Mesure et suivi de l`empreinte écologique des ongulés sauvages

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Mesure et suivi de l’empreinte écologique
des ongulés sauvages
sur la végétation forestière
Anders Mårell – Maryline Pellerin – Agnès Rocquencourt
À l’issue de la Seconde Guerre mondiale, les populations d’ongulés sauvages de plaine et de
montagne étaient fortement réduites en France au point d’être, pour certaines d’entre elles,
menacées d’extinction (bouquetin, mouflon). Ce n’est qu’à partir du début des années 1980 que
les populations d’ongulés de plaine, principalement de cerf élaphe, de chevreuil et de sanglier,
ont retrouvé un nouvel essor (Maillard et al., 2010) dont l’ampleur suscite actuellement de vives
inquiétudes. Cette forte progression est principalement due aux nouveautés législatives, aux
nouvelles directives de chasse et aux réintroductions d’animaux mises en place depuis les années
1960. Ces dernières avaient pour objectif de restaurer les populations (Maillard et al., 2010) mais
ont abouti localement à une croissance non maîtrisée de leurs effectifs. En zones rurales et périurbaines, cette croissance non maîtrisée menace certaines activités économiques, comme l’agriculture et la sylviculture. Elle est à l’origine d’une augmentation des risques de collisions sur les
réseaux routiers (Vignon et Barbarreau, 2008) et engendre également des risques sanitaires non
négligeables pour les populations humaines et le bétail (Dufour et al., 2011). Enfin, quant aux
effets sur le milieu naturel, une surabondance de ces animaux peut se traduire par une dégradation des habitats et un appauvrissement local de la biodiversité (Côté et al., 2004).
Les ongulés sauvages modifient la structure, la composition et la diversité des communautés
végétales à travers différentes activités quotidiennes, comme la quête de nourriture (abroutissement, écorçage, consommation de fruits, retournement de la surface des sols…) et le marquage
territorial (frottis, grattis, régalis…). Ces effets sur la végétation peuvent se répercuter à d’autres
compartiments de l’écosystème (Martin et al., 2010), on parle de cascades trophiques. D’autres
comportements, comme le piétinement, la défécation, la miction et le transport des graines,
peuvent aussi influer sur la dynamique de la végétation forestière et avoir, selon le contexte, des
effets bénéfiques ou délétères sur le fonctionnement de l’écosystème (Boulanger et al., 2010 ;
Abbas et al., 2012). Il est ainsi préférable d’utiliser le terme d’empreinte écologique pour faire
référence aux différents effets que les ongulés sauvages peuvent avoir sur l’écosystème forestier,
car le mot impact est souvent associé de manière implicite aux effets négatifs (dégâts forestiers,
collisions véhicules…).
Une gestion durable des forêts suppose de trouver un compromis entre les effets nuisibles et les
services rendus par les ongulés sauvages à l’homme et à l’écosystème, que ce soit sur le plan
économique, social ou écologique. À titre d’exemple, on compte parmi les aspects négatifs les
dégâts agricoles et forestiers, les risques routiers et sanitaires, les conflits entre usagers de la
nature et l’appauvrissement des communautés végétales. Les services rendus regroupent notamRev. For. Fr. LXIV - 5-2012 - © AgroParisTech, 2013
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ment les revenus de la chasse, la valeur patrimoniale des ongulés, le contrôle d’espèces envahissantes et la dispersion des graines. Au regard de ces effets divers et de leur importance pour
l’homme et l’écosystème, l’équilibre forêt-gibier est une composante essentielle de la gestion
durable. Pour prendre sens et valeur, le concept d’équilibre forêt-gibier, qui fait consensus, doit
lui aussi être explicité dans ses différentes facettes : écologique, économique et sociale (cf.
encadré ci-dessous).
L’enjeu est de réussir à concilier les aspects écologiques, économiques et sociaux, en trouvant
un compromis acceptable par tous, basé sur des réalités biologiques comme la capacité de la
forêt à se régénérer. La difficulté de la démarche réside dans l’identification des niveaux acceptables et des seuils à ne pas franchir. Ce compromis pourra être évalué et pourra également
évoluer en fonction des outils de gestion disponibles, dans une démarche de gestion adaptative.
