pathologie de la faune - Faculté de médecine vétérinaire | Université

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PATHOLOGIE DE LA FAUNE
PTM 4240
et de l'Environnement
PTM-4240
Daniel Martineau, DMV, M.Sc. Ph.D. Dipl., ACVP
Professeur, Département de pathologie
Faculté de Médecine Vétérinaire, Université de Montréal
[email protected]

Janvier 2003
Département de Microbiologie et Pathologie
Faculté de Médecine Vétérinaire
Université de Montréal
Pathologie de la faune 2003
Daniel Martineau
PATHOLOGIE DE LA FAUNE
Janvier 2003
Horaire
8 janvier
15 janvier
22 janvier
29 janvier
5 février
12 février
19 février
2115 ou
26 février
2115 10:00
2115 10:00
2115 10 :00
2115 10 :00
2115 10 :00
2115 10 :00
Préparation du travail : Professeur disponible pour questions au
au 3909 (bureau) ou téléphone : 8307
2115 10 :00 Présentation du travail
Évaluation
Un travail sert à l’évaluation. Une période de deux heures est prévue.
FORMAT DE LA PRÉSENTATION
Date et local à préciser:
Présentation du travail. Le travail est présenté oralement avec moyens audio-visuels.
L’usage de Power Point est encouragé (15 minutes de présentation, 5 minutes de
questions).
Diapos :
Dans un coin de la diapo, mettre les références étayant toutes les affirmations: premier
nom de famille du premier auteur avec ses initiales et « et al. » si plus d’un auteur et la
date (on peut alors retrouver la référence aisément sur medline ou autre moteur de
recherche).
Conseils : éviter les phrases complètes sur les diapos. Les auditeurs lisent les diapos et
ne vous écoutent pas. Chercher plutôt à mettre les mots-clefs et surtout des images et
des schémas (éviter les scan, leur qualité est rarement satisfaisante).
CONTENU DU TAVAIL ÉCRIT
Plan du travail
1. Identification claire d'un problème.
2. Synthèse personnelle de la littérature (pas une copie de la littérature) composée de
2.1. ce qui a été fait
2.2. pourquoi ç'a été fait (hypothèse et objectifs du/des chercheurs)
2.3. une critique des études qui ont été faites. Est-ce que les résultats et/ou
observations appuient vraiment les conclusions des auteurs ? Par exemple, y at-il d'autres explications possibles que celles fournies par les auteurs pour
expliquer leurs résultats ? Les opinions de l’étudiant doivent être fondées sur des
faits et appuyées de références solides.
ii
Pathologie de la faune 2003
Daniel Martineau
2.4. ce qui reste à faire (identifier la recherche qui reste à faire), les solutions
possibles.
Note: L'étudiant est fortement encouragé à contacter personnellement et questionner
des personnes ressources.
3. Références: au complet (auteur, année, titre de l'article, de la revue (ou du livre),
volume, pages) et/ou les noms, adresses et nos de téléphone, et date des entrevues
avec les personnes rencontrées pour le travail. Les références doivent apparaître
dans le texte (numérotées ou nom de l'auteur). Le nombre de publications
gouvernementales doit être gardé au minimum (ces publications ne sont
généralement pas soumises à la revue par les pairs), à moins que le sujet par sa
nature soit restreint à ce type de publications) comme par exemple un excellent sujet
comme « L’environnement sur les bases militaires canadiennes » (à discuter avec le
professeur).
4. Adresses de site Web acceptées MAIS il faut :
! qu'il s'agisse du site Web d'un organisme reconnu scientifiquement ou dans le
domaine de l'éducation.
! que les adresses de site Web ne constituent pas plus que le cinquième des
références. Autrement dit, 80 % des références doivent être des articles publiés
dans des revues scientifiques et/ou des entrevues avec des experts.
CHOIX DU SUJET
Le choix du sujet est libre en autant qu’il a rapport avec le contenu du cours. Il doit être
approuvé au préalable par le professeur (Daniel Martineau téléphone 8307, fax: 7788113, bureau 3909, [email protected]). L'étudiant(e) est encouragé à
choisir un sujet qui l'intéresse, et/ou qui pourrait lui servir dans ses aspirations
professionnelles présentes ou futures.
S’il vous plaît, aucun plagiat, incluant de collage de sites Web ou autre document
incluant travaux antérieurs faits par l’étudiant(e).
FORMAT
Page couverture avec titre, nom
10 pages de texte, un interligne et demi (les 10 pages excluent excluant le plan,
les photographies et figures. En d'autres mots, les 10 pages sont constituées de texte).
Les photographies doivent apporter de l’information, illustrer un résultat ou la
problématique, i.e. elles ne doivent pas être décoratives.
(Pas plus que deux étudiants peuvent faire équipe pour faire le travail. Dans ce
cas, 20 pages sont requises et le temps de présentation est 30 minutes avec 10 minutes
de questions. Le professeur s'attend à ce que les étudiants contribuent également au
travail).
EXEMPLES
a) Un magnifique travail de Martin Lavoie (DMV 1996) sur le Parc du MontTremblant. Le travail traitait de l'historique, aménagement, gestion et
biodiversité du Parc du Mont-Tremblant incluant une discussion sur la location
d'une vaste portion du Parc à la compagnie IntraWest (Ski Mont-Tremblant)
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Pathologie de la faune 2003
b)
c)
d)
e)
f)
g)
h)
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Daniel Martineau
par le gouvernement du Québec. Il avait rencontré les gestionnaires du Parc
et les responsables de la compagnie Intrawest. (Le Dr Lavoie a fondé Biofilia,
une compagnie de consultants en aménagement avec des biologistes dans
les Laurentides. Il est financé par des subventions et des contrats avec les
municipalités).
Zoonoses importante au Québec. Ex.: Baylisascaris chez le raton-laveur.
Situation au Québec. Tuberculose chez les cervidés sauvages. Situation aux
É-U, au Canada, au Québec. L'encéphalopathie spongiforme des cervidés.
Situation au Canada, au Québec.
Bélugas du Saint-Laurent. Plan de survie. (Voir site de la FMV, dans Services,
dans Faune)
Impact de l'industrie du "whale watching" dans le monde. Deux ou trois
exemples.
Comment le gouvernement du Québec s'occupe de préserver la biodiversité
au Québec.
Gestion des réserves et parcs québécois et/ou canadiens. Comment les
gestionnaires suivent (ou ne suivent pas) les concepts généraux dont on
parlera pendant le cours.
Etat de santé des poissons sauvages comme indicateur de pollution.
Impacts potentiels de l'aquaculture sur la faune aquatique, sur
l'environnement. Situation au Québec. Comparaison avec la situation ailleurs.
Impact du développement du Parc du Mont-Tremblant et de la compagnie de
développement qui exploite le Mont Tremblant sur le Parc provincial.
Noter que s'il s'agit d'un dossier pertinent, et après consultation avec le
professeur, le travail pourrait être envoyé pour publication dans une revue
scientifique telle que la Revue Vétérinaire Canadienne, un journal (La Presse, La
Gazette, Globe and Mail, National Post) (la traduction n'est pas un problème), ou
encore placé sur le site Web de la FMV.
iv
Pathologie de la faune 2003
Daniel Martineau
TABLES DES MATIÈRES
1. RÔLES DES VÉTÉRINAIRES DANS LA FAUNE...................................................................................8
1.1 GÉNÉRALITÉS .......................................................................................................................................8
1.2 DIAGNOSTIC DE MALADIES .....................................................................................................................8
1.3 ÉPIDÉMIOLOGIE ....................................................................................................................................8
1.4 METTRE AU POINT DES MÉTHODES POUR PRÉVENIR, CONTRÔLER OU ÉLIMINER DES MALADIES IMPORTANTES
CHEZ LA FAUNE ...........................................................................................................................................8
1.5 AMÉLIORER LES TECHNIQUES DE CAPTURE, LA MÉDECINE ET L'ANESTHÉSIE .............................................9
1.6 RÉHABILITATION DE LA FAUNE ...............................................................................................................9
1.7 PRÉSERVER LES ESPÈCES MENACÉES ...................................................................................................9
1.8 TOXICOLOGIE ET TOXICOLOGIE ENVIRONNEMENTALE ............................................................................10
2. BIODIVERSITÉ1,30 ..................................................................................................................................10
2.1 INTRODUCTION ...................................................................................................................................10
2.2 PRINCIPES DE BASE ............................................................................................................................10
2.2.1 Variété.......................................................................................................................................10
2.2.2 Abondance relative : Nombre d'individus appartenant à chaque type. .....................................10
2.2.3 Des nombres.............................................................................................................................10
2.3 ORIGINE DE LA BIODIVERSITÉ ..............................................................................................................12
2.3.1 La première cellule....................................................................................................................12
2.3.2 Origine de la vie ........................................................................................................................12
Conditions primitives, l'anaérobie ................................................................................................................. 12
2.3.3 La libération d'oxygène dans l'atmosphère ...............................................................................13
2.3.4 L'avantage d'utiliser de l'oxygène .............................................................................................13
2.3.5 Évolution des unicellulaires en multicellulaires .........................................................................14
2.4 ÉVOLUTION, SÉLECTION NATURELLE, GÉNÉTIQUE, ENVIRONNEMENT ET BIODIVERSITÉ ............................15
2.4.1 Paléontologie ............................................................................................................................15
2.4.2 Génome humain et vie sur terre................................................................................................15
2.4.3 Évolution et sélection ................................................................................................................16
2.4.4 Génétique et environnement.....................................................................................................17
2.5 IMPORTANCE DE LA BIODIVERSITÉ ........................................................................................................18
2.6 POURQUOI LA BIODIVERSITÉ S'AMENUISE-T-ELLE ? ...............................................................................19
2.6.1 Perte d'habitat ...........................................................................................................................19
2.6.2 Introduction d'espèces exotiques, transgéniques ou d'élevage ................................................21
2.6.3 Destruction des espèces indigènes ..........................................................................................22
Commerce d'animaux exotiques .................................................................................................................. 22
Poissons .................................................................................................................................................. 22
Oiseaux ................................................................................................................................................... 23
Reptiles ................................................................................................................................................... 23
Politique et Préservation ....................................................................................................................24
2.7 PRÉSERVATION DE LA BIODIVERSITÉ ....................................................................................................24
2.7.1 Canada......................................................................................................................................24
2.7.2 Traité de Rio..............................................................................................................................29
2.7.3 Globe.........................................................................................................................................29
3. NOTIONS D'ÉCOLOGIE ........................................................................................................................29
3.1 ÉCOLOGIE ..........................................................................................................................................29
3.2 ÉCOLOGIE DES ÉCOSYSTÈMES ............................................................................................................30
3.3 ÉCOLOGIE DE POPULATIONS ................................................................................................................30
3.4 ÉCOSYSTÈME .....................................................................................................................................30
3.4.1 Stabilité .....................................................................................................................................31
3.4.2 Résilience .................................................................................................................................31
3.4.3 Productivité ...............................................................................................................................34
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Pathologie de la faune 2003
Daniel Martineau
3.4.4 Producteurs...............................................................................................................................34
3.4.5 Consommateurs........................................................................................................................34
3.4.6 Production nette ........................................................................................................................34
3.4.7 Chaîne alimentaire ....................................................................................................................34
3.4.8 Niveau trophique .......................................................................................................................35
3.4.9 Interdépendance entre écosystèmes ........................................................................................35
3.5 IMPLICATIONS DIRECTES DES PRINCIPES D'ÉCOLOGIE............................................................................36
3.6 RÉGULATION DES POPULATIONS ..........................................................................................................36
3.6.1 Modèle "bottom-up"...................................................................................................................36
3.6.2 Modèle "top-down" ....................................................................................................................37
4. ALTÉRATION DE L'ENVIRONNEMENT PAR L'HOMME ....................................................................38
4.1 SURFACE TERRESTRE .........................................................................................................................38
4.2 OCÉANS .............................................................................................................................................38
4.3 AZOTE ...............................................................................................................................................39
4.4 CARBONE ...........................................................................................................................................40
Surproduction de carbone..................................................................................................................40
Effet de serre................................................................................................................................................ 41
Réchauffement global et vie marine ........................................................................................................ 41
Niveau des mers et réchauffement global ............................................................................................... 41
Réchauffement global et Canada ............................................................................................................ 42
Stopper le réchauffement global.............................................................................................................. 42
4.5 EAU ...................................................................................................................................................43
Grands Lacs ................................................................................................................................................. 44
4.6 POLLUTION .........................................................................................................................................45
4.6.1 Composés à base de chlore .....................................................................................................46
Bélugas et composés organochlorés ........................................................................................................... 46
Effets oestrogéniques des produits à base de chlore................................................................................... 47
Autres effets des composés à base de chlore.............................................................................................. 48
4.6.2 Effets immunodépresseurs des polluants .................................................................................48
4.6.3 Effets cancérigènes des polluants ............................................................................................49
Mutations...................................................................................................................................................... 49
Hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) ........................................................................................ 49
•
Composés mutagènes, Belugas, cancer et HAPs.......................................................................... 49
Bélugas du Saint-Laurent ................................................................................................................... 50
Examens post-mortem ................................................................................................................... 51
Cancer ........................................................................................................................................... 51
Les tumeurs de poissons, indicatrices de la contamination des sédiments par les HAP ......................... 52
Autres mécanismes de carcinogenèse......................................................................................................... 53
4.6.4 Pluies acides .............................................................................................................................53
4.6.5 Trou dans la couche d’ozone ....................................................................................................54
4.6.6 Métaux lourds............................................................................................................................54
Mercure ........................................................................................................................................................ 54
4.6.7 Déversements d'huile................................................................................................................55
Déversements "opérationnels" ..................................................................................................................... 55
Déversements majeurs accidentels.............................................................................................................. 55
Prévention .................................................................................................................................................... 56
Inspection ................................................................................................................................................ 56
Effets des déversements d'huile................................................................................................................... 56
Nettoyage ..................................................................................................................................................... 56
Un cas typique de déversement: l'Exxon Valdez, Prince William Sound, Alaska ......................................... 56
Impact sur les animaux............................................................................................................................ 56
Loutres:............................................................................................................................................... 56
Phoques8 ............................................................................................................................................ 58
Orques épaulards ............................................................................................................................... 58
Oiseaux............................................................................................................................................... 58
Poissons ............................................................................................................................................. 58
Moules ................................................................................................................................................ 58
Humains.............................................................................................................................................. 59
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Pathologie de la faune 2003
Daniel Martineau
Conclusions générales à tirer de l'Exxon ................................................................................................. 59
5. PROTECTION DES ESPÈCES MENACÉES AUTREMENT QUE PAR LA PROTECTION D'HABITAT
....................................................................................................................................................................59
5.1 TECHNIQUES DE REPRODUCTION ASSISTÉE ..........................................................................................60
5.1.1 Insémination artificielle..............................................................................................................60
5.1.2 Fertilisation in vitro ....................................................................................................................60
5.1.3 Clonage.....................................................................................................................................60
5.1.4 Méthodes anticonceptionnelles.................................................................................................61
5.2 CONTRÔLE DES PESTES PAR DES VIRUS ...............................................................................................61
5.2.1 Lapin et renard australiens........................................................................................................61
5.2.3 Maladie hémorragique virale : calicivirus. .................................................................................61
5.3 POLYMERASE CHAIN REACTION (PCR).................................................................................................62
5.3.1 Baleines ....................................................................................................................................62
5.3.2 Études génétiques des animaux sauvages ..............................................................................62
6. MALADIES DE LA FAUNE....................................................................................................................63
6.1 POURQUOI DIAGNOSTIQUER LES MALADIES DE LA FAUNE?.....................................................................63
6.2 MICROPARASITES ...............................................................................................................................64
6.2.1 Transmission.............................................................................................................................64
6.2.2 Virulence ...................................................................................................................................64
6.3 MACROPARASITES ..............................................................................................................................64
6.3.1 Transmission.............................................................................................................................64
6.3.2 Virulence ...................................................................................................................................64
6.3.3 Sévérité de l'infection ................................................................................................................64
6.4 ÉPIDÉMIOLOGIE ..................................................................................................................................65
6.4.1 Prévalence ................................................................................................................................65
6.4.2 Incidence...................................................................................................................................65
6.4.3 Taux reproducteur (Ro).............................................................................................................65
6.5 IMPACT DES MALADIES SUR LA FAUNE ..................................................................................................66
6.5.1 Le passé....................................................................................................................................66
6.5.2 Le présent .................................................................................................................................67
6.5.3 Impact de la maladie et biologie de l'hôte .................................................................................67
6.5.4 Impact sur la reproduction.........................................................................................................68
6.5.5 Récupération des carcasses.....................................................................................................68
6.6 MALADIES ÉMERGENTES .....................................................................................................................68
6.6.1 Définition ...................................................................................................................................68
6.6.2 Causes ......................................................................................................................................69
1. Changements environnementaux............................................................................................................. 69
Oscillations naturelles dans le climat ....................................................................................................... 69
Réchauffement global.............................................................................................................................. 69
Bioterrorisme ........................................................................................................................................... 70
Changements environnementaux spécifiques ......................................................................................... 70
Irrigation.............................................................................................................................................. 70
Plastique, pneus ................................................................................................................................. 70
Transfusions sanguines ...................................................................................................................... 70
Production animale industrielle................................................................................................................ 70
Maladie de la vache folle .................................................................................................................... 70
Xénotransplantations ............................................................................................................................... 71
2. Agents infectieux ...................................................................................................................................... 71
Apparition de nouveaux agents infectieux ............................................................................................... 71
Génétique ........................................................................................................................................... 71
Interaction entre les agents infectieux et changements environnementaux............................................. 72
"Débordement" d'agents pathogènes d'animaux domestiques dans la faune..................................... 72
"Débordement" d'agents pathogènes de la faune chez l'humain ........................................................ 72
Arbovirus........................................................................................................................................ 72
