La somatostatine dans le cancer du sein

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Synthèse
Ann Biol Clin 2011 ; 69 (4) : 385-91
La somatostatine dans le cancer du sein
Somatostatin in breast cancer
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
Albane Frati1
Martine Antoine2
Anita Rodenas2
Joseph Gligorov3
Roman Rouzier1
Elisabeth Chéreau1
1 Service de gynécologie obstétrique,
<[email protected]>
2
Service d’anatomopathologie,
3
Service d’oncologie médicale,
Hôpital Tenon, APHP, Paris
Résumé. La somatostatine est une hormone produite, chez l’homme, principalement au niveau de l’hypothalamus. Elle joue de nombreux rôles de régulation
hormonale par le biais de récepteurs spécifiques dans l’organisme. Elle possède
également deux actions intéressantes, à savoir une activité anti-sécrétoire, principalement sur le système gastro-intestinal, et une action anti-prolifératrice sur
les cellules tumorales. De nombreux analogues synthétiques, plus stables que la
somatostatine naturelle, ont donc été développés et ceux-ci sont déjà utilisés en
pratique courante dans la chirurgie digestive notamment pour la prise en charge
de fistule digestive post opératoire. Par ailleurs, le développement d’anticorps
polyclonaux spécifiques a permis d’identifier cinq sous-types de récepteurs de
la somatostatine et d’étudier leur distribution dans différents types cellulaires.
La présence des différents sous-types de récepteurs de la somatostatine dans
les cellules tumorales du sein a ainsi été démontrée. Le but de cette revue est
de rapporter le rôle potentiel anti-tumoral des analogues de la somatostatine
dans la prise en charge des cancers du sein, son utilisation possible préventive
dans la survenue de lymphocèles post opératoires et son usage en imagerie pour
permettre une détection plus précoce des lésions du sein.
Mots clés : somatostatine, cancer du sein, lymphocèle, TEP-TDM
Abstract. In man, somatostatin is a hormone mostly produced by hypothalamus. It plays different parts in hormonal regulation through many specific
receptors in human body. It has also two interesting actions such as an antisecretory activity, mostly on the gastrointestinal system and an antiproliferative
action on tumor cells. Many synthetic somatostatin analogues, more stable than
the natural one, have been developed and are already used in digestive surgery to
treat postoperative digestive fistula. Also, the development of specific polyclonal antibodies allowed the identification of five specific somatostatin receptors
and their localization in different cell species. The presence of the five receptors
in breast cancer cells has than been demonstrated. The purpose of this literature
review is to clarify the potential antitumor effect of somatastatin analogues in
breast cancer; its use as a preventive agent on lymphorrhea after breast surgery
and its employment in imaging for early breast cancer detection.
Article reçu le 16 novembre 2010,
accepté le 3 janvier 2011
Key words: somatostatin, breast cancer, lymphorrhea, TEP-TDM
doi:10.1684/abc.2011.0588
Généralités
La somatostatine est une hormone produite par les cellules de l’hypothalamus mais aussi par les cellules delta de
l’estomac, de l’intestin et du pancréas ; par les neurones
et également par certaines cellules tumorales. Sécrétée
Tirés à part : E. Chéreau
initialement sous la forme d’une longue molécule précurseur, elle subit une dégradation enzymatique tissus
spécifique générant ainsi deux types de somatostatine : la
somatostatine 14 (composée de 14 acides aminés) et la
somatostatine 28 (28 acides aminés) (figure 1). Les deux
peptides sont produits dans des proportions différentes en
fonction des tissus et régulent par le biais de cinq types
de récepteurs la sécrétion hormonale à différents niveaux
de l’organisme. Elle inhibe ainsi la libération de l’hormone
Pour citer cet article : Frati A, Antoine M, Rodenas A, Gligorov J, Rouzier R, Chéreau E. La somatostatine dans le cancer du sein. Ann Biol Clin 2011 ; 69(4) : 385-91
doi:10.1684/abc.2011.0588
385
Synthèse
Ala
Gly
Cys
Lys
Asn
Phe
Phe
Trp
S
S
Cys
Lys
Ser
Thr
Phe
Thr
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Somatostatine 14
Pro
Ala
Met
Ala
Pro
Asn
Ser
Asn
Ala
Ser
Glu
Arg
Lys
Ala
Gly
Cys
Lys
Asn
Phe
Phe
Arg
Trp
S
Lys
S
Cys
Ser
Thr
Phe
Thr
Somatostatine 28
Figure 1. Structures de la somatostatine 14 et de la somatostatine 28.
de croissance (GH), de la TSH et supprime la sécrétion
des hormones gastro-intestinales (gastrine, cholécystokinine, sécrétine, motiline, vasoactive intestinal peptide. . .).
