N° 148 - Septembre 2010 • AdCF • Intercommunalités
D’autres relations avec les collectivités…
La crise rebat les cartes des relations avec les autres
niveaux de collectivités. Dominique Braye, prési-
dent de la communauté de Mantes-en-Yvelines, en
appelle à une « union sacrée » dans laquelle s’expri-
merait « une solidarité intercommunale et intraré-
gionale ». De tels partenariats doivent être animés
par un chef de file, notion qu’il espère bien voir
progresser « pour gagner en lisibilité et en efficacité
du point de vue du temps, du résultat et de la ges-
tion des deniers publics ».
Dans son esprit, selon qu’il s’agisse d’accompagner
un pôle de compétitivité, d’encourager le capital-
risque local ou d’aider la création d’entreprises, le
chef de file pourra être la région, le département
ou la communauté. « Europe-région-bloc local est
le schéma le plus intégré qui nous tirera vers le
haut, avec l’État dans le rôle de grand péréqua-
teur », considère Estelle Grelier, présidente de la
communauté de communes de Fécamp et députée
européenne, en soulignant son faible départemen-
talisme et en précisant qu’elle ne croit malheureu-
sement « plus trop » aux ambitions péréquatrices
de l’État.
Pour Jacques Chabal, président de la communauté
de communes du Pays du Cheylard, un problème
se pose « lorsqu’il y a deux chefs de file ». Selon lui,
la compétence revenant de droit à la région, les
communautés « doivent être là pour la quotidien-
neté, dans la réalité des bassins de vie ».
Malgré les différences de territoires et de sensibi-
lité, un consensus réunit ces élus sur la nécessité
de placer les communautés en situation de « chef
de file » du développement économique local.
Dominique Braye a regretté le « statu quo légis-
latif » sur la question. Le sénateur des Yvelines
observe que « le terrain, en attente d’une simpli-
fication, est déjà organisé ». « Lorsque les régions
reconnaissent les pays, cela leur permet d’avoir un
nombre limité d’interlocuteurs de terrain », illustre
l’élu breton Marc Andro. Le pays peut coordonner
utilement les actions de plusieurs communautés,
notamment en matière de développement touris-
tique, de promotion territoriale ou d’animation des
tissus d’entreprises. À la tête d’une communauté de
6 500 habitants, Jacques Chabal se félicite ainsi que
le territoire de Valdac (Valence Drôme Ardèche
Centre, 200 000 habitants) prenne en charge la
prospective et la veille économique à l’échelle de
plusieurs communautés.
… et avec le monde économique
Ces nouvelles stratégies passent par un renouveau
de la relation avec le monde économique. Les té-
moignages des élus et des représentants consulaires
on montrer la nécessité croissante pour les entre-
prises de dialoguer avec les intercommunalités et
les communes, y compris sur des sujets connexes à
leur compétence économique comme les déchets,
L’ouvrage « L’action
économique des
communautés, res-
sources et modes
d’intervention de
l’intercommuna-
lité au service du
développement écono-
mique local », publié en juin dernier,
est disponible auprès de ses éditeurs,
l’AdCF et l’ISM.
Contact AdcF :
Anne-Sophie Blanchard,
les réseaux (voirie, assainissement, énergie…), les
solutions de garde d’enfants pour les actifs, les
déplacements de salariés et de marchandises…
Des communautés se dotent d’outils de concerta-
tion avec les chefs d’entreprise via les conseils de
développement ou des instances analogues. Mais
attention! « On parle beaucoup, chacun amène une
idée mais, si l’instance de démocratie participative
n’est pas fédérée et soutenue par les élus, la réflexion
risque de se concentrer sur des détails du quotidien
et pas sur une vision politique économique », a averti
Jacques Chabal. Sa recette: « c’est le rôle des com-
munautés d’associer le plus en amont possible les
décideurs économiques » et de les aider à parvenir
à une position « unanime ».
