Supplément de la Gazette n°62 – mai 2008 réf. : 62/08 Santé Lits halte soins santé : ce qu’il faut savoir La création des Lits halte soins santé (LHSS) est dans la continuité des lits infirmiers, installés en 1993 à titre expérimental pour répondre au besoin de prise en charge sociale et sanitaire de personnes sans domicile dont l’état de santé ne nécessitait pas non plus une hospitalisation. L’objectif de création des LHSS était de donner à ce qu’étaient les lits infirmiers un cadre juridique et financier pour assurer une qualité de prise en charge et de suivi, et de définir un cahier des charges de mise en œuvre et de fonctionnement. Le dispositif est en projet depuis plusieurs années et a commencé à se mettre en place depuis 2006. Fin 2007, 501 lits étaient créés et 500 restaient à créer. Objectif ___________________________________________ Les temps d’hospitalisations sont de plus en plus courts et les structures sociales sont de plus en plus amenées à prendre en charge des personnes souffrant de pathologies diverses. Une personne sans domicile fixe qui souffre d’une grippe ou d’un gros rhume, mettra beaucoup de temps à s’en remettre s’il ne peut pas se reposer et bénéficier de soins de base dans un environnement favorable. Fragilisée, elle sera plus vulnérable à d’autres maladies et à terme pourra avoir besoin d’une hospitalisation plus longue. Ce constat amène à penser que pour la personne concernée et dans un soucis d’économie, il vaut mieux offrir un toit et un soin de base tant que la pathologie est bénigne plutôt que la laisser se développer et aboutir à l’hospitalisation de la personne. L’objectif général des Lits halte soins santé est de procurer des soins à des personnes sans domicile fixe atteints de problèmes de santé "bénins", pour prévenir des situations de complication ou de renoncement de soins. Fnars - Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale 76 rue du faubourg Saint-Denis - 75010 Paris - [email protected] - http://www.fnars.org - tél. : 01 48 01 82 00 - fax 01 47 70 27 02 Description du dispositif ______________________________ Ils sont financés à hauteur de 100 €/lit/jour et ce montant comprend la prise en charge des médicaments à usage courant (paracétamol, pansement, désinfectant, kit insulinique, etc.) Quelles réglementations ? Quels statuts ? Les LHSS sont des établissements médicosociaux qui relèvent du 9° du I de l’article 312-1 du code de l’action sociale et des familles. Il s’agit de structures autonomes qui doivent donc faire l’objet d’un passage en comité régional d'organisation sociale et médico-sociale (Crosms). Aucune participation financière du patient ne peut être exigée. Le financement ne comprend que du fonctionnement. Quel public est concerné ? La circulaire n° DGAS/SD1A/2006/47 du 7 février 2006 relative à l’appel à projet national en vue de la création de structures dénommées "Lits halte soins santé", détaille les enjeux, le fonctionnement, les modes de financement, la gestion, l’organisation ainsi que le mode de fonctionnement de l’appel à projet. Ce dispositif est prévu par l’Etat jusqu’en 2011. Est concernée toute personne sans domicile fixe, quelle que soit sa situation administrative, que ses droits à l’assurance maladie soient ouverts ou pas, dont l’état ne nécessite pas d’hospitalisation ou de prise en charge spécialisée, qui doit recevoir des soins. Le dispositif s’adresse aux personnes sans domicile et non pas aux "personnes dont le logement n’est pas adapté". Elle est annexée d’un cahier des charges très détaillé et d’une grille d’évaluation auquel nous vous invitons à vous référer. Questions : Peut-on accueillir des personnes en fin de vie ? Oui, si le médecin s’en sent capable, dans le souci d’accueillir et d’accompagner la personne dignement. La création d’un LHSS est subordonnée à l’accord de la Direction générale de l’action sociale. Les contrôles sont réalisés par les Ddass. Une fois l’accord de création obtenu, le dispositif doit être mis en place dans l’année. Peut-on accueillir une femme enceinte ou sortant de maternité ? Oui, mais cela nécessite un partenariat avec la Protection maternelle et infantile (PMI). Attention : Les LHSS sont des structures