement médical comportant antibiothérapie et traitement anti-inflammatoire peut améliorer la situation en permettant de traiter médicalement un obstacle infectieux et/ou inflammatoire. Dans les cas de diagnostic incertain ou en cas d’atteinte chronique, le bilan des avantages potentiels et des inconvénients (effets secondaires) devra être discuté avec le patient. Causes sécrétoires Dans certains cas, l’atteinte sécrétoire peut être traitée. – En cas d’insuffisance hypothalamohypophysaire, après avoir éliminé une tumeur de l’hypophyse par une IRM cérébrale, un traitement de gonadotrophines est proposé [8] pour stimuler les testicules dans leurs fonctions endocrine (testostérone) et exocrine (spermatogenèse). Ce traitement comporte : hCG 1 500 à 3 000 UI en i.m. deux fois par semaine et FSH 150 UI en i.m. trois fois par semaine jusqu’au démarrage de la spermatogenèse (pendant 6 à 18 mois), avec contrôle du spermogramme tous les trois mois. Il est ainsi possible de stimuler la spermatogenèse et de voir apparaître des spermatozoïdes dans l’éjaculat pour envisager, selon le résultat, une grossesse naturelle ou le recours à une AMP dont le niveau est fonction des résultats obtenus sur le spermogramme. Il est à noter qu’en cas de reprise de la spermatogenèse, des grossesses peuvent être obtenues avec des concentrations spermatiques exceptionnellement basses de l’ordre de deux millions de spermatozoïdes par millilitre. Il faut en général en profiter pour congeler le sperme. Après avoir obtenu les spermatozoïdes, l’homme peut cesser le traitement par gonadotrophines qui est contraignant (cinq injections i.m. par semaine) et avoir recours si besoin à un traitement androgénique substitutif par testostérone (une injection par mois), mais le plus souvent avec arrêt de la spermatogenèse ; – en cas de varicocèle [9-11], pathologie touchant 20 % de la population masculine, le traitement, dont l’efficacité reste discutée, est envisagé dans certains cas. En effet, il existe deux formes cliniques de varicocèle : la varicocèle isolée avec testicules initialement normaux, progressivement dégradés par le reflux veineux spermatique, et la forme associée à une atteinte sécrétoire le plus souvent congénitale avec hypotrophie testiculaire initiale et taux de FSH élevé. Dans la forme isolée, lorsque la varicocèle est bien visible cliniquement et éventuellement bilatérale, avec reflux significatif au doppler, le traitement de cette varicocèle peut permettre d’améliorer le spermogramme avec un délai pouvant dépasser trois mois. Il n’y a pas de différence de résultats en termes de grossesses et de complications (récidive, hydrocèle) entre la ligature chirurgicale de la veine spermatique et son embolisation radiologique. Des grossesses naturelles sont obtenues dans 30 % des cas ; ces résultats sont conditionnés à l’éventuelle amélioration du spermogramme et à la situation de la femme (âge, fonction ovarienne et perméabilité tubaire). Ce traitement peut faciliter le recours à l’AMP après amélioration du spermogramme. Dans les autres cas, ce traitement doit être discuté en fonction des autres possibilités de l’AMP, en sachant cependant que le traitement de cette varice peut limiter la poursuite de la dégradation ultérieure de la spermatogenèse et éviter la survenue d’une azoospermie. Dans les cas d’azoospermie sécrétoire associée à une varicocèle, le traitement préalable de la varicocèle pourrait améliorer la probabilité de trouver des spermatozoïdes lors du prélèvement testiculaire [12] ; – en cas de cryptorchidie non traitée, il faut localiser le ou les testicules cryptorchides cliniquement, par échographie ou par examen tomodensitométrique abdominopelvien. Les testicules devront être descendus dans les bourses afin de pouvoir les surveiller en raison de la fréquence plus élevée de tumeurs du testicule chez les hommes cryptorchides. Cette orchidopexie dans les bourses peut parfois permettre ensuite un démarrage de la spermatogenèse et d’obtenir ainsi des spermatozoïdes utilisés généralement dans le cadre de l’ICSI [13] ; – de façon plus controversée, un traitement par clomifène [14, 15], tamoxifène [16] ou inhibiteurs de l’aromatase [17, 18] peut être proposé dans les atteintes sécrétoires avec FSH normale. Enfin, la stimulation de la spermatogenèse par testostérone donne des résultats très variables : généralement sans effet sur la spermatogenèse, cela peut parfois la stimuler comme cela peut l’arrêter, cette propriété étant notamment utilisée dans un but contraceptif [19, 20] ; – les autres traitements ayant pour but de stimuler la spermatogenèse (antioxydants, L-carnitine) n’ont pas démontré leur efficacité [21, 22] ; – enfin, l’état général du patient interfère avec la spermatogenèse. L’obésité ou la maigreur [23, 24], le stress et le surmenage [25], la consommation d’alcool mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie, vol. 12, n° 3, juillet-août-septembre 2010 [26] ou d’autres toxiques et notamment l’intoxication tabagique