dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte avant-propos Regards croisés sur la réforme SOMMAIRE • Regards croisés sur la réforme 11 Enrique Ledesma • Les objectifs de la réforme de l'hospitalisation sous contrainte 12 en psychiatrie Enrique Ledesma • Peut-on réellement se soigner sans consentement 18 ? Mathieu Bellahsen, Victor Brunessaux, Serge Ki« • L'intérêt d'un travail collaboratif pluridisciplinaire 22 Nathalie Alamowitch, Marie-Noelle Vacheron, Caroline Navion • La psychiatrie, les libertés et le juge : quelle place pour le juge 26 ? David Peyron, Enri que Ledesma • De la confidentialité des données médicales devant le juge 29 Marine Rogé, Valérie Dauriac-Le Masson • Le patient face à l'incontournable ordonnance du juge des libertés et 34 de la détention • Les questions éthiques soulevées par la loi du 5 juillet 2011 Nathalie Mercier 36 Marianne Mazodier • L'art de la fugue 38 Messaoud Djemaï • Élements de bibliographie Liliane Régent Dossier coordonné par Enrique tedesma 40 les prises en charge mais apporte ces améliorations notamment dans le soin ambulatoire sous contrainte, trop souvent associé à une sortie d'essai "prolongée" ainsi qu'un contrôle des libertés individuelles plus serré. La réforme est moins idéologique que procédurale. Le l er août 2011 entrait en application la loi n°2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge. La mise en oeuvre, en période estivale qui souvent rime avec effectif minimum, ne futpas sans difficultés pour les soignants, les médecins, les agents administratifs et même les juges. I il faut ici parler d'une "réforme" qui s'accompagne, de quelques résistances, incompréhensions, hésitations et erreurs. Toutefois, on constate que la quasi-totalité des professionnels qui ont travaillé en psychiatrie en appliquant la loi du 27 juin 1990 admettront qu'elle était nécessaire. I En effet, la loi dite "de 90" qui réformait déjà, celle de 1838 a inversé la logique d'hospitalisation : l'hospitalisation libre devenait la règle de la prise en charge et l'hospitalisation sous contrainte un cas particulier encadré par des procédures médico-administratives. Elle a, par ailleurs, apporté une vision du soin compatible avec la vision initiale du secteur, son regard tourné vers la ville et la réhabilitation. Pourtant, des imperfections existaient et il est vite devenu évident que des améliorations devaient être apportées. Plus de vingt ans après, cette loi ne révolutionne pas SOiNS PSYCHIATRIE - n° 281 - juillet/août 2012 I Ce dossier a pour but de poser un regard pluriprofessionnel sur cette réforme et de faire un premier bilan après quelques mois d'application. La diversité des professionnels (infirmiers, psychiatres, juristes, juges, etc.), des regards et des opinions enrichissent l'analyse que nous proposons. La question du bénéfice pour le patient reste entière même si celle de l'augmentation de la charge de travail est admise. Peut-être ne s'agit-il là que de changements d'habitudes et de méthodes de travail? Le bénéfice pour le patient se mesurera, sans doute, dans la diminution des rechutes, des "perdus de vue" et des échecs du projet thérapeutique. 1 Enfin, la loi précise que le gourvernement devra préparer un rapport faisant état notamment des principaux besoins en matière d'observance thérapeutique et décrivant les moyens à mettre en oeuvre dans ce domaine. Espérons que ces éléments seront de nature à faire évoluer la loi. Enrique tedesma © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS http://dx.doi.org/10.1016/j.spsy.2012.04.004 • 11 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte mise au point Les objectifs de la réforme de l'hospitalisation sous contrainte en psychiatrie ENR1QUE LEDES1V1A I La loi du 5 juillet 2011 réforme un texte datant du 27 juin 1990 1 Elle y ajoute des éléments repérés comme manquants au cours des années qui ont suivi sa mise en application I L'intervention systématique d'un juge des libertés et de la détention pourrait contrebalancer les mesures d'allégement de la mise en soins sous contrainte I Un suivi plus contrôlé des patients "lourds" complète un dispositif qui prévoit que les soins sous contrainte puissent désormais avoir lieu en ambulatoire. The objectives of the reform of hospitalisation under restraint in psychiatry. The law of July 5th, 2011 reforms legislation dating from June 27th, 1990.1t adds elements identified as missing from the original text over the course of the yearsfollowing its application.The systematic intervention of a liberties and detention judge could counterbalance the measures simplifying hospitalisation under restraint. Stricter monitoring of "unwieldy" patients is also included in measures which enable treatment under resta int to be given through outpatient care. - MOTS- CLÉS • Juge des libertés et de la détention • Programme de soins • Loi du 5 juillet 2011 • Soin psychiatrique • Soin sans consentement KEY WORDS • Gare programme • Care without consent • Law of July 5th, 2011 • Liberties and detention judge • Psychiatric care L aloi dite "de 90" [1] a fait l'objet de plusieurs évaluations au cours des dernières années par les inspections générales de différents ministères (Affaires sociales, Justice, Intérieur). Elles ont toutes conclu à la nécessité de réformer cette loi compte tenu des difficultés constatées dans l'accès aux soins psychiatriques ainsi que de l'évolution générale des conditions de prise en charge. L'ensemble des partenaires a été pour une évolution globale du dispositif d'hospitalisation sans consentement, c'est-à-dire tant la procédure d'hospitalisation que suries possibilités de maintien des soins en ambulatoire. Le vocabulaire utilisé a évolué : on ne parle plus d' « hospitalisation en psychiatrie », qu'elle soit libre ou sans consentement, mais de « soins en psychiatrie». La loi tente de mettre en cohérence des éléments qui ne l'étaient pas jusqu'à présent : les modalités et les mesures de soins sans consentement. Cette évolution signe un changement de représentation des soins sans consentement en psychiatrie, soins qui ne se résument plus à l'hospitalisation complète mais peuvent également exister en ambulatoire ou en hospitalisation séquentielle. Dans l'exposé des motifs de la loi du 5 juillet 2011 [2], le législateur avoulu présenter les principaux objectifs attendus. Nous vous proposons 12 © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS http://dx.doi.org/10.10164.spsy.2012.04.006 de les examiner afin de saisir la logique de l'esprit de la loi. LEVER LES OBSTACLES À L'ACCÈS AUX SOINS I Le premier des objectifs consiste à lever ces obstacles et à garantir la continuité d'accès aux soins, sans pour autant remettre en question les fondements du dispositif actuel. Quelques mesures facilitent l'opération, comme la simplification du dispositif en fusionnant la procédure "normale" et la procédure d'urgence (assouplissement des conditions en matière de certificats médicaux), ou encore la clarification du rôle du tiers qui devient demandeur « de soins » (art. L.3212-1) et non plus « de l'hospitalisation », I Les critères d'entrée dans les soins sans consentement sur demande d'un tiers ou en cas de péril imminent ne sont pas modifiés : impossibilité de consentir aux soins en raison des troubles mentaux et nécessité de soins immédiats assortis d'une surveillance médicale (art. L.3212-1). Les modes d'hospitalisation sans consentement, à la demande d'un tiers ou en cas de "péril imminent", deviennent des hospitalisations complètes prononcées par le directeur de l'établissement. SOiNS PSYCHIATRIE - n°281 -juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte Les critères d'hospitalisation sans consentement sur demande de tiers sont maintenus sur le fond mais sont plus "souples" en cas d'urgence. Les certificats médicaux nécessaires I Dans un premiertemps, des certificats médi- caux sont établis en vue de l'admission en soins psychiatriques (art. 1.3212-1). Puis, afin de préserver les libertés individuelles face à l'assouplissement des formalités d'admission dans le L'admission "classique" en soins sans cadre des soins sans consentement à la demande consentement de tiers, le certificat médical de vingt-quatre heures Dans un premier cas, elle est possible lorsqu'il a été « saisi d'une demande présentée par un membre de est complété par un certificat de soixantela famille du malade ou par une personne justifiant de douze heures (art. L.3211-2-2). Ces trois docul'existence de relations avec le malade antérieures à la ments doivent émaner d'au moins deux médecins demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans différents. Enfin, entre le cinquième et le huil'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants tième jour, à compter de l'admission d'une perexerçant dans l'établissement prenant en charge laper- sonne en soins psychiatriques, un psychiatre de sonne malade. Lorsqu'il remplit les conditions prévues l'établissement d'accueil établit un certificat au présent alinéa, le tuteur ou le curateur d'un majeur médical circonstancié indiquant si les soins sont protégé peut faire une demande de soins pour celui-ci ». toujours nécessaires. Si la forme de la prise en Cette décision d'admission sera accompagnée de charge de la personne malade n'est plus adaptée, il en propose une nouvelle. deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de quinze jours dont l'un ne peut être Au vu de ce certificat médical, les soins peuvent être maintenus par le directeur de l'établissement établi que par un médecin exerçant hors de l'établissement accueillant le malade. Il devra être pour une durée maximale d'un mois. Au-delà de confirmé par un certificat d'un second médecin cette durée, les soins peuvent être maintenus par qui peut exercer dans l'établissement accueillant le directeur de l'établissement pour des périodes maximales d'un mois renouvelables. Ces certifile malade (art. L.3212-1). cats devront être établis dans les trois derniers jours de la période en cause (art. L3212-7). La procédure d'urgence I Dans un deuxième cas, le patient pourra être admis en soins par la simplification de la procédure : procédure d'urgence, dite de « péril imminent ». La procédure est facilitée afin de permettre la mise en oeuvre rapide des soins'. Deux cas de figure peuvent exister : • soit lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une 11 demande et dans ce cas, nous pouvons noter que le %fia le el législateur a souhaité apporter une réponse à ce 011, :21ww« '"11 salle • ar a agi la é g tee" • problème récurrent dans les services d'urgence. La ■ 111 emelt& oser den' recherche du tiers se fera, dans ce cas, sur un délai II ',lev de vingt-quatre heures après l'admission en soins e (art. L.3212-1) ; e iti00. 4•11teço= • soit, lorsqu'il existe un « risque grave d'atteinte àl'inté- erp•illiane • 'go a • Suia grité du malade», le directeur de l'établissement peut a il le n e uves a•aiume as is•sa prononcer, àla demande de soins d'un tiers et au vu .1i...1mm a na d'un seul certificat médical, établi par un médecin »baumier/rat ongle w sg fig extérieur à l'établissement de santé, l'admission en soins psychiatriques (art. L.3212-3). !Mea • uIa 1 Afin de veiller aux bonnes pratiques et plus particulièrement à ce que le recours à la procé.Certificat 24 h dure d'urgence soit justifié par la gravité des conséquences d'une absence de prise en charge pour la santé du patient, un examen particulier Certificat 72 h des situations de ces patients par la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP) est prévu'. NOTES 1 . Cette impossibilité de mise en œuvre rapide des soins sans tiers était une lacune majeure de la loi du 27 juin 1990. 2 • D'après l'exposé des motifs accompagnant le projet de loi. • L' hospitalisation d'office ne pouvait avoir lieu que sur décision préfectorale. 4 • D'après l'exposé des motifs accompagnant le projet de loi. • •• • • V! :tee 4' • . SOiNS PSYCHIATRIE - n°281 -juillet/août 2012 13 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte Les autorisations de sortie temporaire La réforme maintient la possibilité, pour le patient, d'effectuer des sorties de courte durée. La durée maximale de douze heures est maintenue. Toutefois, dans le but d'alléger le travail d'accompagnement des équipes soignantes, le législateur a prévu que le patient puisse être également accompagné par « un membre de sa famille ou par la personne de confiance » pendant toute la durée de la sortie (art. L.3211-11-1). Les règles de la levée de la mesure de soins La loi du 27 juin 1990 prévoyait que, si le tiers ou un proche demandait la levée de l'hospitalisation, le psychiatre ne pouvait s'y opposer. La seule solution pour maintenir les soins était la transformation en hospitalisation d'office (H0) 3 . Aujourd'hui, l'article L. 3212-9 est modifié pour donner au psychiatre traitant la possibilité d'opposition à la levée de la mesure de soins sans consentement sur demande d'un tiers ou d'un proche. En revanche, cette levée demeure acquise lorsqu'elle est demandée par la CDSP. Une période d'observation de 72 heures L'admission en soins psychiatriques se fait systématiquement en hospitalisation complète et aménage un premier temps d'observation "initial" et de soins en créant un nouveau certificat établi dans les soixante-douze heures complétant celui des vingt-quatre premières heures. De plus dans un délai de vingt-quatre heures suivant l'admission, un médecin réalise un examen somatique complet de la personne (art. L.3211-2-2). I Passé ce premier temps d'hospitalisation complète et en fonction des conclusions de l'évaluation du patient durant cette période, l'équipe soignante a la possibilité de prendre en charge le patient selon d'autres modalités que l'hospitalisation complète : hospitalisation partielle ou soins ambulatoires. La mise en place d'un « programme de soins » ne pourra donc se faire qu'après cette période d'observation et aux vues des conclusions des certificats médicaux (art. L.3212-4). Le rôle de coordination et d'organisation de l'Agence régionale de santé 1 L'Agence régionale de santé (ARS) se voit attribuer un rôle dans le soutien et l'accompagnement des familles précisé dans l'article L.3212-4-1 qui prévoit notamment qu'elle « veille à la qualité et à la coordination des actions de soutien et d'accompagnement des familles et des aidants des personnes faisant 14 l'objet de soins psychiatriques mené par des établissements de santé et par les associations ayant une activité dans le domaine de la santé et de la prise en charge des malades». I De plus, l'ARS organise, dans chaque territoire de santé, un « dispositif de réponse aux urgences psy- chiatriques en relation avec les services d'aide médicale urgente, les services départementaux d'incendie et de secours, les services de police nationale, les unités de la gendarmerie nationale, les établissements, les groupements de psychiatres libéraux » etc. Un des objectifs de ce dispositif est notamment de «faire assurer leur transport vers un établissement de santé «. Ce transport, précise l'article L.3222-1-1, ne peut avoir lieu qu'après l'établissement du premier des deux certificats médicaux et la rédaction de la demande de soins prévus qui ne peut avoir lieu qu'après l'établissement du certificat médical. CRÉER LES SOINS SANS CONSENTEMENT EN AMBULATOIRE Le deuxième des objectifs présentés consiste à « adapter la loi aux évolutions des soins psychiatriques et des thérapeutiques aujourd'hui disponibles, qui permettent à de nombreux patients d'être pris en charge autrement qu'en hospitalisation à temps plein ». Antérieurement, les psychiatres ne disposaient pas d'autre cadre juridique que celui des "sorties d'essai" pour permettre une prise en charge ambulatoire ou en hospitalisation partielle, rendue possible par une amélioration de l'état du patient. Certains patients demeuraient, ainsi, en sortie d'essai durant plusieurs années, ce qui répondait à un besoin mais allait à l'encontre de l'esprit de la loi "de 90". La réforme de juillet 2011 organise un régime de prise en charge sans consentement sous la forme de soins en ambulatoire ou en hospitalisation partielle avec l'adjonction d'un programme de soins en supprimant les "sorties d'essai". La notion de programme de soins Lorsque, sur les bases d'un avis médical d'un psychiatre qui participe à la prise en charge de la personne, les soins sous contrainte deviennent ambulatoires, le législateur a prévu un protocole de soins nommé «programme de soins » (art. L.32112-1) fixant les formes de prise en charge des patients faisant l'objet de soins sans consentement. Le programme de soins définit les types de soins, les lieux de leur réalisation et leur périodicité. L'avis du patient est recueilli préalablement à la définition du programme de soins et avant toute modification de celui-ci, à l'occasion d'un entretien avec un psychiatre de l'établissement d'accueil. SOINS PSYCHIATRIE - n°281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte Les modalités de passage de l'ambulatoire à l'hospitalisation Afin d'éviter les ruptures de soins, qui ont été de nombreuses fois constatées, l'article L.3211-11 encadre le suivi des intéressés en prévoyant que le psychiatre participant à la prise en charge du patient puisse modifier, à tout moment, la forme de la prise en charge pour garantir la continuité des soins du patient au vu de son état. À ce titre, le psychiatre peut donc proposer une hospitalisation complète du patient. RENFORCER LE "SUIVI" DES PATIENTS « hospitalisation d'office » disparaît au profit d'admission en « soins psychiatriques sur décision préfectorale ». L'article L.3213-1 est modifié dans sa forme mais prévoit toujours que : le représentant de l'État dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil, l'admission en soins psychiatriques ». I Cet article, complété de l'article 1.3213-3, précise que le rythme d'élaboration des certificats est identique à celui des soins en psychiatrie sur demande de tiers mais prévoit que ceux-ci soient transmis, « sans délai au représentant de l'État dans le département et à la commission départementale des soins I Le troisième objectif de cette réforme porte psychiatriques [ . .1. Lorsque la personne malade est sur le suivi « attentif des patients, pour leur sécurité et prise en charge sous la forme d'une hospitalisation pour celle des tiers, dont l'aménagement est exigé par la complète, une copie du certificat médical ou de l'avis consécration de la pratique des soins en dehors de l'hôpi- médical I-. . .1 est également adressée sans délai au juge des libertés et de la détention compétent dans le ressort tal »4. L'aspect principal du suivi est, ici présenté, comme intimement lié à l'idée de renforcement duquel se trouve l'établissement d'accueil ». de mesures de précautions pour certaines catégories de patients dit "potentiellement plus dangereux", c'est-à-dire les personnes déclarées pénalement irresponsables [3] et celles séjournant ou ayant séjourné dans une unité pour malades difficiles (UMD). I Des dispositions ont été prévues en ce sens, comme la réintégration du patient à l'hôpital en cas d'absence de présentation de ce dernier aux consultations. Elles visent à mieux encadrer les sorties des établissements de santé, pour des soins autres qu'en hospitalisation complète ou pour les levées des mesures de soins sans consentement. Pour les patients ayant séjourné en UMD ou ayant été déclarés irresponsables pénalement, le préfet peut disposer, pour l'aider à prendre ses décisions, en plus du certificat médical circonstancié du médecin qui prend en charge le patient, de deux expertises et de l'avis du collège de soignants. Enfin, en ce qui concerne les sorties individuelles accompagnées de courte durée (art. L.3211-11-1) qui répondent à des besoins et à des situations différentes des prises en charge extrahospitahères, elles sont maintenues. Cependant, l'autorisation du préfet, qui auparavant était tacite, doit désormais être explicite s'agissant des sorties des personnes déclarées irresponsables pénalement pour troubles mentaux ou ayant séjourné en UMD. L'apparition des soins psychiatriques sur décision préfectorale llestprévu dans ce cas un mode d'hospitalisation à la demande d'un représentant de l'État La formulation SOINS PSYCHIATRIE - n° 281 - juillet/août 2012 Le rôle du préfet Au vu des certificats médicaux établis par le psychiatre, le préfet doit confirmer la mesure initiale de soins sans consentement à l'issue du premier mois pour un trimestre, puis tous les semestres. À défaut, cette décision de soins est levée (art. L.3213-4). De plus, le préfet peut mettre fin à tout moment à cette mesure sur proposition du psychiatre traitant ou sur proposition de la CDSP. I Tous les certificats médicaux concluant à la possibilité de lever la mesure, au motif que les troubles mentaux de l'intéressé ne compromettent plus la sûreté des personnes ou l'ordre public, doivent être communiqués au préfet, par le directeur de l'établissement d'accueil du malade. Le préfet a ensuite trois jours pour statuer. Ce délai peut allerjusqu' à quatorze jours s'il demande une expertise psychiatrique. Enfin, en cas de refus de levée de la mesure par le préfet, c'est le juge des libertés et de la détention qui statuera sur cette mesure (art. L.3213-5). Les soins sans consentement à la demande de l'autorité publique Aujourd'hui, l'article L.3213-6 clarifie la procédure permettant de passer d'un régime de soins sans consentement sur demande d'un tiers à une prise en charge au titre des soins sans consentement sur demande de l'autorité publique. En effet, sur la base d'un certificat médical du psychiatre prenant en charge le patient, le directeur de l'établissement d'accueil peut demander au préfet qui peut prendre une mesure d'admission 15 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte en soins psychiatriques en application de l'article L. 3213-1. personnes ou porte atteinte de façon grave à l'ordre public, elle est admise en soins psychiatriques dans les conditions définies à l'article L.3213-1 ». DEUX CAS JURIDIQUES PARTICULIERS Par la suite, pour décider de la levée des soins sans consentement des personnes irresponsables pénalement en raison de leurs troubles mentaux ou ayant séjourné en UMD, le préfet devra requérir : • les avis concordants de deux experts, sur l'état de santé du patient (et s'il le souhaite, l'avis d'un troisième expert) ; • l'avis du « collège de soignants » (art. L.3213-8) . La loi a prévu les mesures nécessaires pour deux cas juridiques précis. L'irresponsabilité pénale L'article L.3213-7 prévoit que « lorsqu'une personne, qui bénéficie, sur le fondement du premier alinéa de l'article 122-1 du Code pénal, d'un classement sans suite, d'une décision d'irresponsabilité pénale ou d'un L'hospitalisation des personnes détenues jugement ou arrêt de déclaration d'irresponsabilité L'article L. 3214-1 a été modifié afin de permettre pénale, nécessite des soins et compromet la sûreté des l'admission de patients/détenus au sein des UMD ENCADRÉ 1 Deux nouveaux acteurs dans la prise en charge du patient : le juge des libertés et de la détention (JLD) et l'avocat I La saisine du JLD au moment de la mise en oeuvre des soins sans consentement Cette saisine est prévue afin de demander la levée d'une mesure de soins sans consentement, mais également pour se prononcer sur la modalité de la forme de prise en charge. L'article L.3211-12 précise que la saisine peut être formée par : • la personne faisant l'objet des soins; • les titulaires de l'autorité parentale ou le tuteur si la personne est mineure ; • la personne chargée de sa protection si, majeure, elle a été placée en tutelle ou en curatelle ; • son conjoint, son concubin, la personne avec laquelle elle est liée par un pacte civil de solidarité ; • la personne qui a formulé la demande de soins ; • un parent ou une personne susceptible d'agir dans l'intérêt de la personne faisant l'objet des soins ; • le procureur de la République. Le JLD ne peut statuer qu'après avoir recueilli l'avis du collège (pluridisciplinaire). De plus, dans certaines conditions de "dangerosité" il ne pourra en décider la mainlevée de la mesure qu'après avoir recueilli deux expertises. Il est important de noter que, dans un souci de continuité des soins, il peut décider que la mainlevée ne prendra effet que dans un délai de vingt-quatre heures afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi. I Les ordonnances des 15 jours et des 6 mois du JLD L'article L.3212-12-1 nous dit clairement que « l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention n'ait statué sur cette mesure »Al existe trois cas de figure et deux délais importants. Le premier cas de figure, avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de l'admission prononcée. Le deuxième se réfère au même délai mais dans le cas d'une modification dans la forme de la prise en charge du patient ayant abouti 16 à son hospitalisation complète. Enfin, le troisième cas évoque l'expiration d'un délai de 6 mois suivant soit toutes les décisions judiciaires prononçant l'hospitalisation, soit toutes les décisions prises par le juge des libertés et de la détention. Il faut également que le patient ait été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis ces décisions. Les saisines sont accompagnées d'un avis conjoint, se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète, rendu par deux psychiatres de l'établissement d'accueil désignés par le directeur, dont un seul participe à la prise en charge du patient. Lorsque le patient relève d'une irresponsabilité pénale (art. 122-1 du Code pénal) ou fait l'objet de soins psychiatriques (art. L.3213-1 : soins demandés par le représentant de l'État) et qu'il a fait l'objet d'une hospitalisation dans une unité pour malades difficiles depuis moins de dix ans, l'avis est rendu par le collège soignant. Lorsque le juge ordonne une mainlevée, il peut, au vu des éléments du dossier et par décision motivée, décider que la mainlevée prend effet dans un délai maximal de 24 heures afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi. I En cas de non respect des délais - Lorsque le juge des libertés et de la détention n'a pas pu statuer dans les délais prévus, la mainlevée est acquise à l'issue de chacun de ces délais, à moins qu'il ne soit justifié de circonstances exceptionnelles à l'origine de la saisine tardive et que le débat puisse avoir lieu dans le respect des droits de la défense. I Un avocat pour représenter les intérêts* du patient Dans la plupart des cas, quelques minutes avant l'audience, le patient rencontre son avocat L'article L.3211-12-2 précise que pendant l'audience la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est entendue, le cas échéant assistée de son avocat ou représentée par celui-ci. : intérêt repose ici sur son sens juridique et non sur le sens thérapeutique qu'il pourrait avoir pour les équipes pluridisciplinaires soignantes. SOINS PSYCHIATRIE - n°281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte ou, lorsqu'elles sont mineures, au sein des services de psychiatrie n'ayant pas la qualité d'unité hospitalière spécialement aménagée. Par ailleurs, cet article précise que la prise en charge des détenus ne peut être assurée qu'en hospitalisation complète. RENFORCER LES DROITS DES MALADES Le quatrième objectif porte sur le renforcement des droits des personnes malades et des garanties du respect de leurs libertés individuelles. Ces garanties sont rendues nécessaires notamment par les assouplissements importants dans les procédures d'hospitalisation sans consentement. Le législateur a souhaité que, régulièrement, le patient soit informé de son état de santé et des recours dont il peut bénéficier. L'intervention régulière du juge des libertés et de la détention (encadré 1) est une des garanties apportée au patient afin d'assurer le respect de ses droits notamment en ce qui concerne ses libertés individuelles. Enfin, les conditions de révision de la situation des patients en soins sans consentement sur demande d'un tiers sont renforcées en imposant un examen collégial au bout d'un an. Des aménagements d'audience Afin de faciliter l'organisation des audiences, le législateur a prévu la possibilité d'aménager les dispositifs. Ainsi, l'article L.3211-12-2 prévoit deux autres possibilités afin d'éviter les déplacements au palais de justice : une salle d'audience au sein de l'établissement ou un dispositif de visioconférence (si aucune contre indication médicale n'est repérée). Si le patient est assisté par un avocat, celui-ci peut, lors des audiences en visioconférence, se trouver auprès du magistrat ou auprès du patient. relèvent des personnels de l'établissement d'accueil du patient : le psychiatre responsable de la prise en charge du patient, un autre psychiatre qui ne participe pas à sa prise en charge et d'un représentant de l'équipe pluridisciplinaire participant à la prise en charge du patient. Cette nouvelle instance sera consultée, notamment, sur l'opportunité d'aménager la prise en charge du patient ou de lever les soins sans consentement lorsqu'il s'agit : • des personnes irresponsables pénalement et dont l'hospitalisation a été prononcée en application de l'article L.3213-7 du Code de la santé publique ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale ou qui ont fait l'objet d'une hospitalisation en application de ces dispositions ; • des patients séjournant ou ayant déjà séjourné dans une UMD, pendant une durée minimale Ce collège est, par ailleurs, compétent pour réexaminer la situation des personnes en soins sans consentement, sur demande d'un tiers ou en raison d'un péril imminent, depuis plus d'un an (art. L.3212-7). RÉFÉRENCES 111 Loi n° 90-527 du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation. http://www.legifrance.gouv.fr/ affichTextado?cidTexte=JORFTEX T000000349384&fastPos=1&fast Req1d=1417702860&categorieLie n=cid&oldAction=rechTexte [2] Loi n°2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (www.legifrance.gouv.fr ). http://www.legifrance.gouv.fr/ affichTexte.do?cidTexte=JORFTE XT000024312722&fastPos=1&fas tReq1d=217845111&categorieLie n=cid&oldAction=rechTexte [3] Loi n°2008-174 du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental (www.legifrance.gouv.fr ). Un nouveau rôle de contrôle pour les CDSP L'article L.3223-1 relatif aux missions des CDSP renforce les contrôles suries cas les plus sensibles. Ces situations reposent exclusivement sur deux cas qui sont les personnes soignées sans leur consentement sur décision médico-administrative en l'absence de demande formalisée par un tiers ainsi que les personnes dont les soins sans consentement, sur demande d'un tiers ou de l'autorité publique, se prolongent au-delà d'un an. En outre elle reçoit les réclamations des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques ou celle de leur conseil et examine leur situation. CONCLUSION La procédure d'appel à l'encontre de l'ordonnance du juge L'ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel. Cet appel n'est pas pour autant suspensif sauf en cas de risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade ou d'autrui (art. L.3211-12-4). Dans ce cas, l'appel est accompagné d'une demande faisant état du risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade ou d'autrui, et est formé dans un délai de six heures. La constitution d'un collège de soignants I Un nouvel article L.3211-9 instaure un collège de soignants, constitué de trois membres qui SOiNS PSYCHIATRIE - n°281 - juillet/août 2012 Au bout de quelques mois d'existence, des aménagements et des changements de la réforme sont annoncés. Certains évoquent même l'abrogation prochaine de la loi du 5 juillet 2011. Le débat existe, et ce seul aspect est plutôt un signe positif pour notre système de soins. La seule certitude, dans ce débat, réside dans la multiplicité des pratiques et des mises en œuvre ainsi que dans les disparités des positions thérapeutiques et philosophiques. • Déclaration d'intérêts : l'auteur déclare ne pas avoir de conflit d'intérêts en relation avec cet article. L' AUTEUR Enrique Ledesma, formateur consultant, École supérieure Montsouris, Paris (75014), [email protected] 17 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte point de vue Peut-on réellement se soigner sans consentement ? MATHIEU BELLAHSEN VICTOR BRUNESSAUX SERGE KLOPP II La loi du 5 juillet 2011 suit deux logiques distinctes : celle du pan sécuritaire et celle de la protection des personnes par l'intervention du juge des libertés et de la détention (JLD) I Le programme de soins s'inscrit alors comme un internement au domicile, spoliant la sincérité de la relation de confiance recherchée par les soignants I La présentation systématique des patients hospitalisés sous contrainte devant le JLD risque de forcer l'amalgame entre soins et délinquance II Point de vue du Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire. Is it really possible to be treated without consent? The law of July 5th, 2011 focuses on two distinct areas: the security aspect and that of the protection of people through the intervention of the liberties and detention judge. The care programme thus resembles house arrest, despoiling the sincerity of the trust-based relationship sought by caregivers.The systematic appearance of patients hospitalised under restraint before the liberty and detention judge risks creating confusion between care and delinquency. This article gives the viewpoint of the "39 contre la nuit sécuritaire" collective. MOTS - CLÉS • Clinique • Dangerosité • Folie • Psychiatrie sécuritaire • Programme de soins • Souffrance KEY WORDS • Care programme • Clinic • Dangerousness • Insanity • Security-based psychiatry • Suffering 18 L a loi du 5 juillet 2011 réformant les hospitalisations sans consentement est entrée en application le 1" août 2011, se substituant à la loi du 27 juin 1990. Ce changement de législation a été le théâtre d'affrontements entre les différents acteurs du champ de la psychiatrie (usagers, soignants, familles) mais a également marqué le monde de lajustice avec l'introduction du recours systématique au juge des libertés et de la détention (JLD) par le biais d'une décision du Conseil constitutionnel [1]. Par ailleurs, cette loi a mis au jour une prise de position d'une partie de la classe politique en faveur d'une psychiatrie sécuritaire. 11 s'agit de l'aboutissement d'années de psychiatrie gestionnaire associées au tournant sécuritaire du discours d'Antony prononcé par le président de la République, le 2 décembre 2008. L'action, notamment, du Collectif des 39 contre la nuit sécuritairel a néanmoins permis un fléchissement sensible des positions d'un certain nombre de syndicats, partis et associations, créant ainsi un large front d'opposition à la loi. Celle-ci a pourtant été adoptée par le Parlement Nous reviendrons sur le changement radical de paradigme introduit par ce texte d'exception entremêlant le médico-psychiatrique, le juridique et l'administratif. En prenant l'allure d'une simple adaptation formelle des évolutions de la loi de 1990, cette loi contient en son sein une conception réductrice des rôles et missions alloués à la psychiatrie. Cette dernière passerait ainsi d'une logique soignante à une logique policière de contrôle social. 0 2012 Publié par Elsevier Masson SAS http://dxdoi.org/10.1016/tspsy.2012.05.006 CONTEXTE GÉNÉRAL I À l'issue de son adoption au Parlement, la loi du 27 juin 1990 relative aux hospitalisations sans consentement en psychiatrie devait être réformée dans les cinq ans suivant sa mise en application. Il aura fallu attendre la médiatisation d'un fait divers à Grenoble en novembre 2008 pour que le président de la République enjoigne le gouvernement à rédiger un nouveau projet de loi. Quelques mois plus tôt, en février 2008, était votée la loi de "rétention de sûreté" : le savoir psychiatrique était sommé de prédire la récidive pour certains types de crimes, les personnes concernées se voyant ainsi enfermées sur simple présomption psychiatrique au terme de leur peine. Ensuite, l'amalgame entre folie et dangerosité s'est répandu dans l'opinion publique sous la forme du si médiatique "schizophrène dangereux". 