Pharmacovigilance Éruption cutanée associée à la quinine La quinine est une molécule connue depuis de nombreuses années. Administrée initialement pour traiter le paludisme, elle est maintenant plus couramment utilisée pour traiter les crampes nocturnes. Au Québec, la quinine est un médicament disponible en annexe II pour cette dernière indication. Il s’agit d’un médicament qui est généralement bien toléré et présente peu d’effets indésirables. Tout cela ne signifie pas pour autant que la quinine soit exempte d’effets indésirables graves. Des cas de réactions cutanées, de chocs anaphylactiques et de toxicités hématologique, hépatique et neurologique ont entre autres été rapportés1. Cet article présente un cas d’éruption cutanée associée à la quinine, un effet secondaire rare de ce médicament. Présentation du cas Le patient concerné est M.C., un homme âgé de 58 ans, mesurant 1,59 m et pesant 99,5 kg. Au jour 0 de l’hospitalisation, M.C. consulte à l’urgence pour des étourdissements en augmentation depuis une semaine ainsi que pour de la fatigue, de la faiblesse, une diminution de l’appétit, des céphalées, des frissons, de la diaphorèse et une diminution de la diurèse. M.C. présente également une éruption cutanée accompagnée de prurit au niveau du visage, du dos et des jambes ayant débuté la veille (jour -1 de l’hospitalisation). M.C. est atteint de dysfonction cardiaque diastolique sévère, de diabète de type II traité par de l’insuline, de dyslipidémie, de maladie coronarienne et de maladie vasculaire athérosclérotiques, d’insuffisance rénale sévère, d’hypertension artérielle, d’anémie, d’obésité et de goutte. Il a également subi deux pontages aortocoronariens il y a plus de 15 ans. Étant donné les nombreuses pathologies dont il souffre, M.C. a un profil pharmacologique lourd. La médication qu’il reçoit à l’admission est présentée au tableau I. Il est à noter que de la quinine (NovoQuinine®) à raison de 300 mg une fois par jour au coucher a été ajoutée à la médication de M.C. deux semaines avant son hospitalisation. Le patient a un antécédent d’allergie à la clindamycine (Dalacin C®) qui s’est manifestée par une éruption cutanée. À l’admission, toutes les valeurs de laboratoire de M.C. se trouvent à l’intérieur des intervalles normaux, à l’exception de la créatinémie qui est augmentée à 390 umol/L, alors que sa valeur de base est habituellement aux environs de 280 umol/L, et de l’urémie qui était augmentée à 29,2 umol/L. Plusieurs médicaments sont cessés en raison de l’insuffisance rénale aiguë (IRA) et de la détérioration de l’état général du patient, soit le furosémide, l’amlodipine, l’hydralazine, le fénofibrate, l’atorvastatine, la colchicine, le sulfate ferreux et la quinine. En effet, le furosémide et les hypotenseurs peuvent être à l’origine d’une IRA ou l’exacerber. La colchicine, l’atorvastatine et le fénofibrate, quant à eux, ont été cessés en raison de leur élimination rénale. De fait, l’IRA aurait pu causer une accumulation de www.professionsante.ca ces agents et augmenter le risque d’effets indésirables et de toxicité. Plusieurs hypothèses ont été soulevées pour expliquer cette augmentation de la créatinémie. La quinine a été soupçonnée puisque des cas de néphrite à la quinine ont été rapportés, mais la déshydratation secondaire à l’utilisation du furosémide et à une diminution de l’apport liquidien semblait plus probable en raison de l’augmentation concomitante de l’urée. Puisque la quinine était le dernier médicament à avoir été ajouté, cet agent a tout de suite été soupçonné d’être responsable de l’éruption cutanée accompagnée de prurit. Des analyses de laboratoire ont démontré que M.C. ne présentait pas d’éosinophilie, excluant ainsi un syndrome d’éruption cutanée avec éosinophilie et symptômes systémiques (Drug rash with eosinophilia and systemic symptoms [syndrome DRESS]). De l’hydroxyzine (Atarax®) à