La gestion forestière joue en effet un rôle important et elle peut contribuer à accentuer ou à
atténuer les conflits forêt-gibier en fonction du choix de l’essence objectif, du mode de renouvellement des peuplements et du degré d’hétérogénéité du milieu à différentes échelles spatiales
et temporelles (Graham et al., 2010 ; Kuiper, 2011).
Cette démarche de gestion adaptative repose donc sur la mise en œuvre d’indicateurs que nous
détaillons ci-dessous pour les aspects principalement écologiques en lien avec la végétation
forestière.
Les enjeux économiques, sociaux et environnementaux
liés au concept d’équilibre forêt-gibier
Une composante essentielle de la gestion durable est d’évaluer et de suivre l’équilibre
forêt-gibier qui est à expliciter selon trois aspects, qui correspondent également aux piliers
de la multifonctionnalité en forêt : l’économie, le social et l’écologie.
Du point de vue économique, le concept d’équilibre forêt-gibier repose sur les notions de
coûts et bénéfices liés à la présence de gibier. En effet, la présence de grand gibier sur un
territoire engendre une activité économique non négligeable à l’échelle locale dans certaines
régions, grâce notamment à la chasse (Vollet et al., 2008). Sur ces aspects cynégétiques, à
titre d’exemple, les recettes annuelles globales brutes de l’ONF s’élevait à 45 M€ en 2010.
Cependant, le grand gibier est également à l’origine de contraintes pour certains acteurs du
milieu rural. Ces dernières peuvent se traduire par des coûts supplémentaires. Parmi les
coûts engendrés, on peut citer l’indemnisation des dégâts occasionnés aux cultures agricoles par les sangliers et les cervidés — 23 millions d’euros aujourd’hui (Guibert, 2008) soit
le double du montant des années 1980 — et le renouvellement des peuplements dont
l’avenir a été compromis par les cervidés. Sur ce dernier point, une étude récente de Ballon
et al. (2005) sur cinq départements (Landes, Oise, Sarthe, Tarn et Vosges) estime que, sur
1,2 million d’hectares de forêt étudiés, les cervidés auraient compromis l’avenir des peuplements sur environ 5 000 ha des 40 000 ha de peuplements sensibles, soit 12,5 %. Sur la
base d’évaluations actuelles des coûts liés à la régénération par plantation (de 3 000 à
5 000 €/ha), le préjudice peut être estimé à entre 15 et 25 millions d’euros à l’échelle des
départements étudiés. Les ongulés sauvages constituent également un potentiel important
de collisions routières — progression de 3 700 à 23 500 collisions annuelles depuis la
période 1984-1986 (Vignon et Barbarreau, 2008) — qui se traduisent en général par des
dégâts matériels importants, des blessures, voire des décès. De plus, les mesures dédiées
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Les indicateurs forestiers sur la voie d’une gestion durable ?
à la diminution des risques de collisions entre le trafic et la grande faune sauvage génèrent
des coûts supplémentaires pour la société.
Du point de vue social, les ongulés sauvages rendent aussi un grand nombre de services à
la société. Ils constituent en premier lieu des espèces emblématiques dotées de fortes
valeurs patrimoniales issues principalement de la vie culturelle associée à la chasse du
grand gibier. La chasse elle-même s’apparente à une activité populaire dans le monde
rural ; elle favorise les échanges et les liens entre différentes générations et milieux sociaux.
Cependant, les ongulés sauvages sont aussi porteurs de nombreuses maladies infectieuses
et servent d’hôtes pour de nombreux parasites, eux-mêmes porteurs ou vecteurs de
maladies. Ces maladies constituent des risques sanitaires à la fois pour les humains et pour
le bétail. Une expertise récente par Dufour et al. (2011) sur la tuberculose bovine souligne
la crainte qu’une épidémie ne se développe en France si la société ne met pas en place
des mesures de prévention pour éviter que l’infection des populations animales sauvages
(sanglier, cerf élaphe, blaireau et renard) ne se pérennise comme cela a été observé en
Europe (îles britanniques). Les cervidés jouent également un rôle important dans la dynamique des populations de tiques. De fortes densités de cervidés, en interaction avec les
pratiques sylvicoles (Tack et al., 2012), augmentent en effet le risque pour l’homme de
contracter des maladies transmises par les tiques telles que la maladie de Lyme.
