HEC MONTRÉAL L’ IMPACT DE LA PUBLICITÉ DE JEU DE H ASARD ET D ’ARGENT SUR DES COMPORTEMENTS À RISQUES: LE RÔLE DES BIAIS COGNITIFS ET ÉMOTIONNELS PAR JEAN -B APTISTE DELABRE SCIENCES DE LA GESTION (M ARKETING) MÉMOIRE PRÉSENTÉ EN VUE DE L ’OBTENTION DU GRADE DE MAÎTRISE ÈS SCIENCES (M.S C.) A OÛT 2011 © JEAN-BAPTISTE DELABRE, 2011 AVIS DU CER ii REMERCIEMENTS La rédaction de cet ouvrage n’aurait jamais eu lieu sans l’aide inconditionnelle du professeur Jean-Charles Chebat. Mon directeur de mémoire m’a en effet accordé une confiance absolue tout au long de ce projet. Ses conseils avisés, son expertise ainsi que sa disponibilité m’auront permis de venir à bout de ce travail de longue haleine. Cela n’aurait jamais été possible non plus sans le soutien financier de la Chaire ECSC, au sein de laquelle j’ai eu le privilège de travailler, d’étudier, et d’apprendre pendant un an. Je tiens donc non seulement à remercier, mais aussi à rendre hommage à l'un des professeurs qui aura réellement marqué ma scolarité et suscité mon intérêt pour le marketing. J’aimerais également remercier l’INSPQ et le FQRSC pour leur subvention de recherche. Ce projet d’étude des publicités de Loto-Québec m’a permis de travailler sur des problématiques sociales et sociétales qui ne m’étaient alors pas encore familières. Je tiens aussi à exprimer ma gratitude à Mesdames Narjes Haj Salem et Linda Lemarié, étudiantes de doctorat à la chaire ECSC. Elles m’ont toujours ouvert leurs portes pour me donner des informations, des conseils et des recommandations, sans lesquels ce mémoire n’aurait jamais abouti. Un grand merci à mes amis, sans lesquels je n’aurais pu profiter de ces merveilleuses années d’étudiant, et je n’aurais peut-être jamais envisagé la réalisation d’une maîtrise, ni la rédaction d’un mémoire de recherche. Je profite de l’occasion qui m’est donnée de conclure sur ces six ans d’études pour remercier du fond du cœur mes parents et ma famille pour tout ce qu’ils ont fait pour moi. Une pensée toute particulière à mon grand-père qui a été et restera, pour moi, un modèle. Enfin, et certainement non la moindre, mes pensées vont à ma compagne qui m’a toujours encouragé dans la réalisation de ce mémoire, apporté son soutien et son amour jour après jour, et permis de devenir ce que je suis aujourd’hui. Je lui dois beaucoup. Vraiment, merci. iii SOMMAIRE Le marketing des jeux de hasard et d’argent est un sujet épineux dans la mesure où d’un côté, il s’agit d’une activité très lucrative, financée et gérée par l’État, alors que d’un autre côté, c’est la société qui supporte le coût des traitements liés au possible développement d’une pathologie chez les joueurs. En particulier, la publicité de JHA, pourtant très populaire, a le potentiel de biaiser les joueurs sur leurs réelles chances et compétences au jeu et peut les pousser à jouer. Or, la communauté scientifique s’accorde à dire que biais et pathologie du jeu sont liés, sans pour autant avoir démontré la dangerosité de la publicité. L’objectif principal de ce mémoire est de mesurer l’impact de la publicité des jeux de hasard et d’argent sur les intentions comportementales des joueurs. Il s’agit plus spécifiquement de comprendre dans quelle mesure ces publicités peuvent affecter les attitudes et les intentions des joueurs, et de cerner la responsabilité de la marque Loto-Québec dans ces relations. Le rôle central des biais cognitifs et émotionnels est également étudié. D’une part les biais cognitifs regroupent les perceptions erronées des joueurs vis-à-vis de leurs propres compétences et connaissances du jeu, ainsi que des fausses croyances vis-à-vis du jeu en général. D’autre part, les biais émotionnels se définissent comme une évaluation rétrospective plus positive de leur expérience de jeu. L’objectif secondaire de cette recherche est de développer une typologie des publicités de jeux de hasard et d’argent. En effet, nous serons alors en mesure d’évaluer les différents impacts selon le type de publicité utilisé. Ce travail présente donc dans un premier temps les résultats d’une analyse de contenu de 147 publicités de Loto-Québec diffusées entre 2005 et 2010. Une analyse de regroupement nous a permis par la suite de distinguer cinq types de publicités, qui font appel à des thématiques de persuasion différentes. Nous retenons les types « argumentation », plus à même de biaiser cognitivement les joueurs, et « évasion », qui a priori touchent davantage les biais émotionnels. D’après leurs caractéristiques, ces publicités sont donc les plus risquées. iv Afin de tester empiriquement nos hypothèses de recherche, nous avons procédé à une expérimentation auprès de 102 joueurs québécois, âgés de plus de 18 ans. La manipulation a été effectuée en utilisant les publicités les plus représentatives des groupes « argumentation » et « évasion », qui ont été insérées à des coupures publicitaires lors d’une émission télévisée de 8 minutes environ. Les données ont été recueillies à l’aide d’un questionnaire autoadministré en ligne composé de 22 questions. La majorité des questions portait sur nos variables inhérentes à l’étude : l’implication envers les JHA, les biais cognitifs et émotionnels, l’attitude envers Loto-Québec, l’attitude envers les JHA et les intentions de jouer, le niveau de jeu problématique (PGSI), ainsi que les caractéristiques sociodémographiques des joueurs. Les principaux résultats de cette recherche sont les suivants : Il existe cinq groupes de publicités de JHA distincts les uns des autres. Chaque groupe fait appel à une thématique différente et cible certains joueurs en particulier. Les types « argumentation » et « évasion » sont à priori les plus dangereux. Le premier cible spécifiquement les jeunes et les experts, et prône des croyances erronées à propos du jeu. Le deuxième, qui regroupe le plus de publicités, suscite les émotions des joueurs, et donne une image plus positive de l’expérience de jeu. L’implication envers les JHA est un modérateur du pouvoir de persuasion de la publicité. En effet, sous faible implication, un joueur est biaisé émotionnellement par la publicité « évasion ». Sous forte implication, c’est la publicité « argumentation » qui provoque des biais de perception de soi. L’implication a également un impact positif sur les biais externes, l’attitude envers les JHA et l’intention de jouer. Autrement dit, un joueur fortement impliqué possède plus de biais externes, développe une attitude plus favorable envers le jeu et a plus l’intention de jouer. La publicité « argumentation » a un pouvoir de persuasion plus fort que la publicité « évasion » lorsque le joueur est impliqué envers les JHA. En effet, l’attitude envers Loto-Québec est d’autant plus favorable. Ce n’est v pas le cas pour l’attitude envers les JHA et l’intention de jouer puisqu’elles ne varient pas dépendamment du type de publicité. La marque Loto-Québec joue donc un rôle central dans la compréhension des effets publicitaires dans le domaine des JHA. Ce rôle est accentué par le fait que l’attitude envers Loto-Québec incite les joueurs à s’adonner au jeu, à travers une attitude plus favorable envers les JHA. En effet, l’attitude envers les JHA est un médiateur de la relation entre l’attitude envers Loto-Québec et l’intention de jouer. Sous forte implication, les biais de perception de soi sont médiateurs de la relation entre la publicité et l’intention de jouer. Ainsi, lorsqu’un joueur est fortement impliqué, la publicité de JHA incite le joueur à se consacrer au jeu du fait qu’elle le persuade qu’il a plus de chance, de compétences et de connaissances au jeu que les autres, et que son pouvoir de prédiction est plus grand. Les biais émotionnels jouent un rôle modérateur dans la relation entre la publicité et l’attitude envers les JHA. Par conséquent, plus un joueur se crée des souvenirs positifs à propos de son expérience de jeu, plus la publicité de JHA le persuade et provoque chez lui un changement d’attitude envers le jeu. L’implication envers les JHA est corrélée positivement avec la fréquence de jeu et le niveau de jeu problématique. Plus un joueur est impliqué, plus il joue et plus il a de chance de développer une pathologie. Enfin, on distingue le rôle prépondérant des différents biais dans le développement du jeu pathologique. D’abord, les biais émotionnels sont corrélés positivement avec la fréquence de jeu. Ainsi, plus les joueurs sont biaisés émotionnellement, plus ils jouent et inversement. De plus, tous les biais cognitifs sont corrélés positivement avec la fréquence de jeu et le niveau de jeu pathologique. Par conséquent, un joueur va d’autant plus jouer et développer une pathologie liée au jeu qu’il est biaisé cognitivement et inversement. vi En somme, cette étude contribue à l’avancée de la recherche scientifique dans le domaine des jeux de hasard et d’argent. Elle permet une meilleure compréhension du rôle des biais cognitifs et émotionnels sur les attitudes et intentions comportementales des joueurs. Elle propose également de prendre en considération le rôle primordial de la marque dans le domaine de la persuasion publicitaire appliquée aux JHA. Enfin et surtout, elle précise la dangerosité de la publicité, facteur déterminant du développement du jeu pathologique. Les conclusions de cette recherche suscitent des interrogations concernant l’éthique des entreprises de JHA, et suggèrent des éléments de solution pour les gestionnaires et chercheurs, notamment en ce qui concerne la lutte contre le jeu excessif. Mots-clés : jeux de hasard et d’argent, jeu pathologique, Loto-Québec, publicité de JHA, biais cognitifs, biais émotionnels, modèle de persuasion ELM, implication envers les JHA, attitude envers la marque, attitude envers les JHA, intention de jouer, expérimentation. analyse de contenu, analyse de regroupement, vii TABLE DES MATIÈRES REMERCIEMENTS ................................................................ .............................................................................................. .............................................................. II SOMMAIRE ................................................................ ................................................................................................ ........................................................................ ........................................ III TABLE DES MATIÈRES ................................................................ ...................................................................................... ...................................................... VII LISTE DES FIGURES ................................................................ ......................................................................................... ......................................................... XII LISTE DES ABRÉVIATIONS ABRÉVIATIONS ................................................................ ............................................................................... ............................................... XIII INTRODUCTION ................................................................ ................................................................................................ .................................................................. .................................. 1 1 REVUE DE LA LITTÉRATURE LITTÉRATURE ................................................................ ....................................................................... ....................................... 4 1.1 Le jeu pathologique ................................................................ ................................................................................... ................................................... 4 1.1.1 Définition du jeu pathologique........................................................................ 4 1.1.2 Antécédents reconnus du jeu pathologique .................................................. 5 1.1.3 Le jeu pathologique et l’existence de biais chez le joueur............................ 6 1.2 Les biais chez le joueur de JHA ................................................................ .................................................................. .................................. 7 1.2.1 1.2.1.1 Les biais cognitifs .................................................................................... 8 1.2.1.2 L’impact des biais cognitifs .................................................................. 10 1.2.1.3 Limite de la théorie cognitive ............................................................... 11 1.2.2 1.3 Vers une définition du biais émotionnel .............................................. 11 1.2.2.2 Différence entre biais émotionnel et biais cognitif ............................. 12 1.2.2.3 Le facteur émotion ................................................................................ 12 La publicité en comportement du consommateur .................................... .................................... 13 Le modèle ELM .............................................................................................. 13 1.3.1.1 Les routes de persuasion ..................................................................... 13 1.3.1.2 Le rôle modérateur de l’implication ..................................................... 14 1.3.1.3 Limites du modèle ELM ........................................................................ 15 La publicité dans le cas des jeux de hasard et d’argent ........................... 16 1.4.1 Le contexte actuel ......................................................................................... 16 1.4.2 Les différents types de publicités de JHA .................................................... 17 1.4.3 La publicité et les biais .................................................................................. 18 1.4.4 Impact controversé de la publicité de JHA ................................................... 20 1.5 2 Les biais émotionnels.................................................................................... 11 1.2.2.1 1.3.1 1.4 La théorie cognitive ......................................................................................... 7 Attitude envers LotoLoto-Québec, attitude envers le jeu et intention de jouer . 21 CADRE CONCEPTUEL ET HYPOTHÈSES DE RECHERCHE RECHERCHE......................... 23 2.1 Contribution théorique de l’étude............................................................. ............................................................. 23 2.2 Hypothèses et modèle de recherche ........................................................ ........................................................ 24 viii 3 4 MÉTHODOLOGIE ................................................................ ....................................................................................... ....................................................... 29 3.1 Introduction ................................................................ ............................................................................................. ............................................................. 29 3.2 Dimension et validité du plan expérimental.............................................. .............................................. 29 3.3 Manipulation des stimuli ................................................................ .......................................................................... .......................................... 31 3.4 Choix des stimuli publicitaires publicitaires ................................................................ .................................................................. .................................. 32 3.4.1 Introduction .................................................................................................... 32 3.4.2 Analyse de contenu ....................................................................................... 33 3.4.3 Analyse factorielle et analyse de regroupement.......................................... 34 3.4.4 Comparaison des groupes de publicités obtenus ....................................... 39 3.4.5 Choix et vérification des stimuli .................................................................... 42 3.5 Collecte de données et échantillonnage échantillonnage................................................... ................................................... 47 3.6 Questionnaire et échelles ................................................................ ........................................................................ ........................................ 51 3.6.1 Attitude envers les JHA .................................................................................. 51 3.6.2 Intentions de jouer......................................................................................... 52 3.6.3 Attitude envers la marque Loto-Québec ....................................................... 53 3.6.4 Mesure des biais cognitifs ............................................................................ 54 3.6.5 Mesure des biais émotionnels ...................................................................... 56 3.6.6 Plaisir .............................................................................................................. 57 3.6.7 Implication ..................................................................................................... 58 RÉSULTATS ET ANALYSES ANALYSES ................................................................ ........................................................................ ........................................ 59 4.1 Introduction et vérification des stimuli ..................................................... ..................................................... 59 4.2 Analyses factorielles et fidélité des échelles............................................. ............................................. 59 4.2.1 Attitude envers les JHA .................................................................................. 59 4.2.2 Intention de jouer .......................................................................................... 60 4.2.3 Attitude envers Loto-Québec ......................................................................... 61 4.2.4 Biais cognitifs ................................................................................................. 62 4.2.5 Implication envers les JHA ............................................................................ 63 4.2.6 Biais émotionnels .......................................................................................... 64 4.3 Vérification du modèle conceptuel ........................................................... ........................................................... 66 4.3.1 Effet modérateur de l’implication envers les JHA sur les biais ................... 67 4.3.1.1 Biais émotionnels .................................................................................. 69 4.3.1.2 Biais cognitifs ........................................................................................ 70 4.3.2 Effet modérateur de l’implication envers les JHA sur les attitudes et intentions ....................................................................................................... 73 4.3.2.1 Attitude envers Loto-Québec ................................................................ 75 4.3.2.2 Attitude envers les JHA ......................................................................... 76 4.3.2.3 Intention de jouer .................................................................................. 77 ix 4.3.3 5 Effet de médiation des biais ......................................................................... 79 4.3.3.1 Design de médiation multiple............................................................... 79 4.3.3.2 Médiation des biais sur l’attitude envers Loto-Québec ...................... 81 4.3.3.3 Médiation des biais sur l’attitude envers les JHA ............................... 82 4.3.3.4 Médiation des biais sur l’intention de jouer ........................................ 83 4.3.4 Effet de médiation de l’attitude envers les JHA ........................................... 84 4.3.5 Sommaire des tests d’hypothèses ............................................................... 85 4.3.6 Autres résultats.............................................................................................. 87 4.3.6.1 Biais comme antécédents des attitudes et intentions ....................... 87 4.3.6.2 Effet modérateur des biais émotionnels sur attitudes et intentions . 89 4.3.6.3 Corrélations avec la fréquence de jeu et le niveau de jeu problématique ....................................................................................... 93 DISCUSSION ET CONCLUSION CONCLUSION ................................................................ ................................................................. ................................. 95 5.1 Discussion des résultats ................................................................ .......................................................................... .......................................... 95 5.1.1 Une typologie des publicités de JHA ............................................................. 95 5.1.2 Les biais cognitifs et émotionnels ................................................................ 96 5.1.3 Le rôle central de l’implication envers les JHA ............................................ 97 5.1.4 La remise en question du modèle ELM ........................................................ 97 5.1.5 L’attitude envers la marque de JHA ............................................................. 99 5.1.6 Le rôle médiateur et modérateur des biais.................................................. 99 5.1.7 La fréquence de jeu et le jeu problématique .............................................100 5.1.8 Conclusion....................................................................................................101 5.2 Contribution de la recherche ................................................................ .................................................................. .................................. 103 5.2.1 Contributions académiques ........................................................................103 5.2.2 Implications managériales et sociales .......................................................104 5.3 Limites de la recherche................................................................ .......................................................................... .......................................... 105 5.4 Avenues de recherches futures .............................................................. .............................................................. 107 ANNEXE 1 ................................................................ ................................................................................................ ...................................................................... ...................................... 109 ANNEXE 2 ................................................................ ................................................................................................ ...................................................................... ...................................... 110 ANNEXE 3 ................................................................ ................................................................................................ ...................................................................... ...................................... 112 BIBLIOGRAPHIE ................................................................ ............................................................................................. ............................................................. 125 x LISTE DES TABLEAUX Tableau 1 : Facteurs du thème des publicités et pourcentage de publicités utilisant ces thèmes................................................................................................................. 35 Tableau 2 : ANOVA des groupes obtenus sur les facteurs......................................... 37 Tableau 3 : Description des groupes de publicités .................................................... 38 Tableau 4 : Facteurs de la forme ............................................................................... 39 Tableau 5 : MANOVA des types de publicités sur la forme ........................................ 40 Tableau 6 : Test du chi-carré selon type de publicité sur la cible .............................. 41 Tableau 7 : Facteurs des items du pré-test des stimuli ............................................. 45 Tableau 8 : Comparaison de moyennes appariées pour argumentation et évasion . 46 Tableau 9 : Échantillonnage ...................................................................................... 48 Tableau 10 : Caractéristiques des répondants.......................................................... 50 Tableau 11 : Échelle de l'attitude envers les JHA ...................................................... 52 Tableau 12 : Échelle de l'intention de jouer .............................................................. 53 Tableau 13 : Échelle d'attitude envers la marque Loto-Québec ................................ 54 Tableau 14 : Échelle des biais de perception de soi ................................................. 55 Tableau 15 : Échelle des biais externes .................................................................... 56 Tableau 16 : Échelle du plaisir ................................................................................... 57 Tableau 17 : Échelle de l'implication (R.P.I.I.) ............................................................ 58 Tableau 18 : Dimensions de l'attitude envers les JHA ............................................... 60 Tableau 19 : Effectif des acheteurs de billets de loterie ........................................... 61 Tableau 20 : Dimension de l'intention de jouer ......................................................... 61 Tableau 21 : Dimension de l'attitude envers la marque Loto-Québec....................... 62 Tableau 22 : Dimension des biais de perception de soi ............................................ 62 Tableau 23 : Dimension des biais externes ............................................................... 63 Tableau 24 : Dimensions de l'implication .................................................................. 64 Tableau 25 : Dimension du plaisir ............................................................................. 65 Tableau 26 : MANOVA des biais selon conditions et implication............................... 67 Tableau 27 : ANOVA des biais selon conditions et implication.................................. 68 xi Tableau 28 : Corrélation bivariée entre implication et biais externes ....................... 71 Tableau 29 : MANOVA des attitudes et intentions selon conditions et implication ... 73 Tableau 30 : ANOVA des attitudes et intentions selon conditions et implication ...... 74 Tableau 31 : Corrélation entre l’implication et l’attitude envers les JHA ................... 76 Tableau 32 : Corrélation entre l’implication et l’intention de jouer ........................... 77 Tableau 33 : Médiation des différents biais sur attitude envers Loto-Québec.......... 81 Tableau 34 : Effet direct de l’interaction des publicités et de l’implication sur l'attitude envers Loto-Québec .................................................................................... 81 Tableau 35 : Médiation des différents biais sur attitude envers les JHA .................. 82 Tableau 36 : Effet direct de l’interaction des publicités et de l’implication sur l'attitude envers les JHA ............................................................................................. 83 Tableau 37 : Médiation des différents biais sur intention de jouer ........................... 83 Tableau 38 : Effet direct de l’interaction des publicités et de l’implication sur l'intention de jouer ..................................................................................................... 84 Tableau 39 : Médiation de l'attitude envers les JHA sur l'intention de jouer............. 85 Tableau 40 : Effet direct de l'attitude envers Loto-Québec sur l’intention de jouer .. 85 Tableau 41 : Sommaire des résultats........................................................................ 86 Tableau 42 : Régression de l'attitude envers Loto-Québec sur les biais ................... 87 Tableau 43 : Régression de l'attitude envers les JHA sur les biais............................ 88 Tableau 44 : Régression de l'intention de jouer sur les biais .................................... 88 Tableau 45 : MANOVA des attitudes et de l’intention de jouer selon condition et biais émotionnels ............................................................................................................... 90 Tableau 46: ANOVA des attitudes et intention selon condition et biais émotionnels 90 Tableau 47 : Corrélation entre les biais émotionnels et l’intention de jouer............. 92 Tableau 48 : Corrélation entre l’implication, les biais, l’intention de jouer avec la fréquence de jeu et le niveau de jeu problématique ................................................. 94 xii LISTE DES FIGURES Figure 1: Modèle de recherche .................................................................................. 28 Figure 2 : Plan expérimental ...................................................................................... 30 Figure 3 : Manipulation des stimuli à travers les conditions expérimentales ........... 32 Figure 4 : Choix et description des stimuli publicitaires ............................................ 43 Figure 5 : Plan expérimental pour le prétest des stimuli ........................................... 45 Figure 6 : Interaction entre condition et implication sur biais émotionnels .............. 69 Figure 7 : Interaction entre condition et implication sur biais de perception de soi . 70 Figure 8 : Effet principal de l’implication sur les biais externes pour chaque type de publicité ..................................................................................................................... 72 Figure 9 : Interaction entre condition et implication sur attitudes envers LQ ........... 75 Figure 10 : Effet principal de l'implication sur l'attitude envers les JHA pour chaque type de publicité ......................................................................................................... 77 Figure 11 : Effet principal de l'implication sur l'intention de jouer pour chaque type de publicité ..................................................................................................................... 78 Figure 12 : Illustration du design de médiation multiple ........................................... 80 Figure 13 : Impact modérateur des biais émotionnels .............................................. 89 Figure 14 : Interaction entre conditions et biais émotionnels sur l'attitude envers les JHA ............................................................................................................................. 91 Figure 15 : Effet principal des biais émotionnels sur l'intention de jouer ................. 