Définition
La méningite est l’inflammation des deux membranes
méningées, l’arachnoïde et la pie-mère qui enveloppent
le cerveau et la moelle épinière. L’espace entre ces mem-
branes se nomme l’espace sous-arachnoïdien et contient
le liquide céphalo-rachidien. Pour que l’on soit en
présence d’une méningite, il est essentiel que des micro-
organismes pénètrent dans l’espace sous-arachnoïdien.
Bien que ce soit possible, il est rare que la méningite
bactérienne survienne par l’extension directe d’un lieu
infecté tel qu’une sinusite, une mastoïdite ou une otite
moyenne aiguë.
La méningite est plutôt une progression d’événe-
ments. Les bactéries colonisent en premier lieu le
nasopharynx pour ensuite pénétrer la circulation san-
guine et parvenir au cerveau par les capillaires inflammés
du plexus choroïde. Les bactéries traversent ainsi la bar-
rière hémato-encéphalique, puis l’espace sous-arachnoï-
dien. Suite à l’intrusion de ces bactéries dans le liquide
céphalo-rachidien, survient une libération de médiateurs
et de cytokines produits par les macrophages du cerveau
et des cellules endothéliales amenant ainsi une réponse
inflammatoire avec des changements vasculaires et
parenchymateux du cerveau(3).
Les mécanismes d’autodéfense de l’organisme sont
insuffisants pour combattre les infections dans le liquide
céphalo-rachidien faute d’anticorps. En effet, avant
même l’apparition de la méningite, le liquide céphalo-
rachidien contient une concentration insuffisante d’im-
munoglobulines, de neutrophiles et de composés du
complément nécessaire pour inhiber la multiplication
rapide des bactéries avant l’apparition de l’infection.
Certains déficits immunitaires favorisent le développe-
ment de la méningite bactérienne aiguë. Par exemple,
les enfants de moins de deux ans présentent naturelle-
ment un certain déficit de réponse immune aux bac-
téries encapsulées, comme le streptocoque pneumoniae.
De la même façon, les enfants les plus à risque sont ceux
atteints d’asplénie fonctionnelle ou anatomique,
comme ceux atteints d’anémie falciforme et les enfants
nés aspléniques. Les enfants qui ont un système immu-
nitaire faible tels que ceux atteints du sida ou ceux rece-
vant une chimiothérapie sont aussi plus susceptibles de
contracter une méningite. Enfin, les enfants affligés de
malformations congénitales du visage et du crâne peu-
vent présenter des défectuosités de l’os qui permettent
aux bactéries d’avoir accès aux méninges(4).
Incidence et causes
On compte 2,5 à 3,5 cas de méningite par 100 000 habi-
tants en Amérique du Nord(2). Cependant, on trouve le
plus de cas chez les enfants âgés de trois mois à cinq ans.
Chez le nouveau-né, la méningite est causée par une
bactérie provenant du canal vaginal à la naissance. Les
bactéries en cause proviennent surtout des streptocoques
du groupe B, l’Escherichia coli et le Listeria monocyto-
genes. Les enfants âgés de plus de trois mois dévelop-
peront l’infection par inhalation des sécrétions respira-
toires de personnes infectées.
Ces bactéries sont surtout les streptocoques pneumo-
niae, Neisseria meningitidis et l’Hæmophilus influenzae.
On trouvera, au tableau 1, les pathogènes les plus
fréquents selon l’âge de l’enfant et les antibiotiques uti-
lisés dans ces cas.
Avant l’introduction du vaccin anti-Hib, l’Haemo-
philus influenzae comptait pour 60 % de toutes les
méningites chez les trois mois à trois ans. Cependant,
depuis 1990, soit lors de l’introduction de ce vaccin
dans le calendrier d’immunisation, la fréquence des cas
causés par cette bactérie a chuté de 98 % aux États-Unis
et au Canada(5). On a aussi observé une chute marquée
de l’incidence des infections invasives à pneumocoques
grâce au vaccin PrevnarMD introduit aux États-Unis au
début des années 2000. Aujourd’hui, grâce à ces vac-
cins, l’agent causal principal est le S. pneumoniae et ce
taux reste stable au Canada, soit 0,2 à 0,5 cas par
100 000 habitants depuis les 10 dernières années.