1 En débloquant immédiatement 70 millions d'euros en Janvier 2009 pour construire des chambres d'isolement, des unités pour malades difficiles (UMD) et pour "sécuriser" les hôpitaux psychiatriques (sans accorder aucun moyen supplémentaire pour des soins réels ou pour l'embauche de personnel), le gouvernement mettait en acte la pente sécuritaire dans laquelle s'inscrirait le projet de loi. Après des mois de bataille des professionnels, représentants de familles et d'usagers et certains partis de gauche, l'ancienne majorité gouvernementale a semblé mettre en sommeil son projet SOiNS PYSCH1ATR1E - n°281 -juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte I En novembre 2010, saisi par une association d'usagers, le Cercle de réflexion et de proposition d'actions sur la psychiatrie (CRPA), le Conseil constitutionnel rend une décision concernant la nécessité de l'intervention systématique du juge des libertés et de la détention (ILD) avant le 15' jour d'une hospitalisation sans consentement du fait de la privation de liberté (dans la loi de 1990, l'intervention du juge est possible mais non systématique). Le parlement a alors jusqu'au 1" août 2011 pour modifier la loi dont certains articles sont taxés d'inconstitutionnalité. I Dans les faits, la loi sera donc un patchwork entre deux logiques distinctes voire antagonistes: d'une part, le pan sécuritaire avec le renforcement de la contrainte et du contrôle social des patients pressentis comme une menace pour la société ; d'autre part, celui de protection de la liberté des personnes internées contre leur gré, supposé garanti par l'intervention du JLD. LÉGIFÉRER SUR LES PRATIQUES? I Plusieurs éléments ont concouru à l'adoption de ce projet de loi. Tout d'abord, l'illusion selon laquelle un tel texte pourrait résoudre certains problèmes posés dans le quotidien des pratiques, consubstantiels à l'exercice de la psychiatrie (qu'il s'agisse des "sorties d'essai" se prolongeant indéfiniment, de la difficulté de travailler le déni de la pathologie dans certains cas, de fonder une alliance thérapeutique entre les équipes de psychiatrie, es patients et leurs familles etc.). D'autre part, l'abandon réel des patients et des familles Dans de nombreux endroits, le soin se réduit à une hospitalisation pour traiter la "crise" et rééquilibrer le traitement médicamenteux, obligeant les familles à gérer seules le quotidien de leur malade souffrant psychiquement. I Certaines évolutions de la psychiatrie, en se nourrissant des normes gestionnaires actuelles (durée moyenne de séjour courte, intervention centrée exclusivement sur le traitement médicamenteux etc.), en abandonnant le côté relationnel du soin psychique et l'accompagnement nécessaire pour les patients ,‹ aigus du quotidien » [2] mettent au ban du soin les patients les plus en difficultés, les plus malades, les plus pauvres et leurs familles quand ils en ont encore une. De fait, le climat inhospitalier régnant dans de nombreux services de psychiatrie a tendance à faire fuir les patients, àjuste titre. Plutôt qu'une remise en question des pratiques dégradées sévissant en psychiatrie (manque de formation, SOINS PYSCH1ATR1E - n° 281 - juillet/août 2012 manque de personnels, hiérarchies rigides dans les services, conception des maladies mentales calquées sur le modèle des pathologies somatiques, traitement centré sur le symptôme et les troubles plutôt que sur une approche relationnelle) ce sera aux patients de s'adapter, à leur corps défendant. I Les « soins sans consentement en ambulatoire » [3] rebaptisés dans la loi du 5 juillet 2011 en « admission en soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent code » ont été promus comme la panacée pour prévenir ces dérives, panacée fondée sur l'amalgame pour les patients en proie à des pathologies psychotiques entre soins et traitement médicamenteux (de type injection mensuelle de neuroleptique retard notamment). Si les médicaments sont la plupart du temps nécessaires dans les pathologies psychiques graves, ils ne sont quasimentjamais suffisants en tant que tels, car ils ne peuvent se substituer à l' accompagnement et à la création de dispositifs accueillants, chaleureux et vivants dans les secteurs psychiatriques, associatifs et médicosocial. Et pourtant les discours lénifiants ont abondé dans ce sens lors des débats sur la loi. De plus, l'internement au domicile par les "soins" sans consentement en ambulatoire est un outil pratique pour remplir les objectifs gestionnaires de désengorgement des lits d'hospitalisation et pour faire accepter implicitement la logique de pénurie qui sévit depuis de nombreuses années en psychiatrie : les patients n'ont plus besoin d'être hospitalisés longtemps puisqu'ils peuvent être désormais contraints à se soigner en dehors de lieu d'hospitalisation. N'étant plus limité aux murs de l'hôpital, le système asilaire pourra désormais s'inviter jusque dans l'intimité des personnes. Ainsi, il sera désormais possible de forcer un citoyen à se soigner n'importe où dans la cité, y compris à son domicile, la contrainte se déplace d'un lieu (l'hôpital psychiatrique dans la loi de 1990) à un état (celui de personne en «programme de soins » qui précise lieux, dates, heures et rythmicité de tels "soins"). I Le plus étonnant est de constater que cet état de contrainte aux soins n'est pas jugé privatif de liberté, puisque le Conseil constitutionnel ne l'a pas prévu. Ce dernier ne pouvait le faire étant donné que cette procédure de contrainte au domicile n'existait pas au moment de sa saisie. Donc, cela ne donne pas lieu à l'intervention du JLD, seuls les patients hospitalisés à temps plein passent devant le juge. Pourtant il s'agit là d'un important précédent, remettant en cause l'un des NOTES 1. Le Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire est né pour répondre au discours de Sarkozy du 2 décembre 2008 qui, à partir d'un fait divers isolé, visait à faire passer la psychiatrie d'un dispositif de soins à un dispositif de contrôle social. Il regroupe des professionnels (psychiatres, infirmiers, psychologues, éducateurs...), des usagers, des parents et des citoyens. 2. Le collège est composé d'un psychiatre participant à la prise en charge (PEC) du patient, d'un psychiatre ne participant pas à la PEC du patient et d'un représentant de l'équipe pluridisciplinaire participant à la PEC du patient. 3. Cette formule est du juge Serge Portelli qui l'a déclarée devant plus d'un millier de personnes au meeting du Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire le 17 mars 2012. '19 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte RÉFÉRENCES [1] Décision du 26 novembre 2010: http://www. conseil-constitutionnetfr/ decision/2010/2010-71-qpc/ decision-n-2010-71-qpc-du-26novembre-2010.50790.html. [2] Buzare A. La psychothérapie institutionnelle, c'est la psychiatrie! Nîmes: Champ social; 2002. [3] Loi n° 90-527 du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation. http://www.legifrance.gouv.fr/ affichTexte.do?cidTexte=JORFTEX T000000349384&fastPos=1&fast Req1d=1417702860&categorieLie n=cid&oldAction=rechTexte [4] Foucault M. Histoire de la folie à l'âge classique. Paris:Gal limard;1976. [5] Gentis R. La psychiatrie doit être faite/défaite par tous. Paris:éditions Maspero;1973. fondements du droit français, l'inviolabilité du domicile, sans commission du juge. I À n'en pas douter, ce sont de tels "soins" contraints qui résument la bascule blopolitique et normative de notre lien social : toute personne passant en hospitalisation psychiatrique sans son consentement peut se voir imposer un « programme de soin » et revenir à l'hôpital si ce dernier n'est pas respecté. Inutile de dire que cette disposition est une ouverture du parapluie pour les professionnels : à la contrainte subjective qui peut exister entre un psychiatre, une équipe et un patient (qui force ce dernier à rester hospitalisé parce qu'il s'inquiète pour lui, parce qu'il le connaît depuis un certain temps, parce qu'un lien transférentiel existe), se substitue la contrainte protocolisée et désincarnée du substrat relationnel nécessaire à une psychiatrie faisant hospitalité à la folie. Enfin, dans cette loi, une nouvelle classe de patients fait son apparition, les patients « réputés dangereux » par le législateur qui vont voir leur possibilité de sortie du dispositif contraint beaucoup plus restreinte : à savoir les patients ayant dans leurs antécédents des soins à la demande du représentant de l'État (ex-hospitalisation d'office) à la suite d'une décision d'irresponsabilité pénale ou hospitalisés en unité pour malades difficiles (UMD) depuis moins de dix ans. Ceux-là devront passer devant un "collège d'experts" pour toute décision les concernant. Il s'agit, de fait, de la constitution, sans le dire et donc sans demander l'avis de la Commission nationale informatique et liberté (CNIL), d'un fichier de ces patients. Fichier qui pourrait consister en une utilisation détournée du dossier patient unique informatisé violant ainsi l'un des fondements déontologiques nécessaire à l'exercice de la médecine, à savoir le secret médical. RECOURS SYSTÉMATIQUE AU JUGE « Quand la folie devient une infraction. 3 » Le passage devant le juge aura pris de cours la magistrature, sommée de répondre à cette disposition légale à moyens constants. Dans la loi, il sera ainsi proposé d'avoir recours à l'aberration de la ‹( vidéo audience » quand les patients ne pourront se rendre au tribunal ou quand les juges ne pourront faire des « audiences foraines » dans les lieux d'hospitalisation. Au quotidien, malgré les explications données par les professionnels, ce passage devant le juge (qu'il soit des libertés et de la détention ne rassure en rien) est souventvécu par les patients 20 comme une criminalisation de leur maladie, patients dont l'état psychique est souvent précaire dans les premiers jours d'hospitalisation. LA LOI, ENTITÉ NATURELLE OU CONSTRUCTION POLITIQUE? I Si la loi est souvent présentée aux jeunes professionnels comme un cadre naturel, allant de soi, rappelons qu'elle est en réalité une construction politique et sociale issue de rapports de forces entre différents acteurs. Tout comme l'ensemble de normes qui traversent le champ psychiatrique, qu'elles soient gestionnaires, sécuritaire ou hygiénistes, il est nécessaire de s'intéresser au contexte qui a vu naître une loi et en quoi son application répond à des objectifs idéologiques précis, qu'ils soient émancipateurs, réactionnaires ou conservateurs. Mais comment cela se passe-t-il dans les enseignements dispensés aux futurs psychiatres ? I L'apprentissage des modalités d'application de la loi par les jeunes médecins a lieu durant les premières années d'études, avant le passage des épreuves classantes nationales et le choix de la spécialisation en psychiatrie. La présentation en est assez limitée et pragmatique : à des symptômes correspond une maladie bien identifiée, nécessitant une prise en charge protocolaire avec un traitement défini, ainsi qu'une hospitalisation soit avec l'accord du patient en soins psychiatriques libres (SPL), soit sans son accord en soins psychiatriques à la demande d'un tiers (SPDT), ou en l'absence de tiers et en soins psychiatriques à la demande du représentant de l'Etat (SPRE). Les détails s'arrêtent là. Les internes ayant choisi la psychiatrie n'ont ensuite aucune autre information concernant la loi, et l'arrivée des jeunes psychiatres dans les unités d'hospitalisation montre une réalité bien plus complexe et contraignante. La lourdeur administrative peut décourager certains à proposer des permissions aux patients ou leur fait différer une sortie. L'incompréhension initiale de la loi place donc une véritable barrière empêchant la rencontre et le soin relationnel entre le praticien en formation et le patient. L'application d'un protocole de soins prenant plus de place qu'une réflexion clinique. RÉSISTER À UNE LOI ILLÉGITIME I Devant de telles dérives sécuritaires, il nous paraît important de témoigner de notre expérience clinique. Si nous sommes résolument SOiNS PYS0-11ATR1E - n°281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte contre la loi du 5 juillet 2011 et son amalgame entre folie et dangerosité, conception réductionniste du soin basée sur l'entrecroisement du médicament et du principe de précaution, nous devons nous donner les moyens de lutter politiquement pour son abrogation et cliniquement pour son dépérissement. Il nous paraît donc important de témoigner de notre engagement clinique et politique auprès des patients et de leurs familles Responsabilité éthique et subjective qui ne peut s'abriter derrière un arsenal législatif, de protocoles ou de "bonnes pratiques" visant à dégager la responsabilité légale des soignants, sauf à penser que les soignants permettent d'éviter les procès plutôt que soigner et prendre soin... Il est ainsi de notre responsabilité de ne pas laisser dériver la psychiatrie vers la gestion de l'urgence et de la crise et de penser, toujours et encore, le secteur psychiatrique comme un dispositif de désaliénation, de psychothérapie institutionnelle fondée sur des soins psychiques relationnels faisant place à l'étrangeté d'autrui, à son accueil et au travail de perlaboration psychique. Rappeler aussi qu'il est possible de privilégier les hospitalisations libres, de lever la contrainte avant le passage devant le juge si l'état clinique de la personne le permet, de ne pas prescrire de programme de soins une fois que le patient est sorti de l'hôpital. Politiquement, nous avons pris comme décision de refuser l'application des programmes de soins en ambulatoires, ceux-ci nous servent uniquement à faire des sorties seul pour les patients dans le cadre d'une hospitalisation. CONCLUSION • Les "soins" promus par la loi partent d'un postulat précis : ce qui soigne, ce sont d'abord et avant tout les médicaments. Si l'on pensait que la folie et les problématiques existentielles complexes se traitent uniquement par des médicaments, en effet, leur caractère obligatoire serait le meilleur choix pour répondre à la demande sécuritaire actuelle entrecroisant principe de précaution et idéologie fantasque du risque zéro. I Ce réductionnisme structurerait les "soins" autour de la prise régulière de médicaments, et notamment pour les patients étiquetés "psychotiques", sur l'injection mensuelle d'un neuroleptique retard. Mais peut-on, en raison et avec sérieux, appeler cela des soins ? Est-ce cela l'idée contemporaine que l'on se fait de soins psychiques de qualité tenant compte de la spécificité SOiNS PYSCHIATRIE - n°281 - juillet/août 2012 de la psychiatrie dans le champ médical et social ? Alors que cinquante ans de lutte contre la ségrégation des plus fous d'entre nous ont permis, quand les moyens et une formation de qualité étaient au rendez-vous, de réintégrer les "malades mentaux" dans la cité, force est de constater que l'arrivée des "soins" sans consentement en ambulatoire reconstruit un système asilaire qui sera non plus limité à l'hôpital mais s'étendra au domicile, donnant ainsi l'illusion à la cité de se protéger de ses membres les plus en marge. Un « grand renfermement » [4] à domicile ; solution sécuritaire dont l'efficacité gestionnaire pour répondre à la baisse du nombre de lits et des moyens alloués au développement des structures ambulatoires, nous apparaît comme la trace au mieux d'une déraison, au pire d'un cynisme d'État. I Cette extension illimitée de la contrainte dans le champ social marque un changement paradigmatique du rôle alloué à la psychiatrie. Au nom du principe de précaution, toute personne un tant soit peu en marge des normes dominantes devra être mise sous contrôle puis normalisée par de tels "soins". Cette légitimation d'un État d'exception se fait au détriment d'un accueil de la souffrance singulière des patients, de l'écoute et du temps nécessaire pour mettre en place une relation de confiance et des créations que nous devons trouver au quotidien pour soigner les patients d'une manière singulière et non ségrégative. Dans cette perspective, il nous paraît important pour la suite de prendre acte des prises de positions affichées lors du meeting du Collectif des 39 du 17 mars 2012. Alors que nous avions invité la plupart des candidats aux élections présidentielles et législatives, seuls les représentants de l'ensemble des partis de gauche sont venus et se sont prononcés clairement pour l'abrogation de la loi du 5 juillet 2011. Si le Conseil constitutionnel a déclaré, le 20 avril dernier, contraire à la Constitution le paragraphe II de l'article L.3211-12 du Code de la santé publique et son article L.3213-8, ces deux dispositions, issues de la loi du 5 juillet 2011, ne pourront être aborgées que le 1" octobre 2013 afin que le législateur puisse revoir sa copie. Il demeure qu'il nous appartient— collectivement et individuellement — au niveau local et national de subvertir, avec les patients et leurs familles, de telles lois qui tendent à empêcher des soins psychiques de qualité. « La psychiatrie doit être faite et defaite par tous » rappelait Roger Gentis [5] et donc par chacun ! • Déclaration d'intérêts les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d'intérêts en relation avec cet article. LES AUTEURS Mathieu Bellahsen, psychiatre du secteur adulte 91G08 dans l'Essonne, membre fondateur du Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire et d'Utopsy Victor Brunessaux, interne en psychiatrie, secteur 91G08, AFFEP (Association pour la formation française et européenne en psychiatrie), Serge Klopp, cadre de santé, secteur 91G08, membre fondateur du Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire, Étampes, (91152), [email protected] www.collectifpsychiatrie.fr 21 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte pratique soignante L'intérêt d'un travail collaboratif pluridisciplinaire NATHALIE ALAMOVVITCH MARIE-NOËLLE VACHERON CAROLINE NAVION 1 Le centre hospitalier Sainte-Anne, à Paris (75), a anticipé la mise en vigueur de la loi du 5 juillet 2011 en initiant un groupe de travail pluridisciplinaire I L'implication majeure de la direction des affaires juridiques et des usagers est ici à souligner I Cette démarche rend compte aujourd'hui d'un premier bilan sur l'impact des soins et des organisations. The interest of multi-disciplinary collaborative work. Sainte-Anne hospital in Paris anticipated the application of the law of July 5th, 2011 by initiating a multi-disciplinary task force. It is important to highlight the major involvement of the directorate for legal affairs and users. This task force is now presenting an initial report on the impact on care and organisations. MOTS-CLÉS • Accès aux soins • Droit des patients • Juge des libertés et de la détention • Programme de soins • Service juridique KEY WORDS • Access to care • Gare programme • Legal department • Liberty and detention judge • Patients' rights L es nouvelles modalités d'hospitalisation en psychiatrie mises en place par la loi du 5 juillet 2011 ont nécessité une anticipation de la réforme par la direction des affaires juridiques et des usagers du centre hospitalier Sainte-Anne (CHSA), ainsi qu'un nouveau mode d'organisation et de gestion sur le plan administratif. Elles ont surtout révélé la nécessité et l'intérêt d'un travail collaboratif pluridisciplinaire en renforçant les liens administration-services de soins, permettant de mettre en oeuvre ensemble un dispositif complexe en respectant les droits des patients. Le service juridique du CHSA et le secteur 75G13 (14e arrondissement de Paris) ont souhaité faire part de leur expérience de partenariat pour illustrer l'importance de ce travail collaboratif. établissements de la communauté hospitalière de territoire de Paris en préfiguration' constitué de 10 fiches pratiques, une synthèse des principales mesures, les textes, les références réglementaires et liens internet utiles : • avec chaque service de soins par le biais de réunions d'information "sur mesure" et d'échanges entre le 25 juillet et fin décembre 2011 : plus de 400 participants dénombrés, • avec les secrétaires médicales concernées de l'établissement, maillon essentiel de la gestion des hospitalisations sans consentement entre services de soins et administration, • avec la mise en place d'une hot lime à la direction des affaires juridiques et des usagers permettant DES SOINS PSYCHIATRIQUES de répondre à toutes interrogations des services, ainsi que réfléchir collectivement aux cas concrets pour lesquels les dispositions de la loi du 5 juillet restaient "obscures" : près de 200 appels recensés. 