92 xiii LISTE DES ABRÉVIATIONS ALV : Appareil de Loterie Vidéo ANOVA: Analysis of Variance APA: American Psychological Association CPGI: Canadian Problem Gambling Index DMS-IV: Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorder ELM: Elaboration Likelihood Model FQRSC : Fonds de Recherche sur la Société et la Culture INSPQ : Institut National de la Santé Publique du Québec JHA : Jeux de Hasard et d’Argent LQ : Loto-Québec M : Moyenne MANOVA: Multivariate Analysis of Variance MSSS : Ministère de la Santé et des Services Sociaux FMST : Fondation Mise sur Toi PASW: Predictive Analytics SoftWare (anciennement SPSS) PGSI: Problem Gambling Severity Index SOGS: South Oaks Gambling Screen Chapitre 1 Revue de la Littérature 1 INTRODUCTION Les jeux de hasard et d’argent sont souvent perçus et publicisés comme une activité de détente largement partagée par une majorité de la population au Québec et ailleurs. Environ 7 Québécois sur 10 se sont adonnés aux JHA au cours de l’année précédente (Kairouz & Nadeau, 2011). Même si en 2011 par exemple, le jeu pathologique (ou encore ludomanie) ne touche que 0,7% des Québécois (Kairouz & Nadeau, 2011) (et par conséquent 1% des joueurs de JHA), Papineau et Leblond rapportent que « chaque joueur pathologique entraîne annuellement des coûts sociaux de 56 000 $ au Canada » (Papineau & Leblond, 2010). Il est alors facile d’imaginer les sommes considérables dépensées chaque année par l’État pour soigner les joueurs pathologiques. La recherche scientifique à propos du jeu pathologique a pendant longtemps été financée par les grandes entreprises de jeu. « Au Québec en effet, pendant plus de dix ans [jusqu’en 2002], c'est l'opérateur ludique historique (Loto Québec) qui a financé et contrôlé les recherches et les études de prévalence sur le jeu excessif » (Martignoni-Hutin, 2004). Cette contradiction a d’ailleurs été surnommée « le syndrome québécois ». Le conflit d’intérêt est flagrant et on est en droit de remettre en question l’éthique et même la validité de ce type de recherche. La recherche est parvenue à dégager certains facteurs responsables du développement de pathologies. En particulier, il existe de fausses croyances des joueurs vis-à-vis du jeu, notamment en ce qui à trait à leur chance, connaissances et compétences au jeu. D’un côté, les pertes des joueurs surpassent toujours leurs gains, puisque les entreprises de JHA sont toujours bénéficiaires. D’un autre côté, la définition même des jeux de hasard et d’argent décrit l’aspect entièrement aléatoire des résultats du jeu. Le comportement des consommateurs de JHA, et notamment des joueurs biaisés est donc irrationnel. Des recherches plus récentes ont également souligné le rôle d’un autre type de biais, qui encourage les joueurs à se rappeler de façon plus positive leur expérience de jeu et donc les incite à se consacrer davantage aux JHA. Chapitre 1 Revue de la Littérature 2 La recherche sur les causes de l’existence de ces biais chez les joueurs est assez limitée. On parle notamment d’une plus grande accessibilité, et d’une visibilité accrue. Il existe par exemple des sites internet, visibles et accessibles par tous qui ont l’audace de prodiguer des conseils pour être plus efficace aux machines à sous : There are methods to improve your chances, but there are no guarantees you'll become a consistent winner on slot machines. It's tough to beat the slots when the house edge averages around 10 percent in brick-and-mortar establishments, usually a little less at online casinos […].Playing slot machines is great fun. With proper strategies, playing the slots doesn't have to be tough on your bankroll and there is always the anticipation of hitting that big jackpot (Slot Advisor, 2011). Dans cette ligne de pensée, la publicité pour les jeux de hasard et d’argent est très populaire auprès de la population et omniprésente (Felsher, Derevensky, & Gupta, 2004). L’Association Mondiale des Loteries (World Lottery Association) décerne même chaque année depuis 1999 un prix pour les meilleures publicités (World Lottery Association, 2008). Quelques recherches sur les effets pervers de la publicité de JHA ont vu le jour (Binde, 2007; Griffiths, 2005; Korn, Hurson, & Reynolds, 2005; McMullan & Miller, 2009). Ainsi, ce type particulier de publicité propose une vision du jeu qui va au-delà de la réalité et qui est susceptible de biaiser à lui seul les cognitions des joueurs. Ces recherches ont conclu à un possible impact de la publicité sur les intentions comportementales, ainsi que sur les biais cognitifs, sans toutefois le démontrer empiriquement. Notre objectif dans cette recherche est de comprendre dans quelle mesure la publicité de JHA est capable de biaiser les joueurs et les inciter à jouer de façon excessive. Dans un premier chapitre, nous faisons la revue de la littérature portant sur le domaine des jeux de hasard et d’argent, en particulier ce qui à trait au jeu pathologique et ses antécédents. Ensuite, nous évoquons l’existence de différents types de biais qui existent chez les joueurs. Nous définissons alors les biais cognitifs et les biais émotionnels et cherchons à cerner leur rôle dans le domaine du développement de jeu pathologique. Nous abordons le domaine de la publicité, en utilisant le modèle de persuasion ELM et en étudiant le cas particulier de la publicité sur les JHA. Enfin, nous distinguons l’attitude envers la Chapitre 1 Revue de la Littérature 3 marque, l’attitude envers le jeu, ainsi que les intentions comportementales appliquées au domaine du jeu. Par la suite, nous proposons dans le chapitre 2 le cadre conceptuel de notre recherche basé sur les hypothèses qui découlent de la revue de la littérature. Nous présentons alors notre modèle de recherche. Le chapitre 3 décrit la méthodologie de recherche utilisée. Elle est composée d’une première étape qui décrit notre expérimentation. La deuxième étape nous permet de choisir et de vérifier nos stimuli. Enfin, la dernière étape comprend la collecte de donnée, l’échantillonnage et la description des échelles. La vérification des instruments de mesure, ainsi que du cadre conceptuel constituent le chapitre 4, qui présente les résultats de nos tests d’hypothèses. Quelques résultats supplémentaires d’analyses de variances et de corrélations y sont également inclus. Dans un dernier temps, le chapitre 5 discute des résultats dans le contexte de l’étude et les confronte aux résultats des recherches antérieures. Nous soulignons alors non seulement les contributions managériales et sociales, mais aussi les limites inhérentes à cette étude. Afin de clore cet ouvrage, nous suggérons des pistes pour de futures recherches. Chapitre 1 1 Revue de la Littérature 4 REVUE DE LA LITTÉRATURE 1.1 Le jeu pathologique 1.1.1 Définition du jeu pathologique « A game is a wagering activity in which money can be won or lost » (Chóliz, 2010, p. 15). Ainsi les jeux de hasard pour Chóliz (2010) se définissent en opposition avec les activités de loisir, dans la mesure où gagner et perdre aux jeux de hasard et d’argent ne dépend pas de l’habilité du joueur ou de certaines stratégies de jeu, mais dépend de la chance, et est donc un événement aléatoire. Comme les entreprises de jeux de hasard et d’argent ont pour objectif de faire des bénéfices, le gain d’un joueur sera toujours, à long terme, plus faible que la perte. Or, la motivation première des joueurs réside bien dans le fait de gagner de l’argent et d’acquérir ainsi des richesses (Azmier, 2000; Ladouceur, Sylvain, Letarte, Giroux, & Jacques, 1998). Toutefois, d’après Delfabbro (2004), des motivations autres que monétaires peuvent inciter le joueur à s’adonner au JHA : la recherche d’action et d’excitation, la réduction du stress, de la dépression, ou encore tout simplement de l’ennui. Le jeu pathologique est, depuis 1980, classé comme un trouble psychiatrique du contrôle des impulsions par l’Association Américaine de Psychiatrie (APA) (Joukhador, Maccallum, & Blaszczynski, 2003; Ladouceur, Sylvain, & Boutin, 2000). Il est défini par « an excessive preoccupation with gambling, failure to resist the urge to gamble, and « chasing losses » which lead to severe financial and psychological disturbances » (Joukhador, et al., 2003, p. 1203). Plus précisément, l’APA a caractérisé le jeu pathologique comme une perte de contrôle sur le jeu, des mensonges sur l’importance de la participation au jeu, des perturbations au travail et au sein de la famille, du vol d’argent, et de la volonté de surmonter ses pertes (American Psychiatric Association, 2000). Ladouceur et al. (2000, p. 22), dans leur étude de cas, dressent le portrait réel d’une joueuse pathologique : [Johanne] se sent obsédée par le jeu et effrayée par un besoin incontrôlable d’augmenter le montant de ses mises. Elle tente, Chapitre 1 Revue de la Littérature 5 sans succès, de cesser la pratique du jeu et elle utilise diverses stratégies. Son désir de récupérer les pertes d’argent ainsi que celui de battre « la machine » sont fortement ancrés. Elle ment à propos de ses habitudes de jeu et cela l’attriste profondément puisqu’elle se voit compromettre ses relations familiales […]. Lorsque son thérapeute l’interroge sur le montant total des pertes d’argent à ce jour, elle répond qu’elle préfère ne pas savoir et qu’elle ne souhaite pas répondre à cette question. Cette description permet en effet d’observer une certaine dangerosité du jeu. Il est intéressant de constater de nombreuses irrationalités dans le comportement de Johanne. Les raisons qui ont pu pousser Johanne à développer une pathologie du jeu sont nombreuses et de multiples recherches dans des domaines psychologiques, biologiques, et environnementaux ont tenté de les déterminer. 1.1.2 Antécédents reconnus du jeu pathologique La recherche sur le jeu pathologique a permis de distinguer de nombreux facteurs susceptibles d’entraîner un comportement pathologique chez les joueurs de JHA. Récemment, plusieurs études ont cherché à développer des théories permettant de déterminer l’ensemble de ces facteurs et de les modéliser (Blaszczynski & Nower, 2002; Sharpe, 2002). En particulier, Blaszczynski et Nower (2002) proposent un modèle qui intègre tous les antécédents répertoriés dans la littérature scientifique, dans les domaines génétique, biologique, psychologique et environnemental. Ces auteurs avancent qu’il existe trois groupes de joueurs susceptibles de devenir des joueurs pathologiques: (1) les joueurs conditionnés par des comportements, (2) les joueurs émotionnellement vulnérables, et (3) les joueurs antisociaux et impulsifs. Ainsi, selon le groupe désigné, on identifie différents antécédents du jeu pathologique. Premièrement, on distingue les facteurs suscitant un état de vulnérabilité émotionnel soit : (1) les traits de personnalité, comme la prise de risque, (2) des troubles de l’humeur tels que la dépression, ou encore (3) des difficultés prononcées pour résoudre des problèmes, comme un niveau de stress élevé. D’autres facteurs sont reliés à une vulnérabilité biologique (biochimiques et Chapitre 1 Revue de la Littérature 6 corticaux) et peuvent également être présents chez le joueur (Blaszczynski & Nower, 2002, p. 492). Deuxièmement, concernant les joueurs antisociaux et impulsifs, c’est un facteur psychosocial qui entre en jeu, facteur qui suggère un dysfonctionnement neurologique et neurochimique et qui se manifeste par des comportements impulsifs et antisociaux (Blaszczynski & Nower, 2002, p. 494). Enfin, au sein de chacun des trois groupes identifiés, on observe la présence de facteurs écologiques, de facteurs d’excitation et de schémas cognitifs. Les facteurs écologiques favorisent la présence et l’accessibilité des JHA. On considère notamment les législations et politiques publiques qui favorisent le développement des JHA et l’acceptation sociale de ces pratiques. Ces facteurs se rapportent notamment aux différentes législations et politiques publiques, qui créent un environnement favorable au développement du jeu, et dans lequel les JHA sont socialement acceptés. Par exemple, le développement récent du jeu en ligne fait en sorte que les JHA sont beaucoup plus présents et accessibles par tous, y compris les adolescents, de façon légale ou illégale, ce qui peut potentiellement augmenter le nombre de joueurs problématiques (Cotte & Latour, 2009). La force principale du modèle réside dans le fait qu’il reconnait l’existence d’une proportion de joueurs ne présentant pas de troubles émotionnels ou psychologiques préalables. Ainsi, pour ces joueurs, la perte de contrôle face aux jeux de hasard et d’argent ne peut être le résultat que d’un certain conditionnement ou de l’existence de biais cognitifs concernant la probabilité de gagner (Blaszczynski & Nower, 2002, p. 496). 1.1.3 Le jeu pathologique et l’existence de biais chez le joueur Les jeux de hasard et d’argent sont élaborés de façon légale afin de faire en sorte que les pertes des joueurs surpassent les gains, autrement dit que les entreprises de JHA fassent des bénéfices. Rationnellement, les joueurs devraient donc être amenés à éviter ce type de jeux, puisqu’en moyenne ils perdront de l’argent (Ladouceur, et al., 2000). On sait que plusieurs types de Chapitre 1 Revue de la Littérature 7 biais cognitifs existent chez les joueurs de jeux de hasard et d’argent. Ces biais les poussent à croire qu’ils peuvent « battre la machine » ou avoir plus de chances de gagner que la moyenne des joueurs. Dans le cas des joueurs pathologiques, de nombreuses recherches ont tenté de décrire ces biais et de comprendre leurs impacts sur le développement du jeu pathologique (e.g., Ferland, Ladouceur, & Vitaro, 2002; Joukhador, et al., 2003; Toneatto, 1999; Toneatto, Blitz-Miller, Calderwood, Dragonetti, & Tsanos, 1997). 1.2 Les biais chez le joueur de JHA 1.2.1 La théorie cognitive Le développement du jeu pathologique a fait l’objet de nombreuses recherches (e.g., Blaszczynski & Nower, 2002; Ladouceur, et al., 2000; Ladouceur, et al., 1998; Sharpe & Tarrier, 1993). L’approche cognitive est la théorie la plus documentée (Ferland, et al., 2002) et la plus reconnue (Joukhador, et al., 2003). Pour Ferland et al. (2002), le développement du problème réside dans le fait que le joueur ne prend pas en compte l’indépendance des mises. Autrement dit, ce dernier considère que le résultat d’une mise va dépendre des résultats de chacune des mises précédentes, et qu’il est donc à même de pouvoir contrôler le résultat du jeu en développant une stratégie. De la même façon, Joukhador et al. (2003) définissent le modèle cognitif des JHA, qui met l’accent sur des « irrational and distorted beliefs or schemas regarding personal skill influencing chance-determined outcomes and the drawing of causal associations between independent events » (Joukhador, et al., 2003, p. 1204). Ainsi, selon Ladouceur et al. (2000), certaines cognitions spontanées chez les joueurs les incitent à croire qu’ils vont gagner, malgré l’irrationalité de ce comportement (le gain est basé sur la chance et ils ne gagneront pas à long terme). Certaines variables cognitives jouent donc un rôle primordial dans le comportement des joueurs envers les JHA. Ces variables observées chez les joueurs de JHA « may contribute to their inhability to adequately control their gambling » (Steenbergh, Meyers, May, & Whelan, 2002, p. 143). Chapitre 1 1.2.1.1 Revue de la Littérature 8 Les biais cognitifs Les distorsions cognitives, ou biais cognitifs, chez les joueurs de jeux de hasard et d’argent sont un sujet qui a pris beaucoup d’ampleur dans la littérature. De nombreux auteurs ont démontré que ces distorsions concernant les JHA existent notamment quant au degré de contrôle du joueur sur des résultats pourtant déterminés par la chance (Gaboury & Ladouceur, 1989; Joukhador, et al., 2003; Langer, 1975; Toneatto, et al., 1997). « An understanding of random events and probabilistic outcomes is integral to buyer decision making for many products, such as insurance policies, service contracts, casino games, sweepstakes, and lotteries » (Miyazaki, Brumbaugh, & Sprott, 2001, p. 254). Or, l’aspect aléatoire du résultat de certaines décisions d’achat fait en sorte que les consommateurs prennent des décisions qui peuvent se baser sur des idées fausses, comme par exemple le fait d’avoir un certain contrôle sur ces événements aléatoires. (Langer, 1975; Miyazaki, et al., 2001). Ces idées fausses sont des biais cognitifs, autrement appelés croyances irrationnelles. L’approche du « think-aloud », développée par Gaboury et Ladouceur (1989) est la première méthode qui a été utilisée afin de verbaliser toutes les pensées noncensurées des joueurs lorsqu’ils s’adonnent aux JHA (Joukhador, Blaszczynski, & Maccallum, 2004; Sharpe, 2002) et a été réutilisée de nombreuses fois par la suite (e.g., Griffiths, 1993; Ladouceur, Gaboury, Bujold, Lachance, & Tremblay, 1991). De ces études, les auteurs ont pu découvrir des formes de croyances irrationnelles chez les joueurs (Joukhador, et al., 2004). Toneatto et al. (1997) en ont développé une typologie. Ces biais proviennent de croyances de joueurs ordinaires à propos de techniques qu’ils utilisent pour améliorer leur probabilité de gain. Ainsi, dans cette typologie, on retrouve par exemple le contrôle cognitif (cognitive control) : « attitudes, beliefs, prayer [which] can influence outcomes of wagers » (p. 258), ou encore la chance comme un trait de personnalité (luck as trait) : « luck viewed as an innate trait which influences oucomes » (p. 259). Les auteurs en recensent treize, appartenant à cinq grandes classes de biais : (1) predictive control, (2) active illusory control, (3) passive illusory control, (4) probability control, et (5) interpretive control. Chapitre 1 Revue de la Littérature 9 Dans une autre étude plus récente, Toneatto (1999) perfectionne cette typologie en ajoutant plusieurs dimensions. D’abord, les perceptions erronées des compétences (magnification of gambling skill) (1) amènent les joueurs à surestimer leurs habilités à gagner, ce qui se traduit par une confiance en soi exagérée. Les croyances superstitieuses (superstitious beliefs) (2) sont des moyens sûrs pour les joueurs de contrôler et de manipuler les résultats du jeu en leur faveur. Elles regroupent plusieurs types de superstitions: talismaniques, comportementales et cognitives. Le joueur peut aussi expliquer ses pertes d’une manière qui l’encourage à continuer à jouer : on parle alors de biais interprétatifs (interpretive biases) (3) parmi lesquels on retrouve le biais d’attribution, « l’illusion du joueur » (gambler’s fallacy), « la poursuite du gain » (chasing), l’anthropomorphisme, l’apprentissage suite aux pertes (learning from losses), et le biais rétrospectif. L’orientation temporelle (temporal telescoping) (4) est quant à elle un biais qui pousse le joueur à penser qu’un gain va se produire très bientôt, plutôt que bien plus tard. De plus, le joueur a plus tendance à se souvenir des gains que des pertes, et c’est ce que Toneatto (1999) appelle la mémoire sélective (selective memory) (5). Vient ensuite la compétence prédictive (predictive skill) (6) : le joueur prend des décisions face au jeu en se basant sur des interprétations subjectives d’éléments internes (comme l’intuition, l’instinct, etc.) ou externes (comme des présages, phénomènes météorologiques, comportements d’autres joueurs, etc.). On retrouve également un type de biais étudié depuis longtemps dans la littérature (e.g., Langer, 1975), l’illusion de contrôle sur la chance (illusion of control over luck) (7). Celui-ci distingue la chance comme variable incontrôlable (la chance oscille entre des bonnes et des mauvaises périodes et il faut donc attendre le « bon » moment), comme variable contrôlable (manipulation possible de la chance), comme un trait de personnalité, et enfin comme une contagion (être chanceux dans d’autres circonstances implique d’être chanceux aux jeux). Enfin, la corrélation illusoire (illusory correlation) (8) consiste à attribuer des liens de cause à effet entre des événements environnementaux et les résultats aux jeux. Par exemple, le joueur remarque qu’il gagne plus souvent quand il pleut ou à certains moments de la journée. Chapitre 1 1.2.1.2 Revue de la Littérature 10 L’impact des biais cognitifs Tous ces biais cognitifs jouent un rôle dans le développement et le maintien des problèmes de jeu (Griffiths, 1990; Ladouceur, et al., 1998). D’après la théorie cognitive du jeu pathologique, « it would be expected that modifying a person’s perception of gambling would have an effect on their gambling behavior » (Ferland, et al., 2002, p. 20). Dans la même optique, Ladouceur et al. (2000) avancent qu’il est possible de diminuer la motivation d’un joueur pathologique en corrigeant les distorsions cognitives du joueur et sa compréhension du hasard. Il est important de noter cependant que des études ont montré qu’on ne peut conclure sur l’impact des variables cognitives sur la persistance à jouer aux JHA (Griffiths, 1990), et que des biais cognitifs existent de façon générale chez les joueurs, problématiques ou non (Ladouceur & Walker, 1996). En plus des distorsions cognitives, d’autres facteurs seraient ainsi à prendre en considération dans l’explication du développement du jeu pathologique (Ladouceur & Walker, 1996). Depuis ces recherches, d’autres auteurs se sont penchés sur le sujet. Joukhador et al. (2003) sont arrivés à la conclusion que le jeu problématique est associé aux biais cognitifs, et que les joueurs problématiques feraient plus appel à ce type de biais que des joueurs non-problématiques. Dans le même ordre d’idée, Joukhador et al. (2004) sont arrivés à la même conclusion concernant un biais cognitif particulier, les croyances superstitieuses. Enfin, d’après Myrseth, Brunborg et Eidem (2010), les joueurs pathologiques possèderaient aussi plus de distorsions cognitives que les non-joueurs. En conclusion, on constate que les études sur les biais cognitifs sont arrivées à des conclusions parfois contradictoires concernant l’impact des biais cognitifs sur le développement du jeu pathologique, ainsi que leur existence chez les joueurs problématiques ou non-problématiques. Il est par conséquent intéressant d’apporter un point de vue supplémentaire dans le cadre de cette recherche. Nous comptons aussi déterminer si ces biais existent bien chez des joueurs « ordinaires », et s’ils ont un effet significatif dans le développement d’attitudes positives et d’intentions comportementales, facteurs déterminants, comme nous le verrons, dans le développement du jeu pathologique. Chapitre 1 1.2.1.3 Revue de la Littérature 11 Limite de la théorie cognitive Les études sur les JHA se sont concentrées jusqu’à présent sur les biais cognitifs existants chez les joueurs. La théorie cognitive a en effet pris une importance grandissante dans la littérature. Pourtant, Blaszczynski et Nower (2002) remettent en cause cette théorie. Sans remettre en question l’existence de distorsions cognitives chez les joueurs, les auteurs avancent que les preuves empiriques démontrant un lien causal entre les schémas cognitifs faussés et irrationnels et le développement du jeu pathologique sont insuffisantes (Blaszczynski & Nower, 2002). 1.2.2 Les biais émotionnels Des études récentes se sont penchées sur un autre type de biais qui pourrait être susceptible de provoquer chez le joueur des comportements a priori irrationnels. Ces biais sont liés aux émotions que le joueur peut ressentir ou aimerait ressentir lors de la construction de son attitude envers les JHA et son passage à l’acte de jouer. 1.2.2.1 Vers une définition du biais émotionnel Ces biais émotionnels peuvent être expliqués par le fait que les joueurs se rappellent plus facilement les gains au JHA que les pertes (Cowley, 2008). En effet, quand un individu veut adopter un comportement irrationnel, il procède à une évaluation rétrospective plus positive de l’expérience initiale (Cowley, 2008, p. 1046). Ceci, d’après Cowley (2008) est d’autant plus vrai quand la consommation est de type hédonique, ce qui est le cas des jeux de hasard et d’argent (l’auteure utilise lors de son expérimentation un appareil de loterie vidéo ou ALV). Elle explique qu’une des « approach to justifying a hedonic activity is to increase the degree to which pleasure was experienced when engaging in the activity in the past » (p. 1047). Ainsi, ces joueurs sont biaisés lorsqu’ils sont confrontés à la décision de jouer ou non, de par le fait qu’ils se créent des émotions positives plus fortes que leurs penchants négatifs. Chapitre 1 1.2.2.2 Revue de la Littérature 12 Différence entre biais émotionnel et biais cognitif Toneatto et al. (1997) avaient développé dans leur typologie un biais similaire. Il s’agit du biais de mémoire, ou mémoire sélective, de la sous-catégorie « interpretative control » (Toneatto, 1999). En effet, ce biais de mémoire consiste à se rappeler les gains et ignorer les pertes. Les auteurs ont de plus trouvé que ce type de distorsions était le moins représenté chez les gros joueurs (heavy gamblers). Aussi, même si le biais de mémoire identifié par Toneatto et al. (1997) se rapproche fortement de la définition du biais émotionnel de Cowley (2008), il en diffère nettement de part la nature même du biais. En effet, pour le biais émotionnel, ce n’est pas le simple souvenir du gain qui compte, mais aussi l’émotion positive plus forte lorsqu’on se rappelle du plaisir ressenti par rapport à un gain. 1.2.2.3 Le facteur émotion Les joueurs de JHA qui ont la volonté de jouer, mais qui font face à une dissuasion (perdre au jeu est plus fréquent que de gagner), sélectionnent de façon stratégique des moments particuliers lors de l’évaluation de leur expérience antérieure afin de rendre cette évaluation plus positive (Cowley, 2008). D’après l’auteure, ce résultat peut s’expliquer à l’aide de la théorie de Thaler (1985) qui démontre que les individus cherchent à maximiser leur bonheur en sélectionnant les bons moments associés à une expérience (Cowley, 2008, p. 1051). De par leur expérimentation employant le Iowa Gambling Task, Stocco et Fum (2008) arrivent à la conclusion que des expériences émotionnelles antérieures, comme le fait de gagner au jeu de cartes ou à la loterie, viennent affecter de façon positive les comportements subséquents, autrement dit affectent positivement les attitudes envers le jeu et les intentions comportementales. En conclusion, on observe qu’il existe deux types de biais, les biais cognitifs, appelés également croyances erronées et qui ont fait l’objet de nombreuses recherches, ainsi que les biais émotionnels, auxquels les chercheurs commencent à s’intéresser pour expliquer pourquoi le consommateur de JHA, face à une décision irrationnelle, continue de jouer. Ces biais sont, d’après la Chapitre 1 Revue de la Littérature 13 littérature, à même d’avoir un impact sur le développement des attitudes et des intentions comportementales envers les JHA. 1.3 La publicité en comportement du consommateur Depuis plus d’un siècle, pléthore de théories ont été développées afin de mettre en évidence l’impact de la publicité et de comprendre le phénomène de persuasion publicitaire. Dans les années 1980, un modèle intégrateur a marqué un tournant dans la recherche sur la persuasion : le modèle de probabilité d’élaboration de Petty et Cacioppo (1981). 1.3.1 Le modèle ELM Le modèle ELM (Elaboration Likelihood Model) développé par Petty et Cacioppo (1986b), autrement dit modèle de probabilité d’élaboration, a été jusqu’à récemment le modèle dominant dans la littérature portant sur le phénomène de persuasion publicitaire (De Barnier, 2006). Ce modèle est une théorie générale du changement d’attitude et de comportement d’un consommateur du fait de la persuasion d’un message publicitaire. 1.3.1.1 Les routes de persuasion Selon la théorie du modèle ELM, un message publicitaire peut emprunter deux routes distinctes de persuasion chez l’individu afin de modifier son attitude et son comportement : (1) la route centrale et (2) la route périphérique. En d’autres termes, on distingue deux processus de traitement de l’information véhiculée par le message et ces processus diffèrent selon l’intensité d’élaboration du message par l’individu (Petty & Cacioppo, 1983, 1984). La route centrale (1) suggère un traitement et une analyse en profondeur du contenu du message par l’individu. Il traite les informations qu’il juge pertinentes, dépendamment de ses connaissances préalables. Ce raisonnement lui permet d’émettre une évaluation générale, et de se former une attitude envers l’argumentation du message. Ainsi, il est à même d’accepter ou de rejeter le contenu du message et par la suite d’intégrer des informations contenues dans Chapitre 1 Revue de la Littérature 14 ce message. Il se forme alors une attitude chez l’individu, stable dans le temps et prédictive de son comportement (Cialdini, Petty, & Cacioppo, 1981). Le processus de traitement de l’information de la route périphérique (2) est quant à lui moins approfondi et moins demandant pour l’individu. En effet, il s’appuie sur des éléments périphériques au contenu du message et non sur l’argumentation même du message. Ces éléments périphériques incluent entre autres le nombre d’arguments contenus dans le message, la crédibilité de la source, sa sincérité, son attractivité, la beauté de la musique ou de la mise en scène (De Barnier, 2006). À l’inverse de la route centrale, les attitudes formées suite au traitement de l’information via la route périphérique sont instables dans le temps et ne sont que peu prédictives des intentions comportementales. Pour emprunter la route centrale, l’individu doit donc juger les informations du message comme pertinentes. Par conséquent, il doit (1) avoir les capacités cognitives pour les traiter, autrement dit disposer des connaissances antérieures nécessaires et comprendre facilement le message et (2) être motivé pour traiter ces informations, soit être personnellement impliqué et y trouver un intérêt élevé (Petty & Cacioppo, 1986a). La motivation joue donc un rôle central dans le traitement de l’information, et ainsi le concept d’implication de l’individu vis-à-vis du message est essentiel quand le récepteur utilise la route centrale (Chebat, Charlebois, & Gélinas-Chebat, 2001). 1.3.1.2 Le rôle modérateur de l’implication Pour Petty et Cacioppo (1979), l’implication se définit comme le degré de mobilisation d’un individu dans le processus de traitement d’un message et dépend de la finalité du traitement. La question de l’implication, liée à l’intérêt personnel de l’individu concernant l’argumentation du message, est inhérente au modèle ELM. Si son implication envers l’objet du message est forte, le récepteur devient plus motivé à s’engager dans un travail cognitif et à traiter l’information contenue dans le message : il utilise alors la route centrale de persuasion (Petty & Cacioppo, 1986b). En revanche, si son implication est faible, il a tendance à prendre en considération les éléments périphériques tels que la source, sa Chapitre 1 Revue de la Littérature 15 crédibilité, le nombre d’arguments ou encore les images, et à utiliser la route périphérique (Petty, Cacioppo, & Schumann, 1983). Ainsi, d’après le modèle ELM, on assiste à un changement d’attitudes, stables dans le temps et prédictives du comportement, si et seulement si le récepteur du message publicitaire utilise la route centrale de traitement de l’information, c’està-dire s’il est impliqué envers le contenu du message. Dans le cas contraire, le changement d’attitude ne sera que limité. Par conséquent, dans le cadre de notre étude, un individu avec un niveau d’implication élevé envers les JHA aura tendance à utiliser la route centrale de persuasion du modèle ELM. On observera alors un changement positif et stable dans les attitudes ainsi que les intentions comportementales envers les JHA. Ce résultat devrait donc être plus significatif dans le cas des publicités commerciales de loteries qui font appel à un traitement de l’information important. 