MÉDECINE VÉTÉRINAIRE Quel est l’impact virus de Schmallenberg? du Un nouveau virus a été identifié par des chercheurs allemands en 2011 : le virus de Schmallenberg (du nom de la ville où il a été découvert). En Europe, plus de 2000 élevages, principalement ovins, mais bovins et caprins également, sont actuellement touchés par cette maladie dont les conséquences sont lourdes. Le Département de médecine vétérinaire des FUNDP tente de mieux comprendre le virus et d’en évaluer l’impact, grâce à une approche pluridisciplinaire. Le virus de Schmallenberg est un arbovirus. Cela signifie qu’il est véhiculé par les arthropodes hématophages (suceurs de sang), tels les moustiques ou les moucherons piqueurs, probablement en cause dans ce cas-ci. « Les animaux adultes infectés présentent différents symptômes, dont, notamment, une dégradation de l’état général, une forte fièvre, de la diarrhée et une perte d’appétit » a expliqué Benoît Muylkens, chercheur à l’Unité de Recherche Vétérinaire Intégrée (URVI, membre de NARILIS), lors de la séance d’informations aux éleveurs, organisée à Namur en février dernier. « Même si les signes cliniques disparaissent après une semaine, le virus a eu le temps de s’amplifier dans le sang, pendant trois à cinq jours ». Conséquences ? « Si une femelle est infectée alors qu’elle est gestante, elle transmet directement le virus à son fœtus. Si l’infection se passe au moment de la mise en place du tissu nerveux et du système locomoteur, elle entraîne des malformations sévères de ces deux systèmes. Dès lors, certains agneaux arrivent mort-nés, d’autres sont non viables » explique le chercheur. Dans d’autres cas, les malformations rendent les accouchements très difficiles, voire impossibles. « Parmi les 140 agneaux nés en janvier au Centre du mouton de l’Université, 23 ont été atteints par le virus » Parmi les 140 agneaux nés en janvier au Centre du mouton de l’Université, 23 ont été atteints par le virus. Ces derniers sont, soit morts avant ou à la naissance, soit nés avec une malformation telle qu’ils ont dû être euthanasiés. Cela montre combien le virus est dommageable, surtout quand on sait que dans certains des 80 élevages belges touchés, 60 % des fœtus ont été atteints… Le Centre du mouton au service de la recherche, de l’enseignement et des éleveurs Comme en 2006-2007 suite à l’émergence de la maladie de la langue bleue (Fièvre catarrhale ovine), les activités du Centre du mouton s’inscrivent dans un contexte de recherche, d’enseignement et service à la communauté. Ce troupeau sentinelle permet d’apporter des réponses précieuses quant à l’émergence et la propagation du nouveau virus et il joue pleinement son rôle pour l’enseignement des étudiants en médecine vétérinaire puisqu’ils viennent nombreux pour assister aux agnelages et au suivi des agneaux nouveau-nés. Certains étudiants peuvent même participer aux travaux de recherche dans le cadre de leur travail personnel de fin de 1er cycle. L’équipe du Centre du Mouton se tient également prête pour répondre aux nombreuses questions des éleveurs de mouton qui sont désemparés face à cette nouvelle maladie. Lors de la séance d’information à laquelle 300 personnes, principalement des éleveurs, ont participé, les scientifiques namurois ont donc expliqué comment réagir à ce virus, au regard des éléments qu’ils ont observés. « La période de contamination du bétail coïncide avec les périodes d’activité des insectes vecteurs de la maladie. En raison des durées de gestation différentes des espèces cibles (5 mois pour la brebis, 9 mois pour la vache), on peut redouter que des nouveaux cas apparaissent à une fréquence plus élevée dans les élevages bovins dans les mois à venir. Une surveillance accrue des vêlages est conseillée en raison des difficultés de mise-bas qui ont pu être observées » a expliqué le professeur Nathalie Kirschvink, directeur du Département de médecine vétérinaire namurois et partenaire du projet. Recherche pluridisciplinaire L’URVI étudie ce virus à partir d’une approche pluridisciplinaire : leurs recherches font appel à la physiologie, à l’anatomie, à la virologie et à l’embryologie. Elles sont menées également en collaboration avec différents laboratoires de référence, belges et étrangers. « Nous espérons ainsi présenter, d’ici quelques mois, un profil type de progression de la maladie. Les données récoltées seront précieuses pour la mise au point et la validation de nouveaux tests diagnostiques plus sensibles que la méthode disponible aujourd’hui » annonce Nathalie Kirschvink. « C’est dans cette optique également que nous proposons aux éleveurs un questionnaire destiné à mieux évaluer la présence de la maladie de Schmallenberg et des pertes qu’elle cause dans les élevages en Belgique (255 sont touchés actuellement). Les données récoltées permettront de dresser une image de la sévérité de l’atteinte clinique et de l’évolution épidémiologique et virologique associée. Elles seront comparées à celles de nos collègues vétérinaires, entomologistes et virologistes européens ». En juin, un symposium rassemblera, au Royaume-Uni, les scientifiques qui étudient les différentes questions soulevées par cette émergence virale. À cette occasion, les possibilités de développement d’un vaccin pourront être évaluées. E.D. Libre Cours n° 84 – avril 2012