Le traitement de la douleur du patient brûlé

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LA BRÛLURE GRAVE EN URGENCE
prisE En charGE
Le traitement de la douleur
du patient brûlé
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
L
a douleur par brûlure est nociceptive, c’està-dire qu’elle est générée par un excès de
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La recherche d’une analgésie optimale est une priorité absolue chez la victime
d’une brûlure compte tenu des conséquences sur les plans physique et psychique
de la douleur. Charge au soignant de bien l’évaluer pour mieux soulager les patients.
stimulation des nocicepteurs, qui sont les
récepteurs de la douleur. Elle a une fonction d’alarme
car il y a une lésion physique. La douleur est due à
la brûlure elle-même, majorée par les mouvements,
et concerne la zone affectée mais aussi celles avoisinantes. Pour rappel, l’Association internationale
pour l’étude de la douleur (IASP) définit la douleur
comme «une expérience sensorielle et émotionnelle
désagréable associée à une lésion tissulaire réelle ou
l’inhalation
de mélange
équimolaire
oxygène protoxyde
d’azote (meopa)
permet de lutter
contre la douleur.
potentielle ou décrite dans ces termes ».
intensité selon les degrés
S’agissant de brûlures, les atteintes superficielles
génèrent des douleurs aigües. À l’inverse, dans le cas
des brûlures du 3e degré, la zone lésée est insensible
soignant de tenter de cerner celle-ci et son ressenti.
en raison de la destruction des récepteurs. « La dou-
Quelle que soit la façon dont la douleur s’exprime,
leur diffère selon l’étendue et le type de degré de la
le patient doit voir sa plainte écoutée, en gardant à
brûlure », confirme Martine Damade, cadre de santé
l’esprit qu’il n’y a pas de relation entre l’importance
au service de chirurgie plastique et de la main du
de la lésion et la douleur exprimée.
CHU de Rouen. De plus, les lésions qui affectent certaines parties du corps très innervées (visage, périnée,
la douleur psychologique
siège, mains, plantes des pieds, etc.) sont particuliè-
L’altération du revêtement cutané a de nombreux
rement douloureuses. «Les brûlures du 2e degré sont
retentissements chez le patient : image de soi, social,
extrêmement douloureuses. Il importe de tenir
familial, schéma corporel chez l’enfant... La brûlure
compte du caractère subjectif de la douleur, car celle-
relève en outre de la pathologie d’urgence. « C’est
ci dépend de la mémoire du patient en la matière.
quelque chose d’imprévu qui donne un coup d’arrêt
Son vécu joue beaucoup. La prise en charge rapide
dans le déroulement de la vie de la victime. Cette
est essentielle afin d’éviter cet effet de mémoire dou-
dimension est également à prendre en compte »,
loureuse. En effet, plus la prise en charge de la douleur
estime Martine Damade. Les soignants seront parti-
intervient tardivement après la brûlure, plus le cerveau
culièrement vigilants concernant la douleur générée
en gardera trace, au point que son souvenir peut se
par les soins. «Ce sont des temps longs qu’il convient
révéler insupportable pour la victime. »
d’anticiper, en termes d’organisation et d’antalgie,
La douleur est un élément subjectif et individuel, et
insiste Marie-Pierre Bernasque, infirmière au service
peut être parfois difficile à verbaliser. Il revient au
de chirurgie plastique du CHU de Rouen. Les soins,
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* décembre 2016 * L’INFIRMIÈRE MAGAZINE
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Ion
ForMaT
u notamment la réalisation de pansements, ne doivent
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pas être effectués à la va-vite. Les brûlures longues
Une brûlure
grave est
un évènement
majeur dans
la vie d’un
enfant
soulager la douleur
La lutte contre la douleur comprend l’administration
à guérir et importantes en particulier sont à traiter
d’antalgiques de pallier 1 à 3. L’utilisation de mélange
au cas par cas, selon l’évaluation réalisée sur le
équimolaire oxygène protoxyde d’azote (Meopa) est
moment. Cela va dans le sens du confort du patient,
contre-indiquée lors de défaillance vitale. Lors de
mais aussi du soignant. »
brûlures graves, étendues et à un degré élevé, la séda-
À la mise en place d’un traitement analgésique s’ad-
tion est mise en œuvre. Pour les brûlures moindres,
ditionnent l’accompagnement, les explications et la
la priorité est à l’analgésie.
réassurance mis en œuvre par le soignant. « C’est un
L’installation du patient intervient également dans
temps précieux pour la mise en confiance du patient
la lutte contre la douleur. « Il convient de surélever
et son acceptation des soins. L’angoisse, majorée par
un membre brûlé, afin qu’il ne soit pas pendant,
ceux-ci, peut accentuer la sensation douloureuse »,
indique Martine Damade. L’installation est pensée
poursuit Marie-Pierre Bernasque.
pour réduire les œdèmes, donc diminuer la douleur.