Arénavirus...................................................................................................................................... 72
3. Hôtes........................................................................................................................................................ 72
vii
Pathologie de la faune 2003
Daniel Martineau
6.6.3 Problèmes causés par les maladies émergentes .....................................................................73
6.6.4 Problèmes pratiques posés en recherche sur les maladies émergentes chez les animaux
domestiques.......................................................................................................................................73
6.6.5 Maladies émergentes spécifiques.............................................................................................73
Prion. La maladie de la vache folle (Mad cow disease) et autres encéphalopathies spongiformes.............. 73
Lésions. ................................................................................................................................................... 76
Signes cliniques....................................................................................................................................... 76
Espèces susceptibles. ............................................................................................................................. 76
Méthodes de diagnostic........................................................................................................................... 76
Traitement. .............................................................................................................................................. 76
Prévention, contrôle................................................................................................................................. 77
Historique de la maladie de la vache folle ............................................................................................... 77
Virus ............................................................................................................................................................. 77
Hantavirus ............................................................................................................................................... 77
"Morbillivirus" équin ................................................................................................................................. 80
« Distemper » des lions ........................................................................................................................... 81
« Distemper » des mammifères marins. Morbillivirus des mammifères marins ....................................... 81
Phoques.............................................................................................................................................. 81
Cétacés .............................................................................................................................................. 82
Influenza chez le phoque......................................................................................................................... 83
Maladie vésiculaire des otaries de Californie: {123} ................................................................................ 86
Autres virus récents de mammifères marins............................................................................................ 86
Contamination, virus, et phoque .............................................................................................................. 86
Maladie hémorragique du chevreuil due à un adénovirus. ...................................................................... 87
Fièvre hémorragique du virus Ebola ........................................................................................................ 87
Virus du syndrome de l'immunodéficience acquise (VIH) ........................................................................ 87
West Nile Virus (virus du Nil Occidental) ................................................................................................. 88
Bactéries ...................................................................................................................................................... 90
Maladie de Lyme (Borreliose).................................................................................................................. 90
Amphibiens et maladies émergentes ........................................................................................................... 95
Chytridiomycose ...................................................................................................................................... 95
Iridovirus .................................................................................................................................................. 95
6.7 GÉNÉTIQUE, ENVIRONNEMENT, MALADIES ET CONSERVATION ...............................................................96
6.7.1 Molécules du complexe majeur d'histocompatibilité .................................................................96
6.7.2 Guépard 3, 16, 37, 38, 48...................................................................................................................96
6.7.3 Pumas (panthères) (couguars) de Floride. (Felis concolor coryi). ............................................98
6.7.4 Loups de l’Isle Royale ...............................................................................................................99
6.7.5 Baleine à bosse ........................................................................................................................99
6.8 AGENTS INFECTIEUX ...........................................................................................................................99
6.8.1 VIRUS .......................................................................................................................................99
Rage............................................................................................................................................................. 99
Bluetongue ................................................................................................................................................. 104
Maladie hémorragique épizootique du cerf (Hemorrhagic disease)............................................................ 105
Distemper................................................................................................................................................... 106
Encéphalite équine de l'Ouest ............................................................................................................... 106
Encéphalite équine de l'Est ................................................................................................................... 107
Encéphalite de Saint Louis .................................................................................................................... 107
Virus de Powassan ................................................................................................................................ 107
Snowshoe Hare Virus ............................................................................................................................ 107
Jamestown Canyon virus....................................................................................................................... 107
Colorado Tick fever virus ....................................................................................................................... 107
Parvovirus .................................................................................................................................................. 108
Pseudorage ................................................................................................................................................ 108
Fièvre catarrhale maligne ........................................................................................................................... 108
Agents ................................................................................................................................................... 108
Forme Africaine ..................................................................................................................................... 108
Forme des moutons............................................................................................................................... 109
Herpèsvirus bovin 1 (IBR) .......................................................................................................................... 109
BVD-MD ..................................................................................................................................................... 110
Parainfluenza-3 .......................................................................................................................................... 110
Maladie hémorragique du lapin .................................................................................................................. 110
viii
Pathologie de la faune 2003
Daniel Martineau
Lésions prolifératives à Pox........................................................................................................................ 110
Ecthyma contagieux. ............................................................................................................................. 110
Fibromatose du lapin ............................................................................................................................. 110
Fibromatose de l'écureuil....................................................................................................................... 111
Tumeurs induites par les papovavirus........................................................................................................ 111
Fibromes et fibropapillomes des ongulés. ............................................................................................. 111
Papillomatose orale des carnivores ....................................................................................................... 111
Lentivirus.................................................................................................................................................... 111
6.8.2 BACTÉRIES............................................................................................................................111
Anthrax (Maladie à déclaration obligatoire) ................................................................................................ 111
Helicobacter ............................................................................................................................................... 113
Maladie de Lyme (Borreliose)..................................................................................................................... 113
Brucellose .................................................................................................................................................. 113
Tuberculose ............................................................................................................................................... 115
Paratuberculose ......................................................................................................................................... 119
Leptospirose............................................................................................................................................... 119
Septicémies des rongeurs et des lagomorphes.......................................................................................... 121
Tularémie .............................................................................................................................................. 121
Maladie de Tyzzer ................................................................................................................................. 123
Pseudotuberculose................................................................................................................................ 123
Peste ..................................................................................................................................................... 124
Nécrobacillose ....................................................................................................................................... 124
Kérato-conjonctivite à Chlamydia .......................................................................................................... 124
Complexe de la pneumonie chez le mouflon ......................................................................................... 125
Pasteurella multocida ............................................................................................................................ 125
6.8.3 PROTOZOAIRES ...................................................................................................................125
Toxoplasmose ............................................................................................................................................ 125
Giardiase.................................................................................................................................................... 125
Cryptosposridium. ...................................................................................................................................... 126
Sarcocystis sp: ........................................................................................................................................... 126
Anaplasmose.............................................................................................................................................. 126
6.8.4 FONGI.....................................................................................................................................126
Trichophyton verrucosum ........................................................................................................................... 126
Adiaspiromycose ........................................................................................................................................ 127
6.8.5 PARASITES............................................................................................................................127
Rappels ...................................................................................................................................................... 127
Trématodes. .......................................................................................................................................... 127
Définitions.............................................................................................................................................. 127
Herbivores .................................................................................................................................................. 128
Généralités ............................................................................................................................................ 128
Fascioloides magna .......................................................................................................................... 128
Gale sarcoptique, Cuterebra, Psoroptes, Oestres ............................................................................ 128
Orignal................................................................................................................................................... 129
Parelaphostrongylus tenuis............................................................................................................... 129
Parelaphostrongylus andersoni......................................................................................................... 130
Elaphostrongylus rangiferi ................................................................................................................ 130
Fascioloides magna .......................................................................................................................... 131
Taenia krabbei (Cysticercus tarandi). ............................................................................................... 131
Taenia hydatigena (Cysticercus tenuicollis) ...................................................................................... 131
Echinococcus granulosus (kyste hydatique) ..................................................................................... 131
Wehrdikmansia cervipedis ................................................................................................................ 131
Dictyocaulus viviparus ...................................................................................................................... 131
Dermacentor albipictus ..................................................................................................................... 131
Caribou.................................................................................................................................................. 132
Cerf de Virginie...................................................................................................................................... 132
Wapiti .................................................................................................................................................... 132
Lièvre d'Amérique.................................................................................................................................. 132
Omnivores.................................................................................................................................................. 132
Moufette, raton-laveur ........................................................................................................................... 132
Baylisascaris procyonis..................................................................................................................... 132
Crenosoma sp .................................................................................................................................. 133
Capillaria plica .................................................................................................................................. 133
ix
Pathologie de la faune 2003
Daniel Martineau
Ours noir................................................................................................................................................ 133
Trichinella spiralis ............................................................................................................................. 133
Dirofilaria ursi.................................................................................................................................... 133
Diphyllobothrium ursi ........................................................................................................................ 134
Carnivores .................................................................................................................................................. 134
Loups, coyotes,renards ......................................................................................................................... 134
Dirofilaria immitis (ver du cœur)........................................................................................................ 134
Ankylostomiase................................................................................................................................. 134
Crenosoma vulpis ............................................................................................................................. 134
Capillaria aerophila ........................................................................................................................... 134
Mites ................................................................................................................................................. 134
Sarcoptes scabiei......................................................................................................................... 134
6.8.6 Conditions variées ..................................................................................................................135
Malnutrition................................................................................................................................................. 135
Attrition dentaire ......................................................................................................................................... 135
Surcharge gastrique (acidose) ................................................................................................................... 136
Polioencéphalomalacie des ruminants ....................................................................................................... 136
Complexe abcès intracrânial-méningoencéphalite suppurée chez le chevreuil.......................................... 136
Ostéoarthropathie dégénérative ................................................................................................................. 136
Myopathie de capture................................................................................................................................. 136
Traumas ..................................................................................................................................................... 137
Chevreuils.............................................................................................................................................. 137
Loups et coyotes ................................................................................................................................... 137
7. ANNEXES ............................................................................................................................................139
8. ZOONOSES .........................................................................................................................................139
9. MALADIES À CONNAÎTRE .................................................................................................................139
10. TAXONOMIE ......................................................................................................................................140
11. RÉFÉRENCES ...................................................................................................................................140
GÉNÉRALES ...........................................................................................................................................140
SPÉCIFIQUES..........................................................................................................................................140
12. ADRESSES UTILES ..........................................................................................................................141
ORGANISMES IMPLIQUÉS DANS LA PROTECTION DE LA NATURE ..................................................................143
x
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
1. Rôles des vétérinaires dans la faune
1.1 Généralités
•
•
•
Contrairement à la clientèle vue en médecine vétérinaire traditionnelle, les animaux de la faune ne sont
pas apportés par un propriétaire. En fait, ils n'ont pas de "propriétaire". Dans la plupart des pays, c'est le
Gouvernement, mandaté par le payeur de taxes, qui fait office de propriétaire. Est-ce que le
Gouvernement remplit ce mandat avec succès? Vous jugerez par vous-mêmes au fil de ces pages.
Les vétérinaires œuvrant dans la faune sont peu nombreux même dans un pays riche, grand et
densément peuplé comme les États-Unis.
Les vétérinaires en faune doivent penser en terme de population, d'habitat et d'écosystème, contrairement
à leurs collègues en pratique qui en général traitent les animaux (de compagnie) individuellement.
1.2 Diagnostic de maladies
Plusieurs, sinon la plupart, des animaux sauvages sont soumis à l'examen vétérinaire une fois morts: Par le
fait même, le vétérinaire œuvrant en faune est souvent spécialisé en pathologie (Drs André Dallaire, Daniel
Martineau, FMV).
D'autres spécialités vétérinaires sont également importantes ou le deviennent:
- l'épidémiologie (Dre. Denise Bélanger, FMV)
- la parasitologie (Dr. Alain Villeneuve, FMV)
- la reproduction, pour les espèces rares gardées en zoo, pour les programmes de réhabilitation de
populations d'animaux sauvages, à cause des effets hormonaux de plusieurs polluants, en particulier les
organochlorés. Ex. : Dre Daphné Pontbriand (maintenant à l'Ordre des médecins Vétérinaires du Québec),
- la toxicologie (pour la faune) (Dr Normand Larivière, FMV)
- l'immunotoxicologie (Dr. Sylvain DeGuise, U. du Connecticut)
- la biologie moléculaire (pour l'épidémiologie moléculaire du cancer: cancer du foie chez la corrégone. Dr. Igor
Mikaelian)
- Réhabilitation (Dr. Guy Fitzgerald, FMV)
- Virologie (Dr. Jean-Martin Lapointe, FMV)
- Environnement (Dr Martin Lavoie, Biofilia)
1.3 Épidémiologie
Étude des relations entre les maladies de la faune d'une part et les maladies des animaux domestiques et des
maladies humaines d'autre part.
Ex.: rage, maladie de Lyme, tuberculose, brucellose, Hantavirus.
1.4 Mettre au point des méthodes pour prévenir,
contrôler ou éliminer des maladies importantes
chez la faune
Exemples:
Empoisonnement au plomb. Les plombs de chasse et les poids employés dans les agrès de pêche sont
ingérés par les oiseaux aquatiques. Ce sont des causes fréquentes d'empoisonnement par le plomb chez les
oiseaux aquatiques. Aux États-Unis, l'empoisonnement au plomb cause une perte annuelle d'environ un million
d'oiseaux aquatiques. Problème important au Canada qui préoccupe grandement le Service Canadien de la
Faune http://www.cws-scf.ec.gc.ca/cwshom_f.html
Les oiseaux de proie, les aigles par exemple, s'empoisonnent aussi au plomb en ingérant des palmipèdes dont
les muscles contiennent des plombs de fusils.
8
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Mangeoires pour oiseaux: les concentrations d'oiseaux peuvent augmenter la transmission des maladies:
salmonellose, trichomonas. (Épidémie de salmonellose au Québec en avril 2000. Voir:
www.medvet.umontreal.ca/CQSAS/default.htm)
Tuberculose et Brucellose chez les bisons et les wapitis: ces animaux sont un des derniers foyers de
brucellose et de tuberculose au Canada, dans un Parc National en Alberta. Il y a beaucoup d'éleveurs de
bovins autour de ce Parc…. Si on veut vraiment éradiquer cette maladie, il faut abattre ces animaux.
Élevage de cervidés ou ruminants "sauvages" (cerfs de Virginie, wapitis): peuvent être infectés par
Mycobacterium bovis et nuire au programme d'élimination de la tuberculose bovine (Voir Tuberculose et
wapitis).
Au Québec, le wapiti est élevé à plusieurs endroits. La tuberculose (M. bovis) a frappé plusieurs élevages en
1994. Les troupeaux ont du être abattus.
Encéphalopathie spongiforme des cervidés: en décembre 2000, le gouvernement fédéral (canadien)
décidait d'abattre les 1,700 wapitis de six troupeaux de Saskatchewan après que 14 wapitis montrèrent des
lésions de la maladie.
Transport d'animaux sauvages:
- Des ratons-laveurs transportés des États américains du sud vers les États américains du moyen
Atlantique ont apporté la rage avec eux
- Renards et Coyotes (Echinococcus multilocularis) pour la chasse
- Porcs sauvages (brucellose, pseudorage)
Litière de poulets : La litière souillée dans les élevages de poulet de reproduction peut transmettre aux
oiseaux sauvages le protozoaire Histomonas meleagridis (Black head) par le ver Heterakis gallinarum. Les
poules et les faisans sont résistants à la maladie alors que les oiseaux sauvages ne le sont pas (les poulets de
gril ne sont pas infectés mais les poulets gardés pour la reproduction le sont souvent).
1.5 Améliorer les techniques de capture, la médecine
et l'anesthésie
Ex.: Dr. Guy Fitzgerald
1.6 Réhabilitation de la faune
Voir Drs. G. Fitzgerald, S. Lair, Yves Dubord, M. Lavoie.
La plupart des animaux sauvages apportés par le public au vétérinaire en pratique sont blessés i.e ils ne
sont pas malades, et la plupart des blessures résultent de l'intervention humaine (véhicules, attaques par des
chiens, chats, pièges).
Aux États-Unis, en 1994, seulement six vétérinaires travaillaient à plein temps en réhabilitation. Pourtant des
centres de réhabilitation reçoivent 2,000 à 6,000 animaux par année. La plupart de ces centres engagent des
vétérinaires en pratique privée sur une base contractuelle.
Toute clinique vétérinaire privée devrait avoir une politique bien déterminée vis à vis des animaux de la faune
(acceptation ou refus). Si la clinique refuse les animaux de la faune qui lui sont présentés, le praticien devrait
pouvoir au moins fournir à la personne qui présente un animal sauvage blessé (ou malade) les adresses des
organismes impliqués en réhabilitation.
1.7 Préserver les espèces menacées
Le vétérinaire peut travailler en reproduction, en toxicologie (espèces menacées) ou encore au contrôle
d'espèces nuisant aux espèces menacées (lapins et renards roux en Australie menacent les marsupiaux
australiens).
9
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
1.8 Toxicologie et toxicologie environnementale
(voir JAVMA 203: 617-628).
Organochlorés et bélugas du Saint-Laurent
Rôle du praticien dans un cas de contamination environnementale:
En 1994, Pierre Olivier, vétérinaire aux Îles de la Madeleine signalait aux médias qu'on y trouvait des oiseaux marins englués de
pétrole. C'est lui qui a suggéré que le Irving Whale, un navire appartenant à la compagnie Irving, (la même compagnie qui avait
affrété l'Exxon Valdez, en Alaska) était responsable de cette huile. Quand Pierre Olivier a émis cette suggestion, la Garde Côtière
canadienne a d'abord déclaré que le pétrole ne provenait pas du Irving Whale mais plutôt d'un autre navire échoué à Anticosti.