Elle permet également le prolongement de la vidange gastrique et de la contraction de la vésicule biliaire et le largage
des hormones pancréatiques [1]. Elle subit ensuite une
dégradation enzymatique rapide qui inactive ses effets. La
demi-vie des somatostatines naturelles est ainsi inférieure à
3 minutes. Par ailleurs, la somatostatine possède une action
inhibitrice de la prolifération cellulaire, aussi bien au niveau
des cellules normales que tumorales [2]. De nombreux analogues synthétiques de la somatostatine ont été développés
(figure 2). Ils possèdent des activités biologiques similaires
avec une demi-vie plus longue et une affinité différente avec
les récepteurs de la somatostatine. Certains sont utilisés en
pratique clinique comme l’octréotide (Sandostatine® ), le
lanréotide (Somatuline® ), le pasiréotide (SOM 230® ) et le
vapréotide (RC-160, Octastatin® ). Ces analogues ne possèdent pas les principaux sites de clivage de la somatostatine
naturelle et sont donc plus stables.
386
Les récepteurs de la somatostatine
Il existe cinq différents types de récepteurs de la somatostatine (SSTR), nommés de SSTR1 à SSTR5. Ce sont
des récepteurs transmembranaires couplés aux protéines
G dont les gènes spécifiques sont situés sur des chromosomes différents, laissant suggérer une fonction spécifique
à chacun [3]. Le développement d’anticorps polyclonaux
spécifiques de chaque sous-type de SSTR a permis, par
des techniques d’immunohistochimie (IHC), de préciser la
localisation spécifique de chaque SSTR et d’évaluer leur
proportion dans les tissus sains et pathologiques [4-6]. De
plus, il existe une corrélation entre les taux d’ARNm spécifiques de chaque SSTR et la quantification par IHC, ce
qui autorise son utilisation pour la recherche des SSTR en
pratique clinique [7]. Leur expression est donc variable en
fonction du type cellulaire, de la nature tumorale ou non
des cellules et des paramètres biologiques cellulaires. De
plus, ils possèdent des affinités variables en fonction du
type de ligand que ce soit la somatostatine naturelle ou ses
Ann Biol Clin, vol. 69, n◦ 4, juillet-août 2011
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Somatostatine et cancer du sein
analogues synthétiques [8]. Dans les tissus sains, les SSTR
sont retrouvés essentiellement au niveau du cerveau, du
pancréas, de l’estomac et des reins. Leur distribution dans
les tissus tumoraux est variable en fonction du type tumoral et des caractéristiques biologiques des tumeurs [1, 3]
(tableau 1). Dans les cancers du sein, il existe une expression des cinq sous-types de SSTR avec une prédominance
du sous-type SSTR 2 : 91 % (SSTR1), 98 % (SSTR2), 96 %
(SSTR3), 76 % (SSTR4), et 54 % (SSTR5) [9]. De plus, il
a été démontré que plus de 50 % des tumeurs du sein exprimaient des SSTR et qu’ils étaient plus souvent présents en
cas de tumeurs avec des récepteurs hormonaux positifs et en
cas de tumeurs bien différenciées [10]. Par ailleurs, il a été
montré une forte corrélation entre l’expression des récepteurs hormonaux (œstrogène et progestérone) et le niveau
d’expression des SSTR 1,2 et 4 [9, 11] et entre le grade
tumoral et l’expression de SSTR 2 [12].
D-Phe
H
Cys
Phe
S
D-Trp
Octréotide
S
Lys
Ac
H
Thr
Cys
Thr
D-bnal
Cys
Tyr
S
D-Trp
Lanréotide
S
Lys
H2N
Cys
Val
D-Phe
Cys
Tyr
Effets biologiques
Deux principaux effets biologiques de la somatostatine sont
décrits dans la littérature, il s’agit d’un effet anti-tumoral
d’une part, et d’un effet anti-sécrétoire d’autre part.
H
S
D-Trp
S
Vapréotide
Lys
Effet anti-tumoral
H2N
Les analogues de la somatostatine sont connus depuis plusieurs années pour leur action anti-prolifératrice sur des
cellules normales, ainsi que sur des cellules tumorales in
vitro en régulant les différents signaux de transduction [2].