L’incidence d’une méningite à N. meningitidis est de
Québec Pharmacie vol. 52, no1, janvier 2005 33
Texte rédigé par
Ingrid Wagner,
B. Pharm., M. Sc.,
CHUQ, Centre
hospitalier de
l’Université Laval,
Québec.
Texte original soumis
le 1er novembre 2004.
Texte final remis le
15 novembre 2004.
Révision :
Dr François Boucher,
pédiatre-infectiologue,
et Chantal Duquet,
B. Pharm., M. Sc.
les pages BLEUES
La méningite bactérienne
chez l’enfant
La méningite bactérienne est une infection qui cause beaucoup de craintes dans la population, plus
particulièrement chez les parents qui ont de jeunes enfants. Aucune infection bactérienne au monde
n’a eu une évolution épidémiologique aussi spectaculaire que la méningite aiguë depuis 1990(1). Même
si on a réalisé beaucoup de progrès en matière de traitement et de vaccination, la méningite reste
encore une importante source de morbidité et de mortalité. Cet article traitera de la méningite
bactérienne acquise en communauté, plus particulièrement chez les nouveau-nés et les jeunes
enfants. Nous aborderons les symptômes typiques cliniques de la méningite bactérienne, l’approche
diagnostique de même que les recommandations en matière de traitement et de la thérapie adjuvante.
0,6 cas par 100 000 et est plus élevée chez les jeunes
enfants. Cette bactérie est d’ailleurs la première cause de
la méningite chez les 2 à 18 ans. Les sérogroupes B et C
comptent pour la moitié des cas.
Manifestations cliniques
Les manifestations cliniques de la méningite varient
en gravité. Les symptômes cliniques dépendent de
l’âge ou de la condition physique du patient(6). La
méningite peut être ainsi difficile à diagnostiquer, car
les symptômes et signes cliniques peuvent être
quelquefois non spécifiques, spécialement chez les
nouveau-nés et les jeunes enfants (1 mois à 12
mois)(7). Ces deux groupes d’âge manifestent le plus
souvent les mêmes symptômes cliniques : instabilité
de la température corporelle (hypothermie ou hyper-
thermie), cris, léthargie, refus de se nourrir, faible
réflexe de succion, irritabilité, vomissements, diarrhée
et détresse respiratoire (tachypnée ou apnée). Parce
que le nouveau-né et le jeune enfant ne présentent pas
les signes habituels de la méningite, un changement
dans l’état physique de l’enfant ou son état d’éveil est
important. Un renflement de la fontanelle peut appa-
raître tard dans le processus de l’infection. Il sera
présent dans 50 % des cas.
Une éruption cutanée peut aussi être présente mais
rare chez les jeunes enfants. De plus, un tiers d’entre eux
peuvent présenter des convulsions. Ces symptômes se
développent habituellement pendant au moins un à
deux jours, mais quelques enfants, plus particulièrement
ceux entre la naissance et l’âge de trois ou quatre mois,
deviennent rapidement malades en moins de 24
heures(4). Chez les trois quarts des enfants plus âgés (plus
de 12 mois), la maladie est subaiguë et se développe en
deux à cinq jours. Une méningite aiguë débute par des
signes et symptômes d’inflammation méningée pendant
quelques jours et se manifeste par une augmentation de
la fièvre, des maux de tête, une raideur de la nuque et
une altération du niveau de conscience.
À mesure que l’infection progresse, des signes de
pression intracrânienne élevée apparaissent (hyperten-
sion, bradycardie, coma) et les signes d’irritation ménin-
gée (signes de Kernig et de Brudzinski positifs) sont
détectés chez 50 % à 60 % des patients. Des signes neu-
rologiques focaux ou des convulsions sont moins
fréquents. Les patients avec une méningite à méningo-
coque ont un rash diffus, lequel, souvent, se présente
avec pétéchies ou purpura. Un changement de l’état de
conscience et des troubles neurologiques apparaissent
tard dans l’évolution de la maladie. Environ 30 % des
enfants se présentant à l’urgence avec une méningite ont
déjà subi des convulsions(8). Au tableau 2, on trouvera les
principaux signes et symptômes de la méningite présents
selon l’âge de l’enfant.