Des analyses chimiques ont démontré en décembre 1994 que le pétrole s'écoulait bien de l'Irving Whale et ce, depuis 1970.Ce
bateau a coulé (et peut-être avait-il été coulé volontairement) en septembre 1970 dans des circonstances suspectes par 200
pieds de fond. Il contenait quelque 3,000 tonnes de pétrole (l'Exxon Valdez en contenait 40,000) et une quantité de biphényles
polychlorés (BPC) vaguement précisée par la compagnie. (Ce n'est qu'à l'été 1995 qu'on apprenait que le bateau contenait en
outre d'importantes quantités de BPC (mélange lourd et huileux de composés constitués de deux anneaux d'atomes de carbone
auxquels sont fixés un nombre variable d'atomes de chlore) et que la compagnie le savait depuis longtemps (sans en aviser le
gouvernement)). Le renflouement, effectué en 1996 sous la pression de l'opinion publique, a coûté la somme de 42 millions de
dollars au gouvernement fédéral. L'opéraion fut un succès, sauf que les BPC n'étaient plus dans l'épave. Ils se sont
probablement écoulés sur le fonds entretemps
Le gouvernement parle de poursuivre la famille Irving de Fredericton, qui possédait la barge (National Post, Jan. 21, 1999). Irving
refuse toujours de payer (en 1999).
En avril 1999, le gouvernement fédéral laissait savoir qu'il n'y avait plus de danger, sauf qu'une grande zone d'exclusion des
pêches devait être maintenue autour de l'épave.
2. Biodiversité
1,30
2.1 Introduction
Voir: Odum, E.P. Le déclin de la biodiversité. Méd. Vét. Québec. Juillet 1994:p. 29-30.
2.2 Principes de base
La biodiversité s'exprime en terme de variété et d'abondance relative.
2.2.1 Variété
Nombre de types (espèce, variété génétique..) par unité d'espace ou: nombre de types sur le nombre total
d'organismes.
2.2.2 Abondance relative : Nombre d'individus
appartenant à chaque type.
Ex.: Deux villes ont chacune 1,000 chiens. Dans une ville, il y a 10 races de 100 chiens. Dans l'autre ville,
il y a aussi 10 races mais 990 chiens sont des Collies alors que seulement 10 chiens sont de 9 races
différentes. Dans les deux villes, la variété des chiens est semblable (il y a bien 10 races) mais
l'abondance relative des chiens est bien moindre dans la deuxième ville (99% des chiens sont de la même
race et 1 % des chiens sont de races différentes). C'est pourquoi présentement l'abondance relative des
espèces vivantes habitant notre planète est beaucoup plus affectée que la variété.
2.2.3 Des nombres
1.5 millions et 10 millions...
Un million et demi d'espèces vivantes sont connues à l'heure actuelle sur la surface de la planète sur un total
(très approximatif) de 10 millions d'espèces. Donc, environ 15% des espèces vivantes sont connues (mais au
fait, comment estime-t-on le nombre des espèces inconnues...?).
On découvre encore de nouvelles espèces de grands mammifères. Ainsi, une nouvelle de chameau qui boit de
l'eau salée dans le nord-ouest de la Chine, dans le désert du Kum Tagh, fermé pendant 41 ans pour des
10
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
essais nucléaires (Février 2001). À l'arrêt des tests, en 1996, les chasseurs et les prospecteurs d'or arrivèrent
et commencèrent à abattre les chameaux pour se nourrir.
À part le chat domestique, toutes les espèces de félidés (trente sept), sont menacées d'une façon ou d'une
autre. Par exemple, on estimait en 1994 que les cinq espèces de tigres restant dans le monde comptent entre
5,000 et 7,000 individus au total.
Depuis la découverte de l'Amérique (1492), environ 500 sous-espèces (connues) de plantes et animaux,
incluant l'ours grizzly de Californie, ont disparu.
Le renard "swift". L'habitat de ce renard de la taille d'un chat s'étendait des prairies canadiennes au Texas. Il
est à peu près disparu du Canada dans les années 1900 à cause de la chasse, de la trappe et de la perte
d'habitat. Déclaré espèce "extirpée" par COSEWIC. Depuis 1983, 800 renards élevés en captivité ont été
libérés en Alberta et Saskatchewan. LA population canadienne est maintenant estimée à 289 animaux en
nature.
Le grizzly était abondant à travers la moitié ouest de l'Amérique. Aujourd'hui, il est confiné en CB, en certaines
parties de l'Alberta, les trois territoires et de l'Alaska.
Le furet à pieds noirs: habite les Prairies, c'est le seul furet indigène à l'Amérique du Nord. Il est éteint dans
l'Ouest du Canada et est considéré en vois de disparition aux États-Unis. Le zoo de Toronto a un programme
d'élevage en captivité (dans lequel le Dr S. Lair a été impliqué).
Au Québec, il y avait des millions de tourtes à l'arrivée des premiers colons. Ceux-ci ont rapidement tué tous
ces oiseaux (origine du mot "tourtière"). Il ne reste plus de l'espèce que quelques exemplaires empaillés au
musée d'histoire naturelle d'Ottawa (dans un grand tiroir…fermé).
Au cours des dernières 10 années (en 1999), 34 espèces de vertébrés ont disparu seulement aux États-Unis
alors que des lois de protection ne les protégeaient pas encore. Au rythme actuel, le cinquième des espèces
vivantes disparaîtront au cours des prochaines 30 années alors que l'espèce humaine doublera en nombre.
En 1999, c'était la première fois dans l'histoire de l'humanité, que des humains
(dont l'auteur de ces lignes) constataient que la population humaine avait
doublé au cours de leur vie (40 ans) .
Dans une brochure du Service canadien de la faune, on estime que "l'homme détruit une à trois espèces par
jour. Certains prédisent que d'ici la fin du siècle on aura atteint le rythme d'une espèce à l'heure" (1994).
Quelques espèces animales parmi "les plus rares au monde"
(janvier 2000)
-
11
Ibis à crête (22 oiseaux, Japon)
Kouprey (ruminant, quelques douzaines, Cambodge)
Panthère de Floride (30 à 50, sud de la péninsule)
Wombat nordique au nez poilu: (marsupial dont la poche est à l'arrière, 65, Queensland,
Australie)
Tortue Pinta des Galapagos: (un mâle, Galapagos (une récompense de $ 10,000 est
offerte pour la découverte d'une femelle !))
Alala (Corvus hawaiensis): 25 oiseaux (Hawaii) en captivité et en nature.
Comparé à ces espèces, la situation du panda géant paraît très bonne:
1,000 individus (en 2001)
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
2.3 Origine de la biodiversité
2.3.1 La première cellule
On croit, en l'an 2001, que l’univers a 15 milliards d’années. La terre s'est formée il y a 4.5 milliards d’années.
La première cellule est apparue il y a environ 3.8 milliards d'années. Puis pendant 2 milliards d'années, la
seule forme de vie sur terre était les bactéries. Il y a 1.8 milliards d'années, les premiers êtres vivants
unicellulaires à noyau, des algues, apparurent. Les premiers animaux pluricellulaires apparurent il y a
seulement 550 millions d'années. Les premières formes humaines datent de 6 millions d'années.
Autralopithecus, 4 millions d'années, Homo erectus 1.5 million. Neanderthal: seulement 200,000 années. Le
comportement distinctif d'Homo sapiens, manifesté par la fabrication d'objets utilitaires élaborés et l'expression
artistique a débuté il y a environ 70,000 ans.
Puis, l'évolution permit aux descendants de la première cellule de couvrir la Terre de végétation, et de changer
la composition de l'atmosphère. La création de cet environnement a conduit à l'apparition de la vie intelligente
(?!).
2.3.2 Origine de la vie
On ignore encore comment les premiers acides aminés - les "briques" qui constituent les protéines- sont
apparus. Certains pensent que les premiers ont été apportés sur la terre par des météorites (Bailey, Science).
On ignore aussi comment les acides aminés ont été raccordés les uns aux autres, en chaînes, pour faire des
protéines.
D'autres chercheurs (la plupart) pensent que l'ARN est apparu avant les protéines.
Hypothèse terrestre
En 1998, des chercheurs allemands ont créé des peptides à partir d'acides aminés, en recréant des conditions
existant dans les volcans des fonds marins. Pour cela, ils ont fait bouillir des acides aminés avec des gaz comme le sulfure
d'hydrogène, le méthane ethiol, (tous deux trouvés dans les volcans) et les ont mélangés avec du sulfure de fer, du sulfure de nickel et du
monoxyde de carbone (Huber Wachtershauser, 1998).
Hypothèse de l'espace
En 2001, des chercheurs de la NASA créaient des précurseurs de cellules vivantes en utilisant des composés
trouvés dans les "nuages" interstellaires (= entre les étoiles) - l'eau, l'ammoniaque, le méthanol et le monoxyde
de carbone, en les exposant à des rayons ultraviolets. Ils montraient ainsi que de des formes précurseures de
la vie telle que nous la connaissons sur terre peuvent éclore dans l'espace, dans la queue d'une comète, riche
en ces composés, et ce en l'absence d'une planète. (On a découvert plus de 50 planètes à l'extérieur de notre
système solaire au cours des dernières années)
Les missions sur Mars ont montré l'existence passée d'océans et de rivières. Des photographies du satellite
Galilée suggèrent l'existence d'un océan d'eau liquide sous la croûte glacée de Europa, la lune de Jupiter. Les
années qui viennent révéleront si la vie existe dans cet océan sombre, à 483 millions de milles du soleil. (Sur
terre, une forme de vie basée sur le soufre prospère autour des évents hydrothermiques, au plus creux de
l'océan Atlantique).
Pour les cellules primitives, tous les nutriments (sucres, acides aminés) étaient présents dans la "soupe"
primordiale. Il n'y avait pas d'oxygène, qui était toxique pour ces cellules, des bactéries très proches des
Clostridium actuels. Aucun appareil métabolique complexe n'était nécessaire pour produire l'énergie. Mais
l'environnement changea: les réserves de nutriments finirent par s'épuiser (un premier changement profond de
l'environnement), et des cellules (pas toutes) développèrent des enzymes afin de fabriquer les molécules
organiques qui n’étaient plus présentes dans l'environnement. Les organismes qui réussirent à développer ces
enzymes prospérèrent et les autres disparurent.
Conditions primitives, l'anaérobie
Alors que la quantité de nutriments organiques présents dans la soupe primordiale diminuait, le carbone (sous
12
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
forme de CO2) et l'azote (N2) étaient abondants. Cependant, le CO2 et N2 sont difficiles à utiliser car
relativement inertes. Ils sont inertes parce qu'ils sont oxydés (ils n'ont pas tendance à donner d'électrons). Une
façon de les rendre réactifs, afin qu'ils puissent participer à la synthèse de molécules organiques complexes,
est de leur donner des électrons. C'est ce qu'accomplit la photosynthèse; elle prend des électrons d'un
donneur faible d'électrons, l'eau, donne ces électrons à un bon donneur d'électrons afin que celui-ci donne
facilement ses électrons au CO2 et à N2 (ce qui cause la réduction de ces derniers). Le résultat final de ce
processus est la libération de l'oxygène de l'eau vers l'atmosphère (un autre changement profond de
l'environnement) (et que le carbone est retenu dans la plante).
En utilisant l'énergie solaire, la photosynthèse retire le CO2 de l'atmosphère pour en faire
des molécules organiques. En échange, la photosynthèse libère de l'oxygène dans
l'atmosphère.
2.3.3 La libération d'oxygène dans l'atmosphère
Les organismes qui développèrent les enzymes nécessaires pour utiliser le carbone et l'azote de l'atmosphère
furent donc favorisés par la sélection naturelle. Les premiers êtres vivants capables de photosynthèse furent
les cyanobactéries, des cellules sans noyau (les algues et les fongi, qui ont des noyaux (i.e. des eukaryotes),
apparurent plus tard).
C'est l'apparition de la photosynthèse chez des bactéries
1) qui rendit l'utilisation du carbone possible à partir du CO2
2) qui libéra l'oxygène dans l'atmosphère.
L'atmosphère de la planète en fut totalement changée.
La végétation diminue l'effet de serre
parce qu'elle retire le CO2 de l'air
L'apparition de la photosynthèse changea la composition de l'atmosphère primitive en libérant une
quantité énorme d'oxygène, un gaz qui était presque absent jusqu'alors. Les cyanobactéries
(anciennement appelées algues bleu-vert) eurent donc des effets sur l'environnement beaucoup plus
importants que l'activité humaine en eut (aura?) jamais.
Encore aujourd'hui, ce sont les bactéries qui fixent l'azote, c'est-à-dire qu'elles séparent l'azote N2 en deux
atomes N. Les atomes d'azote libérés se combinent alors avec un atome d'hydrogène pour former deux
molécules d'ammoniac (NH3). Ce processus requiert une énergie considérable étant donné l'inertie de N2. Des
bactéries, bien connues en médecine vétérinaire pour les maladies importantes qu'elles causent chez les animaux sont impliquées dans
ce processus, les Clostridies par exemple, bactéries pathogènes anaérobiques vivant dans le sol.
Les algues bleu-vertes (cyanobactéries) fixent aussi l'azote.
En 1977, on découvrait le premier évent hydrothermique entouré de nouvelles formes de vie sur le fonds du Pacifique. On sait maintenant
(on l'ignorait avant 1977), que la moitié de la biomasse sur terre est située sur le fonds des océans, autour de ces évents. En fait, la
chimiosynthèse pourrait avoir été la première source d'énergie pour la vie sur terre. Dans la chimiosynthèse et la photosynthèse, les
hydrates de carbones sont formés à partir de bioxyde de carbone et d'eau. C'est uniquement la source d'énergie qui diffère, les nutriments
chimiques comme le sulfure d'hydrogène pour la première, la lumière pour la deuxième. LA chimiosynthèse est encore utilisée de nos
jours par les organismes qui croissent à côté des évents hydrothermiques, dans le fonds du Pacifique. L'environnement soufré où
croissent ces plantes et animaux est très carcinogène. Les scentistes ont commencé à examiner ces organismes pour déterminer les
mécanismes par lesquels ils ne développent pas de cancer.
2.3.4 L'avantage d'utiliser de l'oxygène
L'oxygène fut libéré dans l'atmosphère par les cyanobactéries. Ce changement allait permettre à d'autres
formes de vie de voir le jour. L'oxygène est un composé extrêmement réactif, capable de réagir avec la plupart
13
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
des constituants cytoplasmiques. Il a donc été toxique pour les premiers organismes, comme il l’est encore
actuellement pour les bactéries anaérobiques. (Il est encore toxique, même pour les mammifères). Cependant
la réactivité de l'oxygène constitue aussi une bonne source d'énergie et ce potentiel a été utilisé tôt dans
l'évolution par les organismes vivants. En se servant d'oxygène comme accepteur d'électrons, les organismes
sont capables d'oxyder (d'utiliser) plus complètement les nutriments qu'ils ingèrent. Par exemple, en l'absence
d'oxygène, le glucose est dégradé en acide lactique ou en éthanol, les produits finaux de la glycolyse. Par
contre, en présence d'oxygène, le glucose est dégradé complètement en CO2 et en H20. De cette façon, une
bien plus grande quantité d'énergie est libérée pour chaque gramme de glucose qui est absorbé. Cette énergie
(l'oxydation aérobique des molécules -nourriture) est utilisée pour fabriquer l'ATP de la même façon que la
photosynthèse produit l'ATP à partir de la lumière solaire.
Noter que l'oxygène est encore toxique pour les formes de vie actuelles, même pour les mammifères. En effet,
son utilisation pour la production d'énergie produit des radicaux libres qui endommagent les protéines et les
acides nucléiques. Les radicaux libres jouent un rôle très important (sinon le plus important) dans le processus
de vieillissement. En fait, le vieillissement pourrait être la manifestation ultime de la toxicité de l'oxygène. Les
radicaux libres ont été aussi impliqués dans le cancer, et plusieurs formes de dégénérescence cellulaire, dont
la maladie de Lou Gehrig et la maladie d'Alzheimer.
2.3.5 Évolution des unicellulaires en multicellulaires
Les organismes composés d'une seule cellule, les unicellulaires, ont eu tant de succès évolutionnaire qu'ils
constituent maintenant la moitié de la biomasse sur la Terre. Contrairement aux organismes plus évolués,
plusieurs unicellulaires peuvent synthétiser toutes les substances dont ils ont besoin à partir de quelques
nutriments simples, et quelques unicellulaires peuvent se diviser très rapidement, une fois par heure.
Pourquoi alors avoir évolué en organismes multicellulaires? Parce que des êtres pluricellulaires peuvent
utiliser des ressources qu'aucune cellule ne pourrait exploiter individuellement. Par exemple, la pluricellularité
permet à l'arbre d'être gros. Cette grande taille nécessite que l'arbre ait des racines; un groupe de cellules
puise donc dans les ressources nutritives du sol alors qu'un autre groupe, les feuilles, capte l'énergie solaire.
etc. etc. L'apparition des arbres créa de toute pièce des environnements différents de ceux qui existaient déjà.
D'autres formes de vies, pluricellulaires et unicellulaires, apparurent, adaptées à la jungle, à la forêt pendant
que d'autres espèces disparurent, non adaptées et/ou incapables de s'adapter aux nouvelles conditions.
L'évolution s'est faite par soubresauts violents, non de façon graduelle Les bouleversements
écologiques, dont des réchauffements globaux, et les disparitions d'espèces ne sont donc pas des
phénomènes nouveaux!
- La boule de glace: Il y a 600 millions d'années, la terre devint une énorme boule de glace à cause
d'une baisse de luminosité du soleil et de bas niveaux de CO2 dans l'atmosphère. Des couches de
glace de plusieurs kilomètres d'épaisseur couvrirent les continents de l'époque, tous rassemblés
au Pôle Sud de l'époque. Les océans gelèrent jusqu'à une profondeur de un kilomètre. La terre
passa plusieurs millions d'années dans cet état.
