Nouvelles-CATIE
Des bulletins de nouvelles concis en matière de VIH et d’hépatite C de CATIE.
Une étude révèle que le maintien durable de la suppression du VIH
sans médicaments n'est pas courant après l’interruption du
traitement
27 janvier 2016
Grâce au renforcement du sysme immunitaire et à la réduction de la quanti de VIH dans le sang au-dessous du
seuil detection (un niveau décrit comme « indétectable »), les combinaisons de médicaments anti-VIH puissants
(couramment appelées TAR) offrent plusieurs avantages, dont les suivants :
La TAR peut réduire énorment le risque d’infections liées au sida.
La TAR peut augmenter l’esrance de vie de certaines personnes, de sorte que celle-ci devient presque
normale.
La TAR peut réduire consirablement le risque de transmission sexuelle du VIH.
La TAR a cependant des inconvénients, dont les suivants :
Elle ne guérit pas l’infection au VIH.
On doit la prendre au moins une fois par jour pour le reste de sa vie.
Certains régimes causent des eets secondaires.
Appel à la prudence
Nombre d’études ont rélé que l’interruption de la TAR était chare de risques. La quanti de VIH peut augmenter
rapidement, et le sysme immunitaire peut faiblir de nouveau lorsque le traitement est interrompu. De plus, lors
d’un grand essai clinique bien conçu portant le nom de SMART, l’interruption du traitement a augmenté le risque de
complications liées à l’inflammation, ainsi que le risque d’infections et de mortali.
La suppression du VIH sans TAR est-elle possible?
Les chercheurs ont trouvé que la suppression du VIH se maintenait sans médicaments chez certaines populations,
dont les suivantes :
Les prétendus « contrôleurs d’élite » : les chercheurs ont déni ce groupe comme les personnes dont la
charge virale reste indétectable dans le sang (moins de 50 copies/ml) sans l’utilisation d’une TAR. De telles
personnes sont rares et représentent moins de 1 % de toutes les personnes atteintes du VIH.
Les contrôleurs post-traitement : Les personnes dans ce groupe ont commencé une TAR très peu de temps
après l’infection initiale puis l’ont interrompue plus tard. Malgré l’interruption du traitement, leur sysme
immunitaire semble être en mesure de maintenir la suppression du VIH. Les contrôleurs post-traitement sont
un groupe peu nombreux.
Il existe aussi des rapports faisant état de quelques cas de suppression temporaire du VIH dans le sang sans
médicaments; les exemples incluent deux adultes ayant subi une gree de moelle osseuse dans le cadre de
tentatives de guérir l’infection au VIH et un bé trai peu de temps après l’infection (le « du
Mississippi »).
Les chercheurs qui ont étudié en profondeur les groupes et les cas ci-dessus sont incapables d’expliquer pourquoi
cette suppression virologique inattendue s’est produite ou de prévoir pourquoi et quand la suppression pourrait
cesser subséquemment. Il reste que ces groupes et ces cas ont un point en commun : les tests de laboratoire
portent à croire que la quanti de cellules infeces par le VIH dans le corps de ces personnes est relativement
faible, comparativement à la personne séropositive moyenne sous TAR. Les chercheurs appellent ce fardeau de
cellules infeces dans le corps le réservoir.
cessité d’approches multiples et simultanées
Dans une tentative d’induire uneriode de rémission du VIH sans TAR, des équipes de recherche prévoient mener
des exriences auprès de personnes séropositives suivant une TAR dont le réservoir de cellules infeces par le VIH
est relativement petit. Les exriences en question consisteront probablement à administrer des combinaisons
d’agents dans l’espoir de rehausser la capaci du sysme immunitaire à tuer les cellules infectées par le VIH et à
réduire le volume du réservoir. Il existe de nombreuses options qui pourraient servir à ces exriences, y compris
les suivantes : des vaccins pour stimuler l’immuni contre le VIH; desdicaments pour rehausser la capaci du
sysme immunitaire à reconnaître et à tuer les cellules infeces par le VIH; des grees de moelle osseuse et des
thérapiesniques. À l’avenir, les chercheurs pourraient juger utile de tenter des interruptions du traitement pour
évaluer la capaci du sysme immunitaire à supprimer le VIH, mais seulement après avoir mis en œuvre des
stragies comme celles mentionnées ci-dessus.
