«Mangez moins et jeûnez
quelquefois...
soldat turc est d’une sobriété étonnante ; il ne boit que de l’eau ou des limonades,
se nourrit de pilaf au riz ou de figues, et ne touche guère à la viande ; on sait que
sa vigueur est remarquable. Les portefaix de Salonique et de Constantinople, qui se
nourrissent de la même façon, sont d’une force proverbiale.
Sans aller si loin, on peut remarquer en France, quelles solides races d’hommes
a produit le régime végétarien ; voyez les Bretons, les Limousins, les Auvergnats, les
Provençaux et tant d’autres encore.
Ces hommes de science ont alors constaté combien leurs idées sur la viande et la.
suralimentation étaient fausses.
Le plus curieux, ce n’est pas cette constatation-là, si évidente d’ailleurs (et qui est
convaincante puisque ce système a engendré de fortes races d’hommes), mais c’est
la conclusion à laquelle messieurs les savants sont arrivés. Après avoir découvert que
les gens soi-disant civilisés mangeaient beaucoup trop, et trop de viande, ils ont été
amenés à déclarer qu’il est tout à fait profitable, nécessaire même, de faire, chaque
année, plusieurs semaines de jeûne, par exemple au printemps ! Voyez plutôt ce qui
s’écrit depuis quelque temps dans des revues scientifiques :
D’abord à l’étranger. Nous voyons que les directeurs professeurs des plus célèbres
Écoles de Culture Physique Sinclair et Bernaar Macfaden, enseignent et démontrent,
par leur exemple personnel, que rien n’est plus fortifiant (parce que rajeunissant nos
organes) que de se priver de temps en temps de nourriture... Leurs imitateurs com-
mencent à être nombreux, car ils s’en trouvent beaucoup mieux. Et en France : Le
jeûne est une véritable cure bienfaisante, écrit le docteur Guelpa, « c’est, le meilleur
moyen de redonner la jeunesse à nos organes et de combattre les maladies ».
« Mangez moins et jeûnez quelquefois, dit ailleurs le Dr Vitteaux de Sr-Désert,
votre estomac marchera mieux ; faites jeûne au moins un mois chaque année ».
Ailleurs ce sont des hygiénistes qui recommandent, au nom de la science médicale
d’une part, d’absorber beaucoup moins de nourriture, à condition toutefois de mâ-
cher beaucoup plus les bouchées, et, d’autre part, de réduire de moitié encore notre
nourriture pendant un bon mois tous les ans. Ils ajoutent qu’il est utile pendant
ce jeûne de boire entre les repas quelques verres d’eau pour laver et purifier nos
organes.
Dernièrement, un autre savant écrivait que le gouvernement devrait faire une loi
forçant tous les citoyens à jeûner, chaque année, pendant quelques semaines, pour
purifier le sang et redonner de la vitalité à leurs organes... Ce brave docteur, s’il
avait été tout à fait savant et juste, aurait ajouté : « Cette loi que je rêve, elle a été
déjà inventée par le christianisme, et, depuis près de 2.000 ans, le jeûne annuel est
recommandé aux chrétiens » . On peut citer aussi les mahométans qui jeûnent 4O
jours chaque année, par hygiène religieuse.
Aussi, comprend-on qu’un autre médecin, le docteur Planque ait écrit naguère
avec justesse : « Si le christianisme n’avait pas institué le Carême, les médecins au-
raient le devoir de l’ordonner, tout au moins aux riches et aux gens de bureau ».
Voilà qui est fait pour nous consoler un peu, braves camarades qui travaillons si
dur et qui ne mangeons pas toujours à notre faim : notre estomac est plus accommo-
dant que nous le croyons. Nous pouvons lui donner peu à condition que ce soit de
la nourriture champêtre et très mâchée : cela lui suffit, et notre organisme se trouve
alors dans les meilleures conditions pour obtenir le maximum de forces et de vitalité.
Au contraire, les riches qui excitent leur estomac avec la viande, avec les boissons
alcooliques, avec les épices, le poivre, etc., ces riches-là se font le plus grand tort tout
en se figurant, que plus ils mangent, plus ils vont augmenter leurs forces ; alors qu’au
contraire ils détruisent le bon équilibre de leur santé, et qu’ils usent et vieillissent
plus rapidement leurs organes. Tant pis pour ceux-là : c’est la juste punition de leur
mépris pour la sobriété, et de leur sensualité gourmande.
Mais, nous autres, profitons au moins de la leçon...