Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014 DE LA ROCHE A SON MODELE NUMERIQUE PAR APPROCHE PARTICULAIRE : CONCEPTUALISATION ET APPLICATIONS FROM THE ROCK TO ITS PARTICULATE CONCEPTUALISATION AND APPLICATIONS NUMERICAL MODEL: Mariane PETER-BORIE1, Sylvie GENTIER1, Arnold BLAISONNEAU1, Théophile GUILLON1, Xavier RACHEZ1 1 BRGM, Orléans, France RÉSUMÉ — Dans les domaines de la géothermie, du stockage géologique du CO 2 ou encore de l’exploitation de gaz dans des réservoirs non conventionnels, les sollicitations hydro-thermiques peuvent être à l’origine d’un endommagement et/ou d’une fissuration des roches. Il s’initialise à l’échelle des grains (échelle micro) et se répercute sur les propriétés macroscopiques des roches (échelle macro). L’approche particulaire micro-macro (méthode aux éléments discrets) est particulièrement adaptée mais une des difficultés de ces modèles réside dans la calibration des propriétés à l’échelle des particules pour retrouver les propriétés « macros ». Dans ce papier, une conceptualisation est proposée pour la construction de modèles numériques de roches grenues (granites et grès). Elle repose sur une description fine de la composition minérale et de la texture de ces roches (granulométrie). Un de ces modèles de roche est utilisé pour étudier l’impact du forage sur le proche puits et l’effet de l’injection d’un fluide plus froid que le milieu naturel. A partir de l’assemblage de différents modèles numériques de roches incluant une fissuration locale, les propriétés mécaniques équivalentes d’une zone de faille sont estimées. Ces derniers modèles ouvrent des perspectives pour l’étude d’objets géologiques complexes. ABSTRACT — In the fields of geothermal, CO2 geological storage, and gas exploitation in unconventional reservoirs, hydrothermal loading can be at the origin of damage and/or cracking in rocks. It is initiated at the scale of grains (micro level) and affects the macroscopic properties of rocks (macro level). The particulate micromacro approach (discrete element method) is particularly well suited but one of the difficulties of these models is in the calibration of the properties at the level of particles to recover the "macro" properties. In this paper, a conceptualization is proposed for the building of numerical models of granular rocks (granites and sandstones). It is based on a detailed description of the mineral composition and texture of these rocks (grain size). One of these models of rock is used to investigate the impact of drilling on the near well and the effect of colder fluid injection than the rock mass. From the assembling of different numerical rock models including local cracking, equivalent mechanical properties of a fault zone are estimated. These latter models open perspectives for the study of complex geological objects. Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014 1. Introduction Dans les domaines de la géothermie, du stockage géologique du CO2 ou encore d’exploitation de gaz dans des réservoirs non conventionnels, les sollicitations hydrothermiques peuvent être à l’origine d’une fissuration des roches. Cette dernière s’initialise à l’échelle des grains (échelle micro) et se répercute sur les propriétés macroscopiques des roches (échelle macro). Même en simplifiant la physique en jeu, le modèle mathématique résultant est complexe et doit être résolu numériquement. Parmi les méthodes numériques existantes, une approche particulaire micro-macro (méthode aux éléments discrets) est particulièrement adaptée. La difficulté de ces modèles de particules réside dans la calibration des propriétés à l’échelle des particules pour retrouver les propriétés « macros ». Ce papier propose une méthode de conceptualisation des roches dans l’objectif d’optimiser la calibration des propriétés dites « micros ». Après une description du code utilisé (PFC ©Itasca), une attention particulière est portée à la modélisation de la roche. Deux exemples d’applications sont ensuite donnés en illustration ; ils concernent : l’étude de la dégradation potentielle du puits à l’origine d’un phénomène de venue de sable (sanding) induite par le forage du puits et aggravée par une sollicitation thermique (cas de l’exploitation géothermique du grès du Trias à Melleray); l’estimation de propriétés équivalentes d’un milieu pétrographique complexe pour effectuer un changement d’échelle (cas des zones de failles plurimétriques des granites du système géothermique stimulé de Soultz-sous-Forêts). 