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contre Rome qui amènent de nombreuses familles à émigrer vers des provinces
plus calmes ou qui lancent sur le marché des milliers d’esclaves juifs vite
rachetés par leurs coreligionnaires aux quatre coins de l’Empire
17
.
L’historien Juster a dressé une liste des localités où est attestée la
présence juive aux environs de l’ère chrétienne
18
. De l’Italie à la Germanie, de
la Gaule à l’Asie Mineure, de l’Arabie à l’Afrique du Nord, des centaines de
cités accueillent la diaspora.
Les historiens
19
ont tenté de chiffrer ce phénomène et arrivent à des
conclusions très semblables. Au début de notre ère, la Palestine compterait 3
millions de Juifs et la diaspora 4 millions
20
; ce qui représente environ 10%
21
de
la population de l’Empire romain évaluée à 70 millions d’habitants. On
comprend alors la force du judaïsme et son attraction sur les foules. En effet, le
prosélytisme juif remporte beaucoup de succès, surtout dans les couches
humbles de la société. Ce phénomène s’explique sans doute par la crise
spirituelle des religions antiques mais également par la séduction du
monothéisme, de la morale, des rites et de la vie communautaire de la religion
juive
22
.
Les Juifs sont autorisés à suivre leur religion et sont même
exemptés des cérémonies concernant la religion officielle (se prosterner devant
la statue de l’Empereur, par exemple). Par contre, ils doivent payer un impôt
spécial appelé Fiscus Judaïcus
23
.
Si l’on examine leurs activités, on constate qu’ils exercent tous les métiers
et ne se distinguent pas des autres catégories de la population. Jamais, ils ne sont
caractérisés comme marchands ou banquiers, mais on les retrouve plutôt dans
toutes les activités artisanales (tissage, teinture, verrerie...), dans l’agriculture et
dans la fonction publique. Comme ils se sont assimilés aux populations locales,
rien ne les singularise au sein de l’Empire romain, sinon leur culte
24
.
Ce culte, qui fait le particularisme des Juifs de la diaspora, a attiré, on l’a
vu, beaucoup de monde. Mais en même temps, de nombreux écrivains éprouvent
de la répulsion devant cette religion monothéiste. Martial, Juvénal, Perse et
d’autres encore tournent en ridicule le prosélytisme juif, ironisent sur la pratique
de la circoncision ou colportent de nombreuses fables (les Juifs propagent la
lèpre) qui resurgiront au Moyen Age.
17
EISENBERG, J., op. cit., p.124.
18
JUSTER, J., Les Juifs dans l’Empire romain, Paris, 1914, t. 1, pp. 180-209.
19
EISENBERG, J., op. cit., pp. 122-123 ; AZIZA, C., op. cit., p. 36 ; POLIAKOV, L., op. cit., p. 21.
20
A ce chiffre, il faut rajouter la communauté de la Babylonie, qui ne fait pas partie de l’Empire romain, évaluée
à 1 million de Juifs.
21
POLIAKOV, L., op. cit., p.21, l’estime à 8% de la population de l’Empire romain.
22
EISENBERG, J., op. cit., pp. 128-133.
23
FINKELSTEIN, L., The Jews: their history, culture and religion, Westport, Greenwood Press, 1979, t.1, p.
216.
24
ROTH, C., op. cit., pp. 166-167.