DOSSIER « ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE » J Pharm Clin 2010 ; 29 (2) : 113 Conclusion CORINNE ISNARD-BAGNIS1, VINCENT LAUNAY-VACHER2 1 Service de néphrologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris Service ICAR, Service de néphrologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris <[email protected]> 2 doi: 10.1684/jpc.2010.0147 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. P lusieurs définitions existent pour l’éducation thérapeutique (ETP). Retenons celle du ministère de la Santé (basée sur le rapport rédigé par Christian Saout à la demande de Madame Roselyne Bachelot, ministre de la Santé et des Sports) qui propose l’ETP comme un processus de renforcement des capacités du patient et de son entourage à prendre en charge l’affection qui le touche, sur la base d’actions intégrées dans le projet de soin. Cette définition insiste sur l’objectif d’autonomie pour le patient, par l’acquisition de savoirs et de compétences, mais également, ce qui est fondamental, sur l’amélioration de la qualité de vie. Selon la loi, l’ETP doit s’adresser à tout patient qui le nécessite. Cela sous entend qu’il faut réfléchir à la façon dont les professionnels peuvent évaluer les besoins des patients. Il faut aussi être réaliste et constater que les moyens humains disponibles ne permettent pas actuellement l’accès pour tous à un accompagnement thérapeutique et qu’il est nécessaire de proposer une prise en charge prioritaire à certains patients. Ainsi, dans la maladie rénale chronique, chaque étape de la maladie rénale peut être l’objet de difficultés particulières. Il existe des événements « charnière » principalement déterminés par l’évolution de la fonction rénale et des thérapeutiques proposées. Certaines composantes d’un programme d’accompagnement peuvent se retrouver prioritaires à différents stades de la maladie comme l’aide à l’observance. Paradoxalement, l’annonce de la maladie chronique, si elle fait l’objet d’un accompagnement en oncologie, n’est la plupart du temps pas associée à des actions d’ETP spécifique en néphrologie alors que c’est un moment difficile, dont les patients se souviennent souvent toute leur vie. Il faut souligner que très peu d’études apportent des données permettant de mettre en place des actions spécifiques et nous avons encore de très nombreuses questions à résoudre vis-à-vis du moment idéal et de la forme que doit prendre l’annonce d’une maladie chronique comme une maladie rénale. De même, l’accompagnement diététique a des objectifs très différents suivant les étapes de traitement de la maladie rénale. Parmi ces différents stades de la maladie rénale chronique, l’annonce d’une insuffisance rénale au stade terminal nécessitant la mise en place d’une technique d’épuration extra-rénale, hémodialyse ou dialyse péritonéale, est une étape particulièrement délicate. J Pharm Clin, vol. 29, n o 2, avril-mai-juin 2010 Bien sûr, la discussion des techniques de remplacement de la fonction rénale comme l’hémodialyse, la dialyse péritonéale ou la transplantation nécessite un accompagnement spécifique qui mobilise à la fois des actions d’information, d’acquisition de connaissances, d’élaboration d’un choix de la technique mais aussi un travail sur la peur qui est très souvent associée à la perspective de ce type de soin. C’est une période très difficile à vivre pour les patients qui dans un tiers des cas, débutent la dialyse dans un contexte d’urgence, donc sans avoir pu être préparés à ce type de soin. Les psychologues sont ainsi souvent associés, et à juste titre, aux programmes d’ETP. Ils peuvent participer à de nombreuses actions notamment aux ateliers de groupe, à la conception d’outils, à l’évaluation des patients. Néanmoins, il ne faut pas confondre et mélanger la prise en charge psychologique et l’accompagnement en ETP qui sont des choses différentes. Les personnes formées à l’ETP pourront dépister un besoin d’aide psychologique et travailler en collaboration avec des psychologues. Par ailleurs, la pratique de l’ETP peut conduire à des questions ou des difficultés au sein d’une équipe de professionnels de santé auxquelles le psychologue peut aider à répondre en animant une réflexion de groupe. La majorité des programmes d’ETP existant en milieu hospitalier sont souvent centrés sur l’acquisition de compétences d’auto soin (la pratique de la glycémie capillaire, l’automesure tensionnelle) ou sur l’observance. Il existe une très grande hétérogénéité des pratiques en milieu hospitalier. Il faut noter que le lien entre l’hôpital et la ville doit être renforcé pour permettre aux patients d’être pris en charge à proximité de leur domicile sans avoir à revenir à l’hôpital pour les actions d’ETP. Ainsi peut-on considérer que l’ETP en France nécessite encore de très nombreux développements, et une organisation claire. Si elle doit être assurément menée en milieu hospitalier, il n’y a pas lieu de l’y circonscrire, au contraire. Les réseaux de santé peuvent (doivent ?) être un moyen de relier et de diffuser, reproduire, et adapter les programmes hospitaliers en ville. Dans ce contexte, les pharmaciens d’officine, en relation avec leurs confrères hospitaliers, constituent une charnière sur laquelle articuler cette collaboration ville-hôpital. ■ 113