- Le réchauffement: Les continents sous la couche de glace commencèrent à se déplacer et les
volcans ainsi créés injectèrent du CO2 dans l'atmosphère. La terre se réchauffa. Et il y eut une
explosion de formes de vies diverses dans les océans (appelée l'explosion du Cambrien) - Nature
25 mai 2000.
Il y a 65 millions d'années (et les 180 millions d'années précédentes), les dinosaures étaient les animaux les
plus nombreux à la surface du globe. Certains dinosaures étaient carnivores, d'autres omnivores ou
herbivores. Par contraste, nos ancêtres les mammifères, et les autres animaux de l'époque, étaient de petits
insectivores qui essayaient péniblement de survivre. Soudain, les dinosaures disparurent, probablement à
cause d'une météorite massive qui s'écrasa dans le Golfe du Mexique. La lutte écologique commença entre
les oiseaux, les reptiles et les mammifères. Les mammifères "gagnèrent", même s'ils sont encore minoritaires
en nombre.
Ce scénario d'extinction massive se serait répété avec des acteurs autres que les dinosaures et les
mammifères au moins six fois dans les derniers 460 millions d'années: il y aurait eu au moins six
extinctions massives d'espèces animales à la surface de la terre pendant ce laps de temps28.
Avant les dinosaures, des reptiles ayant une apparence de mammifères dominaient. Avant eux, c'était des
14
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
amphibiens, et encore auparavant, il y eut une succession d'animaux marins plus primitifs. Entre chaque
extinction massive au cours de laquelle une espèce perdait au moins 90% de ses représentants, il y aurait eu
une période de grande stabilité. L'évolution se serait donc faite par à coups et non selon un processus graduel.
Après chaque extinction massive, plusieurs niches écologiques seraient devenues vacantes. L'espèce capable
de se diversifier le plus rapidement occupe ces niches devenues vides (elle "gagne") pendant les quelques
millions d'années qui suivent.
2.4 Évolution, sélection naturelle, génétique,
environnement et biodiversité
2.4.1 Paléontologie
Formation de la terre: 4.5 milliards d'années
Apparition de la vie: 3.8 milliards d'années.
Apparition des premiers vertébrés
Apparition et disparition des dinosaures: 225 millions à 65 millions d'années.
Apparition des primates: 50 millions.
Séparation des deux lignées qui ont donné les chimpanzés
d'une part et les humains d'autre part.
Apparition des premières formes humaines (Homo erectus, pas Homo sapiens):
1-4 millions
Apparition de Homo sapiens
Apparition des premiers outils et manifestations artistiques
Passage des premiers hommes en Amérique: 20 à 30,000 ans.
(4.5 x 109 années)
(3.8 x 109 )
(500 x 106)
(65 x 106 )
(50 x 106 )
( 6 x 106))
(106)
(105)
(7 x 104)
(20 x 103)
(Rappel: un million est mille fois 1,000. Un milliard est mille fois un million.)
Il y a très peu de variation génétique à l'intérieur de l'espèce humaine comparé
aux autres espèces animales.
Il y a plus de différences génétiques entre deux chimpanzés d'une population de 55
chimpanzés d'Afrique de l'Ouest qu'il y en a entre deux humains de races différentes !
Ceci suggère fortement que l'espèce humaine actuelle provient d'un très petit nombre d'ancêtres. Il y aurait eu
un « bottleneck » c'est-à-dire une ou des diminutions subites de nos ancêtres au cours du dernier million
d'années (comme pour les guépards). On sait qu'une douzaine d'espèces "humaines" ont disparu au cours de
l'histoire. Elles ont disparu soit à cause d'un désastre environnemental (glaciation, maladie, par exemple), soit
à cause de la compétition (notre espèce (Homo sapiens) aurait exterminé les autres espèces à peu près
humaines) ou encore à cause d'une conjonction de plusieurs de ces causes. - D. Woodruff, PNAS 1998
2.4.2 Génome humain et vie sur terre
La connaissance du génome humain livre des conclusions stupéfiantes: par exemple, les humains ont hérité
au moins 223 gènes bactériens (ces gènes sont absents du génome des levures, de la mouche, du ver de
terre, suggérant ainsi que le transfert des bactéries à l'humain a été direct).
Le génome humain compte 3 milliards de bases, qui codent environ 40,000 gènes. La cellule la plus simple
connue, celle d'une bactérie, Mycoplasma genitalium, en compte 500. De ces 500 gènes, 300 sont essentiels à
la vie (de cet organisme). On ignore totalement la fonction de 80 de ces 300 gènes (-Hutchison, North
Carolina, 2001). On prévoit créer de toute pièce une cellule vivante autour de 2011.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
2.4.3 Évolution et sélection
Après un voyage de 4 ans autour du monde, dont un séjour aux Galápagos, sur un voilier appelé le "Beagle",
et après des années de réflexion, Darwin proposa que tout ce qui vit présentement sur la terre provient d'un
ancêtre commun et que toutes les différences existant entre les organismes vivants sont dues à des
changements accumulés lentement pendant une longue période de temps. C'était une idée révolutionnaire
étant donné que l'humain était alors perçu comme une oeuvre de Dieu, et qu’on pensait que la terre n’avait
que quelques dizaines de milliers d'années, tout au plus.
On sait maintenant que le requin, la carpe, la salamandre, le kangourou, la vache et l'humain dérivent du
même ancêtre qui exista voici 500 millions d'années.
Selon Darwin, tous les organismes n'ont pas les mêmes chances de survivre et de se reproduire. Ceux qui ont
les meilleures chances laissent le plus grand nombre de descendants, ce qui naturellement a pour
conséquence de répandre leurs caractéristiques à l'intérieur d'une population. Après plusieurs générations, un
tel processus entraîne la transformation physique de l'espèce au complet.
L'évolution est avant tout un processus d'adaptation
Espèces endémiques
- Les régions les plus biodiversifiées sont les régions chaudes, probablement parce que les conditions y ont
été constantes pendant longtemps, forçant les espèces à se spécialiser pour exploiter des ressources.
- Les régions géographiquement isolées ont naturellement beaucoup d'espèces endémiques (= qui ne sont
présentes que dans ces régions: (Ex.: Indonésie, Galápagos, Australie)).
Le processus de sélection naturelle est la force majeure qui a guidé l'évolution vers l'élaboration de l'espèce
humaine. Ce processus a duré des centaines de millions d'années. Il se poursuit toujours. Or, c'est
l'environnement et les changements dans l'environnement qui ont déterminé la sélection des espèces les
mieux adaptées aux nouvelles conditions imposées par les changements environnementaux. Au cours de ces
centaines de millions d'années, chaque espèce vivante, végétale ou animale, a dû s'adapter pour survivre. Des
milliers d'espèces ont disparu dans le cours des temps, incapables de s'adapter assez rapidement aux
conditions changeantes. Des milliers de nouvelles espèces sont apparues à cause de ces mêmes conditions.
Ce processus continuel de disparitions et d'émergences d'espèces nouvelles a conduit à la richesse et à la
variété des formes de vie existant actuellement sur notre planète et, non la moindre des choses, à l'élaboration
de notre propre espèce. Ce processus est toujours en cours.
En dernier ressort, c'est donc l'environnement qui a modelé lentement l'espèce humaine, comme un potier
façonne une poterie au fil des heures.
Gaïa
Une théorie moderne conçoit la planète Terre comme un être vivant, dont les composantes, l'atmosphère, la
terre et les êtres vivants, incluant les plantes et les animaux, sont les organes, au même titre que les poumons,
le foie, le cœur sont les organes des mammifères. Selon cette théorie, l'apparition de la vie primitive sur terre a
modifié l'environnement. Puis, sous l'influence de cette vie grandissante, l'environnement est devenu de plus
en plus favorable à la vie. En d'autres mots, l'apparition de la vie a favorisé son propre développement.
L'auteur de cette théorie, Lovelock, a baptisé cette créature "Gaïa". Bien que beaucoup de scientifiques
n'acceptent pas certaines parties du concept, presque personne ne le rejette en bloc.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
La vie modifie et a toujours modifié l'environnement.
Alors pourquoi s'inquiéter?
Pour Lovelock, l’important est de préserver l’intégrité des deux principaux « organes » assurant l’homéostasie
de Gaïa, soient les forêts et les océans.
Pourquoi s'inquiéter alors de la destruction de la couche d'ozone, des forêts tropicales qui brûlent, du
réchauffement global, tous des changements environnementaux qui découlent de l'activité humaine?
Parce que jamais l'activité d'une espèce vivante n'a modifié si profondément, à si grande échelle et si
rapidement l'environnement terrestre, sans lequel nous ne serions pas ce que nous sommes aujourd'hui (tant
pis ou tant mieux, c'est selon). Le taux actuel d'extinction global des espèces est 100 à 1,000 fois plus élevé
que les niveaux préhumains (Science 269: 347, 1995). L'activité humaine, par la technologie mais aussi par la
forte densité humaine sur la planète a détruit, et détruit chaque jour, de larges étendues d'habitats naturels.
Lors d'une visite à Montréal (oct 1999), Jane Goodall disait: "Au début des années 1960, les chimpanzés étaient présents partout en
Afrique centrale et en Afrique de l'Ouest. Ils vivent maintenant dans de petits îlots de verdure, entourés de pauvreté humaine".
En 1999, la population humaine atteignait officiellement 6 milliards d'individus (ONU). C'est la première
fois dans l'histoire de l'humanité que des individus de 40 ans voyaient la population humaine doubler
de leur vivant.
En 1999, la population humaine est deux fois plus nombreuse qu'en 1960, trois fois plus qu'en 1927, six fois plus qu'en 1804. La
population humaine pourrait atteindre 12 milliards en 2025 (Fonds des Nations Unies pour la population -1999). En moyenne la
population humaine s'accroît de 80 millions de personnes par année malgré la baisse de fécondité.
Certains interprètent ces chiffres comme un succès: ils avancent que la population a augmenté, non parce que les gens ont commencé à
se reproduire comme des lapins, mais plutôt parce qu'ils ont cessé de mourir comme des mouches. ( - Nicolas Eberstadt, démographe,
Oct 1999). C'est probablement vrai. Mais quelles sont les conséquences pour les autres espèces animales? Combien de temps les pays
en voie de développement peuvent-ils soutenir l'accroissement de leur population humaine ? Malgré le déclin de natalité, les États-Unis
ont le taux de natalité le plus élevé dans le monde occidental. Ils compteront 332.5 millions d'habitants en 2025 (Bureau de recensement
américain). La Chine compte actuellement (1999) 1.25 milliards d'habitants, les Indes viennent d'atteindre le milliard (sept 1999).
L'occupation / destruction d'habitat naturel mène à la diminution des niches écologiques disponibles pour les
formes de vie qui s'étaient adaptées à ces niches au cours de millions d'années d'évolution. Ces formes
de vie disparaissent...parce qu'elles n'ont pas le temps de s'adapter.
2.4.4 Génétique et environnement
Le phénotype d'un organisme vivant est simplement l'apparence de cet organisme, c'est la somme de ses
caractéristiques physiques, ce dont il a l'air. Le phénotype de chaque organisme est contrôlé par son
génotype, le génotype étant la somme des gènes de l'individu. Le phénotype de chaque individu est produit
par l'expression coordonnée de tous les gènes de cet individu (probablement autour de 40,000 gènes d'après
la séquence du génome humain) dans les limites des restrictions imposées par l'environnement. Chaque
caractère phénotypique d'un individu, animal ou plante, est donc le fruit de l'effet d'un ou de gènes.
Ces effets ne sont pas limités à l'échelle d'un individu. Ils s'étendent à l'échelle des écosystèmes et même de
toute la biosphère. Une population est un groupe d'organismes, et le phénotype de chaque population est
déterminé par tous les gènes présents dans tous les organismes de cette population.
En retour, un écosystème, qui inclut tous les organismes vivants (tous les membres de toutes les espèces)
présents dans un environnement particulier, et le phénotype de cet écosystème sont déterminés par l'action
collective de tous les individus, animaux ou plantes présents. Ce sont les écosystèmes de la Terre qui ont
produit ensemble la lithosphère, l'hydrosphère et l'atmosphère de notre planète.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Le phénotype de la biosphère, ce que nous voyons autour de nous,
le ciel bleu, les arbres verts, est le produit final de l'action de tous
les gènes individuels de tous les organismes, qui s'expriment à
l'intérieur des restrictions exercées par l'environnement.
Dans les villes, l'environnement est contrôlé « presque » entièrement par une espèce animale, Homo
sapiens. Les caractéristiques physiques de cet environnement sont entièrement le fruit de la créativité (ou du
manque de créativité) de l'espèce humaine. Il n’y a pas d'espace disponible pour les autres espèces. Sans
parler de l'altération ou l'élimination d'écosystèmes par des mécanismes autres que purement physiques
(produits toxiques).
Est-ce que l'expansion de notre espèce mènera à l'élimination des écosystèmes naturels ? ...
2.5 Importance de la biodiversité
Médicaments. Le nombre total de gènes présents dans les organismes biologiques sur la surface de la terre
diminue. Les gènes disparus avaient requis presque quatre milliards d'années pour arriver à leur état actuel. Ils
ont disparu à jamais. Peut-être existait-il parmi ces gènes des gènes semblables à ceux qui codent pour le
taxol, un médicament purifié à partir de l'écorce d'un arbre pour le traitement du cancer du sein? Peut-être
existait-il des gènes de végétaux capables de rendre les plantes résistantes à certains insectes, à certains
virus ? Certains de ces gènes auraient pu être introduits dans le blé et le rendre résistant à certaines pestes ?
Selon l'Organisation mondiale de la Santé, environ 80% des gens des pays en voie de développement se fient
aux médecines traditionnelles, aux plantes sauvages et aux produits animaux pour leurs soins de santé. Des
composés chimiques que l'on trouve dans les grenouilles, les crapauds, les mouches, les sangsues et les
requins pourraient contribuer au traitement de l'hypertension, des infections et du cancer. Un quart des
médicaments sous prescription, en Occident, sont tirés de composés dérivés de la flore et cinq des principales
drogues vendues dans le monde proviennent de fongus.
Les peptides isolés des glandes dermiques du crapaud à griffes d'Afrique sont testés par la compagnie Magainin Pharmaceuticals contre
les infections. Les requins possèdent un stéroïde, la squalamine, qui protège contre les infections. On trouve jusqu'à 20 toxines
différentes dans une seule espèce de scorpion. La salive de la sangsue contient des substances qui empêchent la coagulation. La
compagnie Ciba-Geigy a mis au point une version ingéniérée génétiquement d'une de ces substances, l'hirudine qui a été mise en
marché en 1996.
Août 1999. Les enfants asthmatiques sont souvent traités avec des aérosols de cortico pendant de longues périodes. Or, le traitement à
long terme aux corticostéroïdes cause l'ostéoporose et des ulcères cutanés et arrête la croissance des enfants. La compagnie Inflazyme
espère qu'un composé d’éponges qu'elle purifie remplacera les stéroïdes. Voilà dix ans, les universités d'Alberta et de la Colombie
Britannique ont commandité des plongées en Papouasie et en Nouvelle Guinée pour collecter des éponges et du corail, dans l'espoir de
découvrir de nouveaux composés. L'expédition a trouvé une éponge, Petrosia contigrata, qui contient un composé qui pourrait améliorer
le traitement de l'inflammation, particulièrement dans l'asthme, l'arthrite rhumatoïde, le psoriasis, les allergies et plusieurs maladies
inflammatoires de l'intestin.
Résistance aux maladies. La diversité génétique dans la production agricole végétale (et probablement
animale) augmente la résistance aux maladies en réduisant le risque de maladies épidémiques.
La perte actuelle de gènes "défait" le travail fait par l'évolution.
Ce travail est l'essence de la vie et donc de notre espèce.
Gaïa est-elle malade?
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
2.6 Pourquoi la biodiversité s'amenuise-t-elle ?
-
Perte d'habitat:
Introduction d'espèces exotiques, transgéniques ou d'élevage
Destruction d'espèces indigènes
2.6.1 Perte d'habitat
La perte d’habitat est de loin la cause la plus importante de la perte de biodiversité.
Une loi pour la protection des espèces en danger existe aux États-Unis (Endangered Species Act), au Canada
et même au Québeca. Cependant, la protection des écosystèmes dans lesquels vivent ces espèces n'est pas
incluse dans ces lois. De plus, les espèces tombent en général trop tard sous la protection de cette loi, quand
la destruction de leur écosystème est devenue tellement avancée que celui-ci ne pourrait pas soutenir une
population de taille appropriée. Alors, les chercheurs recommandent maintenant de protéger un écosystème
avant qu'il ne devienne menacé, quand les mesures qui devraient être prises sont encore réalistes
économiquement43.
Peut-être connaissez-vous des exemples au Québec.
HABITATS:
Forêt: le tiers des régions forestières de la Terre a disparu depuis l'éclosion de la civilisation agraire (Science 277: 522, 1997). Dix
millions d'hectares de nouvelle terre, pour la plupart des forêts, sont requis chaque année pour l'expansion de la population humaine. Or,
170,000 espèces de plantes ou les 2/3 de toutes les plantes de la terre sont dans les forêts tropicales. Dans une région bien connue
d'Iquitos au Pérou, presque 70 % du bois exploité vient d'un arbre décrit pour la première fois en 1976.