Du point de vue écologique, la notion d’équilibre forêt-gibier repose sur les concepts de
« densité-dépendance » et de capacité d’accueil en écologie des populations. Ces derniers
postulent que les effets des animaux sur le milieu génèrent des répercussions sur la population animale elle-même à mesure que celle-ci s’approche de la capacité d’accueil maximale
du milieu. L’objectif d’une gestion durable est alors bien souvent de maintenir la population à un niveau d’effectif adapté au milieu (c’est-à-dire inférieur à la capacité d’accueil)
tout en gérant le milieu forestier de façon à améliorer la capacité d’accueil. Cette démarche
vise à assurer une meilleure performance démographique de la population animale (optimisant ainsi la production de gibier) et à s’assurer que les effets sur le milieu forestier ne
dégradent pas l’écosystème en empêchant le renouvellement du peuplement forestier, en
diminuant sa productivité ou en engendrant des effets irréversibles sur la biodiversité. Le
cas du massif du Donon (Moselle, Meurthe-et-Moselle, Vosges et Bas-Rhin) est un exemple
où les dégâts de gibier ont dépassé le seuil à ne pas franchir concernant le renouvellement
durable des sapinières : Flament et Hamard (2011) montrent que les cervidés sont la principale cause d’échec pour régénérer les sapinières. D’autres études montrent que les ongulés
sauvages modifient la structure et la composition des communautés végétales forestières,
notamment en termes de richesse et de diversité (Pellerin et al., 2010), sans pour autant
faire basculer l’écosystème irréversiblement vers d’autres états.
Pour conclure, il est important de signaler que les conséquences économiques peuvent être
importantes pour certains acteurs sans pour autant avoir un impact sur les aspects écologiques. Par exemple, les dégâts sylvicoles peuvent entraîner des surcoûts insupportables
liés au renouvellement de la forêt avec les essences objectif (c’est-à-dire maintien de la
production forestière), mais la pression n’est pas suffisante pour que la forêt ne soit plus
capable de se régénérer de façon naturelle avec d’autres essences que les essences objectif
(c’est-à-dire le maintien du fonctionnement de l’écosystème forestier). L’objectif de gestion
est alors de maintenir un niveau de population animale qui soit économiquement supportable et politiquement acceptable (niveaux et seuils à définir selon le contexte) et de gérer
le milieu forestier afin de réduire sa sensibilité aux dégâts (exemple : création de cloisonnements, plantation dans le recrû…).
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ANDERS MÅRELL – MARYLINE PELLERIN – AGNÈS ROCQUENCOURT
INDICATEURS DE CHANGEMENT ÉCOLOGIQUE ET SUIVIS DE LA PRESSION
Pour estimer et suivre l’équilibre forêt-gibier, le gestionnaire a besoin d’informations sur l’historique et l’état actuel de la population animale, l’évolution de son abondance et de sa performance, ainsi que sur les conséquences en termes de pression et d’effets sur le milieu. Un groupe
de scientifiques français a développé les indicateurs de changement écologique (ICE) ; il s’agit
d’outils d’aide à la gestion des populations d’ongulés sauvages et de leurs effets sur le milieu.
Les ICE décrivent l’interaction entre la population animale et son habitat, afin de fournir des
éléments quantitatifs relatifs à l’état de la pression, son évolution et ses conséquences (Morellet,
2008). Les ICE s’inscrivent dans une démarche de gestion adaptative : le décideur analyse des
tendances temporelles de l’évolution de la population animale et de ses effets sur le milieu. Le
concept d’ICE a été proposé comme outil d’aide à la gestion cynégétique et forestière suite aux
difficultés à précisément connaître l’effectif des populations d’ongulés sauvages. En effet, les
approches antérieures se basaient sur des estimations d’effectifs et leur comparaison à des
objectifs préalablement fixés.