Signe de Brudzinski : flexion des hanches et des genoux
au moment où on fléchit la tête à la recherche d’une raideur
de la nuque.
Signe de Kernig : En décubitus dorsal : la cuisse est fléchie
à 90 degrés sur le bassin et le genou est fléchi de telle sorte que
la jambe et la cuisse forment également un angle de 90
degrés. Le signe est positif lorsqu’on note, chez le patient, une
résistance ou une douleur lorsqu’il essaie d’étendre la jambe.
34 Québec Pharmacie vol. 52, no1, janvier 2005
les pages BLEUES
Tableau 1 - Traitement empirique selon l’âge(8,10)
Patient Pathogènes Antibiotiques
Nouveau-né
• Infection précoce
• Infection tardive
Streptocoque agalactiæ, Escherichia coli
Klebsiella pneumoniæ
Entérocoques
Listeria monocytogenes
Staphylocoque aureus
, Bacille à Gram négatif
Pseudomonas aethrioscope Æthrioscope æruginosa
• Ampicilline + céfotaxime ou ampicilline +aminoside
• vancomicine+ceftazidime
Ampicilline+céfotaxime ou ceftriaxone
Âge : 1-3 mois voir n-né et infection tardive + Streptocoque
pneumoniæ Neisseria meningitidis,
Hæmophilus influenzæ
Ampicilline+céfotaxime ou ceftriaxone
Âge : 3 mois à 5 ans
Streptocoque pneumoniae
Neisseria meningitidis
Hæmophilus influenzæ
Céfotaxime ou ceftriaxone +vancomycine
Âge : 5 ans et plus
Streptocoque pneumoniæ
Neisseria meningitidis
Pneumocoque multi-résistant
Céfotaxime ou ceftriaxone
Céfotaxime ou ceftriaxone+vancomycine
*Addition de rifampicine si pneumocoque résistant
aux céphalosporines
Cas clinique
L. P., âgé de 29 jours, est amené à l’urgence de l’hôpital régional. Sa tem-
pérature tympanique est de 39,4 ºC. Sa mère affirme qu’il boit moins bien
depuis deux jours, qu’il est plus irritable et plus somnolent. Il ne tousse
pas, ne vomit pas et n’a pas de diarrhée.
L’examen physique fait par le médecin de l’urgence révèle une tem-
pérature rectale de 37,5 ºC, un pouls à 174 battements par minute, une
respiration à 40 par minute et une pression sanguine à 97/41 mm Hg.
L’enfant montrait en outre de l’irritabilité lorsque pris dans les bras. Il n’y
avait pas de renflement de la fontanelle, mais on a noté la présence d’un
rash cutané diffus.
Complications
Les complications de la méningite dépendent de la bac-
térie en cause et du degré de l’état de conscience lors de
l’arrivée du patient à l’hôpital. Les infections à méningo-
coques constituent une urgence médicale qui exige un
diagnostic précoce, l’hospitalisation et une antibio-
thérapie efficace. Même dans les meilleures conditions,
le taux de mortalité de cette infection varie entre 5 % et
10 %, et peut même dépasser 50 % en l’absence de
traitement(1).
Quinze pour cent à 20 % des survivants, notam-
ment les nourrissons et les enfants en bas âge, peu-
vent présenter des séquelles neurologiques perma-
nentes(1,4). Les complications à long terme sont, en
général, de l’ordre de 10 % à 20 % indépendamment
des micro-organismes qui interviennent dans la
maladie. On trouve entre autres une surdité chez
10 % des patients, de l’hydrocéphalie et des pro-
blèmes neurologiques focaux (spasticité, parésie,
ataxie, paralysie cérébrale).
Les convulsions sont une complication importante
de la méningite bactérienne chez l’enfant. Leur inci-
dence serait plus élevée chez les enfants âgés de 3 à 12
mois. Les facteurs associés aux convulsions sont : la bac-
térie en cause, l’état de conscience perturbé à l’arrivée de
l’enfant à l’hôpital, les anomalies neurologiques à l’ima-
gerie, un faible taux de glucose et des protéines élevées
dans le liquide céphalo-rachidien.