Océans: Indonésie: On pêche le poisson à la dynamite. Pour attraper les poissons tropicaux vivants, on se sert de cyanure. Un jet
étourdit les plus gros poissons qui finissent dans des aquariums à Hong Kong ou Singapour. Mais le poison tue les poissons plus petits et
le corail. Un biologiste australien rapporte qu'il entendait une explosion de dynamite toutes les 15 minutes.
PAYS ET RÉGIONS
Afrique Les gorilles de montagne et les chimpanzéz sont des exemples d'espèces animales dont l'habitat a été dramatiquement réduit.
Le Rwanda est un petit pays enclavé dans les terres dont la population humaine est la plus dense au monde. Même dans les périodes de
calme social, on met le feu sans hésitation à une des poches de forêt humide qui reste afin d'avoir un peu d'espace. Au début des
années 1980s, le Rwanda était un des pays au monde avec le plus haut taux de SIDA. En 1994, le Rwanda a explosé avec la majorité
Hutu qui s'est retourné contre la minorité Tutsi plus prospère. En quelques mois, 85 % des Tustsi étaient passés à la machette, brûlés, ou
battus à mort. C'est là que Diane Fossey la célèbre primatologiste a été tuée par des braconniers. Il semble que le comportement de
Fossey à la fin de sa vie ait précipité le nombre de gorilles tués parce que les Rwandais cherchaient à se venger de son comportement
agressif. (voir Weber et Vedder et al 2001)
Canada: La perte de la forêt est due en grande partie à l'industrie du papier. AU Québec, tout le monde a entendu parler du film de
Richard Desjardins "L'erreur boréale". Sur la côte Ouest canadienne, la compagnie Mac Millan Bloedel longtemps blâmée pour la coupe
des forêts du Pacifique s'est récemment (1999) impliquée dans la réhabilitation de la marmotte de l’Île de Vancouver (Marmota
vancouverensis), une espèce presque disparue (le zoo de Calgary en a 6, le Metro de zoo de Toronto en a 8…). La population de L’Île de
Vancouver compte environ 150 individus. (en 1997). Les raisons du déclin sont la prédation, les maladies, les activités humaines et… la
perte d'habitat due à la déforestation : Une fondation pour la réhabilitation de cette espèce a été mise sur pied: 1 million de dollars a été
donné par la compagnie et le gouvernement de CB. 21 millions de dollars proviendront du public. Une station sera aménagée au Mont
Washington pour la reproduction des marmottes captives . Le plan est de ramener dans 4 ou 5 ans de 20 à 30 marmottes à l’Île de
Vancouver pendant 20 ans jusqu'à ce qu'il y ait de 600 à 1,000 individus.
Chine: de 1950 à 1960, Mao Zedong a ordonné aux citoyens chinois de "changer le cours des rivières, d'aplanir les montagnes". Inutile
de dire que l'environnement a souffert de ces directives politiques. (JZWM 26: 193-200 (1995))
Les pandas ne vivent qu'en Chine, dans des réserves. Ils requièrent un habitat bien particulier: une forêt de montagne tempérée
composée d'arbres décidués * fournissant une canopée pour le bambou dont ils se nourrissent et des gros arbres dans lesquels ils
peuvent faire leur tanière. En 2001, les réserves créées pour la préservation des pandas ne parviennent pas à remplir ce rôle: La
a
Au Québec, la loi 108 protège une liste d'animaux.susceptibles d'être protégés. Aucun animal n'a été encore
défini comme devant être protégé.
19
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
population humaine a doublé dans la réserve de Wolong créée en 1975 dans la province de Sechuan (sud-ouest de la Chine). Les
habitants de la région brûlaient le bois des forêts des basses terres pour la cuisine et le chauffage. Parce qu'ils ont épuisé ces forêts, ils
brûlent maintenant le bois des forêts de montagne où les pandas vivent et se reproduisent.
La réserve de Wolong, la plus grande réserve de pandas, a 500,000 acres. Sa population de pandas a descendu de 145 en 1974 à 72 en
1986. Ils sont probablement moins nombreux aujourd'hui,
De plus, 50,000 touristes visitent annuellement la réserve. Les touristes dégustent la spécialité locale, du porc fumé, dont la préparation
requiert … du bois. - Science 6 avril 2001. On peut faire un parallèle avec la population de bélugas du Saint-Laurent. L'afflux des visiteurs
dans le Parc Marin du Saguenay entraîne une circulation de bateaux d'observation de toute sorte qui dérangent les baleines et qui cause
la mort (rarement) de bélugas par des blessures dues aux hélices. (voir http://www.medvet.umontreal.ca/services/beluga/index.html )
Indonésie. Ce pays fut durement touchée par la crise économique en Asie en septembre 1998. Cet archipel compte 200 millions
d'habitants. C'est la quatrième population en importance dans le monde. La protection de l'environnement y progressait à cause d'une
classe moyenne qui s'y développait et qui prenait de plus en plus conscience de l'incroyable richesse de la faune de ce pays. Ce pays a
plus d'espèces de plantes et d'animaux que n'importe quel pays dans le monde, à part le Brésil. De plus, un très grand nombre de ces
espèces est endémique à l'Indonésie (elles ne vivent que là). Des 515 espèces de mammifères de l'Indonésie, 36 % sont endémiques.
Des 1,519 espèces d'oiseaux, 28 % sont endémiques. En plusieurs endroits, les pauvres envahissent les forêts appartenant au
gouvernement, déciment la faune (en la revendant à des Taiwanais gastronomes ou exportateurs dans les zoos) coupent les forêts de
bois précieux, et les remplacent par l'agriculture. À cause du taux annuel d'inflation de 80 %, les gens n'ont pas de pouvoir d'achat: les
pêcheurs ont besoin de canots. Ils vont de plus en plus loin dans les forêts pour trouver des arbres assez grands. Les toits de métal des
maisons sont trop chers. Les villageois coupent les feuilles de palmiers et le sol de la jungle devient exposé à la lumière brûlante du
soleil. On attrape les singes en les acculant dans leur nid au coucher du soleil. Puis on coupe les arbres avoisinants pour leur couper
toute retraite : les singes se vendent pour rien dans les ports (Globe and Mail Oct 27 1998) par Peter Waldman du Wall Street Journal.
Île de Sumatra: le braconnage du tigre augmente, les éléphants et les rhinocéros, parmi les derniers pachydermes sauvages en Asie,
sont en voie d'extinction. Ils sont poussés dans des parcs de plus en plus petits par les plantations de caoutchouc et huile de palme. Une
école gérée par le gouvernement pour réformer les éléphants pris en train de piller les récoltes villages sauvages n'a plus un rond. La
malnutrition et les maladies sévissent chez les 120 "patients". En mer, les pêcheurs, ravagent les coraux qui entourent les 17,000 îles de
l'Indonésie. Dans le Sulawesi du Nord, on trouve dans les marchés des espèces menacées, vivantes et mortes.
Des macaques attachés tendent la main aux passants pour de la nourriture, comme des enfants. Près de là, il y a des rats cuits sur la
braise en vente et des chiens en cage pour l'abattage, des chauves-souris pendent au bout de fil de fer dans des caisses de bois. Les
trappeurs les capturent pendant les nuits venteuses avec des cerfs-volants garnis de crochets de pêche. Pourtant, les chauves-souris
jouent un rôle important dans la pollinisation des arbres. Mais leurs ailes sont des mets délicieux dans les pot-au-feu au curry.
La perte d'habitat pour une espèce peut représenter un gain pour une autre espèce.
Par exemple, la surpopulation de coyotes au Canada et particulièrement au Québec est due au fait que le coyote n'a plus de compétiteur.
En effet, l'habitat du loup, le compétiteur naturel du coyote, a été très réduit par l'activité humaine, alors que l'habitat naturel du coyote, a
pris de l'expansion.
Les coyotes sont nombreux au Québec (environ 10,000 dont 2,000 en Gaspésie) et ce grand nombre pose un problème réel aux éleveurs
de moutons. Des cas de bovins attaqués et tués par des coyotes ont été aussi décrits. Le coyote s'attaque aussi au chevreuil. Les cerfs
de Virginie n'ont jamais été aussi nombreux au Québec, sauf en Gaspésie où le nombre de cerfs de Virginie abattus par les chasseurs est
passé de 1380 en 1986 à 140 en 1991. Le coyote s'en prendrait aussi au troupeau de caribous du parc de la Gaspésie, un troupeau de
200 têtes, dernier vestige des hordes qui couraient jadis de l'Île du Prince-Édouard jusqu'au Vermont. Le coyote chasse les mêmes proies
que le renard et le lynx et entre en compétition directement avec ces animaux pour le territoire. C'est ce qui se passerait actuellement
dans le Parc Forillon en Gaspésie.
Pourquoi les coyotes sont-ils aussi nombreux en Amérique du Nord ? La modification de l'environnement par l'homme est le facteur
principal: l'élimination des forêts, ce qui a créé des milieux ouverts, semblables à ceux où se reproduisent les coyotes dans l'ouest, et les
voies de communication puisque le coyote est entré chez nous en longeant l'autoroute transcanadienne. L'augmentation des populations
de cerfs de Virginie favorisée par l'abondance des terres agricoles abandonnées a aussi fourni une proie relativement abondante et
accessible aux coyotes.
Biodiversité dans les pays chauds (Indonésie)
Groupe
Insectes
Mollusques
Poissons
Amphibiens
Reptiles
Oiseaux
Mammifères
Indonésie
250,000
20,000
8,500
1,000
2,000
1,519
515
NOMBRE D'ESPÈCES
Dans le monde entier
750,000
50,000
19,000
4,200
6,300
9,200
4,170
Pourcentage du monde entier
33
40
45
24
32
17
12
Noter qu'il y a plus d'espèces de poissons (connues) qu'il y a d'espèces d’oiseaux et de mammifères ensemble. Ceci reflète
probablement que la vie est d'abord apparue dans la mer. (Que penser alors de la variété des agents infectieux qui affectent les poissons
en nature et de leur potentiel de causer de nouvelles maladies humaines ou animales ?)
20
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
2.6.2 Introduction d'espèces exotiques, transgéniques
ou d'élevage
Résultat: Élimination des espèces indigènes et menant à l'homogénéisation globale du biota :
Lamproies et poissons des Grands Lacs.
Les lamproies ont envahi les Grands Lacs au début du siècle, à partir de l’Atlantique, par les canaux creusés par les Américains et les
Canadiens. Dans les années 50, elles avaient détruit les pêcheries commerciales de tous les Grands Lacs, excepté le lac Érié.
L’empoisonnement, la trappe et l’électrocution ont grandement diminué leur nombre mais elles font un retour depuis la moitié des années
80... parce que les papeteries et les fonderies d’acier de Sault Ste Marie ont réduit leurs émissions de polluants dangereux. L’animal
n’est pas dangereux pendant la grande partie de sa vie (6 ans). A l’état larvaire, le poisson a l’air d’un ver dans le fond boueux des
sources. Il devient parasitaire la dernière année de sa vie et meurt après avoir déposé 50,000 œufs. La dernière année de sa vie, la
lamproie se fixe sur la peau d’autres poissons grâce à sa bouche en forme de ventouse et aux dents acérées. Elle y fait un ulcère par
lequel elle se nourrit des tissus de son hôte.
(La rivière Ste Marie était si polluée que les lamproies ne pouvaient y survivre. Des centaines de milliers de lamproie s’y reproduisent
maintenant dans une zone de 800 hectares. A mesure que cette colonie grandit, les petites lamproies envahissent les lacs Huron,
Michigan et la baie Georgienne (NP Jan 1999)).
Saumon du Pacifique et saumon de l'Atlantique.
Le saumon du Pacifique (sauvage) de la côte Ouest est en déclin. Selon la International Salmon Farmers Association, en ColombieBritannique, les populations sauvages de saumon du Pacifique diminuent constamment et plusieurs pêcheries ont fermé.
Le saumon de l'Atlantique est aussi en déclin. Le stock a décliné de 65 % depuis le début des années 1980. Il se compose maintenant
d'environ 250,000 saumons.
Note: Le lac Ontario abritait de nombreux saumons de l'Atlanique au siècle dernier, jusqu'à ce que l'espèce soit décimée par la pêche et
l'élimination des zones de frai, probablement au cours des années 1890. Actuellement, de nombreux saumons vivent dasn le lac Ontario,
mais ce sont des saumons du Pacifique (coho et quinnat), importés pour satisfaire les pêcheurs.
Pour compenser le déclin de la pêche au saumon du Pacifique, on pratique l'élevage du saumon de l'Atlantique (oui de l'Atlantique( en
Colombie-Britannique depuis les années 1970.
En 1998, la production de saumon d'élevage était de $ 229.2 millions comparée à $ 55 millions de saumon pêché (NP Sept 4 1999)). En
1997, le saumon d'élevage fournissait la moitié de la consommation mondiale de saumon.
En août 1999, 32,700 saumons de l'Atlantique s'échappaient d'un élevage de l’Île de Vancouver. Au cours des années précédentes, des
centaines de saumons adultes de l'Atlantique ont été trouvés dans les rivières de l'Île de Vancouver.
Les saumons d'élevage qui s'échappent compétitionnent avec succès contre leurs confrères sauvages en ce qui a trait à la reproduction
et à la recherche de nourriture parce qu'ils sont plus gros .
En CB, plus de 80 % de la production d'aquaculture est du saumon Atlantique. On estime que de 60,000 à 100,000 saumons /Atlantique
s'échappent des élevages dans les eaux côtières de la CB chaque année. Curieusement, Pêches et Océans Canada, dont le mandat
inclut pourtant la conservation des espèces canadiennes de poisson, émet les mêmes commentaires que l'industrie de l'aquaculture:
"Quelques poissons ici et là ne constituent pas une invasion". Le public présume que des études ont été faites pour mesurer l'impact des
saumons de l'Atlantique sur les saumons sauvages du Pacifique. Or il n'en est (presque) rien: une seule étude avait été effectuée
jusqu'en 1999 (faite par un étudiant au PhD, John Volpes). Il a démontré que les saumons de l'Atlantique sont capables de survivre à
l'état sauvage dans le Pacifique, y ont une période de frai, et produisent des jeunes qui survivent jusqu'à l'âge adulte.
On a tenté de rétablir les populations de saumon du Pacifique en élevant des alevins (dans des "écloseries") puis en les relâchant en
nature. (Chez les poissons, très peu de jeunes se rendent à l'âge adulte étant donné que leurs larves et alevins constituent le zooplancton
qui sert de fourrage à la vie marine). On s'est aperçu récemment (1998-1999) que les poissons issus d'écloseries peuvent avoir des
comportements qui diminuent leur survie en milieu sauvage.
Espèces transgéniques
D'autres facteurs, plus récents, peuvent causer la destruction d'espèces indigènes.
Saumons: Les saumons coho (du Pacifique) ne peuvent être élevés sur la côte Atlantique à cause des tempréatures trop froides. Qu'à
cela ne tienne, on a fabriqué des saumons du Pacifique résistants au froid: Les saumons coho faits transgéniques avec le gène
d'hormone de croissance et un autre d'une protéine antigel ont été mis au point par des chercheurs canadiens (SJ Du, C Hew à
l'Université de Toronto). Les recherches ont été subventionnées par Pêches et Océans Canda. Les saumons transgéniques sont
beaucoup plus agressifs que les saumons normaux. Leur métabolisme est accru énormément et ils doivent manger tout le temps une
grande quantité de nourriture. Ils posent donc un risque à la chaîne alimentaire aquatique. Le second risque posé par ces poissons est
qu'ils sont stériles. Ils tentent quand même de s'accoupler et mobilisent des partenaires pendant ce temps. (N'oublions pas que pour
contrôler des populations de moustiques, on introduit des moustiques stériles dans ces populations).
Les poissons transgéniques croissent plus vite mais sont sujets à des difformités et à une mobilité moins grande. Si des individus non
stériles sont produits et s'échappent, ils propageront ces caractéristiques dans la population.
Des expériences faites sur d'autres poissons (medakas) à l'U de Purdue montrent que les poissons transgéniques meurent plus jeunes.
Chez les saumons, les mâles plus gros attirent plus les femelles que les mâles plus petits. Donc, le gène de l'hormone de croissance se
répandrait vite dans la population sauvage et les rejetons mourraient plus jeunes que les saumons normaux. Puisque les saumons
d'élevage, même normaux, s'échappent souvent, qu'arrivera-t-il aux saumons du Pacifique sauvages lorsque les transgéniques,
beaucoup plus gros et plus agressifs, s'échapperont de leur enclos? Surtout que, en premier lieu, les saumons transgéniques ont été mis
au point parce que les populations indigènes de saumon avaient diminué à un point tel que la pêche n'était plus rentable. Des modèles
mathématiques prédisent que 60 animaux transgéniques dans une population sauvage de 60,000 animaux conduiraient à l'extinction de
cette population en 40 générations. C'est l'inverse de la sélection darwinienne. La sélection sexuelle force le gène dans la population et la
viabilité réduite conduit la population à l'extinction.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Espèces d'élevage: N'oublions pas que les espèces animales qui sont élevées ont été tellement sélectionnées qu'elles peuvent être
considérées dans plusieurs cas comme des espèces exotiques. Ceci est particulièrement vrai pour les poissons, pour les différentes
variétés de truites par exemple. En 2001, un chercheur de P et O (B Devlin dans Nature) a montré que le gène d'hormone de croissance
introduit dans les truites sauvages (normalement 10 g à 14 mois) faisant croître rapidement ces poissons (167 g à 14 mois), comme dans
le cas du saumon. Par contre, la même technique de transgénèse n'arrivait pas à faire croître des truites d'élevage, déjà sélectionnées
pour une croissance maximale (270 g en 14 mois) par 100 ans d'élevage. De plus, les poissons transgéniques souffraient de
malformations. Cette expérience montre à quel point les espèces domestiques ont été altérées génétiquement et jusquà quel point elles
diff`èrent génétiquement des espèces sauvages.