2. Méthode aux éléments discrets (DEM) Les modèles de particules liées sont réalisées avec le code PFC (©Itasca, 2008) dont le principe est la modélisation du mouvement et de l'interaction de particules circulaires en utilisant la méthode des éléments discrets (DEM ; Cundall, 1971). Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014 Figure 1. Comportement des grains, des parallel-bonds (Potyondy et Cundall, 2004) et des modèles des joints lisses (Itasca, 2008) Le modèle est composé de particules distinctes qui se déplacent indépendamment les unes des autres, et qui interagissent seulement aux contacts ou interfaces entre elles (figure 1). Dans l’étude présentée ici, les particules sont initialement liées par un contact Parallel Bond (PB, figure 1, Potyondy et Cundall, 2004). Le comportement macroscopique du modèle est régi par la densité de l’arrangement des particules, leur distribution granulométrique, et les propriétés des particules et des contacts (Potyondy et Cundall, 2004). Des discontinuités peuvent être intégrées dans ces modèles : un modèle de joint lisse (Smooth Joints Model – SJM ; figure 1, Itasca, 2008) est appliqué au contact entre les particules superposées aux discontinuités. Il permet le glissement de deux particules parallèlement à la discontinuité. 3. Construction du modèle de roche numérique Modéliser une roche grenue avec un modèle de particules liées nécessite en premier une description de ses caractéristiques pétrographiques. Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014 Figure 2. Principe de la construction d’un modèle numérique de particules liées. Deux types de roches grenues sont considérées ici : les roches plutoniques (type granite), montrant un assemblage de cristaux en grains en contact par des joints de grains ; et les roches sédimentaires détritiques terrigènes (type grès), formées de débris issus de l’érosion d’autres roches et apparaissant sous forme de grains liés entre eux par un processus de cimentation. L’analyse de lames minces permet de décrire la texture de la roche à travers notamment, la nature minéralogique des grains qui la composent et leurs proportions, la granulométrie des grains, la porosité, et, dans le cas des roches sédimentaires, le type et la proportion des cimentations. Lors de la conceptualisation de la roche, la texture de la roche doit être confrontée à la physique du problème à résoudre. Selon le phénomène physique associé à la sollicitation imposée et l’échelle d’étude concernée, cela va conduire à la construction de modèles de particules liées pour lesquels soit chaque particule est associée à un grain de la roche, soit chaque particule modélise un volume de roche homogénéisée (figure 2) ou volume élémentaire représentatif (VER) 3.1. Modèles à l’échelle d’un volume de roche homogénéisée Les modèles de particules liées composées de particules qui modélisent un volume de roche homogénéisée ont fait l’objet d’une étude par Potyondy et Cundall (2004) dont le contenu est brièvement rappelé ici. Ces auteurs présentent une analyse des micropropriétés (à l’échelle des particules) et macro-propriétés (à l’échelle de l’échantillon du modèle de particules liées) et ils proposent une application au granite du lac du Bonnet (Canada). Dans ce type de modèle, la particule numérique est associée à un échantillon de roche et possède ainsi des propriétés mécaniques et thermo-mécaniques homogénéisées qui permettent de reproduire le comportement «macroscopique» de la roche. La granulométrie des particules est différente de celle de la roche : Potyondy et Cundall (2004) préconisent l’utilisation d’une granulométrie caractérisée par un rapport des rayons extrêmes des particules égal à 1,6 associée à une compacité de 84% pour un assemblage optimal des particules. Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014 3.2. Modèles à l’échelle des grains de la roche La construction d’un modèle de particules liées à l’échelle des grains proposée ici intègre les caractéristiques texturales des roches. La composition minéralogique de la roche est directement répercutée sur le nombre de familles de particules et leurs caractéristiques : chaque nature de grain (quartz, feldspath, etc.) est associée à une famille de particules dont les proportions et la granulométrie sont identiques à celles observées dans la roche. Figure 3. Evolution de la largeur du contact entre les particules : des roches sédimentaires (en fonction de l’induration) aux roches plutoniques. Figure 4. Caractéristiques volumétriques (densité) de la roche et traduction dans le modèle de particules liées. Les joints de grains des roches plutoniques sont modélisés par les contacts PB. Dans le cas des roches sédimentaires, nous proposons de modéliser non seulement les cimentations grain à grain mais aussi les cimentations par un minéral secondaire par des contacts PB. Le degré d’induration de la roche, qui est d’autant plus élevé que les processus de cimentation des grains par précipitations de minéraux secondaires ou par compaction a été important lors de la diagénèse, est alors traduit par la largeur du PB (figure 3) : plus le degré d’induration de la roche est élevé, plus la largeur du PB est élevée. L’induration est mise en relation avec l’étendue de la surface en contacts entre les grains ou du recouvrement par un minéral secondaire estimée au mieux à partir d’une évaluation sur lames minces. Les caractéristiques géométriques du modèle de particules liées définies, les propriétés physiques, mécaniques et thermo-mécaniques des particules et des PB sont attribuées selon les Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014 correspondances roches-modèles de particules liées établies et le rôle dans le comportement de la roche : tandis que les particules sont principalement associées aux caractéristiques volumétriques (la densité) et aux propriétés élastiques de la roche, les contacts sont associés à la rupture. La densité des particules liées de l’échantillon de roche numérique est en moyenne celle de la densité de la roche. De fait, les particules intègrent l’ensemble des constituants de la roche qui influent sur les propriétés volumiques de la roche : chaque particule contient le grain qu’elle représente, mais aussi une part du ciment potentiel et du vide poral (figure 4). Le calage numérique des propriétés mécaniques, thermiques et thermo-mécaniques des modèles de particules liées est précédé par un précalage. Il a pour objectif de rechercher une solution préalable qui permet l’estimation de propriétés des grains et ciments constituant la roche selon deux critères : 1) intégration des propriétés de chacune des phases minérales en appliquant les théories des milieux effectifs (Berryman, 1995). Cependant, le problème étant en général non-linéaire et anisotrope, l’application de ces théories reste complexe et ne permet de le résoudre complètement ; 2) cohérence des propriétés de chacune des phases considérées avec les propriétés des minéraux qui les constituent. Le calage numérique final des micro-propriétés est ensuite réalisé de façon itérative en modélisant des essais mécaniques (compression simple, triaxiale) sur un échantillon de modèle de particules liées jusqu’à obtenir des résultats d’essais similaires à ceux obtenus sur les véritables échantillons de roche en laboratoire. Le volume de l’échantillon numérique utilisé pour les essais est suffisant pour permettre une représentation statistique correcte des différentes familles de particules du modèle de roche (VER). 