S’agissant du Maroc, il est évident qu’il ne dispose pas – en tout cas pas encore – de ressources
significatives en matière d’énergie primaire. Il a, en outre, un système de production et de
consommation encore peu développé. Il est appelé à faire face, au cours des vingt-cinq
prochaines années, au défi de l’émergence économique tellement nécessaire pour satisfaire
les aspirations au bien-être de sa population dans un contexte de globalisation et de compétitivité
internationale. Ses performances vont, de toute évidence, dépendre, en grande partie, de ses
choix énergétiques. Ces choix sont aujourd’hui particulièrement ouverts dans la mesure où
le pays peut encore opter, à moindre coût – en comparaison avec les pays soumis à la force
d’inertie des infrastructures du passé – pour des solutions qui réduisent la consommation
d’hydrocarbures en agissant notamment sur les réseaux de transport ou en développant la
production électrique d’origine nucléaire, solaire ou éolienne, réduisant du même coût les
émissions de gaz à effet de serre et renforçant les objectifs du développement durable.
La présente étude « Energie 2030 : quelles options pour le Maroc ? » consacrée aux enjeux
énergétiques du Maroc à l’horizon 2030 vise, avant tout, à apporter de nouveaux éclairages
prospectifs aux décisions collectives en matière de politique énergétique qu’impliquent les
choix de société opérés par notre pays et, au-delà, à contribuer à une prise de conscience des
conséquences possibles de ces choix. C’est dans les limites de cette démarche que trouve son
sens l’élaboration des scénarios en tant qu’instruments privilégiés par lesquels la prospective
essaie d’explorer, sur la base d’hypothèses plausibles, les futurs possibles, compte tenu des
atouts et contraintes multiples, qu’elles soient économiques, sociales, technologiques ou
financières.
Trois scénarios ont été construits. Chacun d’eux identifie une situation possible assez différente
de la situation actuelle afin d’éclairer l’étendue du champ décisionnel relevant des autorités
institutionnelles. Pour faciliter la réflexion sur les futurs possibles à caractère alternatif et
qui sont au nombre de deux – l’un dit scénario du « volontarisme énergétique » et l’autre
dit scénario du « régionalisme ouvert », un scénario de référence est présenté en premier lieu.
Il est basé sur un ensemble de considérations réputées fort probables dans les milieux experts
et qui relèvent de ce qui est souvent appelé le « savoir conventionnel ». Il faut dire que le
scénario de référence est beaucoup plus proche d’un exercice d’extrapolation des tendances
passées.
Ce scénario de référence ou tendanciel se situe, en effet, dans la logique d’une croissance
tendancielle de l'ordre de 4 %, de la poursuite de la globalisation économique avec des difficultés
de coopération maghrébine et euro-méditerranéenne et d'un prix futur élevé de l'énergie
(pouvant se situer au-delà de 100 $/baril à l’horizon 2030). La demande totale d'énergie associée
à ce scénario est, sous l’hypothèse du maintien de son élasticité par rapport à la croissance
(1,6), de l'ordre de 48 millions de TEP (4 fois la consommation énergétique actuelle), soit
un accroissement annuel moyen de 5,6 %. Deux piliers du développement durable sont alors
affectés : le social, par l'impact des prix de l'énergie sur la population vulnérable, et
l'environnement, par la pollution générée par la consommation des hydrocarbures. Ces effets
négatifs sur le développement durable devraient être sensiblement corrigés si l'on incorporait
un important développement de la production d'énergie renouvelable propre.
La faisabilité de ce scénario requiert des investissements importants et des efforts
substantiels en matière de recherche et d'innovation technologique et pourrait constituer un
facteur stimulant pour l'activité productive du pays. Cependant, l'accès à l'énergie resterait,
comme l'accès à l'eau ou à la connaissance, une source de fracture sociale. Le Maroc, tout
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