1 Concrètement, sa mise en place s'est dérou- LES IMPACTS DE LA RÉFORME L'ANTICIPATION DE LA RÉFORME lée en plusieurs temps : 22 • en amont avec le vice-président du tribunal de 1 Ils sont aujourd'hui multiples dans la gestion grande instance de Paris (TGI) par le biais de réunions préparatoires regroupant l'ensemble des acteurs concernés par sa juridiction ; • au sein de la direction des affaires juridiques et des usagers par une importante analyse des textes jusqu'à l'intégration de la seconde question prioritaire de constitutionnalité (QPC), adoptée le 9 juin 201P juste avant la promulgation de la loi. Ce travail a débouché sur la création d'un guide pour l'application du nouveau dispositif, disponible sur l'intranet de l'établissement. Par ailleurs, ce documenta alimenté un travail en commun avec les des hospitalisations sur le plan administratif. 0 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés http://dx.doi.org/10.1016/j.spsy.2012,05.002 Cela se traduit par : • une charge de travail supplémentaire pour l'équipe du bureau des hospitalisations sans consentement : multiplication et création de documents administratifs, mise en place d'outils informatiques adaptés (tableaux de bord, suivis, alertes, etc.) , élaboration de procédures spécifiques (réunion des collèges, etc.), mise à jour des documents à destination des usagers. Cela a provoqué un réel changement des pratiques et une réactivité de tous les instants ; SOINS PYSCHIA'T'RlE - no281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte • une nouvelle relation entre le CHSA et le juge des libertés et de la détention (ILD), à l'appui d'une ligne cryptée entre le bureau des hospitalisations sans consentement, le greffe du tribunal et la préfecture. Avec l'accord du TGI, l'établissement a organisé une audience foraine dans une salle spécifiquement aménagée, permettant aux patients "auditionnables" mais non transportables de se présenter devant le juge. L'expérience fut concluante et pourrait se renouveler une fois par mois. I Cette réforme, par-delà les controverses et les réelles difficultés de mise en oeuvre, a permis un renforcement du droit des patients en faisant intervenir systématiquement le JLD pour toute hospitalisation sans consentement dépassant les quinze jours. Elle a permis aux professionnels des établissements de santé concernés de réfléchir et de travailler en collaboration plus étroite, et de découvrir un nouveau partenaire qui agit de sa place, dans l'intérêt du patient. POINT DE VUE DU SERVICE DE SOINS La loi du 5 juillet 2011 consacre un difficile équilibre entre la protection des droits individuels des patients avec l'intervention dujuge des libertés et de la détention au quinzième jour de l'hospitalisation, et la protection de la société par le biais des mesures concernant une certaine catégorie de patients réputés dangereux. Son application soulève de nombreuses questions, tant pour les psychiatres que pour les agents administratifs (encadré 1), en raison de la difficulté de compréhension d'un texte complexe, de l'accroissement des tâches administratives au détriment du soin. D'où l'importance pour les soignants d'avoir pu bénéficier d'une explication de la loi par le service juridique du CHSA, et d'une véritable hot une surtout dans les premiers mois. Le secteur 75G13 est un secteur parisien, intervenant sur un bassin de population très contrastée, de 136 000 habitants. NOTES 1, Décision 2011-135/140 du 9 Juin 2011, Monsieur Abdellatif et autres (portant sur les hospitalisations d'office). 2. Dépêche APM du 8 août 2011 COOH8001. ENCADRÉ 1 Le secrétariat médical, vers de nouvelles fonctions ? Le secrétariat médical est la charnière entre les médecins et l'administration de l'établissement, il gère notamment les admissions, s'assure de leur conformité et de la rédaction des certificats médicaux. Le ler août 2011 débute un véritable casse-tête pour les secrétaires médicales en psychiatrie. Le premier objectif a été de réaliser à notre initiative un schéma synthétique et didactique pour les équipes de notre service (et pour nous) suite aux réunions d'informations sur la nouvelle loi. Il a fallu lire, relire, décrypter et enfin comprendre les tenants et les aboutissants de celle-ci, et ce, dès fin juillet; la lecture d'une loi n'est pas simple et n'est pas à la portée de tous, mais nous avons pu bénéficier du soutien et de la disponibilité de la direction des usagers au quotidien. Nous nous tenons prêtes et très vite nous découvrons alors la multiplication des certificats et l'ampleur de la charge de travail, dans la période du mois d'août et la moitié des effectifs habituels. Entre théorie et réalité de terrain : les douze premiers jours de l'hospitalisation sous contrainte d'un patient sont rythmés par une multitude de certificats, à date fixe, ce qui nécessite une rigueur et une organisation "sans faille" ; douze jours qui deviennent une course après les psychiatres, en composant avec les attentes du JLD. Les contraintes s'accumulent rapidement et s'installent avec entre autres : • la préparation des "certificats du jour' qui découragent les médecins lorsqu'ils arrivent; • la rédaction des certificats du week-end : qui a le droit de rédiger ? Il faut s'organiser avec les médecins d'astreinte et planifier ce qu'ils doivent rédiger et à quelle date (entre le certificat des vingt-quatre heures et le certificat des soixante-douze heures); SOiNS PYSC111ATR1E - n°281 - juillet/août 2012 • les convocations des patients au tribunal qui arrivent parfois très tard, à transmettre d'urgence aux équipes soignantes pour organiser le transport; - les délais très courts si le directeur, sur avis du médecin, veut faire appel de la décision du JLD (dans les vingt-quatre heures selon la loi mais qui se révèlent seulement être six heures en pratique); • la difficulté d'une non-conformité d'une hospitalisation 13212-1-2 (péril imminent) rédigée par erreur par un médecin exerçant dans l'établissement d'accueil, un vrai problème pour régulariser rapidement et refaire le certificat de placement; • les patients hospitalisés en admission en soins sans consentement à la demande du représentant de l'État (Aspre) : la difficulté d'une entrée le vendredi à 16 heures et les sorties de courte durée à prévoir quelques jours avant pour obtenir l'autorisation du représentant de l'État ; • les permissions de week-end et programmes de soins : lorsque le patient rentre après ses quarante-huit heures de sortie, faut-il rédiger un certificat ? si oui, lequel ? (situation ? réintégration ? Ce point reste à éclaircir). Nous nous interrogeons sur l'organisation de nos collègues en province qui ont souvent moins de moyens et sur leur façon de mettre en application la loi. En effet, l'interprétation diffère en quelques points selon les établissements, ce que nous avons pu constater lors de transferts de patients. Enfin, nous nous questionnons également sur notre quotidien qui est rythmé par les certificats la moitié de la journée, et notre avenir à devenir "secrétaires des certificats". L'équipe des secrétaires du secteur 75G13, centre hospitalier Sainte-Anne 23 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte RÉFÉRENCES [1] Naudin J, Lançon C, Bouloudnine S. Soins sans consentement : trois mots, trois problèmes. Revue Santé Mentale 2011;161:25-30. [2] vacheron MN, Laqueille X. L'admission en soins psychiatriques sous contrainte : apports et limites de la loi du 5 juillet 2011. Revue Laennec 2012;1:10-23. [3] Braitman A et al Critères de prise de décision aux urgences de l'hospitalisation sans le consentement. Ann Med Psychol 2011;169;10:664-667. [4] Lachaux B. Clinique et éthique du consentement. Rhizome 2011;42:2-3. Au-delà de ces considérations, qu'en est-il actuellement au quotidien ? Nous souhaitons aborder ici la difficile question des soins sans consentement en ambulatoire à partir de deux vignettes cliniques (encadrés 2 et 3). pathologie dans l'expérience qu'ils ont vécue [1] . Le programme de soins ouvre alors la possibilité de soigner en ambulatoire si le degré d'autonomie du patient est suffisant et si l'entourage est présent et soutenant. LA LOI FAVORISE L'ACCÈS AUX SOINS ET LE MAINTIEN DANS LES SOINS LES LIMITES DE CES DIFFÉRENTES MESURES La loi instaure la possibilité de soins ambulatoires sans consentement après une période d'observation initiale de soixante-douze heures, par le biais de l'établissement d'un programme de soins. Cette mesure rassure à la fois : • les proches, souvent traumatisés par la décision de l'hospitalisation qui imaginent que cette obligation de soins suffira à éviter la rechute ; • le patient, qui est informé qu'il sera revu à vingtquatre puis à soixante-douze heures de la décision des soins sans consentement, et de la possibilité de suivi en ambulatoire dans un cadre précis ; • le JLD, qui va parfois préconiser le programme de soins après l'audition d'un patient et sans toujours tenir compte des certificats médicaux établis. Cette période de soixante-douze heures est particulièrement utile à la fois pour les soignants et les patients : • pour les soignants, ce temps permet l'évaluation de la pathologie et la rencontre avec l'entourage ; • pour les patients, qui vont pendant cette durée, être aidés à prendre la mesure de la part de leur La possibilité de soins sans consentement en ambulatoire peut avoir un effet pernicieux dans cette période où nous manquons de lits de façon récurrente, et où l'établissement du programme de soins autorise des sorties plus rapides. Le risque est de devoir aller chercher un patient en rupture de soins prématurée parce qu'il n'aura pas eu le temps suffisant pour accepter la maladie, comprendre l'importance de prendre un traitement et l'objectif du programme de soins. Celuici est par ailleurs difficile à mettre en place en cas de domicile indéterminé, le patient restant alors hospitalisé pour raisons sociales et non thérapeutiques, du fait de structures d'aval saturées ou inexistantes [2] . Lorsque le programme se prolonge sur une durée assez longue du fait de la difficulté du patient à reconnaître sa pathologie mais non ses symptômes, ou de la crainte du psychiatre de "perdre" son patient, il peut perdre son sens initial, qui est celui de conduire à une reconnaissance des troubles et à un libre consentement aux soins. Il s'assimile alors pour le patient à une privation ENCADRÉ 2 Madame L Madame L. est hospitalisée à la demande d'un tiers dans le service au décours d'une visite à domicile du centre médico-psychologique (CMP), après un signalement effectué par le mari de la patiente, son généraliste et la mère de cette dernière. Femme au foyer, après une formation de vétérinaire, mère de 5 enfants et catholique pratiquante, Madame L. a progressivement développé des idées délirantes à thématique mystique et sexuelle centrées sur son mari, et à thématique persécutive centrée à la fois sur son mari mais également l'entourage familial à l'exception de ses enfants. Elle s'est séparée de son mari depuis environ deux ans et souhaite divorcer. L'inquiétude de l'entourage est liée à des menaces suicidaires récentes de la patiente avec risque pour les enfants, et refus de soins. À son entrée, son discours est projectif, et interprétatif avec une note passionnelle. Elle accepte cependant le traitement et demande à rester en lien avec son avocat d'autant qu'elle doit se présenter devant le juge pour enfants cinq jours après son admission. Cette audition fait suite au signalement des grands-parents maternels inquiets de ne plus voir leurs petits enfants et de l'état de leur fille. Au bout de quelques jours de traitement antipsychotique, l'état de 24 Madame L s'apaise. Elle apparaît moins sthénique et moins virulente bien que son discours reste paralogique et persécutif. Le mari est reçu en sa présence, et l'évaluation de la situation familiale est effectuée avec lui mais également avec les grands-parents, le médecin généraliste et l'avocat de la patiente. La patiente reconnaît être moins angoissée avec le traitement, bien qu'elle ne perçoive pas le caractère pathologique de son comportement et de ses propos. Afin de maintenir l'alliance initiale, il est décidé de proposer très rapidement le maintien de la mesure de soins sans consentement avec établissement d'un programme de soins, et pour lui permettre de se rendre à l'audition prévue avec le juge pour enfants avec son mari et ses enfants. Un mois après cette sortie, la patiente se rend toujours régulièrement à ses consultations et accepte un traitement d'action prolongée. L'objectif a été ainsi de tenter un climat de confiance et une alliance avec la patiente par le biais de soins ambulatoires sans toutefois risquer l'interruption de la continuité du traitement dès la sortie de l'hôpital, de maintenir son lien à ses enfants âgés de 15 à 5 ans et son insertion sociale. SOiNS PYSC1-11ATR1E - n° 281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte ENCADRÉ 3 Monsieur S Monsieur S. est un jeune homme de 25 ans, hospitalisé dans le service pour la première fois. Cette hospitalisation fait suite à un épisode psychotique aigu marqué par une claustration à domicile depuis plusieurs mois, un désinvestissement de ses études, un discours allusif et rationalisant, une discordance idéo-affective avec froideur de contact, et rires immotivés ainsi qu'une menace de passage à l'acte auto et hétéroagressif envers ses parents chez qui il vit. À l'entrée le patient est dans le déni des troubles, et refuse les soins. Son discours est paralogique, par moments vide de sens et allusif. Sa réticence est sous-tendue par un vécu délirant persécutif flou probablement imaginatif et interprétatif. Il est discordant et très ambivalent avec un déni des difficultés relationnelles et intellectuelles. Lors de l'audition à J+15 devant le JLD, le patient se présente calme avec un discours rationalisant et banalisant. Malgré les différents certificats, le JLD propose la mise en oeuvre d'un programme de soins. Au terme d'une réunion pluridisciplinaire, il est décidé de faire appel de cette décision du fait de l'état clinique du patient avec prédominance de symptômes négatifs à type de repli, d'apragmatisme, d'évitement du contact, de troubles cognitifs à l'origine d'un désinvestissement des études, de symptômes positifs à type d'idées délirantes à thème persécutif, dysmorphophobique, d'empoisonnement et mégalomaniaque, de déni des troubles et d'absence d'adhésion au traitement. Le délai est presque dépassé en raison de la nécessité d'évaluer la situation et nous faisons alors appel à l'administration pour comprendre la décision du JLD et assurer la transmission de notre recours dans les plus brefs délais. Le programme de soins apparaît en effet prématuré, l'état du patient étant incompatible avec un suivi ambulatoire, le risque étant un nouveau repli à domicile, et un passage à l'acte auto-agressif dans un contexte anxieux et dissociatif. L'appel est accepté et l'hospitalisation complète maintenue. Cependant monsieur S. apparaît alors très revendiquant envers l'équipe soignante, dans une méfiance accrue et une grande réticence. Les entretiens sont centrés sur les voies de recours possibles et non sur la maladie. Les parents en revanche apparaissent soulagés par le maintien de la mesure, évoquant la possibilité pour eux si celle-ci avait été levée de porter plainte contre le service. L'adhésion partielle aux soins ne sera obtenue qu'après plusieurs mois de prise en charge avec maintien de la continuité des soins par le biais d'une prise en charge en hôpital de jour. de liberté puisqu'il ne peut aller et venir à sa guise. Le discours devient centré sur la contrainte, le vécu persécuff des soins, les voies de recours possibles, et non plus sur les symptômes éprouvés par le patient et sa souffrance. Au contraire le patient peut accepter de façon docile et passive cette obligation de soins, ne tentant aucune élaboration par rapport à son expérience passée de la maladie, ne se donnant pas la possibilité d'agir par lui-même. 1 Enfin le programme est parfois demandé par le juge au quinzième jour de l'hospitalisation, malgré l'avis circonstancié du psychiatre. La difficulté alors pour ce dernier en cas d'appel de cette décision, est de maintenir la confiance du patient et parfois de l'entourage. Là encore le travail d'élaboration autour des symptômes et du soin disparaît pour ne laisser la place qu'au discours centré sur l'administratif et le droit du patient, illustré par le cas de Monsieur S. (encadré 3). de l'établissement du programme, de ses modalités d'application, de la désignation de ceux qui seront porteurs du programme de soins tant le psychiatre que les infirmiers référents du patient, l'assistante sociale, le psychologue.., et de sa durée. Elle est d'autant plus nécessaire que la loi conduit àun changement de pratiques par le biais de la disparition de la réflexion psychodynamique pour une clinique factuelle, descriptive et comportementale mise en évidence par la multiplication des certificats. Les médecins se transformant ,< en techniciens de santé» pour reprendre les termes de Bernard Lachaux [4] . Ces certificats sont rédigés non plus en fonction du patient mais de celui qui va les lire : l'administration, l'avocat du patient, le juge, etc. La loi introduit là un regard extérieur dans le soin qui n'est plus ce rapport singulier entre le soignant et son patient. VERS UNE MODIFICATION DES PRATIQUES La possibilité de soins sans consentement en ambulatoire légalise la pratique ancienne des sorties d'essai prolongées. Elle évite des longues hospitalisations et limitera, on peut l'espérer, les "perdus de vue" encore trop nombreux. Au-delà des considérations