4. Exemples d’applications 4.1. Endommagement du puits de l’exploitation géothermale d’un grès du Trias La modélisation présentée est extraite de l’étude de la dégradation de grès triasiques identifiés comme des niveaux injecteurs pour l’exploitation géothermique du réservoir argilo-gréseux du Trias à Melleray (France ; Peter-Borie et Blaisonneau, 2012). Deux types de sollicitations ont été étudiés : la première mécanique, générée par le déconfinement associé au forage et la seconde thermique, liée à l’injection d’un fluide plus froid que la roche hôte aux premières heures de la mise en exploitation du puits. Le faciès de grès étudié ici est composé majoritairement de quartz (99%) sous forme de grains de 0,1 10-3 m à 0,3 10-3 m de rayons, cimentés soit directement entre eux (10%), soit par un ciment argileux (30%) ou dolomitique (60%). Deux modèles de particules liées ont été créés : l’un à l’échelle des grains (tableau 1) et le second à l’échelle d’un volume de grès homogénéisé (figure 5a et b) ; dans ce dernier modèle la granulométrie des particules s’étale entre 1000 µm à 1600 µm, chaque particule représente en moyenne 6 grains de la roche. Ces deux modèles ont des propriétés macroscopiques équivalentes. Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014 Propriétés "micro" Particules monominérales de quartz Contacts cimentés graindoloargile grain mite Résistance à la traction (MPa) Module d’Young (GPa) 60 Propriétés "macro" Module d’Young (GPa) Cohésion (MPa) Angle de frottement (°) Modèle numérique du grès 25 19 20 Résistance à la compress. simple (MPa) 66 60 30 49 Cohésion (MPa) 19 90 68 74 Angle de frottement (°) 43 38,5 30,8 33,1 Module d’Young (GPa) 38 Tableau 1 : Propriétés micro- et macroscopiques du modèle de particules liées à l’échelle des grains du grès triasique de Melleray (les propriétés microscopiques des contacts sont les moyennes des propriétés des contacts quartz-quartz qui représentent 98% des contacts ; Peter-Borie et Blaisonneau, 2012). Figure 5. Modèles numériques de grès à l’échelle du grain (a) et à l’échelle d’un volume de grès homogénéisé (b). Localisation des ruptures dans le modèle de particules liées à l’échelle du grain lors du forage et de la sollicitation thermique (c). Les modélisations ont comporté deux phases principales : (i) le déconfinement dû au forage du puits, (ii) la sollicitation thermique de quelques heures. Elles concernent un volume de roche (température 80°C) autour du puits d’injection de 18 cm de diamètre, à 1500 m de profondeur (contraintes : ’V=24 MPa, ’H=13 MPa, ’h=7 MPa ; température de réinjection 35°C), selon une section choisie horizontale et centrée sur le puits. Le modèle particulaire (54 cm x 54 cm) est inclus dans un modèle continu FLAC2D (2 m x 2 m) qui permet de repousser les conditions aux limites suffisamment loin du puits et du modèle particulaire où le phénomène est étudié (Shiu et al., 2011). Afin de diminuer le temps de calcul, la réponse thermique transitoire est réalisée par un calcul analytique qui résout l’équation de la température en fonction de la distance au puits. Le forage du puits, est à l’origine d’un léger endommagement dans la zone du proche puits dans le cas du modèle de particules liées à l’échelle du grain : une quarantaine de ruptures est observée dans la zone de breakout (axe de la contrainte Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014 horizontale minimale h ; figure 5c) et concernent quasi exclusivement les liaisons de type ciment dolomitique. Dans le modèle de particules liées à l’échelle d’un volume de grès homogénéisé, la modélisation du forage ne se traduit par aucune rupture, ce qui peut être lié au fait que 1) les contacts interparticulaires du modèle homogénéisé sont plus résistants que les contacts de type ciment dolomitique ; 2) la granulométrie plus grossière du modèle homogénéisé ne permet pas de faire apparaitre les ruptures observées très près du puits pour le modèle de grès à l’échelle des grains. La simulation du refroidissement par le fluide géothermal (35°C) de la roche réservoir (initialement à 80°C) est effectuée sur la première heure et demie d’exploitation. La simulation de la sollicitation thermomécanique sur le modèle de particules liées à l’échelle du grain permet de mettre en évidence l’apparition d’une fissuration qui se propage selon la direction de la contrainte maximale (H ; figure 5c). 