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Pour en savoir plus...
tions d’activité (selon le sexe, l’âge, le ter-
rain...). Les facteurs neurotrophiques
comme le NGF ou le BDNF agissent aussi
comme des neuromodulateurs des neu-
rones nocicepteurs.
La sensibilisation centrale est
un élément majeur dans la
pérennisation des circuits de la
douleur
La sensibilisation centrale implique la
mise
en jeu d’un nombre important de neuro-
transmetteurs. L’activation périphérique
des fibres A-delta et C par une stimulation
douloureuse va induire une activation post-
synaptique plus longue et plus importante
dans le cas d’une sensibilisation centrale.
Cette amplification centrale est liée à l’ac-
tivation de récepteurs N-methyl-D-aspar-
tic acid (NMDA) par des acides aminés
excitateurs comme le glutamate et à l’ac-
tivation de récepteurs neurokinines par la
substance P. Le monoxyde d’azote, ubi-
quitaire et impliqué dans de nombreux pro-
cessus, est également très impliqué dans la
sensibilisation centrale due à la douleur.
Lors de certaines stimulations nocicep-
tives, en particulier des douleurs viscérales
ou neuropathiques, on a pu noter une acti-
vation de neurones de la colonne dorsale,
donc de nouvelles voies de transmission
de la douleur, habituellement non fonc-
tionnelles : la mémorisation de la douleur
induit un recrutement temporel, mais aussi
spatial, au niveau central.
Une mémorisation variable
selon la douleur
La mémoire d’une douleur est influencée
par un grand nombre de facteurs, dont en
premier lieu l’intensité de la douleur appli-
quée. Le jugement des patients semble plus
influencé par l’intensité du stimulus que
par sa durée. Différents facteurs peuvent
agir sur la mémoire de la douleur : l’in-
tensité de la douleur, l’émotion, l’intensité
attendue de la douleur, le pic d’intensité
d’autres douleurs précédemment ressen-
ties. De nombreux auteurs ont montré que
si une douleur sévère persistait plus de
24 heures, le développement de modifica-
tions neurologiques était inévitable.
Les facteurs psychologiques
sont fondamentaux
Des modifications neurologiques peuvent
survenir après une douleur, mais aussi
après un choc psychologique. La mémori-
sation des phénomènes douloureux est bien
sûr renforcée par des situations de stress ou
de conflit psychologique. Le cerveau pos-
sède des systèmes pour masquer ou ren-
forcer la douleur grâce aux endorphines, à
la sérotonine et autres médiateurs. La séro-
tonine pourrait être impliquée dans la rémi-
niscence de la douleur au cours de certaines
dépressions. Les facteurs psychologiques
sont au premier plan dans les douleurs
chroniques, où la complexité du tableau ne
permet souvent pas de définir ce qui les a
favorisées ou ce qui en est le corollaire :
états dépressifs, troubles de la personnalité,
anxiété, atteinte du comportement ou du
coping... Les approches cognitivo-com-
portementales insistent aujourd’hui égale-
ment sur l’importance des croyances et des
attentes des patients (douleur attendue
avant une intervention, soulagement espéré
après un traitement), également importantes
dans l’effet placebo.
Peut-on prévenir la mémorisa-
tion de la douleur ? L’analgésie
préventive
En général, la prise en charge de la dou-
leur débute après l’apparition du stimulus
douloureux. Récemment, certains auteurs
ont développé le concept d’analgésie pré-
ventive. De nombreuses études ont en effet
montré que chez l’animal, une interven-
tion antinociceptive appliquée avant un sti-
mulus douloureux ou une lésion est plus
efficace que lorsqu’elle est appliquée après
le stimulus. Par contre, une fois que l’hy-
perexcitabilité est induite, il faut utiliser de
plus larges doses d’antalgiques pour sup-
primer la douleur. Dans la pratique, ce
concept démontré chez l’animal est contro-
versé chez l’homme, et n’a pas prouvé sa
pertinence dans de nombreuses situations,
en particulier en chirurgie. En revanche,
on sait que les traitements qui agissent sur
la mémoire, en particulier les benzodiazé-
pines, mais aussi les cannabinoïdes, ont un
rôle antalgique démontré : ils sont utilisés
comme coanalgésiques dans de nom-
breuses situations.
La mémoire de la douleur, qui compte par-
fois autant que la douleur ressentie par le
patient au moment du traumatisme ou de la
lésion, est un élément fondamental à
prendre en compte, notamment en rhuma-
tologie, où les atteintes chroniques sont pré-
dominantes. Pour certains auteurs, la dou-
leur chronique ne serait qu’une
réminiscence de douleurs aiguës, alors
même que l’agression tissulaire a disparu.
Les facteurs favorisant cette mémoire sont
très nombreux et variables d’un patient à
l’autre. Cette approche nouvelle offre des
perspectives intéressantes pour le traitement
de nombreuses douleurs, avant tout neuro-
pathiques, mais aussi en rhumatologie.
S. Perrot,
service de rhumatologie A
et Centre de traitement de la douleur,
hôpital Cochin-Tarnier, Paris