pratiques, elle pose la question de l'évolution d'une contrainte au libre consentement du patient, de la transformation d'un programme en contrat, témoin d'une réciprocité entre deux personnes, et d'une intersubjectivité. I Le maintien d'un patient dans des soins sans consentement impose une réflexion individualisée autour de chaque patient, pluridisciplinaire entre les soignants et souvent l'administration. Cette réflexion est présente dès l'entrée dans les soins avec la notion du risque pour le patient et pour autrui [3], et tout au long de l'hospitalisation. Par la suite se pose la question du moment SOiNS PYSCFRATR1E - n°281 - juillet/août 2012 CONCLUSION • Déclaration d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d'intérêts en relation avec cet article. LES AUTEURS Nathalie Alamowitch, directrice adjointe en charge de la direction des affaires juridiques, des usagers, de la qualité, de la communication et de la CHT (communauté hospitalière de territoire), Marie-Noêlle Vacheron, chef de service du secteur 75G13, vice-présidente de la CME, Caroline Navion, responsable des affaires juridiques, L'équipe des secrétaires du secteur 75G13, centre hospitalier Sainte-Anne, Paris (75014) [email protected] 25 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte entretien La psychiatrie, les libertés et la loi quelle place pour le juge ? : ENR1QUE LEDESMA I David Peyron, premiervice-président du tribunal de grande instance (TGI) de Paris, en charge du service des juges des libertés et de la détention (JLD) évoque sans détours les difficultés de mise en oeuvre de cette réforme mais plaide également, sans concession, pour le contrôle des libertés individuelles du patient, droit fondamental que le JLD a le devoir de garantir I Entretien. Ensuite, sur la question de l'investissement matéloi du 5 juillet 2011 et quels bénéfices les patients peu- riel et humain, avec Chantal Arens, présidente du TGI de Paris, nous avons décidé de transférer tous vent-ils en attendre ? les moyens nécessaires afin d'anticiper cette charge supplémentaire quitte à réajuster par la a, me semble-t-il, deux aspects Daniel Peyron. Il y suite si les moyens attribués se révélaient trop dans cette loi. Il y a un aspect immédiat qui est importants. celui de la protection des libertés individuelles et Donc après nous être réunis, nous avons très vite un autre qui est l'aspect médical. pris des contacts avec les En France, pour ce qui hôpitaux concernés, la Nous sommes p assés est de la question de la préfecture de police de privation des libertés, on Paris, le barreau de Paris, de 12 affaires par mois fait intervenir un juge les experts médicaux, le s'appuyant sur la loi. Au commandement militaire niveau des principes des à 12 affaires par jour du Palais de justice, bref, libertés publiques cela tous les interlocuteurs pour tenter d'identifier et semble être du domaine de l'évidence. Bien évide quantifier tous les impacts de cette réforme. demment, pour ne pas être simpliste, considérant Une des premières décisions internes a été de qu'il s'agit de patients, nous devons nous poser séparer cette activité de celle du ILD pénal" et les questions suivantes : d'abord si cette intervend'ainsi créer un secrétariat distinct avec une tion est réellement utile et ensuite si elle ne prééquipe de volontaires. Et cela était très important sente pas des effets "seconds" médicaux. Si ces pour affronter ce changement sereinement. effets sont neutres : ça va ; s'ils sont positifs, c'est une "divine" surprise ; et s'ils sont négatifs, il faut Les contacts avec les hôpitaux sous notre juridiction, que sont le Centre hospitalier Sainte-Anne les mettre en balance avec la question juridique (75), l'établissement public de santé de Maisonde la liberté. Blanche (75) et le groupe public de santé de PerSoins Psychiatrie : La loi est entrée en vigueur le août ray-Vaucluse (75), au mois de mai et au mois de 2011. Quels moyens et quelle organisation ont été mis juin 2011, nous ont permis d'anticiper et d'orgaen place par le ministère de laJustice pour faire face à niser le mois d'août. Ce groupe de travail, ainsi constitué, s'est réuni de nouveau en sepces nouvelles dispositions ? tembre 2011 puis en janvier et en mai 2012. Pour le TGI de Paris, cela a représenté un invesDP. Tout d'abord, il faut avouer que cette loi tissement à moyens constants. Cela comprend a généré un stress énorme lorsque l'on a su deux magistrats et quatre fonctionnaires du greffe qu'elle arrivait. En effet, le Conseil constitutionnel a prévu, dans sa sagesse immense, qu'elle détachés sur cette mission, d'investissements en lieux et en matériel. Mais ce sont également des entrerait en application un 1" août et ça, c'était très "novateur". Ces fonctions nouvelles, attri- frais d'avocat', des expertises judiciaires et bien évidemment, une organisation qui ont eu des buées à un service "sous pression" par la nature conséquences sur tous les acteurs du Palais de de son activité, tel que le service des JLD, ont été justice de Paris. un véritable défi. Soins Psychiatrie : Quel est voire avis personnel sur la David Peyron CD 2011 Publié par Elsevier Masson SAS 26 http://dxdoi.org/10.10161j.spsy.2012.04.007 SOiNS PSYCHIATRIE - n° 281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte Soins Psychiatrie : Les patients et les prévenus ne sont pas présents au Palais dejustice pour les mêmes motift. Avez-vous mis en oeuvre des aménagements particuliers afin que ceux-ci ne se croisent pas ? La possibilité de visioconférence est-elle pertinente ? DP. Préalablement, il faut préciser que nous avons décidé, d'un commun accord, que les audiences se dérouleraient au Palais de justice, et cela pour deux raisons. La première tient au fait que les trois hôpitaux qui travaillent avec nous sont répartis sur six sites distincts. Ces sites n'étant pas équipés pour accueillir le juge et organiser une audience publique, nous avons convenu, avec nos partenaires, que nous ne pouvions pas faire autrement pour l'instant. Nous avons fait en sorte que les conditions ne puissent pas être qualifiées d'indécentes et particulièrement que le monde du pénal et celui de la psychiatrie se croisent le moins possible. Concrètement, les affaires pénales sont traitées l'après-midi, voire en soirée, et les patients sont, quant à eux, reçus le matin : à 9 h 30 nous recevons les patients de Sainte-Anne et de MaisonBlanche, puis, à partir de 10h 30, ceux de PerrayVaucluse pour des raisons pratiques. Les patients attendent, de fait, assez peu. Le second point est lié aux transports et aux facilités de stationnement au sein du Palais de justice de Paris, ce qui en soi est un véritable privilège. Soins Psychiatrie : Cette loi a-t-elle permis de nouvelles modalités de travail avec les établissements spécialisés ?A-t-elle eu commune conséquence un nouveau rapport avec le monde de la santé mentale ? DP. En réalité, il y a un mouvement quantitatif énorme : nous sommes passés de 144 affaires en 2010 sous l'ancienne loi [1], soit de 12 affaires par mois à 12 par jour aujourd'hui. Cela a entraîné un changement important qui a nécessité que nous tissions des liens extrêmement riches avec nos interlocuteurs. Soins Psychiatrie : Le juge des libertés et de la détention est un nouvel acteur dans le parcours des patients hospitalisés sous contraintes. À quel niveau et sur quelles questions situez-vous son expertise ? Quels liens existet-il avec les certificats des psychiatres ? DP. Au niveau de la légitimité de la privation de liberté dont le patient fait l'objet etje crois que les patients le comprennent assez bien. Je pense que les personnels soignants arrivent à expliquer l'objet de cette rencontre avec le juge et c'est extrêmement SOiNS PSYCHIATRIE - n° 281 - juillet/août 2012 important d'avoir cette approche pédagogique. Certains patients, en effet, peuvent se demander quelle faute ils ont pu commettre pour se retrouver devant un juge. Il faut, je pense, clairement expliquer que le juge a une fonction constitutionnelle qui est de protéger les libertés et pas seulement de condamner. La plupart du temps, dans près de 90 % des cas pour les audiences des quinze jours, ils sortent plutôt satisfaits qu'un juge ait examiné la légitimité de leur hospitalisation. L'avis médical est à double détente. Tout d'abord, il est présent en lien avec la décision d'hospitalisation du préfet ou du chef d'établissement, puis dans un nombre considérable de certificats pendant toute l'hospitalisation et avant les quinze jours. C'est sur la base de ces certificats et de l'avis conjoint que nous voyons, s'il y a des troubles psychiatriques, et si ceuxci rendent le consentement éclairé impossible. NOTE • À Paris, les frais d'avocat sont pris en charge par leTGI. Soins Psychiatrie : Voyez-vous, dans votre approche, une différence notable entre l'audience des quinze jours et celle des six mois ? DP. Dans les deux cas, il y a privation de liberté. Cependant, nous constatons, en réalité, que sur quinze jours, la situation est évolutive. Nous pouvons observer que dans un nombre limité de cas, la situation a peu évolué, mais dans un très grand nombre de cas, la situation a, au contraire, largement évolué. Dans la plupart des cas, nous voyons bien que le patient sortira à assez court terme. La question est de savoir si l'on anticipe la décision ou si on l'accompagne. Le plus souvent, nous faisons le choix, raisonnable et sage, de l'accompagner en expliquant au patient que c'est par un travail avec son médecin qu'il sortira assez rapidement. Dans certains cas, le patient n'accepte pas la décision. C'est notamment le cas des personnes hospitalisées depuis plus de six mois. En ce qui concerne les audiences des six mois, nous devons veiller à ce que les certificats ne soient pas basés, peut-être, sur une certaine routine. Nous pouvons, dans certains cas, ordonner une expertise. Parfois, nous avons quelques surprises : nous ordonnons alors une mainlevée. Dans un nombre très limité de cas, nous ordonnons une mainlevée "sèche", notamment lorsque nous constatons que des patients "simulent" des troubles pour échapper à leur responsabilité pénale. Dans la plupart des cas, nous donnons la possibilité à l'établissement de soins et à l'équipe d'établir un programme de soins dans les vingt-quatre heures car il faut tout même que la sortie ne fasse pas brutalement. 27 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte RÉFÉRENCE MI Loi n° 90-527 du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation. http://www.legifrance.gouv.fr/ affichTexte.do?cidTexte=JORFTEX T0000003493848dastPos=1&fast Req1d=1417702860&categorieLie n=cid&oldAction=rechTexte Soins Psychiatrie : Quel est, selon vous, le rôle et le posi- Soins Psychiatrie : Quel premier bilan feriez-vous de tionnement de l'avocat vis-à-vis du patient ? l'application de cette loi ? DP. À Paris, chaque jour, deux avocats intervien- DP. Pour le tribunal de grande instance de Paris, nent. Les patients, dès qu'ils arrivent, sont mis en relation avec leur avocat. Il est là pour aider la personne à passer ce cap de l'audience, qui peut parfois être lourd, et avec l'aide de l'infirmier qui l'accompagne, il lui explique les enjeux de l'audience. Il peut ensuite aider la personne à expliciter son point de vue dans certains cas et plaider pour la mainlevée si c'est le souhait du patient. En aucun cas, il n'ira à l'encontre de la volonté du patient. Les avocats ont dû, eux aussi, trouver leur place et leur rôle. Au début, certains avocats se positionnaient de manière quasi systématique par principe contre l'hospitalisation. Cette position partait de l'idée que l'hospitalisation était forcément mauvaise pour le patient et ce, quelle que soit la volonté de celui-ci. De ce fait, dans quelques cas, on ne parlait plus du patient. Heureusement, aujourd'hui, ces positions sont minoritaires. sur le plan judiciaire, cela fonctionne très bien. Deux critères nous permettent de l'affirmer. Tout d'abord, le taux de présence des patients à l'audience qui est remarquable : dans plus de 3 cas/4, les patients sont présents. Si le patient n'est pas là, c'est que soit le médecin a jugé qu'il n'était pas transportable, soit qu'il n'a pas envie de voir le juge, et c'est son droit. Le deuxième critère est le taux de représentation par un avocat, qui est supérieure à 90 % étant entendu que le patient peut dire qu'il ne souhaite pas être représenté par un avocat. Sur le plan médical, nous avons peu de recul mais je suis en relation avec un médecin de l'EPS de Maison-Blanche, le docteur Nathalie Mercier, qui mène une étude sur cet impact. Encore une fois, si l'impact est neutre, parfait, s'il est positif, c'est une "divine" surprise, s'il est négatif, c'est ennuyeux. • Propos recueillis par Soins Psychiatrie : En janvier 2013, leJLD aura powfonction de statuer également sur les problèmes liés a la procédure préalable de l'hospitalisation sous contrainte. Quels sont les problèmes qui pourront apparaître ? Enrique Ledesma, formateur consultant à l'École supérieure Montsouris, Paris (75014). DP. Aujourd'hui, effectivement, nous écartons toutes ces requêtes concernant la procédure préalable d'hospitalisation sous contrainte en rappelant que ce contentieux relève de la compétence du juge administratif. Ce qui nous permet de nous concentrer sur le problème de fond de la privation de liberté. Au Prjanvier 2013, les avocats devront faire un choix stratégique : nous risquons de quitter les questions de fonds pour tomber dans des questions de forme. Cela pourrait entraîner d'une part des audiences qui auront moins de sens et d'autre part, des mainlevées pour vice de forme plus nombreuses. Ces mainlevées, si elles conduisent à des sorties de patients qui médicalement ne devraient pas sortir, seront problématiques. Nous avons, d'ailleurs, lors de nos réunions de travail avec les hôpitaux, anticipé ces problèmes en faisant part des améliorations nécessaires au respect de la procédure. Cela a nécessité parfois une sorte de formalisme dans les procédures qui peut, de fait, être soumis à la critique mais qui est nécessaire. 28 SOiNS PSYCHIATRIE - n°281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte réflexion De la confidentialité Jb données médicales devant le juge I Depuis le 1er août 2011, tous les patients hospitalisés sans consentement bénéficient d'un contrôle de leur hospitalisation par le juge des libertés et de la détention (JLD) I Le principe de la publicité des débats interroge la confidentialité des données médicales ainsi que la protection du patient contre une possible stigmatisation. MARINE ROGÉ VALÉRIE DAURIACLE MASSON The confidentiality of medical records before the judge. Since August 1s1, 2011, all patients hospitalised without consent now have the right for their hospitalisation to be reviewed by the liberty and detention judge.The open court principle being made public raises questions regardingthe confidentiality of medical records as vvell as the protection of the patient against any possible stigmatisation. L aloi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 « relative aux sauf si le juge en décide autrement. Ainsi, la presse droits et à la protection des personnes faisant l'objet a-t-elle parfois publié des comptes rendus d'aude soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en diences, dans lesquels les problèmes médicaux charge » est entrée en vigueur le l e' août 2011. des personnes entendues étaient décrits sous couDepuis lors, toutes les personnes hospitalisées en psychiatrie sans leur consentement bénéficient d'un contrôle de leur hospitalisation par le juge des libertés et de la détention (JLD) avant le quinzième jour de leur hospitalisation'. I La saisine du juge est effectuée soit par le directeur de l'établissement de soins, soit par le préfet, selon le régime d'hospitalisation (à la demande d'un tiers, en cas de péril imminent ou sur décision du préfet). À réception de la requête, le greffe du JLD ouvre un dossier au nom de la personne hospitalisée et y intègre tous les documents médicaux et pièces de procédure visés par la loi et reçus du directeur de l'établissement de soins. Une convocation est envoyée aux différentes parties pour une audience dont la date est fixée par le juge. Cette première étape de la procédure pose la question de l'accès au dossier de procédure qui contient des données médicales en principe couvertes par le secret professionnel. I Au cours de l'audience, le JLD contrôle la nécessité du maintien en hospitalisation [1]. À cette fin, il entend la personne hospitalisée pour connaître ses demandes et observations et il examine les pièces du dossier, notamment les certificats médicaux. Les débats sont publics comme de principe en matière de justice civile, SOiNS PYSC1-11ATR1E - n°281 - juillet/août 2012 vert d'anonymat. Cette deuxième étape de la procédure pose la question de l'accès à l'audience par des tiers à la procédure et la question de la confidentialité des données médicales exposées à l'audience. I Enfin, le juge rend une ordonnance par laquelle il décide soit de la poursuite de la mesure d'hospitalisation soit de sa mainlevée. Il rend son délibéré soit en audience, soit par mise à disposition au greffe. I Ce dernier temps de la procédure pose la question de l'accès au délibéré et à la décision de justice et la question de la confidentialité des données médicales transcrites dans l'ordonnance rendue par le JLD. I La procédure de contrôle automatique des hospitalisations psychiatriques a été prévue par le législateur comme une garantie offerte à toute personne hospitalisée sans son consentement de voir sa situation examinée dans un délai raisonnable par le juge judiciaire, gardien des libertés individuelles. Néanmoins, les impératifs du fonctionnement de lajustice, notamment le principe de publicité des débats et des décisions de celle-ci, peuvent entrer en contradiction avec l'intérêt que la personne porte au respect de sa vie privée et au respect du secret médical. © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS http://dx.cloi.org/10.1016/j.spsy.2012.05.005 MOTS-CLÉS • Confidentialité • Débat public • Donnée médicale • Juge des libertés et de la détention • Saisine • Soins sans consentement KEY WORDS • Care without consent • Confidentiality • Liberty and detention judge • Medical record • Public debate • Referral NOTES 1 . Selon l'article L3211-12-1 du Code la santé publique. 