FEUILLET ECONOMIQUE Problématique de l'encadrement des prix et du contrôle économique I. Introduction En cette période où le pays connait une contraction des activités économiques du fait de la chute des cours des matières premières et des produits pétroliers sur le plan mondial ainsi que de la volatilité du taux de change en interne, la question de la détermination du niveau des prix intérieurs se pose avec acuité. De plus en plus les opérateurs économiques dénoncent et se plaignent, à la suite des missions intempestives de contrôle économique et des redressements souvent fantaisistes mis à leur charge par l'Administration de l'économie, et ce au motif de violation des lois et règlements en matière de formation des prix en RDC. Ces redressements aboutissent à la réclamation des pénalités et amendes transactionnelles au titre de trop perçu et des pratiques illicites des prix. En effet, pour le pouvoir public, les opérateurs économiques seraient à la base du niveau jugé élevé des prix pratiqués en RDC. Les hommes d'affaires quant à eux déplorent le poids excessif de la fiscalité (proportion des droits et taxes parmi les éléments constitutifs) sur le prix à pratiquer. Par ailleurs, d'aucuns estiment que l'encadrement des prix par le pouvoir public est un impératif pour la régulation et la surveillance du marché ainsi que la protection du pouvoir d'achat des consommateurs. D'autres, par contre, pensent que l'intervention de l'Etat, à un certain niveau, décourage et ne stimule pas les investissements privés d'une part et étouffe les initiatives d'entreprendre d'autre part. L'analyse du cadre légal de formation des prix et la procédure de l'intervention de l'Etat en matière de contrôle économique a fait l'objet de plusieurs échanges ces derniers jours entre le Secrétaire Général à l'économie et les membres de la FEC, notamment la matinée organisée le 5 août 2016. II. Cadre légal de formation des prix et du contrôle économique en RDC En ce qui concerne la formation des prix, il y a lieu de noter qu'en République Démocratique du Congo, la fixation des prix d'un bien ou d'un service est régie par le Décret-loi du 20 mars 1961 sur le prix et ses mesures d'applications, notamment, l’arrêté ministériel 065/CAB/MIN/ÉCONAT/MBL/DKL/dag/201 5 du 26 novembre 2015 en vigueur. Le ministère de l'économie, dans le cadre de la vulgarisation de la réglementation en la matière, a publié tous les textes y relatifs au journal officiel numéro 24 du 15 décembre 2015. Pour l'essentiel, l'arsenal juridique susmentionné consacre en matière de formation des prix le principe de liberté des opérateurs économiques à fixer leurs prix des biens importés, des biens produits localement et des services, à l'exception de quatre produits dits stratégiques, à savoir; l'eau, l'électricité, le transport et les produits pétroliers, dont les prix sont administrés c'est-à-dire fixés par arrêté du ministre ayant l'économie dans ses attributions. Ce principe de liberté de fixation des prix par les opérateurs est encadré par la définition préalable par voie des textes légaux et réglementaires des rubriques admises comme éléments constitutifs des prix, le seuil à ne pas dépasser de certaines dépenses et la détermination du taux de la marge bénéficiaire maximum autorisée. Ainsi, s'agissant du contrôle économique, qui est la conséquence logique du principe de liberté de fixation des prix, Il est exercé par l'administration centrale et les provinces et tire son fondement légal du même décret-loi du 20 mars 1961 sur le prix ; tel que modifié et complété par l’ordonnance-loi 83-026 du 12 septembre 1983, et réglementé par l’arrêté ministériel 031/CAB/MIN-ÉCO&com./2013 du 02 octobre 2013 en vigueur. Des obligations des entreprises en matière de fixation des prix En matière des prix les entreprises sont obligées: d'élaboration des structures des prix conformément aux textes de transmettre des statistiques et des états financiers de se conformer aux rubriques des dépenses admises de respecter le seuil des charges autorisées de respecter le seuil des marges bénéficiaires autorisées de transmettre les statistiques Des obligations des entreprises en matière de contrôle économique En matière de contrôle économique les entreprises sont obligées : d'accepter une mission de contrôle par année diligentée par l'Administration Centrale ou les provinces selon le cas et de payer les pénalités et amendes transactionnelles avérées. De l'objet, de la fréquence et de la période du contrôle économique Le contrôle se fait une fois l’an, après le dépôt des états financiers, c'est-à-dire à partir du mois de mai de l'année. Le mois de décembre est sans activité. C’est un contrôle à postériori, qui devrait se faire sur les documents commerciaux, à la structure et à la marge bénéficiaire transmise avant le contrôle aux inspecteurs. En cas de violation, les amendes transactionnelles sont appréciées par les inspecteurs sur terrain, en tenant compte d’une fourchette leur indiquée ; III. Modèles types des structures des prix 1.2 Cas des produits fabriqués localement et des prestations des services 2.1 Cas des produits importés Tableau 1. Structure de prix de revient et de vente d’un