raison de 25 mg par voie orale toutes les 8 heures et de la diphénhydramine (Benadryl®) à raison de 25 mg par voie intraveineuse toutes les 6 heures au besoin ont été instaurés afin de diminuer les symptômes cutanés (éruption et prurit), tandis qu’un Texte rédigé par Magali Laprise-Lachance, B. Pharm., St. Joseph’s Healthcare, Hamilton, et Mélanie Simard, B. Pharm., M.Sc., BCOP, CHUQ, Pavillon de l’Hôtel-Dieu, Québec. Texte original remis le 30 juillet 2010. Texte final remis le 18 janvier 2011. Révision : Christine Hamel, B. Pharm., M.Sc., Hôpital BMP, Cowansville. Tableau I Histoire médicamenteuse Médication Durée de traitement Atorvastatine 40 mg die 10 ans Fénofibrate 100 mg die 10 ans Pantoprazole 40 mg die 7 ans Aspirine 325 mg die 6 mois Métoprolol 50 mg bid 6 mois Amlodipine 5 mg die 6 mois Hydralazine 10 mg tid 6 mois Sulfate ferreux 300 mg 2 comprimés hs 6 mois Insuline lispro aux repas (Novorapid®) 4 mois Insuline biosynthétique humaine 4 mois à action intermédiaire hs (Novolin® GE NPH) Allopurinol 100 mg die 3 ½ mois Colchicine 0,6 mg 1 comprimé 3 fois par semaine 3 mois Furosémide 80 mg bid 1 ½ mois Quinine 300 mg die 2 semaines juin 2011 vol. 58 n° 3 Québec Pharmacie 49 Pharmacovigilance soluté de normal salin (NaCl 0,9 %) a été administré pour corriger la déshydratation du patient. Quelques heures plus tard, M.C. présentait encore beaucoup de prurit et la dose de diphénhydramine a été augmentée à 50 mg toutes les 6 heures au besoin. Le lendemain de son admission (jour 1), l’hydroxyzine et la diphénhydramine ne parvenaient pas à soulager les symptômes de M.C., ce dernier présentant toujours des lésions prurigineuses importantes. Il avait même l’impression que ces dernières avaient augmenté. De plus, il a présenté un premier pic de température à 38,4 °C en avant-midi et un autre atteignant 38,2 °C en soirée. Le dermatologue, qui avait été demandé en consultation, a prescrit une crème à base d’acétonide de triamcinolone 0,1 % (Aristocort-R®) en application sur les rougeurs deux fois par jour. Ce médecin n’a pas fait de biopsie cutanée, mais il a tout de même conclu à un exanthème non spécifique d’origine infectieuse ou médicamenteuse. Puisque le patient a fait de la fièvre, l’infectiologue a été demandé en consultation et ce dernier a conclu qu’une infection n’était pas en cause. La cause de l’exanthème non spécifique était donc d’origine médicamenteuse. Dans la soirée, le furosémide a été repris. Au jour 2, il y avait une diminution importante de l’éruption cutanée et du prurit. La créatinémie s’était également améliorée, atteignant ce jour-là 325 umol/L. Le patient n’a plus refait de pic fébrile. Au jour 3, les symptômes d’allergie de M.C. se sont encore beaucoup améliorés et sa créatinémie était retournée à sa valeur de base, soit 276 umol/L. Au jour 4, le patient ne présentait plus de prurit et l’éruption cutanée continuait de guérir (voir tableau II). Malgré l’amélioration rapide de son état, le patient a reçu son congé après sept jours d’hospitalisation puisque des investigations, qui n’étaient pas en lien avec l’épisode d’éruption cutanée, ont été menées. Discussion Les réactions associées à la quinine sont, pour la plupart, de type latent, ce qui signifie que les symptômes apparaissent de 24 heures à plusieurs semaines après le début du traitement2. C’est également le cas pour les réactions associées à la quinidine, une molécule apparentée à la quinine2. Généralement, le temps d’exposition nécessaire à la quinine est d’au moins cinq à sept jours et la majorité des hypersensibilités surviennent après deux à six semaines de traitement si les patients n’y ont jamais été exposés auparavant2,3. Les réactions cutanées associées à la quinine se présentent de différentes façons, mais elles sont le plus souvent accompagnées de prurit 2. En France, de 1985 à 1996, 14 cas de réactions cutanées ont été