Ultrastop
Des chercheurs de France ont me une exrience auprès d’un nombre limi de personnes séropositives
rigoureusement sélectionnées sans avoir recours aux interventions potentielles mentionnées ci-dessus. Tous les
participants avaient commenune TAR relativement tôt dans le cours de l’infection au VIH et avaient une charge
virale sanguine inférieure à 50 copies/ml et un compte de CD4+ supérieur à 500 cellules/mm3. De plus, le nombre de
cellules infeces par le VIH dans leur réservoir était inhabituellement faible.
Après l’interruption du traitement, la charge virale a rebondi chez la plupart des participants en moins de quatre
semaines. Cependant, chez un participant, la charge virale est rese faible, soit moins de 400 copies/ml, pendant à
peu près un an après l’interruption de la TAR. Malgré les nombreux tests eectués sur des échantillons de son VIH
et son sysme immunitaire, les chercheurs français demeurent consters et incapables d’expliquer la suppression
continue du VIH dans le sang de cet homme.
L’un des résultats importants de l’étude Ultrastop réside dans le fait que, malgré la sélection très rigoureuse des
participants (en fonction de nombreux facteurs, dont leurs antédents immunologiques, virologiques et
thérapeutiques et l’évaluation de leur réservoir de VIH), l’interruption de la TAR a é suivie d’uneriode limie de
suppression virologique chez 90 % des participants. Les résultats de l’étude Ultrastop portent à croire que, toute
seule, l’interruption du traitement pourrait ne pas être une façon utile d’aider les personnes séropositives à
supprimer le VIH.
tails d’étude
Les chercheurs ont sélectionné les participants pour cette étude avec beaucoup de soin. En plus d’eectuer des
analyses de sang complexes, l’équipe a exami les antédentsdicaux des participants et leur a fait subir une
évaluation psychologique an de s’assurer qu’ils étaient capables de participer à une étude de cette nature qui
cessiterait des visites fréquentes au laboratoire.
Les chercheurs ont fait état dessultats obtenus auprès de 10 participants dont le prol moyen au début de
l’étude était le suivant :
âge : 42 ans
sept hommes, trois femmes
riode écoulée depuis le diagnostic de VIH : six ans
nombre d’années de l’infection au VIH où la charge virale était inférieure à 50 copies/ml : cinq ans
compte de CD4+ le plus faible depuis toujours : 495 cellules/mm3
compte de CD4+ : 1 118 cellules/mm3
compte de CD8+ : 566 cellules/mm3
rapport CD4/CD8 : 2,1
À l’aide d’une épreuve ultrasensible, les techniciens ont détermi que tous les participants avaient une charge virale
inférieure à 20 copies/ml un mois avant l’étude. De plus, ils avaient tous un très faible nombre de cellules infectées
par le VIH dans leur sang, ce qui suggère la présence d’un réservoir plus petit que d’ordinaire.
Résultats : accent sur les neuf participants dont la charge virale a rebondi
Comme nous l’avons mentionné plus tôt dans ce rapport, la plupart des participants ont vu leur charge virale
grimper et entrer nettement dans la zonetectable dans les quatre semaines suivant l’interruption de la TAR. Les
résultats présentés ci-dessous en ce qui concerne la charge virale, le réservoir de VIH, les cellules T, l’innocui et
d’autres questions se rapportent sciquement à neuf participants dont le système immunitaire n’a pas été en
mesure de supprimer le VIH après l’interruption de la TAR.
Charge virale
En moyenne, la première charge viraletectable a é de 2 125 copies/ml. Un deuxième test de la charge virale
eectué une semaine plus tard (pour confirmer qu’elle était détectable) a rélé que la charge virale moyenne avait
grim jusqu’à 7 213 copies/ml.