produit importe N* 01 LIBELLE Valeur FOB 02 03 04 05 Fret et Assurance Valeur CIF Droit de douane à l’impôt Fonds de Promotion Industrielle Ogefrem Taxe denrées alimentaires 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 Redevance, rémunératoire informatique Rétribution DGDA Retenu ANAPI Frais SCTP Redevance Logistique terrestre SCTP ANAPI OCC Honoraire transitaire Transport MATADI-KINSHASA Frais manutention local à Kinshasa Frais bancaire Frais d’amortissements Prix de revient Marge bénéficiaire Prix de vente hors taxe TVA 16% Prix de vente TTC Tableau 2. Structure de prix de revient et de vente d’un produit industriel COTATION Factures fournisseurs Idem Total 1+2 Position Tarifaire 1,84% (CIF+D.E.) N* 01 LIBELLE Prix d’achat des Matières premières COTATION Coût d’achat 02 Frais de fabrication (y compris frais de déchets, coulage, stockage, freintes et pertes à la transformation non couverts par une assurance) Salaires et charges sociales effectives Total des frais (Quotte part) Frais d’assurance et charges financières éventuelles Coût de sources d’énergie Q.P. frais 03 0,475% CIF 04 (Poids Net en Kg) x 7,55 05 1% CIF 06 4% de 5% FPI 1194 $ (40’) ; 796 $ (20’) ou 34,16 $/T 225 $ (20’) 450 $ (40’) 96% de 5% FPI 2% Contrat Voir Arrêté 5 $/ T 1,3% CIF 0,1 % CIF Total 3 à 19 09 Loyer, taxes et charges des bâtiments professionnels Frais d’entretien des installations et du matériel Impôts et taxes afférents à l’activité de production Frais d’emballages non récupérables 10 Frais d’administration et de gestion 11 12 13 PRIX DE REVIENT INDUSTRIEL M.B. (Bénéfice industriel) Frais d’amortissements économiques 14 Frais de publicité 15 Frais de transport liés à la distribution et facturés par les tiers PRIX DE VENTE EX-USINE Diverses taxes TVA P.V.T. (TTC) 07 08 16 17 18 19 Q.P. frais Q.P. de la consommation effective Q.P. Q.P. frais Q.P. frais Q.P. frais Q.P. frais indirects TOTAL 1 à 10 20% de 11 Q.P. des frais réels Plafonnés à 5% P.R. Q.P. des frais saisis TOTAL 11 à 15 % de 16 16% de 16 TOTAL 16 à 18 IV. Préoccupations des entreprises face à la législation sur les prix et de l'exercice du contrôle économique Il est certes établi que l'élaboration des structures des prix est imposée par les textes légaux et réglementaires. Cependant, la réalité économique ou d'exploitation des activités ne correspondent pas souvent à certaines rubriques fixées dans ces textes. Tel est le cas des dépenses de la publicité qui sont limitées à 5% du prix de revient. La formation des prix du secteur des services n'est pas aisée, particulièrement, l’hôtellerie dont le tarif doit également tenir compte du taux d’occupation. La vente des biens importés par les grandes surfaces qui sont autorisées à vendre en détail est une préoccupation qui mérite une attention de l'Administration. Dans le même ordre d'idées, la liberté des prix dont question dans les textes n’est pas considérée comme totale dans la mesure où les marges bénéficiaires sont limitées au maximum à 20% pour la production des biens ou des services et à 25% pour l'artisanat. Les taux des marges pour le commerce d'importation sont variables suivant la nature des produits et se situent autour de 10 à 12% en général. En ce qui concerne l'exercice du contrôle économique, il est perçu dans le chef des opérateurs économiques comme de contrôles « tracassiers ». En effet, dans un espace de temps réduits, les opérateurs font état de plusieurs contrôles économique et d’autres services publics à savoir : Contrôle des différents ministères en tant que policiers des secteurs spécifiques, notamment environnement, transport, industrie, PT-NTIC, Plan, Mines ; Contrôles exercés par les régies financières (nationales et provinciales) dans le cadre de contrôle fiscale de premier et de second degré ; Contrôle exercé par l’Inspection Générale des Finances dans le cadre de contre-vérification degré ; de second Contrôle exercé par d’autres services étatiques ayant une certaines prérogatives en matière de vérification, tels que la Police nationale, le Parquet général, le Service de renseignement intérieur et extérieur, Inspection du travail, etc. Il apparaît de ce fait que dans un trimestre une entreprise peut se retrouver face en moyenne entre 8 à 12 services de contrôle. Par ailleurs, pour ce qui est de contrôle des régies, il a été relevé un "conflit de compétence" qui oppose les provinces et l'Administration Centrale. Dans le cadre de la décentralisation, le pays a opéré le découpage territorial qui a porté le nombre des provinces de 11 à 26 et ce conflit s'est vu être exacerbé avec comme conséquence la multiplication des missions de contrôle auprès des entreprises. V. Propositions de solution Face à ces préoccupations des entreprises, l’Administration centrale de la FEC, comme force de proposition a formulé quelques recommandations à savoir : - La publication d’un calendrier de contrôle économique harmonisé avec les différents services étatiques, entre autres les régies financières et les entités territoriales décentralisés et, - L’actualisation régulière des éléments chiffrés déterminés par les textes légaux et réglementaires en concertation avec les exploitants de différents secteurs.