rapportés1. La moitié d’entre eux étaient des éruptions érythémateuses et les sept autres, des cas d’eczéma, d’urticaire et de purpura allergique1. Plusieurs cas décrits dans la littérature scientifique sont survenus chez des personnes de 58 à 68 ans, sauf un chez une jeune femme de 23 ans sans comorbidités3,4,5. Les présentations clini- Tableau II Évolution de l’état clinique et modification de la médication Jour -1Apparition de l’éruption cutanée Jour 0 n Consultation à l’urgence n Valeur de la créatinine = 390 umol/L, urée = 29,5 n métoprolol 25 mg bid n Ajout soluté NaCl 0,9 %, hydroxyzine, diphénhydramine 25 mg puis 50 mg n Médicaments cessés : furosémide, amlodipine, hydralazine, fénofibrate, atorvastatine, colchicine, FeSO4 , quinine Jour 1 n Impression de progression du prurit, fièvre n Ajout crème hydratante et crème de cortisone n Reprise du furosémide n Arrêt de la diphénhydramine Jour 2 n importante du rash et prurit, n créatinémie (325 umol/L) n métoprolol 50 mg bid Jour 3 n importante du rash et prurit n retour aux valeurs normales de créatinémie (276 umol/L) Jour 4 n importante du rash et prurit n Valeur de la créatinine = 287 umol/L, urée = 18,1 Jour 5 Jour 6 Jour 7 n Départ Note : l’amlodipine, l’atorvastatine et la colchicine ont été reprises en externe. 50 Québec Pharmacie vol. 58 n° 3 juin 2011 ques des réactions cutanées rapportées étaient similaires. Les patients présentaient une fatigue généralisée et des myalgies, puis le rash apparaissait3,4,5. À la suite de l’apparition du rash, les patients présentaient des épisodes d’hyperthermie3,4,5. De plus, des anomalies du bilan sanguin (éosinophilie) étaient présentes chez deux de ces patients et tous les cas présentaient une atteinte d’au moins un organe, le plus souvent le foie3,4,5. Ces patients ont reçu un diagnostic de syndrome DRESS. Ce syndrome se manifeste par plusieurs signes et symptômes systémiques avec une altération de l’état général, une hyperthermie (température supérieure à 39 °C), des adénopathies douloureuses de grande taille et une ou plusieurs atteintes viscérales, comme une hépatite cytolytique, une néphrite interstitielle, une pneumopathie interstitielle, une thyroïdite, une encéphalite, une pancréatite, une rhabdomyolyse, une myocardite ou une péricardite3. Récemment, des études ont laissé entendre que le virus herpétique humain de type 6 (VHH6), responsable de la roséole et d’autres maladies infantiles, jouerait un rôle dans la pathogenèse des syndromes d’hypersensibilité induits par les médicaments8,9. C’est le cas d’une jeune femme de 23 ans qui a manifesté un syndrome DRESS alors qu’elle prenait de l’Hexaquine®, un médicament contenant de la quinine et de la thiamine. Ses symptômes se sont manifestés lorsqu’elle a souffert d’une réactivation du VHH63. Les médicaments pour lesquels des syndromes DRESS ont été rapportés sont présentés au tableau III. Il est à noter que M.C. n’a pas présenté un syndrome DRESS puisqu’il n’y avait pas d’irrégularité dans son bilan sanguin, ni d’atteinte d’organe. Cependant, il a présenté un affaiblissement de l’état général et de l’hyperthermie modérée. Son diagnostic était donc un exanthème maculaire érythémateux sur le tronc et le visage ainsi que sur les membres inférieurs, réaction de moindre intensité qu’un syndrome DRESS. Que se serait-il passé si la quinine n’avait pas été retirée de la pharmacothérapie de M.C. ? Est-ce qu’il aurait manifesté un syndrome DRESS ? Il est difficile de répondre à cette question avec certitude. Il s’agit cependant d’une possibilité puisque la littérature médicale indique que la gravité de l’éruption, ainsi que des anomalies de laboratoire qui sont associées au syndrome DRESS sont liées en partie à la durée de l’exposition au médicament après l’apparition des premiers signes d’hypersensibilité9. Imputabilité Parmi les nombreux médicaments suspendus lors de