durant la vie fœtale [27] et adulte [28] perturbent la spermatogenèse. Les règles hygiénodiététiques de bon sens doivent être rappelées, et c’est parfois à cette occasion que le tabac peut être arrêté définitivement par le couple. Prélèvement chirurgical de spermatozoïdes Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Causes excrétoires Lorsqu’il n’a pas été possible de rétablir la continuité de la voie séminale (impossibilité ou échec d’anastomose, agénésie déférentielle), le prélèvement de spermatozoïdes est alors réalisé, si cela n’a pas été fait lors de la tentative de réparation de la voie séminale. Il peut s’agir d’un prélèvement déférentiel, épididymaire ou, si besoin, de pulpe testiculaire. Ce prélèvement est réalisé classiquement par voie chirurgicale, le plus souvent au cours d’une brève anesthésie générale. Il est parfois réalisé par ponction percutanée par certaines équipes. L’avantage du prélèvement chirurgical est de permettre un recueil de spermatozoïdes plus important afin de congeler suffisamment de paillettes pour permettre plusieurs tentatives d’ICSI sans avoir à réopérer le patient. Dans tous les cas, par souci d’efficacité, un contrôle extemporané de la qualité des prélèvements est souhaitable avec examen au microscope en salle d’opération. Ce contrôle guide l’intervention, car il permet de décider d’un prélèvement de pulpe testiculaire lorsque le prélèvement réalisé au niveau de la voie séminale est de qualité insuffisante. En cas de prélèvement de pulpe testiculaire, un contrôle anatomopathologique est souhaitable. Dans certains cas rares de sténose des canaux éjaculateurs, il est parfois possible de réaliser un prélèvement de spermatozoïdes au niveau des vésicules séminales sous contrôle échographique par voie transrectale avec une prémédication antibiotique. Les résultats de l’ICSI dans les causes excrétoires [29] montrent plus de 25 % de grossesses par tentative. À l’issue des différentes tentatives nécessaires, plus d’un couple sur deux obtient au moins une grossesse. Causes sécrétoires En l’absence de traitement ayant pu améliorer la spermatogenèse et en cas d’azoospermie, de nécrospermie totale ou en présence de très rares spermatozoïdes non utilisables en ICSI, le prélèvement chirurgical de pulpe testiculaire, généralement bilatéral, peut permettre d’isoler des spermatozoïdes utilisables en ICSI. Le prélèvement testiculaire percutané à l’aiguille permet plus rarement d’obtenir des spermatozoïdes dans le contexte d’une atteinte sécrétoire que le prélèvement chirurgical [30]. Le prélèvement testiculaire chirurgical est ainsi réalisé lorsque le volume testiculaire le permet (testicules de volume supérieur à 5 mL). Il est réalisé le plus souvent au cours d’une brève anesthésie générale. Ce prélèvement de pulpe testiculaire est parfois réalisé à l’aide d’un microscope opératoire avec un à plusieurs prélèvements par testicule, sans que l’unanimité soit faite sur la technique opératoire [31]. Le contrôle extemporané par un biologiste de la reproduction au bloc opératoire peut permettre d’éviter de prélever le second testicule lorsque des spermatozoïdes ont été détectés sur le premier côté prélevé qui est de préférence celui du meilleur testicule (taille, consistance). Une analyse anatomopathologique est systématiquement réalisée sur les fragments de pulpe afin de porter un diagnostic précis : syndrome de cellules de Sertoli seules, arrêt de maturation ou hypospermatogenèse. L’association des trois tableaux peut se voir au sein d’un même testicule donnant un aspect de mosaïque, mais seule l’hypospermatogenèse est compatible avec la possibilité de trouver des spermatozoïdes. Ce prélèvement est le plus souvent réalisé avant la tentative d’ICSI, et les spermatozoïdes isolés sont congelés pour une utilisation ultérieure [32]. Un prélèvement synchrone à la tentative d’ICSI est parfois réalisé systématiquement par certaines équipes avec un risque de près de 60 % de ne pas trouver de spermatozoïdes et de faire une stimulation ovarienne inutile, car sans possibilité d’ICSI. Le prélèvement synchrone est parfois réalisé lorsque l’ICSI est impossible à partir de l’éjaculat et/ou à la décongélation des paillettes ; ces situations doivent être anticipées, le patient étant prêt pour l’intervention (patient à jeun ayant eu une consultation d’anesthésie dans le mois précédant la tentative). La probabilité de trouver des spermatozoïdes dans la pulpe testiculaire varie de 25 à près de 50 % en cas d’azoospermie sécrétoire [33, 34] ; elle est indépendante de la taille des testicules, du taux de FSH et d’inhibine B. Elle est significativement plus faible en cas de microdélétion du chromosome Y, notamment AZF a, de manière moins significative en cas de délétion AZF b ou c [35]. Le prélèvement de pulpe testiculaire peut théoriquement aggraver une insuffisance androgénique, ce dont le patient doit être informé, mais en pratique, la diminution de la testostéronémie n’est généralement pas significative