Les matelas antiescarres sont également utiles pour
évaluer la douleur
soulager les patients brûlés aux membres inférieurs.»
Le choix d’une méthode d’évaluation de la douleur
L’alimentation, lors du processus de guérison, joue
adaptée au patient revient au soignant. L’évaluation
également un rôle important. Hyperprotéïnée et
de la douleur relève du rôle propre de l’IDE. Si le
hyperprotidique, elle favorise le processus de cica-
patient est conscient, il est possible de recourir à
trisation, corrélée à la douleur.
l’échelle visuelle analogique ou à l’échelle numérique.
Lorsqu’il est difficile pour le patient de donner un
chez l’enfant
chiffre correspondant à sa douleur, l’échelle verbale
Le traitement antalgique peut avantageusement être
simple, moins abstraite pour celui-ci, est privilégiée.
complété par des moyens tels que la distraction (lire
Lorsque le patient n’est pas en mesure de commu-
un livre ou raconter une histoire), la relaxation (mimer
niquer, le soignant évalue la douleur via l’observation
la respiration pour faire des bulles de savons en souf-
du comportement et des paramètres physiologiques.
flant dans une paille), voire l’hypnose. La présence
d’un ou des parents atténue aussi la détresse de
éTuDIanTs en IFsI
Les ue en lien avec le dossier
l’enfant. Lorsque c’est possible, les soins douloureux
sont réalisés en leur présence. Il importe également
d’apporter à l’enfant une information adaptée à ses
capacités cognitives sur la cause de la douleur et
références d’ue et extrait de leur contenu :
> uE 2.1.s1 « Biologie fondamentale » (compétence 4) :
le cycle cellulaire, les différenciations cellulaires et la notion
de tissus, les types et structures de cellules, vie cellulaire
et le fonctionnement des cellules excitables ;
> uE 2.2.s1 « cycles de la vie et grandes fonctions »
(compétence 4) : aspects anatomiques et physiologiques
(respiratoire, digestive, cardiaque, élimination) ;
> uE 2.3.s2 « santé, maladie, handicap, accidents de la vie »
(compétence 1) ;
> uE 2.4.s1 « Processus traumatiques » (compétence 4) ;
> uE 3.1.s1 « raisonnement et démarche clinique infirmière »
(compétence 1) : jugement et démarche clinique infirmière (signes
et symptômes, risques, diagnostics infirmiers, suivi et évaluation...)
et uE 3.1.s2 : recueil de données cliniques, examen clinique,
lecture des signes, transmissions ;
> uE 4.3.s2 « soins d’urgence » (compétence 4) : identifier l’urgence
à caractère médical, pratiquer les gestes de secours en attendant
l’arrivée d’une équipe médicale et uE 4.3.s4 : la hiérarchie des
actions dans l’urgence, la démarche de soins, la surveillance
de la conscience et de la vigilance, bilans neurologiques, le rôle
des samu, smur, cUMP, les protocoles de soins d’urgence, etc.
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celle induite par les soins.
À noter qu’une brûlure grave est un événement
majeur dans la vie d’un enfant. Une prise en charge
de la douleur inadaptée en phase initiale peut générer
des séquelles psychologiques chez celui-ci.
conséquences d’une douleur
non prise en charge
Sur le plan somatique, elles sont de plusieurs ordres.
Le stress métabolique et l’hypermétabolisme sont
accrus par la douleur. De plus, celle-ci ne favorise
pas, voire freine, la mobilisation. Les syndromes
confusionnels, l’agressivité, le délire, les troubles
comportementaux peuvent découler d’une mauvaise
gestion de la douleur en phase aiguë. Cette dernière
pourrait également induire un syndrome de stress
post-traumatique, voire dépressif
*
sophIe koMaroFF
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