l’hospitalisation, plusieurs peuvent être éliminés en analysant la chronologie des évènements en ce qui a trait à l’imputabilité de la réaction observée chez M.C. Tout d’abord, le furosémide a été suspendu lors de l’admission, mais il Éruption cutanée associée à la quinine Après l’utilisation de quinine, certains patients ont reçu un diagnostic de syndrome DRESS. Ce syndrome se manifeste par plusieurs signes et symptômes systémiques avec une altération de l’état général, une hyperthermie, des adénopathies douloureuses de grande taille et une ou plusieurs atteintes viscérales. a été repris au jour 1. Malgré la reprise de ce médicament, l’état clinique du patient s’est tout de même amélioré. Le furosémide peut donc être éliminé en tant qu’agent causal. Ensuite, l’amlodipine, l’atorvastatine et la colchicine ont éventuellement été repris en externe, sans qu’il y ait pour autant réapparition d’une réaction cutanée chez M.C. Les deux seuls autres médicaments, à l’exception de la quinine, qui n’ont pas été réintégrés dans le profil pharmacologique du patient, sont l’hydralazine et le fénofibrate. D’une part, puisque le patient prenait du fénofibrate depuis plus de 10 ans, nous pouvons penser que ce médicament n’est probablement pas la cause de l’éruption cutanée. D’autre part, M.C. prenait de l’hydralazine depuis plus de six mois et la dose de ce médicament avait été réduite quelques semaines avant le début de la réaction. Il serait donc étonnant que l’hydralazine soit responsable de la réaction d’hypersensibilité. Le seul nouveau médicament que M.C. prenait était la quinine, qui avait été administrée deux semaines avant l’apparition du rash et du prurit. L’algorithme d’imputation d’une réaction indésirable à un médicament, aussi connu sous le nom d’algorithme de Naranjo, a été utilisé afin de déterminer le degré de probabilité que l’éruption cutanée soit due à la quinine6. Dans le cas présent, le score obtenu est de 4, ce qui signifie que la quinine est possiblement responsable du rash dont a souffert M.C. et que le degré de probabilité est faible. Il est vrai que, dans le cas présent, plusieurs facteurs peuvent avoir influé d’une façon ou d’une autre sur le tableau clinique. Tout d’abord, le patient était déshydraté, ce qui est confirmé par une urémie élevée. En effet, une concentration plasmatique d’urée élevée peut causer des démangeaisons cutanées. Toutes les causes médicales ne pouvaient donc être éliminées lors de la détermination de l’imputabilité de la quinine dans la réaction. Ensuite, l’augmentation de la créatinémie était suffisamment importante pour que l’on puisse conclure à une insuffisance rénale aiguë. Plusieurs médicaments que prenaient M.C. étaient éliminés en quantité plus ou moins importante au niveau rénal. Par conséquent, il est possible qu’il y ait eu augmentation des concentrations sériques de certains médicaments, dont la quinine, ce qui pourrait avoir contribué à la réaction. En effet, bien que le CYP3A4, isoenzyme du cytochrome www.professionsante.ca P450 (CYP), soit majoritairement responsable du métabolisme de la quinine, l’excrétion de cette molécule se fait par la suite au niveau rénal, dont 20 % sous forme inchangée. Malheureusement, plusieurs critères de l’algorithme de Naranjo n’ont pas été évalués cliniquement, tels qu’une réexposition à la quinine ou l’analyse des concentrations sanguines de quinine, ce qui est en partie responsable du faible degré de probabilité obtenu entre la quinine et l’éruption cutanée. Enfin, il est à noter que l’algorithme ne tient pas compte de la chronologie des évènements. Or, d’un point de vue purement chronologique, la quinine a été le seul médicament à être récemment introduit dans la médication de M.C. (moins de deux semaines avant le début de la réaction cutanée). C’est pourquoi cette dernière a rapidement été incriminée. Traitement Que l’on soit en