Réservoir viral
Comme la charge virale augmentait, il était clair que davantage de cellules immunitaires se faisaient infecter et que le
réservoir prenait de l’ampleur. Pour confirmer ce changement, les chercheurs ont éval le réservoir. Au début de
l’étude, le réservoir comptait moins de 66 copies d’ADN VIH par million de cellules sanguines, selon les estimations.
Toutefois, après l’interruption du traitement, le fardeau de cellules infeces par le VIH a augmen et le réservoir
contenait 106 copies d’ADN VIH par million de cellules sanguines. Cette augmentation du volume du réservoir est
signicative du point de vue statistique, c’est-à-dire non attribuable au seul hasard.
Changements dans les cellules T
Chose peu surprenante étant donné les nombreux changementsgatifs qui se produisaient, les comptes de CD4+
ont commencé à chuter rapidement, la baisse moyenne initiale étant de 124 cellules/mm3. De plus, on a consta
qu’une proportion plus élee de cellules immunitaires s’enflammaient et devenaient actives, ce qui marquait un
autre changement signicatif du point de vue statistique.
Innocui
Aucun eet secondaire grave ne s’est produit pendant l’étude après l’interruption de la TAR; il est possible que ce
résultat soit partiellement attribuable aux comptes de CD4+ralement éles des participants (et au fait qu’ils
n’avaient jamais chuté à un faible niveau avant l’amorce de la TAR), ainsi qu’à la durée relativement courte de
l’interruption. Les eets indésirables couramment signalés après l’interruption étaient géralement d’intensi
lére ou modérée et incluaient les suivants :
maux dete
muscles douloureux ou sensibles
diarrhées
ganglions lymphatiques enflés
En géral, les charges virales ont baissé rapidement lorsque les participants ont recommencé leur traitement.
Quatre semaines après la reprise du traitement, huit participants sur neuf avaient une charge virale inférieure à 50
copies/ml.
Les énements suivants se sont produits 24 semaines après la reprise de la TAR :
Des tests de la charge virale ultrasensibles ont rélé que sept participants sur huit avaient une charge virale
inférieure à 1 copie/ml.
En moyenne, le fardeau de cellules infectées par le VIH dans le sang (le réservoir) a diminué et se situait de
nouveau au niveau d’avant l’interruption.
Le compte de CD4+ moyen était de 823 cellules/mm3 (près de 300 cellules de moins qu’au début de l’étude).
Un cas particulier
Les chercheurs ne savent pas avec certitude pourquoi une personne a réussi à maintenir une charge virale
relativement faible pendant 56 semaines malgré l’interruption de sa TAR (les chercheurs le suivent encore). Le
résultat de son plus récent test de la charge virale a é de 282 copies/ml. L’examen des antécédentsdicaux du
participant d’avant son inscription à l’étude a rélé que sa charge virale la plus élevée depuis toujours avait é
lérement supérieure à 3 000 copies/ml. Son compte de CD4+ le plus faible (avant de commencer la TAR) avait é
de 566 cellules/mm3. Trois ans avant son inscription à l’étude Ultrastop, une analyse de ses échantillons de sang
avait rélé que sa charge virale se situait régulièrement à moins de 20 copies/ml.
Ce participant ne semble pas avoir denes associés à une vulrabili réduite au VIH.
Malgré des analyses exhaustives, les chercheurs ont é incapables d’expliquer l’absence de réplication du VIH dans
le sang de cet homme pendant qu’il ne prenait pas de médicaments anti-VIH.
Points à considérer
1. Nos lecteurs devraient se rappeler que les participants à cette étude ont é sélectionnés avec beaucoup de soin.
En eet, pour que leur inclusion dans l’Ultrastop soit envisagée, les volontaires pressentis devaient avoir un nombre
extrêmement faible de cellules infectées par le VIH (on parle ici du réservoir) dans leur sang, soit une quanti
inférieure au seuil detection. Dans l’étude française, cela voulait dire moins de 66 copies d’ADN VIH par million de
cellules sanguines. Les chercheurs ont décrit une si faible quanti comme un « événement rare ». De plus, notons
que les volontaires avaient commencé leur TAR lorsque leur compte de CD4+ se situait à près de 500 cellules/mm3,
et leur charge virale prétraitement avait é relativement faible. Étant donné la rigueur de ces crires de sélection,
notons que la personne séropositive moyenne n’aurait pas é admissible à cette étude.