2. L' ancienne hospitalisation a la demande d'un tiers" (HDT) est devenue :« demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion 29 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte • pour l'admission "classique" à la demande d'un fiers', les deux certificats médicaux doivent être « cirronstanciés » et dater « de moins de 15 jours »; • pour Pachnission à la demande d'un tiers en cas d'urgence 3 , l'unique certificat initial doit faire état de l'urgence et d'un « risque grave d'atteinte à NOTES (SUITE) des personnes soignants exerçant dans l'établissement prenant en charge la personne malade» (article L3212-111.1° du CSP). Dans cette hypothèse, le premier certificat médical ne peut être établi que par un médecin n'exerçant pas dans l'établissement accueillant le malade. » l'intégrité du malade ». • Si l'admission a lieu pour péril imminent 4, l'unique certificat initial doit dûment constater « qu'il existe, à la date de l'admission, un péril imminent pour la santé de la personne ». I La décision d'admission en soins psychia- 3 ' Cette nouvelle forme psychiatriques d'une personne malade au vu d'un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d'un médecin exerçant dans l'établissement ». 4 . Dans cette hypothèse, prévue par l'article L.3212-111.2° du CSP « Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l'établissement accueillant la personne malade ». 5 * Article L,3213-1.l du CSP, ancienne "hospitalisation d'office (H0)". Ce certificat initial ne peut pas émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil. 6 ' L'article L3211-2-2 du CSP est applicable à toutes les procédures d'hospitalisation 7 * Définies aux articles L3212-1 ou L.3213-1 du CSP. Pour les hospitalisations sur décision du Préfet : « le représentant de l'État dans le département décide de la forme de prise en charge (...), en tenant compte de la proposition établie, le cas échéant, par le psychiatre ». 8 ' Le Conseil constitutionnel rappelle, dans sa décision n° 2011174 QPC du 6 octobre 2011 : «6.... L'hospitalisation sans son consentement d'une personne atteinte de troubles mentaux doit respecter le principe, résultant de l'article 66 de la Constitution, selon lequel la liberté individuelle ne saurait être entravée par une rigueur qui ne soit nécessaire; il incombe au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, la protection de la santé des personnes souffrant de troubles mentaux ainsi que la prévention des atteintes à l'ordre public.., et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties. Au nombre de celles-ci figurent la liberté d'aller et venir et le respect de la vie privée, protégés par les articles 2 et 4 de la Déclaration 30 g, triques sur décision du représentant de l'État' est prononcée sur la base d'un unique certificat médical qui doit être « circonstancié et préciser les éléments indiquant que « les troubles mentaux néces- © C Mo re au/ Else d'hospitalisation prévue par l'article L3212-3 du CSP rend possible » l'admission en soins La loi du 5 juillet 2011 précise le contenu des certificats médicaux et les conditions de leur transmission au juge. sitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public » I Dans toutes ces hypothèses, les « médecins ne peuvent être parents ou alliés, au quatrième degré inclusivement, ni entre eux, ni du directeur de l'établissement ] qui prononce la décision d'admission, ni de la personne ayant demandé les soins ou de la personne faisant l'objet de ces soins ». Bien entendu, les certi- Les certificats médicaux exigés par la loi ficats médicaux doivent être conformes aux exigences générales de l'article R.4127-76 du CSP qui dispose, en son alinéa 2, que : « Tout certificat, SECRET MÉDICAL ET TRANSMISSION DES CERTIFICATS MÉDICAUX AU JUGE Le placement puis le maintien d'une personne en hospitalisation psychiatrique sans consentement sont conditionnés par la réalisation d'un certain nombre d'examens médicaux et par la rédaction d'autant de certificats médicaux, essentiellement établis au cours des premiers jours d'hospitalisation. Le contenu de ces différents certificats médicaux est expressément prévu par la loi. Le certificat médical initial I La décision d'admission en soins psychiatriques à la demande d'un tiers ou en cas de péril imminent est prononcée sur la base d'un certificat médical (ou deux selon le type de procédure), qui doit être conforme aux exigences de l'article L.3212-1 du Code de la santé publique (CSP). Le certificat initial, rédigé après examen du patient: • d'une part, atteste que « 10 . ses troubles mentaux rendent impossible son consentement » et que « 20. son ordonnance, attestation ou document délivré par un médecin doit être rédigé lisiblement en langue française et daté, permettre l'identification du praticien dont il émane et être signé par lui. ». Malgré l'importance des contraintes administratives pesant sur les médecins, il est important de veiller à ce que chaque certificat médical soit bien signé par le médecin dont il émane, une fois frappé par le secrétariat. Une irrégularité du certificat médical initial pourrait entraîner sa nullité et par suite, la nullité de la décision d'admission en soins psychiatriques. Les certificats médicaux des 24 heures et 72 heures L'article L.3211-2-2 du CSP 6 précise que : • dans les vingt-quatre heures suivant l'admission, un psychiatre de l'établissement d'accueil réalise un examen somatique complet de la personne et établit « un certificat médical constatant son état mental impose des soins immédiats assortis soit état mental et confirmant ou non la nécessité de maind'une surveillance médicale constante justifiant une tenir les soins psychiatriques au regard des conditions d'admission ». «Ce psychiatre ne peut être l'auteur du cerhospitalisation complète, soit de soins ambulatoires » ; • d'autre part, « constate l'état mental de la per- tificat médical ou d'un des deux certificats médicaux sur la sonne malade, indique les caractéristiques de sa maladie base desquels la décision d'admission a été prononcée » ; • dans les soixante-douze heures suivant l'admiset la nécessité de recevoir des soins ». De plus, le médecin doit se conformer aux sion, « un nouveau certificat médical est établi dans les mêmes conditions » que celles prévues pour exigences propres à chaque type d'hospitalisation : SOiNS PYSC1-11ATR1E - n° 281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte l'établissement du certificat de vingt-quatre heures. En outre, avant l'expiration de ce délai de soixantedouze heures, le psychiatre de l'établissement d'accueil propose « dans un avis motivé [. . .1 la forme de la prise en charge » (hospitalisation complète ou programme de soins), lorsque les deux certificats médicaux ont conclu à la nécessité de maintenir les soins psychiatriques. Le directeur de l'établissement doit entériner cet avis et prononcer le maintien des soins sous la forme préconisée par le psychiatre 7 I Le respect, par les médecins, de ces exigences légales constitue une garantie pour les libertés individuelles. En effet, le maintien sous un régime de soins sous contrainte est non seulement privatif de liberté 8 mais encore parfois attentatoire à l'intégrité physique de la personne. C'est la raison pour laquelle le législateur a décidé d'un contrôle automatique par le JLD, de toutes les hospitalisations sans consentement. . Le certificat médical de huitaine Selon l'article L.3212-7 du CSP applicable aux hospitalisations à la demande d'un tiers ou en cas de péril imminent et l'article L.3213-3 du CSP applicable aux hospitalisations sur décision du préfet, entre le 5e et le 8e jour, un psychiatre de l'établissement délivre « un certificat médical circons- tancié indiquant si les soins sont toujours nécessaires. Ce certificat médical précise si la forme de la prise en charge I-. . .1 demeure adaptée et, le cas échéant, en propose une nouvelle » 9 . La copie de ce certificat est « adressée sans délai au juge des libertés et de la détention ». Son défaut de production « entraîne la levée de la mesure de soins L'avis conjoint 10e-12e jours L'article L.3211-12-1 II. du CSP i° dispose que la saisine du JLD est accompagnée d'un avis conjoint rendu par deux psychiatres de l'établissement, dont l'un participe à la prise en charge du patient. « Cet avis se prononce sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète » et doit préciser s'il existe des motifs médicaux faisant obstacle, dans l'intérêt de la personne, à son audition par le juge 11. C'est notamment sur la base de cet avis médical conjoint que le JLD ordonne la poursuite de l'hospitalisation complète ou sa mainlevée [2]. La saisine du juge et la communication des certificats médicaux par le directeur de l'établissement de soins L'article L.3211-12-1 I du Code de la santé publique (CSP) dispose que l'hospitalisation SOiNS PYSC1-11ATR1E - n°281 - juillet/août 2012 complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le JLD, préalablement saisi par le directeur de l'établissement de soins ou par le Préfet, n'ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de l'admission. I La saisine du juge intervient à réception d'une requête adressée par le directeur de l'établissement ou le Préfet « au moins trois jours avant l'expiration du délai de qui nzejours » comportant un « exposé des faits et son objet » 19 . L'avis médical conjoint doit être joint à cette requête sans délai. L'article R.3211-11 du CSP dispose que le directeur d'établissement communique au JLD « tous les éléments utiles au tribunal », notamment « une copie des certificats... médicaux au vu desquels la mesure de soins a été décidée et de tout autre certificat médical utile, dont ceux sur lesquels se fonde la décision la plus récente de maintien des soins». Concrètement, le directeur de l'établissement est tenu, par la loi, de communiquer aujuge tous les certificats médicaux établis depuis l'admission en soins psychiatriques. I Le secret médical, qui couvre en principe les certificats médicaux, est exceptionnellement levé par la loi imposant un contrôle systématique des hospitalisations sans consentement, dans un cadre procédural très strict. Il est important de souligner que l'accès au dossier de la procédure judiciaire est strictement limité au JLD, au procureur de la République, à l'avocat de la personne hospitalisée et, le cas échéant, à l'avocat du tiers à l'origine de l'hospitalisation ou à l'avocat de la préfecture et ce, uniquement pour les besoins du contrôle de l'hospitalisation sans consentement. Le secret médical attaché aux certificats médicaux qui sont transmis par le directeur de l'établissement de soins, est donc garanti à ce stade de la procédure, par la stricte limitation de l'accès au dossier de la procédure aux seuls professionnels autorisés par la loi et tous soumis au secret professionnel. En revanche, le caractère confidentiel des données médicales peut être remis en cause à l'audience, au cours de laquelle l'affaire est débattue. CONFIDENTIALITÉ DES DONNÉES MÉDICALES ET PUBLICITÉ DES DÉBATS La confidentialité des données médicales est assurée par la loi afin de protéger les personnes contre les atteintes à leurvie privée. Néanmoins, le secret médical n'est pas absolu et peut faire l'objet d'exceptions légales. C'est le cas lorsque le principe du respect de la vie privée se trouve concurrencé NOTES (SUITE) des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ainsi que la liberté individuelle ; que les atteintes portées à l'exercice de ces libertés doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées aux objectifs poursuivis ». 9. En cas d'hospitalisation sur décision du préfet, le certificat précise :« les caractéristiques de l'évolution des troubles ayant justifié les soins ou leur disparition ». 10. L'article L3211-12-1 II du CSP est applicable à toutes les procédures d'hospitalisation. 11 ' ArticleL.3211-12-2 du CSR La personne hospitalisée est alors représentée à l'audience par un avocat, choisi ou commis d'office. 12. Articles R.3211-27 et R.321128 du CSP: la saisine intervient dans les conditions de l'article R.3211-8 du CSP. Le directeur d'établissement communique une copie de la demande d'admission effectuée par un tiers ou une copie de l'arrêté préfectoral ordonnant l'hospitalisation (selon le type d'hospitalisation). 13 ' Article 226-13 du Code pénal, 14 . Le principe de la publicité des débats est également garanti par la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 en son article 10. 15 ' Conseil d'État :arrêts CE, 4 oct. 1974, Dame David - CE, 27 oct. 1978, Debout. Cour de cassation :Casa. civ 2e, 2 déc. 1965, Bull.civ. 1965, II, n° 969 Jurisclasseur Procédure civile, Fasc. 501 : «Audience et débats», Natalie Fricero, éd. LexisNexis, 2008, p. 7. 16. Voir article 433, 435,436 et 749 du Code de procédure civile. 17. Aux termes d'un amendement présenté au Sénat :« Untel dispositif se justifie par le fait que la publicité de l'audience pourrait avoir, dans certains cas, des conséquences désastreuses pour les personnes concernées, dans le cas, par exemple, de conflits familiaux, de personnes connues localement... ». 18. Loi n° 72-626 du 5 juillet 1972 instituant un juge de l'exécution et relative à la réforme de la procédure civile. 19. Nathalie Fricero et Philippe Pedrot précisent sur ce point : «La lecture publique peut se limiter au dispositif, mais elle est exigée même si les débats ont eu lieu 31 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte NOTES (SUITE) en chambre du conseil (sauf pour les décisions gracieuses)», in Cabrillac R, Frison-Roche MA, RevetT, Libertés et droits fondamentaux, 2003. 20. Selon l'article 451 du Code de procédure civile :« Les décisions contentieuses sont prononcées en audience publique et les décisions gracieuses hors la présence du public, le tout sous réserve des dispositions particulières à certaines matières. « La mise à disposition au greffe obéit aux mêmes règles de publicité ». 21 « Auquel cas, la décision n'étant pas prononcée publiquement, les tiers ne peuvent pas en obtenir copie. 22 " "L'interdiction de publication concernant les pièces de procédure d'un procès en divorce", Michel Véron, Revue Omit pénal, déc. 2008, comm. 153. On peut observer que la limitation de la diffusion des éléments de la procédure judiciaire s'étend également à d'autres domaines et à d'autres formes de publicité. Ainsi, le secret est-il par exemple réclamé au nom de la protection du secret industriel : "Protection des secrets d'affaires : enjeux et repères", Francis Hegel, Cahier de droit de l'entreprise, janvier 2012, dossier 3. Quant à la publication des décisions de Justicevia internet,sur des sites tels www.legifrance.gouv. fr, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) a formulé une recommandation n° 01-057 du 29 novembre 2001 demandant aux éditeurs de bases de données de décisions de justice.., accessibles sur des sites Internet de s'abstenir d'y faire figurer le nom et l'adresse des parties, dans le souci du respect de la vie privée des personnes physiques concernées et de l'indispensable "droit à l'oubli". par un autre principe de même valeur, comme en l'espèce, le principe de la publicité des débats. Le secret médical et le respect de la vie privée « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. «2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou Les informations relatives à l'état de santé d'une personne sont protégées par la loi et les règles régissant le secret médical. La violation du secret médical est un délit passible de sanctions pénales 15 Le respect de la vie privée La confidentialité des données fait partie intégrante du secret professionnel médicales est assurée par la loi prévu à l'article L. 1110-4 du CSP : « Toute personne . de !amorale, au à lapotectian des droits d libertés d'autrui ». Toutefois, ce droit, garanti par la Convention européenne des droits de l'homme, se trouve se en charge par un profes- afin de protéger les personnes concurrencé par un autre sionnel, un établissement, un droit fondamental, égaleréseau de santé a droit au res- contre les atteintes à leur vie ment garanti par cette pect de sa vie privée et du Convention : le droit à un secret des informations la privée procès équitable, qui supconcernant [.1 Excepté dans les cas de dérogation, expressément prévus par la pose la publicité des débats à l'audience. loi, ce secret couvre l'ensemble des informations concer- L'article 6.1 de la Convention européenne des nant la personne, venues à la connaissance du profes- droits de l'homme dispose que : « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial I-. . .1 Lejugem,ent doit l'article l er de la charte de l'usager en santé mentale, signée le 8 décembre 2000 par la Confé- être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant rence des présidents de commission médicale la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la d'établissement de centre hospitalier spécialisé, la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale Fédération nationale des (ex-) patients en psychiadans une société démocratique, lorsque les intérêts des trie et le ministère de la Santé, qui énonce [3] : « L'usager en santé mentale est une personne qui doit mineurs ou la protection de la vie privée des parties au être traitée avec le respect et la sollicitude dus à la dignité procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement de la personne humaine. [. ] C'est une personne qui a nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances le droit au respect de son intimité (effets personnels, cour- spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux rier, soins, toilette, espace personnel, etc.), de sa vie pri- intérêts de la justice ›,[6] 14. vée, ainsi qu'à la confidentialité des informations La publicité des débats est un principe général du droit qui ne peut connaître d'exception que dans personnelles, médicales ou sociales la concernant. » sionnel de santé». I Ce principe fondamental est inscrit dans Ce droit au secret médical fait partie intégrante du droit au respect de la vie privée édicté par les dispositions de l'article 9 du Code civil. L'état de santé d'une personne est une composante du domaine exclusif de sa vie privée [4]. I Dans le cas des hospitalisations sous contrainte, les restrictions à l'exercice des libertés individuelles doivent être limitées à celles nécessitées par l'état de santé et la mise en oeuvre du traitement [5]. Lajurisprudence affirme en outre, de manière constante, que « constitue une atteinte illicite àla vie privée d'une les cas spécifiés par la loi [7] 15 . La question de la publicité des débats à l'audience La publicité des débats permet à l'ensemble des citoyens de contrôler le bon fonctionnement de la Justice, ce qui constitue une garantie objective pour tous les justiciables [8] . Une justice clandestine