1.3.1.3 Limites du modèle ELM Cette dernière conclusion a cependant été remise en cause pour plusieurs raisons. Tout d’abord, Petty et Cacioppo (1981) ont considéré les deux routes de persuasion comme étant exclusives. Par la suite, ces même auteurs (Petty & Cacioppo, 1986a) ont admis la possibilité d’une coexistence et d’une complémentarité de ces deux processus. Ainsi, lorsque l’intérêt de l’individu soumis au message est modéré, les indices périphériques peuvent exercer un rôle dans la motivation de l’individu à s’engager dans la route centrale, qui requiert un effort cognitif supérieur. De plus, le modèle se limite à des aspects strictement rationnels évalués selon l’importance qu’en donne le récepteur. « Le modèle présume la supériorité de la voie centrale et demeure consensuel avec le courant de recherche cognitif prônant la supériorité de la cognition » (De Barnier, 2006, p. 75). Ainsi, ce modèle ne prend pas en compte l’impact émotionnel du message sur le changement d’attitudes, qui a pourtant reçu une attention particulière récente en communication (Morris, Woo, & Singh, 2005) et en neuroscience (Damasio & Blanc, 2006; Davidson, 2000; LeDoux, 1995; cités par de Barnier, 2006, p. 75). Chapitre 1 Revue de la Littérature 16 1.4 La publicité dans le cas des jeux de hasard et d’argent 1.4.1 Le contexte actuel Dans un contexte de publicité commerciale, les entreprises de loterie et autres JHA ont un intérêt certain à promouvoir les jeux afin de réaliser des bénéfices. Il est cependant important de noter que, dans la majorité des cas, ces entreprises sont des entreprises d’État qui ne font face à aucune concurrence, en tant que monopole d’État (McMullan & Miller, 2009). Autrement dit, peu importe la promotion du jeu, un consommateur qui a l’intention de jouer n’aura pas d’autres choix que de débourser de l’argent au profit de ces seules entreprises. Au Canada par exemple, on remarque que les recettes nettes des entreprises de JHA sont passées de 2,73 milliards de dollars en 1992 à 13,75 milliards de dollars en 2009, les ménages canadiens dépensant en moyenne 335 dollars par an dans les JHA en 2008 (Marshall, 2010). La publicité pour les jeux de hasard et d’argent a étonnamment fait l’objet de très peu d’études académiques ou managériales. Pour McMullan et Miller (2009), ceci est dû soit au manque de données fiables et au fait que le sujet est difficile à étudier, soit parce que c’est un sujet relativement sensible aux yeux des gouvernements, qui font la promotion des JHA pour les rendre attrayants alors qu’ils sont susceptibles d’être dangereux pour le bien public. Néanmoins, les publicités pour les JHA sont omniprésentes. Une étude canadienne (Felsher, et al., 2004) montre par exemple que 90% des individus interrogés se rappellent avoir vu des publicités pour les loteries, et 39% de ces individus disent acheter des tickets de loterie à cause de ces publicités. « Lottery marketing stimulates and exploits counterfactual thinking to get consumers' attention, change their thinking, and arouse their emotions, all in the service of inducing them to do what they perhaps would otherwise not do, that is, buy lottery tickets » (Landman & Petty, 2000, p. 313). De là découle la possibilité que la publicité puisse avoir un rôle capital à jouer dans le développement de certains biais chez les consommateurs, biais qui les incitent à se comporter de façon irrationnelle. Chapitre 1 Revue de la Littérature 17 1.4.2 Les différents types de publicités de JHA Plusieurs analyses de contenus des publicités de JHA (Korn, et al., 2005; McMullan & Miller, 2009) et études qualitatives (Derevensky et al., 2007) ont été réalisées et ont permis de distinguer des thèmes et des messages principaux inhérents à ce type de publicité. Il est à noter cependant qu’étrangement, ces différentes analyses n’ont jamais mené à des analyses de regroupement qui auraient permis de déterminer des groupes spécifiques de publicités, plus explicites et distincts les uns des autres. D’une part, un thème commun qui ressort particulièrement est le fait de gagner : un « ethos of winning » (McMullan & Miller, 2009, p. 273). En effet, pour Korn et al. (2005) par exemple, Win big (gagner beaucoup) et Anyone can win (n’importe qui peut gagner) font partie des cinq principaux messages véhiculés par les publicités de JHA. Pour McMullan et Miller (2009, p. 285), « winning was always highlighted » dans les publicités : 90% des publicités analysées par ces auteurs contiennent les mots « winning », « being a winner » ou encore « winning changed your life ». De plus, les différentes recherches s’entendent sur le fait que les publicités décrivent les JHA comme une forme de distraction tout à fait normale (Korn, et al., 2005), et surtout que c’est un choix rationnel parmi les produits de consommation courante (McMullan & Miller, 2009). Les auteurs vont plus loin en avançant que l’effet conjugué de ces types de messages publicitaires et l’accessibilité accrue des JHA peut résulter en des raisonnements erronés de la part des consommateurs sur leurs probabilités de gagner, une propension à vouloir continuer à jouer malgré les pertes et à une certaine « poursuite du gain » (Toneatto, 1999). Par conséquent, cela tend à promouvoir certains biais bien connus dans le cas du jeu pathologique. Ce type particulier de publicités s’appuie donc sur une argumentation forte, qui pousse le joueur à penser le jeu comme une activité de la vie de tous les jours qui lui permet de gagner de l’argent facilement (Korn, et al., 2005). Ces publicités à forte argumentation sont, comme nous l’avons vu précédemment, susceptibles d’inciter le joueur à traiter le message via la voie centrale de persuasion du modèle ELM. Ainsi, si celui-ci est impliqué envers les JHA, ces publicités auront un impact positif, stable et durable sur ses attitudes comportementales envers les JHA que s’il est faiblement impliqué. et intentions Chapitre 1 Revue de la Littérature 18 D’autre part, les émotions font partie intégrante d’une majorité des publicités de JHA. En effet, les messages publicitaires utilisent souvent l’excitation et l’amusement pour convaincre leur auditoire (McMullan & Miller, 2009). À ce titre, plusieurs auteurs identifient deux principaux messages publicitaires faisant appel aux émotions : (1) l’expérience amusante et passionnante du jeu, et (2) l’évasion, en d’autre termes les JHA permettent aux joueurs d’échapper à leur quotidien maussade (Derevensky, et al., 2007; Korn, et al., 2005; McMullan & Miller, 2009). Ainsi, on constate que les publicités mettent de l’avant l’existence d’une forte probabilité que la vie du joueur soit améliorée grâce aux JHA sans se fatiguer (Derevensky, et al., 2007). Certaines publicités « were strategically designed to entice audiences to « take turns » with winning citizens and imagine themselves in their shoes » (McMullan & Miller, 2009, p. 290). C’est l’exemple type qu’Escalas (2004) utilise dans son article lorsqu’elle avance que les gens qui s’imaginent gagner ont plus de chance de s’adonner aux JHA. Ces publicités, que nous appelons « évasion », font donc appel à une dimension émotionnelle plus importante. Ainsi, dans un premier temps, il est possible de penser que les publicités de type « évasion » procèdent à la persuasion par la route périphérique du modèle ELM puisque l’accent dans la publicité n’est pas mis sur l’argumentation mais plutôt sur les émotions du joueur. On s’attend donc à ce que sous faible implication envers les JHA, un joueur soit plus persuadé par la publicité de type évasion que sous forte implication, et que donc celle-ci modifie positivement ses attitudes et intentions. Enfin, on peut s’attendre à ce que sous forte implication, la publicité « argumentation » persuade davantage les joueurs que la publicité « évasion ». 1.4.3 La publicité et les biais La promotion des JHA au travers de publicités peut poser un certain problème dans la mesure où de telles promotions peuvent engendrer ou consolider des fausses idées ou des biais chez les consommateurs (Miyazaki, et al., 2001). Plus précisément, on constate que les publicités peuvent favoriser des biais cognitifs mais également émotionnels. D’une part, dans une étude récente sur le concept de chance, Jiang, Cho et Adaval (2009) ont montré par exemple que si on rend la chance saillante à des Chapitre 1 Revue de la Littérature 19 individus de façon subliminale (priming subliminally with luck-related stimuli (p. 182)), leur estimation quant à leur probabilité de gagner la loterie augmente, ainsi que leur participation aux loteries et le montant d’argent investi dans des options financières risquées. Ils ont aussi et surtout fait ressortir le rôle médiateur d’un biais dans l’impact de ces stimuli sur le comportement du consommateur : le changement temporaire dans les perceptions de chance. Ce dernier peut être assimilé au biais que Toneatto et al. (1997) définissent comme l’état de chance dans leur typologie (luck as a state), et qui correspond à une fluctuation de la chance dépendamment de l’état du joueur. Ainsi, comme cela a été expliqué auparavant, McMullan et Miller (2009) ont montré qu’un certain type de publicités s’appuyant sur une argumentation forte est à même de promouvoir chez les joueurs des raisonnements irrationnels qui peuvent les biaiser cognitivement. D’autre part, il est possible que la publicité de JHA développe des biais émotionnels chez le joueur, dans la mesure où la publicité peut lui rappeler ses gains passés. La publicité fait alors en sorte que celui-ci se souvienne plus des gains et donc des émotions positives procurées par ces gains que des pertes lorsqu’il évalue son expérience de jeu antérieure (Cowley, 2008). C’est notamment le cas des publicités qui se basent sur l’évasion, dans la mesure où ce type de publicité fait spécifiquement appel à l’affect du joueur, et les incite à s’imaginer à la place des gagnants (McMullan & Miller, 2009) En conclusion, la publicité pour les JHA pourrait avoir un impact sur les biais cognitifs et émotionnels des consommateurs de JHA dépendamment du type de publicités employé : une publicité à forte argumentation affecterait plus les biais cognitifs que les biais émotionnels, et inversement pour une publicité de type évasion. Par conséquent, un autre objectif de notre recherche est de savoir si la publicité commerciale des jeux de hasard et d’argent biaise les consommateurs, et si les biais cognitifs et émotionnels sont des médiateurs de l’impact de la publicité de JHA sur les attitudes et les intentions comportementales. Chapitre 1 Revue de la Littérature 20 1.4.4 Impact controversé de la publicité de JHA En réalité, très peu de recherches ont été réalisées sur la publicité des JHA et sur son impact sur les consommateurs (Derevensky, Sklar, Gupta, & Messerlian, 2010; Griffiths, 2005; McMullan & Miller, 2009). C’est la raison pour laquelle, jusqu’à maintenant, aucune conclusion ne peut être tirée quant à l’existence d’un lien de cause à effet entre la publicité des JHA et le développement du jeu pathologique (Binde, 2007; Griffiths, 2005). Des études économétriques qui s’appuieraient sur les statistiques des entreprises de JHA permettraient sans aucun doute d’apporter une réponse plus précise sur les effets de la publicité des JHA et son efficacité. Ces données sont pourtant très rarement rendues publiques, de par le fait que ce sont des entreprises d’État qui sont en charge de gérer les jeux de hasard et d’argent (Binde, 2007). De plus, les études académiques à ce sujet sont peu nombreuses et contradictoires : Zhang (2004) avance par exemple que l’impact de la publicité des JHA sur le volume de vente est plus important que la moyenne des autres produits de grande consommation, alors que d’autres auteurs démontrent que la publicité n’a tout simplement pas d’impact significatif sur les ventes de JHA (Heiens, 1999; Mizerski, Miller, Mizerski, & Lam, 2004). Dans leur article, Lee, Lemanski et Jun (2008) sont arrivés à la conclusion que l’exposition à des publicités de JHA affecte de façon positive les attitudes envers les JHA et les intentions comportementales. De plus, Lee et ses collègues (2008) avancent un point très intéressant par rapport au rôle potentiel de la prédisposition de certains joueurs à rechercher plus en profondeur des informations dans les publicités pour les JHA. En effet, on peut penser que les joueurs pathologiques auraient plus tendance par exemple à porter une attention particulière aux messages publicitaires des JHA. Dans ce cas, ces individus prédisposés auraient probablement des attitudes plus favorables à l’égard des JHA ainsi que des intentions plus fortes de jouer (Lee, et al., 2008). Certaines études dans des domaines de pathologies relativement proches, comme le tabac et l’alcool, ont réfuté l’impact d’une telle prédisposition, à cause Chapitre 1 Revue de la Littérature 21 d’un manque de preuves dans la littérature (Atkin, 1990). Cela nous permet ainsi de penser que l’impact des messages publicitaires pour les JHA ne diffère pas en puissance dépendamment du type de joueur, qu’il soit non-joueur, joueur ordinaire, ou encore joueur pathologique. Enfin, il est important de noter qu’aucune étude empirique dans ce domaine ne s’appuie sur des manipulations expérimentales du message publicitaire : Lee et al. (2008) ont par exemple mesuré l’exposition des participants en leur demandant combien de fois ils avaient vu une publicité commerciale pour les JHA. On peut donc remettre en cause la validité écologique de leur recherche. Ainsi, le simple manque de preuves empiriques nous incite à étudier l’impact des messages publicitaires sur les attitudes envers les JHA et les intentions comportementales, en manipulant de façon expérimentale les deux types de publicités distinctes « argumentation » et « évasion ». 1.5 Attitude envers Loto-Québec, attitude envers le jeu et intention de jouer Un changement positif dans les attitudes et les intentions de jouer sont indéniablement un facteur clé dans le développement du jeu pathologique. La compréhension des attitudes envers le jeu est fondamentale dans la mesure où ces attitudes sont prédictives du comportement du joueur et de son intention de jouer (Chiu & Storm, 2010; Moore & Ohtsuka, 1999). La relation entre les biais cognitifs, l’attitude envers le jeu et le comportement de jeu a été, jusqu’à présent, très rarement étudié (Sharpe, 2002). La théorie cognitive nous amène à penser que les biais cognitifs ont un rôle déterminant dans le développement du jeu pathologique. En revanche, en ce qui concerne les attitudes et intentions comportementales, le constat n’est pas aussi tranché. En effet, d’après Miyazaki et al. (2001), les croyances erronées des joueurs peuvent avoir une influence sur l’intention et la décision de jouer aux JHA. De même Cowley (2008) montre le possible impact des biais émotionnels sur les intentions de jouer et de rejouer. De plus, Breen et Zuckerman (1999) dans leur expérimentation suggèrent un rôle de l’attitude dans le développement d’un comportement excessif du jeu. Sharpe (2002) de son côté, avance que plusieurs conclusions peuvent être Chapitre 1 Revue de la Littérature 22 tirées de la littérature à propos des attitudes et du comportement de jeu, notamment que des « positive attitudes toward gambling seem to predict engagement in gambling activities both acress samples and experimental designs » (p. 13) Enfin, aucune étude n’a fait part d’un concept pourtant inévitable en marketing : la marque. On peut penser que cela est dû au fait que les compagnies de JHA sont dans la majorité des cas des monopoles dans leur pays, et aussi que de nombreuses études scientifiques et managériales portant sur les JHA ont été subventionnées par des compagnies de JHA. C’est par exemple le cas de LotoQuébec au Québec (e.g., Ferland, et al., 2002; Ladouceur, et al., 2000). Or, l’attitude d’un consommateur envers une marque peut être vue comme étant son évaluation globale de la marque (Mitchell & Olson, 1981). Cette attitude est composée d’éléments affectifs et cognitifs (Kirmani & Zeithaml, 1993). Elle peut influencer les comportements des consommateurs, comme le choix d’une marque par rapport à une autre ou leur intention d’achat (Keller, 1993; Low & Lamb, 2000). L’attitude envers la marque est également une variable inhérente à l’étude des effets de la publicité envers des produits ou des services (Mitchell & Olson, 1981). Ainsi, en tant que marque, les compagnies de JHA, comme LotoQuébec peuvent également avoir une influence sur les attitudes et les intentions des joueurs. En conclusion, notre étude cherche à démontrer les effets de la publicité de JHA sur les attitudes et les intentions de jouer. La revue de la littérature nous a permis d’identifier deux types de publicités. D’une part, la publicité de type « évasion » s’appuie sur les émotions pour persuader, en ayant un effet sur les biais émotionnels. D’autre part, la publicité de type « argumentation » s’appuie sur un niveau élevé de cognition et de traitement de l’information, en ayant un effet sur les biais cognitifs. Enfin, c’est au travers de ces deux types de biais que la publicité modifie les attitudes et les intentions comportementales des joueurs, et se place comme un antécédent potentiel du développement du jeu pathologique. Chapitre 2 2 Cadre Conceptuel et Hypothèses de Recherche 23 CADRE CONCEPTUEL ET HYPOTHÈSES DE RECHERCHE 2.1 Contribution théorique de l’étude Selon Binde (2007), la littérature scientifique existante suggère un impact de la publicité sur le développement du jeu pathologique, bien que cet impact soit modéré comparé à d’autres facteurs qui semblent plus pertinents. Néanmoins, rares sont les recherches qui examinent les effets directs de la publicité sur le développement du jeu pathologique ainsi que sur les variables attitudinales et comportementales et leurs interrelations. Les auteurs soulignent que ce type de recherche serait difficile à mettre en œuvre (Binde, 2007; Griffiths, 2005). Ceci s’explique notamment par le fait que de nombreux autres facteurs entrent également en jeu, et que ces facteurs biologiques, psychologiques et écologiques n’ont été que peu étudiés jusqu’ici (Blaszczynski & Nower, 2002; Sharpe, 2002). La revue de la littérature nous a d’abord permis de constater que les conclusions concernant les impacts de la publicité sur les biais sont mitigées. En effet, on remarque d’un côté que des messages promotionnels pour les JHA accroissent par exemple la perception de contrôle (Miyazaki, et al., 2001), la perception de chance du joueur (Jiang, et al., 2009) ou encore lui procurent des émotions positives qui lui rappellent des moments positifs (ses gains) et lui font oublier des moment négatifs (ses pertes) pourtant plus nombreux (Cowley, 2008). Cependant, on est en droit de se demander si la publicité a réellement un effet sur ces biais, dans la mesure où il a été démontré dans maintes études que les joueurs problématiques ou non, et même des non-joueurs, sont intrinsèquement biaisés (e.g., Gaboury & Ladouceur, 1989; Joukhador, et al., 2004; Langer, 1975; Toneatto, 1999). De plus, d’après la théorie cognitive dans le domaine du jeu pathologique, les chercheurs s’entendent sur le rôle primordial des distorsions cognitives dans le développement du jeu pathologique (Ferland, et al., 2002; Ladouceur, et al., 2000). Néanmoins, il reste à démontrer leur impact, ainsi que celui des biais Chapitre 2 Cadre Conceptuel et Hypothèses de Recherche 24 émotionnels dans le changement d’attitudes et d’intentions comportementales envers les JHA. Enfin, les quelques études qui ont tenté de démontrer les effets des biais sur les attitudes se sont intéressées au cas particulier d’adolescents (Derevensky, et al., 2010; Derevensky, et al., 2007; Korn, et al., 2005) ou d’étudiants universitaires (Lee, et al., 2008) et ne permettent donc pas de généraliser les résultats. En conclusion, les multiples études réalisées jusqu’à présent sur les liens existants entre la publicité et l’existence de biais, cognitifs et émotionnels n’ont pas permis de conclure de façon définitive sur le rôle significatif de la publicité de JHA. La présente étude s’inscrit dans ce courant de recherche, en allant plus loin et en essayant de déterminer dans un premier temps si la publicité de JHA a un effet significatif sur les attitudes et intentions comportementales des joueurs, et dans un deuxième temps dans quelle mesure les concepts de biais cognitifs et émotionnels, que l’on retrouve dans la littérature, sont des médiateurs de ces relations. Concernant les publicités de JHA, nous avons distingué dans la littérature deux thématiques distinctes : les publicités « argumentation » et les publicités « évasion ». Chacune d’entre elles est à même d’affecter de façon différente les biais, et les attitudes et intentions comportementales. Ainsi, pour nous permettre de réaliser cette recherche, il nous semble indispensable de réaliser avant tout une analyse de contenu de publicités de JHA afin de corroborer les conclusions des différentes études qui ont été menées jusqu’à présent sur les différents types de publicités, et surtout d’apporter des preuves empiriques. 2.2 Hypothèses et modèle de recherche La littérature sur les publicités de jeux de hasard et d’argent nous a permis de relever deux types de publicités a priori distinctes. Cette typologie comprend dans un premier temps la publicité argumentative, qui pousse le joueur à penser le jeu comme une activité de la vie de tous les jours et qui prône certaines croyances erronées. Comme son nom l’indique, elle s’appuie sur une argumentation forte (Korn, et al., 2005; McMullan & Miller, 2009; Toneatto, Chapitre 2 Cadre Conceptuel et Hypothèses de Recherche 25 1999). De par son contenu, on peut ainsi s’attendre à ce que ce type de publicité influence le développement de biais cognitifs (Jiang, et al., 2009; Miyazaki, et al., 2001). Dans un deuxième temps, la publicité de type « évasion» invite les joueurs à se représenter dans les événements qui sont présentés. Ce type de publicité est caractérisé avant tout par l’affect et est donc susceptible de biaiser émotionnellement les joueurs. De plus d’après la théorie du modèle ELM de Petty et Cacioppo (1986b), l’implication du joueur envers les JHA vient jouer un rôle de modérateur dans ces relations. La publicité « argumentation », qui passe par la route centrale de persuasion du modèle ELM, affecte davantage les biais cognitifs sous un niveau plus élevé d’implication. Pour la publicité « évasion » en revanche qui passe par la route périphérique, c’est sous un niveau plus faible d’implication qu’elle affecte davantage les biais émotionnels. Ainsi, nous sommes en mesure d’énoncer les hypothèses suivantes : H1 : Si le joueur est faiblement impliqué envers les JHA, la publicité de type « évasion » a plus d’impact sur les biais émotionnels du joueur de JHA que s’il est fortement impliqué. H2 : Si le joueur est fortement impliqué envers les JHA, la publicité de type « argumentation » a plus d’impact sur les biais cognitifs du joueur de JHA que s’il est faiblement impliqué. De plus, nous nous attarderons à tester l’impact des publicités non seulement sur les attitudes envers les JHA et les intentions de jouer, mais aussi envers la marque Loto Québec, puisque rappelons que les JHA sont exclusivement des produits marqués et que l’attitude envers la marque est reconnue comme un antécédent des intentions comportementales (Keller, 1993). Lee et al. (2008) démontrent l’impact positif de l’exposition à la publicité de JHA sur les attitudes envers les JHA. Nous allons plus loin dans l’analyse en manipulant des publicités et en comparant les effets différentiateurs de deux types de publicités distincts. En effet, la publicité de type « argumentation » est susceptible de persuader le joueur à emprunter la voie centrale de persuasion qui, selon le modèle ELM, prône un changement d’attitudes stable dans le temps (Cialdini, et al., 1981). De fait, les caractéristiques de ce type de publicités amènent le joueur Chapitre 2 Cadre Conceptuel et Hypothèses de Recherche 26 à un traitement de l’information plus important que les publicités de type « évasion ». Ce dernier type de publicité s’appuie avant tout sur les émotions, et le récepteur du message publicitaire est donc amener à emprunter la voie périphérique de persuasion. Ainsi, nous testons donc les hypothèses suivantes: H3a : Si le joueur est fortement impliqué envers les JHA, la publicité de type « argumentation » provoque un changement d’attitudes plus positif envers Loto-Québec que la publicité de type « évasion ». H3b : Si le joueur est fortement impliqué envers les JHA, la publicité de type « argumentation » provoque un changement d’attitudes plus positif envers les JHA que la publicité de type « évasion ». H3c : Si le joueur est fortement impliqué envers les JHA, la publicité de type « argumentation » provoque un changement d’intention de jouer plus positif que la publicité de type « évasion ». Par la suite, la littérature sur la théorie cognitive semble apporter des preuves irréfutables sur le rôle des biais cognitifs dans le développement du jeu pathologique (e.g., Ferland, et al., 2002; Ladouceur, et al., 2000; Toneatto, 1999). Ces biais peuvent conditionner le joueur de sorte à ce qu’il développe une attitude favorable envers Loto-Québec et le jeu en général, et donc l’incite à consommer plus activement les produits de JHA. Découlent alors les hypothèses suivantes : H4a : Les biais cognitifs sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les attitudes envers Loto-Québec. H4b : Les biais cognitifs sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les attitudes envers les JHA. H4c : Les biais cognitifs sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les intentions de jouer. Chapitre 2 Cadre Conceptuel et Hypothèses de Recherche 27 Dans cette ligne de pensée, Cowley (2008) a montré l’importance du biais émotionnel dans l’intention de rejouer aux JHA. De plus, il est possible que des expériences émotionnelles antérieures affectent positivement les attitudes envers la marque, le jeu et les intentions comportementales (Stocco & Fum, 2008). Ainsi, ces biais sont susceptibles de jouer un rôle médiateur de la publicité sur les attitudes et intentions, dépendamment du niveau d’implication du joueur. Nous sommes donc en mesure de proposer les hypothèses suivantes : H5a : Les biais émotionnels sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les attitudes envers LotoQuébec. H5b : Les biais émotionnels sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les attitudes envers les JHA. H5c : Les biais émotionnels sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les intentions de jouer. Enfin, les recherches sur les JHA nous conduisent à penser que les attitudes envers les JHA ont un effet positif sur les intentions de jouer. Or la marque de JHA est une variable inhérente à notre étude dans la mesure où les produits de JHA sont des produits marqués. Ainsi, comme la littérature nous le suggère, l’attitude envers la marque influence les intentions comportementales, autrement dit chez les joueurs de JHA, l’attitude envers Loto-Québec a un impact sur l’intention de jouer. La dernière hypothèse à tester dans ce modèle est donc : H6 : L’attitude envers les JHA est un médiateur de l’effet de l’attitude envers Loto-Québec sur les intentions de jouer. À partir de toutes ces hypothèses, nous sommes à présent en mesure de développer un modèle conceptuel théorique qui discute les limites de la Chapitre 2 Cadre Conceptuel et Hypothèses de Recherche 28 littérature sur les liens supposés entre la publicité de JHA, les biais et le développement de comportements de jeu à risque. À partir de ce modèle, les conclusions de cette recherche nous permettront de questionner la dangerosité de la publicité dans le domaine des JHA, et l’importance des différents types de biais dans le développement des attitudes et intentions comportementales envers les JHA. Ce modèle s’inscrit donc dans le courant de recherche actuel, et sera en mesure de faire avancer la connaissance dans ce domaine. Biais émotionnels Publicités de JHA Attitudes envers LotoQuébec Attitudes envers les JHA - Évasion - Argumentation Biais cognitifs Implication envers les JHA FIGURE 1: MODÈLE DE RECHERCHE Intentions de jouer Chapitre 3 3 Méthodologie 29 MÉTHODOLOGIE 3.1 Introduction Le présent chapitre a pour objectif d’exposer et de justifier les choix méthodologiques qui permettent de tester notre cadre conceptuel et nos différentes hypothèses de recherche. Nous commençons par présenter le plan expérimental et les conditions expérimentales. Par la suite, nous justifions, par une analyse de contenu et une analyse de regroupement, le choix des stimuli publicitaires pour réaliser l’expérimentation. Nous continuons en détaillant la collecte de données ainsi que la procédure d’échantillonnage. Enfin, nous nous attardons sur la construction du questionnaire et les échelles utilisées pour mesurer les différentes variables de notre modèle de recherche. 3.2 Dimension et validité du plan expérimental La méthode utilisée pour vérifier nos hypothèses de recherche est l’expérimentation, qui nous permet de vérifier les relations de causes à effet entre les variables de notre modèle de recherche. Notre but, en effet, est de manipuler plusieurs types de publicités et de mesurer les différents impacts de ces publicités. Notre plan expérimental comprend un seul facteur, la variable manipulée, qui est le type de publicité. Ce facteur comprend trois niveaux : (1) la publicité de type « argumentation », (2) la publicité de type « évasion», et (3) la publicité de contrôle (publicité qui n’a aucune relation avec les JHA). Les unités testées sont des joueurs de JHA, soumis à ces publicités. Le groupe de contrôle est composé d’individus soumis à une autre publicité n’ayant aucun rapport avec les JHA. Le type de plan expérimental que nous utilisons est le plan « après seulement » avec un groupe de contrôle, qui est recommandé par certains chercheurs dans les tests d’efficacité publicitaire (Demirdjian, 1983). Le plan expérimental se présente de la façon suivante : Chapitre 3 Méthodologie 30 Type de publicité Conditions expérimentales Argumentation Condition 1 Évasion Condition 2 Contrôle Condition 3 FIGURE 2 : PLAN EXPÉRIMENTAL Afin de pouvoir tirer des conclusions valides de l’expérimentation, un certain arbitrage entre la validité interne et la validité externe est nécessaire. D’une part, « la validité interne se définit comme la capacité à attribuer les effets observés à la ou aux variables explicatives manipulées par le chercheur et non à d’autres facteurs externes » (Jolibert & Jourdan, 2006, p. 154). D’abord, MacKenzie et Lutz (1989) ont prouvé, dans le contexte de l’efficacité publicitaire, qu’une expérimentation en laboratoire mène les sujets à s’impliquer plus fortement dans l’évaluation des annonces que dans un contexte naturel. Ensuite, l’expérimentation en laboratoire permet de contrôler pour d’autres variables qui pourraient venir affecter les résultats. Comme dans l’étude de Zhao et Pechmann (2007), nous exposons donc les participants trois fois au stimulus publicitaire de chacune des conditions expérimentales. La validité interne de notre étude est ainsi renforcée. D’autre part, la validité externe se traduit par une généralisation possible des résultats, et une extrapolation des conclusions de la recherche à des situations ou des populations différentes (Jolibert & Jourdan, 2006). Une fois de plus, nous utilisons la même procédure que Zhao et Pechmann (2007). Les participants sont exposés à un épisode télévisé de « Un gars Une fille », programme télévisé diffusé à la télévision au Québec, d’une durée de 6 minutes et 30 secondes environ. C’est un programme humoristique qui met en scène la vie d’un couple québécois. Le thème est très proche de celui qui est utilisé dans l’étude de Zhao et Pechmann (2007), puisqu’ils exposent leurs participants à l’émission Friends. Il y a trois coupures publicitaires et dans chacune d’entre elles la publicité de Chapitre 3 Méthodologie 31 JHA est montrée une fois. De plus, des publicités de remplissage (filler advertisements) sont incluses dans les coupures publicitaires afin d’améliorer le réalisme de l’expérimentation (G. Zhao & Pechmann, 2007, p. 675). Enfin, comme nous le verrons plus tard, le questionnaire utilisé est un questionnaire en ligne, qui intègre la vidéo correspondant aux manipulations expérimentales. Tout cela nous permet donc d’augmenter la validité externe (ou écologique) de la recherche. Enfin, le plan expérimental choisi, autrement dit le plan « après seulement » avec groupe de contrôle, nous permet de contrôler pour certains biais qui pourraient limiter la validité interne et externe de notre étude. En effet, parmi les principaux biais identifiés par Campbell et Stanley (1963), ce type de plan contrôle pour les effets de sélection, de maturation et d’histoire puisque les sujets de l’étude sont répartis de façon aléatoire entre les conditions expérimentales (Jolibert & Jourdan, 2006). L’effet de sélection provient de la manière dont les participants sont affectés aux conditions expérimentales. L’effet d’histoire consiste en des événements extérieurs qui viennent perturber les mesures. En dernier lieu, l’effet de maturation est un biais qui est dû à des changements dans les unités expérimentales entre deux périodes de mesures. 