En la matière, l’étude de l’AdCF et de l’ISM sur les
relations avec les milieux consulaires montre que
celles-ci sont plus collaboratives qu’il y a quelques
années et que la division du travail se précise.
« Nous respectons l’expertise des consulaires, nous
ne cherchons pas à dédoubler leurs champs de com-
pétence », témoigne Marc Andro, vice-président de
Quimper Communauté. « Les bureaux d’études font
des diagnostics, donnent des chiffres et repartent ;
les consulaires, par définition, n’ont pas ce genre de
pratique », témoigne un représentant d’une com-
munauté de communes de Dordogne.
« La seule fois que la chambre
de métiers m’a sollicitée… »
Tout dépend, là encore, des territoires. « La seule
fois que la chambre de métiers m’a sollicitée, c’était
pour me demander d’accueillir un centre Leclerc ! »,
a regretté Estelle Grelier, tout en évoquant en re-
vanche le « guichet unique » créé par la commu-
nauté avec la CCI et le Medef.
Au sein de Montpellier Agglomération, les relations
avec la chambre de métiers sont « excellentes » s’est
félicité Jean-Pierre Moure premier vice-président
de la communauté d’agglomération. L’élu est éga-
lement ravi du travail collaboratif réalisé avec la
chambre d’agriculture sur la déclinaison du SCoT
en PLU. Les politiques de pôles de compétitivité, de
clusters ou de « grappes d’entreprises » ont trans-
formé depuis dix ans la nature des rapprochements
entre communautés, organismes consulaires et
monde de l’entreprise. L’enjeu est désormais de
« faire des choses ensemble » et de conduire des
actions concrètes dans des champs tels que l’inno-
vation, la gestion prévisionnelle de l’emploi et des
compétences, ou encore l’accompagnement de la
création d’entreprises.
Si l’accueil des entreprises et la mise à disposition
d’une offre foncière constituera encore pour long-
temps le cœur de métier des communautés (96
% des communautés d’agglomération et 73 % des
communautés de communes, selon une enquête
2009 de l’AdCF), chacun sait bien qu’il faudra de
plus en plus agir sur l’ensemble du cycle de vie de
l’entreprise pour susciter un « écosystème » favo-
rable. En termes de retombées fiscales, ce n’est pas
le seul capital investi au départ qui comptera mais
la capacité du tissu local d’entreprises à accroître
sa valeur ajoutée. « Avant, on calculait l’investisse-
ment en fonction du retour dans la TP. La réforme
fiscale nous incitera à un vrai pacte financier, beau-
coup plus intégré en termes d’urbanisme, de déve-
loppement économique, dans le cadre d’une straté-
gie territoriale plus globale », anticipe Charles-Éric
Lemaignen en se qualifiant d’ « optimiste lucide ».
Une posture que nombre d’élus aimeraient égale-
ment adopter, mais sans cacher pour autant leurs
inquiétudes du moment.
Valérie Liquet
Dossier Mutations éco
« La réforme fiscale nous incitera à un vrai pacte
financier, beaucoup plus intégré en termes
d’urbanisme, de développement économique,
dans le cadre d’une stratégie territoriale plus
globale. » Charles-Éric Lemaignen, président de
la communauté d’Orléans Val-de-Loire
« Les collectivités qui n’offrent pas, dans leurs
zones d’activités, des crèches intégrées, un plan
de déplacement d’entreprises et des infrastruc-
tures soucieuses de la consommation d’énergie
sont en dehors du coup. » Jean-Pierre Moure,
vice-président de Montpellier Agglomération
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© CEA MINATEC pierrejayet.com
Dans l’agglomération de Grenoble, le campus d’inno-
vation Minatec de 20 hectares compte parmi les cinq
premiers mondiaux en micro et nanotechnologies. Les
70 000 m2 de locaux abritent 4 000 personnes, dont
2 400 chercheurs, 1 200 étudiants, 600 industriels et
spécialistes du transfert technologique. Une ville
dans la ville.
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