Leur rôle sur la régulation de la sécrétion hormonale est bien
connu dans la prise en charge des tumeurs endocrines et les
résultats des analogues de la somatostatine sur les patients
traités pour acromégalie ont permis de mettre en évidence
une action anti-tumorale de ces molécules en diminuant
les concentrations circulantes de GH et d’IGF-1 [13]. Les
expériences menées par la suite in vivo et in vitro sur des
cellules tumorales de la prostate [14], ainsi que sur d’autres
types tumoraux et notamment dans le cancer du sein [15],
ont permis de mettre en évidence deux mécanismes antiprolifératifs (tableau 2) :
– un effet antiprolifératif direct via les récepteurs de la
somatostatine (SST) : la liaison des analogues de la soma-
Trp
Cys
Val
Figure 2. Structures des analogues synthétiques à la somatostatine.
tostatine à leur récepteur entraîne une inhibition du cycle
cellulaire, une inhibition de la sensibilité aux facteurs de
croissance et a un effet pro-apoptotique ;
– un effet antiprolifératif indirect (indépendant des récepteurs) par une inhibition du relargage des facteurs de
croissance, une inhibition de l’angiogenèse et une modulation du système immunitaire.
Effet anti-sécrétoire
Les analogues de la somatostatine sont également connus
pour leur action inhibitrice sur la sécrétion hormonale
endocrine et exocrine et sont largement utilisés dans ces
Tableau 1. Distribution des SSTR dans les tissus normaux et tumoraux.
SSTR 1
SSTR 2
SSTR 3
SSTR 4
SSTR 5
Distribution dans les tissus sains
Cerveau, pancréas, estomac, foie, reins
Cerveau, pancréas, muscle, estomac, reins
Cerveau, pancréas, estomac
Cerveau, pancréas, poumon, placenta
Pancréas, estomac
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Distribution dans les tissus tumoraux
Prostate, ovaire, poumon, thymomes, sein
Rein, ovaire, poumon, thymomes, sein
Pancréas, ovaire, sein
Sein
Prostate, ovaire, rein, pancréas, côlon, sein
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Tableau 2. Effets anti-tumoraux des différents types de SSTR.
SSTR 1
Effet antiprolifératif par la voie MAPK
Inhibition de la croissance par modulation de la production de NO
SSTR 2
Induction apoptose par sur expression de TRAIL
Effet antiprolifératif par la voie MAPK
Sur expression des connexines responsables de la formation de gap junctions fonctionnelles
SSTR 3
Inhibition VEGF
Sur expression p53 induisant l’apoptose
Inhibition de la croissance par modulation de la production de NO
SSTR 4
Modification du pH cellulaire via Na-H et inhibition de la prolifération
SSTR 5
Inhibition de la croissance par inhibition de ERK
indications [1]. En effet, la somatostatine distribuée dans le
système nerveux et gastropancréatique permet d’inhiber la
sécrétion endocrine et exocrine gastro-intestinale et possède également une action anti-inflammatoire [16]. Les
analogues de la somatostatine sont donc utilisés en pratique
courante dans la prise en charge post opératoire des fistules
d’origines digestives ou pancréatiques. De plus, plusieurs
séries rapportent l’utilisation des analogues de la somatostatine dans le traitement de l’ascite chyleuse ou dans la prise
en charge des plaies du canal thoracique [17]. Même si son
mécanisme d’action n’est pas bien étudié, il semble qu’ils
agissent en inhibant le flux sanguin splanchnique et en limitant l’absorption des triglycérides. De plus, des SSTR ont
été mis en évidence dans les tissus lymphatiques, y compris
en dehors du tractus intestinal. Il est donc probable que
l’action inhibitrice de la somatostatine sur le flux lymphatique gastro-intestinal puisse s’étendre en dehors du tractus
intestinal et notamment sur le système lymphatique.
La somatostatine
dans le cancer du sein
Comme nous l’avons vu précédemment, les cinq sous-types
de SSTR sont retrouvés dans les cellules tumorales du sein.
Il apparaît donc intéressant de se pencher sur l’effet potentiel de la somatostatine sur ces tumeurs.
