Pour en
savoir plus
Pour découvrir cette société
méridionale du XIIIe siècle, les
ouvrages ne manquent pas. Nous
voulons toutefois vous signaler deux
ouvrages fondamentaux qui méritent
d’être mieux connus du grand public :
- Laurent Macé, Les comtes de
Toulouse et leur entourage (XIIe-
XIIIe siècles). Rivalités, alliances et
jeux de pouvoir. Toulouse, Privat,
2000.
- Hélène Débax, La féodalité
languedocienne (XIe-XIIe siècles).
Serments, hommages et fi efs dans le
Languedoc des Trencavel. Toulouse,
Presses Universitaires du Mirail,
2003.
Édité par le Conseil général de l’Aude
Centre administratif départemental
11855 Carcassonne cedex 9
Directeur de la publication :
Alain Tarlier
Rédaction :
Archives départementales de l’Aude
41 avenue Claude Bernard
11855 Carcassonne cedex 9
Responsable de la rédaction :
Sylvie Caucanas
Photographies : A. Estieu,
A. Fernandez (Archives
départementales)
Tirage : 3 000 exemplaires,
publication gratuite
Compogravure :
t2p numéric 04 68 77 22 22
Impression : De Bourg - Narbonne
de l’ordre cistercien lui-même désireux
de justifi er l’intervention de l’Église
catholique en Languedoc), on peut
lire : « les plus nobles de ma terre sont
déjà atteints par le mal de l’infi délité,
entraînant avec eux une multitude de gens
qui ont abandonné la foi… ». Raymond VI
fut-il lui-même tenté par le catharisme ?
C’est en tout cas ce qu’affi rme bien haut le
cistercien Pierre des Vaux de Cernay : « à ce
qu’on rapporte, partout où il va, il mène
avec lui des hérétiques… afi n, au cas où il
viendrait à mourir, de mourir entre leurs
mains ». Cette opinion doit être nuancée.
Si on s’en rapporte aux récents travaux
de Laurent Macé, le comte de Toulouse
ne semble pas avoir, à aucun moment,
adhéré aux croyances dissidentes mais
il est certain qu’il a toléré la présence
d’hérétiques dans son entourage et qu’il
leur a même assuré protection. Il en a
été de même pour son neveu et vassal
Raymond Roger de Trencavel, vicomte de
Béziers, Albi et Carcassonne.
Les liens féodaux
et familiaux, fon-
damentaux dans
l’or ganisation de la
société de l’époque,
imposent aux princes
toulousains et à leurs
principaux vassaux
une certaine prudence.
Comment chasser
les hérétiques de son
domaine sans porter
atteinte aux relations
de fi délité nouées
avec ses vassaux et sans mettre en
danger son assise politique. En effet, le
catharisme a pénétré largement la petite
et moyenne aristocratie languedocienne.
De nombreuses raisons peuvent
expliquer cette situation. L’absence du
droit d’aînesse dans le processus des
successions en Languedoc est à l’origine
d’une fragmentation des seigneuries : les
mêmes biens font à chaque génération
l’objet de partages et le nombre de
coseigneurs s’accroît, amenuisant d’autant
leurs ressources. C’est dans cette petite
aristocratie appauvrie que le catharisme
prend souvent racine, et cela d’autant plus
facilement que ces seigneurs s’opposent
régulièrement à l’Église romaine pour
la préservation de leur patrimoine. Les
chartriers, notamment celui de l’abbaye
bénédictine de Lagrasse, témoignent des
rapports confl ictuels qui existent entre les
établissements monastiques et certains
seigneurs au cours de la deuxième moitié
du XIIe siècle. Ces derniers remettent
souvent en cause les donations et
aumônes que leurs parents ont pu faire
à l’abbaye pour leur salut personnel,
réduisant d’autant le patrimoine familial.
Par ailleurs, sont fort impopulaires les
efforts menés par l’Église romaine pour
obtenir des seigneurs laïcs la restitution
des dîmes ecclésiastiques que ceux-ci
percevaient encore dans le Midi malgré
les condamnations prononcées à la suite
de la réforme grégorienne. Cette hostilité
marquée à l’égard des établissements
religieux jugés trop riches et trop
puissants politiquement et socialement,
on la rencontre également dans la
culture des élites aristocratiques et
urbaines : les troubadours qui chantent
l’amour courtois critiquent souvent
assez durement la vie menée par les
clercs romains, dénonçant la trahison
du message évangélique. Certains,
tels Raimon de Miraval ou Peire Vidal,
fréquentant les cours des seigneurs
cathares du Carcassès, apparaissent
suspects aux yeux de l’Église.