Les convulsions tardives, c’est-à-dire survenant plus de
48 heures après le début de la maladie, sont souvent asso-
ciées à un mauvais prognostic(6). Les étiologies proposées
peuvent être dues à la fièvre, à une cause pathologique ou
aux deux. Les convulsions surviennent la plupart du
temps durant la phase aiguë de la méningite.
Dans l’étude de Chang et coll., l’incidence des con-
vulsions était plus élevée lorsque les bactéries E. coli,
Salmonella, S. agalactiæ, H. influenzæ et N. meningitidis
intervenaient dans l’étiologie de la maladie(6).
Jusqu’à 50 % des enfants éprouveront de légères
complications résiduelles telles que des problèmes d’ap-
prentissage et des convulsions occasionnelles.
Une augmentation de la pression intracrânienne peut
aussi survenir au stade aigu de l’infection. Cette dernière
peut entraîner une ischémie cérébrale. Si cette augmen-
tation est substantielle, l’herniation cérébrale peut sur-
venir, ce qui est la cause principale de mortalité dans les
cas de méningite chez les enfants.
La SIADH (sécrétion inappropriée de l’hormone
antidiurétique) peut, de plus, être présente. Elle peut
conduire à de l’hyponatrémie et à la rétention liqui-
dienne, et aggraver ainsi un œdème cérébral. Voilà
pourquoi on recommande une surveillance étroite du
bilan liquidien (ingesta et excreta) chez les patients
atteints de méningite bactérienne aiguë.
On a estimé que le taux de complications dues au
Streptocoque pneumoniæ était aussi élevé que 40 %. Le
taux de mortalité est plus faible avec le N. meningitidis
(5 % à 10 %) ou H. influenzae (3 % à 6 %) compa-
rativement au Streptocoque pneumoniae (15 %)(2).
Diagnostic
Aussitôt que l’on soupçonne une méningite, un échan-
tillon sanguin est prélevé afin d’y pratiquer une culture
qui permet, le cas échéant, de détecter la présence d’une
septicémie. Ensuite, le diagnostic de la méningite
s’établit à partir de caractéristiques précises identifiées
dans le liquide céphalo-rachidien. On doit pratiquer une
ponction lombaire afin d’obtenir ce liquide, lequel est
ensuite envoyé au laboratoire pour examen. Cependant,
la ponction lombaire peut être retardée selon l’état clini-
que du patient. En effet, en présence de signes neu-
rologiques, on peut envisager une tomodensitométrie ou
une résonance magnétique avant la ponction lombaire
afin d’éliminer une hypertension intracrânienne.
Une mesure des globules blancs, neutrophiles, pro-
téines et glucose dans le liquide céphalo-rachidien nous
guidera dans le diagnostic. Une culture du liquide
céphalo-rachidien sera nécessaire pour orienter adé-
quatement le traitement antibiotique par la suite. Au
tableau 3, on trouvera les différents résultats permettant
d’établir un diagnostic de méningite chez l’enfant.
Suite à l’examen physique de l’enfant, si les symp-
tômes observés permettent de soupçonner une ménin-
gite, l’antibiothérapie est entreprise avant même l’obten-
tion des résultats de la ponction lombaire, car un trop
long délai d’attente pourrait aggraver l’état du patient(9).
Le méningocoque sera isolé dans la moitié des cas(7). Il est
intéressant de spécifier qu’un traitement par antibio-
La méningite bactérienne chez l’enfant
Québec Pharmacie vol. 52, no1, janvier 2005 35
Tableau 2 - Présentation clinique selon l’âge(20)
Symptômes Nouveau-né Enfant
Généraux Apnée
Tachypnée
Hypothermie
Hyperthermie
Bradycardie
Fièvre
Frissons
Myalgie
Raideur de la nuque
Tachycardie
Comportementaux Léthargie
Irritabilité
Léthargie
Irritabilité
Neurologiques Cris
Nystagmus
Convulsions
Rigidité de la nuque
Gonflement de la
fontanelle
État mental altéré
Signes neurol. focaux
Perte d’audition
Convulsions
Photophobie
Raideur de la nuque
Kernig, Brudzinski
Dermatologiques Cyanose
Pétéchies
Purpura
Cyanose
Pétéchies
Purpura
Gastro-intestinaux Faible alimentation
Diarrhée
Vomissements
Distention abdominale
Jaunisse
Anorexie
Nausées
Vomissements
tiques administré par voie orale quelque temps avant la
ponction lombaire ne modifie pas la composition cellu-
laire et chimique du liquide céphalo-rachidien. Par con-
tre, la culture est souvent négative suite à un traitement
antibiotique précédent(9).
