La similitude génitale ne change rien à l' « étrangeté » de l'autre. Je ne peux jamais le réduire à ce
que je connais de moi-même, de mes désirs, de mes comportements.
Les personnes homosexuelles insistent sur le fait que leur quête sexuelle ne relève pas seulement,
comme le croient beaucoup de gens, d’une recherche de plaisir érotique. Le plus souvent, les
personnes espèrent trouver un(e) ami(e) avec lequel pourront se vivre tendresse, fidélité, aide
mutuelle, partage de soucis et d’intérêts divers… et plaisir sexuel. Ils essaient ainsi de tenir unis « le
désir et la tendresse », faisant du coup l’expérience qu’aimer, « ce n’est pas évident ».
« Les moins sérieux des psychanalystes ont confondu attachement amoureux et sexuel d’un individu à
une personne de même sexe à un attachement narcissique. Comme si deux personnes de même sexe
étaient la même personne ! Comme si seule la différence sexuelle désignait l’altérité entre les êtres !
Comme si également il existait davantage de différences entre hommes et femmes que de
ressemblances. L’altérité existe entre deux jumeaux, elle existe a fortiori entre deux hommes ou deux
femmes issus de familles différentes. L’altérité est un des déterminants du désir sexuel. Pour nous
désirer mutuellement, il nous faut beaucoup de pareil (ce qui nous est commun comme humains) et
un peu de pas pareil, ce que confirme la neurobiologie. Ce “pas pareil” peut être la différence des
sexes, mais pas toujours et pas seulement. Chez les humains, l’altérité source de désir sexuel peut se
trouver dans la différence physique, la différence culturelle et sociale ou la différence de
personnalité
. »
Finalement, dire que le couple homosexuel nie l’altérité revient à ramener le « même » au sexuel et
le sexuel au sexe. Pourtant, ce n’est pas parce que deux êtres sont similaires d’un point de vue
biologique qu’ils sont le « même » : deux hommes, deux femmes ont des personnalités différentes et
uniques qui en font des êtres singuliers. Les recherches en neurobiologie confirment que les
différences entre les individus d’un même sexe sont tellement importantes qu’elles dépassent les
différences entre les deux sexes. Cette variabilité s’explique par la plasticité du cerveau. A la
naissance seulement 10% de nos 100 milliards de neurones sont connectés entre eux. Les 90% de
connexions restantes vont se construire progressivement au gré des influences de la famille, de
l’éducation, de la culture, de la société, note Catherine Vidal, neurobiologiste.
C’est dans la capacité d’aimer que s’éprouve, pour les homosexuels comme pour les hétérosexuels,
l’acceptation ou le refus de l’altérité, non dans la valeur différentielle et impersonnelle d’un objet de
pulsion. La relation homosexuelle, par-delà la similitude des sexes, peut ouvrir à la différence et à
l’altérité en ce qu’elle est rencontre entre deux personnes, chacune étant unique.
Les couples homosexuels ont un désir de vivre ensemble durable et heureux. Tout ce qui contribue à
des engagements plus durables doit être applaudi. Une personne homosexuelle qui vit avec un
partenaire pourra être source de fécondité sociale pour son entourage.
Fécondités
Dans le langage courant, nous avons restreint le sens de la notion de « fécondité » à « donner la vie »
ou « procréer ». C’est alors réduire l’être humain à son niveau animal. Anthropologiquement, la
fécondité recouvre une signification plus large : la capacité de donner une vie humaine. Nous ne
faisons pas que nous reproduire, nous nous produisons mutuellement, nous produisons du nouveau.
Il s’agit de mettre au monde une personne jusqu’a` ce que cette personne naisse a elle-même. Et
cela dépasse infiniment la seule procréation biologique.
Donner la vie humaine, c’est ce que la théologienne Marie-Christine Bernard, spécialisée en
épistémologie des sciences humaines, appelle la « parentalité spirituelle ». C’est la responsabilité qui
nous incombe à tous d’engendrer quelqu’un à lui-même, d’engendrer quelqu’un à sa propre
vocation, de lui permettre d’entrer dans sa propre vie : « Mettre au monde, au sens large que nous
Stéphane Clerget, Comment devient-on homo ou hétéro ?, Paris, Jean-Claude Lattès, 2006., p.269.
Les neurones du genre, http://www.liberation.fr/sciences/01012358301-les-neurones-du-genre consulté le
12 mars 2012
*Claude Besson, Homosexuels catholiques sortir de l’impasse, Éditions de l’Atelier, novembre 2012, p. 44 et
ss