Le suivi par ICE a été initialement développé pour le chevreuil, mais il s’élargit progressivement
à d’autres ongulés sauvages (cerf élaphe, chamois, mouflon et sanglier). Le groupe ICE est principalement composé de scientifiques spécialistes d’écologie animale. Ceci explique la prédominance des indicateurs établis à partir du compartiment « animal » (abondance des populations,
performance des individus), le déficit d’indicateurs de pression sur le milieu (régénération forestière et flore) et l’absence d’indicateurs de l’empreinte écologique (tableau I, p. 715). Ainsi, il
manque des indicateurs pour évaluer et suivre les dégâts sur la régénération forestière et les
effets sur le fonctionnement et la biodiversité de l’écosystème. Nous exposons ci-dessous le
potentiel que présente la végétation comme indicateur pour évaluer et suivre l’empreinte écologique d’ongulés sauvages.
LA VÉGÉTATION COMME INDICATEUR POUR ÉVALUER ET SUIVRE L’EMPREINTE ÉCOLOGIQUE
D’ONGULÉS SAUVAGES
En France, les ongulés sauvages sont principalement herbivores, excepté le sanglier qui est frugivore-omnivore. La pression d’abroutissement ou de consommation sur la végétation est ainsi la
mesure la plus directe pour estimer la pression d’herbivorie (ici définie comme étant le nombre
d’animaux par la masse du fourrage disponible). En effet, la quantité de végétation consommée
est étroitement liée aux besoins énergétiques des animaux. De nombreuses études ont montré
que le taux de broutement des espèces lignifiées est fortement corrélé aux effectifs des animaux.
En France, le groupe ICE a validé deux indicateurs basés sur le taux de consommation et qui
sont utilisés par les gestionnaires pour suivre la pression d’herbivorie : l’indice de consommation
(IC) des espèces lignifiées (Boscardin et Morellet, 2007) et l’indice d’abroutissement (IA) d’une
essence objectif : le Chêne (Chevrier et al., 2006). Il reste cependant à traduire ces mesures de
pression en termes d’empreinte écologique (c’est-à-dire les effets sur la régénération forestière
ou la biodiversité) pour savoir si l’impact est à un niveau acceptable ou s’il s’approche d’un seuil
critique à ne pas dépasser.
L’empreinte écologique des ongulés sauvages sur la végétation peut être mesurée en quantifiant
les réponses des plantes à l’échelle des populations ou des communautés végétales.
À l’échelle des populations végétales, l’approche consiste à sélectionner un nombre restreint
d’espèces végétales et à mesurer les effets sur un ou plusieurs paramètres démographiques ou
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Les indicateurs forestiers sur la voie d’une gestion durable ?
Tableau I
Ensemble des indicateurs de changement écologique (ICE)
développés et validés pour le chevreuil et le cerf élaphe par le groupe français ICE,
actualisé d’après Morellet (2008)
Indicateur
Description
Sites de validation
Références
L’abondance de la population animale
Chevreuil
Indice kilométrique
pédestre
Nombre de chevreuils vus par
kilomètre
Dourdan (Essonne)
(cf. Morellet,
2008)
Taille de groupe
Nombre de chevreuils par groupe
Dourdan (Essonne)
(cf. Morellet,
2008)
Nombre de groupes de cerfs
élaphes vus par kilomètre
La Petite Pierre (Bas-Rhin) (Hamann et al.,
2011)
Cerf élaphe
Suivis aux phares
La qualité et la performance individuelle des animaux
Chevreuil
Fécondité
Proportion de femelles gestantes
de chevreuil
Chizé (Deux-Sèvres),
Dourdan (Essonne),
Trois-Fontaines (Marne)
(cf. Morellet,
2008)
Masse corporelle
Masse corporelle des faons
de chevreuil
Haye (Meurthe-et-Moselle), (cf. Morellet,
Trois-Fontaines (Marne),