2. Même si l’on croyait que les participants choisis pour cette étude avaient les meilleures chances de connaître une
rémission prolongée du VIH sans médicaments, la durée réelle de celle-ci s’est rélée remarquablement courte, soit
un mois environ. L’équipe française a souligné que la courte durée de la riode précédant le rebond de la charge
virale chez la plupart des participants rappelait les résultats obtenus il y a environ 15 ans lorsque l’interruption du
traitement a é sérieusement évale pour la première fois.
3. L’épreuve utilisée pour évaluer le nombre de cellules infectées par le VIH avait une limite detection inférieure de
66 copies d’ADN VIH par million de cellules sanguines. Les tests utilisés à l’heure actuelle dans les laboratoires de
recherche pour évaluer le volume du réservoir de VIH sont imparfaits et sous-estiment probablement son vrai
volume. L’usage de ce genre de tests est dans une grande mesure réser aux laboratoires de recherche et à
certaines études qui éprouvent des thérapies potentielles contre l’infection au VIH. Il n’emche que plusieurs
équipes de recherche travaillent à la mise au point dethodes plus précises pour évaluer le réservoir de VIH.
4. Lessultats de l’étude Ultrastop portent à croire que l’interruption de la TAR, comme seule intervention visant à
induire une rémission du VIH sans médicaments, a sans doute peu de chances d’être adoptée à grande échelle à
l’avenir. Les chercheurs français ont fait preuve de beaucoup de rigueur dans leur sélection et n’ont choisi que des
participants dont le prol biodical laissait esrer la possibili d’une rémission prolongée sans médicaments. Mais
cela ne s’est pas produit.
5. Les chercheurs français n’ont pas fourni de données d’analyses des ganglions et tissus lymphatiques. Rappelons
que la majorité des cellules (lymphocytes) que le VIH infecte (98 %) se trouve dans les ganglions lymphatiques et les
tissus apparentés. Il s’ensuit donc que le VIH aussi se loge principalement dans ces parties du corps. De plus, des
chercheurs aricains ont trouvé que, même lorsque la charge virale dans le sang est indétectable grâce à la TAR,
on peut encore observer le VIH infecter des cellules dans les ganglions lymphatiques. Esrons qu’à l’avenir les
chercheurs évalueront ces compartiments lorsqu’ilsneront des recherches sur la rémission du VIH sans
médicaments.
Vers l’avenir
Il est probable que l’interruption de la TAR sera incluse dans certaines études futures où l’on tentera de guérir le VIH
ou d’induire uneriode de rémission sans médicaments chez des personnes sous TAR. Les études en question
devront trouver des moyens de rehausser la capaci du sysme immunitaire àtecter et à tuer les cellules
infeces par le VIH et à réduire le volume du réservoir de VIH. Il faudra que de telles mesures soient prises avant
que les chercheurs envisagent de nouveau l’interruption du traitement.
D’autres équipes de recherche travaillent à des méthodes desties à mieux prévoir quelles personnes séropositives
seraient susceptibles d’éprouver un rebond virologique à la suite de l’interruption de la TAR.
De nombreuses études passionnantes sont à l’horizon. Certaines d’entre elles porteront sur les grees de moelle
osseuse, les médicaments conçus pour réduire le réservoir de VIH et renforcer le sysme immunitaire et les
thérapiesniques. Il est important que des personnes séropositives se portent volontaires pour ces études. Ce
faisant, elles aideront consirablement les chercheurs à comprendre les conséquences complexes de l’infection au
VIH et à perfectionner les approches visant la rémission du VIH sans TAR, voire la guérison.
Sean R. Hosein
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