3.3 Manipulation des stimuli En ce qui concerne la manipulation des stimuli, nous procédons de la manière suivante. Les cinq publicités de remplissage de 30 secondes chacune n’ont strictement aucun lien avec les JHA. On retrouve une publicité pour des services de téléphonie (publicité de remplissage 1), une pour du pain (publicité de remplissage 2), une pour des céréales (publicité de remplissage 3), une pour des services de petites annonces (publicité de remplissage 4) et enfin une pour des voitures (publicité de remplissage 5). Ces publicités ont été choisies non seulement afin de toucher un maximum de thèmes et types de messages publicitaires différents, mais aussi car elles sont récentes et sont diffusées à la télévision au Québec. Dans les conditions expérimentales 1 et 2, nous présentons une publicité de remplissage pour les deuxième et troisième coupures publicitaires. La publicité Chapitre 3 Méthodologie 32 commerciale de JHA est présente dans chacune des coupures publicitaires, et est montrée en dernier. Dans la condition de contrôle, nous présentons une publicité de remplissage à la première coupure publicitaire, puis deux publicités de remplissage aux deux coupures publicitaires suivantes. Le temps moyen d’exposition des participants à l’émission télévisée et aux publicités est de 8 minutes et 40 secondes. Enfin, l’ordre de présentation du stimulus publicitaire et des publicités de remplissage pour chacune des conditions expérimentales est déterminé de la façon suivante : Coupure publicitaire 1 Coupure publicitaire 2 Coupure publicitaire 3 Publicité de Publicité de Publicité Publicité Un Gars Publicité Un Gars Condition remplissage remplissage argumentation Une Fille argumentation Une Fille argumentation 1 1 2 Publicité évasion Condition 2 Publicité de Un Gars remplissage Une Fille 1 Publicité de Un Gars remplissage Une Fille 2 Publicité évasion Publicité évasion Publicité de Publicité de Publicité de Un gars Publicité de Condition Publicité de Un Gars remplissage remplissage remplissage 3 Une Fille remplissage 4 Une Fille remplissage 5 3 1 2 FIGURE 3 : MANIPULATION DES STIMULI À TRAVERS LES CONDITIONS EXPÉRIMENTALES 3.4 Choix des stimuli publicitaires 3.4.1 Introduction La manipulation expérimentale consiste, dans cette étude, à montrer des publicités commerciales de JHA, les stimuli, à des joueurs. La littérature, au travers d’analyses de contenu, nous a permis d’identifier deux types de publicités : « évasion» et « argumentation ». Cependant, aucune de ces études n’a procédé à des analyses de regroupement afin d’appuyer ces propos. Ainsi, dans le processus de choix des stimuli publicitaires, nous effectuons une analyse de contenu d’un échantillon de publicités de Loto-Québec, ainsi qu’une analyse de regroupement (ou analyse typologique) afin de confirmer la typologie Chapitre 3 Méthodologie 33 des publicités de JHA et de choisir les publicités les plus représentatives de chaque groupe. 3.4.2 Analyse de contenu L’analyse de contenu est une méthode qui permet de déterminer des thèmes ou des concepts récurrents. Elle permet une réduction de données en classifiant un grand nombre de mots ou d’expressions dans un nombre restreint de catégories (Weber, 1985). Un échantillon de convenance de 147 publicités télévisées et d’affichage de Loto-Québec, de 2005 à 2010, a été utilisé. Une grille d’analyse est développée afin de permettre de coder les différentes publicités en fonction de 6 variables nominales descriptives (produit, type de jeu, jeu solitaire, jeu stratégique, année, médium) et 50 variables binaires, qui indiquent la présence ou non de la variable dans la publicité. Ces variables sont rassemblées en trois groupes : la cible (sexe, âge, expertise), la forme (caractéristiques physiques et sensorielles, trame narrative et porte-parole) et la thématique (besoins sollicités, ton et registre, thème de la publicité, biais cognitifs). Cette grille d’analyse est construite principalement d’après l’étude de McMullan et Miller (2009), en reprenant un grand nombre de leurs variables identifiées. Par exemple, on retrouve des variables comme le type de vocabulaire employé, le thème de la publicité (winning, normalization, escapism, and community benefits) ou encore l’attrait (amusement et excitation). De plus, nous nous appuyons sur la théorie des besoins non-hiérarchiques proposée par Manfred Max-Neef (1991) afin de faire ressortir les besoins sollicités chez les joueurs de JHA et les éléments de satisfaction (satisfiers) provenant des JHA. Murray, Pauw et Holm (2005) reprennent cette théorie dans leur analyse. Nous utilisons certaines de leurs variables afin de comprendre plus en détails quels besoins le jeu peut combler au travers des publicités. Ainsi, les variables identifiées sont : les besoins de subsistance, de protection, d’affection, de participation, de compréhension, de création, d’identité et de liberté. Enfin, nous utilisons l’étude de Toneatto et al. (1997) pour distinguer les biais cognitifs. Chapitre 3 Méthodologie 34 Afin de suivre la même procédure que McMullan et Miller (2009), un livre de codage est développé avec les définitions des variables de la grille. Deux juges, de façon indépendante, sont exposés deux fois à chacune des publicités et codent les variables. Enfin, les deux juges se retrouvent afin de s’entendre à 100% sur chaque variable pour chaque publicité. Dans le cas où les auteurs ne sont pas d’accord, ils regardent plusieurs fois la publicité en question jusqu’à ce qu’ils arrivent à un accord. 3.4.3 Analyse factorielle et analyse de regroupement Une fois le consensus atteint, nous procédons à une analyse factorielle sur deux des trois groupes de variables : la forme et la thématique. La cible étant composée de seulement six variables binaires, une analyse factorielle n’est pas nécessaire. Nous suivons la même procédure que Bloch, Ridgway et Dawson (1994) afin de déterminer de nouveaux facteurs pour les groupes de variables « thématique » et « forme », puis distinguer des groupes de publicités en fonction du thème (clusters), et enfin établir s’il existe des différences significatives entre ces groupes de publicités sur la forme et l’audience visée (la cible). D’abord, une analyse factorielle en composante principale sur la thématique des publicités est réalisée. Le diagramme des valeurs propres (scree plot) ainsi qu’une analyse parallèle1 (Patil, Singh, Mishra, & Donovan, 2008) nous permet de distinguer 4 facteurs, expliquant 63.5% de la variance initiale: (1) le facteur évasion (prestige, liberté, évasion, loisir, identité), (2) le facteur compétence (compétence au jeu, illusion de contrôle, et compréhension), (3) le facteur socialisation (affection, attraction sociale et participation), et (4) le facteur sensation (sensation et sentiments, excitation et éthos du gain). Le tableau suivant regroupe les différents facteurs avec les coefficients (loadings) des items 1 L’analyse parallèle est une méthode qui se veut plus rigoureuse que celles basées sur la valeur propres égale à 1 et du diagramme des valeurs propres (scree plot). Il s’agit de créer une base de données aléatoires avec le même nombre de variables et d’observations que la base de données originale. On procède ensuite à l’analyse en composantes principales de ces données et on extrait les valeurs propres. Lorsque les valeurs propres issues des données aléatoires sont plus grandes que celles observées, on conclut qu’il s’agit de facteurs qui représentent de l’erreur aléatoire. Chapitre 3 Méthodologie 35 pour chacun des facteurs, après rotation Varimax. On y trouve aussi le pourcentage de publicités comprenant chaque item (thème de la publicité), ainsi que les valeurs propres des facteurs (Eigenvalues). Thèmes des publicités % de publicités Facteur 1 Facteur 2 Facteur 3 Facteur 4 avec thèmes Évasion Compétence Socialisation Sensation Prestige 28.6 .80 -.19 -.06 .06 Liberté 40.8 .78 -.30 -.04 .17 Evasion 42.2 .75 -.32 -.10 .00 Loisir 49.0 .69 .26 .08 .01 Identité 36.1 .62 .25 .13 -.11 Compétences au jeu 22.4 -.07 .86 -.15 -.12 Illusion de contrôle 22.4 -.11 .83 -.12 .03 Compréhension 10.9 .01 .78 -.02 .08 Affection 20.4 .07 -.17 .82 -.02 Attraction sociale 25.2 .02 -.07 .82 -.03 Participation 19.0 -.07 .00 .68 .04 Sensation et sentiments 25.2 -.06 .15 .12 .77 Excitation 25.9 -.01 -.01 -.07 .75 L'éthos du Gain 58.5 .37 -.31 -.08 .58 3.37 2.27 1.75 1.50 Valeurs propres (Eigenvalues) TABLEAU 1 : FACTEURS DU THÈME DES PUBLICITÉS ET POURCENTAGE DE PUBLICITÉS UTILISANT CES THÈMES Ainsi, on déduit de ce tableau par exemple que 58.5% des publicités analysées font référence à l’éthos du gain, que 22.4% des publicités utilisent des arguments reliés à certains biais cognitifs (compétences au jeu et illusion de contrôle), que presque 26% jouent sur les émotions (sensation et sentiment, excitation) ou encore que 42.4% font appel à l’évasion dans leur message. Cette factorisation permet de distinguer des thèmes qui sont similaires à ceux évoqués dans la littérature concernant la publicité de JHA (Korn, et al., 2005; McMullan & Miller, 2009). Le facteur évasion fait appel à certains besoins de la théorie de Max-Neef (1991) dont ceux de liberté, de loisir, de prestige ou encore d’identité. Le facteur compétence correspond aux cognitions et à certains biais cognitifs présents chez les joueurs (Toneatto, et al., 1997). Le troisième facteur, la socialisation, est en rapport direct avec un thème tout aussi important dans la Chapitre 3 Méthodologie 36 littérature sur les publicités de JHA (McMullan & Miller, 2009): les bénéfices communautaires (Community benefits). Enfin, le facteur sensation est en lien avec les émotions et l’éthos du gain, thèmes indissociables des publicités de JHA. Ces quatre facteurs sont donc représentatifs de quatre types de thématiques publicitaires différents utilisés dans les publicités de JHA. Par la suite, une analyse de regroupement est effectuée en suivant les mêmes étapes que l’étude de Bloch et al. (1994). Appliquée à notre étude, l’analyse de regroupement nous permet de regrouper des publicités entre elles, « de telle sorte que chaque groupe soit le plus homogène possible sur les variables utilisées et différent des autres groupes sur ces mêmes caractéristiques » (Jolibert & Jourdan, 2006). Comme le conseille Mullet (1999), il est préférable d’utiliser les facteurs obtenus à partir de l’analyse factorielle pour réaliser une analyse de regroupement. Ainsi, nous procédons à une classification des publicités en “niches” (clusters) en utilisant pour cela les scores factoriels provenant de la régression des quatre facteurs trouvés précédemment. Dans un premier temps, nous utilisons la méthode de Ward avec la distance euclidienne au carré pour calculer la distance entre deux publicités. L’application d’un scree test et l’analyse du dendogramme nous donne une solution initiale à quatre ou à cinq groupes. La méthode non-hiérarchique est effectuée dans un deuxième temps: les centroïdes (ou moyennes) de la solution de Ward sont utilisés comme solution initiale à la procédure de regroupement K-Means (McQueen, 1967), puisque cette méthode requiert que les chercheurs connaissent préalablement le nombre de groupes (Jolibert & Jourdan, 2006). Cette procédure nous permet d’obtenir une plus grande précision dans l’affectation des publicités dans chaque classe, en minimisant la variance au sein de chaque groupe (Jolibert & Jourdan, 2006). Enfin, en utilisant les résultats de cette procédure, nous choisissons le résultat à cinq groupes, dans la mesure où une analyse de variance subséquente prouve que les cinq groupes sont bien différenciés sur chacun des quatre facteurs (ce qui n’est pas le cas de la solution à quatre groupes) (tableau 2). En effet, à un niveau de confiance de 95%, tous les tests F4,142 sont significatifs (toutes les p-values sont inférieures à 0.001). Chapitre 3 Méthodologie 37 TABLEAU 2 : ANOVA DES GROUPES OBTENUS SUR LES FACTEURS Le tableau 3 nous permet de décrire en détail chaque groupe de publicités en fonction des différents facteurs. Nous suivons le même cheminement que Bloch et al. (1994). Ainsi, chaque cellule contient deux nombres. Le premier correspond au pourcentage de publicités au sein de chaque groupe qui rapporte une « forte présence » du facteur. On considère qu’un facteur est fortement présent lorsqu’au moins deux items (thèmes) constituant chaque facteur sont présents (variable binaire codée 1) dans la publicité. Par exemple, 100% des publicités du groupe 1 « évasion » possèdent au moins deux items du facteur « évasion », ou encore que 95.8% des publicités du groupe 5 « argumentation » possèdent au moins deux items du facteur « compétence ». Le deuxième nombre correspond à un indice qui permet de comparer la présence d’un facteur dans un groupe par rapport aux autres et par rapport à l’échantillon total. Ainsi, l’indice 100 correspond à la présence d’un facteur dans l’échantillon total. Pour illustrer ces propos, 51.7% des publicités de l’échantillon total rapportent une forte présence du facteur « évasion » (indice 100). Puisque 100% des publicités dans le groupe 1 font appel au facteur évasion, et que l’indice 100 correspond à un pourcentage de 51.7%, alors on obtient un indice 193 (100%/51.7%) pour le facteur évasion dans le groupe 1. Cet indice est un bon indicateur de l’importance du facteur selon les groupes, dans la mesure où il permet de mettre en perspective des résultats. Par exemple, l’indice 541 du facteur « compétence » dans le groupe « argumentation » montre que ce groupe s’appuie cinq fois plus sur le facteur « compétence » que la moyenne de l’échantillon total. Enfin, le test du chi-carré nous permet d’évaluer si un facteur varie de façon significative entre chaque groupe, et ce à un niveau de confiance de 95% (les p- Chapitre 3 Méthodologie 38 values sont inférieures 0,001). Les résultats des tests nous confortent dans l’idée que la solution à cinq facteurs est idéale, et qu’elle reflète bien les différentes caractéristiques de chacun des groupes. Echantillon total Groupe 1 Évasion Groupe 2 Sensations partagées Groupe 3 Groupe 4 Groupe 5 Bonheur chiSocialisation Argumentation lié au gain carré pvalues Facteurs 1. Evasion 51.7% 100 100.0% 193 72.7% 141 15.4% 30 21.6% 42 29.2% 56 68 0.001 2. Compétence 17.7% 6.1% 0.0% 0.0% 0.0% 95.8% 107.5 0.001 100 34 0 0 0 541 19.0% 4.1% 100.0% 0.0% 40.5% 0.0% 127.6 0.001 100 22 526 0 213 0 31.3% 100 32.7% 104 90.9% 290 57.7% 184 0.0% 0 20.8% 66 54.41 0.001 147 49 11 26 37 24 100% 33.3% 7.5% 17.7% 25.2% 16.3% 3. Socialisation 4. Sensation Taille de Cluster % de l'échantillon total TABLEAU 3 : DESCRIPTION DES GROUPES DE PUBLICITÉS En conclusion, on remarque l’existence de cinq groupes de publicités distinctes. Le groupe 1 « évasion » axe sa communication avant tout sur l’évasion (indice de 193). On remarque aussi la présence relativement élevée du facteur « sensation » avec un indice relativement élevé (indice de 104). C’est aussi le groupe le plus important avec 33.3% des publicités totales. Les publicités du groupe 2 « sensations partagées » font appel à la socialisation et aux sensations du joueur, mais il est moindrement représenté (7.5% des publicités). C’est essentiellement le facteur sensation qui explique le groupe 3 « bonheur lié au gain » et qui regroupe 17.7% des publicités. 25.2% des publicités font parti du groupe « socialisation » (du facteur « socialisation »). Enfin, le groupe argumentation totalise 16.3% des publicités et se caractérise par un indice du facteur compétence extrêmement fort (541). Chapitre 3 Méthodologie 39 3.4.4 Comparaison des groupes de publicités obtenus En ce qui concerne le deuxième groupe de variables de l’analyse de contenu, le même procédé est effectué. L’analyse factorielle en composante principale, après rotation Varimax nous donne un résultat à deux facteurs qui expliquent 53.3% de la variance initiale. Facteur 1 Dimension musicale .84 Facteur 2 Dimension narrative et visuelle .02 Musique .80 -.34 Joyeux .73 -.13 Bruit de fond .64 .16 Rythme d'exécution .64 .03 Langage neutre -.16 .84 Conversation .19 -.81 Personnage ordinaire .11 -.64 Luminosité .15 .57 Contraste .09 .53 Valeurs propres (Eigenvalues) 3.14 2.20 Items de la forme Tempo TABLEAU 4 : FACTEURS DE LA FORME On observe donc deux facteurs qui ont trait à (1) la dimension musicale des publicités (tempo, musique, joyeux, bruit de fond, rythme d’exécution), et (2) leur dimension narrative et visuelle (langage neutre, conversation, personnage ordinaire, luminosité, et contraste). La dernière étape de notre analyse consiste à évaluer s’il existe des différences significatives entre chaque groupe de publicités concernant la forme de la publicité, ainsi que sa cible. Pour les deux nouvelles variables de la forme, obtenues par la méthode de la régression, nous procédons à une MANOVA puisque ces variables sont continues. Ainsi, la variable manipulée correspond aux différents groupes de publicité (à cinq niveaux), et les deux variables dépendantes sont les deux facteurs de la forme, soit la dimension musicale et la dimension narrative et visuelle. Le test nous donne les résultats suivants : Chapitre 3 Facteur de la forme Méthodologie Groupe 1 Évasion Groupe 2 Sensations partagées Groupe 3 Bonheur lié au gain 40 Groupe 4 Groupe 5 Socialisation Argumentation F de Fisher p-values Dimension musicale 0.218 -0.146 -0.194 0.160 -0.197 1.371 0,247 (ns.) Dimension narrative et visuelle -0.123 -0.143 0.375 -0.275 0.076 2.055 0,09 (ns.) Note: Les entrées représentent les scores factoriels moyens du facteur spécifié par groupes test Multivarié F = 1,710, p = 0,090 ns. (trace de Pillai) TABLEAU 5 : MANOVA DES TYPES DE PUBLICITÉS SUR LA FORME Les résultats de la MANOVA, en utilisant la trace de Pillai, ne sont pas significatifs à un niveau de confiance de 95% (F=1.710, p-values = 0.09). Autrement dit, il n’y a pas de différence significative entre les deux dimensions de la forme, pour les cinq groupes de publicités. De plus, les tests univariés ANOVA nous indiquent qu’il n’y pas non plus de différences significatives entre les groupes de publicités sur les deux dimensions de la forme, à un niveau de confiance de 95% (F4,142=1.371, p-values=0.247 pour la musique, et F4,142=2.055, p-values=0.09 pour la narration et le visuel). Cela nous permet de conclure que les groupes de publicités ne diffèrent pas sur leur forme. Ce résultat est primordial dans notre choix de publicités de JHA à manipuler, puisque en effet, dans la suite de la recherche, la forme des publicités choisies n’influence pas nos manipulations. Pour le dernier groupe de variables de l’analyse de contenu, la cible, nous testons les différences entre les groupes en utilisant le test du Chi-carré dans la mesure où ces variables sont binaires. Par exemple, le sexe contient deux variables, « femme » si la publicité vise les femmes, « homme » si la publicité vise les hommes, et idem pour les tranches d’âge et l’expertise. En effet, une publicité, par exemple, peut viser autant les femmes que les hommes. Ainsi, il y a six variables : homme, femme, 13-18 ans, 19-34 ans, âge +35 ans, et expertise. Cette dernière variable sert à expliquer si la publicité s’adresse à des experts, autrement dit si des connaissances par rapport aux jeux sont nécessaires pour y jouer. Chapitre 3 Méthodologie Groupe 1 Facteur de la forme 1. Femme Effectif observé Effectif théorique 2. Homme Effectif observé Effectif théorique 3. Age 13-18 Effectif observé Effectif théorique 4. Age 19-34 Effectif observé Effectif théorique 5. Age +35 Effectif observé Effectif théorique 6. Expertise Effectif observé Effectif théorique Évasion Groupe 2 Groupe 3 41 Groupe 4 Groupe 5 Sensations Bonheur lié Socialisation Argumentation Chi carré partagées au gain 39 8 22 32 13 38.0 8.5 20.2 28.7 18.6 44 11 23 34 23 45.0 10.1 23.9 34.0 22.0 4 1 4 9 8 8.7 1.9 4.6 6.5 4.2 47 11 26 36 23 47.7 10.7 25.3 36.0 23.3 48 11 24 35 24 47.3 10.6 25.1 35.7 23.2 5 1 6 12 21 15.0 3.4 8.0 11.3 7.3 p-values 10.245 0.036 2.157 0.707 (ns.) 8.861 0.065 1.567 0.815 (ns.) 3.418 0.491 (ns.) 49.325 0.000 TABLEAU 6 : TEST DU CHI-CARRÉ SELON TYPE DE PUBLICITÉ SUR LA CIBLE D’après les résultats, à un niveau de confiance de 95%, il n’y a pas de différence significative, pour les hommes (Chi-carré=2.157, p-value=0.71), les 19-34 ans (Chi-carré=1.567, p-value=0.81) et les 35 ans et plus (Chi-carré=3.418, pvalue=0.49) entre les différents groupes de publicités. Toutefois, les conclusions diffèrent pour les femmes, les adolescents et les experts. En effet, il existe des différences significatives entre les groupes de publicités quand la cible est une femme (Chi-carré=10.245, p-value=0.03), quand la cible est experte (Chicarré=49.325, p-value=0.00), et quasi significative pour la cible des 13-18 ans (Chi-carré=8.861, p-value=0.06). Ainsi, en comparant les effectifs observés et les effectifs théoriques pour chacune de ces cibles entre les groupes, on remarque que les experts sont sous-représentés dans le groupe de publicité de type «évasion». De plus, les adolescents sont sous-représentés dans les publicités de type « évasion», et les femmes sous-représentées dans les publicités de type « argumentation ». En revanche, ce dernier type de publicité cible plus les adolescents et les experts : les jeunes (13-18 ans) et les experts y sont surreprésentés. Certains de ces résultats vont dans le sens de nos hypothèses. En effet, le biais émotionnel consiste à se rappeler plus des moments positifs liés aux JHA. Or, on peut supposer qu’un adolescent n’a jamais vécu de tels moments puisque les Chapitre 3 Méthodologie 42 jeux sont illégaux avant l’âge de 18 ans au Québec et donc que les publicités qui font appel à l’évasion ciblent moins les jeunes. Aussi, les publicités « argumentation » visent plus les experts que les autres. Rappelons que ces publicités sont sensées, d’après nos hypothèses, biaiser cognitivement les joueurs. Dans la mesure où la compréhension du jeu, les compétences des experts et leurs cognitions quant au jeu sont des éléments qui définissent ce type de publicités, ce résultat est tout à fait probant. Les conclusions de ces analyses permettent de combler une lacune dans la littérature concernant une typologie des publicités de JHA. Même si plusieurs auteurs avaient distingué des thèmes récurrents dans ces publicités, leurs analyses n’ont pas été poussées plus loin (Korn, et al., 2005; McMullan & Miller, 2009). Par conséquent, il existe cinq types de publicités qui font appel à des thèmes bien distincts : (1) l’évasion, (2) les sensations partagées, (3) le bonheur lié au gain, (4) la socialisation, et (5) l’argumentation. Certains des noms ayant été empruntés à notre revue de la littérature, ils expriment toutefois entièrement le contenu des thèmes. Ainsi, le premier et le dernier groupe représentent de façon adéquate les deux types de publicités que nous avions discriminés dans la littérature. La validité externe de notre analyse de regroupement est par conséquent élevée (Jolibert & Jourdan, 2006). Il est essentiel de noter que ces deux groupes ont des caractéristiques qui nous amènent à les considérer comme les plus importantes à étudier. D’abord, les publicités « évasion» sont tout simplement les plus nombreuses : 33.3% de l’échantillon total, et donc indispensables dans une étude sur la publicité de JHA. Quant au groupe « argumentation », il cible avant tout les adolescents et les experts. On note qu’une grande partie de la littérature sur le jeu pathologique s’intéresse au jeu chez les adolescents puisqu’ils sont plus enclins à devenir des joueurs pathologiques (e.g., Delfabbro & Thrupp, 2003; Derevensky, et al., 2010; Derevensky, et al., 2007), d’où l’intérêt d’étudier plus particulièrement ces publicités. 3.4.5 Choix et vérification des stimuli Notre expérimentation requiert un stimulus publicitaire par condition expérimentale. La prochaine étape est donc le choix, parmi les deux groupes de Chapitre 3 publicités Méthodologie retenus, de deux publicités 43 les plus représentatives des caractéristiques du groupe. Ainsi, il va de soi de choisir la publicité qui est le plus au centre de chacun des deux groupes (clusters). En effet, la méthode de classification utilisée a permis de regrouper les publicités par groupe sur la base de leur homogénéité au sein des groupes, et de leur hétérogénéité entre les groupes (Jolibert & Jourdan, 2006). Les centres des groupes, autrement appelés barycentres, ont été déterminés par le processus hiérarchique utilisant la méthode de Ward. Dans les deux groupes, il nous suffit alors de déterminer la publicité la plus proche du barycentre, c’est-à-dire celle dont la distance avec le barycentre est la plus faible. Groupe de publicité Distance par rapport au barycentre des groupes Argumentation 0.51 Paquet Voleur Évasion 0.41 Super 7 Année Type de média Loterie instantanée 2010 TV Tirage au sort 2008 TV Nom du jeu Type de jeu FIGURE 4 : CHOIX ET DESCRIPTION DES STIMULI PUBLICITAIRES Ainsi, au sein du groupe « argumentation», c’est la publicité « Paquet Voleur » qui est la plus proche du centre (distance de 0.51), et donc la plus représentative. C’est une publicité télévisée de 2010, pour une loterie instantanée. Elle met en scène une femme dans la cinquantaine, qui prend sur le fait un voleur dans sa maison. Elle lui dit qu’elle refuse le vol. Ce dernier lui pose alors une question à choix multiple, et si elle répond juste, il partira sans rien voler. C’est d’ailleurs le cas, et il repart de la maison les mains vides. Apparaît alors une description du jeu de JHA en question. Cette publicité, de par sa description, est bien en lien avec les caractéristiques du groupe « argumentation ». La publicité « évasion » est la mieux représentée par la publicité télévisée « Super 7 » (distance de 0.41), un jeu de tirage au sort datant de 2008. Une femme est assise sur un canapé et lit un livre sur le tennis dans une belle demeure. Un homme, sans doute son mari, est allongé sur ce même canapé, et Chapitre 3 Méthodologie 44 pose sa tête sur les genoux de la femme. De la musique classique se fait entendre. La femme tourne la tête, et demande alors à ce qui semble être un orchestre (on ne peut pas le voir), de jouer moins fort. Cette publicité nous amène à penser que ces deux personnes ont gagné le gros lot de 12 millions de dollars et qu’ils peuvent donc se permettre de dépenser leur argent à leur guise (engager un orchestre chez soi). Il est ainsi tout à fait plausible de penser qu’on assiste à une certaine évasion au travers de ce message, car ce dernier incite le spectateur à se mettre à la place du gagnant. Pour plus de détails, une illustration de ces deux publicités est présentée à l’annexe 1. Enfin, nous réalisons un pré-test pour valider ce choix. Ainsi, nous décidons de présenter les deux publicités choisies à des personnes qui répondent ensuite, de façon binaire, à 8 énoncés randomisés pour chacune des publicités. Chaque énoncé est une description de chacun des items correspondant aux facteurs les plus importants au sein des groupes de publicités retenues. Par exemple, pour le groupe « argumentation », le facteur principal est la compétence. Ce facteur comprend 3 items : compétence au jeu, illusion de contrôle, et compréhension. Pour le groupe « évasion », le facteur principal est l’évasion, qui comprend 5 facteurs : prestige, liberté, évasion, loisir, et identité. Chacun des répondants doit cocher oui si le thème utilisé, i.e. la description de l’item, est présente dans la publicité, ou non si inversement. Le facteur manipulé, le type de publicité, est un facteur répété : un individu est exposé à la publicité « évasion », répond aux 8 énoncés. Ensuite, il est exposé à la publicité « argumentation », puis répond une fois de plus aux 8 énoncés. L’utilisation d’un facteur répété nous permet de réduire le nombre de participants à l’étude puisque chaque participant est exposé aux deux conditions expérimentales. Enfin, on effectue une randomisation du facteur répété afin de ne pas influencer les résultats. La collecte de données a été effectuée sur le web, à partir d’un échantillon de convenance de 32 personnes. Le taux de réponse est de 62.5%, soit de 20 questionnaires complétés. Le questionnaire du pré-test des stimuli est présenté à l’annexe 2. La figure 5 illustre le plan expérimental pour le pré-test. Chapitre 3 Méthodologie 45 Type de publicité Argumentation Évasion Stimuli Paquet Voleur Super 7 FIGURE 5 : PLAN EXPÉRIMENTAL POUR LE PRÉTEST DES STIMULI Une analyse factorielle en composante principale avec rotation Varimax est effectuée à partir des résultats du pré-test. L’analyse du diagramme des valeurs propres (scree test) et l’analyse parallèle nous donnent deux facteurs qui expliquent 62.8% de la variance initiale. Facteur Compétence Facteur Évasion Illusion de contrôle .81 -.28 Compréhension .77 -.18 Compétences au jeu .73 .10 Prestige -.60 .60 Evasion -.14 .71 Identité .12 .70 Loisir -.58 .64 Liberté -.46 .64 Valeurs propres (Eigenvalues) 3.86 1.16 Items de l'argumentaire TABLEAU 7 : FACTEURS DES ITEMS DU PRÉ-TEST DES STIMULI Les résultats prouvent l’existence des deux dimensions des énoncés : la compétence et l’évasion. À partir de l’analyse factorielle, deux nouvelles variables, compétence et évasion, sont créées en utilisant la méthode de la régression. Suite à cela, nous cherchons à savoir si les deux publicités choisies sont bien différentes sur ces deux variables. Nous effectuons alors une comparaison de moyennes pour échantillons appariés, en utilisant un t-test pour échantillon appariées. Les résultats sont les suivants : Chapitre 3 Méthodologie 46 Différences appariées Intervalle de confiance 95% de la Erreur différence Moyenne Ecart-type standard moyenne Inférieure Supérieure t ddl Sig. (bilatérale) Paire 1 1 - 2 1.40 .96 .21 .95 1.85 6.51 19 .000 Paire 2 3 - 4 -.96 1.36 .30 -1.60 -.32 -3.16 19 .005 Note: 1 Compétence pour la publicité Argumentation 2 Compétence pour la publicité Évasion 3 Evasion pour la publicité Argumentation 4 Evasion pour la publicité Évasion TABLEAU 8 : COMPARAISON DE MOYENNES APPARIÉES POUR ARGUMENTATION ET ÉVASION Pour le facteur « compétence », la différence entre les deux publicités est significative, à un niveau de confiance de 95% (t=6.51, p-value=0.000). La moyenne de la différence est positive (M=1.40) et nous indique que la publicité « argumentation » s’appuie plus sur les compétences que la publicité « évasion ». De même, la différence des moyennes des publicités est significative pour le facteur « évasion » (t=-3.16, p-value=0.005). La moyenne négative (M=-0.96) montre que l’évasion est plus présente dans les publicités « évasion ». Ces résultats sont totalement en accord avec nos suppositions, et par conséquent, nous pouvons affirmer que les publicités choisies présentent des caractéristiques bien distinctives et sont représentatives des groupes. En conclusion, la publicité « Super 7 » est le stimulus qui est retenu pour tester la condition expérimentale « évasion » puisqu’elle incite les gens à se mettre à la place des gagnants et est susceptible de provoquer des biais émotionnels. La publicité « paquet voleur » quant à elle est utilisée pour tester la condition expérimentale « argumentation ». En effet, elle présente des arguments enclins à stimuler des biais cognitifs chez le joueur. Chapitre 3 Méthodologie 47 3.5 Collecte de données et échantillonnage La population cible de notre étude est constituée de joueurs de JHA du Québec de plus de 18 ans. Les sujets de notre échantillon ayant participé à cette étude ont été recrutés par une firme de sondage indépendante, de manière aléatoire. L’échantillonnage a été effectué à partir de panels classiques, autrement dit un échantillon de personnes représentatif de la population totale des Québécois de plus de 18 ans, recruté sur une longue période en vue d’être interrogé (Jolibert & Jourdan, 2006). La méthode d’échantillonnage est probabiliste, et procède à un tirage aléatoire simple. Afin de nous assurer d’interroger seulement des joueurs, trois questions filtres ont été intégrées en début de questionnaire, afin de déterminer leur comportement de jeu. Ces questions proviennent de l’étude de Moore et Ohtsuka (1997) et ont été modifiées pour répondre aux objectifs de la présente étude. Une première échelle mesure la fréquence de jeu et comporte 9 items, qui représentent 9 types différents de JHA, avec par exemple « Je joue aux cartes pour de l’argent » ou encore « J’achète des billets de loterie ». C’est une échelle de Likert à 7 points, où 1 correspond à « Jamais » et 7 à « une fois par semaine ou plus ». Pour cette question, un répondant est considéré comme non-joueur s’il répond « jamais » aux 9 items. Ensuite, la deuxième échelle est ordinale à 7 points. Elle mesure le plus gros montant d’argent dépensé en une semaine : 1 correspond à « Je n’ai jamais joué aux JHA » et 7 correspond à « Plus de 5000$ ». De