rhumatismale (9). Mais le rétablissement du rythme sinusal per-
met-il, à terme, de se passer d’un traitement anticoagulant, dont on
connaît par ailleurs les risques, surtout chez les sujets âgés ? On a
vu que les récidives de FA sous traitement antiarythmique sont loin
d’être rares. En outre, un certain nombre d’accidents thromboem-
boliques peuvent être indépendants de la FA et en rapport avec la
cardiopathie sous-jacente ou le terrain vasculaire associé.
Qu’en est-il de la fréquence et de la gravité des effets secon-
daires des traitements associés ?
✔Antiarythmiques : risque de troubles du rythme ventriculaire,
notamment de torsades de pointe, de flutters à transmission ven-
triculaire rapide ou de bradycardies sévères, ou encore de dépres-
sion de l’inotropisme, sans oublier les complications propres de
l’amiodarone.
✔Drogues dromotropes négatives (dont certaines sont également
inotropes négatives [bêtabloquants, inhibiteurs calciques]) : elles
peuvent aussi induire des bradycardies graves nécessitant la pose
d’un pacemaker. L’ablation par radiofréquence de la jonction auri-
culo-ventriculaire, quant à elle, rend les patients dépendants de
leur stimulateur cardiaque, et on sait qu’elle est responsable d’un
certain nombre de morts subites.
Quel est l’impact de chacune des deux options sur la mortalité ?
Certes, l’étude de Framingham a montré que l’existence d’une
FA multiplie par deux le risque de mortalité (10). Logiquement,
ce risque s’avère d’autant plus élevé que la fraction d’éjection est
altérée ; mais il paraît essentiellement lié à la survenue d’acci-
dents vasculaires cérébraux : que devient-il sous traitement anti-
coagulant bien conduit ? Certaines études [AFASAK (11), BAA-
TAF (12)], font état d’une diminution significative de la mortalité
sous traitement anticoagulant.
Par ailleurs, il n’est pas prouvé que le rétablissement et le main-
tien du rythme sinusal sous antiarythmique contribuent à dimi-
nuer ce risque. La fameuse méta-analyse de Coplen (13) et l’é-
tude SPAF (14) font état d’une surmortalité chez les patients
recevant des antiarythmiques de classe I. Toutefois, la méthodo-
logie de l’étude Coplen est très sujette à caution, et il est certain
que bon nombre de patients, avec les nouvelles recommandations,
n’auraient maintenant pas reçu ce type d’antiarythmique.
Dans l’insuffisance cardiaque, les résultats actuels sont égale-
ment très parcellaires et parfois contradictoires. Il est en effet
impossible à l’heure actuelle de savoir si, sur ce terrain, le main-
tien du rythme sinusal est associé à une réduction de mortalité.
Il semble toutefois que l’amiodarone augmente les chances de se
maintenir en rythme sinusal à un an, et que son effet sur la mor-
talité soit neutre ou légèrement favorable (15, 16).
Enfin, il n’y a pas encore de résultats probants concernant les
effets de chaque option thérapeutique sur la symptomatologie
fonctionnelle et la qualité de vie, le nombre d’hospitalisations et
le coût global pour la santé publique.
DDeeuuxx ééttuuddeess ppeerrmmeettttrroonntt ppeeuutt--êêttrree ddee rrééppoonnddrree àà cceerrttaaiinneess ddee cceess
qquueessttiioonnss
L’étude PIAF (17) : il s’agit d’une étude pilote multicentrique
réalisée en Allemagne chez des patients ayant une fibrillation
auriculaire de plus de 7 jours et de moins de 360 jours. Les patients
sélectionnés sont randomisés en deux groupes :
– Maintien de la FA et contrôle de la fréquence cardiaque par dil-
tiazem, éventuellement associé, en cas d’échec, à d’autres médi-
caments dromotropes négatifs, voire ablation par radiofréquence
de la jonction AV.
– Rétablissement du rythme sinusal et maintien de celui-ci par
amiodarone.
Les deux groupes de patients sont maintenus systématiquement
aux anticoagulants.
L’étude pilote portant sur 252 patients suivis pendant 12 mois
vient de s’achever : des résultats préliminaires ont montré qu’il
n’y avait pas de différence significative entre les deux options
thérapeutiques sur la symptomatologie fonctionnelle. Mais cette
étude doit servir de tremplin à une étude de plus grande enver-
gure dans laquelle la morbi-mortalité pourra être évaluée.
L’étude AFFIRM(18) :il s’agit d’une très grande étude réalisée
aux États-Unis et au Canada chez des patients présentant une FA
ayant duré plus de 6 heures et dont la survenue remonte à moins
de 6 mois. Elle prévoit l’inclusion de 5 300 patients de plus de
65 ans, ou ayant un autre facteur de risque thromboembolique.
Le suivi prévu est de 3 ans.
Les patients sont randomisés en deux groupes :
– Maintien de la FA et contrôle de la fréquence cardiaque par voie
médicamenteuse (toutes les possibilités de traitements, voire d’as-
sociations, sont autorisées) ; en cas d’échec, ablation ou modu-
lation de la jonction auriculo-ventriculaire par radiofréquence.
Dans ce groupe, le traitement anticoagulant est systématiquement
poursuivi.
– Maintien du rythme sinusal par traitement antiarythmique (là
encore, toutes les possibilités de traitements sont autorisées, et
même le recours à des moyens non médicamenteux : stimulation
cardiaque, radiofréquence, chirurgie). Dans ce groupe, la pour-
suite du traitement anticoagulant n’est pas obligatoire.
L’intérêt de cette étude est qu’elle laisse, pour chaque stratégie,
une assez grande liberté de choix thérapeutiques au praticien.
Les résultats de l’étude AFFIRM sont prévus pour le début de
l’année 2002. Ils doivent porter sur la mortalité globale, la sur-
venue d’accidents vasculaires cérébraux, la qualité de vie et le
coût global.
CCOONNCCLLUUSSIIOONN :: RRAALLEENNTTIIRR OOUU RRÉÉDDUUIIRREE ??
Il n’y a toujours pas de réponse univoque à cette question. De
nombreux facteurs entrent en ligne de compte, et tout algorithme
décisionnel risque d’être trop simplificateur. Le choix thérapeu-
tique reste encore dicté par le contexte particulier de chaque
patient et par l’expérience personnelle du thérapeute. En atten-
dant les résultats des grands essais en cours, qui permettront peut-
être d’apporter quelques réponses sur le sujet... ou de soulever de
nouvelles questions. ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Levy S, Breithardt G, Campbell R et al. on behalf of the Working Group on
Arrhythmias of the European Society of Cardiology. Atrial fibrillation : current
knowledge and recommandations for management. Eur Heart J 1998 ; 19 : 1294-
320.
La Lettre du Cardiologue - n° 342 - février 2001
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