de soin, par conséquent, ils n’entrent pas dans le Plan d’action renforcée en faveur des personnes sans abri (Parsa) et le Droit au logement opposable (Dalo) ne s’y applique pas. Certains parlent d’un "principe de réalité" plutôt que d’un "principe de continuité". Quand une personne est guérie, elle ne relève donc plus du dispositif. Peut-on accueillir une femme malade avec son enfant ? Oui, mais un seul lit sera mobilisé. A charge de la structure de mettre à disposition un lit d’appoint à côté de celui de sa mère. Peut-on accueillir un enfant malade ? Non, la structure de soin s’adresse à des personnes majeures. Quel financement ? Comment organiser l’espace ? Le financement est assuré par l’assurance maladie (Objectif national des dépenses de l’assurance maladie médico-social [Ondam]) sous forme d’une dotation annuelle sur la base d’un forfait par lit et par jour. Les lits sont donc payés qu’ils soient occupés ou non. Supplément de la Gazette - mai 2008 Les lits de la structure doivent autant que possible être regroupés pour délimiter un espace spécifique, dédié et facilement identifiable. En aucun cas, les lits ne peuvent "tourner" ou aller d’une chambre à une autre. Les chambres ne peuvent pas être fermées à clé, car le personnel doit pouvoir intervenir à tout moment. 2 Un accès handicapé doit être prévu. Question : Peut-on faire appel à des Hospitalisations à domicile (HAD) ou à des Soins infirmiers d’aide à domicile (SIAD) ? Non, car ils sont aussi financés par la sécurité sociale qui ne peut pas financer deux fois la même chose. Les lits vacants ne peuvent pas être utilisés pour le besoin d’une structure annexe. Ils ne sont disponibles que pour les personnes répondant aux critères du dispositif. Quels services pour la personne ? Travailleur social Entre autres choses, il assure les orientations et les ouvertures de droits. Des partenariats pour l’animation et les ateliers peuvent prendre le relais de l’accompagnement. La prise en charge devra être globale et il faudra prévoir : - le nettoyage de sa chambre, - une restauration 3 fois par jour, 7 jours sur 7 (adaptée à son régime si besoin), - une aide à l’alimentation si nécessaire, - des animations : ateliers, sorties…, - une orientation vers des partenaires et des dispositifs sociaux et/ou sanitaires. Veilleurs de nuit Ils permettent une présence 24h/24 et doivent pouvoir alerter les services de soin si besoin. Conseil : Ce n’est pas obligatoire, mais nous conseillons très fortement de les former aux premiers secours. Quels besoins en personnel ? Contrats Pour les salariés affectés sur le dispositif en temps partiel, une mention devra être prévue dans chaque contrat concernant celui-ci. Par exemple, l’employée de ménage qui travaille dans le CHRS attenant et qui nettoie aussi les chambres du dispositif doit être couverte sur tout son secteur d’activité, il doit donc en être fait mention dans son contrat. Qui achète, finance et gère les médicaments ? La structure doit avoir un fond de médicaments courants qui est à sa charge. La structure doit pouvoir gérer des stupéfiants et produits de substitution qui devront alors être placés dans une salle fermée à clé avec un coffre. Directeur La structure Lits halte soins santé, même si elle est attenante à une autre structure doit avoir son propre directeur, même s’il n’y est qu’à temps partiel. Le directeur prend les décisions d’entrée et de sortie après avis du médecin. En somme, au final, c’est au médecin que revient la décision. Les médicaments ne peuvent pas être laissés dans les chambres. Pour les médicaments spécifiques, ils sont achetés au fur et à mesure par le personnel en fonction des besoins du patient. Personnel soignant (médecins, infirmiers, etc.) L’équipe doit obligatoirement compter un temps de médecin et d’infirmière. Ceux-là doivent pouvoir être mobilisés si besoin. Ils peuvent être salariés de la structure, ou bien faire l’objet d’une convention avec une structure médicale, ou encore être déclarés en tant que vacataires. Les médicaments sont pris en charge par l’assurance maladie du patient si ses droits sont ouverts. Sinon, ils doivent être pris en charge par la structure. Les travailleurs sociaux ont donc