(Fabrice Couderc) Dans

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MOOC : « des particules aux étoiles »
Introduction au modèle standard de la physique des particules (Fabrice Couderc)
Dans cette séquence nous allons poursuivre l’exploration du monde des particules
subatomiques et nous concentrer sur les interactions électromagnétique, faible et sur le
boson de Higgs.
Ce monde des particules est à la fois quantique et relativiste, il obéit à la théorie
quantique des champs.
Dans le monde classique, une particule est décrite par un point matériel dont les
coordonnées q dépendent du temps. L’évolution de ces coordonnées est encodée dans
un lagrangien L(q,qpoint) qui fournit les équations du mouvement.
En théorie des champs, une particule est décrite par un champs, représentant la
probabilité de trouver la particule en un point x de l’espace-temps. L’évolution de ce
champs est donnée par un lagrangien, intégrale sur tout l’espace d’une densité
lagrangienne. C’est cette densité qui encode toute la physique.
Voici le lagrangien d’un champs scalaire libre noté phi. Un champs scalaire est une
particule de spin 0. Comme en mécanique classique, le Lagrangien est la différence de
deux termes. Le premier, T(dmuphi, dmuphi*), est un terme dynamique, il correspond à
l’énergie cinétique. Le second V(phi,phi*) est un terme d’énergie potentielle.
Contrairement à la mécanique classique, en relativité restreinte une particule libre
possède une énergie potentielle non nulle, correspondant à sa masse. Ce potentiel est
donné par V (phi,phi*)=m carre phi* phi.
Le théorème de Noether joue un rôle central aussi bien en mécanique classique qu’en
théorie des champs. Il fait correspondre à chaque symétrie laissant le lagrangien
invariant, une quantité conservée.
Par exemple, afin que la physique soit identique d’un bout de l’Univers à l’autre , on doit
construire un lagrangien invariant par translation dans l’espace. Ceci implique, par le
théorème de Noether, que l’impulsion se conserve. De même l’invariance des lois de la
physique par translation dans le temps implique que l’énergie est conservée.
En théorie des champs, en plus des symétries d’espace-temps classiques, de nouvelles
symétries sont possibles. Ces symétries internes affectent la phase des champs. Si on
change la phase d’un champ scalaire par alpha, le champs conjugué est affecté par une
phase opposée et le lagrangien est invariant! Ceci correspond au fait qu’en mécanique
quantique, la phase absolue de la fonction d’onde n’a pas de sens physique. Le
théorème de Noether nous renseigne sur la quantité conservée correspondante: il s’agit
de la charge électrique.
Lorsque la phase dépend du point d’espace temps x, on parle de transformation locale.
Dans ce cas, le lagrangien n’est plus invariant. Afin de restaurer la symétrie, on est
conduit à introduire un nouveau champs vectoriel Amu (i.e de spin 1) dont la
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transformation sous la symétrie locale va restaurer l’invariance du lagrangien. Cette
procédure prédit alors directement l’interaction entre phi et Amu.
On passe d’une théorie triste où les particules sont libres et n’interagissent pas à une
théorie très riche où les particules interagissent entre elles par exemple ici en
échangeant des photons!
Afin de décrire l’évolution du champs vectoriel Amu, on doit introduire dans le lagrangien
un terme cinématique et un terme de masse correspondant. Mais pour conserver
l’invariance locale si durement acquise, la masse de Amu doit être nulle. Or l’expérience
montre que les bosons W et Z, de l’interaction faible, sont en fait très massifs.
Ainsi il est indispensable de briser la symétrie électrofaible afin de rendre massifs les
bosons Z et W. Il s’agit du mécanisme de Brout-Englert-Higgs que nous allons
rapidement décrire.
Revenons sur le potentiel d’une particule scalaire libre. En une dimension, le minimum
du potentiel correspond à l’axe de symétrie phi = 0, et le champ oscille autour de cette
valeur.
En ajoutant un terme en phi quatre, l’axe de symétrie phi=0 ne correspond plus au
minimum. Le champ, en tombant dans un des minima du potentiel, brise ainsi la
symétrie.
En 2 dimensions, l’axe phi=0 est l’axe de rotation de la symétrie. Le même raisonnement
s’applique. On décompose le champs phi en une valeur minimale (v/racine(2)) et une
oscillation autour de ce minimum: il s’agit du boson de Higgs h.
