Développement: Théorème de Dini
et application au théorème de Glivenko Cantelli
Adrien Fontaine
1er juillet 2014
Référence : Gourdon, Analyse
Nourdin, Agrégation de mathématiques, épreuve orale
Théorème 1 (Deuxième théorème de Dini)
Soient a, b Ravec a<b, et (fn)nNune suite de fonctions croissantes de [a, b]dans R, qui
converge simplement vers une fonction continue f. Alors, (fn
)nNconverge uniformément vers fsur [a, b].
Démonstration : Soit ε > 0. La fonction fétant continue sur le compact [a, b], elle est uniformément
continue sur [a, b]par le théorème de Heine. Il existe donc η > 0tel que
x, y [a, b],|xy|< η ⇒ |f(x)f(y)|< ε
Soit alors S= (a=a0< a1< ... < an1< an=b)une subdivision de [a, b]de pas < η. Puisque
(fn)converge simplement vers f, et que les aisont en nombre fini, il existe un entier n0N, tel
que nn0, et 1in, on ait |f(ai)fn(ai)|< ε.
Soit x[a, b]et nn0. Il existe i∈ {1, ..., n}tel que x[ai, ai+1]. Alors,
|f(x)f(ai)|< ε
Donc,
|f(x)fn(x)| ≤ |f(x)f(ai)|+|f(ai)fn(ai)|+|fn(ai)fn(x)|
ε+ε+ (fn(x)fn(ai)) car fnest croissante
2ε+fn(ai+1)fn(ai)car fnest croissante
2ε+|fn(ai+1)f(ai+1)|+|f(ai+1 f(ai)|+|f(ai)fn(ai)|
5ε
La convergence est donc uniforme.
1
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Application :
Théorème 2 (de Glivenko-Cantelli)
Soit (Xn)nNune suite de v.a.i.i.d. Notons Fla fonction de répartition commune des Xnet
posons si tRet nN, la variable aléatoire :
Fn(t) = 1
n
n
X
k=1
1]−∞,t](Xk)
Alors, presque surement, on a :
sup
tR|Fn(t)F(t)| −
n+0
Démonstration : Idée de la preuve : La loi forte des grands nombres nous donne facilement
Fn(t)p.s
n+F(t)pour tout tR. Par ailleurs, chaque fonction Fnest croissante. On a donc
envie d’appliquer le deuxième théorème de Dini. Plusieurs problèmes se posent alors :
la fonction Fn’est pas, a priori, continue.
la convergence n’a pas, a priori, lieu sur un segment.
la loi forte des grands nombres nous donne
tR,At/P(At)=1et ωAt, Fn(t)(ω)
n+F(t)(ω)
Pour appliquer le théorème de Dini, il nous faut trouver un ensemble Ade mesure pleine
uniforme pour tous les tR. Autrement dit, on cherche Atel que P(A)=1et
ωA, tR, Fn(t)(ω)
n+F(t)(ω)
Les deux premiers points seront résolus grâce à l’inverse généralisé de la fonction de répartition,
le troisième grâce à la séparabilité de R.
Commençons par deux résultats fondamentaux sur l’inverse généralisé de la fonction F.
Lemme 1
On introduit l’inverse généralisé de la fonction F:
u[0,1], F (u) := inf{xR/F (x)u}
Alors, on a l’équivalence suivante, pour tout xRet u[0,1],
F(u)xuF(x)
Démonstration : Si F(u)x, alors il existe yxtel que F(y)u. Mais par croissance
de F, on a F(y)F(x), et donc
uF(y)F(x)
Réciproquement, si uF(x), alors x∈ {yR/F (y)u}, et doncxinf{yR/F (y)
u}, i.e
F(u)x
3
Corollaire 1
Si Yest une v.a réelle de fonction de répartition Fet U∼ U([0,1]), alors F(U)Y.
Démonstration : Il suffit d’écrire
P(F(U)x) = P(UF(x)) = F(x)
car la restriction à [0,1] de la fonction de répartition d’une loi uniforme est l’identité.
On va maintenant pouvoir se ramener, dans la preuve du théorème de Glivenko-Cantelli, au cas
de v.a qui suivent une loi uniforme sur [0,1].
En effet, soit (Un)nNune suite de v.a réelles indépendantes de même loi U([0,1]). Alors, on a :
sup
tR|1
n
n
X
k=1
1XktF(t)| ∼ sup
tR|1
n
n
X
k=1
1F(Uk)tF(t)| ∼ sup
tR|1
n
n
X
k=1
1UkF(t)F(t)|
Par ailleurs, si on pose s=F(t), il vient :
sup
tR|1
n
n
X
k=1
1UkF(t)F(t)|= sup
sF(R)|1
n
n
X
k=1
1Ukss| ≤ sup
s[0,1] |1
n
n
X
k=1
1Ukss|
Ainsi, il suffit de montrer que le théorème de Glivenko-Cantelli est vrai dans le cas particulier de
v.a qui suivent des lois U([0,1]), et où s[0,1].
Grâce à loi forte des grands nombres, on sait que pour tout s[0,1], il existe Asde mesure pleine
tel que
ωAs,1
n
n
X
k=1
1Uk(ω)ss
On va maintenant essayer de trouver un ensemble Ade mesure pleine, qui soit uniforme pour
tous les s[0,1].
Qétant dénombrable, et une intersection dénombrable d’ensembles de mesure pleine étant de
mesure pleine, on en déduit l’existence d’un ensemble Ade mesure pleine tel que
ωA, s[0,1] Q,1
n
n
X
k=1
1Uk(ω)ss
Montrons que la propriété ci-dessus est vraie pour tout s[0,1] et pas seulement pour tout
s[0,1] Q.