Traitement
Le taux de mortalité et de morbidité dues à la méningite
étant élevé, un traitement rapide par antibiotiques
administrés par voie intraveineuse est essentiel. Ainsi,
quand la méningite est pressentie et qu’une coloration de
Gram n’est pas accessible, on doit entreprendre une
thérapie empirique. Le choix de l’antibiotique sera fonc-
tion de l’âge de l’enfant et de plusieurs conditions pou-
vant avoir prédisposé l’enfant à la méningite(8). Ce choix
portera sur un antibiotique dont le spectre d’activité cou-
vre tous les agents pathogènes soupçonnés. Les enfants
de moins d’un mois doivent recevoir de l’ampicilline en
raison de son activité bénéfique contre le L. monocyto-
genes et l’entérocoque. On y adjoint un aminoside, car il
apporte une synergie lorsqu’ajouté à l’ampicilline. Une
céphalosporine de troisième génération, la céfotaxime,
est ajoutée à l’ampicilline pour son activité, entre autres
contre le E. coli et le Klebsiella. Pour les enfants âgés de
plus de trois mois, le choix empirique sera la céfotaxime
ou une autre céphalosporine de la troisième génération,
la ceftriaxone. Ce choix est basé sur leur activité contre le
S. pneumoniae, le H. influenzae et les bacilles à Gram
négatif tels que mentionnés plus haut. L’ampicilline ou
la pénicilline G seront un bon choix contre le N. menin-
gitidis. L’incidence de la résistance du N. meningitidis à la
pénicilline G reste très faible en Amérique du Nord et la
thérapie n’a donc pas changé depuis 10 ans.
Les recommandations d’une antibiothérapie pour
une méningite à pneumocoque ont changé depuis
quelques années en raison du changement dans la sus-
ceptibilité du pneumocoque à la pénicilline. En effet, on
considère qu’environ 20 % à 25 % des pneumocoques
sont résistants à la pénicilline en Amérique du Nord ainsi
qu’au Québec. En raison de ce changement de sensibi-
lité, la pénicilline ne peut plus être la thérapie empirique
recommandée. Pour cette raison, les céphalosporines de
la troisième génération ont été recommandées et se sont
avérées très efficaces contre les pneumocoques résistants
à la pénicilline.
La vancomycine est ajoutée au régime thérapeutique
de la méningite à pneumocoque afin d’assurer une cou-
verture thérapeutique adéquate même en cas de résis-
tance de niveau élevé à la pénicilline ou de résistance aux
céphalosporines, ce qui demeure encore exceptionnel.
En présence d’une méningite à cocci Gram positif et
même après la confirmation de la présence d’un S. pneu-
moniae, la vancomycine est donc ajoutée à une
céphalosporine de troisième génération jusqu’à réception
des résultats de l’antibiogramme.
Si le patient est allergique à la pénicilline, les agents
alternatifs sont le chloramphénicol si on est en présence
d’un H. influenzae ou d’un méningocoque, et le
triméthoprim-sulfaméthoxazole pour le L. monocyto-
genes. Le chloramphénicol est rarement utilisé dans les
pays développés. En effet, son métabolisme est imprévi-
sible chez les jeunes enfants et il présente plusieurs inter-
actions avec des médicaments qui peuvent être utilisés
lors d’un traitement de méningite (acétaminophène,
phénobarbital, phénytoïne et rifampicine)(10). Pour des
raisons économiques, le chloramphénicol sera utilisé
dans des pays en développement et l’apparition de la
résistance qui est survenue récemment(1) est inquiétante,
car les conséquences seront dévastatrices, ce dernier étant
largement utilisé dans ces pays où les ressources médica-
menteuses sont limitées, spécialement en Afrique à la
hauteur de la ceinture subsaharienne.
Une fois la bactérie isolée, l’antibiotique doit être
modifié pour une thérapie optimale. En raison de l’ap-
parition des résistances, la thérapie a quelque peu changé
depuis quelques années. Le choix de l’antibiotique se fait
donc en fonction de cette résistance et de la pénétration
de ce dernier en présence d’inflammation des méninges.