2008)
Chizé (Deux-Sèvres)
Taille mâchoire
Longueur de la mâchoire des faons Dourdan (Essonne)
de chevreuil
(cf. Morellet,
2008)
Taille patte arrière
Longueur de la patte arrière
des faons de chevreuil
Chizé (Deux-Sèvres)
(Delorme, 2007 ;
cf. Morellet, 2008)
Infections
Prévalence de Trichuris chez
les faons de chevreuil
Trois-Fontaines (Marne)
(Body et al., 2011)
Fécondité
Proportion de femelles gestantes
de cerf élaphe
La Petite Pierre (Bas-Rhin) (Bonenfant et al.,
2002)
Masse corporelle
Masse corporelle des faons de cerf
élaphe
La Petite Pierre (Bas-Rhin) (Bonenfant et al.,
2002)
Cerf élaphe
La pression sur le milieu
Chevreuil
Indice de consommation Taux d’abroutissement de la flore
lignifiée
Dourdan (Essonne)
(Boscardin et
Morellet, 2007 ;
cf. Morellet, 2008)
Indice d’abroutissement
Trois-Fontaines (Marne)
(Chevrier et al.,
2006)
Taux d’abroutissement des semis
de chênes
L’impact sur le milieu
Chevreuil
–
–
–
Cerf élaphe
–
–
–
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ANDERS MÅRELL – MARYLINE PELLERIN – AGNÈS ROCQUENCOURT
morphologiques susceptibles de répondre aux fluctuations de densité des populations animales.
Il peut s’agir de mesurer dans la population végétale étudiée : la survie (par exemple le taux de
mortalité), la croissance (par exemple la croissance en hauteur moyenne) ou la fécondité (par
exemple le pourcentage d’individus en fleurs). Des indicateurs basés sur des paramètres morphologiques pourraient être liés aux traits de résistance à l’herbivorie (par exemple des défenses
inductibles contre l’herbivorie, soit structurelles soit chimiques). Il s’agit ainsi d’une mesure
d’impact direct et non plus d’une mesure de la pression d’herbivorie. L’approche populationnelle
a le potentiel de développer des indicateurs très précis et sensibles à la pression d’ongulés et
permet au gestionnaire d’identifier les effets sur l’écosystème et d’anticiper une évolution difficilement réversible en cas de surabondance. Cette approche est adaptée à l’étude d’un massif
forestier, en particulier, mais beaucoup moins à des suivis à plus large échelle. Un des inconvénients de ce niveau d’étude est qu’il dépend de la répartition, des conditions stationnelles et
des variations interannuelles de l’espèce végétale cible. Cependant, quelques espèces végétales
ubiquistes comme la ronce, le lierre ou les essences objectif (cf. l’IA) pourraient potentiellement
être utilisées à une plus grande échelle.
À l’échelle des communautés végétales, la démarche consiste à mesurer des changements de
structure, de composition et de diversité de la communauté végétale. Il peut s’agir soit d’une
approche par espèce en quantifiant la présence-absence (ou l’abondance) des espèces vulnérables, tolérantes ou favorisées en fonction de la pression d’ongulés sur le milieu, soit d’une
approche par trait en quantifiant la présence des traits d’histoire de vie caractéristiques de la
résistance ou de la résilience à la pression d’ongulés. Une plante vulnérable qualifie une espèce
dont les chances de persister dans le milieu diminuent avec la densité d’animaux et descendent
en dessous d’un seuil critique (seuil en dessous duquel le risque d’extinction de la population
ou de la métapopulation de la plante est important ; figure 1, p. 717). Il s’agit par exemple de
certaines phanérophytes telle que le Lierre. Par contre, une plante tolérante persiste dans le
milieu même à de très fortes densités d’ongulés sauvages (c’est-à-dire que la probabilité de
présence ou l’abondance de l’espèce ne descendent pas en dessous du seuil critique, figure 1).