2.6.3 Destruction des espèces indigènes
Chine: les Chinois utilisent les animaux sauvages depuis des millénaires pour leur médecine. Ainsi, les tigres
et autres félidés, les ours (bile), les rhinocéros et autres ongulés, les chauves-souris, et plusieurs espèces
d'oiseaux et de reptiles sont employés dans les médicaments de la médecine traditionnelle chinoise. Entre
autres, les os des tigres sont fort prisés. Les chinois forcés à l'émigration deviennent généralement des
citoyens prospères dans les pays d'accueil. Là, ils créent une forte demande pour ces animaux. (Pour une
excellente revue, voir: JZWM 26: 193-200 (1995)). (Pour s'en convaincre, il faut faire un tour dans le quartier
chinois de Montréal et examiner les étiquettes des fioles dans la première boutique venue).
En Alberta, on retrouve souvent des carcasses d'ours tués (ours brun Ursus arctos) desquelles la vésicule
biliaire a été extirpée à la hâte.
Baleines:
Jon Lien, 59 ans, de l’Université Memorial de St-Jean Terre-Neuve recevait 150 appels par année de la part de pêcheurs de morues qui
signalent que des baleines à bosse étaient empêtrées dans leur filet. Ce nombre a chuté à cause du moratorium sur la morue en 1992.
Mais la pêche à la morue reprenait en 1999.
M. Lien entraîne 30 volontaires en mai 1999 pour lui succéder et aussi pour faire le même travail sur les baleines franches de l’Atlantique
Nord, une des baleines les plus rares au monde (*) dont il ne reste plus que 300 représentants. Cette espèce a été chassée jusqu’à
presque complète extinction lorsque la protection internationale lui a été donnée en 1935. En été, environ la moitié de cette population se
rassemble dans la baie de Fundy pour l’accouplement et pour se nourrir de plancton. 62 % des animaux ont des cicatrices dues à
l’équipement de pêche. (NP Jan 8 1999, G. Hamilton).
Félidés: Voir "Espèces les plus rares au monde"
Bélugas:
Plus près de nous, il y a le béluga de l’Estuaire du Saint-Laurent
- Voir site Web de la faculté
http://www.medvet.umontreal.ca/services/beluga/index.html
Commerce d'animaux exotiques
Les animaux exotiques servent à toutes sortes de fin: des guitares sont fabriquées à partir de carapace
d'armadillo. des boucles de ceinture à partir de pied de crocodile, des horloges faites à partir de carapace
de tortue marine.
Au Canada, les animaux importés devraient avoir un permis CITES (Convention on the International Trade
in Endangered Species of Wild Fauna and Flora).
Le commerce mondial d'animaux exotiques capturés à partir de leur habitat naturel est de 1 milliard de
dollars américains, excluant le marché illégal des espèces en danger. Le marché est à son maximum
avant Noël. Les acheteurs aiment croire que ces animaux sont capturés et transportés dans des conditions
acceptables. Il n'en est rien. Les conservationistes travaillant dans l'habitat de ces espèces rapportent que
les gens qui collectent des lézards par exemple passent des heures à remplir d'immenses paniers de ces
animaux. Comme résultat, ceux du fonds sont écrasés par ceux du dessus.
D'autres sont arrivés au Canada entassés dans des sacs et seulement quelques-uns respiraient encore.
Poissons
La plupart des poissons marins (d'eau salée) ne peuvent être élevés en captivité. Ils doivent donc être
capturés dans leur habitat naturel contrairement aux poissons d'eau douce, qui eux peuvent être élevés en
captivité. Beaucoup des poissons marins sont des habitent les coraux, qui sont un peu les forêts humides
de l'océan. Les coraux sont en mauvais état: environ 58 % sont en danger, selon un rapport de septembre
2001 du programme environnemental des Nations Unies. (voir Indonésie).
En Indonésie, 82 % des coraux sont en danger et dans certaines parties de l'Océan Indien, 90 % des
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
coraux sont morts à cause de l'élévation de température de l'eau. Dans les Caraïbes, ce sont les maladies
qui déciment le corail. Les coraux sont aussi exploités pour produire la chaux pour le ciment. Dans les
Keys, en Floride, la construction de marinas et de condos pour les baby boomers vieilissant produit
beaucoup de poussière dans l'eau qui bouche les pores des coraux.
Les collecteurs de poissons des eaux chaudes, comme en Indonésie sont souvent pauvres et mal
équipés. Ils endommagent le corail parce que leur proie est difficile à capturer: les poissons se déplacent
rapidement et sont difficiles à capturer en grand nombre. Pour résoudre ces problèmes, les poissons sont
chassés à la dynamite pour assommer les poissons assez lonfgtemps pour s'en saisir. Évidemment,
plusieurs poissons sont tués et le corail est endommagé. Cependant, la tactique la plus fréquente et la
plus dommageable est la pêche au cyanure. Les coraux sont aspergés de cyanure concentré (le même
composé utilisés pour l'exécution des condamnés à mort aux É-U. Cette pratique a commencé dans les
années 1960s à Taiqna et aux Philippines (Paul Holthus, directeur du "Marine Aquarium Council" - nov
2001). La méthode est maintenant répandue dans le Pacifique asiatique et est particulièrement populaire
aux Philippines et en Indonésie, qui sont la source de 85 % des poissons marins d'aquarium amateur. Le
cyanure ne coûte pas cher, est facile d'emploi et son usage est discret. Plus de mille tonnes (oui, un
million de kilogrammes) ont été utilisées dans les seules Philippines depuis les années 60s. Les
plongeurs écrasent une tablette ou deux de cyanure de sodium dans une bouteille de plastique. C'est une
solution de 1.5 g par litre, soit 300 fois la concentration léthale pour certains poissons (Scientific American,
juillet 2001). Une fois qu'il sont rendus au-dessus des coraux, les plongeurs répandent la solution laiteuse
sur le sommer des coraux pour en chasser les poissons. Le poisson est en hypoxie et ralentit. Il est alors
plus facile à attraper. Les poissons et le corail qui sont frappés directement par le poison meurent
instantanément. La méthode cause des dégats au corail qui sont semblables à ceux causés par un typhon.
Les propriétaires de pet shop et les acheteurs des poissons capturés au cyanure se plaignent que
beaucoup des "survivants" meurent dans les semaines qui suivent l'achat, après avoir perdu beaucoup de
poids, même si leur appétit est resté très bon et même dans certains cas, a augmenté.
Oiseaux
La plupart des oiseaux vendus au Canada ont été élevés au Canada. Ils incluent le African *gray parrot, le
Senegal parrot, conures, perruches, cockatiels, mmacaws, cockatoos, loris, love birds, quakers. Mais
quelques-uns proviennent de leur habitat naturel. Ces derniers devraient avoir un permis CITES. S'ils n'ont
pas de permis, ils ont été capturés et transportés illégalement.
Les oiseaux à éviter sont:
Particulièrement au Canada actuellement: les African song birds spécialement du Sénégal, du
Mozambique et du Mali. Certains sont élevés en captivité en Hollande mais plusieurs proviennent
directement de l'habitat sauvage et ont souvent été maltraités. Il est recommandé d'inspecter le permis
d'exportaton et de demander la preuve qu'ils ont été mis en quarantaine selon les règlements canadiens.
Reptiles
Le gecko léopard est le plus fréquent. Il est natif de l'Iran, Afghanistan, parties de l'Inde et du Pakistan. Il
est facile d'entretien et ne dépasse pas 7-8 pouces de longueur. La plupart ont été élevés en captivité.
Un autre "bon" reptile est le gecko à crête. On le pensait éteint il y a seulement 6 ans. On a alors
découvert un secteur de Nouvelle Calédonie où cet animal était abondant. Puis on l'a élevé en captivité. Il
est devenu très populaire. Il est docile et on peut lui donner de la nourriture à bébé.
Les corn et milk snakes font aussi de bons animaux de compagnie. Ils sont natifs des Etats-Unis et ont été
élevés avec succès. Ils grandissent jusqu'à 5 pieds.
Les tortues maintenant vendues dans les pet shops ont été élevées, comme les poissons d'eau douce.
L'iguane est le reptile le plus communément importé en Amérique du Nord. Il fait un très mauvais animal
de compagnie. Il grandit beaucoup, jusqu'à 6 pieds de lon et requiert beaucoup d'espace et une nourriture
très variée. La plupart sont capturés en Amérique centrale et Amérique du Sud.
Pour des raisons évidentes, il faut éviter les serpents dangereux: cobras et serpents à sonnette, et les
pythons et anacondas qui deviennent immenses, sont difficiles à manipuler et requièrent une cage très
sérieuse.
Recommandations: dans un pet shop, on reconnaît les animaux exotiques élevés en captivité quand ils
sont en bonne condition et du même âge. Les animaux capturés portent des cicatrices et sont d'âges
différents. Des pressions sont exercées pour que des étiquette soient apposés sur les arrivages de
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
poissons qui ont été capturés sans cyanure.
Politique et Préservation
Tigres: Les tigres sont menacés partout dans le monde. (Par contre, dans l'est de la Sibérie, au Népal et
certaines régions de l'inde, leur nombre a augmenté au cours de la dernière décennie).
Il y a 3,750 tigres aux Indes. Soit 60 % de tous les tigres dans le monde.
Les organismes internationaux de conservation, comme le WWF n'ont pas la tâche facile. Les populations
animales ne connaissent pas les frontières. Par contre, les frontières sont la raison d'être des gouvernements.
Ainsi, l'Inde a mis fin à un projet de réhabilitation des tigres du Bengale par le WWF après que le WWF ait
publié une carte de l'habitat de cet animal. La carte identifiait de larges parties du Jammu et du Cachemire
(des états indiens du nord) comme faisant partie du Pakistan alors que les cartes indiennes identifient ces
états comme faisant partie des Indes. (Cette erreur du WWF est survenue précisément alors que les armées
des deux pays se tiraient dessus pour la possession du Cachemire).
2.7 Préservation de la biodiversité
Il ne faut pas confondre préservation de la biodiversité avec protection des espèces menacées. Comment
préserver la biodiversité? C'est difficile, car les prédateurs requièrent beaucoup d'espace, particulièrement, les
gros carnivores tels que les loups, les ours. Par exemple, un ours grizzly aurait besoin de 76 km2 surface,
ininterrompue par des routes. Et ces animaux doivent être quelques milliers sinon ils sont les victimes
d'appauvrissement génétique et de maladies. Donc, des espaces bien plus grands que le plus grand parc
national américain doivent être disponibles.
La fragmentation de l'habitat en espaces plus petits (parcs, réserves) séparés par le développement urbaine et
agricole, fait que
1) un nombre réduit de chaque espèce est représentée dans chaque sous-espace (et donc entraîne la
consanguinité, rend les animaux plus susceptibles aux infections et aux autres facteurs stressants (voir
"Protection des espèces menacées"),
2) que le rapport bordure-surface intérieure augmente et les populations sont plus vulnérables à
l'envahissement par des espèces exotiques.
3) La fragmentation des habitats empêche la migration des espèces si les conditions environnementales
changent. Et elles changent ! Par exemple, le réchauffement global repousse l'habitat de plusieurs
espèces vers le nord. Mais ces espèces ne peuvent migrer à cause de la fragmentation de leur habitat
(voir Carbone et Réchauffement global).
De plus, les parcs et réserves traditionnels mis de côté pour la faune, l'ont été parce qu'elles ne représentaient
pas de valeur pour les mines ou la coupe de bois ou l'élevage de bovins, et non à cause de facteurs
biologiques. Même les sanctuaires ont été créés pour sauvegarder une espèce désirée pour des intérêts
économiques tels que les canards et non pour sauvegarder la biodiversité ou pour préserver un écosystème
(voir "Définition d'écosystème"). Ces régions sont donc en général très jolies, voir e spectaculaires, mais pas
particulièrement riches en espèces vivantes (Ex.: Parc du Bic). De plus, parce que ces régions ont été choisies
pour favoriser une espèce, leur protection, au détriment d'autres régions, peut entraîner la diminution du
nombre des autres espèces et donc augmenter l'extinction des espèces, à l'échelle du globe.
Pour sauvegarder des écosystèmes et donc la biodiversité, on propose actuellement aux États-Unis la création
d'un réseau de régions à l'échelle du pays. Ce réseau est constitué de trois éléments: des réserves strictes
(sanctuaires), des régions à usage multiple (entendre "peu habitées") jouant le rôle de tampon et des corridors
reliant les deux premières catégories.
2.7.1 Canada
Dans ce pays, on commence à réaliser l'importance économique de préserver des espaces pour la nature.
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Pathologie de la faune 2002
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à l'Ile du Prince Édouard, la culture des patates génère 4,500 emplois et perd de l'argent:
pour chaque dollar produit, la culture des patates prend $ 4 en subventions. Par contraste, le
tourisme génère 20,000 emplois et génère des profits. (L. Solomon, NP 1999)
en Colombie britannique, la pêche industrielle au saumon génère $ 100 millions par année,
c'est-à-dire le cinquième des argents générés par la pêche sportive au saumon, qui elle ne fait
pas diminuer les sotcks.
Selon Statisiques Canada, l'industrie forestière compte seulement pour 0.5 % du produit
national brut. En échange de ce faible pourcentage, les gouvernements fédéral et provinciaux
donnent plus de $ 2 milliards en subvention directes à cette industrie (c'est à peu près le
montant que ces gouvernements reçoivent de l'indutrie forestière pour les arbres coupés). En
fait, les subventions indirectes sont beaucoup plus élevées.
Les industries manufacturières associée à l'industrie forestière comptent pour 1.5 % du produit
national brut reçoivent des réductions de taxes et autres subventions (le gouvernement du
Québec a ainsi donné $ 100 millions en 1999).
En général, la "rentabilité" de l'industrie forestière canadienne dépend de la générosité du
gouvernement canadien (et donc des payeurs de taxes):
! Dans le rapport de 1999 de Pricewaterhouse Coopers, on dit que le retour sur le capital
est de 4 % pour les derniers 10 ans, le même rendement que pour les obligations du
Canada.
! Le profit total de l'industrie en 1998 était $ 432 millions, comparé aux $ 460 millions de
l'année précédente et des $ 804 millions de l'année d'avant. Ces montants représentent
les profits totaux générés par la coupe de bois, la pulpe et le papier, et tous les produits du
bois combinés, par les compagnies canadiennes les plus petites, aux énormes
compagnies telles que Weyerhauser, la compagnie américaine géante qui a acheté en
1999 la grosse compagnie canadienne MacMillan Bloedel.
! De plus, cette faible profitabilité est gonflée par le fait que l'industrie n'assume pas le
véritables coûts de la coupe d'arbres. En effet, le gouvernement canadien loue les terres
de la Couronne aux compagnies papetières à des tarifs très bas. Et les coûts encourus
par l'environnement ne sont pas inclus: déforestation et érosion du sol qui en découle, la
pollution due à la production de la pulpe, perte des espèces animales et végétales. Selon
un article du National Post en 1999, si les papetières devaient acheter ces terres (au prix
régulier), elles cesseraient la coupe pour exploiter de façon beaucoup plus rentable ces
terres en les aménageant pour la pêche, la chasse et le ski.
Protection d'habitat au Canada
Le Gouvernement du Canada est sous pression depuis des années pour protéger 30 espèces menacées
d'extinction. En août 1999, le ministre de l'Environnement du Canada M. Anderson, proposait une loi selon
laquelle il sera criminel de détruire l'habitat naturel. Il n'y aurait pas de compensation pour les propriétés
perdues. À première vue, un tel projet peut sembler valable. Pourtant, à cause de celle-ci, bien des fermiers et
des éleveurs de ranchs (dans l'Ouest canadien, L'Association des producteurs de bovins représente plus de
100,000 éleveurs) pourraient cesser de collaborer pour l'amélioration de l'environnement à cause de cette loi.
Par exemple, certains ranchers collaborent déjà avec Canards illimité: ils attirent des canards en aménageant
des marais sur leurs terres. Ils craignent maintenant d'être exposés à des poursuites plus tard s'ils veulent
exploiter leur propriété ou apporter d'autres changements. Ainsi, à la limite, si un cultivateur trouve un renard
véloce ou un lynx sur sa terre, il pourrait même se hâter de détruire l'habitat qui a attiré l'animal, en coupant les
arbres par exemple. Il pourrait même se hâter de détruire l'habitat avant de trouver des espèces rares sur sa
propriété, pour éviter qu'elles ne s'y établissent, comme cela se fait aux États-Unis, apparemment, à cause du
Endangered species Act (voir p. 43), une loi vieille de 25 ans, qui a fait que les propriétaires terriens craignent
vraiment de découvrir des espèces sauvages rares sur leurs terres.
En effet, aux États-Unis, la découverte d'une telle espèce empêche automatiquement toute exploitation
(agriculture ou déboisement), ce qui cause une perte financière immédiate et une diminution de la valeur des
terres. Plusieurs propriétaires, lorsqu'ils découvrent une espèce rare "just shoot, shovel, and shut up". (NP sept
13 1999) ou d'autres encore, en Caroline du Nord, se hâtent de couper leurs forêts de pins avant qu'elles ne
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
deviennent matures, pour éviter que des pics bois ne s'y établissent (NP Sept 13 1999). Les agences
américaines fédérales et des états ont dépensé 1.2 milliards entre 1989 et 1993 seulement pour administrer
cette loi, le ESA. Parmi les espèces énumérées dans le ESA, seulement 3% des espèces habitant des terres
privées se sont améliorées.