même, si le sujet répond « Jamais », il est alors exclu de la collecte. Enfin, la troisième échelle, ordinale, mesure le montant total dépensé les douze derniers mois (7 points). Si le sujet répond 1 (« rien ») ou 2 (« moins de 50$ »), il est également exclu. Cette première phase a permis de recruter 328 individus, dont 275 ont complété le sondage, soit un taux de réponse de 83.8%. Sur ces 275 individus, seuls 102 ont été considérés comme des joueurs de JHA selon les trois questions filtres expliquées ci-dessus, soit un taux de 37.1%. Les unités expérimentales de notre échantillon ont été réparties aléatoirement entre chaque condition expérimentale. Chapitre 3 Méthodologie Conditions expérimentales 48 Nombre de participants Condition 1 (Argumentation) 34 Condition 2 (Évasion) 34 Condition 3 (Groupe de contrôle) 34 Total 102 TABLEAU 9 : ÉCHANTILLONNAGE La collecte de données s’est déroulée sur deux semaines. Une lettre d’instruction introduisant le thème de l’étude fournit les informations nécessaires pour participer à l’étude. L’objectif de la recherche est présenté de façon partielle afin de ne pas biaiser les résultats. En effet, dans la dernière question du questionnaire, on demande aux répondants leur opinion concernant le but de l’étude. Les sujets doivent répondre à un questionnaire auto-administré en ligne de 22 questions, questionnaire dans lequel est intégrée la vidéo correspondant aux manipulations expérimentales. Ils sont prévenus que la durée de complétion du sondage est d’environ 40 minutes. Enfin, ils reçoivent de la part de la firme de sondage des points récompenses pour avoir complété le questionnaire, qu’ils peuvent par la suite échanger pour obtenir des prix déterminés par la firme indépendante. Le tableau suivant présente les principales caractéristiques démographiques et sociales des répondants selon les conditions expérimentales, ainsi que les résultats du test du Chi-carré, qui permettent de déterminer s’il existe des différences significatives, à un niveau de confiance de 95%, entre les différentes conditions expérimentales. Ces caractéristiques sont le sexe, l’âge, le statut social, le niveau de scolarité, l’occupation et le revenu. De plus, la gravité des problèmes de jeu des joueurs est évaluée par le PGSI (Problem Gambling Severity Index). Cet index est une composante unidimensionnelle du Canadian Problem Gambling Inventory, développé par Ferris et Wynne (2001). Holtgraves (2009) démontre les qualités psychométriques de l’index (alpha de Cronbach de 0.855) et valide l’échelle. Il existe d’autres mesures de la pathologie du jeu qui ont fait office de références jusqu’à peu : le SOGS et le DMS-IV (Stinchfield, Chapitre 3 Méthodologie 49 2002, 2003). Cependant, ces mesures ont été remises en cause récemment, premièrement par rapport à leur validité, puisqu’elles ont été développées à partir d’échelles existantes à propos d’autres pathologies. Deuxièmement, plusieurs chercheurs questionnent leur utilisation hors d’un cadre clinique. Or, en plus d’être valide et de posséder une bonne cohérence interne, le PGSI a été développé explicitement pour une utilisation sur une population générale (horsclinique) (Ferris & Wynne, 2001; Holtgraves, 2009). Le PGSI présente 9 items, mesurés sur une échelle à 4 points. Les scores totaux nous permettent de définir quatre catégories de joueurs : (1) les joueurs non-problématiques, (2) les joueurs à faible niveau de problèmes avec peu ou pas de conséquences négatives, (3) les joueurs à niveau modéré de problèmes qui ont quelques conséquences négatives, et (4) les joueurs problématiques avec des conséquences négatives et une possible perte de contrôle. Dans le tableau 10, les résultats de tous les tests du Chi-carré nous permettent de continuer dans les analyses sans avoir à contrôler pour les variables sociodémographiques et psychologiques. En effet, tous ces tests sont nonsignificatifs et les p-values de tous les tests sont supérieures au seuil de signification pour un niveau de confiance de 95%. Par conséquent, il n’existe pas de différences significatives entre chaque condition pour ces caractéristiques. Chapitre 3 Méthodologie Caractéristiques Sexe Âge Statut Occupation 1 50.0 2 52.9 3 73.5 Homme 50.0 47.1 26.5 18 à 24 ans 11.8 2.9 5.9 25 à 34 ans 35 à 44 ans 11.8 17.6 2.9 23.5 8.8 23.5 45 à 54 ans 14.7 20.6 26.5 55 à 64 ans 65 ans et plus 26.5 17.6 32.4 17.6 29.4 5.9 Célibataire Marié(e ) 44.1 38.2 29.4 52.9 44.1 44.1 Divorcé(e ) 14.7 8.8 11.8 2.9 0.0 5.9 2.9 0.0 0.0 Primaire Secondaire 2.9 26.5 0.0 35.3 0.0 35.3 Cégep 44.1 29.4 32.4 Premier cycle Deuxième cycle 20.6 2.9 29.4 2.9 26.5 0.0 Troisième cycle Pas de réponse 0.0 2.9 2.9 0.0 2.9 2.9 5.9 44.1 5.9 38.2 0.0 55.9 Étudiant(e ) Employé(e ) 5.9 17.6 5.9 Retraité(e ) Pas de réponse 44.1 0.0 32.4 5.9 23.5 14.7 moins de 20 000 de 20 000 à 39 999 5.9 41.2 8.8 20.6 5.9 23.5 de 40 000 à 59 999 11.8 32.4 20.6 de 60 000 à 79 999 de 80 000 à 99 999 20.6 2.9 11.8 11.8 20.6 14.7 100 000 ou plus 14.7 8.8 5.9 Pas de réponse 2.9 5.9 8.8 58.8 64.7 70.6 20.6 8.8 11.8 11.8 17.6 5.9 11.8 11.8 5.9 Sans emploi / Recherche Revenu avant impôts (en $) Problème de jeu (PGSI) Conditions (Données en %) Femme Veuf(ve) Pas de réponse Niveau de Scolarité 50 Joueurs nonproblématiques Niveau faible Niveau modéré Joueurs problématiques Note: n.s. équivaut à non-significatif TABLEAU 10 : CARACTÉRISTIQUES DES RÉPONDANTS Chi carré 4.614 p-values 0.100 (n.s.) 7.742 0.654 (n.s.) 6.576 0.583 (n.s.) 7.251 0.841 (n.s.) 13.997 0.082 (n.s.) 12.615 0.398 (n.s.) 2.654 0.851 (n.s.) Chapitre 3 Méthodologie 51 3.6 Questionnaire et échelles Le questionnaire comporte 22 questions réparties en 5 sections. Une phase de pré-test auprès de 86 personnes, échantillon de convenance qui prenait en compte tant des joueurs que des non-joueurs, nous a permis d’obtenir dans un premier temps des commentaires sur la compréhension du questionnaire et ainsi d’améliorer la qualité et la formulation des questions, ainsi que la qualité des traductions en français de certaines échelles. Dans un deuxième temps, plusieurs analyses de corrélation ont été effectuées, ce qui nous a confortés dans le choix des échelles et des hypothèses. La version finale du questionnaire est présentée à l’annexe 3. La majorité des questions portent sur les variables inhérentes à notre modèle, et proviennent d’échelles de mesure testées et validées dans la littérature scientifique. Or, « le choix d’une échelle nécessite de recenser l’ensemble des indicateurs possibles en se basant sur la littérature spécialisée ou sur la connaissance que nous avons du phénomène » (Mace, 1999, p. 76). Ainsi, dans la section suivante, nous présentons et explicitons les échelles que nous avons sélectionnées en indiquant leur indice de fidélité, ainsi que les différentes mesures de validité si existantes. 3.6.1 Attitude envers les JHA L’attitude envers les JHA est mesurée grâce à l’échelle Attitude towards Gambling de Moore et Ohtsuka (1997). Elle comporte 12 items sur une échelle de Likert à 5 points. Elle présente une cohérence interne élevée avec un alpha de Cronbach de 0.79. Les auteurs ont développé cette échelle d’attitude en s’appuyant sur la Theory of Reasoned Action (Ajzen & Fishbein, 1980), autrement dit en se basant sur les croyances et les éléments de coûts / bénéfices de cette théorie. On note qu’il existe des items inversés dans l’échelle. Les items traduits de l’échelle sont présentés dans le tableau 11. Chapitre 3 Méthodologie Tout à fait En en désaccord désaccord 52 Pas sûr En accord Tout à fait en accord 1. Le jeu est une activité amusante 1 2 3 4 5 2. Le jeu modéré est sans danger 1 2 3 4 5 3. Les joueurs ont besoin d’assistance * 1 2 3 4 5 4. Les jeux de hasard et d’argent devraient être illégaux * 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 5. Les jeux de hasard et d’argent sont trop répandus aujourd'hui* 6. Le jeu détruit des familles* 7. Le jeu est juste un autre passetemps 8. La plupart des personnes peuvent contrôler leurs habitudes de jeu 9. Le jeu est un fléau social* 10. Je suis d'accord avec le fait que certains jeux de hasard et d'argent soient légaux 11. Les jeux de hasard et d’argent doivent être contrôlés par la loi afin que les gens n’en abusent pas * 12. Fondamentalement, j’apprécie les jeux de hasard et d’argent (* indique les énoncés inversés) TABLEAU 11 : ÉCHELLE DE L'ATTITUDE ENVERS LES JHA 3.6.2 Intentions de jouer En ce qui concerne les intentions comportementales, Moore et Ohtsuka (1997) ont également développé une échelle de mesure, Gambling Intention Scale, à 7 items. De même, c’est une échelle de Likert à 5 points, qui présente un bon niveau de fidélité avec un alpha de Cronbach de 0.80. Nous avons décidé d’ajouter deux items, afin de préciser certains types de jeux : les appareils de loteries vidéo (ALV) et le bingo (tableau 12). Chapitre 3 Dans les 2 prochaines semaines, j'ai l'intention de…. Méthodologie Tout à fait En en désaccord désaccord 53 Pas sûr En accord Tout à fait en accord 1. jouer aux machines à sous 1 2 3 4 5 2. parier sur le sport 1 2 3 4 5 3. acheter des billets de loterie 1 2 3 4 5 4. aller au casino 1 2 3 4 5 5. jouer au bingo 1 2 3 4 5 6. jouer à un appareil de loterie vidéo 1 2 3 4 5 7. jouer à des jeux de hasard et d'argent 1 2 3 4 5 8. dépenser 20 $ ou plus dans les jeux de hasard et d'argent 1 2 3 4 5 9. dépenser 100 $ ou plus dans les jeux de hasard et d'argent 1 2 3 4 5 TABLEAU 12 : ÉCHELLE DE L'INTENTION DE JOUER 3.6.3 Attitude envers la marque Loto-Québec L’attitude envers Loto-Québec a été mesurée par l’échelle de Stayman et Batra (1991) en ne prenant en compte que la dimension hédonique. En effet, cette échelle ne mesure que l’aspect de l’attitude reliée au plaisir du consommateur envers une marque. Elle est composée de 4 items mesurés sur une échelle sémantique différentielle de type Likert à 7 points, et présente une cohérence interne élevée avec un alpha de Cronbach de 0.85. Les auteurs ne mentionnent pas la validité de l’échelle. Cependant, une analyse factorielle confirmatoire leur permet de montrer que la mesure de l’attitude envers la marque à 10 items peut être analysée en deux facteurs distincts. Un de ces facteurs est composé des quatre items de la version que nous utilisons et que nous présentons dans le tableau suivant. On note que les items 2 et 3 ont été inversés pour des raisons de validité de la mesure. Chapitre 3 Méthodologie 54 Dans quelle mesure vous êtes d'accord avec chaque énoncé concernant la marque LotoQuébec? Loto-Québec est une mauvaise marque 1 2 3 4 5 6 7 Loto-Québec est une bonne marque Je suis favorable à la marque Loto-Québec 1 2 3 4 5 6 7 Je ne suis pas favorable à la marque Loto-Québec * La marque Loto-Québec est agréable 1 2 3 4 5 6 7 La marque Loto-Québec est désagréable * Loto-Québec est une marque antipathique 1 2 3 4 5 6 7 Loto-Québec est une marque sympathique (* indique les énoncés inversés) TABLEAU 13 : ÉCHELLE D'ATTITUDE ENVERS LA MARQUE LOTO-QUÉBEC 3.6.4 Mesure des biais cognitifs Le concept des biais cognitifs est central à notre modèle, et de nombreuses mesures ont été développées, souvent indépendamment les unes des autres (e.g., Joukhador, et al., 2003). En effet, de nombreux auteurs se sont arrêtés sur l’étude de Toneatto et al. (1997) et de Toneatto (1999) pour développer leurs échelles, sans prendre en compte les recherches plus récentes. Dans cette présente étude, nous retenons l’échelle développée par Steenbergh, Meyers, May et Whelan (2002) qui nous paraît la plus appropriée, de par sa structure, sa cohérence interne et sa validité. Le Gamblers’ Beliefs Questionnaire est fiable (alpha de Cronbach de 0.92). L’échelle est composée de deux facteurs : la chance/persévérance (alpha de Cronbach de 0.90) et l’illusion de contrôle (alpha de Cronbach de 0.84). Enfin, on retrouve 21 items mesurés sur une échelle de Likert à 7 points. Les auteurs ont validé l’échelle (validité de construit). Ses validités convergente et discriminante ont été prouvées par MacKillop et ses collègues dans deux études différentes (MacKillop, Anderson, Castelda, Mattson, & Donovick, 2006a, 2006b). Une adaptation de l’échelle a été utilisée et nous retenons 19 items, qui sont traduits en français. La description des items de l’échelle des biais cognitifs proposée par Steenbergh, Meyers, May et Whelan (2002) suggère cependant deux types de biais. En effet, 4 items sont reliés à la perception du joueur envers lui-même et envers ses prédispositions à être chanceux, à bien prédire les Chapitre 3 Méthodologie 55 résultats, et à disposer de connaissances et de compétences dans le jeu. Ces items sont de plus énoncés à la première personne du singulier « je ». Nous proposons dès lors de scinder les 19 items de l’échelle en 2 échelles distinctes : une échelle de biais cognitifs liés à la perception de soi à 4 items (confer tableau 14), et une échelle des biais cognitifs dans un contexte extérieur au joueur, que nous appelons biais externes, à 15 items (confer tableau 15). Ces deux mesures des biais seront donc utilisées afin de mesurer le concept global des biais cognitifs. Tout à fait en désaccord Tout à fait en accord Neutre 1. Je suis quelqu'un de chanceux par nature 1 2 3 4 5 6 7 3. Je suis assez précis pour prédire quand un «gain» va se produire. 1 2 3 4 5 6 7 4. Je dispose de certaines connaissances et compétences en matière de jeux de hasard et d'argent qui peuvent me permettre de gagner 1 2 3 4 5 6 7 5. Je ressens souvent que c'est mon jour de chance 1 2 3 4 5 6 7 TABLEAU 14 : ÉCHELLE DES BIAIS DE PERCEPTION DE SOI Chapitre 3 Méthodologie 56 Tout à fait en désaccord Tout à fait en accord Neutre 1. Il existe des individus plus chanceux que d'autres au jeu 1 2 3 4 5 6 7 2. Certaines connaissances et/ou compétences augmentent la probabilité de se faire de l'argent en jouant 1 2 3 4 5 6 7 3. En regardant ses mises précédentes on peut mieux évaluer comment on doit jouer par la suite 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 4. Le jeu, c’est plus que de la chance 5. À long terme, on gagne plus d'argent au jeu que l'on en perd 6. Certains rituels ou comportements peuvent augmenter les chances de gagner 7. Le succès aux jeux de hasard et d'argent exige une certaine persévérance et de la volonté 8. Certains objets (tels que des portebonheurs) peuvent accroître la probabilité de gagner aux jeux de hasard et d'argent 9. Il est préférable de garder toujours la même mise pour accroître ses probabilités de gain 10. Quand on joue et que l'on perd de très peu c'est souvent signe que l'on est sur le point de gagner 11. À certains moments on peut se sentir plus chanceux que d'autres et c'est pendant ces moments qu'il faut jouer 12. Il existe des places où des endroits où on a plus de chances de gagner aux jeux de hasard et d'argent 13. Lorsque la chance sourit il faut savoir la saisir et miser davantage au jeu car cela n'arrive pas tout le temps 14. À une série de pertes suit une série de gains 15. La persévérance finit souvent par payer au jeu TABLEAU 15 : ÉCHELLE DES BIAIS EXTERNES 3.6.5 Mesure des biais émotionnels L’autre variable centrale dans notre étude est le biais émotionnel. Il est à noter qu’aucune étude ne fait part du développement d’un tel concept. Néanmoins, dans son article, Cowley (2008) mesure un construit similaire à notre définition du biais émotionnel : elle propose une échelle du plaisir, continue de 100 Chapitre 3 Méthodologie 57 millimètres sur laquelle les répondants doivent placer une croix pour évaluer leur plaisir d’une expérience passée, qui était de jouer à des appareils de loteries vidéo (ALV). Or, pour mesurer le plaisir par un seul énoncé, Mandel et Nowlis (2008) proposent une échelle sémantique différentielle à 15 points (de -7 à 7), en se référant à une étude de Kahneman et Snell (1992). L’énoncé de notre échelle est donc le suivant : « lorsque vous jouez à jeux de hasard et d’argent, quel degré de plaisir vous procure cette expérience? ». 3.6.6 Plaisir L’échelle des biais émotionnels n’est composée que d’un seul item. Il ne sera donc pas possible de vérifier sa fidélité. En revanche, afin de la valider, nous proposons d’analyser la corrélation qui existe entre ce concept et un concept proche en définition, autrement dit procéder par une validation nomologique. Ce type de validité permet en effet de vérifier si « le construit mesuré [est] corrélé avec d’autres mesures proches qui en découlent logiquement » (Jolibert & Jourdan, 2006). Une personne qui possède des biais émotionnels est susceptible de ressentir du plaisir, de par la définition même du biais émotionnel. Ainsi, nous mesurons, suite aux manipulations (et non pas comme variable de contrôle) le degré de plaisir des répondants. L’échelle utilisée est la dimension plaisir du P.A.D. de Mehrabian et Russell (1974) à 4 items. C’est une échelle de type sémantique différentielle à 5 points qui présente un bon niveau de fidélité avec un alpha de Cronbach de 0.77 (Mehrabian & Russell, 1974). Le tableau 16 présente les énoncés de l’échelle. Lors du visionnage de la vidéo, comment vous-êtes vous senti(e )? Malheureux(se) 1 2 3 4 5 Heureux(se) Mélancolique 1 2 3 4 5 Jovial(e ) Agacé(e ) 1 2 3 4 5 Réjoui(e ) Insatisfait(e ) 1 2 3 4 5 Satisfait(e ) TABLEAU 16 : ÉCHELLE DU PLAISIR Chapitre 3 Méthodologie 58 3.6.7 Implication Zaichkowsky (1985) a développé une échelle de l’implication, ou personal involvement index (PII), qui met l’accent sur l’importance personnelle d’un produit pour un individu. Cette échelle à 20 items est l’échelle d’implication la plus utilisée (Chebat, et al., 2001). Mittal (1989) met en doute l’unidimensionnalité de l’échelle, et avance qu’elle comporte un facteur hédonique et un facteur attitudinal, en plus de celui d’implication (Chebat, et al., 2001). Ainsi, nous utilisons la version révisée de l’échelle par l’auteur à 10 items, le R.P.I.I. (Revised P.I.I.) (Zaichkowsky, 1994) en l’adaptant au contexte des JHA. Cette échelle est sémantique différentielle, et possède deux dimensions : une cognitive et une affective. Sa cohérence interne est élevée avec un alpha de Cronbach de 0.9. Enfin, une traduction en français de l’échelle d’origine a été développée par Cristau et Strazzieri (1996), version que nous utilisons pour cette échelle. Elle est présentée dans le tableau suivant, avec les énoncés inversés comme dans la version originale de Zaichkowsky (1994). Pour moi, les jeux de hasard et d'argent sont: Importants 1 2 3 4 5 6 7 Pas importants* Ennuyeux 1 2 3 4 5 6 7 Intéressants Dignes d'intérêt 1 2 3 4 5 6 7 Pas dignes d'intérêt* Passionnants 1 2 3 4 5 6 7 Pas passionnants* N'ont aucune signification pour moi 1 2 3 4 5 6 7 Ont une grande signification pour moi Attirants 1 2 3 4 5 6 7 Pas attirants* Fascinants 1 2 3 4 5 6 7 N'ont pas de valeur pour moi 1 2 3 4 5 6 7 Une activité dans laquelle je me sens impliqué(e ) 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 Une activité dont je n'ai pas besoin (* indique les énoncés inversés) TABLEAU 17 : ÉCHELLE DE L'IMPLICATION (R.P.I.I.) Banals* Ont de la valeur pour moi Une activité dans laquelle je ne me sens pas impliqué(e )* Une activité dont j'ai besoin Chapitre 4 4 Résultats et Analyses 59 RÉSULTATS ET ANALYSES 4.1 Introduction et vérification des stimuli Dans ce chapitre, nous présentons et commentons les principaux résultats obtenus suite à l’analyse des données recueillies grâce au questionnaire en ligne, auprès de 102 joueurs de JHA. Dans une première partie, nous nous attardons à vérifier la validité et la fidélité des échelles de mesure utilisées suite à la collecte de données, puis dans une deuxième partie nous validons le modèle conceptuel présenté précédemment. Rappelons que la vérification des manipulations a été effectuée, et exposée précédemment à la suite de notre analyse de contenu. Nous avions en effet prétesté les stimuli choisis et vérifié que ces stimuli publicitaires possédaient les caractéristiques propres aux deux groupes de publicités « argumentation » et « évasion », autrement dit nos deux conditions expérimentales. 4.2 Analyses factorielles et fidélité des échelles Pour vérifier chacune de nos échelles de mesure, nous procédons à des analyses factorielles en composante principale, avec rotation Varimax qui nous permettent de vérifier la dimensionnalité des échelles. Pour cela, nous utilisons comme précédemment l’analyse parallèle (Patil, et al., 2008), ainsi que le test du scree plot. Pour ce qui à trait à la fidélité, nous utilisons le coefficient alpha de Cronbach. 4.2.1 Attitude envers les JHA Dans un premier temps, les mesures nécessaires sont prises pour modifier les items inversés de l’échelle de l’attitude envers les JHA. L’analyse factorielle nous donne 2 facteurs, qui expliquent 51.8% de la variance initiale. Chapitre 4 Résultats et Analyses 60 Attitude JHA 8 .74 Facteur Joueur .05 Attitude JHA 1 .74 .00 Attitude JHA 2 .73 .20 Attitude JHA 12 .73 .28 Attitude JHA 4 .67 .37 Attitude JHA 7 .61 .09 Attitude JHA 10 .61 .12 Attitude JHA 6 .17 .81 Attitude JHA 11 .03 .73 Attitude JHA 9 .36 .68 Attitude JHA 5 .22 .67 Attitude JHA 3 .02 .51 4.51 1.71 Facteur Jeu Eigenvalues TABLEAU 18 : DIMENSIONS DE L'ATTITUDE ENVERS LES JHA En examinant la corrélation de chacun des items sur les facteurs (les loadings), l’analyse faire ressortir un facteur jeu et un facteur joueur. Le facteur Jeu, qui porte sur l’attitude envers le jeu en général, présente un alpha de Cronbach 0.84 tandis qu’il est de 0.74 pour le facteur joueur, dont les items mesurent l’attitude envers les joueurs. Ainsi, l’échelle de l’attitude envers les JHA est composée de 12 items dont la fidélité est élevée (alpha de Cronbach de 0.84). 4.2.2 Intention de jouer L’échelle utilisée pour mesurer l’intention de jouer n’a qu’une dimension. L’analyse factorielle nous montre que cet unique facteur explique 48.1% de la variance totale. L’échelle à 9 items possède une bonne cohérence interne (alpha de Cronbach de 0.84). Il est important de remarquer que l’item 3 n’est que très peu corrélé avec le facteur Intention. Nous décidons cependant de conserver cet item car son énoncé fait référence à l’intention d’acheter des billets de loteries. Or, 78.4% de notre échantillon dit acheter des billets de loteries au moins une fois par mois (tableau 19) Chapitre 4 Résultats et Analyses 61 Effectifs Pourcentage Pourcentage cumulé Une fois par semaine ou plus 57 55.9 55.9 Plus d'une fois par mois. Moins d'une fois par semaine 23 22.5 78.4 Plus d'une fois par an. Moins d'une fois par mois 20 19.6 98.0 Une fois par an 2 2.0 100.0 Jamais 0 0.0 100.0 Total 102 100 TABLEAU 19 : EFFECTIF DES ACHETEURS DE BILLETS DE LOTERIE Facteur Intention Intention 4 .80 Intention 1 .76 Intention8 .76 Intention 6 .76 Intention 7 .75 Intention 9 .73 Intention 2 .72 Intention 5 .59 Intention 3 .10 Eigenvalues 4.32 TABLEAU 20 : DIMENSION DE L'INTENTION DE JOUER 4.2.3 Attitude envers Loto-Québec La première étape a été de modifier les deux items inversés de l’échelle de Stayman et Batra (1991). L’attitude envers Loto-Québec est unidimensionnelle, conformément à ce qu’avancent les auteurs: un seul facteur ressort de l’analyse factorielle, expliquant 65.2% de la variance. Chapitre 4 Résultats et Analyses Attitude Loto-Québec 3 Facteur Attitude .87 Attitude Loto-Québec 4 .86 Attitude Loto-Québec 2 .76 Attitude Loto-Québec 1 .73 62 2.61 Eigenvalues TABLEAU 21 : DIMENSION DE L'ATTITUDE ENVERS LA MARQUE LOTO-QUÉBEC Rappelons que ce facteur mesure la dimension hédonique de l’attitude envers la marque. L’alpha de Cronbach est de 81.8%, ce qui prouve une bonne fidélité de l’échelle. Ainsi, nous mesurons l’attitude envers Loto-Québec grâce à cette échelle à 4 items. 4.2.4 Biais cognitifs Nous proposons, comme expliqué précédemment de scinder dans un premier temps l’échelle de Steenbergh et al. (2002). La première échelle concerne les biais de perception de soi. Une seule dimension apparaît à la suite de l’analyse factorielle, qui explique 67.2% de la variance totale. Facteur Biais de perception Biais Self 4 .90 Biais Self 3 .90 Biais Self 2 .88 Biais Self 1 .53 Eigenvalues 2.69 TABLEAU 22 : DIMENSION DES BIAIS DE PERCEPTION DE SOI Ce facteur ne mesure donc que les biais de perception de soi, avec un bon indice de fidélité (alpha de Cronbach de 0.82). La deuxième échelle qui se rapporte aux biais externes des joueurs dans un contexte général est composée également d’une seule dimension avec 42.3% Chapitre 4 Résultats et Analyses 63 de la variance expliquée. L’alpha de Cronbach pour cette échelle à 15 items est de 0.891. Il est à noter que les items 1 et 5 ne sont que faiblement corrélés avec le facteur. Cependant, une analyse de fidélité avec les 13 items restants nous donne un alpha de Cronbach de 0.985. Ce résultat ne diffère que peu de l’indice de l’échelle à 15 items. Ainsi, nous décidons de garder l’échelle à 15 items qui permet d’obtenir une information plus complète (tableau 23). Facteur Biais Cognitifs Biais Cognitifs 15 .80 Biais Cognitifs 10 .79 Biais Cognitifs 8 .78 Biais Cognitifs 11 .73 Biais Cognitifs 6 .71 Biais Cognitifs 14 .70 Biais Cognitifs 7 .69 Biais Cognitifs 13 .69 Biais Cognitifs 3 .67 Biais Cognitifs 12 .59 Biais Cognitifs 4 .55 Biais Cognitifs 2 .55 Biais Cognitifs 9 .50 Biais Cognitifs 5 .50 Biais Cognitifs 1 .30 Eigenvalues 6.34 TABLEAU 23 : DIMENSION DES BIAIS EXTERNES 4.2.5 Implication envers les JHA Dans un premier temps, nous avons effectué les modifications nécessaires pour les items inversés. Ensuite, une erreur s’était glissée dans la réalisation du questionnaire, et l’item 4 a dû être supprimé puisque l’énoncé bipolaire de cet item était en réalité unipolaire. Ainsi, l’analyse factorielle est réalisée sur les 9 items restants de l’échelle. En accord avec les deux dimensions du R.P.I.I. de Zaichkowsky (1994), nous trouvons deux facteurs : l’un affectif (alpha de Chapitre 4 Résultats et Analyses 64 Cronbach de 0.83) et l’autre cognitif (alpha de Cronbach de 0.73). Ces deux facteurs expliquent 60% de la variance initiale et sont présentés dans le tableau suivant. Facteur affectif Facteur cognitif Implication 5 .85 .06 Implication 8 .84 .12 Implication 10 .76 .30 Implication 2 .64 .35 Implication 7 .17 .77 Implication 6 .16 .75 Implication 9 .18 .73 Implication 1 .44 .61 Implication 3 -.41 .48 Eigenvalues 3.77 1.63 TABLEAU 24 : DIMENSIONS DE L'IMPLICATION On observe que les items 1 et 3 du facteur 2 sont relativement corrélés au facteur 1. Cependant, leur omission ne permet pas d’obtenir un meilleur indice de fidélité qui est de 81.0 dans les deux cas. Ainsi, nous conservons l’échelle à 9 items pour mesurer l’implication des joueurs vis-à-vis des JHA. 4.2.6 Biais émotionnels Comme mentionné précédemment, il n’est pas possible de vérifier la fidélité d’une échelle à un item. Néanmoins, nous utilisons un processus de validation nomologique en analysant la corrélation entre les biais et un concept proche : le plaisir. De même, un seul facteur ressort de l’analyse factorielle sur les 4 items de la dimension Plaisir du P.A.D de Mehrabian et Russell (1974) et ce facteur explique à lui seul 79.5% de la variance totale. Chapitre 4 Résultats et Analyses Plaisir 1 Facteur Plaisir .91 Plaisir 4 .91 Plaisir 2 .91 Plaisir 3 .85 Eigenvalues 3.18 65 TABLEAU 25 : DIMENSION DU PLAISIR La cohérence interne est excellente avec un alpha de Cronbach de 0.91. Enfin, une analyse de corrélation bivariée nous permet de mesurer les interrelations existantes entre ces deux concepts. Le test nous donne un résultat très significatif, avec un coefficient de Pearson de 0.291 (p-values=0.003; N=102). On peut conclure que la mesure des biais émotionnels est valide. Chapitre 4 Résultats et Analyses 66 4.3 Vérification du modèle conceptuel Cette section présente les résultats des analyses effectuées afin de vérifier les hypothèses de notre modèle. Le logiciel utilisé est la version 18.0 de PASW (anciennement SPSS). Nous procédons à des analyses de variances multivariées (MANOVA), des analyses de variances univariées (ANOVA) ainsi qu’à des analyses de régression linéaire. Il est important de préciser que le test de MANOVA est utilisé dans le cas où les variables dépendantes sont supposées corrélées dans notre modèle. Cela nous permet ainsi de contrôler le niveau d’erreur des tests puisqu’il tient compte des corrélations entre ces variables. Ainsi, il est possible que ce test détecte des différences entre les variables dépendantes qui ne seraient pas détectées avec des tests univariés (ANOVA). L’égalité des variances a été testée pour toutes les variables indépendantes par le test de Levene. Celui-ci est apparu non-significatif pour toutes ces variables, ce qui démontre leur homoscédasticité, condition nécessaire pour continuer nos analyses. De plus, les différentes procédures de Baron et Kenny (1986) pour le test de médiation ont été récemment remises en question. Nous utilisons une procédure avec la même finalité qui est plus largement utilisée par les chercheurs en sciences sociales (X. Zhao, Lynch Jr, & Chen, 2010). Les auteurs avancent que pour avoir un effet de médiation, la variable indépendante n’a pas besoin d’avoir un effet direct sur la variable dépendante a priori, tant que l’effet indirect au travers du médiateur est significatif. Afin de tester les effets de médiation de nos hypothèses, nous nous basons donc sur la procédure de Zhao et ses collègues (2010), ainsi que sur leur arbre de décision concernant la nature du médiateur. De plus, comme ils le recommandent, nous utilisons pour réaliser l’analyse le test de Bootstrap développé par Preacher et Hayes (2004, 2008) pour PASW (SPSS). Enfin, tous les tests statistiques présentés dans la suite du travail sont réalisés à un niveau de confiance de 95%. Chapitre 4 Résultats et Analyses 67 4.3.1 Effet modérateur de l’implication envers les JHA sur les biais Dans un premier temps, nous cherchons à déterminer si les publicités de JHA ont une influence sur les biais quand le niveau d’implication des joueurs est élevé. Une MANOVA est effectuée avec comme variables dépendantes les trois types de biais (biais émotionnels, biais de perception de soi et biais externes), et comme variables indépendantes la publicité (à trois niveaux) et le niveau d’implication envers les JHA. Les résultats du test sont présentés dans le tableau 26. La trace de Pillai pour l’interaction (F=2.13; p-value=0.000) ainsi que le lambda de Wilks (F=2.09; pvalue=0.000) nous indique que le test d’interaction entre les deux variables indépendantes est significatif, autrement dit qu’il existe des différences significatives entre les biais dépendamment de l’interaction entre les conditions expérimentales (types de publicités) et l’implication. Valeur F ddl de l'hypothèse Erreur ddl Sig. Trace de Pillai 0.12 0.84 6 190 0.540 Lambda de Wilks 0.88 0.84 6 188 0.539 Trace de Pillai 1.72 1.53 3 94 0.012 Lambda de Wilks 0.06 1.69 3 94 0.003 1.68 2.13 6 190 0.000 0.08 2.09 6 188 0.000 Effet Condition Implication Trace de Condition * Pillai Implication Lambda de Wilks TABLEAU 26 : MANOVA DES BIAIS SELON CONDITIONS ET IMPLICATION Le tableau 27 récapitule les analyses de variances pour chacun des biais selon l’interaction entre les conditions et l’implication, ce qui nous permet de tester les hypothèses 1 et 2. Chapitre 4 Source de variation condition Implication Condition * Implication Résultats et Analyses 68 Variable dépendante Somme des carrés de type III ddl Moyenne des carrés F Sig. Biais émotionnels 19.33 2 9.67 1.86 0.169 Biais de perception de soi 0.75 2 0.38 0.54 0.585 Biais externes 0.67 2 0.34 0.41 0.664 Biais émotionnels 432.45 1 12.36 2.38 0.004 Biais de perception de soi 57.34 1 1.64 2.36 0.005 Biais externes 52.55 1 1.50 1.84 0.031 Biais émotionnels 324.08 2 13.50 2.60 0.004 Biais de perception de soi 38.35 2 1.60 2.30 0.010 Biais externes 31.56 2 1.31 1.61 0.088 TABLEAU 27 : ANOVA DES BIAIS SELON CONDITIONS ET IMPLICATION Le tableau 27 nous indique qu’il existe des différences significatives dans les biais émotionnels du joueur entre les différentes conditions expérimentales, selon le niveau d’implication (F2,99=2.60; p-value=0.004). De même, cette interaction est significative pour les biais de perception de soi (F2,99=2.30; pvalue=0.010). En revanche, on ne peut conclure sur une différence entre les biais cognitifs dans la mesure où l’interaction n’a pas d’impact significatif (F2,99=1.61; p-value=0.088). Afin de pouvoir comparer graphiquement l’effet d’interaction selon les différents niveaux de l’implication, nous décidons par la suite de