C’est le cas de certaines géophytes telle que l’Anémone sylvie. La probabilité de présence ou
l’abondance d’une espèce favorisée augmentent avec la densité d’animaux ; certaines graminées
telle que l’Agrostide vulgaire en sont un exemple. En quantifiant les réponses des espèces à la
pression d’herbivorie selon leur degré de tolérance (1 pour une plante très vulnérable à la
pression d’herbivorie, 5 pour une plante tolérante à une pression d’herbivorie moyenne, 9 pour
une plante particulièrement favorisée à des très fortes densités d’animaux) et en moyennant ces
valeurs à l’échelle de la communauté, il sera possible d’évaluer de façon quantitative l’empreinte
écologique d’ongulés sauvages dans un écosystème à partir de relevés floristiques (comparer à
l’utilisation des valeurs Ellenberg pour la caractérisation stationnelle). L’avantage principal de
l’approche par des traits fonctionnels est sa large échelle d’application car elle peut être transposable à d’autres contextes similaires sans pour autant abriter les mêmes espèces végétales
que celles initialement utilisées pour la validation du modèle. Par conséquent, cette approche
offre la possibilité d’appréhender l’équilibre forêt-gibier à une échelle régionale, voire nationale.
Ce type d’indicateur permettra d’évaluer et de suivre les effets des ongulés sauvages sur le fonctionnement et la biodiversité de l’écosystème et, à terme, il pourrait être intégré dans la démarche
des indicateurs de gestion durable des forêts françaises.
PERSPECTIVES
Des études menées en Amérique du Nord et en Grande-Bretagne montrent la grande diversité
d’indicateurs basés sur la végétation pour évaluer et suivre l’empreinte écologique des ongulés
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Les indicateurs forestiers sur la voie d’une gestion durable ?
FIGURE 1
ILLUSTRATION SCHÉMATIQUE DE LA PROBABILITÉ DE PRÉSENCE
OU D’ABONDANCE DES PLANTES VULNÉRABLES, TOLÉRANTES, INDIFFÉRENTES
ET FAVORISÉES EN FONCTION DE DIFFÉRENTES DENSITÉS
DE LA POPULATION ANIMALE (ONGULÉS SAUVAGES).
Vulnérable = la probabilité de présence ou l’abondance de l’espèce diminue avec la densité d’animaux et
descendent en dessous d’un seuil critique (seuil en dessous duquel le risque d’extinction de la population
ou de la métapopulation de la plante est important).
Tolérante = la plante persiste (c’est-à-dire que la probabilité de présence ou l’abondance de l’espèce ne
descend pas en dessous du seuil critique) dans le milieu même à des très fortes densités d’animaux.
Indifférente = pas d’effets ou les effets sont moindres que la magnitude de la significativité biologique
(l’effet sur la plante est statistiquement significatif, mais n’a pas d’incidence importante sur la présence ou
l’abondance de la plante).
Favorisée = la probabilité de présence ou l’abondance de l’espèce augmente avec la densité d’animaux.
Présence/Abondance
Favorisée
Indifférente
Significativité
biologique
Tolérante
Seuil critique
Vulnérable
Densité d'animaux
sauvages (tableau II, p. 718). Ces indicateurs, qui pourraient être utilisés en France, sont tous
des indicateurs à l’échelle populationnelle des espèces végétales. Il n’existe pas, à notre connaissance, d’indicateurs à l’échelle des communautés végétales, basés sur des traits fonctionnels, qui
concernent les ongulés sauvages en zone tempérée. Ce type d’indicateurs nous semble très
prometteur. Pour cette raison, nous sommes actuellement en train de mettre en relation, sur une
zone géographique restreinte, les données floristiques de l’Inventaire forestier national (IFN) et
les statistiques de chasse de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage. L’objectif est