tout intérêt à leur ouvrir leurs droits rapidement. Conseil : Nous conseillons de ne pas laisser les piluliers à disposition du patient, pour éviter les risques de vols ou de suicide. Le médecin référent est le chef de service et est donc le seul responsable des actes médicaux. In fine, il est le responsable de la structure, car le directeur doit s’en référer à lui pour prendre toute décision d’entrée ou de sortie. S’il fait intervenir des confrères, ils seront sous sa responsabilité. Information : Les pharmacies à usage intérieur devraient être autorisées par un décret est en cours d’examen au conseil d’Etat qui devrait sortir au mois de juin 2008. 3 Supplément de la Gazette - mai 2008 Attention : Les Lits halte soins santé ne doivent pas être le "déversoir" de l’hôpital. Quelle confidentialité ? Tous les salariés de la structure sont soumis au secret professionnel. La structure doit conserver les dossiers de ses patients à durée illimitée. Les dossiers doivent donc être gardés dans une armoire fermée à clé. L’usager doit pouvoir avoir accès à son dossier médical. Pour cela, un mode de consultation par l’intermédiaire du médecin doit être organisé et la personne accueillie doit en être informée. Comment organiser les entrées et sorties ? Quelle durée de prise en charge ? La durée prévisionnelle du séjour est de 2 mois. Le terme prévisionnel renseigne sur une certaine souplesse qui laisse le champ ouvert à l’appréciation du médecin. La durée de séjour peut donc être prolongée si la santé du patient l’exige. Quelles conventions / partenariats à mettre en place ? Les entrées et sorties sont décidées par le directeur, après l’avis du médecin. Les partenariats doivent être définis et écrits à l’avance. Ils sont à prévoir avec : un hôpital psychiatrique, une pharmacie, un laboratoire, un centre d’examen de santé, un centre dentaire, une protection maternelle et infantile (PMI), l’aide sociale à l'enfance (ASE)... La structure doit s’organiser pour que des admissions puissent avoir lieu le week-end ou même la nuit. Comment monter son dossier ? _________________________ Les conventions de partenariat écrites doivent être fournies si elles existent déjà, sinon elles doivent être transmises ultérieurement. Pour le détail sur le montage de dossier, je vous invite à vous reporter à la circulaire qui est très complète. Ayez quand même en tête que : Le dossier ne doit pas faire plus de 50 à 60 pages. Les plans de la structure doivent être fournis et présenter tous les aménagements qui seront faits. Le règlement intérieur, le livret d’accueil et éventuellement le contrat d’accompagnement (pas obligatoire) doivent aussi être fournis. Conclusion _________________________________________ On constate aujourd’hui que 35 à 40 % des lits sont embolisés par les "ni ni", c'est-à-dire des personnes qui ne présentent ni des problèmes psychiatriques lourds, ni des pathologies chroniques, mais qui nécessitent malgré tout des soins et du temps, proches du nursing. Pour répondre à ce besoin, la DGAS étudie un projet de création de Lits pérennes soins santé (LPSS). Si ce dispositif doit se mettre en place, la Fnars devra s’en saisir, pour en évaluer les enjeux et les risques et être force de propositions. Pour toute question complémentaire, n’hésitez pas à me contacter. Je pourrai aussi vous mettre en contact avec un établissement ayant déjà mis en place une structure Lits halte soins santé. Les lits créés concernent 39 départements sur 95, et la moyenne nationale est de 9 lits par département. Le nombre de lits par structure s’étale de 1 à 50. 20 % des lits sont en Ile de France. La Commission nationale informatique et liberté (Cnil) a autorisé une étude sur le public accueilli qui permettra avant tout de recenser les difficultés rencontrées. Cette étude devrait voir le jour au courant du dernier semestre 2008. Le projet des Lits halte soins santé avait été débattu à la Fnars en octobre et novembre 2005. Le risque de création d’une "sous médecine" pour les SDF ne sera écarté que si le dispositif répond à des certaines exigences. Céline de Laurens, chargée de mission Santé en remplacement de Lise Fender [email protected] Supplément de la Gazette - mai 2008 4