Ainsi la symétrie électrofaible est brisée, les bosons W et Z acquièrent une masse.
Néanmoins, la théorie conserve certaines propriétés fondamentales dues à la symétrie:
on montre qu’elle est renormalisable, c’est a dire calculable.
Les prédictions de ce mécanisme sont donc:
l’existence d’une particule scalaire supplémentaire: le boson de higgs
l’intensité du couplage des bosons W et Z au boson de Higgs, qui est proportionnelle à
leur masse mW et mZ.
La symétrie électrofaible implique également que la masse des fermions soit nulle. Là
encore, le champs de Higgs permet de résoudre ce problème. En effet les termes de
couplage fermions-higgs respectent la symétrie électrofaible.
Il s’agit des couplages de Yukawa:
lambda psibar phi psi où psi et psibar sont les champs fermioniques (de spin 1/2), phi le
champs de Higgs, et lambda une constante de couplage.
En développant le champs de Higgs autour de son minimum, donc en brisant la
symétrie, ce couplage prend la forme de deux termes:
le premier donne une masse au fermion psi, mpsi psibar psi
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le deuxième donne un couplage entre psi et h, proportionnel à la masse de psi mpsi.
Les couplages de Yukawa ont une autre propriété étonnante. Ils mélangent entre elles
les différentes familles de quarks lors d’une interaction avec un boson W. Ce mélange
de saveurs est différent pour les quarks “up” et pour les quarks “down” et seul le
mélange relatif est physiquement observable.
Il est donné par la matrice CKM pour Cabbibo-Kobayashi-Maskawa.
Prenons par exemple un boson W se désintégrant en quarks c et s’. Le quark s’ , dit
état propre de saveur, est une superposition quantique des états propres de masse d, s,
b. Les coefficients du mélange sont donnés par Vcd, Vcs et Vcb.
Ainsi on peut l’observer en quark s, avec une probabilité égale au module de Vcs au
carré. mais également en quark d ou en quark b.
La matrice CKM permet donc de passer des états propres de masse aux états propres
de saveurs. Mathématiquement il s’agit d’une matrice 3x3 hermitienne, unitaire. Elle
possède donc une unique phase complexe dont l’importance est fondamentale, car elle
viole la symétrie CP comme nous le verrons dans la suite.
Voici une représentation graphique du module des éléments de la matrice CKM. On
constate que la matrice est quasi diagonale, ainsi les états propres de masse et de
saveurs sont presque identiques.
De façon similaire, on définit dans le secteur leptonique, une matrice de mélange des
neutrinos. Cette matrice est nommée PMNS pour Pontecorvo-Maki-Nakagawa-Sakata.
Notons au passage que les neutrinos n’interagissent avec le reste de la matière que par
l’interaction faible, ils sont donc toujours émis et détectés dans des états propres de
saveurs.
Contrairement à CKM, la matrice PMNS est hautement non diagonale, donc le mélange
entre saveurs est très grand dans le secteur leptonique.
Enfin, nous allons conclure cette introduction par une présentation des diagrammes de
Feynman. Il s’agit à la fois d’une représentation graphique d’une interaction, mais
également d’un puissant outil de calcul. Ils sont construits à partir d’un ensemble de
règles simples directement issues du Lagrangien.
Ce premier diagramme représente par exemple la diffusion de deux électrons. Il s’agit
d’un diagramme dit à l’arbre, seulement deux couplages interviennent: un, deux. Le
calcul du processus doit être complété par des diagrammes en boucles comme le
diagramme suivant. Le photon émet puis réabsorbe une paire électron-positron, ceci est
possible grâce au principe d’incertitude. On voit dans ce diagramme la présence de
quatre couplages un, deux, trois, quatre. Plus le nombre de couplages est grand,
moins le diagramme est important. Ce diagramme en boucle est donc une correction
quantique au diagramme en arbre. Certaines réactions ne sont possibles que via des
diagrammes en boucle. Il s’agit alors de processus très rares.
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Nous avons vu dans cette séquence quelques unes des propriétés fondamentales du
modèle standard.
Les séquences suivantes vont revenir sur ces notions plus en détails, en particulier nous
allons voir comment mesurer les couplages du boson Higgs, les effets surprenants des
matrices CKM et PMNS et bien plus encore.
Merci pour votre attention et à bientôt.
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