présence d’un syndrome DRESS ou d’une réaction cutanée moins grave à un médicament, l’étape initiale et la plus importante du traitement consiste à retirer l’agent causal le plus rapidement possible. Par la suite, des traitements symptomatiques peuvent être instaurés afin de soulager le patient ou de tenter de limiter les dommages aux organes3,8,9. Le traitement symptomatique comprend l’ajout d’antihistaminiques oraux et de corticostéroïdes topiques, ce qui permet de diminuer le prurit ainsi que l’ampleur de l’éruption cutanée3,8,9. Dans le cas de M.C., l’équipe traitante a bien réagi en cessant toute médication lui semblant suspecte ou qui aurait pu causer des dommages supplémentaires aux reins du patient, puis un traitement symptomatique a été instauré. Étant donné la gravité des symptômes de M.C., la diphénhydramine aurait pu être entamée d’emblée à 50 mg, ce qui aurait peut-être permis de soulager plus rapidement le prurit. Dans le même ordre d’idées, une crème de cortisone aurait pu être appliquée plus tôt afin de favoriser un soulagement local du prurit plus rapide. La prise en charge thérapeutique du syndrome DRESS ne diffère pas de celle d’une réaction cutanée moins grave (retrait de l’agent causal, instauration de traitements symptomatiques). Cependant, d’autres agents peuvent s’ajouter afin de préserver les organes atteints. Tableau III Autres médicaments associés à des syndromes DRESS3,5,8,9 Classe thérapeutiqueAgent AntiépileptiquesCarbamazépine* Oxcarbamazépine Phénytoïne* Phénobarbital* Lamotrigine AntirétrovirauxNévirapine Abacavir AntibiotiquesSulfamides* Minocycline Métronidazole Dapsone Anti-hyperuricémiqueAllopurinol (inhibiteur de la xanthine oxydase) Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)Célécoxib Inhibiteurs du recaptage de la sérotonine (ISRS)Fluoxétine Inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA)Captopril Antiarythmiques Mexilétine * Médicaments les plus fréquemment impliqués. juin 2011 vol. 58 n° 3 Québec Pharmacie 51 Pharmacovigilance La prise en charge thérapeutique du syndrome DRESS ne diffère pas de celle d’une réaction cutanée moins grave (retrait de l’agent causal, instauration de traitements symptomatiques). Cependant, d’autres agents peuvent s’ajouter afin de préserver les organes atteints. Bien que la prednisone à la dose de 1 mg/kg/jour se soit avérée utile, particulièrement lorsqu’il y a une atteinte systémique importante, son utilisation demeure controversée8,9. La prednisone agirait en inhibant l’accumulation des éosinophiles et de l’interleukine-5 (IL-5)8. L’IL-5 est un médiateur important de l’activation des éosinophiles et un régulateur majeur de leur accumulation dans les tissus. D’autres médicaments ont également été tentés lorsque des anticonvulsivants étaient responsables de syndromes DRESS. Les immunoglobulines par voie intraveineuse à raison de 1 mg/kg/jour pour deux jours se sont avérées bénéfiques lors d’un syndrome DRESS associé à la phénytoïne8. La N-acétylcystéine (Mucomyst®) peut également être bénéfique en augmentant l’effet antioxydant du glutathion et en inhibant les cytokines médiatrices des réactions immunes8. Puisque l’utilisation de la quinine est désormais à proscrire chez M.C., les solutions de rechange en matière de traitement pour soulager les crampes nocturnes des jambes sont une bonne hydratation, des compresses chaudes ou froides, des massages ainsi que des étirements réguliers7,10. D’autres médicaments ont été utilisés avec un certain succès, tels que les inhibiteurs des canaux calciques, plus particulièrement le diltiazem, et les complexes de la vitamine B contenant un minimum de 30 mg de vitamine B610. Bien que ces traitements ne semblent pas aussi efficaces que la quinine pour soulager les crampes, l’Académie américaine de neurologie déconseille l’usage régulier de la quinine et recommande plutôt d’essayer le diltiazem ou les complexes de vitamine B7,10. À la suite de l’arrêt du fénofibrate, M.C. n’a pas représenté de crampes nocturnes. Il est donc possible que ces dernières aient été un effet secondaire dû à l’association de l’atorvastatine et du fénofibrate chez un insuffisant rénal. Conclusion 5. Bankar RN, Köhnke A, Palani SB. Drug rash with esonophilia and systemic symptom syndrome due to quinine. J Postgrad Med. 2007; 53 (4): 272-3. 