d’identifier des espèces vulnérables, tolérantes ou favorisées selon la pression des ongulés
Rev. For. Fr. LXIV - 5-2012
717
ANDERS MÅRELL – MARYLINE PELLERIN – AGNÈS ROCQUENCOURT
Tableau II
Exemples d’indicateurs basés sur la végétation
en Amérique du Nord et en Grande-Bretagne
Variables
Espèces ou groupes d’espèces
Paramètres de pression exercée par les animaux
• Broutement
Taux de broutement
• Frottis
Fréquence de frottis
Acer saccharum(2), Aster divaricatus(2), Aster prenanthoides(2), Chelone glabra(2),
Impatiens capensis(2), Trillium grandiflorum(2), rejets de souche(1), semis d’arbres(1),
arbustes(1), « browse line »(1), Hedera helix(1), Primula sp.(1), Hyacinthoides non-scripta(1),
Mercurialis perennis(1)
Arbres(1)
Paramètres démographiques
• Survie
Fréquence
Densité
• Croissance
Recouvrement
Acer spicatum(2), Arailia nudecalis(2), Betula allegheniensis(2), Clintonia borealis(2),
Maianthemum canadense(2), Sorbus decora(2), Taxus canadensis(2)
Arisaema tryphyllum(2), Laportea canadensis(2), Maianthemum canadense(2),
Orchis specatabilis(2), Smilicina spp.(2), Uvalaria sp.(2), Polygonatum sp.(2)
Arailia nudecalis(2), Clintonia borealis(2), Maianthemum canadense(2)
Hauteur
Actea pachypoda(2), Arisaema tryphyllum(2), Clintonia borealis(2), Mercurialis perennis(1),
Osmorrhiza clatyonii(2), Trillium grandiflorum(2)
Taille des feuilles
Maianthemum canadense(2), Trillium grandiflorum(2)
• Fécondité
Inflorescences
Arisaema tryphyllum(2), Maianthemum canadense(2), Orchis spectabilis(2),
Smilicina spp.(2), Trillium grandiflorum(2), Ulvaria sp.(2), Polygonatum sp.(2)
(1) Cooke (2009).
(2) Kirschbaum et Anacker (2005).
sauvages et les traits d’histoire de vie associés. Sous l’hypothèse que nous puissions établir une
liste des espèces et des traits, nous envisageons de réaliser une cartographie à l’échelle régionale, voire nationale, de la pression et de l’empreinte écologique des ongulés sauvages à partir
des relevés floristiques de type IFN.
Les analyses préliminaires montrent que l’espèce d’ongulé influe sur les résultats : l’effet du
chevreuil n’est pas le même que celui du sanglier ou du cerf, à cause de leurs différences de
taille, de régime alimentaire et de comportement. Ce premier constat complique les analyses et
risque de rendre les résultats plus complexes et moins généralisables, mais il pourrait aussi
permettre de distinguer l’effet de différents groupes fonctionnels d’ongulés sauvages (brouteurs,
paisseurs, omnivores…). La qualité des données initiales (justesse et exhaustivité des relevés
floristiques, précision et justesse de l’estimation de la pression d’herbivorie) est une autre difficulté rencontrée pendant les analyses ; elle pourrait menacer l’exactitude des résultats. L’ampleur
du gradient de la pression d’herbivorie rencontré dans notre zone d’étude et la quantité de
relevés floristiques sur laquelle nous nous basons pour les analyses statistiques nous permettent
de contourner en grande partie ces problèmes. Les prochaines étapes seront :
— de compléter les analyses afin d’identifier les réponses des espèces,
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Les indicateurs forestiers sur la voie d’une gestion durable ?
— d’identifier les traits d’histoire de vie qui caractérisent les espèces vulnérables, tolérantes
et favorisées selon la pression d’herbivorie,
— d’estimer l’impact sur le milieu pour une région donnée à partir des relevés floristiques
en se basant sur des traits fonctionnels (IFN, conservatoires botaniques…),
— de valider cette estimation (modèle) en utilisant des jeux de données indépendants
(dispositifs RENECOFOR, enquête auprès des gestionnaires…).