serait soupçonnée d'arbitraire. Néanmoins, lejuge peut, dans certains cas particuliers, être autorisé par la loi, à arbitrer entre les intérêts divergents de la société et de la personne dont le cas est débattu. personne la divulgation, de faits intéressant sa santé ». Le droit au respect de la vie privée et familiale est garanti par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme qui dispose que : 32 Les débats en chambre du conseil L'article 22 du Code de procédure civile dispose que « les débats sont publics, sauf les cas où la loi exige SOiNS PYSCH1ATR1E - n°281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte ou permet qu'ils aient lieu en chambre du conseil » 16 . démarche au greffe du juge des libertés et de la détention (demande de consultation de l'ordonnance voire demande de copie). À moins de considérer que le contrôle des hospicontradictoire, statue publiquement, sous réserve des talisations psychiatriques ne relève des matières dispositions prévues à l'article 11-1 de la loi n° 72-626 relatives à l'état et à la capacité des personnes qui du 5 juillet 1972»" sont déterminées par décret", notamment les L'article 11-1 de la loi 18 n° 72-626 du 5 juillet 1972 affaires familiales (divorce", séparation de corps, dispose, alinéa ler : « Les débats sont publics. lis ont autorité parentale), incapacité des majeurs toutefois lieu en chambre du conseil dans les matières (tutelle), ce qui ne semble pas être le cas ici. gracieuses ainsi que dans celles des matières relatives à Cette question de la publicité de l'ordonnance l'état et à la capacité des personnes qui sont déterminées rendue par le juge des libertés et de la détention par décret.» Et, l'alinéa 2, codifié du Code de pro- en matière de contrôle des hospitalisations psycédure civile dispose : « Le juge peut en outre décider chiatriques ne trouve pas de réponse évidente. En matière de contrôle des hospitalisations psychiatriques sans consentement, l'article L.321112-2 du CSP dispose que « le juge, après débat que les débats auront lieu ou se poursuivront en chambre du conseil s'il doit résulter de leur publicité une atteinte à l'intimité de la vie privée, ou si toutes les parties le demandent, ou s'il survient des désordres de nature à troubler la sérénité de la justice ». Aussi le législateur a prévu que les débats puissent avoir lieu en chambre du conseil ("à huis clos") dans certaines conditions. Néanmoins, cette possibilité est laissée à l'appréciation des différents juges. Au Tribunal de grande instance de Paris, les JLD proposent systématiquement une audience en chambre du conseil, ce qui n'est pas toujours le cas en appel. Le problème de la publicité de l'ordonnance du JLD Enfin, se pose la question de la publicité de l'ordonnance rendue par le JLD. Il semble que les textes spécifiques à la procédure de contrôle des hospitalisations psychiatriques ne règlent pas cette question. I II convient dès lors de se rapporter aux règles de droit commun concernant la publicité des jugements. Le jugement doit être lu en audience publique par l'un des magistrats l'ayant rendu [9] 19 sauf en cas de mise à disposition au greffe". I L'article 11-2 de la loi n° 72-626 du 5 juillet 1972 dispose que « les jugements sont prononcés , publiquement sauf en matière gracieuse ainsi que dans celles des matières relatives à l'état et à la capacité des personnes qui sont déterminées par décret ». L'article 11-3 de la même loi dispose que « les tiers sont en droit de se faire délivrer copie des jugements prononcés publiquement ». En application de ce texte, les informations initialement couvertes par le secret médical mais contenue dans l'ordonnance du juge pourraient être divulguées à des tiers non autorisés, en l'occurrence famille, amis, voisins, par simple SOiNS PYSC1-11ATR1E - n° 281 - juill et/a o ût 2012 CONCLUSION I Dans le cadre de la procédure de contrôle des hospitalisations psychiatriques, la publicité des débats est laissée par le législateur à la libre appréciation du juge des libertés et de la détention ou du premier président de la Cour d'appel. Or les différentes juridictions n'apprécient pas toutes cette question de la même manière. Ainsi, certaines juridictions proposent ou décident de tenir ces audiences en chambre de conseil quand d'autres privilégient le principe de la publicité des débats. C'est pourtant un enjeu très important pour la personne hospitalisée, qu'il convient de protéger, d'une part, contre la possible stigmatisation liée à la pathologie psychique, d'autre part, contre le risque d'exploitation des informations médicales relatives à la santé mentale par des tiers (dans le cadre de certains litiges, comme par exemple, ceux liés à la "garde" des enfants, au placement sous tutelle, etc.). I La décision du juge concernant la publicité des débats et de la décision rendue, vis-à-vis des tiers à la procédure, procède du nécessaire équilibre qu'il convient d'établir dans cette matière extrêmement sensible qu'est la psychiatrie, entre le caractère public des décisions de justice et la protection de la vie privée de la personne hospitalisée. • RÉFÉRENCES [1] Cochez F, Gadrat X. Les "garde-fous : le contrôle des mesures des soins psychiatriques, in Actualités sociales hebdomadaires, Cahier Les soins psychiatriques sans consentement après la loi du 5 juillet 2011, n°2751, mars 2012, p. 65-87. [21 Vacheron MN, Laqueille X. L'admission en soins psychiatriques sous contrainte : apports et limites de la loi du 5 juillet 2011. Revue trimestrielle du centre Laênnec 2012;1:10-23. [3] Devers G. Code des soins en santé mentale. Paris: Éditions Lamarre; 2008. [4] Leude A, Mathieu B, Tabuteau D. Droit de la Santé. Paris: Presses Universitaires de France; 2007. [5] Dupont M., Esper C., Paire C. Cours de droit hospitalier. 5, édition. Paris: Dalloz; 2005. [6] Oberdorff H, Robert J. Libertés fondamentales et droits de l'homme , éd. Montchrestien, 5 , éd. 2002, p.220. [7] Cadiet L, Jeuland E. Droit judiciaire et droit privé. Paris: Litec LexisNexis, 4 , éd ; 2004. p. 467-8 [8] Fricero N. Droit è des débats publics devant des juges impartiaux. Procédures 2011;3:comm. 93. [9] Cabrillac R, Frison-Roche MA, RevetT, Libertés et droits fondamentaux, éd. Dalloz, 9, éd. 2003, section 7 : «Les droits fondamentaux spécifiques au procès civil», p. 533-534. Déclaration d'intérêts : les auteurs déclarent n'avoir aucun conflit d'intérêts en relation avec cet article. LES AUTEURS Marine Rogé, avocat au barreau de Paris (75116), Valérie DauriacLe Masson, praticien-hospitalier, DIM, centre hospitalier Sainte-Anne, Paris (75014), [email protected] 33 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte enquête Le patient face à l'incontournable ordonnance du juge des libertés et de la détention NATHALIE MERCIER I Une centaine d'interviews ont été réalisées auprès de patients hospitalisés sous contrainte avant et après leur passage au tribunal I L'objectif: apprécier notamment la compréhension de la loi et du rôle du juge des libertés et de la détention, le vécu de l'audience, les motifs des refus de comparution et l'impact de la notification de l'ordonnance I À ce jour, aucun patient n'a refusé les entretiens au décours de son séjour hospitalier dès lors qu'il était sorti de la période de crise. The patient faced with the inescapable ruling of the liberty and detention judge. Around a hundred of interviews have been carried out vvith patients hospitalised under restraint before and after their court case. The aim was to assess in particular the understanding of the law and the role of the liberties and detention judge, the experience of the hearing, the motives behind the refusais to appear and the impact of the notification of the ruling.To date, no patients have refused interviews during their hospital stay once they have emerged from the period of crisis. MOTS CLÉS • Contrainte • Décision • Diagnostic • Hospitalisation • Juge des libertés et de la détention • Responsabilité KEYWORDS • Decision • Diagnosis L es inquiétudes souvent évoquées dans les médias quant aux modalités pratiques et à l'impact psychique des comparutions devant le juge des libertés et de la détention (JLD) s'inscrivant dans le cadre de la loi du 5 juillet 2011 ont motivé l'étude à visée exploratoire présentée ici. Cette dernière veut aider, à travers l'analyse des représentations d'une cinquantaine de patients hospitalisés sous contrainte, à mieux comprendre comment est vécue cette intrusion systématique de la justice au décours des séjours hospitaliers. LA FIGURE DU JUGE • Hospitalisation I Un certain degré de confusion existe pour un • Liberties and detention judge nombre substantiel de cas quant aux modalités exactes de la contrainte (les différences entre les différentes formes d'hospitalisation' ne sont pas lisibles pour la plupart) et quant à la qi alité des juges que les patients sont invités à rencontrer : juge des tutelles, juge des affaires familiales, JLD... I II est assez fréquent que le JLD renvoie les patients à des images fortes et contradictoires. Pour certains, il est l'autorité supérieure capable de « les libérer sur le champ », pour d'autres, il est celui qui les renvoie à des sentiments de culpabilité et devant qui l'on va devoir rendre compte d'une infraction, réelle ou imaginaire, actuelle ou passée (« Ça doit être mon comportement, • Responsibility • Restraint 34 ©2012 Publié par Elsevier Masson SAS http://dx.doi.org/10.1016/j.spsy.2012.05.003 je ne sais pas ce que j'ai fait. », «Je ne sais pas pourquoi j'ai été appelée par un juge, je n'ai tué ni volé quoi que ce soit. » « Va-t-il me reparler de l'histoire de la petite fille, il y a dix ans ?»). Le JLD, s'il est perçu comme celui qui arbitre, peut aussi être appréhendé comme une figure aidante aux compétences multiples : il est supposé pouvoir contribuer à déposer plainte contre des voisins prétendument harcelant, à garder un foyer, à trouver un emploi, àfaire le point sur des affaires juridiques en cours. I Dans ce contexte, l'anticipation de la rencontre avec le JLD peut être source de réactions diverses allant de l'anxiété intense avec ruminations au fol espoir d'une sortie immédiate en passant par l'expectative tranquille, voire la curiosité. Le passage devant le JLD invite également les patients à se positionner face à la légitimité de leur hospitalisation, là encore des positions extrêmes s'observent : « Le passage devant leJLD, nous met dans une position de choix, adultifié, responsabilisé » dit l'un d'eux, «Je ne sais pas, c'est ma mère qui s'occupe de tout cela, c'est à elle qu'il faudrait poser les questions. » dit un autre. I Dans les cas observés, la non comparution devant leJLD a été justifiée par l'état physique ou psychique des patients ou par des raisons d'ordre pratique (absence de véhicule de transport ou de personnel d'accompagnement, levée d'hospitalisation sous contrainte précoce pour éviter la SOiNS PYSC1-11ATR1E - n°281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte LES REPRÉSENTATIONS DU JLD I Après la comparution devant le JLD, les discours sont souvent plus riches et étoffés qu'ils ne le sont avant l'entretien, les patients ont le sentiment d'avoir une expérience à partager, d'avoir été "écoutés" au cours d'entretiens qu'ils jugent toutefois courts (pas plus de dix minutes selon eux) et souvent formels. La légitimité de la décision du JLD semble majoritairement respectée et peu nombreux sont ceux qui, bien que considérant que leur hospitalisation est abusive, sollicitent une expertise (3 cas sur 35 dans l'étude). I Le JLD est parfois considéré comme un "garde fou" susceptible de préserver les patients de la toute-puissance médicale « Ça sert qu'une - décision ne soit pas univoque f.. .1 le juge est un tiers, une autorité au-dessus des médecins qui peut ou non le conforter dans ses prérogatives ». À l'inverse, il peut être perçu comme « le suppôt » des médecins auxquels il ne pourrait que faire allégeance faute, d'une part, d'avoir les compétences pour soutenir un avis contraire (« Ils n 'ont pas de formation médicale, <, Ce n'est pas leur métier ») et, d'autre part, de pouvoir prendre le risque de "laisser dans la nature" des patients psychotiques capables de défrayer la chronique. LA CONFRONTATION AUX ÉCRITURES I La notification de la décision du JLD (art. R.3211-33) n'est pas toujours distribuée lors de son arrivée, par oubli ou par précaution, le patient étantjugé trop "fragile" pour pouvoir y faire face. Elle n'est en général lue attentivement que par les patients procéduriers ; elle est le plus souvent parcourue pour des raisons très diverses : difficultés de compréhension du vocabulaire juridique, anxiété, impossibilité physique de déchiffrer les écritures (analphabétisme, vision floue imputable aux neuroleptiques, etc.), méconnaissance de la langue française... Lors de l'enquête, une patiente s'est aperçue qu'elle avait oublié avoir comparu devant le JLD. Ce trouble mnésique est probablement dû aux benzodiazépines. SOiNS PYSC1-11ATR1E - n° 281 - ju il let/août 2012 I Les éléments repris dans la notification d'une décision sont globalement ceux du certificat de saisine ce qui met le patient en contact direct avec les propos "techniques" des psychiatres. C'est ainsi que, "sans filtre", les patients sont mis face à la réalité de leur pathologie et parfois même avec le diagnostic de leur affection. Diagnostic que certains découvrent à la lecture avec des effets heureusement pas toujours aussi délétères que ceux qui pourraient être craints. Le nom du tiers apparaît également dans la notification, il n'était pas toujours connu du patient ce qui aboutit parfois à des situations inédites ou fâcheuses, le patient découvrant par exemple, que le tiers n'est pas celui qu'il croyait ou qu'il s'agit d'un voisin dont la légitimité de l'intervention lui paraît discutable. Dans notre étude, le tiers n'a répondu présent à la convocation du JLD que dans deux cas et il n'y a pas eu de confrontation au tribunal avec le patient, ce dernier ayant refusé ou n'étant pas en état de comparaître. I La présence d'un avocat à l'audience n'est véritablement interrogée que par les patients présentant un délire de persécution ou mégalomaniaque. Dans ce contexte pathologique, les avocats commis d'office ne sont souvent perçus que comme de pâles ersatz comparés aux avocats célèbres, nationaux ou internationaux, qu'ils revendiquent pour défendre leur cause. Les interactions avec les avocats qui précèdent l'audience devant le JLD sont habituellement jugées comme aimables, courtes et très insuffisantes pour « connaître le dossier ». Dans l'étude, leurs interventions sontjugées sans impact sur la décision du juge. Quelques patients mentionnent qu'ils ont été poussés à demander une expertise, avis qu'ils ne suivent pas toujours. 0C Moreau /E lsevier Masson SAS multitude des certificats qui s'y rattachent, etc.). Les motifs de renoncement des patients au passage devant le JLD sont pluriels, retenons : la confiance dans les décisions du médecin et l'adhésion à l'hospitalisation, la conviction que le passage devant le JLD ne modifiera en rien la mesure et la crainte de la confrontation et de la décision qui s'ensuivra. NOTE 1 .11 s'agit des soins psychiatriques à la demande d'un tiers (SPDT), des soins psychiatriques d'urgence (SPU), des soins psychiatriques pour péril imminent (SPPI) et des soins psychiatriques sur demande du représentant de l'État (SDRE). Déclaration d'intérêts l'auteur déclare ne pas avoir de conflit d'intérêts en relation avec cet article. LA PERCEPTION DE LA LOI L'AUTEUR Interrogés quant à l'intérêt de la nouvelle loi, le positionnement des patients oscille entre deux positions extrêmes : d'un côté, elle est perçue comme une mesure "administrative", coûteuse en temps, en personnel et en argent pour la société ; d'un autre, la nouvelle loi est considérée comme une mesure de contre-pouvoir utile face aux psychiatres dont les positions sont parfois jugées arbitraires. Nathalie Mercier, psychiatre, praticien hospitalier contractuel, 75G23, service du docteur Msellati, Établissement public de santé Maison-Blanche, Paris (75018), [email protected] 35 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte réflexion Les questions éthiques soulevées par la loi du 5 juillet 2011 MARIANNE MAZOD1ER 1 La loi du 5 juillet 2011 soulève de nombreuses questions relatives aux soins et aux modalités de prise en charge des patients I La finalité du soin ne s'égare-t-elle pas dans cette mosaïque législative ? 1 Que deviennent les droits des patients confrontés à l'univers de la justice ? 