dichotomiser la variable implication : niveau faible (0) et niveau élevé (1). Chapitre 4 4.3.1.1 Résultats et Analyses 69 Biais émotionnels La figure 6 nous permet d’observer, à l’aide d’un diagramme, l’interaction qui existe entre les différents types de publicité (conditions) et l’implication. De prime abord, on remarque que le niveau des biais émotionnels pour la condition « évasion » est plus élevé quand le niveau d’implication est faible. Ceci vient confirmer notre hypothèse H1. FIGURE 6 : INTERACTION ENTRE CONDITION ET IMPLICATION SUR BIAIS ÉMOTIONNELS Nous acceptons donc l’hypothèse H1 selon laquelle « si le joueur est faiblement impliqué envers les JHA, la publicité de type « évasion » a plus d’impact sur les biais émotionnels du joueur de JHA que s’il est fortement impliqué » à partir de l’analyse du graphique. De plus, il est important de noter que dans le cas de la publicité « argumentation », si un joueur est plus fortement impliqué envers les JHA, la publicité a un impact plus fort sur ses biais émotionnels. Chapitre 4 Résultats et Analyses 4.3.1.2 70 Biais cognitifs 4.3.1.2.1 Biais de perception de soi Rappelons que l’interaction entre les conditions et l’implication, selon le tableau 27, est significative pour les biais de perception de soi (F2,99=2.30; pvalue=0.010). La figure 7 présente le graphique de l’interaction avec la variable implication dichotomisée. FIGURE 7 : INTERACTION ENTRE CONDITION ET IMPLICATION SUR BIAIS DE PERCEPTION DE SOI D’après le graphique, on peut conclure pour la condition « argumentation » que la moyenne des biais de perception de soi est plus importante quand l’implication est élevée. Ainsi, pour les biais de perception de soi, l’hypothèse 2 selon laquelle la publicité « argumentation » a un effet sur les biais si le joueur est fortement impliqué est vérifiée. Il nous faut maintenant la vérifier pour les biais externes. Chapitre 4 Résultats et Analyses 4.3.1.2.2 71 Biais externes D’après le tableau 27 des ANOVA sur les biais, on ne peut conclure sur une différence entre les biais externes dans la mesure où l’interaction n’a pas d’impact significatif (F2,99=1.61; p-value=0.088). Ainsi, en examinant les effets principaux, on remarque que l’implication a un effet significatif sur les biais externes (F1,100= 1.84; p-value=0.031). D’après le tableau 28, on observe que la corrélation bivariée entre l’implication et les biais externes est significative et positive (P=0.423; p-value=0.000). On peut donc conclure que plus les joueurs sont impliqués envers les JHA, plus leur niveau de biais externes est élevé. Corrélation bivariée Implication Biais externes Corrélation de Pearson 0.423 Sig. (bilatéral) 0.000 N 102 TABLEAU 28 : CORRÉLATION BIVARIÉE ENTRE IMPLICATION ET BIAIS EXTERNES Aussi, d’après le graphique de la figure 8, on remarque que le niveau de biais externes est plus fort lorsque l’implication est élevée. Ainsi, l’hypothèse H2 selon laquelle « si le joueur est fortement impliqué envers les JHA, la publicité de type « argumentation » a plus d’impact sur les biais cognitifs du joueur de JHA que s’il est faiblement impliqué » est partiellement supportée. En effet, c’est le cas pour les biais de perception de soi dans la mesure où l’interaction existe entre la publicité et l’implication, et que, pour la publicité de type « argumentation », la différence est significative. En revanche ce n’est pas le cas pour les biais externes. Seule l’implication envers les JHA a un effet sur les biais externes. Chapitre 4 Résultats et Analyses 72 FIGURE 8 : EFFET PRINCIPAL DE L’IMPLICATION SUR LES BIAIS EXTERNES POUR CHAQUE TYPE DE PUBLICITÉ Chapitre 4 Résultats et Analyses 73 4.3.2 Effet modérateur de l’implication envers les JHA sur les attitudes et intentions Dans cette sous-section, les hypothèses concernant l’interaction entre le type de publicités et l’implication sur les attitudes et intentions (hypothèses 3a, 3b et 3c) sont testées. Elles visent en effet à comparer les effets entre les deux types de publicités utilisés sur ces variables. Nous procédons d’abord à une MANOVA sur des attitudes envers la marque et les JHA et les intentions de jouer selon les deux variables indépendantes : condition et implication. Les résultats du test sont présentés dans le tableau 29. La trace de Pillai de l’interaction (F=1.42; p-value=0.025) ainsi que le lambda de Wilks (F=0.14; pvalue=0.027) nous indiquent que le test d’interaction entre les deux variables indépendantes est significatif. Cela va dans le sens de nos hypothèses et nous continuons en examinant les ANOVA. Valeur F ddl de l'hypothèse Erreur ddl Sig. Trace de Pillai 0.26 1.97 6 190 0.080 Lambda de Wilks 0.74 2.09 6 188 0.064 Trace de Pillai 1.83 1.78 3 94 0.001 Lambda de Wilks 0.06 1.77 3 94 0.001 Trace de Pillai 1.42 1.50 6 190 0.025 Lambda de Wilks 0.14 1.50 6 188 0.027 Effet Condition Implication Condition * Implication TABLEAU 29 : MANOVA DES ATTITUDES ET INTENTIONS SELON CONDITIONS ET IMPLICATION Le tableau 30 récapitule les analyses de variances des attitudes et intentions selon l’interaction entre les conditions et l’implication, ce qui nous permet de tester les hypothèses 3a, 3b et 3c. Chapitre 4 Source de variation condition Résultats et Analyses Variable dépendante Attitude envers Loto-Québec Attitude envers les JHA Intentions de jouer Implication Attitude envers Loto-Québec Attitude envers les JHA Intentions de jouer Condition * Implication Attitude envers Loto-Québec Attitude envers les JHA Intentions de jouer 74 Somme des carrés de type III ddl Moyenne des carrés F Sig. 15.67 2 7.84 6.48 0.004 0.42 2 0.21 0.78 0.465 0.24 2 0.12 0.28 0.757 71.33 1 2.04 1.68 0.056 19.97 1 0.57 2.10 0.012 35.27 1 1.01 2.36 0.005 56.25 2 2.34 1.94 0.031 5.79 2 0.24 0.89 0.614 16.79 2 0.70 1.64 0.081 TABLEAU 30 : ANOVA DES ATTITUDES ET INTENTIONS SELON CONDITIONS ET IMPLICATION L’effet d’interaction des variables indépendantes est significatif pour l’attitude envers Loto-Québec (F2,99=1.94; p-value=0.031), ce qui n’est pas le cas ni pour les attitudes envers les JHA (F2,99=0.89; p-value=0.614), ni pour les intentions de jouer (F2,99=1.64; p-value=0.081). Ainsi, les hypothèses 3b et 3c sont rejetées. Pour tester l’hypothèse 3a, nous devons examiner la différence des moyennes afin de déterminer le sens de la relation. Les sous-sections suivantes présentent les résultats plus détaillés des ANOVA pour chacune des variables dépendantes. Chapitre 4 4.3.2.1 Résultats et Analyses 75 Attitude envers Loto-Québec L’interaction du type de publicité et de l’implication sur l’attitude envers LQ est significative (confer tableau 30). L’analyse du graphique 9 nous montre que, pour un niveau élevé d’implication, une publicité de type « argumentation » a plus d’impact sur les attitudes envers Loto-Québec qu’une publicité de type « évasion ». FIGURE 9 : INTERACTION ENTRE CONDITION ET IMPLICATION SUR ATTITUDES ENVERS LQ Cela nous permet donc de confirmer l’hypothèse 3a, selon laquelle si le joueur est fortement impliqué envers les JHA, la publicité de type « argumentation » provoque un changement d’attitudes plus positif envers Loto-Québec que la publicité de type « évasion ». Chapitre 4 Résultats et Analyses 4.3.2.2 76 Attitude envers les JHA En ce qui concerne l’attitude envers les JHA, nous avons vu que l’interaction n’est pas significative. On remarque cependant dans le tableau 30 que l’effet principal de l’implication envers les JHA est significatif (F1,100= 2.10; pvalue=0.012). Attitude envers les JHA Corrélation bivariée Implication Corrélation de Pearson 0.433 Sig. (bilatéral) 0.000 N 102 TABLEAU 31 : CORRÉLATION ENTRE L’IMPLICATION ET L’ATTITUDE ENVERS LES JHA D’après le tableau 31, la corrélation entre l’implication et l’attitude envers les JHA est significative et positive (P=0.433; p-value=0.000). Cela signifie que plus un joueur est impliqué envers les JHA, plus son attitude envers les JHA est positive. Le graphique de la figure 10 vient confirmer ces résultats puisqu’on y observe que la courbe des moyennes sous forte implication est plus élevée que celle sous faible implication. Ainsi, on peut conclure qu’à un niveau élevé d’implication, les joueurs ont une attitude plus positive envers les JHA. Chapitre 4 Résultats et Analyses 77 FIGURE 10 : EFFET PRINCIPAL DE L'IMPLICATION SUR L'ATTITUDE ENVERS LES JHA POUR CHAQUE TYPE DE PUBLICITE 4.3.2.3 Intention de jouer Enfin, nous avions remarqué dans le tableau 30 que l’interaction impliquant l’intention de jouer n’est pas significative. De plus, l’effet principal du facteur conditions (F1,100=0.28; p-value=757) n’est pas significatif non plus. Toutefois, on note que l’implication a un impact sur l’intention de jouer puisque son effet principal est significatif (F1,100=2.36; p-value=0.005). Corrélation bivariée Implication Intention de jouer Corrélation de Pearson 0.504 Sig. (bilatéral) 0.000 N 102 TABLEAU 32 : CORRÉLATION ENTRE L’IMPLICATION ET L’INTENTION DE JOUER Chapitre 4 Résultats et Analyses 78 La corrélation entre l’implication et l’intention de jouer, présentée dans le tableau 32, est significative et positive (P=0.504; p-value=0.000). Ce résultat nous indique donc que les joueurs plus impliqués envers les JHA ont plus l’intention de jouer. Cette conclusion est confirmée par l’analyse du graphique 11 puisque la courbe des moyennes sous forte implication y est plus élevée que celle sous faible implication. FIGURE 11 : EFFET PRINCIPAL DE L'IMPLICATION SUR L'INTENTION DE JOUER POUR CHAQUE TYPE DE PUBLICITE En conclusion de cette sous-partie, l’hypothèse 3a selon laquelle si le joueur est fortement impliqué envers les JHA, la publicité de type « argumentation » provoque un changement d’attitudes plus positif envers la marque Loto-Québec que la publicité de type évasion est acceptée, tandis que les hypothèses 3b et 3c sont rejetées. Dans le cas de l’attitude envers les JHA et l’intention de jouer, on note tout de même qu’un niveau plus élevé d’implication les affecte positivement. Chapitre 4 Résultats et Analyses 79 4.3.3 Effet de médiation des biais Nous allons dans cette sous-partie, nous attarder sur la vérification des hypothèses 4 et 5, c’est-à-dire sur le rôle médiateur des biais cognitifs et émotionnels. Comme expliqué précédemment, nous procédons par des analyses de médiation proposées par Zhao et ses collègues (2010) en utilisant le Bootstrap test de Preacher et Hayes (2004, 2008) sur PASW pour plusieurs raisons. D’abord, le Bootstrapping est d’après les auteurs la méthode la plus appropriée et la plus puissante pour obtenir des intervalles de confiance pour des effets indirects spécifiques (Preacher & Hayes, 2008, p. 886). De plus, nous utilisons trois médiateurs pour nos analyses : les biais émotionnels, les biais de perception de soi et les biais externes. Or, cette méthode nous permet de tester l’effet d’un modèle à médiation multiple, ce qui présente plusieurs avantages, notamment en ce qui concerne la réduction des biais des paramètres, et l’effet d’un médiateur conditionnel à la présence d’autres médiateurs (Preacher & Hayes, 2008). Ainsi, « quand l’hypothèse d’une médiation par de multiples médiateurs potentiels est émise, la médiation multiple est la stratégie d’analyse appropriée » (Preacher & Hayes, 2008, p. 886). Enfin, il est important de préciser que nous cherchons à tester ce que Baron et Kenny nomment « l’effet de médiation d’une modération » (1986). En effet, c’est, d’après nos hypothèses, l’effet d’interaction de la publicité et de l’implication qui affecte les attitudes et les intentions, à travers les biais cognitifs et émotionnels. Or, la procédure de Preacher et Hayes nous permet d’intégrer des covariables dans le test du Bootstrap et donc de tester ce type d’effet (i.e., en mettant les deux variables de l’interaction comme covariables) (Preacher & Hayes, 2008, p. 887). 4.3.3.1 Design de médiation multiple Le design de médiation multiple est illustré dans la figure 12 (Preacher & Hayes, 2008, p. 881). Dans le modèle A, X (variable indépendante) affecte Y (variable dépendante). Dans le modèle B, on fait l’hypothèse que X a un effet indirect sur Y à travers M1, M2,…,Mj (où Mi est un médiateur). La relation c est l’effet total de X sur Y. La relation c’ représente l’effet direct de X sur Y. La relation a symbolise l’effet de X sur M, tandis que la relation b symbolise l’effet direct de M Chapitre 4 Résultats et Analyses 80 sur Y. Enfin, l’effet de médiation est représenté par la relation ab, autrement dit l’effet indirect de X sur Y à travers le médiateur M. FIGURE 12 : ILLUSTRATION DU DESIGN DE MÉDIATION MULTIPLE Une relation de médiation est significative à partir du moment où la relation ab est significative (X. Zhao, et al., 2010). Par la suite, en se référant à l’arbre de décision de Zhao et al. (2010), si l’effet direct de X sur Y (c’) est encore significatif, la médiation est dite « indirecte » (autrement appelé autrefois « médiation complète » par Baron et Kenny (1986). Sinon, la médiation est partielle dans la mesure où le cadre conceptuel est incomplet et d’autres médiateurs ont été omis. Pour conclure à une relation ab significative, l’intervalle de confiance ne doit pas inclure 0 (Preacher & Hayes, 2008; X. Zhao, et al., 2010) Chapitre 4 4.3.3.2 Résultats et Analyses 81 Médiation des biais sur l’attitude envers Loto-Québec Nous procédons à un test de Bootstrap, avec l’interaction des publicités et de l’implication comme variable indépendantes, ainsi que les variables publicités et implication comme covariables. Preacher et Hayes (2008) recommandent d’utiliser l’intervalle de confiance des biais corrigés. Les résultats de la médiation multiple sont présentés dans le tableau 33. Les intervalles de confiance à 95% des biais corrigés incluent 0 pour tous les biais. La relation ab n’est donc pas significative. Bootstrapping Intervalle de confiance 95% des biais corrigés Effet indirect (ab ) Point d'estimation Erreur standard Borne inférieure Borne supérieure Biais émotionnels -0.0173 0.0301 -0.1230 0.0125 Biais de perception de soi 0.0197 0.0262 -0.0180 0.0907 Biais externes -0.0117 0.0464 -0.1350 0.0552 Note : Bootstrap à 5000 échantillons Variab le dépendante : Attitude envers Loto-Québ ec Variab le indépendante : Condition x Implication Covariab les : Condition et Implication TABLEAU 33 : MÉDIATION DES DIFFÉRENTS BIAIS SUR ATTITUDE ENVERS LOTOQUÉBEC De plus, présentée dans le tableau 34, la relation c’, autrement dit l’effet direct de l’interaction des publicités et de l’implication sur l’attitude envers Loto-Québec n’est pas significatif non plus (t=-0.391; p-value=0.696). Effet direct (c') Coefficient Erreur standard t p-value Condition x Implication -0.586 0.150 -0.391 0.696 TABLEAU 34 : EFFET DIRECT DE L’INTERACTION DES PUBLICITÉS ET DE L’IMPLICATION SUR L' ATTITUDE ENVERS LOTO-QUÉBEC Chapitre 4 Résultats et Analyses 82 Ainsi, d’après l’arbre de décision de Zhao et al. (2010), les biais émotionnels et les biais cognitifs ne sont ni des médiateurs directs, ni indirects de l’effet de l’interaction de la publicité et de l’implication sur l’attitude envers Loto-Québec. Les hypothèses 4a et 5a sont donc rejetées. 4.3.3.3 Médiation des biais sur l’attitude envers les JHA La même analyse est effectuée afin de déterminer s’il existe une médiation des biais sur l’attitude envers les JHA (tableau 35). Comme pour l’attitude envers Loto-Québec, aucun des intervalles de confiance ne contient 0. Autrement dit, la relation ab est non-significative et on ne peut donc conclure à aucune médiation des biais. Bootstrapping Intervalle de confiance 95% des biais corrigés Effet indirect (ab ) Point d'estimation Erreur standard Borne inférieure Borne supérieure Biais émotionnels -0.0018 0.0098 -0.0380 0.0093 Biais de perception de soi -0.0045 0.0134 -0.0371 0.0176 Biais externes -0.0015 0.0091 -0.0310 0.0104 Note : Bootstrap à 5000 échantillons Variab le dépendante : Attitude envers les JHA Variab le indépendante : Condition x Implication Covariab les : Condition et Implication TABLEAU 35 : MÉDIATION DES DIFFÉRENTS BIAIS SUR ATTITUDE ENVERS LES JHA Quant à l’effet direct (relation c’ du tableau 36), elle est significative (t=-2.572; pvalue=0.012). D’après Zhao et al. (2010), notre cadre conceptuel est par conséquent erroné et il faut envisager la possibilité d’avoir omis un médiateur dans notre analyse. Chapitre 4 Résultats et Analyses 83 Effet direct (c') Coefficient Erreur standard t p-value Condition x Implication -0.169 0.066 -2.572 0.012 TABLEAU 36 : EFFET DIRECT DE L’INTERACTION DES PUBLICITÉS ET DE L’IMPLICATION SUR L' ATTITUDE ENVERS LES JHA Les hypothèses 4b et 5b sont donc elles aussi rejetées puisqu’aucun biais n’est médiateur de l’effet de l’interaction de la publicité et de l’implication sur l’attitude envers les JHA. 4.3.3.4 Médiation des biais sur l’intention de jouer Finalement, le tableau 37 expose les résultats pour la médiation des biais sur l’intention de jouer. Pour les biais émotionnels et les biais externes, les intervalles de confiance des biais corrigés comprennent 0 (relation ab nonsignificative). Ces biais ne sont donc pas médiateurs. Cependant, on remarque que l’intervalle de confiance pour les biais de perception de soi, de -0.1663 à 0.0087, n’inclut pas le 0. Ainsi dans ce cas, l’effet indirect de l’interaction de la publicité et de l’implication sur l’intention de jouer au travers des biais de perception de soi est significatif (relation ab). Bootstrapping Intervalle de confiance 95% des biais corrigés Effet indirect (ab ) Point d'estimation Erreur standard Borne inférieure Borne supérieure Biais émotionnels -0.0034 0.0104 -0.0423 0.0079 Biais de perception de soi -0.0657 0.0377 -0.1663 -0.0087 Biais externes 0.0022 0.0128 -0.0142 0.0424 Note : Bootstrap à 5000 échantillons Variab le dépendante : Intention de jouer Variab le indépendante : Condition x Implication Covariab les : Condition et Implication TABLEAU 37 : MÉDIATION DES DIFFÉRENTS BIAIS SUR INTENTION DE JOUER Chapitre 4 Résultats et Analyses 84 Il nous faut à présent vérifier la relation directe de l’interaction sur l’intention de jouer (relation c’), qui est d’après le tableau 38 non-significative (t=-0.566; pvalue=0.573). Effet direct (c') Coefficient Erreur standard t p-value Condition x Implication -0.044 0.077 -0.566 0.573 TABLEAU 38 : EFFET DIRECT DE L’INTERACTION DES PUBLICITÉS ET DE L’IMPLICATION SUR L'INTENTION DE JOUER Par conséquent, la relation de médiation est « indirecte seulement », ce qui signifie que le médiateur identifié est cohérent avec le cadre conceptuel, et qu’il y a peu de chance qu’il y ait d’autres médiateurs pouvant avoir une influence dans cette relation (X. Zhao, et al., 2010, p. 201). La médiation des biais de perception de soi est donc complète. Ainsi, l’hypothèse 5c est rejetée puisque les biais émotionnels ne sont pas médiateurs pour l’intention de jouer. L’hypothèse 4c est partiellement acceptée, puisque les biais externes ne sont pas des médiateurs, alors que les biais de perception de soi le sont. 4.3.4 Effet de médiation de l’attitude envers les JHA Pour terminer nos analyses, nous cherchons à savoir si l’attitude envers les JHA est un médiateur de l’effet de l’attitude envers Loto-Québec sur l’intention de jouer. Pour cela, une analyse de médiation simple est effectuée. Le test du Bootstrap nous donne un intervalle de confiance des biais corrigés dont le 0 est exclus (tableau 39). L’effet indirect (relation ab) est donc significatif, ce qui signifie que l’attitude envers les JHA est un médiateur de la relation. Chapitre 4 Résultats et Analyses 85 Bootstrapping Intervalle de confiance 95% des biais corrigés Effet indirect (ab ) Point d'estimation Erreur standard Borne inférieure Borne supérieure Attitude envers les JHA 0.1119 0.0499 0.0400 0.2655 Note : Bootstrap à 5000 échantillons Variab le dépendante : Intention de jouer Variab le indépendante : Attitude envers Loto-Québ ec TABLEAU 39 : MÉDIATION DE L' ATTITUDE ENVERS LES JHA SUR L'INTENTION DE JOUER L’analyse de l’effet direct de l’attitude envers Loto-Québec sur l’intention de jouer, présentée dans le tableau 40, nous permet de déterminer le type de médiateur. Effet direct (c') Coefficient Erreur standard t p-value Attitude envers Loto-Québec -0.021 0.072 -0.298 0.767 TABLEAU 40 : EFFET DIRECT DE L' ATTITUDE ENVERS LOTO-QUÉBEC SUR L’INTENTION DE JOUER On constate que l’attitude envers Loto-Québec n’a pas d’effet direct significatif sur l’intention de jouer (t=-0.298; p-value=0.767). Ainsi, d’après Zhao et al. (2010), la médiation de l’attitude envers les JHA est « indirecte seulement », ce qui signifie que le médiateur est cohérent avec notre cadre conceptuel et qu’il est improbable qu’il y ait d’autres médiateurs. Cette médiation est par conséquent complète. 4.3.5 Sommaire des tests d’hypothèses Au sein de ce chapitre, nous avons exposé les différentes analyses dans le but de vérifier la validité du cadre conceptuel et de nos hypothèses de recherche. Le tableau suivant résume les résultats obtenus de l’analyse de nos résultats. Chapitre 4 Résultats et Analyses 86 L'implication comme modérateur de l'impact de la publicité sur les biais H1 Si le joueur est faiblement impliqué envers les JHA, la publicité de type « évasion » a plus d’impact sur les biais émotionnels du joueur de JHA que s’il est fortement impliqué. Acceptée H2 Si le joueur est fortement impliqué envers les JHA, la publicité de type « argumentation » a plus d’impact sur les biais cognitifs du joueur de JHA que s’il est faiblement impliqué. Partiellement acceptée L'implication comme modérateur de l'impact de la publicité sur les attitudes et intention H3a Si le joueur est fortement impliqué envers les JHA, la publicité de type « argumentation » provoque un changement d’attitudes plus positif envers Loto-Québec que la publicité de type « évasion ». Acceptée H3b Si le joueur est fortement impliqué envers les JHA, la publicité de type « argumentation » provoque un changement d’attitudes plus positif envers les JHA que la publicité de type « évasion ». Rejetée H3c Si le joueur est fortement impliqué envers les JHA, la publicité de type « argumentation » provoque un changement d’intention de jouer plus positif que la publicité de type « évasion ». Rejetée Le rôle médiateur des biais cognitifs H4a H4b H4c H4a : Les biais cognitifs sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les attitudes envers Loto-Québec. H4b : Les biais cognitifs sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les attitudes envers les JHA. H4c : Les biais cognitifs sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les intentions de jouer. Rejetée Rejetée Partiellement acceptée Le rôle médiateur des biais émotionnels H5a H5b H5c Les biais émotionnels sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les attitudes envers Loto-Québec. Les biais émotionnels sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les attitudes envers les JHA. Les biais émotionnels sont des médiateurs de l’interaction de la publicité et de l’implication envers les JHA sur les intentions de jouer. Rejetée Rejetée Rejetée Le rôle médiateur de l'attitude envers les JHA H6 L’attitude envers les JHA est un médiateur de l’effet de l’attitude envers Loto-Québec sur les intentions de jouer. Lorsque les attitudes du joueur envers les JHA augmentent, ses intentions de jouer augmentent. TABLEAU 41 : SOMMAIRE DES RÉSULTATS Acceptée Chapitre 4 Résultats et Analyses 87 4.3.6 Autres résultats Il nous a paru intéressant d’effectuer des analyses supplémentaires afin de mettre en lumière certaines relations dont nous n’avions pas fait l’hypothèse. 4.3.6.1 Biais comme antécédents des attitudes et intentions Tout d’abord, d’après nos résultats, les biais cognitifs jouent un rôle dans le développement des attitudes et de l’intention de jouer. Cependant, le rôle des biais émotionnels est à mettre en perspective. En effet, d’un côté la publicité « évasion » liée à une faible implication du joueur affecte les biais émotionnels. D’un autre côté, ces biais n’ont aucun rôle de médiation et aucune autre hypothèse liée à ce type de biais n’est apparue significative. Ainsi, nous procédons à des analyses de régression sur les attitudes et l’intention afin de découvrir si les différents biais ont un effet direct sur ces variables. Dans un premier temps, l’analyse de régression des biais sur l’attitude envers LQ (tableau 42) est significative (F=4.039; p-value=0.009) et montre que seuls les biais externes ont un effet significatif et positif (β=0.289) sur l’attitude envers LQ (t=2.668; p=value=0.009). Ainsi, plus les joueurs possèdent des biais cognitifs externes, meilleure est leur attitude envers Loto-Québec. Variables Bêta standardisé t Sig. Biais émotionnels 0.154 1.498 0.137 Biais de perception de soi -0.030 -0.258 0.797 Biais externes 0.289 2.668 0.009 R² 0.110 Variable dépendante: Attitude envers Loto-Québec Singificativité du modèle : F=4.039 avec p-value=0.009 TABLEAU 42 : RÉGRESSION DE L'ATTITUDE ENVERS LOTO-QUÉBEC SUR LES BIAIS Cependant, le pouvoir explicatif de ces variables est très faible. En effet, le coefficient de détermination (R²) qui indique le pourcentage de la variation totale de l’attitude envers LQ expliquée par la régression est de 11.0%. Chapitre 4 Résultats et Analyses 88 Dans un deuxième temps, aucun des biais n’a d’effet sur les attitudes envers les jeux de hasard et d’argent (tableau 43). Même si la régression est significative (F=3.868; p-value=0.012), les trois tests t de Student sont non-significatifs. Variables Bêta standardisé t Sig. Biais émotionnels 0.076 0.733 0.465 Biais de perception de soi 0.168 1.449 0.151 Biais externes 0.174 1.604 0.112 R² 0.106 Variable dépendante: Attitude envers les JHA Singificativité du modèle : F=3.868 avec p-value=0.012 TABLEAU 43 : RÉGRESSION DE L'ATTITUDE ENVERS LES JHA SUR LES BIAIS Dans un dernier temps, le modèle de régression sur l’intention de jouer est aussi significatif (F=21.212; p-value=0.000). On observe dans le tableau suivant que seuls les biais cognitifs de perception de soi affectent de façon significative et positive (β=0.580) l’intention de jouer (t=6.072; p-value=0.000). Le coefficient de détermination est relativement meilleur pour ce modèle de régression puisqu’il explique presque 40% de la variance de l’intention (R²=0.394). Variables Bêta standardisé t Sig. Biais émotionnels 0.077 0.903 0.369 Biais de perception de soi 0.580 6.072 0.000 Biais externes 0.029 0.320 0.750 R² 0.394 Variable dépendante: Intention de jouer Singificativité du modèle : F=21.212 avec p-value=0.000 TABLEAU 44 : RÉGRESSION DE L'INTENTION DE JOUER SUR LES BIAIS En conséquence, les biais cognitifs sont des antécédents reconnus d’un changement d’attitude envers LQ (pour les biais externes) et d’intention de jouer (pour les biais de perception de soi). En revanche, une fois de plus, il est Chapitre 4 Résultats et Analyses 89 impossible de conclure sur un quelconque rôle des biais émotionnels sur ces variables. 4.3.6.2 Effet modérateur des biais émotionnels sur attitudes et intentions Pour en conclure avec un rôle potentiel des biais émotionnels dans notre recherche, nous évaluons son impact en tant que simple modérateur de l’effet de la publicité sur les attitudes et intentions. La figure 13 nous permet de visualiser cette relation à l’aide d’un schéma. Attitudes envers LotoQuébec Publicités de JHA - Évasion - Argumentation Attitudes envers les JHA Biais émotionnels Intentions de jouer FIGURE 13 : IMPACT MODÉRATEUR DES BIAIS ÉMOTIONNELS La MANOVA du tableau 45 ne nous indique pas de relation multivariée pour la modération. En effet, la trace de Pillai pour l’interaction entre la publicité et les biais émotionnels est non-significative (F=1.88 ; p-value=0.087). On remarque cependant qu’il y a un effet principal des biais émotionnels pour la MANOVA (F=3.78 ; p-value=0.013 pour la trace de Pillai). Chapitre 4 Résultats et Analyses Valeur F ddl de l'hypothèse Erreur ddl Sig. Trace de Pillai 0.10 1.65 6 190 0.136 Lambda de Wilks 0.90 1.67 6 188 0.129 Trace de Pillai 0.11 3.78 3 94 0.013 Lambda de Wilks 0.89 3.78 3 94 0.013 0.11 1.88 6 190 0.087 0.89 1.90 6 188 0.082 Effet Condition Biais émotionnels 90 Trace de Pillai Condition * Biais émotionnels Lambda de Wilks TABLEAU 45 : MANOVA DES ATTITUDES ET DE L’INTENTION DE JOUER SELON CONDITION ET BIAIS ÉMOTIONNELS Nous procédons à des analyses de variance univariées (tableau 46) pour chacune des variables indépendantes. On observe alors que l’interaction est significative pour l’attitude envers les JHA (F2,99=4.69; p-value=0.011). Pour l’intention de jouer, c’est l’effet principal des biais émotionnels qui est significatif (F1,100=8.52 ; p-value=0.004). Enfin, il n’y a aucun effet principal ou d’interaction pour l’attitude envers LQ. Source de variation condition Biais émotionnels Condition * Biais émotionnels Variable dépendante Somme des carrés de type III ddl Moyenne des carrés F Sig. Attitude envers LQ 3.14 2 1.57 0.98 0.378 Attitude envers les JHA 3.07 2 1.54 4.54 0.013 Intention de jouer 0.02 2 0.01 0.01 0.985 Attitude envers LQ 5.79 1 5.79 3.63 0.060 Attitude envers les JHA 1.43 1 1.43 4.22 0.043 Intention de jouer 5.70 1 5.70 8.52 0.004 Attitude envers LQ 4.24 2 2.12 1.33 0.270 Attitude envers les JHA 3.17 2 1.59 4.69 0.011 Intention de jouer 0.21 2 0.10 0.15 0.857 TABLEAU 46: ANOVA DES ATTITUDES ET INTENTION SELON CONDITION ET BIAIS ÉMOTIONNELS Chapitre 4 Résultats et Analyses 91 Ces résultats sont lourds de conséquences dans la mesure où les biais émotionnels ont un effet modérateur dans la relation entre le type de publicités et l’attitude envers les JHA. Nous décidons de dichotomiser la variable « biais émotionnels » afin de pouvoir comparer l’effet d’interaction d’un point de vue graphique : niveau faible (0) et niveau élevé (1). FIGURE 14 : INTERACTION ENTRE CONDITIONS ET BIAIS EMOTIONNELS SUR L' ATTITUDE ENVERS LES JHA Ainsi, d’après l’analyse de graphique de la figure 14, plus le joueur est biaisé émotionnellement, plus la publicité de type « argumentation » affecte les attitudes envers les JHA. Quand le niveau de biais est faible, c’est la publicité de type « évasion » qui affecte d’autant plus ces attitudes. Les biais émotionnels viennent aussi affecter directement l’intention de jouer puisque l’effet principal est significatif (tableau 46). Ainsi, d’après le tableau 47, la corrélation entre les biais émotionnels et l’intention de jouer est significative et positive (P=0.300 ; p-value=0.002). Chapitre 4 Résultats et Analyses Corrélation bivariée Biais émotionnels 92 Intention de jouer Corrélation de Pearson 0.300 Sig. (bilatéral) 0.002 N 102 TABLEAU 47 : CORRELATION ENTRE LES BIAIS EMOTIONNELS ET L’INTENTION DE JOUER Autrement dit, les joueurs qui sont davantage biaisés émotionnellement ont plus l’intention de jouer que les autres. Ceci est confirmé par l’analyse du graphique 15 puisque la courbe pour le niveau de biais élevée est supérieure à celle du niveau faible. FIGURE 15 : EFFET PRINCIPAL DES BIAIS EMOTIONNELS SUR L'INTENTION DE JOUER Chapitre 4 4.3.6.3 Résultats et Analyses 93 Corrélations avec la fréquence de jeu et le niveau de jeu problématique Finalement, nous nous attardons sur des relations de corrélation entre les biais, l’implication et l’intention de jouer, et des variables sociales. Il est par exemple intéressant de montrer que les corrélations entre la fréquence de jeu et l’implication, les biais émotionnels et cognitifs, ainsi que l’intention de jouer sont toutes significatives et positive (tableau 48). On en conclut que plus les joueurs de JHA jouent, plus ils sont impliqués envers les JHA, plus ils développent des biais émotionnels et cognitifs, et plus ils veulent rejouer, et inversement. Une analyse de corrélation avec cette fois le niveau de jeu problématique (PGSI) est effectuée. Mis à part pour les biais émotionnels, les résultats sont identiques avec des corrélations significatives et positives. Autrement dit, plus les joueurs ont un niveau de jeu problématique, plus ils s’impliquent envers les JHA, et plus ils développent de biais cognitifs, et inversement. Enfin, on note la forte corrélation qui existe entre la fréquence de jeu et l’intention de jouer d’une part (P=0.711; p-value=0.000) et le niveau de jeu problématique d’autre part (P=0.443; p-value=0.000). Par conséquent, plus un joueur s’adonne aux JHA, plus il voudra rejouer et plus il développera un comportement pathologique et inversement. Chapitre 4 Résultats et Analyses Fréquence de jeu Niveau de jeu problématique Corrélation de Pearson 0.335 0.347 Sig. (bilatéral) 0.001 0.000 N 102 102 Corrélation de Pearson 0.235 0.052 Sig. (bilatéral) 0.018 0.604 N 102 102 Corrélation de Pearson 0.487 0.249 Sig. (bilatéral) 0.000 0.012 N 102 102 Corrélation de Pearson 0.204 0.286 Sig. (bilatéral) 0.040 0.004 N 102 102 Corrélation de Pearson 0.711 0.463 Sig. (bilatéral) 0.000 0.000 N 102 102 Corrélation de Pearson 0.443 Sig. (bilatéral) 0.000 N 102 Corrélation bivariée Implication Biais émotionnels Biais de perception de soi Biais externes Intention de jouer Niveau de jeu problématique 94 TABLEAU 48 : CORRÉLATION ENTRE L’IMPLICATION, LES BIAIS, L’INTENTION DE JOUER AVEC LA FRÉQUENCE DE JEU ET LE NIVEAU DE JEU PROBLÉMATIQUE Chapitre 5 5 Discussion et conclusions 95 DISCUSSION ET CONCLUSION Après avoir analysé les résultats d’un point de vue statistique, nous allons d’abord les discuter dans le contexte de la recherche, en les mettant en perspective avec la littérature existante sur les jeux de hasard et d’argent, les biais cognitifs et émotionnels, ainsi que sur les effets de la publicité de JHA. Par la suite, nous présentons les contributions scientifiques, managériales et sociales de cette recherche. Enfin, nous commentons les différentes limites inhérentes à notre étude et avançons des avenues pour de futures recherches. 