Anders MÅRELL
Irstea
UR EFNO Écosystèmes forestiers
F-45290 NOGENT-SUR-VERNISSON
([email protected])
Maryline PELLERIN
Irstea
UR EFNO Écosystèmes forestiers
F-45290 NOGENT-SUR-VERNISSON
Actuellement
CNERA Cervidés-Sanglier
OFFICE NATIONAL DE LA CHASSE
ET DE LA FAUNE SAUVAGE
Au bord du Rhin
F-67150 GERSTHEIM
([email protected])
Agnès ROCQUENCOURT
Irstea
UR EFNO Écosystèmes forestiers
Domaine des Barres
F-45290 NOGENT-SUR-VERNISSON
([email protected])
Remerciements
Les idées présentées ci-dessus sont le fruit des réflexions menées dans le cadre d’un projet de recherche
financé par le département de l’eau et de la biodiversité du ministère de l’Écologie, du Développement
durable, des Transports et du Logement pour lequel nous exprimons notre profonde gratitude. Nous sommes
également très reconnaissants envers les autres partenaires du projet, l’Institut national de l’information
géographique et forestière, l’Office national des forêts, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage
et la Fédération nationale des chasseurs, pour la mise à disposition des données environnementales et des
dispositifs expérimentaux. Nous aimerions aussi remercier tous les participants du réseau d’indicateurs de
changement écologique et nos collègues de l’unité de recherche Écosystèmes forestiers pour les nombreux
échanges scientifiques sur le sujet des indicateurs et des suivis de l’équilibre forêt-gibier. Nous remercions
également les deux relecteurs anonymes, dont les suggestions nous ont permis d’améliorer cet article.
BIBLIOGRAPHIE
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Rev. For. Fr. LXIV - 5-2012
Les indicateurs forestiers sur la voie d’une gestion durable ?
MESURE ET SUIVI DE L’EMPREINTE ÉCOLOGIQUE DES ONGULÉS SAUVAGES SUR LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE (Résumé)
Les populations d’ongulés sauvages ont progressé depuis les années 1980 au point aujourd’hui de poser des
problèmes économiques, sociaux et environnementaux. Une gestion durable des forêts suppose de trouver
un compromis entre les effets nuisibles (économiques, sanitaires et écologiques) et les services rendus
(économiques, patrimoniaux et écologiques) à l’homme et à l’écosystème. Une composante essentielle de la
gestion durable est d’évaluer et de suivre ces effets afin d’éviter des dégâts excessifs ou des dommages irréversibles. Elle repose donc sur des indicateurs, que nous détaillons ici pour les aspects principalement écologiques en lien avec la végétation forestière.
Basés sur les principes de la gestion adaptative, les indicateurs de changement écologique (ICE) mettent à
la disposition des décideurs et gestionnaires des indicateurs qui renseignent sur l’évolution du couple population animale-milieu. Néanmoins, parmi eux, manquent des indicateurs pour évaluer et suivre les dégâts sur
la régénération forestière et les effets sur le fonctionnement et la biodiversité de l’écosystème. Nous proposons ici d’utiliser les réponses des plantes à l’échelle des populations ou des communautés végétales afin
d’évaluer et suivre l’empreinte écologique des ongulés sauvages en milieu forestier. La notion de l’empreinte
écologique prend en compte le fait que les effets d’ongulés sauvages ont, selon le contexte, des effets bénéfiques ou délétères sur le fonctionnement de l’écosystème. À terme, ces indicateurs pourraient être intégrés
dans la démarche des indicateurs de gestion durable des forêts françaises.
MEASUREMENT AND MONITORING OF THE ECOLOGICAL IMPACT OF WILD UNGULATES ON FOREST VEGETATION (Abstract)
Populations of wild ungulates have been increasing since the 1980s to the extent that they now raise
economic, social and environmental problems. Sustainable forest management implies that a compromise is
found between the harmful effects (on the economy, health and the environment) and the services rendered
(to the economy, the heritage and the environment) to man and the ecosystem. A crucial component of
sustainable management is evaluation and monitoring of these effects to avoid excessive destruction or irreversible damage. This relies on indicators that we describe here in their essentially ecological aspects in
connection with forest vegetation.
Based on the principles of adaptive management, ecological change indicators (ECIs) provide decision-makers
and managers with indicators as to changes in the animal/habitat pair. However, they do not include indicators enabling damage to forest regeneration to be evaluated or monitored, or ones for effects on ecosystem
functioning and biodiversity. We propose using the responses of plants on the scale of populations or plant
communities so as to assess and monitor the ecological impact of wild ungulates in forest environments. The
notion of ecological impact takes on board the fact that, depending on the particular context, the effects of
wild ungulates may be either beneficial or harmful for ecosystem functioning. In the longer term, these indicators could be incorporated into the sustainable management indicator approach in French forests.
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