Quelques rares articles ont cherché à mettre en évidence
l’effet d’analogues de la somatostatine sur les lymphocèles
post opératoires. Dans une étude randomisée prospective
incluant 261 patientes ayant bénéficié d’un curage axillaire
pour un cancer du sein, Carcoforo et al. ont mis en évidence
une différence significative entre deux groupes recevant
ou non en post opératoire immédiat 0,1 mg d’octréotide
en sous-cutané trois fois par jour pendant 5 jours. Les
patientes ont été suivies pendant 7 ans. Dans le groupe traité
(n = 125), il a été noté une diminution du débit moyen des
drains (65,4 vs 94,6 mL, p = 0,0001) et une ablation plus
précoce des drains en post opératoire (7,1 vs 16,7 jours,
p = 0,0001). Il n’a pas été retrouvé de différence significative en termes de complications post opératoires [18].
De même, Mahmoud et al. ont réalisé un essai randomisé
incluant 50 patientes ayant bénéficié d’une mastectomie
associée à un curage axillaire pour un cancer du sein tout
stade confondu. Trente patientes ont bénéficié d’une injection quotidienne de 0,1 mg de somatostatine sous-cutanée
pendant les 7 jours post opératoires et vingt patientes n’ont
reçu aucun traitement. Ils ont montré les mêmes effets bénéfiques de l’octréotide sur le débit moyen journalier des
drains (104 vs 145 mL, p = 0,0001), sur la durée totale
de drainage (12,7 vs 25 jours, p = 0,0001), ainsi que sur
la nécessité de ponction des lymphocèles post opératoires
(90 vs 40 %, p = 0,0001) [19].
Activité anti-tumorale
Activité anti-sécrétoire :
prévention des lymphocèles
La lymphocèle est une complication post opératoire fréquente dont la morbidité n’est pas négligeable conduisant
à un retard de prise en charge, notamment dans la mise
en place des traitements adjuvants. Hormis les ponctions
itératives, il n’existe pas à l’heure actuelle de traitement
efficace des lymphocèles post opératoires. De nombreux
articles dans la littérature détaillent les effets bénéfiques de
l’octréotide sur les fistules digestives et pancréatiques et
sur la régression des ascites chyleuses et des chylothorax.
388
L’utilisation des analogues de la somatostatine dans la prise
en charge des cancers du sein reste très controversée et les
résultats disponibles à ce jour dans la littérature sont discordants (tableau 3). In vitro, plusieurs études ont démontré
l’action anti-prolifératrice des analogues de la somatostatine sur des lignées cellulaires de cancers du sein [20-22].
En situation métastatique dans le cancer du sein, une étude
randomisée comparant l’administration de tamoxifène
associé à l’octréotide versus tamoxifène associé à un
placebo en première ligne de traitement de patientes métastatiques ou en rechute non accessible à un traitement local
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Ann Biol Clin, vol. 69, n◦ 4, juillet-août 2011
667
Adjuvant
Métastatique
-
Métastatique
-
Métastatique
Situation
clinique
Tam vs Tam-Oct (3)
Tam-Plac vs
Tam-OP/LAR (2)
Oct-Bromo
Som-Tam
Som
Oct
Oct-Tam-CV
Oct
Som-Tam
Oct-Bromo
Oct
Som-Tam
Oct
Oct-CV
Oct
Som-Bromo
Tam vs
Tam-Nor-Oct (1)
Traitement
Tam
78/333
Survie sans récidive
Tam-Plac
20/99 (20,2 %)
+
+
Tam
4/11 (36%)
Positive n = 87 (41,4 %)
+
+
-
Réponse au traitement
Tam-Oct
70/334
TamOP/LAR21/100
(21 %)
Tam-Nor-Oct
5/9 (55 %)
pendant 2 ans. (3) : Tamoxifène 20 mg/j pendant ans avec ou sans octréotide 90 mg IM 1 injection par mois pendant 2 ans.
205-502, Bromo : bromocriptine. (2) : Tamoxifène 20 mg/j + placebo versus tamoxifène 20 mg/j + + octréotide longue durée (OP/LAR) 160 mg IM toutes les 2 semaines pendant 2 mois puis tous les mois
(1) : Tamoxifène 40 mg par jour versus tamoxifène 40 mg + norprolac 75 ␮g + octréotide 200 mg par jours pendant 6 semaines minimum. Oct : octréotide, Som : somatuline, Tam : tamoxifène, CV : CV
2010
Pollak et al. [26]
6
32
10
9
9
1993
1995
1995
1996
1998
199
210
14
30
9
10
30
11
7
20
13
2001
1989
1989
1989
1990
1992
1992
1992
1993
1993
2002
20
Nombre
de
patientes
1998
Bajetta et al. [23]
Bontenbal et al.