après le prélèvement de pulpe [36], surtout si elle était normale avant l’intervention. L’hormonothérapie substitutive peut à l’avenir devenir nécessaire lorsque la testostéronémie est basse, et cela, même en l’absence de prélèvement testiculaire. Lorsque le prélèvement testiculaire est négatif, le couple peut choisir une solution alternative : don de spermatozoïdes ou adoption. Il est cependant possible, lorsque le volume testiculaire le permet et avec un taux normal de testostérone, de répéter le prélèvement de pulpe testiculaire [37] avec un délai d’au moins six mois, avec une probabilité d’obtenir des spermatozoïdes mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie, vol. 12, n° 3, juillet-août-septembre 2010 253 Mini-revue Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. d’environ 20 %, notamment en cas de discordance entre les résultats anatomopathologiques et ceux de laboratoire de biologie de la reproduction. Lorsque des spermatozoïdes ont pu être isolés, la probabilité d’obtenir une grossesse par ICSI dans les atteintes sécrétoires est voisine de 20 % par tentative, avec un taux de fécondation significativement plus faible qu’en cas d’atteinte obstructive [38]. Ainsi, pour l’ensemble de ces couples, moins d’un sur dix pourra obtenir une grossesse. Autres causes d’infertilité masculine Conclusion Anomalies de l’éjaculation Les anomalies de l’éjaculation peuvent être source d’infertilité. – l’anéjaculation peut se rencontrer dans un contexte d’anorgasmie. Il s’agit d’une pathologie de la sexualité dont le traitement psychosexologique est parfois long et complexe, ne permettant pas toujours une évolution favorable avec restauration de l’orgasme et donc de l’éjaculation. Il est parfois nécessaire d’envisager un prélèvement déférentiel de spermatozoïdes suivi d’une AMP ; – les lésions médullaires (paraplégie, tétraplégie) sont associées à une disparition de l’éjaculation. Ces patients ont le plus souvent des troubles de la miction avec autosondage ou sonde à demeure entraînant une infection chronique du carrefour urogénital. Lorsque l’éjaculation ne peut être obtenue par électrostimulation ou par vibromassage, ou en cas d’infection chronique retentissant sur la qualité de l’éjaculat, le prélèvement déférentiel est alors indiqué pour permettre ensuite une AMP ; – en cas d’éjaculation rétrograde par trouble de l’innervation du col vésical (neuropathie du diabète, chirurgie rétropéritonéale avec lésion du nerf sympathique), un traitement alphastimulant peut dans certains cas restaurer une éjaculation antérograde. En cas d’échec et dans les autres cas, notamment en cas d’atteinte du col vésical après résection prostatique, et après confirmation de l’éjaculation rétrograde par la présence de fructose dans l’urine après masturbation, il est parfois possible de recueillir des spermatozoïdes dans l’urine en prévenant le choc osmotique (restriction hydrique et vessie vide) et acide (alcalinisation par bicarbonates). Lorsque les spermatozoïdes ainsi recueillis ne sont pas utilisables, un recueil déférentiel est indiqué. Le traitement étiologique de l’infertilité masculine reste d’actualité, car il peut permettre dans les meilleurs cas de simplifier la prise en charge du couple sans recourir à l’ICSI, mais il peut également permettre de rendre possible l’ICSI et d’en améliorer les résultats par une optimisation de la qualité du sperme. Seule cette démarche diagnostique associée à une recherche clinique et plus fondamentale permettra de mieux comprendre et de mieux traiter les différentes causes d’infertilité masculine. Conflit d’intérêts : aucun. Références 1. Irvine DS. Epidemiology and aetiology of male infertility. Hum Reprod 1998 ; 13 (Suppl 1) : 33-44. 2. Devroey P, Vandergorst M, Nagy P, Van Steirteghem A. Do we treat the male or his gamete? Hum Reprod 1998 ; 13 (Suppl 1) : 178-85. 3. Alukal JP, Lipshultz LI. Why treat the male in the era of assisted reproduction? 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Ces troubles ont très souvent une origine psychogène par dévalorisation personnelle liée à la culpabilité ressentie pour cette infertilité masculine, mais ils peuvent préexister à cette infertilité en cas de causes 254 organiques vasculaires, neurologiques ou par atteinte des corps caverneux (maladie de La Peyronie évoluée par exemple). Dans la plupart des cas, les traitements médicaux oraux (inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5) ou intracaverneux (prostaglandine E1) permettent de remédier à une insuffisance érectile pour obtenir des rapports sexuels compatibles avec la reproduction. Dans certains cas réfractaires avec impossibilité d’une pénétration, le recours à l’insémination artificielle peut être proposé. 9. Zini A, Boman JM. Varicocele: red flag or red herring? Semin Reprod Med 2009 ; 27 : 171-8 [Epub 2009 Feb 26]. 10. Evers JH, Collins J, Clarke J. Surgery or embolisation for varicoceles in subfertile men. 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