Extraits du chapitre III:
LA MÊME RECHERCHE DE LA LUMIÈRE
L'ÉGLISE ROMANE DE DANGEAU :IXesiècle
L'église romane de Dangeau a pendant très longtemps été reléguée au rang d'église mineure, voire
oubliée.Il a fallu la restauration intelligente d'un abbé, amoureux visionnaire de son église, pour que
l'on découvre là, un chef-d’œuvre d'architecture,parmi les plus purs de l'art roman. Pour la découvrir,
il faut parcourir les coteaux et les vallées du Perche, pour arriver à 30 km au sud de Chartres au village de Dan-
geau.
L'église est basse, imposante au premier abord avec son large chevet roman prolongé en ouverture par trois ab-
sidioles aux fenêtres étroites. Si l'on excepte les représentations sculptées du portail roman au sud, c'est l'austérité
qui règne en maître à Dangeau.Au portail occidental, une simple porte,encadrée d'un portail à triple rouleau ouvre
sur la nef. Pas de chapiteau,ni de décoration ostentatoire.Tout est canalisé par la simplicité du plan.Poussée la porte,
c'est le règne de l'épure à l'état brut, des piliers massifs et de grandes arcades rythment le lieu et rien d'autre, dépouil-
lement et simplicité règnent en ce lieu que n'aurait pas refusé saint Bernard, tant tout va à l'essentiel.
La force de l'église de Dangeau, c'est la simplicité de sa réalisation, à partir d'un plan simple qui a parfaitement intégré
toutes les transformations imposées par les modifications et restaurations successives,sans que jamais la forme initiale ne soit
altérée.
Le prieuré de Dangeau a été fondé par le « Grand Monastère » Majus Monastérium, c'est-à-dire Marmoutier près de Tours,
dont l'importance fut considérable au Moyen Âge. Fondé en 372 par saint Martin, sa réputation grandit au point d'être un des
monastères les plus puissants de l'ouest de la France avant son absorption par Cluny au Xesiècle.
C'est vers les années 1050 que les moines du Grand Monastère entreprirent une campagne gigantesque de défrichement et de
construction d'églises et d'abbayes dont le prieuré fit partie.
À l'époque, le village s'était reconstruit sur un ancien castrum qui s'appelait Daniolo ou Dangeolum, qui serait une forme contrac-
tée de Domnus Georgius, le seigneur Georges, saint Georges qui se trouve représenté terrassant le dragon, sur le seul chapiteau solaire
du portail sud.
La première église,comme l'ont démontré les fouilles,était carolingienne.En 1064,le chevalier Herlebault de Dangeau est mis à mal dans
un tournoi. Il demande alors, avant de mourir à se faire moine et pour cela fait don aux religieux de Marmoutier d'une partie de ses biens et
de la moitié des droits qu'il détenait sur l'église de Dangeau,afin que les moines en possèdent alors l'entière propriété.Son frère Eudes de Dan-
geau approuve la donation et blessé à mort en 1069, il prend également l'habit monastique avant de mourir. Les moines du Grand Prieuré se re-
trouvent alors maîtres d'œuvre et entreprennent la reconstruction du prieuré.
Si la nouvelle église s'est appuyée sur le mur préroman ouest du chœur, il ne reste aucune trace de la structure carolingienne originelle, qui a été
incorporée dans la nouvelle construction. Des fouilles ont permis de faire apparaître les murs et piliers carolingiens (voir plan) mais ils ont été re-
couverts par la suite. Néanmoins le travail archéologique a permis de constater que les bâtisseurs ont parfaitement conservé et l'orientation et la
structure originelles de la première église dont le plan s'inscrit remarquablement dans le quadrilatère solsticial du lieu (Fig. 1).