Country Stewardship Scheme
La récompense serait plus efficace que la punition pour la protection des espèces. En Angleterre, le
"Countryside Stewardship Scheme" accorde des subventions aux cultivateurs qui acceptent de protéger
certaines parties de leur terre. Ainsi 8,000 accords ont été signés pour protéger 143,000 hectares.
Sous un autre programme britannique, le "Environmentally Sensitive Areas Scheme", 9,000 cultivateurs
reçoivent des compensations pour revenus perdus.
Defenders of Wildlife
Aux É-U, les Defenders of Wildlife, un organisme privé, rembourse les éleveurs de bétail dont les animaux ont
été blessés ou tués par des loups. Depuis 1987, le groupe a remboursé $ 84,000 (NP Sept 13 1999),
$ 50 pour un mouton à $ 5,000 pour quatre vaches. Ainsi, ni les éleveurs ni le gouvernement n'ont à payer
pour la préservation des loups. Les conservationnistes sont les seuls à payer ! Bon ou mauvais ?
Nature Conservancy of Canada
Au Canada, cette tendance est récente. Les 11,000 membres de Nature Conservancy of Canada font un peu
la même chose que les Defenders of Wildlife: ils achètent la terre. C'est de loin le moyen le plus simple et le
plus définitif pour la protection. S'ils ne peuvent acheter la terre, ils prennent des ententes avec les
propriétaires pour la protection.
DuvetNord
Au Québec, DuvetNord une compagnie privée dirigée par un professeur de l'Université Laval, a acheté les Iles
Pellerins, l'Ile aux Lièvres et l'Ile du Pot de Vie, des iles sises dans le fleuve Saint-Laurent, en face et en amont
de Rivière du Loup. (On ne peut plus aller sur ces îles sans demander à (ou payer) DuvetNord). Qu'en
pensez-vous ? Après tout, ces îles sont ("étaient") aussi à vous...
Canadian Property Rights Research Institute
Au Canada, le "Canadian Property Rights Research Institute" (Ouf!) suggère au ministre Anderson
d'encourager les arrangements volontaires, subventionnés par le gouvernement ou les organismes privés qui
récompensent les propriétaires pour la protection de l'habitat. Le gouvernement pourrait aussi promouvoir
l'échange, la location, ou l'achat de terres, des déductions d'impôts pour la création d'habitat ou pour des
délais dans l'exploitation. Le Comité sur le statut des espèces menacées d'extinction au Canada (CSEMDC) Species at Risk Working Group - estime que le plus important facteur qui motiverait les propriétaires serait
d'enlever les facteurs de démotivation.
Espèces menacées au Canada
Le Canada a perdu au moins 27 espèces ou sous-espèces de flore et de faune depuis deux cents ans.
Au Canada, la protection des espèces menacées a fait partie de l'agenda du gouvernement en 1978 avec la
création du CSEMDC. Treize ans plus tard, le comité avait évalué et classé 213 espèces dans les cinq
catégories suivantes: disparues, déracinées, en danger de disparition, menacées et rares. De ces quelques
deux cent espèces, seulement quatre ont fait l'objet d'un plan concret: Grue blanche d'Amérique, Faucon
pèlerin, renard véloce et Pluvier siffleur. Ce piètre résultat est la conséquence de plusieurs chicanes de
juridiction ou de disputes à l'intérieur d'un même ministère entre différents gestionnaires (Québec Science,
Déc. 1993). Au début de 1999, 631 scientifiques ont averti le premier ministre que 80 % des espèces sur la
liste des espèces en danger sont en danger parce que leur habitat est menacé.
Québec
Moins de 1 % du territoire québécois est protégé par des parcs et des réserves écologiques, alors que
l'Ontario (qui a un gouvernement de "droite") prévoit étendre cette protection à 12 % de son territoire. Aucune
province ne protège moins son territoire que le Québec (- André Noël, La Presse 8 mai 1999).
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
On connaît bien les parcs provinciaux. Ceux-ci existent d'abord pour la récréation, pas pour la préservation. On
connaît moins bien les réserves écologiques, où toute activité humaine est prohibée. La circulation à pied y est
même interdite. La première réserve a été créée en 1974. Il en existe maintenant 50.
Selon la FAPAQ (anciennement MEF, anciennement MLCP) (http://www.fapaq.gouv.qc.ca/), les objectifs de la
création de ces régions de protection stricte sont:
-
avoir des points de comparaison pour, plus tard, pouvoir évaluer l'impact des activités humaines sur
l'environnement naturel québécois ou tout simplement pouvoir étudier les phénomènes à l’œuvre dans
un environnement "naturel" (voir "Isle Royale").
-
protection des espèces animales ou végétales (voir plus haut).
-
léguer un environnement intact à nos descendants.
La superficie totale de ces réserves ne représente qu'un dixième de 1% de tout le territoire québécois. Parmi
les réserves les plus importantes, on compte la réserve écologique de Jackrabbit au nord ouest de MorinHeights (7.5 km2), la réserve de l’Île Brion, aux Îles de la Madeleine (6.5 km2), la réserve Louis Babel sur la
Côte Nord (235 km2), la réserve Marcel Raymond en face de l’Île aux-Noix, 0.6 km2 (en comparaison, le parc
du Mont-Tremblant compte 1,490 km2 de superficie). (Comparer ces superficies à la superficie nécessaire à un
ours grizzly (évidemment absent du Québec), soit 76 km2). Notez aussi que ces réserves ne sont pas
organisées en réseaux, c'est-à-dire qu'elles ne communiquent pas entre elles par des corridors, et que leur
superficie est inversement proportionnelle à la densité de la population humaine environnante et/ou à la valeur
économique des territoires en cause.
Par contre, sur une note positive, le concept de région tampon semble s'implanter ici (ex.: parc du Bic). Autres
bonnes nouvelles: La FAPAQ a encouragé l'acquisition de 5,000 hectares de terrain, le long du fleuve, entre
Québec et Montréal, dans le cadre du plan d'action Saint-Laurent pour le rétablissement du brochet.
Le gouvernement seul ne peut pas tout faire.
«Avec l’approbation du public, rien ne peut échouer; sans elle, rien ne peut… réussir ».
- Abraham Lincoln
Ainsi, la menace d’un boycott du public, et non les lois américaines, ont fait que les conserveries de thon ont
commencé à exiger de leur fournisseur que ceux-ci pêchent le thon avec des filets qui ne mettent pas en
danger les dauphins.
Les grandes compagnies commencent à changer leur fusil d’épaule. Les compagnies d’assurance réalisent
qu’elles peuvent être poussées à la faillite à cause des tempêtes plus fréquentes déclenchées par
l’augmentation de CO2 et d’autres gaz à effet de serre.
Espèces menacées au Québec
Au Québec, même si la loi sur les espèces menacées a été adoptée en 1989 par le gouvernement du Québec,
aucune espèce spécifique n'est encore protégée légalement.
Les ministères impliqués en environnement ne se parlent pas. En 1992, le ministère de l'environnement
(MENVIQ à l'époque) publiait une liste d'espèces menacées ou vulnérables. Elle compte douze arbres, 23
arbustes et 339 plantes herbacées (un total de 374 espèces sur le total de 2,550 espèces répertoriées sur le
territoire provincial). Fin 1992, le Ministère du loisir, de la chasse et de la pêche (MLCP à l'époque) publiait lui
aussi sa propre liste (!!!). Elle comptait 26 espèces de mammifères sur les 90 au Québec, (des musaraignes
au rorqual), une quinzaine d'amphibiens et de reptiles, 13 espèces de poissons sur 185, comme le chat-fou
liséré, découvert dans le parc de la Gatineau en 1971.
Un seul nid actif de la Pie-grièche migratrice a été recensé au Québec par le Service canadien de la faune en
1993.
Caribou. Le caribou (Rangifer tarandus, renne) est le seul gros ruminant vivant exclusivement de lichen. Il
27
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
habite les Territoires du Nord Ouest, l'Alaska et l'Eurasie. De plus, deux minuscules populations vivent au Sud
du Québec. La population du Parc de la Gaspésie était chassée jusque dans le milieu des années 40. Puis les
forestiers sont venus. En plus d'effrayer les caribous par leurs activités peu discrètes, ils ont coupé les arbres
surtout les plus gros, couverts de lichen! Ce n'est qu'en 1977 qu'on a finalement arrêté les activités forestières
au mont Jacques Cartier, dans le Parc de la Gaspésie, où subsistent maintenant 200 caribous.
Donc, les deux populations du Québec sont particulièrement fragiles en hiver pour les raisons mentionnées cidessus. Or, les régions où elles vivent, Charlevoix et le parc de la Gaspésie, sont économiquement
dépourvues et les habitants de ces régions font des pressions pour que la visite de ces troupeaux soit permise
au plus grand nombre possible de gens. Les biologistes de la FAPAQ ont fort à faire pour persuader leurs
patrons de ne pas céder à ces pressions. Les caribous sont adaptés à la toundra, où ils peuvent voir et sentir
de loin les prédateurs tels que le coyote (voir plus loin) et l'ours. Quand arrivent les visiteurs, les caribous
s'enfuient dans les régions boisées, où ils sont très vulnérables à ces prédateurs naturels.
Un exemple d'aménagement de parc au Québec, le Parc du Mont-Tremblant
(Résumé du travail de Martin Lavoie, étudiant 4ième année en pathologie de la faune, DMV 1996)
Avant l'arrivée des blancs, le Parc du Mont-Tremblant était le territoire d'hiver des Weskarinis, des algonquins,
parce que l'orignal y était abondant et la pêche sur la glace productive. La "Montagne qui tremble" était la
montagne du Grand Esprit.
En 1894, le premier parc québécois est créé: le parc de la Montagne Tremblante (60 km2) et, en même temps,
est déclaré réserve forestière de l'état (!). En 1925, y est rajouté un territoire de 3,108 km2, la réserve forestière
de la montagne Tremblante. En 1981, après des audiences publiques pour décider si le parc serait utilisé pour
la préservation, la récréation ou l'industrie forestière ou les trois activités, le gouvernement déclare le parc un
parc de récréation. (Donc ?) sa superficie est coupée presque en trois, soit 1,248 km2, et une zone de 242
km2, 20 % donc, est laissée à l'industrie forestière pour une période de 9 ans. Le nord du parc devient la
réserve faunique Rouge Matawin qui sert à l'exploitation forestière et à la chasse et à la pêche. Le parc a
maintenant (1996) 1,490 km2. Il compte 31 espèces de mammifères. La présence du couguar et du carcajou
reste à confirmer.
Il y a 186 espèces d'oiseaux observées. 26 espèces de poissons dont la moitié est pêchée, 6 espèces de
reptiles et 14 espèces d'amphibiens. (Nous ne parlons pas de la flore ici; celle-ci est très diversifiée).
Ce territoire a été exploité intensivement par l'industrie forestière (CIP) jusqu'en 1990. Toute la forêt du Parc
a été abattue au moins une fois. La "plus vieille" forêt du parc date de 120 ans. Les nouveaux arbres du nord
du parc commencent à repousser.
Le parc est actuellement partagé en trois sections: 1) zone de préservation: préservation intense et utilisation
faible. 2) Zone de récréation intensive: préservation modérée et utilisation intensive. 3) Zone d'ambiance:
préservation élevée et utilisation modérée.
Suite à la convention mondiale sur la biodiversité signée par le Canada à Rio, un nouveau plan de zonage a
été proposé pour l'orienter vers la conservation.
Cette révision de zonage arrive à un moment critique dans l'histoire du Parc car le nouveau zonage inclurait le
pic Johannsen dans une zone de préservation, même si ce pic est présentement dans le territoire loué par la
corporation Intrawest (en 1996).
Intrawest.
Cette compagnie loue 67 km2 (le territoire du Mont-Tremblant) depuis 1991 des anciens propriétaires du centre
de ski et ce, pour une période de 99 ans. Elle possède et exploite sept autres centres de villégiature (1996),
pour la plupart des centres de ski. Plus de $ 500 millions ont été investis par la compagnie dans le parc depuis
1991 (en 1996). Plus de 3,500 emplois ont été créés dans la région. Seul le centre de ski est inclus dans le
Parc. En 1996, le développement du centre de ski avait détruit 18 âcres de forêt du Parc, du côté Nord de la
montagne (The "Edge", et oui! Comme le guitariste de U2!)). Intrawest est très intéressée à exploiter le pic
Johannsen pour le ski.
Le but (publicisé) d'Intrawest est d'avoir des clients à l'année longue, pas seulement l'hiver. En dehors du Parc,
la construction du golf a créé quelques remous. Le golf empiète sur un ravage de chevreuils. Plus de douze
28
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
études ont été faites sur l'impact du golf. Plusieurs de ces études ont été faites par des biologistes d'Intrawest.
L'entretien des golfs et le contrôle des insectes (mouches noires et maringouins) requièrent des insecticides,
qui finissent dans l'eau. Or, la grenouille des marais et la rainette versicolore, deux espèces menacées vivent
dans un rayon de 25 km des nouveaux développements.
Personnes contact:
Yves Junot, relationniste, Intrawest
Pierre Dupuy biologiste, MEF, Service de la mise en valeur du milieu.
Martin Lavoie (vétérinaire -1996, maintenant spécialisé en environnement, dans les Laurentides !)
2.7.2 Traité de Rio
Avez-vous entendu parler du traité de Rio?
Rio : 178 nations ont signé un traité en juin 1992 qui a donné lieu à une kyrielle de traités moins importants, qui
n’ont pas abouti à grand chose.
- 76 pays ont coupé leurs forêts anciennes alors que 11 autres pays ont moins de 5 % de leur terre boisée
originale (World Resources Institute, Wash. 1997).
Le traité de Rio (1992) (tiré de Time, Nov 1997)
Climat
Déforestation
Financement
Population
Biodiversité
Rhétorique
Réalité
Les délégués ont approuvé une convention sur le
climat pour que les nations réduisent
volontairement leurs émissions de dioxyde de
carbone et autres gaz à effets de serre aux
niveaux de 1990
Les délégués ont réclamé une action « urgente »
et ont dressé des plans préliminaires pour
négocier une convention de la forêt.
Les délégués ont demandé que les pays riches
augmentent leur aide au développement à 0.7%
de leur produit national brut.
Les pays ont ignoré les objectifs de Rio et les gaz
à effets de serre sont relâchés comme si Rio
n’avait pas eu lieu
Le monde continue à détruire une superficie de
forêt de la grandeur du Népal chaque année.
Cette aide, actuellement une moyenne de 0.3%
du PNB américain, diminue constamment. L’aide
officielle américaine aux autres pays a diminué de
37 % entre 1992 et 1995.
À cause de la sensibilité du Vatican et de
Bien que l’humanité augmente de 80 millions par
certaines nations en développement, les
année, le taux de naissance diminue rapidement
recommandations pour le contrôle de population
partout dans le monde, parce qu’avant tout les
ont été rendues inintelligibles par les
gens veulent de plus petites familles, même dans
bureaucrates. Les délégués ont demandé des
les pays dont les gouvernements n’approuvent
« politiques démographiques appropriées »
pas la contraception. .
Le déclin actuel de la biodiversité est le résultat de La perte d’espèces s’accélère à mesure que les
l’activité humaine et représente une menace
humains envahissent les habitats et fragmentent
grave pour le développement humain
les écosystèmes. Une convention anémique sur la
diversité biologique a été ratifiée par 161 pays
(pas par les États-Unis)
2.7.3 Globe
À l'échelle du globe, on observe que la biodiversité est pauvre aux pôles et qu'elle s'accroît vers l'équateur. On
a observé aussi qu'il y a plus de variétés de plantes là où le sol est pauvre. Afin de préserver la biodiversité,
certains ont conclu que les pays tropicaux, aux sols pauvres, ne devraient pas essayer de développer leur
agriculture à cause de la nature de leur sol (ce qui rend aussi les humains pauvres) mais devraient plutôt
développer leurs ressources minérales.
3. Notions d'écologie
3.1 Écologie
Étude des relations entre les organismes et leur environnement. Elle inclut les interactions avec le monde
physique mais aussi avec les membres d'autres espèces ainsi que de la même espèce. L'écologie se divise en
29
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
deux branches, l'écologie des écosystèmes et l’écologie des populations.
3.2 Écologie des écosystèmes
Les écosystèmes sont considérés comme trop complexes pour que chacun de leur composant soit étudié
séparément; ils sont donc étudiés comme des unités fonctionnelles.
3.3 Écologie de populations
C'est un peu l'opposé de l'écologie des écosystèmes. C'est l'étude de chacun des composants d'un
écosystème afin de comprendre comment celui-ci fonctionne.
3.4 Écosystème
Un écosystème est un système biologique de traitement de L'ÉNERGIE provenant
du soleil, dont les composants ont évolué ensemble pendant une longue période de
temps.