Pour ce qui est de la durée du traitement, elle dépen-
dra aussi de la bactérie en cause et de la réponse au traite-
ment. Pour le N. meningitidis, la durée habituelle du
traitement est de sept jours. Pour le S. pneumoniae et le
H. influenzae, elle variera entre 10 et 14 jours. Pour le
streptocoque du groupe B, de 14 à 21 jours.
Si un bacille à Gram négatif ou le L. monocytogenes
sont en cause, un minimum de trois semaines est requis.
La stérilisation du liquide céphalo-rachidien survient
rapidement lors de l’introduction de l’antibiotique. Par
exemple, la stérilisation du méningocoque s’effectue à
l’intérieur de deux heures tandis qu’elle prend quatre
heures pour le pneumocoque(7). Cependant, la stérilisa-
tion du liquide céphalo-rachidien peut être plus tardive,
particulièrement en présence d’une méningite à bacille à
Gram négatif chez le nouveau-né. Dans ce cas, on doit
pratiquer des ponctions lombaires répétées afin de s’assu-
rer de la stérilisation du liquide céphalo-rachidien.
Corticostéroïdes
On débat de l’utilisation des corticostéroïdes dans le
traitement de la méningite bactérienne depuis plus de
40 ans. Son utilisation viendrait de modèles infectieux
d’animaux, qui ont montré que la réponse inflamma-
toire de l’espace sous-arachnoïdien serait un facteur
majeur contribuant à la morbidité et à la mortalité dues
à la méningite bactérienne(11). Sur la base de ces observa-
tions expérimentales, diverses méta-analyses ont conduit
à des conclusions différentes. Selon Bashir et coll., leurs
différents critères d’admissibilité des sujets dans l’étude
36 Québec Pharmacie vol. 52, no1, janvier 2005
les pages BLEUES
Le taux de
mortalité et de
morbidité dues à
la méningite
étant élevé,
un traitement
rapide par
antibiotiques
administrés
par voie
intraveineuse
est essentiel.
Cas clinique (suite)
On a effectué une ponction lombaire et, par la suite, le médecin a prescrit
de la céfotaxime à raison de 200 mg/kg par jour et de l’ampicilline
200 mg/kg par jour. Son état clinique s’est amélioré après 48 heures.
seraient peut-être en cause(7). En effet, ces études
n’étaient pas contrôlées avec un placebo, elles utilisaient
différents antibiotiques, la dexaméthasone était en outre
administrée à des moments différents et tous les patients
n’étaient pas au même stade de la maladie. Certaines
études ont été incapables de montrer un bénéfice réel à
l’ajout de la dexaméthasone. D’autres ont suscité des
réserves quant à la pénétration des antibiotiques dans le
liquide céphalo-rachidien si la dexaméthasone est
administrée en même temps que l’antibiothérapie.
Le rôle des corticostéroïdes est donc controversé.
L’évidence qu’ils protègent contre les complications neu-
rologiques est surtout prouvée lors de méningites à H.
influenzæ de type B. Certains ont soulevé une inquiétude
face à la diminution de l’absorption des antibiotiques au
niveau méningé lorsqu’on est, de plus, en présence d’un
pneumocoque résistant(12). Cependant, il semble désor-
mais prouvé que cette considération soit plus théorique
que réelle.
L’efficacité de la dexaméthasone n’a été montrée que
chez l’enfant de plus de six semaines. Si l’on décide de
prescrire de la dexaméthasone, il est fortement recom-
mandé de l’administrer avant la première dose d’antibio-
tiques ou moins d’une heure après celle-ci(13), car un délai
plus long entraîne une diminution de son efficacité, la
cascade inflammatoire étant déjà trop avancée(14). La dose
suggérée, dans certaines études, est de 0,15 mg/kg
à toutes les six heures pendant deux à quatre jours.
En dépit de plusieurs variations dans les études
réalisées auprès des enfants, elles ont montré qu’en
général ceux qui avaient une infection à H. influenzae et
qui avaient reçu de la dexaméthasone présentaient un
plus faible taux de séquelles neurologiques incluant la
perte de l’ouïe.