Fixons s[0,1] et ε > 0.Q[0,1] étant dense dans [0,1], il existe pet qdeux éléments de
Q[0,1] tels que sεpsqs+ε.
Alors, par croissance de s7→ 1
nPn
k=1 1Uk(ω)s, on a
1
n
n
X
k=1
1Uk(ω)p1
n
n
X
k=1
1Uk(ω)s1
n
n
X
k=1
1Uk(ω)q
pour tout ωA.
D’où, en passant à la lim sup à droite et à la lim inf à gauche, on en déduit (la propriété étant
vérifiée pour pet q) :
sεlim inf
n+
1
n
n
X
k=1
1Uk(ω)slim sup
n+
1
n
n
X
k=1
1Uk(ω)ss+ε
pour tout ωA.
Pour chaque ωA, la suite de fonctions croissantes 1
nPn
k=1 1Uk(ω)sconverge donc simplement
vers ssur [0,1]. Le deuxième théorème de Dini, nous assure alors que la convergence est uniforme
sur [0,1]. Ce qui achève la démonstration.
4
Remarques :
Pour justifier que l’application définie sur par suptR|Fn(t)F(t)|est bien une variable
aléatoire (ce qui justifie par la même occasion la suite d’équivalences en loi de la preuve du
théorème de Glivenko-Cantelli), on a besoin du lemme suivant :
Lemme 2
La fonction de répartition empirique Fnbâtie sur les variables aléatoires X1, ..., Xnde fonction
de répartition Fvérifie :
ω,sup
xR|Fn(x)(ω)F(x)|= sup
xQ|Fn(ω)(x)F(x)|
En conséquence, kFnFkest une variable aléatoire réelle.
Démonstration : Fixons ωquelconque dans et notons pour alléger
τ:= kFn(.)(ω)Fk= sup
xR|Fn(x)(ω)F(x)|
Comme Fn(x)(ω)et F(x)sont toujours deux réels de [0,1], ce suprémum τest fini. Alors, pour
tout ε > 0, il existe un xεtel que
τε < |Fn(xε)(ω)F(xε)| ≤ τ
Les fonctions de répartitions Fn(.)(ω)et Fétant continues à droite au point xε, la valeur absolue
de leur différence l’est aussi. Il existe donc un δ > 0tel que
t]xε, xε+δ[,|Fn(t)(ω)F(t)|>|Fn(xε)(ω)F(xε)| − ε
Par ailleurs, Qétant dense dans R, il y a au moins un rationnel tdans l’intervalle ]xε, xε+δ[. Ce
rationnel vérifiant l’inégalité ci-dessus, on en déduit
sup
rQ|Fn(r)(ω)F(r)|> τ 2ε
Le premier membre ne dépendant pas de εet ε > 0étant arbitraire, on en déduit
sup
rQ|Fn(r)(ω)F(r)| ≥ τ:= sup
rR|Fn(r)(ω)F(r)|
Puisque ωétait quelconque, ceci vaut pour tout ω. L’inégalité dans l’autre sens est évidente,
donc l’égalité du lemme est démontrée pour tout ω.
Il existe bien sur un premier théorème de Dini dont l’énoncé est le suivant :
Théorème 3 (Premier théorème de Dini)
Soient a, b Ravec a<b, et (fn)nNune suite croissante de fonctions continues de [a, b]dans
R, qui converge simplement vers une fonction continue f. Alors, (fn)nNconverge uniformément
vers fsur [a, b].
Prendre garde au fait que dans ce théorème, on a besoin de la continuité des fn, contrai-
rement au deuxième théorème de Dini. Dans Gourdon, les fonctions fnsont supposées
continues dans les deux théorèmes de Dini, mais comme on le voit ici, cette hypothèse
n’est pas nécessaire pour le deuxième. La démonstration du théorème de Glivenko-Cantelli
nécessite d’ailleurs cet énoncé plus précis, puisqu’a priori, il n’y a aucune raison pour que
les fonctions Fnsoient continues.
5
Pour tout n, si (Xk)1knest un échantillon de taille n, la fonction Fnest appelée la fonction
de répartition empirique de l’échantillon (Xk)1kn.
Le théorème de Glivenko-Cantelli est parfois appelé théorème fondamental de la statistique,
car il exprime en quoi une loi de probabilité peut être révélée par la connaissance d’un
échantillon suffisamment grand de ladite loi de probabilité.
Le théorème de Glivenko-Cantelli est parfois considéré comme une généralisation du deuxième
théorème de Dini, car il ne suppose pas en particulier la continuité de F, ni le fait d’être
défini sur un compact.
Le théorème de Kolmogorov-Smirnov précise l’énoncé du théorème de Glivenko-Cantelli
dans le cas où Fest continue : il donne une estimation de la vitesse de convergence en 1
n:
Théorème 4 (de Kolmogorov-Smirnov)
Soit (X1, ..., Xn)un échantillon de loi µsur Rde fonction de répartition F. Si Fest continue,
alors
Kn=nsup
xR|Fn(x)F(x)| −LµKS
µKS est une loi universelle ne dépendant pas de F. Elle est portée par R+et a pour fonction
de répartition pour t0:
FKS (t) = 1 + 2
+
X
k=1
(1)ke2k2t2
Le théorème de Kolmogorov-Smirnov est à la base du test d’adéquation à une loi de
Kolomogorov-Smirnov.
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