4.2. Modélisation du comportement mécanique équivalent d’une zone de faille L’exemple proposé vise in fine l’étude des effets d’une stimulation hydraulique d’une zone de faille. La dimension plurimétrique de ces objets géologiques ne permet pas la mise en place d’essais expérimentaux qui permettraient de caractériser son comportement mécanique. Afin de pallier ce manque de données, nous proposons d’appliquer les modèles de particules liées en prenant en compte toute la complexité pétrographique et structurale d’une zone de faille afin d’estimer des propriétés mécaniques équivalentes. A partir du modèle conceptuel pétrographique de la zone de faille dans les granites sur le site de Soultz-sous-Forêts proposé par Genter et al. (2000), un échantillon de zone de failles est construit (hauteur : 1,5m). Il est composé de deux modèles de particules liées distincts, qui intègrent à l’échelle du grain un granite hydrothermalisé, et une veine de quartz (tableau 2). Le granite cataclasé est modélisé par l’association d’une fracturation intense au modèle de granite hydrothermalisé (figure 6a). La fracturation est modélisée par des SJM caractérisés par une cohésion de 5 MPa et un angle de frottement de 30°. La réalisation d’essais numériques (uniaxial et triaxial) a permis l’estimation de propriétés mécaniques équivalentes. La figure 6b et le tableau 3 résument les propriétés macroscopiques des modèles numériques des faciès de roche et les celles du modèle équivalent. La roche équivalente a des propriétés mécaniques globalement plus faibles : la résistance à la compression simple et la cohésion de la zone de faille sont plus de deux fois inférieures à celles des faciès pris séparément. La raideur normale de la discontinuité équivalente est égale à 8,2 MPa/mm, et est cohérente avec des valeurs de la littérature : en général, les valeurs des raideurs normales des discontinuités vont du MPa/mm à quelques dizaines de MPa/mm (Bandis et al., 1983). Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014 Figure 6. a. Modèle conceptuel d’une zone de faille dans le granite de Soultz (d’après Genter et al., 2000, modifié), traduction dans le modèle numérique. b. Courbes illustrant les résultats des essais uniaxial et triaxiaux sur la zone de faille. Particules monominérales de quartz Module d’Young 65 (GPa) Rayon minimal (m) 1,5 10-3 Rayon maximal (m) 3,5 10-3 Contacts joints de grains Résistance à la traction (MPa) Module d’Young (GPa) Cohésion (MPa) Angle de frottement (°) 110 65 257 40 Tableau 2 : Propriétés micro du modèle de veine de quartz à l’échelle des grains. Modèle de roche numérique Module d’Young (Gpa) Coefficient de Poisson Résistance à la compression simple (MPa) Cohésion (MPa) Angle de frottement (°) Granite hydrothermalisé 33,4 0,23 128 33,5 39,2 Veine de quartz 57,3 0,08 188 47,6 40,1 Roche équivalente 12,2 0,06 59 18 37 Tableau 3 : Propriétés macro des modèles de granite hydrothermalisé et de veine de quartz à l’échelle des grains et de l’échantillon de zone de faille. 5. Discussion Les différents modèles numériques de roche étudiés (grès quartzique, granite hydrothermalisé, veine de quartz) ont été construits sur la base de la texture de la roche (échelle des grains correspondant à des phases minérales pour l’essentiel) constituant le niveau micro de la modélisation. A ce niveau de discrétisation, il est intéressant de comparer les propriétés « macros» des deux roches mono-minérales constituées du même élément initial (particules associées aux grains élémentaires de quartz dans les deux cas) de propriétés équivalentes (60 GPa). Elles différent par Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014 leur granulométrie (rapport de 10 en moyenne) et par les propriétés des contacts entre les grains de la roche. L’assemblage représentant une veine de quartz est dans sa structure plus résistant (188 MPa en compression simple) qu’un assemblage des mêmes éléments de base de granulométrie inférieure (nombres de contacts plus grand) et de propriétés plus diverses (66 MPa en compression simple soit trois fois plus faible) et correspondant à un ciment et non à une cristallisation (joints de grain). En restant à ce niveau de discrétisation, la construction d’un modèle numérique de