[24]
Dolan et al. [25]
Venin et al. [28]
Morere et al. [29]
Manni et al. [30]
Stolfi et al. [31]
Cannata et al. [32]
Pollak et al. [33]
Pollak et al. [33]
Somlo et al. [34]
Bonneterre et al.
[35]
Anderson et al. [36]
Canobbio et al. [37]
Di Leo et al. [38]
Ingle et al. [39]
Bontenbal et al.
[24]
Année
Tableau 3. Utilisation des analogues de la somatostatine dans le cancer du sein.
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Synthèse
n’a pas mis en évidence de différence entre les deux groupes
en termes de survie sans progression [23]. Une autre étude
incluant 22 patientes avec un cancer du sein métastatique a
mis en évidence une amélioration de la survie sans progression par l’adjonction d’analogues de la somatostatine et
d’une molécule anti-prolactine au tamoxifène (84 semaines
vs 33 semaines) [24]. Une revue de la littérature reprenant
210 patientes inclues dans 40 études (publiées ou non),
traitées pour un cancer du sein métastatique avec des
analogues de la somatostatine, a mis en évidence une amélioration de la survie sans progression surtout en première
ligne métastatique (69,5 % versus 28,5 %, p = 0,006) et
chez les patientes ayant moins de deux métastases [25]. En
situation adjuvante, une communication présentée à l’Asco
en 2010 sur 667 patientes utilisant l’association tamoxifène
- octérotide vs tamoxifène seul n’a pas mis en évidence de
différence entre les deux groupes en termes de survie globale ou de survie sans récidive [26]. Ces données peuvent
s’expliquer par l’absence de sélection des patientes éligibles
à un traitement par ces molécules. En effet, l’expression
des récepteurs de la somatostatine étant variable d’une
patiente à l’autre, il est probable qu’une administration
selon l’expression ou non des SSTR serait plus pertinente.
D’autre part, il a été montré que l’expression des SSTR
diminue lorsque les tumeurs sont plus avancées et moins
bien différenciées, donc plus volontiers dans les tumeurs
métastatiques correspondant à la majorité des essais publiés
[27].
Le TEP/TDM au Dotatoc-(68 Ga) :
localisation et suivi des tumeurs
Le 68 Ga est un émetteur de positons obtenu à partir d’un
générateur 68 Ge/68 Ga qui peut servir à marquer des peptides d’intérêt clinique. Le Dotatoc-(68 Ga) est un traceur de
forte affinité pour les récepteurs de type 2 de la somatostatine utilisé pour l’imagerie des tumeurs qui les expriment.
Le TEP/TDM au Dotatoc-(68 Ga) associe la spécificité
de la détection scintigraphique des SSTR à la précision
anatomique et spatiale du TEP/TDM [40]. Son utilisation
pour les tumeurs neuroendocrines semble être supérieure en
termes de détection des lésions et permet ainsi de localiser
des tumeurs neuroendocrines du sein non palpables [41].
Il semble également intéressant pour la détection d’autre
tumeur exprimant des SSTR, notamment les cancers du
sein. En effet, la relecture de cliché de 33 patientes ayant
bénéficié d’un Dotatoc-TEP/TDM pour des tumeurs neuroendocrines a permis de détecter chez deux de ces patientes
une tumeur primitive du sein entraînant une modification
de la prise en charge [42]. Couplé à l’IRM, il semble également augmenter, chez la souris, la détection de tumeur du
sein à un stade précoce [43].
390
Conclusion
La somatostatine semble donc trouver une place potentielle
dans l’arsenal diagnostique et thérapeutique des cancers
du sein. Son utilisation en imagerie pourrait aider au diagnostic plus précoce de lésions infracliniques et permettre
une évaluation de notre efficacité thérapeutique. Les résultats de son utilisation comme traitement anti-tumoral ou
en prévention des lymphocèles post opératoires semblent
encourageants bien que discordants. L’utilisation en pratique courante des analogues de la somatostatine n’est pas,
à l’heure actuelle, recommandée mais il semble que l’avenir
réside en une sélection des patientes ayant un bénéfice clinique à l’utilisation de ces analogues pour une thérapie
ciblée.
Conflits d’intérêts : aucun.
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