Antibioprophylaxie
Lorsqu’un cas de méningite est diagnostiqué, en raison
de sa transmission par le biais de l’inhalation des sécré-
tions respiratoires de personnes infectées, il est impor-
tant de traiter ceux qui ont été en contact avec le
patient. Souvent la question de l’antibioprophylaxie
fera à nouveau surface lors de tels cas. The 2003 Red
Book Report of the committee on Infectious Diseases(15)
recommande de traiter les membres de la famille (spé-
cialement les jeunes enfants), les enfants du même
groupe à la garderie et les autres contacts (ceux qui ont
été exposés aux sécrétions) de ceux qui sont infectés
avec le N. meningitidis ou le H. influenzae de type B
seulement. Pour le H. influenzae, seuls les enfants de
moins de quatre ans non immunisés et ceux de 12 mois
et moins dont le calendrier de vaccination n’est pas
complété devront recevoir une antibioprophylaxie. La
prophylaxie sera indiquée si le contact est survenu à
l’intérieur de sept jours avant le début de la maladie(6).
Il ne sera pas nécessaire de protéger l’entourage si
d’autres agents pathogènes sont en cause.
La méningite bactérienne aiguë est une maladie à
déclaration obligatoire et la décision de traiter les con-
tacts d’un cas de méningite est en général prise par le
Département de santé publique régional, avec qui le
médecin traitant doit communiquer rapidement par
téléphone en cas de forte présomption.
La rifampicine est le premier choix de l’antibiopro-
phylaxie. Une dose de 20 mg/kg par jour répartie aux
12 heures pour une durée de 48 heures (quatre doses)
(maximum de 600 mg/dose) est recommandée chez les
enfants de plus de un mois et lorsqu’il s’agit du
méningocoque. Pour les enfants âgés de moins de un
mois, une dose de rifampicine à 10 mg/kg par jour
répartie aux 12 heures pour une durée de 48 heures
(quatre doses) est recommandée. Comme solution de
rechange, il est recommandé de donner de la
ciprofloxacine (500 mg oralement en une dose) aux plus
de 18 ans ou de la ceftriaxone 250 mg intramusculaire
en une dose aux plus de 12 ans et 125 mg aux moins de
12 ans(16).
S’il s’agit du H. influenzae, la dose recommandée de
rifampicine chez les enfants âgés de moins d’un mois est
de 20 mg/kg par jour divisée aux 12 heures pour 4 jours
tandis que pour les enfants âgés de plus d’un mois, elle
sera de 40 mg/kg par jour répartie aux 12 heures pour
une durée de 48 heures (quatre doses). Il serait en outre
souhaitable de faire vacciner, pour une dose, les enfants
âgés entre 12 et 48 mois, et pour trois doses ceux de 2 à
11 mois si la vaccination n’est pas complétée pour le
H. influenzae(7).
Immunisation
Vaccin contre H. influenzæ
Le vaccin contre H. influenzae de type b (Act-HIB) a été
remarquablement efficace pour réduire l’incidence du
H. influenzae dans la méningite et il est inclus dans le
calendrier régulier d’immunisation du Québec. Il se
présente en fiole unidose d’une poudre lyophilisée et est
La méningite bactérienne chez l’enfant
Québec Pharmacie vol. 52, no1, janvier 2005 37
Tableau 3 - Caractéristiques du liquide céphalo-rachidien lors de la méningite(9,30)
Liquide trouble souvent opalescent
Pression lors de la ponction 180 mm H2O
Compte des globules blancs augmenté = 1 à 5 x 109/L
% de neutrophiles 80 %
Ratio glucose du LCR / glucose sanguin < 0,4
Protéines augmentées = 1 à 5 g/L
Coloration à Gram positif chez 60 % à 90 % des patients
Culture bactérienne positive dans 70 % à 85 % des patients
(antibiogramme obtenu après 24 - 48 heures)
Cas clinique (suite)
L’analyse du liquide céphalo-rachidien montre un taux élevé de globules
blancs (1,5 x 10 9/L), une présence de neutrophiles à plus de 95 %, du
glucose à 2,5 mmol/L et des protéines à 3 g/L. Après trois jours, la
culture bactérienne est redevenue positive pour un
S. pneumoniæ
et
on a cessé l’administration d’ampicilline.
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