zone de failles par juxtaposition de modèles numériques de faciès élémentaires a conduit à une estimation des propriétés mécaniques équivalentes pour l’objet global. Il ressort de cette étude que la résistance équivalente est principalement gouvernée par le granite cataclasé assimilé à un granite hydrothermalisé fracturé qui constitue le « maillon faible » de l’assemblage. La résistance équivalente va donc être aussi dépendante de la densité de fracturation et des propriétés de ces fractures. Au-delà des propriétés équivalentes macros, il est intéressant d’observer l’influence des hétérogénéités sur les ruptures observées à l’échelle de l’échantillon reconstitué. Le niveau de discrétisation de la roche dans le modèle numérique peut être réduit en considérant des particules dans le modèle numérique représentant déjà un volume de roche « homogénéisée », c’est-à-dire à une granulométrie supérieure à celle des grains de la roche elle-même. L’homogénéisation des grains du grès quartzique (une particule équivalente à environ 6 éléments de la roche) nécessite d’attribuer des propriétés mécaniques aux particules plus proches de celle de la roche intacte que des éléments de quartz eux –mêmes. Ceci conduit à obtenir des propriétés macros équivalentes (module d’Young et Rc) pour les deux niveaux de discrétisation. Cependant, les ruptures observées lors du forage du puits sont masquées dans le modèle « homogénéisé ». Cela pose la question soit au niveau de l’homogénéisation par rapport à un phénomène très local (problème d’échelle) soit à une difficulté d’homogénéiser les propriétés des contacts pour garder tout au moins une probabilité de rupture équivalente. 6. Conclusion et perspectives La description fine pétrographique et texturale d’une roche permet l’élaboration d’un modèle conceptuel de particules élémentaires traduisant l’origine et l’histoire de la roche étudiée (minéraux constitutifs, cristallisation versus diagénèse, altération, fracturation…). Sur la base de tels modèles, des phénomènes physiques rencontrés classiquement en ingénierie du sous-sol profond au niveau des puits, notamment mécaniques et thermomécaniques, peuvent être étudiés et confrontés aux observations faites in situ. Ils peuvent également aider à l’interprétation des données de forage (diagraphies et imageries). Au-delà de la construction de modèle numérique de roche homogène proche de la texture et de la composition initiale d’une roche, la construction d’un modèle numérique d’une zone de faille hétérogène peut être réalisée par juxtaposition des différents faciès possédant chacun leur homogénéité et en superposant localement un réseau discret de fractures. Cette approche par brique élémentaire ouvre de nombreuses perspectives pour l’étude des objets géologiques hétérogènes et plus Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014 particulièrement à des échelles non échantillonnables et testables en laboratoire. Par contre, cela pose le problème de la définition d’une méthodologie pour échantillonner et définir les propriétés à l’échelle de la discrétisation élémentaire. Si la conceptualisation du modèle est relativement directe à l’échelle de la texture de la roche, la conceptualisation à des échelles plus petites, tout en apparaissant à première vue plus simple (particules de propriétés homogènes et granulométrie homogène) doit être bien évaluée en fonction des phénomènes physiques étudiés. Cependant, cette approche ouvre des perspectives pour la modélisation de massifs rocheux à l’échelle de sites spécifiques. Remerciements Les travaux présentés ont été menés dans le cadre des projets Gefrac3Mod et Clastiq-2 financés par l’ADEME, du projet européen GEISER et des projets de développement CAPTAIN et NUMROCH financés par le BRGM. Les auteurs remercient Itasca France pour son expertise et le soutien technique apporté à ces modélisations. Références bibliographiques Bandis S.C., Lumsden A.C. & Barton N.R., (1983) Fundamentals of Rock Joint Deformation. Int. J. Rock Mech. Min. Sei. & Geomech. Abstr. Vol. 20, N°6, pp. 249-268 Berryman J. G. 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