1 L'éthique doit être questionnée et doit fédérer des réflexions pluriprofessionnelles au bénéfice des projets de soins. The ethical questions raised by the law of July 5th, 2011. The law of 5th July 2011 raises numerous questions relating to care and the procedures for treating patients. Is the purpose of care getting lost in this legislative mosaic? What is the future of the rights of the patients, faced with the world ofjustice ?The ethical aspect must be questioned and must bringtogether multi-professional reflections for the benefit of the care projects. MOTS-CLÉS • Autonomie • Dignité • Droits des patients • Éthique • Intimité • Judiciarisation • Programme de soins KEY WORDS • Autonomy • Gare programme • Dignity • Ethics • Judicialization • Patients' rights L a loi du 5 juillet 2011 [1] représente une réforme importante des soins psychiatriques sans consentement. Son objectif se voulait sécuritaire et protecteur des droits des patients. Après des débats houleux, elle a été mise en application le 1" août 2011 et a entraîné quelques précipitations et confusions, malgré le soutien de l'encadrement des établissements concernés. Six mois après sa mise en place, de multiples témoignages des acteurs de soins et des associations d'usagers, le rapport de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale de février 2012 ont souligné les difficultés et interrogations dans son application. Le but n'est pas de reprendre en détail ce bilan pratique mais d'essayer de l'accompagner de réflexions éthiques qui s'imposent aux personnes concernées par cette loi, médecins, soignants mais aussi usagers, administratifs etjuristes. • Privacy RESPECT DES DROITS DES PATIENTS, RESPECT DES IDENTITÉS DE TOUS I Cette loi a pour but d'apporter un réel progrès dans le champ des soins sans consentement en psychiatrie. Sa complexité freine son intégration rapide et fluide par les partenaires des soins psychiatriques, sans oublier les usagers. Le respect des droits des patients commence par la reconnaissance du statut de citoyen au malade mental, dusse-t-il nécessiter, durant un temps, des soins sans consentement. Cet élément peut-il se retrouver clairement dans l'intitulé de la loi relative à des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques ? Les patients, leur entourage, les 36 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés http://dx.doi.org/10.1016/j.spsy.2012,05.007 soignants ressentent-ils cette loi comme une avancée heureuse, qui respecte leur liberté, leur autonomie, leur dignité, leur intimité, leur droit à l'information, au consentement et à la confidentialité, dans un contexte empathique, garant de la dimension humaine attendue dans toute démarche de soins ? I Ces questions se posent notamment dans les soixante-douze premières heures de soins sans consentement, phase d'observation et de traitement en urgence. Certains assimilent cette période à une sorte de "garde àvue" clinique, avec privation de liberté, au terme de laquelle les soins sans consentement peuvent être levés. Le législateur souhaitait protéger les patients et l'environnement, et renforcer leurs droits. Les patients en crise peuvent ou non être accessibles à une information adaptée. Celle-ci doit parfois être différée, selon l'état clinique du patient, tantôt inconscient de ses troubles, tantôt opposant ou confus. Comment le patient peut-il alors comprendre son statut, lorsqu'il s'agit d'un soin sans consentement, dans le cadre de péril imminent, c'est-à-dire d'hospitalisation sur demande d'un tiers mais en l'absence du tiers, injoignable dans l'immédiat ? Quelles seront alors les répercussions relationnelles entre le patient et ses proches ? I Les programmes de soins respectent-Ils la dignité, l'intimité et l'autonomie du patient ? Des visites à domicile, parfois nécessaires, peuvent être vécues comme intrusives par des patients de retour chez eux. Les réintégrations en hospitalisation complète ne sont pas toujours faciles à organiser dans un cadre éthique adapté. SOINS PYSCRIATRIE - n°281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte Les acteurs de soins conservent-ils leur finalité originelle ? Ne perdent-ils pas en partie leurs repères, leurs valeurs et leur identité ? Peuvent-ils assumer leurs actes et leurs devoirs ? Comment peuvent-ils encore gérer leurs limites dans tous ces espaces de soin définis par la loi ? En effet, la mission première des professionnels psychiatriques est thérapeutique. Que devient-elle quand elle est assujettie aux décisions du juge des libertés et de la détention, ou du directeur d'établissement ? L'assistance des avocats est expliquée aux patients, mais leur rôle gagnerait à être précisé. Les différentes formes d'audience avec le juge, au tribunal ou en visioconférence, suivent-elles les exigences de confidentialité, de dignité pour ces patients vulnérables ? Les audiences à l'hôpital demeurent encore rares, et les audiences publiques ont jusqu'alors été favorisées. Tous les messages véhiculés par ce texte assurentils aux générations actuelles et futures des repères pour mener une démarche de soins sans consentement, cohérente et confortable pour tous ? la loi est-il toujours compris lors des soins ambulatoires sans consentement? Est-il en harmonie avec les principes d'autonomie, de dignité, et de déstigmatisation, alors que ces mesures visent à consolider la continuité des soins dans un cadre protecteur e tfavorisant la réhabilitation sociale de ces malades ? La loi du 5 juillet 2011 nous aidet-elle à mieux appréhender la promulgation de nouvelles lois ? Ne faut-il pas toujours adapter au contexte, les lois et règles, à l'abord forcément rigide. Cette loi ne rejoint-elle pas parfois les risques d'une psychiatrie de plus en plus technicisée et protocolisée, et donc peut-être déshumanisée ? RESPECT DE LA SOCIÉTÉ, RESPECT DES AUTRES Il faut du temps pour observer et évaluer les effets de la loi du 5 juillet 2011. Il en faut encore plus pour permettre à chacun de bien l'intégrer dans ses pratiques. Aucune loi n'est immuable ; des projets de révision sont à l'étude, à la suite des premiers rapports, mais il faut du temps pour élaborer des solutions sages, applicables dans la réalité du terrain et accessibles à tous. I Les bonnes intentions de la loi du 5 juillet 2011 ne prévoyaient pas les diverses complications et interrogations qu'elle engendrerait à tous les niveaux, lors de sa mise en place rapide. Les usagers de la santé ont parfois peine à la comprendre malgré nos efforts d'information. D'aucuns ont parfois pensé que les exigences, quelquefois rigides, de la loi, leur permettraient d'échapper aux soins dont ils ont pourtant besoin. D'autres se soumettent à ce cadre confus sans en mesurer les changements notables. Les professionnels se débattent entre le respect de la mise en pratique de la loi, avec les multiples certificats de signataires différents, l'organisation des audiences au juge, de forme très hétérogène selon les établissements, et le maintien de la qualité des soins, entre alliance thérapeutique, écoute de tous les acteurs de soins, pour une co-construction confiante d'une prise en charge thérapeutique de qualité, Ce texte soulève de nombreux questionnements éthiques, certains qui lui sont propres, d'autres plus génériques liés au monde sanitaire. Cette loi facilite-t-elle la concertation collective ? La loi du 5 juillet induit un déséquilibre entre les avis des protagonistes de la prise en charge des soins sans consentement, et ceci en "faveur" du juge. On peut ainsi comprendre l'avis du collège pluridisciplinaire après une hospitalisation complète prolongée, comme un facilitateur de l'articulation collective. Cette loi rend indispensable une bonne coordination entre les juridictions, les établissements psychiatriques, et les services préfectoraux. L'écoute et la collaboration de l'autre, et dans la mesure du possible du patient et de son entourage, sont essentielles. Sinon, ces derniers peuvent ne pas saisir le bien-fondé de la démarche de soins sans consentement. Cette situation peut se retrouver lors des sorties brèves de l'hôpital qui ne sont possibles qu'accompagnées, mais pas nécessairement par un soignant. L'accompagnement par un proche peut se révéler délicat, voire néfaste, pour l'évolution du patient et des soins. La confiance entre professionnels de la santé rencontre paradoxalement une possible défiance entre les psychiatres, lors des multiples certificats médicaux rédigés par des signataires différents. L'objectif sécuritaire de la loi ne confond-il pas trop souvent le patient psychiatrique à un délinquant, potentiellement dangereux? L'objectif de SOiNS PYSC1-11ATR1E - n°281 - jui I let/août 2012 de- 5 iket 2.011 (N. CONCLUSION • RÉFÉRENCE [1] Loi n°2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge http://www.legifrance. gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte =JORFTEXT000024312722&fast Pos=1&fastReq1d=217845111& categorieLien=cid&oldAction=r echTexte Déclaration d'intérêts : l'auteur déclare ne pas avoir de conflit d'intérêts en relation avec cet article. L' AUTEUR Marianne Mazodier, psychiatre, praticien hospitalier, groupe hospitalier Paul-Guiraud, pôle 92G13, Villejuif (94800), marianne.mazodier@ch-pgyfr 37 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte témoignage L'art de la fugue «D evant la loi se dresse le gardien de la porte. Un homme... se présente et demande à entrer dans la loi. Mais le gardien dit que pour l'instant il ne peut pas lui accorder l'entrée. L'homme réfléchit, puis demande s'il lui sera permis d'entrer plus tard. "C'est possible", dit le gardien, "mais pas maintenant". Le gardien s'efface devant la porte, ouverte comme toujours, et l'homme se baisse pour regarder à l'intérieur. Le gardien s'en aperçoit et rit. "Si cela t'attire tellement", dit-il, "essaie donc d'entrer malgré ma défense. Mais retiens ceci :je suis puissant. Et je ne suis que le dernier des gardiens. Devant chaque salle il y a des gardiens de plus en plus puissants .. » Franz Kafka, Le Procès La nouvelle loi de psychiatrie, en vigueur depuis le 1" août 2011, outre ses aspects sécuritaires, sème sur le chemin de son application de nombreux désagréments. L'accompagnement devant le juge des libertés et de la détention (JLD) des patients n'en est pas le moindre. En effet, les patients hospitalisés sous contrainte de façon continue depuis une quinzaine de jours sont convoqués devant le JLD qui entérine ou non l'hospitalisation. Les équipes soignantes qui souffrent déjà d'être en sous-effectif doivent faire face à cette nouvelle obligation. Il faut jongler avec les emplois du temps, modifier le roulement d'un soignant, en solliciter un d'un autre service, faire appel à des intérimaires pour remplacer les accompagnants. Pour couronner le tout, il n'est pas rare que les convocations au tribunal tombent l'après-midi pour le lendemain alors que les plannings sont déjà bouclés. RÉCIT D ' UNE AUDIENCE Ce jour-là, c'était au tour de Monsieur B. d'aller se confronter au JLD. "Basculé" d'un programme de soins vers une hospitalisation en continu depuis deux semaines pour recrudescence délirante et risque de mise en danger, Monsieur B. est fin prêt à 8 h 30 : douche, petit déjeuner, traitement. Nous n'attendons plus que le taxi commandé par l'hôpital. Une fois dans la voiture, le patient refuse de mettre sa ceinture de sécurité, « Ça m'angoisse » me dit-il. Je n'insiste pas mais je le surveille du coin de l'ceil car il a une main cramponnée à la portière. Nous sommes pris dans les embouteillages et je tente d'amorcer un dialogue avec lui. mais il marmonne des réponses 38 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés http://dx.doi.org/10.1016/j.spsy.2012.05.004 évasives et je comprends qu'il faut le laisser tranquille. On entend seulement l'autoradio du véhicule. À un moment, le patient lance : « Ils sont en train de parler de moi dans la chanson. —Ah bon ? répond le chauffeur de taxi. —Oui, ils viennent de citer mon nom, explique le patient». Le conducteur me lance un regard discret dans le rétroviseur mais ne fait pas de commentaire. DANS LE DÉDALE DU PALAIS DE JUSTICE Nous arrivons un peu en retard au tribunal, le passage par le sas de contrôle dure un bon quart d'heure. J'essaie de me repérer tant bien que mal dans le dédale du Palais de justice pour trouver l'escalier F par lequel nous devons passer. Je sens que Monsieur B. est de plus en plus tendu : il veut fumer, prendre un café, mais je lui dis que nous sommes en retard et que nous le ferons après l'audience. Soudain il s'élance dans un escalier à tout vitesse :« C'est par là ! », puis il redescend pour dévaler un autre escalier « Non, c'est par là ! » Le patient est anxieux et malgré ma réassurance et mon autorité bienveillante, je ne parviens pas à le calmer. Nous voilà enfin devant le fameux guichet tenu par un gendarme. Une avocate commise d'office nous aborde aussitôt et entraîne le patient dans son sillage. Puis nous attendons l'arrivée du juge dans l'étroit couloir, parmi d'autres personnes. Monsieur B. se remet à déambuler nerveusement. Il pousse une porte et disparaît. Je m'élance à sa poursuite, c'est la porte des toilettes, je ressors, un peu confus. Une femme qui attend son tour d'audience dans le couloir, baisse la tête en souriant. Il passe un long moment à l'intérieur, je le soupçonne de fumer. « JE VEUX UNE AUDIENCE PUBLIQUE » Enfin notre tour arrive. Le juge m'autorise à assister à l'audience et nous fait entrer dans un petit bureau en compagnie de la greffière.Aussitôt le patient se rebiffe et demande une audience publique. « Vous êtes sûr ? lui demande le juge. —Je suis intimidé ici, je veux une audience publique! —Mais vous le serez peut être encore plus en public. —Je préfère une audience publique. » Le juge donne alors l'ordre d'ouvrir la grande salle devant la mine contrariée de la greffière. Cela prend SOiNS PYSC1-11ATR1E - n°281 - juillet/août 2012 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte quelques minutes entre l'affairement des gendarmes et l'entrée du public. Pendant ce temps, Monsieur B. détaille la salle en silence, puis s'approche de l'avocate et lui murmure une question. Elle se tourne vers moi, les sourcils froncés : « C'est qui le ministre de la Justice, Claude Guéant ? » Le juge lit le certificat médical accablant, délivré par le psychiatre de monsieur B., relatant les récents troubles de ce dernier et lui demande ce qu'il en pensa Le patient se lève « Monsieur le Président, j'ai été mandaté par le Premier ministre pour aller secourir les pays soniques et lituniques (sic)». Le juge, d'abord, légèrement désarçonné par l'étrange plaidoirie, reprend vite les choses en main et demande au patient de répéter ce qu'il a déclaré. Ce que ce dernier fait, sans changer une virgule. « Les pays sunnites, vous voulez dire, interroge l'homme de loi. —Non, soniques. —Bien. Ce sont là vos activités personnelles, parleznous maintenant de l'hospitalisation, demande le _ILD. —Tous les médecins ont été achetés, lui rétorque Monsieur B. Le juge relit certains passages de la lettre médicale. —Ce sont pourtant vos médecins qui ont signé. Le U. le U... —Je ne les connais pas. Ils ont tous été achetés, affirme Monsieur B. » Le juge laisse le patient finir son intervention, puis annonce que c'est le moment d'aller délibérer. Sur ma gauche, je vois l'avocate qui pouffe en silence dans sa robe, la tête tournée de côté. LA DÉLIBÉRATION Monsieur B. est très angoissé, il veut fumer, j'ai du mal à le contenir, il est inaccessible au dialogue. Il se remet à déambuler dans la salle, va vers le couloir, revient, ressort. L'avocate l'observe, m'observe. Je lui propose des bonbons pour temporiser le manque de nicotine. Il me lance un regard noir et scrute les bonbons blancs dans ma main. « Ils ont été hollywoodés (sic) ? me demande-t-il, soupçonneux. —Non non, ils sont français, je réponds maladroitement. —Et pourquoi tu veux que je mange des Tic Tac'»? dit-il plus agressivement.» Je me demande soudain si un délire d'empoisonnement n'est pas en train de lui traverser l'esprit. Mais il finit par les mettre dans sa bouche et les mâchonne sans me quitter des yeux. Le retour du juge et de la greffière me sauve de mon nouveau rôle de persécuteur. soiNs PYSCI 11ATR1E - - n°281 - juillet/août 2012 Les délibérations, comme je m'y attendais, n'ont pas duré très longtemps. Le juge annonce au patient que son hospitalisation est maintenue et que la nécessité de soins psychiatriques s'impose. Celui-ci baisse la tête et éclate en sanglots. Il profère encore quelques néologismes puis se lève d'un seul coup et déclare : « Je veux faire appel! » L'avocate et moi essayons de lui faire comprendre qu'il vaut mieux laisser passer un peu de temps. Je lui parle du programme de soins, dont il a déjà bénéficié dans le passé, qui pourra se remettre en place une fois son état stabilisé. Il s'élance vers la sortie et j'ai peine à le rattraper. Arrivés au rez-de-chaussée, il réitère son besoin de café et de cigarette. Dans le hall, encombré de magistrats, de visiteurs, de "convoqués" de toute sorte, je réussis à happer une femme de ménage pour lui demander où se trouvent les machines à café. J'entends ensuite de grands cris. Monsieur B. bouscule un groupe, se fraie un chemin parmi les robes noires des magistrats, bondit vers la sortie, dévale les grandes marches du palais à toute vitesse et saute par-dessus le tourniquet tenu par un policier avant de se noyer dans la foule extérieure. En quelques secondes, il avait fait presque 100 mètres, une flèche I ÉPILOGUE J'ai manqué de glisser sur les marches mouillées du tribunal et couru en criant : «Revenez Monsieur B., revenez ! » sous les regards médusés des témoins. Mais j'ai vite abandonné carie savais que jamais je ne pourrai le rattraper. Une fugue ! Voilà, je vivais la fugue d'un patient. La première de ma carrière. Je n'en étais pas fier. Bizarrement, la première idée qui m'est venue à ce moment là après le signalement à l'hôpital, a été d'appeler le service des transports pour annuler le taxi du retour. Le standardiste m'annonce qu'il était trop tard, le taxi étant déjà en route. Puis, de l'air de celui qui en a vu d'autres, il ajoute : « Bah, ne vous inquiétez pas, on le retrouvera, on les retrouve tous. Prenez le ce taxi, profitez en pour rentrer tranquille». En effet, le soir même, la police ramenait à l'hôpital Monsieur B. qu'elle avait retrouvé, terré dans son appartement. Messaoud Djemat infirmier, hôpital Maison-Blanche, Paris (75020), djemes@freefr 39 dossier La réforme de l'hospitalisation sous contrainte bb h r !Dhle . D' La bibliographie suivante [1-50] complète le dossier "La réforme de l'hospitalisation sous contrainte" LIVRES [1] Blisko S. Rapport sur la mise en oeuvre de la loi n°2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge. Paris: Assemblée nationale; 2012. [2] Coelho J. Soins psychiatriques et juge des libertés et de la détention (JLD). Bordeaux: Les Études hospitalières; 2011. [3] Collectif. L'organisation des soins psychiatriques : les effets du plan "Psychiatrie et santé mentale" (2005-2010). Paris: La Documentation française; 2012. [4] Dupuy O. Droit et psychiatrie : la réforme du 5 juillet 2011. Paris: Heures de France; 2011. [5] Idepp. Livre blanc 2012 de la psychiatrie française. disponible sur : http://wwvvidepp.info [6] SPH. La loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge : synthèse, 2012 [en ligne] http:// vvww.uspsy.fr/IMG/pdf/Loi_du_5 juillet_2011.pdf [7] Tabuteau D. 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TEXTES LÉGISLATIFS ET RÉGLEMENTAIRES [42] Loi n°2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (JO 06/07/2011). [43] Décret 2011-846 du 18 juillet 2011 relatif à la procédure judiciaire de mainlevée ou de contrôle des mesures de soins psychiatriques (JO 19/07/2011) + rectificatif 00 30/07/2011). [44] Décret 2011-847 du 18 juillet 2011 relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (JO 19/07/2011). [45] Circulaire interministérielle n°2011-345 du 11 août 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (BO SPSS 2011/9). [46] Circulaire du 21 juillet 2011 relative à la présentation des principales dispositions de la loi n°2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge et du décret n°2011-846 du 5 juillet 2011 relatif à la procédure judiciaire de mainlevée ou de contrôle des mesures de soins psychiatriques (BO MJL 2011/7). [47] Circulaire DGOS/R4/2011/312 du 29 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (http:// sante.gouv.fr/IMG/pdf/Circulaire_29_07_2001_ Loi_psy_05_07_2011-2.pdf) Liliane Régent Documentaliste ERFPS CHU Rouen (76031) 40 SOINS PSYCHIATRIE - n° 281 - juillet/août 2012