5.1 Discussion des résultats 5.1.1 Une typologie des publicités de JHA Une importante partie de notre méthodologie consiste à développer de façon empirique une typologie des publicités de JHA, en prenant appui sur les analyses de contenu et rapports de recherche existants dans la littérature (Derevensky, et al., 2007; Griffiths, 2005; Korn, et al., 2005; McMullan & Miller, 2009). Tout d’abord, à l’aide d’une analyse de contenu et d’une analyse factorielle, nous avons fait ressortir 4 thématiques différentes, et très proches de celles énoncées dans la littérature (thèmes de l’évasion, de la compétence, de la socialisation, et de la sensation). Par la suite, en suivant la procédure de Bloch et al. (1994), nous avons procédé à une analyse de regroupement avec un échantillon de 147 publicités de Loto-Québec de 2005 à 2010. Les résultats de cette analyse nous permettent de dégager cinq types distincts de publicités de JHA: les publicités de types « évasion », « sensations partagées », « bonheur lié au gain », « socialisation », et enfin « argumentation ». Ainsi, leurs caractéristiques permettent non seulement de les distinguer, mais aussi et de les comparer entre elles. Par exemple, ces publicités ne différent pas sur leur forme, autrement dit sur des dimensions musicales, narratives et visuelles. En revanche, elles différent sur le public ciblé. Par exemple, le groupe de publicités « argumentation » vise plus les jeunes et les experts que les autres groupes. Deux groupes appartenant à cette typologie, soit les groupes « argumentation » et « évasion » sont très liés aux résultats de la littérature. Ces groupes nous Chapitre 5 Discussion et conclusions 96 semblent plus favorables au développement de biais chez les joueurs. Les thématiques associées au groupe argumentation sont axées sont l’éthos du gain et des perceptions erronées des compétences des joueurs (Korn, et al., 2005; McMullan & Miller, 2009). Les publicités de ce groupe sont donc plus à même de biaiser cognitivement les joueurs de JHA. Parallèlement, les publicités du groupe « évasion » exposent le jeu comme une expérience amusante et passionnante, et comme une échappatoire à la réalité (Derevensky, et al., 2010; Korn, et al., 2005; McMullan & Miller, 2009). Elles sont susceptibles d’amener le joueur à se mettre à la place des gagnants (Escalas, 2004; McMullan & Miller, 2009) et de provoquer des biais émotionnels. 5.1.2 Les biais cognitifs et émotionnels Il existe de nombreux antécédents du jeu pathologique qui touchent à des domaines génétique, biologique, psychologique et environnemental (Blaszczynski & Nower, 2002; Sharpe, 2002). Dans leur typologie des joueurs pathologiques, Blaszczynski et Nower (2002) évoquent l’existence d’un groupe de joueurs normaux, autrement dit ne présentant pas de troubles émotionnels ou psychologiques préalables. Ils sont pourtant susceptibles de devenir des joueurs pathologiques. La théorie cognitive a fait office de référence dans le domaine du jeu pathologique (Ferland, et al., 2002) et avance l’existence de biais cognitifs (Toneatto, et al., 1997). La revue de la littérature et l’étude de Steenbergh et al. (2002) nous ont permis de distinguer deux principaux types de biais cognitifs : (1) les biais de perception de soi, ou comment le joueur évalue sa propre chance, compétences et connaissances par rapport au jeu, et (2) les biais externes, i.e. l’évaluation de ces mêmes concepts dans un contexte général de jeu. D’après la littérature, les conclusions sur l’impact des biais cognitifs sur l’attitude envers les JHA et l’intention de jouer sont contradictoires. D’autres études avancent l’existence de biais émotionnels, qui suscitent des émotions plus positives en lien avec des expériences passées de JHA et qui provoqueraient également une intention de rejouer (Cowley, 2008; Stocco & Fum, 2008). Un des objectifs de notre recherche était de savoir si la publicité commerciale des jeux de hasard et d’argent biaise les consommateurs, et en particulier si la Chapitre 5 Discussion et conclusions 97 publicité « évasion » provoque plus de biais émotionnels que la publicité « argumentation », et inversement pour les biais cognitifs. 5.1.3 Le rôle central de l’implication envers les JHA Afin d’y répondre, nous nous sommes basés sur le modèle ELM de Petty et Cacioppo (1986b) qui postule que l’implication est un modérateur de l’effet de la publicité sur le changement d’attitude (Petty & Cacioppo, 1981). Dans un premier temps, en accord avec la théorie et selon nos attentes, nous avons démontré que sous faible implication, c’est la publicité « évasion » qui augmente les biais émotionnels des joueurs de JHA. En effet, ce type de publicité utilise la voie périphérique de persuasion du modèle ELM, la voie des émotions. Le joueur étant faiblement impliqué et donc moins motivé à traiter le contenu informatif du message, la publicité touche les émotions des joueurs. Ainsi, elle les biaise en les poussant à se rappeler des expériences de jeu de façon plus positive. Si le joueur au contraire est fortement impliqué, donc motivé à traiter l’information, la publicité « argumentation » provoque plus de biais de perception de soi que la publicité « évasion ». De fait, elle utilise cette fois-ci la voie centrale qui prône un traitement de l’information plus important. Or, ce type de publicité est basé sur une argumentation qui fait appel à des biais cognitifs. À ce titre, il est intéressant de souligner que la publicité n’a pas d’impact sur les biais externes. Or, les biais cognitifs de perception de soi diffèrent des biais cognitifs externes car ils ne s’adressent pas à la même cible : les premiers s’adressent aux joueurs eux-mêmes et les seconds s’adressent aux autres joueurs de JHA. Ainsi, la publicité « argumentation » biaise les propres perceptions de chance et de compétences des joueurs impliqués, vis-à-vis d’eux-mêmes mais pas vis-à-vis des autres. Ces résultats sont d’une importance majeure car jusqu'à présent, aucune étude n’était parvenue de façon empirique à démontrer la dangerosité de la publicité de JHA. 5.1.4 La remise en question du modèle ELM Selon ce même modèle ELM, on s’attend à ce qu’emprunter la voie centrale de persuasion amène le récepteur du message à former des attitudes plus stables Chapitre 5 Discussion et conclusions 98 et plus prédictives de son comportement (Cialdini, et al., 1981). Or, la publicité « argumentation » n’a, d’après nos résultats, pas eu plus d’impact sur les attitudes envers le jeu et l’intention de jouer que la publicité « évasion ». Les limites du modèle ELM peuvent expliquer ces résultats. D’abord, Petty et Cacioppo (1986a) ont admis que les deux routes de persuasion peuvent coexister et être utilisées en même temps. De plus, le rôle inférieur de l’émotion et de l’affect en publicité est remis en question, et certains auteurs avancent que la cognition a besoin des émotions pour fonctionner (Morris, et al., 2005). D’autres auteurs ont développé un modèle de persuasion publicitaire, le modèle MAC dans lequel l’affect domine la cognition (Ambler & Burne, 1999). Ceci vient prouver l’importance des émotions dans la publicité, et notamment dans le domaine du jeu. Le fait que la publicité « évasion » persuade autant que la publicité « argumentation » pourrait s’expliquer également grâce à la théorie de la transportation narrative et le concept de la simulation mentale. La transportation narrative est définie comme « une immersion dans un texte », autrement dit le degré auquel le récepteur est absorbé par une histoire (Green & Brock, 2000, p. 702). Les auteurs notent que la transportation ne se limite pas à la seule lecture de textes écrits, mais que les « mondes narratifs » incluent tout ce qui à trait à de l’information narrative : le lecteur peut être par exemple un auditeur ou un téléspectateur (Green & Brock, 2000, p. 702). Ainsi, un message promotionnel ou une publicité a le pouvoir de transporter un téléspectateur. Par exemple, « lottery ads encourage consumers to « dream a little dream » of how they would spend their millions, were they to win » (Escalas, 2004, p. 37).Pour Green et Brock (2000), les individus transportés ressortent d’une certaine manière transformés par l’expérience, avec des croyances changées. Le stimulus pour la condition « évasion » amène le joueur à se mettre à la place des gagnants. Or, ce processus est en lien direct avec le concept de la simulation mentale. La simulation mentale correspond à une représentation mentale imitative de certains événements (Taylor & Schneider, 1989) et se présente habituellement sous une structure narrative, autrement dit une histoire Chapitre 5 Discussion et conclusions 99 ou une narration. L’expression commune « se mettre à la place du conducteur » (Escalas, 2004, p. 46) décrit parfaitement ce concept. En accord avec la théorie de la transportation narrative de Green et Brock (2000), Escalas (2004) démontre que c’est au travers d’une réponse émotionnelle plus forte et de sentiments positifs que la transportation (évoquée par la simulation mentale) parvient à persuader l’individu. « People who imagine winning the lottery in response to an ad may feel luckier and may buy more lottery tickets » (Escalas, 2004, p. 46). La publicité de type « évasion » a donc ce pouvoir de persuader par la voie des émotions. 5.1.5 L’attitude envers la marque de JHA En revanche, quand un joueur est impliqué, la publicité « argumentation » provoque un changement d’attitude envers Loto-Québec plus important que la publicité « évasion ». Ainsi, dans le cas de la publicité de JHA, la voie centrale de persuasion du modèle ELM avec des publicités de type « argumentation » mène à une attitude envers Loto-Québec plus positive que la voie périphérique. Ce résultat est une avancée importante dans le domaine des jeux de hasard et d’argent. En effet, aucune étude ne s’est intéressée à ce concept pourtant inhérent au marketing. La marque de JHA, Loto-Québec dans notre recherche, prend donc une place de premier ordre dans la mesure où c’est également un antécédent de l’intention de jouer. La médiation complète de l’attitude envers les JHA nous apporte finalement une information indispensable : une attitude positive envers la marque pousse les individus à jouer, à travers une attitude positive envers les jeux. 5.1.6 Le rôle médiateur et modérateur des biais Nous avons cherché à démontrer le rôle médiateur des biais cognitifs et émotionnels dans le modèle proposé. L’objectif était en effet de savoir si les biais sont innés chez les joueurs, toutes choses étant égales par ailleurs, ou si la publicité persuade les joueurs en développant chez eux plusieurs types de biais. Pour ce qui est de l’attitude envers LQ et envers les JHA, aucune relation de médiation n’a été trouvée. Dans le cas de l’intention de jouer, nos résultats nous ont montré que les biais cognitifs de perception de soi, en tant qu’antécédent de Chapitre 5 Discussion et conclusions 100 l’intention de jouer, ont ce pouvoir de médiation. La méthode employée, celle de Zhao et al. (X. Zhao, et al., 2010), nous a permis de conclure à une médiation « indirecte seulement », ce qui veut dire que les biais de perception de soi sont les seuls médiateurs de cette relation. De fait, les autres types de biais (émotionnels et externes) n’entrent pas en jeu dans cette relation. Cela signifie que lorsqu’un joueur est impliqué envers le jeu, une publicité pour les JHA va le pousser à jouer, du fait qu’elle l’amène à penser que lui-même a plus de chance, de compétences et de connaissances, et qu’il peut mieux prédire les résultats. En ce qui concerne les biais émotionnels, il n’a également pas été possible de conclure à un rôle d’antécédent. Comme nous l’avons vu, ce concept est relativement nouveau dans ce domaine et très peu d’études s’y sont intéressées. Une analyse plus poussée a toutefois faire ressortir le rôle modérateur des biais émotionnels dans la relation entre les publicités et l’attitude envers les JHA, peu importe le niveau d’implication du joueur. Ainsi, ce résultat indique que plus un joueur se crée des souvenirs positifs quant à son expérience vis-à-vis du jeu, plus la publicité de JHA provoque un changement d’attitude positif envers les JHA. 5.1.7 La fréquence de jeu et le jeu problématique Finalement, on a remarqué que sous forte implication, la publicité « argumentation » provoque non seulement plus de biais cognitifs, mais aussi plus de biais émotionnels que la publicité « évasion ». L’implication seule joue aussi un rôle direct dans le développement des biais externes, d’une attitude favorable envers les JHA et d’une intention de jouer plus grande. Or, des analyses de corrélations supplémentaires nous ont permis de déceler des relations entre l’implication, l’intention de jouer, la fréquence de jeu, ainsi que le niveau de jeu problématique. Ainsi, plus un joueur se sent impliqué vis-à-vis des JHA, plus il va jouer et aura l’intention de jouer et plus il a de chance de devenir un joueur pathologique. De même, en accord avec plusieurs études sur les types de joueurs (Joukhador, et al., 2004; Joukhador, et al., 2003; Myrseth, et al., 2010), nous pouvons conclure sur une différence de niveau de biais cognitifs entre les joueurs problématiques et les joueurs ordinaires. En effet, les deux types de biais cognitifs et le niveau de jeu problématique sont corrélés Chapitre 5 Discussion et conclusions 101 positivement, ce qui n’est pas le cas avec les biais émotionnels puisque seule la fréquence de jeu est positivement corrélée au niveau de biais émotionnels. Ce dernier concept est seulement corrélé à la fréquence de jeu, autrement dit, plus les joueurs jouent, plus ils sont émotionnellement biaisés. Ceci est tout à fait compréhensible puisque les biais émotionnels se forment au travers de l’expérience de jeu du joueur. 5.1.8 Conclusion L’objectif de cette étude est avant tout d’approfondir les connaissances à propos de la publicité de JHA, et de son impact. Plus spécifiquement, notre recherche s’est attardée dans un premier temps à valider l’existence de plusieurs types de publicités de JHA, qui ont des conséquences différentes sur certaines attitudes des joueurs. Une analyse de regroupement nous a permis de distinguer cinq grands types de publicités de JHA bien distincts. De plus, la méthodologie pour réaliser l’expérimentation nous assure d’une bonne validité écologique de la recherche. Une étude plus poussée de deux types particuliers de publicités, « évasion » et « argumentation », a montré que, quand la personne est impliquée envers les jeux de hasard et d’argent, la publicité de JHA affecte des variables attitudinales et comportementales. Toutefois, leur impact différent légèrement. En effet, la publicité « argumentation » provoque un changement d’attitude envers LotoQuébec plus important que la publicité « évasion ». Or, on a découvert que ce type d’attitude incite les joueurs à s’adonner aux jeux, à travers une attitude positive envers les JHA. Aucune étude dans le domaine des JHA n’a cherché jusqu’à présent à mesurer le concept d’attitude envers la marque de JHA. La connaissance de LotoQuébec est telle au Québec qu’il nous a paru indispensable, au vu de la littérature, de nous y attarder. Aussi, notre étude permet de mieux cerner le rôle moteur de la marque dans le développement d’attitudes positives envers le jeu, d’intentions de jouer et finalement dans le développement des problèmes de jeu. Chapitre 5 Discussion et conclusions 102 Les biais des joueurs sont au centre de cette présente recherche. La littérature sur les biais cognitifs est dense, et nous avons choisi de les classer en deux groupes : les biais de perception de soi, et les biais externes. A posteriori, ce choix semble judicieux dans la mesure où les biais cognitifs par rapport à soi (biais de perception de soi) semblent jouer un rôle bien plus important que les biais externes des joueurs. De plus, très peu d’articles évoquent le concept de biais émotionnel, qui comme nous l’avons vu, a une place à part entière dans le domaine du jeu pathologique. Nous avons donc démontré que la publicité de JHA a le pouvoir d’engendrer et de stimuler ces différents biais. Plus particulièrement, la publicité « argumentation » affecte surtout les biais de perception de soi sous forte implication du joueur, tandis que la publicité « évasion » affecte davantage les biais émotionnels du joueur sous faible implication. Ceci vient remettre en question le fait que la publicité cherche avant tout à maintenir et renforcer des habitudes de jeu chez des gros joueurs impliqués, plutôt que d’en développer chez des joueurs « ordinaires » faiblement impliqués (Binde, 2009; Derevensky, et al., 2010). Par la suite, les biais de perception de soi, en tant que médiateur de l’effet de la publicité sur l’intention de jouer (quand le joueur est impliqué) sont en partie responsables du développement du jeu pathologique. La publicité provoque donc une envie de jouer par le fait qu’elle amène les gros joueurs à penser qu’ils ont plus de chance et de compétences au jeu. En ce qui concerne les biais émotionnels, les conclusions différent puisque leur effet est modérateur. Autrement dit, plus les joueurs se créent une expérience positive par rapport au jeu, plus la publicité persuade les joueurs de s’adonner aux JHA. En conclusion, cette étude présente des résultats qui décrivent la publicité de JHA et démontrent sa dangerosité pour des joueurs non-problématiques et problématiques. Les biais, stimulés par la publicité, se développent au fur et à mesure que les individus jouent, ce qui les amène à se construire des attitudes plus favorables envers LQ et les JHA, et les pousse à jouer d’autant plus. Chapitre 5 Discussion et conclusions 103 5.2 Contribution de la recherche Les contributions de cette recherche sont dans un premier temps d’ordre académique, puisque notre analyse de regroupement et notre expérimentation a permis d’accroître les connaissances quant à la relation entre la publicité et le développement des biais chez les joueurs de JHA. Dans un deuxième temps, elles sont d’ordre managérial et social, puisque des recommandations pratiques et des mises en garde sont formulées. 5.2.1 Contributions académiques Ce travail constitue une première dans le domaine du marketing social quant à la compréhension des publicités de JHA, leurs impacts, ainsi que sur le rôle de deux types de biais : les biais cognitifs et les biais émotionnels. En effet, à notre connaissance aucune étude de ce type n’a été réalisée, et les résultats avancés dans notre recherche permettent de répondre à ce manque dans la littérature scientifique. Nous pouvons conclure, dans certaines conditions, à la dangerosité de la publicité et son possible rôle à jouer dans le développement du jeu pathologique. En particulier, nous avons développé la première typologie des publicités de JHA. Celle-ci peut désormais servir de base aux futures recherches sur la publicité de JHA, et être utilisée afin de comparer plus en détails leurs effets différenciés. Nous avons pu conclure sur le rôle majeur des biais dans la construction d’attitudes envers les JHA et envers la marque Loto-Québec et de l’intention de jouer. Pour les biais cognitifs, cette recherche s’inscrit dans la théorie cognitive, et va plus loin en démontrant le rôle médiateur des biais de perception de soi. L’intérêt des biais émotionnels a également été mis en valeur par son rôle modérateur. Ce concept relativement nouveau permet de dépasser la théorie cognitive et proposer un nouvel antécédent possible du jeu pathologique. Suite aux conclusions de l’étude, il va sans dire que les biais émotionnels ont un rôle à part entière et qu’il est indispensable de les prendre en considération lors de futures recherches. Chapitre 5 Discussion et conclusions 104 Une fois de plus, le modèle de persuasion publicitaire ELM a été utilisé. Bien que certains résultats soient en accord avec la théorie, ils ont démontré certaines limites du modèle, notamment sur la supériorité des cognitions sur les émotions. En effet, la publicité « évasion » qui se base sur l’affect a autant d’effet sur les attitudes et intentions comportementales que la publicité « argumentation » qui se base sur la cognition. Comme énoncé par Petty et Cacioppo (Petty & Cacioppo, 1986a), on peut ainsi penser que les deux routes de persuasion sont utilisées en même temps. Enfin, cette recherche offre également des apports d’un point de vue méthodologique. L’expérimentation s’est basée sur un processus de visionnement de publicités, basé sur la recherche de Zhao et Pechmann (2007) qui permet d’établir une forte validité écologique tout en obtenant des résultats significatifs dans le domaine de la persuasion publicitaire. De plus, l’utilisation de la méthode de Zhao et ses collègues (2010) a permis de conclure sur des effets de médiation, qui n’auraient pas été mis en lumière suivant celle de Baron et Kenny (Baron & Kenny, 1986). Ceci démontre donc une fois de plus son utilité et son importance dans le domaine du marketing. 5.2.2 Implications managériales et sociales En ce qui concerne les implications managériales et sociales, cette recherche suggère de porter attention aux risques associés à la publicité de JHA. La publicité en général cherche à faire connaître des produits ou services et à persuader les individus de les consommer. Chez les joueurs cependant, ces publicités sont dangereuses, puisqu’en les incitant à jouer, elles peuvent provoquer des troubles comportementaux et mener à une pathologie du jeu. Notre étude tend également à montrer l’impact de la marque de JHA sur les attitudes et intentions comportementales des joueurs. Ainsi, il est clair que plus Loto-Québec possède une image favorable, plus la marque est susceptible de pousser les joueurs à développer des comportements excessifs vis-à-vis du jeu. Dans la lutte contre le jeu excessif, les efforts doivent être concentrés sur la diminution des biais cognitifs d’une part, et des biais émotionnels d’autre part. Chapitre 5 Discussion et conclusions 105 S’il n’est pas possible de mettre en place des mesures légales pour diminuer ce risque pathologique, il est en revanche plus facile de chercher à enrayer le développement des biais chez les individus, facteurs principaux du développement du jeu pathologique. Des campagnes publicitaires de mises en garde ont par exemple été réalisées par le Ministère de la Santé et des Services Sociaux (MSSS) et de la fondation Mise sur Toi (FMST) de Loto-Québec. Toutefois, pour être efficaces, ces campagnes devront chercher avant tout à contrer le développement des biais cognitifs et émotionnels. 5.3 Limites de la recherche Notre recherche comporte de façon évidente certaines limites qui doivent être prises en considération dans un souci de d’interprétation des résultats et des recommandations. On retrouve par conséquent des limites au niveau théorique, ainsi qu’au niveau des manipulations et de l’échantillonnage. Bien qu’on ait obtenu des résultats significatifs majeurs à propos des biais émotionnels, ce concept est comme nous l’avons précisé relativement nouveau et peu étudié. Ainsi, une des limites de notre étude réside dans la mesure de ce concept, puisqu’une échelle à un seul item a été utilisée. Même si nous avons démontré sa validité d’un point de vue nomologique, il n’empêche que mesurer un concept à l’aide d’un seul item ne permet pas d’en appréhender toutes ses dimensions. La mesure des biais émotionnels est par conséquent beaucoup moins sensible que celle des biais cognitifs. Dans le même ordre d’idées, de nombreuses mesures des biais cognitifs ont vu le jour depuis que la théorie cognitive fait figure de référence dans le domaine de la psychologie du joueur. Nous avons choisi le Gamblers’ Belief Questionnaire (Steenbergh, et al., 2002) que nous avons ajusté pour cette étude. Cette échelle nous a paru la mieux adaptée, et surtout la plus valide. Néanmoins, les chercheurs dans le domaine de la pathologie du jeu ne se sont pas encore mis d’accord sur une mesure universelle. Ainsi, l’utilisation d’une autre échelle de mesure des biais cognitifs, comme celles à 53 items de Joukhador et ses collègues (2003) aurait pu nous donner des résultats différents. De plus, l’échelle choisie pour cette étude prend en considération plusieurs types de biais cognitifs Chapitre 5 Discussion et conclusions 106 distincts. Ainsi, on peut se demander si la publicité de la condition « argumentation » qui a été sélectionnée n’encouragent que certains types de biais. Dans ce cas, l’échelle de mesure des biais cognitifs pourrait être trop générale pour capturer des effets plus spécifiques. Quant à l’échelle de l’intention de jouer, la mesure de ce concept est très générale. Elle concerne en effet plusieurs types de jeux, alors que les stimuli publicitaires ne portent que sur un seul type de JHA. On est en droit de penser qu’une mesure plus précise aurait donné des résultats différents. Par la suite, notre analyse de regroupement des publicités de JHA s’est basée sur un échantillon de publicités non-exhaustif et relativement petit. En effet, cette analyse se base sur 147 publicités et ne permet donc pas de proposer une typologie théoriquement valide. Aussi, il se peut que le choix de nos stimuli, même s’ils ont été vérifiés et validés par un pré-test, ne soit pas entièrement représentatif. De plus, l’émission télévisée « Un gars Une fille » ainsi que les publicités de remplissage ont été choisies de façon subjective. Même si nous avons cherché à ce qu’il n’y ait aucun rapport avec les JHA, ces publicités et émissions ont sûrement affecté certaines variables mesurées et ont donc pu perturber les résultats de l’étude. Enfin, une dernière limite réside dans l’échantillonnage et la collecte de données. D’abord, les trois questions filtres pour définir un joueur d’un non-joueur ont été tirées de l’étude de Moore et Ohtsuka (1997). Or, même si cette définition parait appropriée pour notre étude, les auteurs l’utilisent pour un échantillon d’adolescents. De plus, bien que la taille de notre échantillon, 102 individus regroupés dans trois conditions expérimentales, soit suffisante pour réaliser des inférences statistiques (chaque condition contient au moins 30 répondants), il pourrait être pertinent de conduire une autre recherche impliquant un plus grand nombre d’individus par conditions expérimentales. Il faut donc être vigilant quant à la généralisation des résultats à la population des joueurs au Québec. Chapitre 5 Discussion et conclusions 107 5.4 Avenues de recherches futures Nos résultats ouvrent des perspectives intéressantes sur l’impact des différentes publicités du jeu. D’abord, ce travail met en évidence l’existence de groupes de publicités distincts. Bien que nous nous soyons attardés sur l’impact des deux types qui nous paraissent les plus risqués, d’éventuelles recherches sur les trois autres types permettraient d’approfondir l’étude sur la persuasion publicitaire dans le domaine des JHA. De plus, il serait intéressant de réaliser une typologie plus fine, en utilisant un échantillon exhaustif et en proposant une analyse de contenu plus détaillée. Concernant le développement du jeu pathologique, aucune étude à notre connaissance n’a tenté de déterminer si la publicité parvient à persuader les non-joueurs de s’adonner aux JHA. Ceci est certainement dû au fait que les pathologies se développent avant tout chez les adolescents et qu’ils sont d’autant plus susceptibles d’être affectés par la publicité (Derevensky, et al., 2007). Ainsi, l’impact des publicités de JHA sur les adolescents fait partie des recherches à envisager dans le futur. L’introduction de la variable sur l’attitude envers la marque de JHA nous a permis de mieux appréhender les relations qui existent entre la publicité et le développement des intentions comportementales et du jeu pathologique. Aussi, une autre voie de recherche intéressante consiste à travailler davantage sur le concept de la marque dans le domaine de la santé publique, et à le mettre en perspective avec des domaines de recherches connexes. D’un côté, la littérature sur l’image de marque par exemple est abondante et elle apporterait sans doute d’autres réponses sur le lien entre Loto-Québec et le jeu pathologique. D’un autre côté, il serait approprié de mettre en parallèle la recherche dans le domaine des JHA avec celle sur l’alcool et le tabac, puisque ces pathologies sont semblables (Derevensky, et al., 2010; Derevensky, et al., 2007; Korn, et al., 2005). Ceci nous amène à proposer une dernière avenue de recherche sur les publicités de mises en garde contre le jeu excessif. On ne recense que très peu d’études sur ce sujet (e.g., Munoz, Chebat, & Suissa, 2010). Au Québec par Chapitre 5 Discussion et conclusions 108 exemple, le MSSS a lancé un programme de sensibilisation contre le jeu pathologique et propose une aide aux joueurs problématiques, via leur site internet (Ministère de la Santé et des Services Sociaux, 2011). La fondation Mise sur Toi, tout comme le MSSS, a lancé depuis peu une campagne publicitaire sensée contrer le jeu excessif. Bien que cette fondation soit un organisme indépendant à but non-lucratif, elle est « essentiellement financé par un don annuel de Loto-Québec » (Mise sur Toi, 2011). On est donc en droit de se demander si ces campagnes parviennent à freiner le développement du jeu pathologique, ou si un effet « boomerang » se produit. En effet, « le jeu doit rester un jeu », slogan de la FMST ainsi que ses messages publicitaires banalisent les JHA et pourraient avoir un effet inverse. Or, d’après nos constats, les biais chez les joueurs sont au centre des préoccupations actuelles. Par conséquent, il serait tout à fait approprié de comparer l’efficacité de tels messages de prévention, notamment en employant la théorie de l’inoculation de McGuire (1961) appliquée au marketing et à la publicité (e.g., Compton & Pfau, 2004; Szybillo & Heslin, 1973). 109 ANNEXE 1 Illustration des stimuli Publicité Argumentation Publicité Évasion 110 ANNEXE 2 Questionnaire pour le pré-test des stimuli ETUDE SUR DES PUBLICITÉS DE LOTERIES Vous trouverez dans les prochaines pages un questionnaire anonyme auquel nous vous invitons à répondre. Ce questionnaire a été développé dans le cadre d’un mémoire à HEC Montréal. Répondez sans hésitation aux questions incluses dans ce questionnaire, car ce sont vos premières impressions qui reflètent généralement le mieux votre pensée. Il n’y a pas de limite de temps pour répondre au questionnaire, bien que nous ayons estimé que cela devrait vous prendre environ 5 minutes. Ce questionnaire est composé de 2 parties. Les renseignements recueillis sont anonymes et resteront strictement confidentiels; ils ne seront utilisés que pour l’avancement des connaissances et la diffusion des résultats globaux dans des forums savants ou professionnels. Vous êtes complètement libre de refuser de participer à ce projet et vous pouvez décider en tout temps d’arrêter de répondre aux questions. Le fait de remplir ce questionnaire sera considéré comme votre consentement à participer à notre recherche et à l’utilisation des données recueillies dans ce questionnaire pour d’éventuelles recherches. Merci de votre précieuse collaboration! Jean-Baptiste Delabre Étudiant à la M. Sc. HEC Montréal [email protected] 111 I. Avant-propos Un des objectifs de la publicité est de véhiculer un ou plusieurs messages chez les consommateurs. C’est le cas de la publicité que vous allez voir. Suite à la publicité, il y aura une série de 8 énoncés. Ces énoncés font référence aux messages susceptibles d’être véhiculés par cette publicité. Il est indispensable que vous regardiez la publicité attentivement et entièrement pour pouvoir répondre aux questions suivantes. Note: vous pouvez la regarder plus d’une fois. 1. Parmi les énoncés suivants, lesquels s’appliquent à la séquence publicitaire que vous venez de voir : Oui Non 1. Le jeu permet de comprendre de nouvelles choses, de résoudre des problèmes ou de comprendre d’autres personnes. 