6. Naranjo CA, Busto U, Sellers EM, et coll. A method for estimating the probability of adverse drug reaction. Clin Pharmacol Ther 1981; 30 (2): 239-45. 7. Coppin, R.J., Wicke, D.M. et Little, P.S. Managing nocturnal leg cramps – calf-stretching exercises and cessation of quinine treatment : A factorial randomised controlled trial. Br J Gen Pract 2005; 55(512): 186-191. 8. Seth D, Kamat D, Montejo J. Dress syndrome : A Practical Approach for Primary Care Practionners. Clinical Pediatrics 2008; 47 (9): 947-52. 9. UpToDate. Drug Eruptions. Andrew D. Samuel, MD. [Sujet révisé le 7 octobre 2010. Page consultée le 12 janvier 2011.] www.uptodate.com 10. Medscape Pharmacist – Ask the expert. How Can Leg Cramps Be Treated? Jodi H. Walker, Pharm. D. [Publié le 14 juin 2010. Consulté le 24 juin 2010.] www.medscape.com Nous avons présenté un cas d’éruption cutanée accompagnée de prurit, associé à la quinine. Chez notre patient, de nombreux facteurs ont pu avoir un impact sur l’imputabilité de la réaction indésirable. Puisque la quinine demeure le médicament le plus susceptible d’avoir causé l’éruption cutanée, sa réintroduction est totalement déconseillée, à moins que cela ne soit fait sous surveillance médicale très étroite. La quinidine étant un isomère de la quinine, lorsqu’une réaction allergique à la quinine est soupçonnée, il est préférable de l’éviter puisqu’il existe un risque de réaction croisée. Les antihistaminiques et les corticostéroïdes topiques demeurent les agents de choix pour le traitement d’éruptions cutanées accompagnées de prurit d’origine médicamenteuse. Si le patient avait souffert d’un syndrome DRESS, la conduite à suivre aurait été la même. L’ajout de prednisone par voie orale à raison de 1 mg/kg/jour peut être envisagée, bien que cette dernière soit controversée. n Références 1. Beyens MN, Guy C, Ollagnier M. Effets indésirables de la quinine dans l’indication de crampes musculaires. Thérapie 1999; 54(1): 59-62. 2. Hoigné R, Jaeger MD, Wymann R, et coll. Time pattern of allergic reactions to drugs. Agents Actions Suppl. 1990; 29: 39-58. 3. Gréco M, Dupré-Gotghebeur D, Leroy JP, et coll. Syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse à l’Hexaquine® (quinine et thiamine). Ann Dermatol Venereol. 2006; 133(4): 354-8. 4. Khan N, Burchett S, Adelman HM. A woman with leg cramps and rash. Hosp Pract (Minneap) 2000; 35 (6): 17, 21-2. Questions de formation continue 10) Tous les énoncés suivants sont vrais, sauf un. Lequel ? A. Les réactions d’hypersensibilité associées à la quinine se manifestent rapidement. B. La quinine étant métabolisée majoritairement par le CYP3A4, plusieurs interactions médicamenteuses sérieuses sont possibles. C. Il existe peu de solutions de rechange efficaces à la quinine. D. La quinine est en partie excrétée de façon inchangée au niveau rénal. E. La quinine entraîne plusieurs effets secondaires graves. 11) Parmi les énoncés suivants concernant le syndrome DRESS, lequel est faux ? A. La pierre angulaire du traitement est le retrait de l’agent causal. B. Le syndrome DRESS peut avoir différentes présentations systémiques. C. La prednisone fait toujours partie de l’arsenal thérapeutique utilisé pour traiter un syndrome DRESS. D. Plusieurs médicaments sont associés à des syndromes DRESS. E. Le traitement du syndrome DRESS est seulement symptomatique. Veuillez reporter vos réponses dans le formulaire de la page 74 52 Québec Pharmacie vol. 58 n° 3 juin 2011