2.Les connaissances et les compétences du joueur peuvent accroitre ses probabilités de gain. 3.Un individu peut influencer en règle général le résultat de son propre jeu. 4.La publicité exprime le fait que le jeu nous amène à faire partie d’une élite, d’une classe sociale plus élevée. 5.Le jeu nous permet de faire tout ce dont on a envie. 6.Jouer ou gagner au jeu nous aide à échapper à l’ennui et la monotonie de la vie de tous les jours. 7.Le jeu fait en sorte de changer les rêves en réalité. 8.Le jeu nous permet de mieux nous connaître, et d’avoir une certaine estime de nous-mêmes. Note : suite à cela, la deuxième publicité est présentée, et les sujets répondent une seconde fois aux mêmes questions. 112 ANNEXE 3 Questionnaire principal sur les Jeux de Hasard et d’argent ETUDE SUR LES JEUX DE HASARD ET D’ARGENT Vous trouverez dans les prochaines pages un questionnaire anonyme auquel nous vous invitons à répondre. Ce questionnaire a été développé dans le cadre d’un mémoire à HEC Montréal. Répondez sans hésitation aux questions incluses dans ce questionnaire, car ce sont vos premières impressions qui reflètent généralement le mieux votre pensée. Il n’y a pas de limite de temps pour répondre au questionnaire, bien que nous ayons estimé que cela devrait vous prendre environ 20 minutes. Les renseignements recueillis sont anonymes et resteront strictement confidentiels; ils ne seront utilisés que pour l’avancement des connaissances et la diffusion des résultats globaux dans des forums savants ou professionnels. Vous êtes complètement libre de refuser de participer à ce projet et vous pouvez décider en tout temps d'arrêter de répondre aux questions. Le fait de remplir ce questionnaire sera considéré comme votre consentement à participer à notre recherche et à l’utilisation des données recueillies dans ce questionnaire pour d’éventuelles recherches. Veuillez noter que les données pourront servir à d’autres recherches. Si vous avez des questions concernant cette recherche, vous pouvez contacter le chercheur principal, Jean-Baptiste Delabre, au numéro de téléphone ou à l’adresse de courriel indiqués ci-dessous. Le comité d’éthique de la recherche de HEC Montréal a statué que la collecte de données liée à la présente étude satisfait aux normes éthiques en recherche auprès des êtres humains. Pour toute question en matière d’éthique, vous pouvez communiquer avec le secrétariat de ce comité au 514-340-7182 ou au [email protected] Merci de votre précieuse collaboration! Jean-Baptiste Delabre Étudiant à la M. Sc. HEC Montréal [email protected] Jean-Charles Chebat Professeur titulaire HEC Montréal [email protected] 113 I. Questions préliminaires 1. Pour les activités mentionnées ci-dessous, veuillez indiquer votre fréquence d’utilisation en cochant l’une des catégories suivantes : Jamais (a) Je joue aux cartes pour de l'argent (c) Je parie de l’argent sur le sport (d) J'achète des billets de loteries (e) Je parie de l’argent sur les tables de jeu au Casino (f) Je joue aux machines à sous au Casino (k) Je joue aux appareils de loterie vidéo (i) Je joue au Bingo pour de l'argent (j) Je joue à des jeux et je parie de l’argent sur les résultats sur internet (ex: poker) (j) Je joue à des jeux de hasard et d'argent sur internet Plus d'une Plus d'une fois par an. fois par Une fois Moins d'une mois. Moins par an fois par d'une fois mois par semaine Une fois par semaine ou plus 114 2. Quel est le plus gros montant d'argent que vous avez déjà joué en une semaine? a. Je n’ai jamais joué aux jeux de hasard et d’argent. b. Moins de $10 c. Entre $10 de $99, d. Entre $100 de $499, e. Entre $500 de $999, f. Entre $1000 de $4999, g. Plus de $5000 3. Combien vous avez dépensé dans les jeux de hasard et d’argent au cours des 12 derniers mois (additionner tous les types de jeu, par exemple des billets de loterie, les courses, casino, machines à sous, jeux de cartes, etc). Note: Les coûts d’un billet de loterie par semaine sont d’environ 300 $ par an. a. Rien b. Moins de 50$ c. 51$ à $300 d. $301 à $499 e. $500 à $999 f. $1000 à $4999 g. Plus de $5000 115 4. Pour moi, les jeux de hasard et d’argent sont : Pour moi, les jeux de hasard et d'argent sont Importants 1 2 3 4 5 6 7 Pas importants Ennuyeux 1 2 3 4 5 6 7 Dignes d'intérêt 1 2 3 4 5 6 7 Passionnants N'ont aucune signification 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 Intéressants Pas dignes d'intérêt Pas passionnants Ont une grande signification Attirants 1 2 3 4 5 6 7 Pas attirants Fascinants 1 2 3 4 5 6 7 Banals N'ont pas de valeur 1 2 3 4 5 6 7 Une activité dans laquelle je me sens impliqué(e ) 1 2 3 4 5 6 7 Une activité dont je n'ai pas besoin 1 2 3 4 5 6 7 Ont de la valeur Une activité dans laquelle je ne me sens pas impliqué(e ) Une activité dont j'ai besoin 116 II. Émission télévisée. 5. Vous allez voir une émission télévisée intitulée « Un gars Une fille », d'une durée de 10 minutes. Cette émission sera accompagnée de coupures publicitaires. Veuillez vous assurer que le son est en marche sur votre ordinateur, et appuyer sur la flèche. De plus, il est important que vous la regardiez entièrement. En effet, tout le reste de l'étude porte sur ce que vous allez voir. Vous ne serez donc pas en mesure de répondre aux questions sans avoir vu l'émission. 6. Avez-vous eu le temps de regarder l'émission télévisée "Un gars Une fille" entièrement? Le reste de l'étude porte sur cette émission. Il est donc impératif que vous l'ayez regardé. Si vous cochez non, vous serez redirigé vers l'émission pour la regarder à nouveau. a. Oui b. Non 7. Veuillez indiquer ce que vous avez pensé de la vidéo que vous venez de voir. Ne vous souciez pas de l'orthographe. N’oubliez pas que le questionnaire est confidentiel et qu'il n'y a pas de bonne ou mauvaise réponse. __________________________________________________________________ __________________________________________________________________ _______________________________________________________________ 8. Pendant le visionnage de la vidéo, comment vous-êtes vous senti(e)? Malheureux(se) 1 2 3 4 5 Heureux(se) Mélancolique 1 2 3 4 5 Jovial(e ) Réjoui(e ) 1 2 3 4 5 Agacé(e) Insatisfait 1 2 3 4 5 Satisfait(e ) 117 III. Questions liées au jeu de hasard et d’argent. 9. Lorsque vous jouez aux jeux de hasard et d'argent, quel degré de plaisir vous procure cette expérience? Pas du tout agréa ble Votre expérience de jeu de hasard et d'argent -7 Moye nne ment agré able -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 Très agréa ble 1 2 3 4 5 6 7 10. Dans votre rapport aux jeux de hasard et d’argent, dans quelle mesure vous êtes d'accord avec chaque énoncé ? Tout à fait en désaccord 1. Je suis quelqu'un de chanceux par nature 3. Je suis assez précis pour prédire quand un «gain» va se produire. 4. Je dispose de certaines connaissances et compétences en matière de jeux de hasard et d'argent qui peuvent me permettre de gagner 5. Je ressens souvent que c'est mon jour de chance Tout à fait en accord Neutre 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 118 11. Voici une liste d'énoncés sur les jeux de hasard et d’argent. Dans quelle mesure vous êtes d'accord avec chaque énoncé ? Tout à fait en désaccord 1. Il existe des individus plus chanceux que d'autres au jeu 2. Certaines connaissances et/ou compétences augmentent la probabilité de se faire de l'argent en jouant 3. En regardant ses mises précédentes on peut mieux évaluer comment on doit jouer par la suite 4. Le jeu, c’est plus que de la chance. 5. À long terme, on gagne plus d'argent au jeu que l'on en perd 6. Certains rituels ou comportements peuvent augmenter les chances de gagner 7. Le succès aux jeux de hasard et d'argent exige une certaine persévérance et de la volonté 8. Certains objets (tels que des porte-bonheurs) peuvent accroître la probabilité de gagner aux jeux de hasard et d'argent 9. Il est préférable de garder toujours la même mise pour accroître ses probabilités de gain 10. Quand on joue et que l'on perd de très peu c'est souvent signe que l'on est sur le point de gagner Tout à fait en accord Neutre 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 119 11. À certains moments on peut se sentir plus chanceux que d'autres et c'est pendant ces moments qu'il faut jouer 12. Il existe des places où des endroits où on a plus de chances de gagner aux jeux de hasard et d'argent 13. Lorsque la chance sourit il faut savoir la saisir et miser davantage au jeu car cela n'arrive pas tout le temps 14. À une série de pertes suit une série de gains 15. La persévérance finit souvent par payer au jeu 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 1 2 3 4 5 6 7 12. Dans quelle mesure vous êtes d'accord avec chaque énoncé concernant la marque Loto-Québec? Loto-Québec est une mauvaise marque 1 2 3 4 5 6 7 Je suis favorable à la marque Loto-Québec 1 2 3 4 5 6 7 La marque Loto-Québec est agréable 1 2 3 4 5 6 7 Loto-Québec est une marque antipathique 1 2 3 4 5 6 7 Loto-Québec est une bonne marque Je ne suis pas favorable à la marque Loto-Québec La marque Loto-Québec est désagréable Loto-Québec est une marque sympathique 120 13. Dans quelle mesure vous êtes d'accord avec chaque énoncé? Tout à fait en désaccord En désaccord Pas sûr En accord Tout à fait en accord 1. Le jeu de hasard et d’argent est une activité amusante 1 2 3 4 5 2. Jouer aux jeux de hasard et d’argent de façon modérée est sans danger 1 2 3 4 5 3. Les joueurs ont besoin d’assistance 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 4. Les jeux de hasard et d’argent devraient être illégaux 5. Les jeux de hasard et d’argent sont trop répandus aujourd'hui 6. Le jeu de hasard et d’argent détruit des familles 7. Le jeu de hasard et d’argent est juste un autre passetemps 8. La plupart des personnes peuvent contrôler leurs habitudes de jeu de hasard et d’argent 9. Le jeu de hasard et d’argent est un fléau social 10. Je suis d’accord avec le fait que certains jeux de hasard et d’argent soient légaux 11. Les jeux de hasard et d’argent doivent être contrôlés par la loi afin que les gens n’en abusent pas 12. Fondamentalement, j’apprécie les jeux de hasard et d’argent 121 14. Dans quelle mesure vous êtes d'accord avec chaque énoncé ? Dans les 2 prochaines semaines, j'ai l'intention de…. Tout à fait En en désaccord désaccord Pas sûr En accord Tout à fait en accord (a) jouer aux machines à sous 1 2 3 4 5 (b) parier de l’argent sur le sport 1 2 3 4 5 (c) acheter des billets de loterie 1 2 3 4 5 (d) aller au casino 1 2 3 4 5 (e) jouer au bingo 1 2 3 4 5 (f) jouer à un appareil de loterie vidéo 1 2 3 4 5 (g) jouer à des jeux de hasard et d'argent 1 2 3 4 5 (h) dépenser 20 $ ou plus dans les jeux de hasard et d'argent 1 2 3 4 5 (i) dépenser 100 $ ou plus dans les jeux de hasard et d'argent 1 2 3 4 5 122 IV. Information générale Cette information, ainsi que le reste du questionnaire, demeurent strictement confidentielles et aucune information ne sera divulguée. Nous utiliserons les renseignements suivants seulement pour mieux classer les questionnaires et mieux comprendre les réponses. 15. Quel est votre sexe? a. Féminin b. Masculin 16. En pensant au 12 derniers moins, à quelle fréquence avez-vous… Jamais Parfois La plupart du temps Presque toujours Avez-vous parié plus que vous pouviez vous permettre réellement de perdre? 0 1 2 3 Toujours en pensant aux 12 derniers mois, avez-vous eu besoin de jouer de grosses sommes d'argent pour obtenir le même niveau de sensations fortes? 0 1 2 3 Lorsque vous jouiez, est-ce que vous reveniez un autre jour pour essayer de regagner l'argent perdu? 0 1 2 3 Avez-vous emprunté de l'argent ou vendu quelque chose pour obtenir l'argent pour jouer? 0 1 2 3 0 1 2 3 0 1 2 3 0 1 2 3 0 1 2 3 0 1 2 3 Avez-vous eu le sentiment que vous pourriez avoir un problème de jeu? Le jeu vous a-t-il causé des problèmes de santé, y compris le stress ou l'anxiété? Des gens ont-ils déjà critiqué vos habitudes de jeu ou vous ont-ils dit que vous aviez un problème de jeu, peu importe si oui ou non vous pensiez que c'était le cas? Vos habitudes de jeu ont-il causé des problèmes financiers à vous ou à votre ménage? Vous êtes-vous senti coupable à propos de la façon dont vous jouez ou de ce qui se passe lorsque vous jouez? 123 17. Quel âge avez-vous? □ 18 à 24 ans □ 35 à 44 ans □ 55 à 64 ans □ 25 à 34 ans □ 45 à 54 ans □ 65 ans et plus 18. Dans quelle région habitez-vous ? □ Montréal □ Québec □ Trois-Rivières □ Région de Montréal □ Région de Québec □ Région de Trois- □ Laval □ Cantons de l’est □ Gaspésie □ Saguenay □ Laurentides □ Outaouais □ Bas Saint-Laurent □ Saguenais/Lac St-Jean □ Mauricie □ Abitibi/Temiscamingue □ Côte-Nord □ Chaudière-Appalaches □ Lanaudière □ Montérégie □ Centre du Québec □ Autres – Québec □ Autres – Canada □ Pas de réponse Rivières 19. Quel est votre statut matrimonial? □ Célibataire □ Divorcé(e) □ Marié(e) □ Veuf (veuve) 20. Veuillez indiquer la dernière année d’étude que vous avez complétée. □ École primaire □ Cégep □ École secondaire □ Université □ Pas de réponse 21. Laquelle des situations suivantes décrit le mieux votre état actuel? □ Étudiant(e) □ Sans travail ou à la recherche d’un emploi □ Retraité(e) □ Employé(e) □ Pas de réponses 22. Votre revenu familial annuel avant impôts se situe: □ moins de 20 000$ □ 40 000$ à 59 999$ □ 80 000$ à 99 999$ □ 20 000$ à 39 999$ □ 60 000$ à 79 999$ □ 100 000$ ou plus □ Pas de réponse 124 V. Prévention du jeu problématique Les jeux de hasard et d'argent peuvent avoir des conséquences désastreuses pour le joueur, tant du point du vue psychologique que financier. Aussi, nous vous demandons de prendre 30 secondes de votre temps pour visionner un message préventif du Ministère de la Santé et des Services sociaux et de la Fondation Mise sur Toi. Merci de votre précieuse collaboration ! Jean-Baptiste Delabre. Jean-Charles Chebat. 125 BIBLIOGRAPHIE Ajzen, I., & Fishbein, M. (1980). Understanding attitudes and predicting behavior: Englewood Cliffs, NJ: Prentice-Hall. Ambler, T., & Burne, T. (1999). The impact of affect on memory of advertising. Journal of Advertising Research, 39, 25-34. American Psychiatric Association. (2000). Diagnostic and statistical manual of mental disorders: DSM-IV-TR. Washington, DC. Atkin, C. K. (1990). Effects of televised alcohol messages on teenage drinking patterns. Journal of Adolescent Health Care, 11(1), 10-24. Azmier, J. J. (2000). Canadian gambling behaviour and attitudes: Summary report. Gambling in Canada Research Report No.8, Calgary, AB: Canada West Foundation Baron, R. M., & Kenny, D. A. (1986). The moderator–mediator variable distinction in social psychological research: Conceptual, strategic, and statistical considerations. Journal of personality and social psychology, 51(6), 1173. Binde, P. (2007). Selling dreams-causing nightmares? On gambling advertising and problem gambling. Journal of Gambling Issues, 20, 167-192. Binde, P. (2009). Exploring the impact of gambling advertising: An interview study of problem gamblers. International Journal of Mental Health and Addiction, 7(4), 541-554. Blaszczynski, A., & Nower, L. (2002). A Pathways Model of Problem and Pathological Gambling. Addiction, 97(5), 487-499. Bloch, P. H., Ridgway, N. M., & Dawson, S. A. (1994). The Shopping Mall as Consumer Habitat. Journal of Retailing, 70(1), 23. Breen, R. B., & Zuckerman, M. (1999). 'Chasing' in gambling behavior: personality and cognitive determinants. [doi: DOI: 10.1016/S0191- 8869(99)00052-5]. Personality and Individual Differences, 27(6), 1097-1111. 126 Campbell, D. T., & Stanley, J. C. (1963). Experimental and Quasi Experimental Design for Research. Chicago: Rand McNally Chebat, J. C., Charlebois, M., & Gélinas-Chebat, C. (2001). What makes open vs. closed conclusion advertisements more persuasive? The moderating role of prior knowledge and involvement. Journal of Business Research, 53(2), 93-102. Chiu, J., & Storm, L. (2010). Personality, perceived luck and gambling attitudes as predictors of gambling involvement. Journal of Gambling Studies, 26(2), 205227. Chóliz, M. (2010). Cognitive Biases and Decision Making in Gambling. Psychological reports, 107(1), 15-24. Cialdini, R. B., Petty, R. E., & Cacioppo, J. T. (1981). Attitude and attitude change. Annual review of psychology, 32(1), 357-404. Compton, J., & Pfau, M. (2004). Use of inoculation to foster resistance to credit card marketing targeting college students. Journal of Applied Communication Research, 32(4), 343-364. Cotte, J., & Latour, K. (2009). Blackjack in the kitchen: Understanding online versus casino gambling. Journal of Consumer Research, 35(5), 742-758. Cowley, E. (2008). Looking back at an experience through rose-colored glasses. Journal of Business Research, 61(10), 1046-1052. Cristau, C., & Strazzieri, A. (1996). Implication durable et leadership d'opinion: la valeur prédictive de trois échelles d'implication durable. Actes du 12ème Congrès international de l'Association Française du Marketing, 12, 141-158. Damasio, A. R., & Blanc, M. (2006). L'erreur de Descartes: la raison des émotions. Paris: Odile Jacob. Davidson, R. J. (2000). Cognitive neuroscience needs affective neuroscience (and vice versa). Brain and cognition, 42(1), 89-92. 127 De Barnier, V. (2006). Le modèle ELM : bilan et perspectives. Recherche et Applications en Marketing, 21(2), 61. Delfabbro, P. (2004). The stubborn logic of regular gamblers: Obstacles and dilemmas in cognitive gambling research. Journal of Gambling Studies, 20(1), 121. Delfabbro, P., & Thrupp, L. (2003). The social determinants of youth gambling in South Australian adolescents. Journal of Adolescence, 26(3), 313-330. Demirdjian, Z. S. (1983). Sales effectiveness of comparative advertising: An experimental field investigation. The Journal of Consumer Research, 10(3), 362364. Derevensky, J., Sklar, A., Gupta, R., & Messerlian, C. (2010). An empirical study examining the impact of gambling advertisements on adolescent gambling attitudes and behaviors. International Journal of Mental Health and Addiction, 8(1), 21-34. Derevensky, J., Sklar, A., Gupta, R., Messerlian, C., Laroche, M., & Mansour, S. (2007). The effects of gambling advertisements on child and adolescent gambling attitudes and behaviors. International Centre for Youth Problems and High-Risk Behaviors McGill University. Montreal, Canada. Escalas, J. E. (2004). Imagine yourself in the product: Mental simulation, narrative transportation, and persuasion. Journal of Advertising, 33(2), 37-48. Felsher, J. R., Derevensky, J. L., & Gupta, R. (2004). Lottery playing amongst youth: Implications for prevention and social policy. Journal of Gambling Studies, 20(2), 127-153. Ferland, F., Ladouceur, R., & Vitaro, F. (2002). Prevention of Problem Gambling: Modifying Misconceptions and Increasing Knowledge. Journal of Gambling Studies, 18(1), 19-29. Ferris, J., & Wynne, H. (2001). The Canadian Problem Gambling Index: Final Report: Canadian Centre on Substance Abuse. 128 Gaboury, A., & Ladouceur, R. (1989). Erroneous Perceptions and Gambling. Journal of Social Behavior & Personality, 4(4), 411-420. Green, M. C., & Brock, T. C. (2000). The role of transportation in the persuasiveness of public narratives. Journal of personality and social psychology, 79(5), 701. Griffiths, M. D. (1990). The cognitive psychology of gambling. Journal of Gambling Studies, 6(1), 31-42. Griffiths, M. D. (1993). Pathological gambling: possible treatment using an audio playback technique. Journal of Gambling Studies, 9(3), 295-297. Griffiths, M. D. (2005). Does gambling advertising contribute to problem gambling? International Journal of Mental Health and Addiction, 3(2), 15-25. Heiens, R. A. (1999). The influence of product publicity on product sales in a noncompetitive environment. Academy of Marketing Studies Journal, 3(1), 10. Holtgraves, T. (2009). Evaluating the Problem Gambling Severity Index. Journal of Gambling Studies, 25(1), 105. Jiang, Y., Cho, A., & Adaval, R. (2009). The unique consequences of feeling lucky: Implications for consumer behavior. Journal of Consumer Psychology, 19(2), 171-184. Jolibert, A., & Jourdan, P. (2006). Marketing research: méthodes de recherche et d'études en marketing. Paris: Dunod. Joukhador, J., Blaszczynski, A., & Maccallum, F. (2004). Superstitious beliefs in gambling among problem and non-problem gamblers: Preliminary data. Journal of Gambling Studies, 20(2), 171-180. Joukhador, J., Maccallum, F., & Blaszczynski, A. (2003). Differences in cognitive distortions between problem and social gamblers. Psychological reports, 92(3), 1203-1214. 129 Kahneman, D., & Snell, J. (1992). Predicting a Changing Taste: Do People Know What They Will Like? [Article]. Journal of Behavioral Decision Making, 5(3), 187200. Kairouz, S., & Nadeau, L. (2011). Portrait du jeu au Québec: Prévalence, incidence et trajectoires sur quatre ans: Concordia University. Keller, K. L. (1993). Conceptualizing, Measuring, and Managing CustomerBased Brand Equity. Journal of Marketing, 57(1), 1-22. Kirmani, A., & Zeithaml, V. (1993). Advertising, Perceived Quality, and Brand Image. In D. A. Aaker & A. Biel (Eds.), Brand Equity & Advertising : Advertising's Role in Building Strong Brands (pp. 143-161). New Jersey: Lawrence Erlbaum Associates, Inc. Korn, D., Hurson, T., & Reynolds, J. (2005). Commercial gambling advertising: Possible impact on youth knowledge, attitudes, beliefs and behavioural intentions. Guelph: Ontario Problem Gambling Research Centre. Ladouceur, R., Gaboury, A., Bujold, A., Lachance, N., & Tremblay, S. (1991). Ecological validity of laboratory studies of videopoker gaming. Journal of Gambling Studies, 7(2), 109-116. Ladouceur, R., Sylvain, C., & Boutin, C. (2000). Le Jeu Pathologique. Revue québécoise de psychologie 21(1), 21-35. Ladouceur, R., Sylvain, C., Letarte, H., Giroux, I., & Jacques, C. (1998). Cognitive treatment of pathological gamblers. Behaviour Research and Therapy, 36(12), 1111-1119. Ladouceur, R., & Walker, M. (1996). A cognitive perspective on gambling. Trends in cognitive and behavioural therapies, 89–120. Landman, J., & Petty, R. (2000). “It could have been you”: How states exploit counterfactual thought to market lotteries. Psychology and Marketing, 17(4), 299321. 130 Langer, E. J. (1975). The illusion of control. Journal of personality and social psychology, 32(2), 311. LeDoux, J. E. (1995). Emotion: Clues from the brain. Annual review of psychology, 46(1), 209-235. Lee, H.-S., Lemanski, J., & Jun, J. (2008). Role of Gambling Media Exposure in Influencing Trajectories Among College Students. Journal of Gambling Studies, 24(1), 25-37. Low, G. S., & Lamb, C. W. (2000). The Measurement and Dimensionality of Brand Associations. Journal of Product & Brand Management, 9(6), 350-370. Mace, G. (1999). Guide d'élaboration d'un projet de recherche: Les Presses de l'Université Laval. MacKenzie, S. B., & Lutz, R. J. (1989). An Empirical Examination of the Structural Antecedents of Attitude toward the Ad in an Advertising Pretesting Context. The Journal of Marketing, 53(2), 48-65. MacKillop, J., Anderson, E. J., Castelda, B. A., Mattson, R. E., & Donovick, P. J. (2006a). Convergent validity of measures of cognitive distortions, impulsivity, and time perspective with pathological gambling. Psychology of Addictive Behaviors, 20(1), 75. MacKillop, J., Anderson, E. J., Castelda, B. A., Mattson, R. E., & Donovick, P. J. (2006b). Divergent validity of measures of cognitive distortions, impulsivity, and time perspective in pathological gambling. Journal of Gambling Studies, 22(3), 339-354. Mandel, N., & Nowlis, S. (2008). The Effect of Making a Prediction about the Outcome of a Consumption Experience on the Enjoyment of That Experience. Journal of Consumer Research, 35(1), 9. Marshall, K. (2010). Jeux de hasard, 2010. Perspective. 131 Martignoni-Hutin, J.-P. (2004, 27 décembre 2004). Jouer peut nuire à la santé. Libération. Retrieved from http://www.liberation.fr/tribune/0101513559-jouer-peutnuire-a-la-sante Max-Neef, M. A. (1991). Human-scale development: Conception, application and further reflections. New-York: The Apex Press. McGuire, W. J. (1961). The effectiveness of supportive and refutational defenses in immunizing and restoring beliefs against persuasion. sociometry, 24(2), 184197. McMullan, J., & Miller, D. (2009). Wins, Winning and Winners: The Commercial Advertising of Lottery Gambling. Journal of Gambling Studies, 25(3), 273. McQueen, J. (1967). Some Methods for Classification and Analysis of Multivariate Observations. Paper presented at the Proceedings of the Symposium of Mathematics Statistics and Probability, California, USA. Mehrabian, A., & Russell, J. A. (1974). An approach to environmental psychology. Cambridge, MA: MIT Press. Ministère de la Santé et des Services Sociaux. (2011). Jeu: Aide et Référence. Retrieved July the 20th, 2011, from http://www.jeu-aidereference.qc.ca/ Mise sur Toi. (2011). Mise sur Toi - Le Jeu doit rester un Jeu. Retrieved July the 20th, 2011, from http://www.misesurtoi.ca/ Mitchell, A. A., & Olson, J. C. (1981). Are Product Attribute Beliefs the Only Mediator of Advertising Effects on Brand Attitude? Journal of Marketing Research, 18(3), 318-332. Mittal, B. (1989). A Theoretical Analysis of Two Recent Measures of Involvement. Advances in Consumer Research, 16(1), 697-702. Miyazaki, A. D., Brumbaugh, A. M., & Sprott, D. E. (2001). Promoting and countering consumer misconceptions of random events: The case of perceived 132 control and state-sponsored lotteries. Journal of Public Policy & Marketing, 20(2), 254-267. Mizerski, D., Miller, R., Mizerski, K., & Lam, D. (2004). The stochastic nature of purchasing a state's lottery products. Australasian Marketing Journal (AMJ), 12(3), 56-69. Moore, S., & Ohtsuka, K. (1997). Gambling Activities of Young Australians: Developing a Model of Behaviour. Journal of Gambling Studies, 13(3), 207-236. Moore, S., & Ohtsuka, K. (1999). The prediction of gambling behavior and problem gambling from attitudes and perceived norms. Social Behavior and Personality: an international journal, 27(5), 455-466. Morris, J. D., Woo, C. M., & Singh, A. (2005). Elaboration likelihood model: A missing intrinsic emotional implication. Journal of Targeting, Measurement and Analysis for Marketing, 14(1), 79-98. Mullet, G. M. (1999). Benefit Segmentation in Practice. Journal of Segmentation in Marketing, 3(1), 13-36. Munoz, Y., Chebat, J., & Suissa, J. (2010). Using Fear Appeals in Warning Labels to Promote Responsible Gambling Among VLT Players: The Key Role of Depth of Information Processing. Journal of Gambling Studies, 26(4), 593. Murray, M., Pauw, C., & Holm, D. (2005). The House as a Satisfier for Human Needs: a Framework for Analysis, Impact Measurement and Design. Myrseth, H., Brunborg, G. S., & Eidem, M. (2010). Differences in Cognitive Distortions Between Pathological and Non-Pathological Gamblers with Preferences for Chance or Skill Games. Journal of Gambling Studies, 1-9. Papineau, E., & Leblond, J. (2010). Étatisation des jeux d’argent sur Internet au Québec: Institut National de la Santé Publique. Patil, V., Singh, S., Mishra, S., & Donovan, T. (2008). Parallel Analysis Engine to Aid in Determining Number of Factors to Retain (computer software): Retrieved 05/04/2011 from http://ires.ku.edu/~smishra/parallelengine.htm. 133 Petty, R. E., & Cacioppo, J. T. (1979). Issue involvement can increase or decrease persuasion by enhancing message-relevant cognitive responses. Journal of personality and social psychology, 37(10), 1915. Petty, R. E., & Cacioppo, J. T. (1981). Issue involvement as a moderator of the effects on attitude of advertising content and context. Advances in Consumer Research, 8(1), 20-24. Petty, R. E., & Cacioppo, J. T. (1983). Central and peripheral routes to persuasion: Application to advertising. Advertising and consumer psychology, 3023. Petty, R. E., & Cacioppo, J. T. (1984). Source factors and the elaboration likelihood model of persuasion. Advances in Consumer Research, 11(1), 668672. Petty, R. E., & Cacioppo, J. T. (1986a). Communication and persuasion: Central and peripheral routes to attitude change: Springer-Verlag New York:. Petty, R. E., & Cacioppo, J. T. (1986b). The elaboration likelihood model of persuasion. Advances in experimental social psychology, 19(1), 123-205. Petty, R. E., Cacioppo, J. T., & Schumann, D. (1983). Central and peripheral routes to advertising effectiveness: The moderating role of involvement. The Journal of Consumer Research, 10(2), 135-146. Preacher, K. J., & Hayes, A. F. (2004). SPSS and SAS procedures for estimating indirect effects in simple mediation models. Behavior Research Methods, 36(4), 717-731. Preacher, K. J., & Hayes, A. F. (2008). Asymptotic and resampling strategies for assessing and comparing indirect effects in multiple mediator models. Behavior Research Methods, 40(3), 879. Sharpe, L. (2002). A reformulated cognitive-behavioral model of problem gambling: A biopsychosocial perspective. Clinical Psychology Review, 22(1), 125. 134 Sharpe, L., & Tarrier, N. (1993). Towards a cognitive-behavioural theory of problem gambling. British Journal of Psychiatry, 162, 407-412. Slot Advisor. (2011). Beat Slot Machines. Retrieved June the 16th, 2011, from http://www.slotadvisor.com/slot-machines.html Stayman, D. M., & Batra, R. (1991). Encoding and Retrieval of Ad Affect in Memory. Journal of Marketing Research, 28(2), 232-239. Steenbergh, T. A., Meyers, A. W., May, R. K., & Whelan, J. P. (2002). Development and Validation of the Gamblers' Beliefs Questionnaire. Psychology of Addictive Behaviors, 16(2), 143-149. Stinchfield, R. (2002). Reliability, validity, and classification accuracy of the South Oaks Gambling Screen (SOGS). Addictive Behaviors, 27(1), 1-19. Stinchfield, R. (2003). Reliability, validity, and classification accuracy of a measure of DSM-IV diagnostic criteria for pathological gambling. American Journal of Psychiatry, 160(1), 180. Stocco, A., & Fum, D. (2008). Implicit emotional biases in decision making: The case of the Iowa Gambling Task. Brain and cognition, 66(3), 253-259. Szybillo, G. J., & Heslin, R. (1973). Resistance to persuasion: Inoculation theory in a marketing context. Journal of Marketing Research, 396-403. Taylor, S. E., & Schneider, S. K. (1989). Coping and the simulation of events. Social Cognition, 7(2), 174-194. Thaler, R. (1985). Mental accounting and consumer choice. Marketing science, 4(3), 199-214. Toneatto, T. (1999). Cognitive psychopathology of problem gambling. Substance Use & Misuse, 34(11), 1593-1604. Toneatto, T., Blitz-Miller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos, A. (1997). Cognitive distortions in heavy gambling. Journal of Gambling Studies, 13(3), 253-266. 135 Weber, R. P. (1985). Basic content analysis. Beverly Hills, CA: Sage. World Lottery Association. (2008). WLA Advertising Awards. July 21, 2011, from http://www.worldlotteries.org/cms/index.php?option=com_content&task=view&id=171&Itemid=82 Zaichkowsky, J. L. (1985). Measuring the Involvement Construct. The Journal of Consumer Research, 12(3), 341-352. Zaichkowsky, J. L. (1994). The personal involvement inventory: Reduction, revision, and application to advertising. Journal of Advertising, 59-70. Zhang, P. (2004). Over-or under-advertising by state lotteries. Unpublished doctoral dissertation, University of Maryland. Zhao, G., & Pechmann, C. (2007). The impact of regulatory focus on adolescents' response to antismoking advertising campaigns. Journal of Marketing Research, 44(4), 671-687. Zhao, X., Lynch Jr, J. G., & Chen, Q. (2010). Reconsidering Baron and Kenny: Myths and truths about mediation analysis. Journal of Consumer Research, 37(2), 197-206.