L'énergie est la base de la vie sur Terre. Selon la deuxième loi de la thermodynamique, une partie de
l'énergie devient inutilisable lorsqu'on la transfère ou lorsqu'on la transforme d'un état à un autre (barrage
hydroélectrique changeant l'énergie potentielle de l'eau en énergie électrique, un réacteur nucléaire utilisant
l'énergie atomique pour produire de la vapeur pour faire tourner une turbine) parce qu'elle est convertie en
chaleur et se dissipe. En d'autres mots, dans un système fermé, l'énergie finit toujours par devenir inutilisable
et le désordre s'installe dans le système, un peu comme le désordre s'installe dans un bureau si on ne
dépense pas l'énergie nécessaire pour faire de l'ordre quotidiennement. Donc, si un système est "fermé" (= il
ne reçoit pas d'énergie de l'extérieur), l'entropie deviendra toujours maximale. La mort d'un organisme vivant
est le résultat de l'entropie (l’organisme ne peut plus utiliser d'énergie pour maintenir l'ordre dans ses
composantes... et le calcium rentre massivement dans les cellules).
Les écosystèmes ne font pas exception à cette règle: les plantes captent l'énergie du soleil. En ingérant les
plantes, les animaux absorbent le fruit de l'énergie solaire (pour ne pas dire l'énergie solaire elle-même). Les
plantes permettent à tous les autres organismes d'échapper à l'entropie.
A mesure que l'énergie solaire est utilisée par les plantes, puis par les consommateurs des plantes, une
grande partie est dissipée en chaleur provenant de la respiration. On dit que l'entropie (=le désordre)
augmente. Donc, l'énergie nécessaire au maintien de l'écosystème terrestre s'épuiserait rapidement si ce
n'était du soleil.
Les populations de plantes et d'animaux sont les objets à travers lesquels l'écosystème fonctionne.
L'écosystème reçoit deux apports: des apports biotiques et des apports abiotiques.
- L'apport abiotique consiste en énergie radiante (chaleur, lumière) et de matière inorganique (eau,
CO2, O2).
- L'apport biotique inclut les autres organismes qui pénètrent dans l'écosystème ainsi que les
influences imposées par d'autres écosystèmes. Par exemple, l'écosystème qu'est un ruisseau est
influencé par l'écosystème terrestre à travers lequel coule le ruisseau.
Tous les écosystèmes sont formés de trois composantes: les producteurs, les consommateurs et la matière
abiotique.
- Le soleil est la source d'énergie utilisée par tous les systèmes
biologiques terrestres pour échapper à l'entropie.
- Aucune forme de vie sur terre n'est indépendante du soleil.
30
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Est-ce qu'un aquarium, une ville est un système fermé ?
POURQUOI UNE GIGANTESQUE USINE D'ALUMINIUM EST-ELLE EN AMONT DU PREMIER PARC MARIN AU CANADA ?
(ÉNERGIE, INDUSTRIE ET BIODIVERSITÉ)
La production de l'aluminium requiert à peu près la même quantité d'électricité utilisée par une petite ville ou encore la
même quantité d'énergie produite par une centrale nucléaire de taille moyenne. C'est pour cette raison que cinq des plus grandes
usines d'aluminium sont établies dans la région du Saguenay, au Québec, en amont du Parc Marin du Saguenay. Là elles ont
construit leur s propres barrages, dont l'entretien défaillant a contribué aux inondations du Saguenay en 1998*,. Elles fabriquent leur
propre électricité distribuée par leur propre réseau électrique.
Pourquoi l'énergie hydro-électrique est-elle si abondante (et bon marché) dans cette région ? Y a-t-il un lien avec la
présence des bélugas ? Oui. La réponse est dans l'histoire géologique récente du continent nord-américain. Il y a 12,000 ans, notre
continent était couvert de glace . L'état de New York, le Québec étaient couverts par une calotte glaciaire. À la limite septentrionale
(sud) de cette calotte, vivait une faune arctique abondante: des phoques, des ours polaires, des bélugas et des narvals vivaient audessus de ce qui était Ottawa. Le contient ployait sous le poids de cette glace. Puis le climat s'est réchauffé. Les glaciers se sont
alors retirés et ont labouré le continent comme d'immenses béliers mécaniques. Ils ont laissé à leur place des fjords, des lacs, et des
rivières. Le continent, libéré du poids de la glace, s'est élevé. Les lacs et les rivières se sont aussi élevés, fournissant un potentiel
hydro-électrique à l'industrie métallurgique.
Parce que le continent s'est relevé, la mer de Champlain s'est retirée, laissant à sec Ottawa et la plus grande partie de la vallée
du Saint-Laurent. Une petite population de bélugas est restée "en arrière", dans le sud, captive d'un segment de l'Estuaire du
Saint-Laurent centré sur l'embouchure du Saguenay, où elle est restée à cause des conditions quasi-arctiques qui y prévalent.
C'est à cause de cette conjoncture qu'aujourd'hui une importante industrie d'aluminium est située directement en amont (et
pollue) le parc marin du Saguenay, créé pour la protection de la population de bélugas la plus septentrionale au monde.
3.4.1 Stabilité
Tendance d'un écosystème à atteindre et à maintenir un équilibre.
Système stable: résiste au départ d'un état régulier. Si ce système est perturbé, il reprend rapidement son
état initial après une perturbation.
En général, les communautés stables ont une grosse structure biotique et entreposent les nutriments et
l'énergie sous forme d'une biomasse importante (ex.: une forêt avec ses arbres). La stabilité d'un système
dépend de sa résilience et de sa résistance.
3.4.2 Résilience
Capacité d'un système à maintenir sa structure et son patron de comportement lorsqu'il est affecté par une
perturbation.
Stabilité et résilience ne sont pas nécessairement liées: dans un écosystème aquatique, il n'y a pas
d'entreposage d'énergie et de nutriments sous forme de biomasse. Le système est peu stable mais a une
résilience élevée (ex.: un fleuve ou un lac ayant normalement un changement rapide d'eau reçoit
soudainement les effluents chargés de matière organique d'une ville. Les eaux brunes caractéristiques de
cette altération deviendront vite limpides si les effluents cessent).
Une forêt résiste bien à une attaque par le gel, par les insectes, par une tempête. Seule une agression très
sévère peut menacer la stabilité de ce système, le feu par exemple. Une fois que la forêt a brûlé, le retour à
l'état original est lent. La résilience est faible, la stabilité est élevée.
Diversité, résilience et stabilité:
La résilience d'un écosystème est plus grande si un écosystème comporte une grande diversité d'espèces.
a)
31
Si l'écosystème comporte une grande variété d'espèces, il y a de grandes chances pour que
plusieurs espèces remplissent des fonctions qui se chevauchent. Si une espèce est sensible à un
changement environnemental qui survient dans cet écosystème, et est affectée par ce changement, il
y a de grandes chances pour qu'une autre espèce qui remplit des fonctions semblables soit résistante.
Le nombre d'individus de cette dernière espèce augmentera et compensera le nombre réduit de
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
l'espèce affectée. Le système ne sera pas ou peu affecté par le changement.
Exemples:
1)
dans l'acidification d'un lac, la biomasse totale de groupes divers (cladocéranes, copépodes,
rotifères, zooplancton total) reste la même en dépit du fait que chacun de ces groupes
taxonomiques perd une espèce entière étant donné que les individus appartenant aux espèces
résistantes au pH acide prolifèrent alors que les individus appartenant aux espèces sensibles
meurent.
2)
des prairies dont la biodiversité a été maintenue restent productives en temps de sécheresse
lorsque comparées à des prairies dont la biodiversité a été appauvrie (par des bovins ou la
culture). Ceci est dû au fait que les prairies dont la biodiversité est grande comportent des
espèces végétales résistantes à la sécheresse. En Australie occidentale, plusieurs espèces de
Acacia ont des températures différentes pour le déclenchement de la germination. Les prairies
qui ont ces plantes se font coloniser par Acacia après des feux de différentes intensités. Après un
feu (de prairie), la fixation de l'azote dans le sol à partir de l'atmosphère sera donc assurée
quelles que soient l'intensité et la durée du feu.
Le corollaire est que moins il y a d'individus dans un écosystème, moins cet écosystème est
résilient (l'extinction d'une espèce aura des répercussions sur tout l'écosystème en question).
3)
Parce que l'écosystème côtier compte peu d'espèces, il est durement ébranlé par la
disparition d'une seule espèce, la loutre. Sur la côte de l'Alaska, les loutres se nourrissent
normalement d'oursin. (Les loutres sont le seul prédateur normal de l'oursin dans cette partie du
monde. L'oursin se nourrit normalement de kelp, une algue marine. La disparition des loutres, soit
par la chasse (Science 185:1058 , 1974), soit par la prédation par les orques, entraîne la
prolifération des oursins et la disparition du kelp.
Plus la période de temps considérée est longue, plus le nombre d'espèces est important pour
assurer la stabilité d'un écosystème, parce que les conditions environnementales ont beaucoup
plus de chance de changer au cours d'une longue période.
Aucune espèce animale ou végétale n'est superflue même si sous des
circonstances environnementales données, certaines ont l'air de l’être.
b)
Une grande diversité des interactions trophiques facilite le flux d'énergie en fournissant des routes
alternatives à la circulation de l'énergie. Le flux d'énergie entre différents niveaux trophiques est alors
sujet à moins de variation (=est plus stable). Ex.: les sauterelles, les renards, les lapins, les oiseaux
carnivores.
c)
La diversité des plantes réduit la transmission des pathogènes spécifiques à une espèce parce
que la distance moyenne entre deux plantes de la même espèce est plus grande en milieu de grande
diversité. Ex.: maïs en culture
d)
La diversité des espèces diminue l'effet de l'invasion d'une espèce exotique.
Exemple de cas: Anticosti. Anticosti est une île gigantesque (7,923 km carrés) dans le Golfe du SaintLaurent. Son histoire est unique dans l'histoire du Canada et malheureusement peu connue. En 1896, un riche
industriel français, Henri Menier, décidait d'en faire son paradis de chasse personnel. Il y introduisit quelques
dizaines de chevreuils (Odocoielus virginianus) et des renards argentés (pour la production de la fourrure) et fit
exterminer tous les prédateurs. Il acheta aussi les villages, desquels les habitants devinrent ses locataires. Il se déclara un
monarque et fit brûler un village anglophone à la pointe est de l'île. Cet acte prit des proportions incontrôlables à Ottawa où le Parlement
... parla d'un complot de la France pour reprendre le Canada.
La surpopulation actuelle de chevreuils donne le tableau suivant:
32
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Perte de biodiversité: sauf pour les arbres, toute la végétation qui est à portée de gueule de chevreuil est
disparue: la forêt, constituée presque uniqement d'épinettes, a l'apparence d'un terrain de golf bien entretenu
où poussent des arbres au tronc nu en bas de 1.5 mètre de hauteur. Il y a quelques pousses de bouleaux, de
peupliers et de pins seulement aux endroits hors d'atteinte des chevreuils, comme dans des lots clôturés. Il n'y
a donc pas de buisson ou de couvert végétal au sol.
Chevreuils: Dans d'autres populations nord-américaines de chevreuils, la densité maximale est de 12
chevreuils par km carré. Cette densité baisse à 9-10 chevreuils par km carré après un hiver normal. À
Anticosti, la population de chevreuils est de 120,000 à l'automne, soit 15 chevreuils au km carré, et de 10-12
chevreuils par km carré au printemps. La cause de mortalité la plus importante des chevreuils d'Anticosti serait
la rigueur des conditions climatiques en hiver. Les chevreuils se nourrissent normalement de tiges, bourgeons
et feuilles. En hiver dans l'Est du Canada, la diète se compose de cèdre et de différents arbres à bois dur. À
cause de la taille de la population, de l'appauvrissement de la végétation, des hivers généralement rigoureux
(156 jours, abondance de neige rendant inacessibles les rares plantes présentes au sol), la nourriture
disponible en hiver est le facteur majeur qui limite la taille de cette population. En hiver, Picea et Abies
balsamea composent 95 % de la biomasse disponible comme nourriture et les chevreuils ingèrent aussi les
lichens qui poussent sur les arbres tombés, ce qu'ils ne feraient pas dans des conditions plus normales. Ces
facteurs expliquent que les réserves adipeuses baissent dramatiquement de l'automne (chez les faons, 15.3
%) au printemps (0.2 %).
Virus: parmi les populations d'ongulés sauvages, les chevreuils d'Anticosti ont le plus taux le plus élevé de
séropositivité pour l'herpès bovin 1 (le même virus qui cause IBR) et ont un taux élevé pour le PI3. Par contre,
ils sont séronégatifs au BVD, un virus courant chez les bovins et chevreuils du continent.
Conclusion: la forêt boréale a accommodé l'introduction d'un hôte non indigène aux dépens de sa
biodiversité.
L'économie de l'île dépend d'une "monoculture" animale (qui peut favoriser la transmission des agents
infectieux). L'introduction de bovins dans l'île pourrait introduire des virus pour lesquels les chevreuils sont
immunologiquement naïfs. La monoculture pourrait alors s'effondrer à cause d'une épidémie dévastatrice.
L'économie de l'île, pas reluisante avec plus de 53 % de chômage, repose entièrement sur les activités
forestières que sont la chasse et la coupe de bois. Si la population s'effondrait, la coupe de bois augmenterait
probablement pour compenser la perte économique de la chasse. De plus, on considère sérieusement
Anticosti pour l'exploitation d'huile et de gaz. Il n' y a pas de doute que les pressions pour ce type d'exploitation
augmenteraient.
Pour alléger la dépendance de l'économie locale envers une "monoculture" précaire, il serait souhaitable de
limiter la population de chevreuils soit en protégeant des secteurs de la forêt, en augmentant la chasse (pas
évident), en effectuant des abattages ou en introduisant des prédateurs tels que des lynx, loups, cougars (pas
évident à cause de la possibilité d'introduire des maladies dont la rage chez les renards argentés aussi très
nombreux; des prédateurs déplaceraient aussi la population de renards argentés qui pourraient devenir une
nuisance).
- Revue Vétérinaire Canadienne 42: 638-641 (2001)
Diversité, résilience, stabilité et réchauffement global
Régions tempérées: Selon les modèles mathématiques, le réchauffement global sera plus marqué aux
latitudes tempérées (les nôtres), là où la diversité est moindre. Les changements climatiques auront donc un
plus grand effet sur les écosystèmes de nos latitudes parce qu'ils sont moins biodiversifiés, et donc moins
stables et moins résilients.
Régions tropicales: Animaux des régions tropicales: Les régions tropicales perdront beaucoup d'espèces et
les espèces survivantes qui remplissaient les même fonctions que celles disparues prendront de l'expansion.
Ces régions montreront moins de changements dans l'ensemble que les régions arctiques et tempérées.
Partout: Normalement, les patrons de migration des animaux changeraient pour s'adapter aux changements
globaux et/ou les animaux de régions chaudes pourraient migrer vers le nord. Cependant, 1) le réchauffement
global est très rapide. Il n'est donc pas sûr que les animaux aient le temps de changer ces comportements
ancestraux. 2) Les habitats naturels de ces animaux, (ou les habitats naturels qu'ils pourraient habiter) ont été
réduits et/ou fragmentés par l'activité humaine.
33
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Ils n'ont simplement pas de place où aller !
Voir: Carbone
3.4.3 Productivité
Un écosystème à grande biodiversité est aussi plus producteur. C'est parce que les espèces de plantes
voisines, dans un même champ par exemple, se complètent fonctionnellement. Chacune profite des
caractéristiques de l'espèce de plante voisine parce que chaque espèce peut exploiter des conditions
particulères.
3.4.4 Producteurs
Les producteurs (ou autotrophes) capturent l'énergie brute, le plus souvent celle du soleil. Ce sont en général
les plantes vertes. L'énergie accumulée par les plantes se nomme production ou plus spécifiquement,
production primaire, parce que c'est la première forme sous laquelle l'énergie est entreposée. Les plantes
fixent l'énergie du soleil et manufacturent la nourriture à partir de substances organiques simples (sucres,
acides aminés, et inorganiques (O2, CO2, H2O). Le métabolisme autotrophique est au maximum dans les
couches supérieures de l'écosystème, le toit des forêts et la surface des lacs et des océans.
3.4.5 Consommateurs
Les consommateurs (ou hétérotrophes) sont les herbivores et les carnivores. Ils se servent de la nourriture
entreposée par les autotrophes (plantes), la réarrangent et finalement décomposent les matériels complexes
en composés inorganiques simples. Les hétérotrophes se divisent en deux sous-systèmes, les
consommateurs et les décomposeurs. Les consommateurs se nourrissent de tissus vivants et les
décomposeurs dégradent le tissu mort en substances inorganiques.
3.4.6 Production nette
La production nette (par opposition à l'énergie primaire) est la quantité d'énergie disponible pour les
hétérotrophes. Par exemple, 45% de la production nette d'un marais est perdue dans l'eau de l'estuaire.
3.4.7 Chaîne alimentaire
L'énergie entreposée dans les plantes passe dans un écosystème à travers une série d'étapes constituées de
"manger" et "être mangé". Une chaîne alimentaire peut être représentée par une série de flèches chacune
pointant d'une espèce à l'autre et dans laquelle l'espèce qui pointe est l'espèce mangée par l'autre.
Cependant, aucune de ces relations n'est purement linéaire. Les ressources alimentaires sont partagées,
particulièrement au début d'une chaîne alimentaire. La même plante est ingérée par une variété de
mammifères et d'insectes. Un même animal peut être consommé par plusieurs espèces de prédateurs. Ainsi,
les chaînes alimentaires deviennent interconnectées et forment un réseau alimentaire, réseau dont la
complexité varie à l'intérieur d'un même écosystème et entre des écosystèmes différents.
Parce que le transfert d'énergie est inefficace, les chaînes alimentaires ont rarement plus de 3 /4 niveaux
trophiques. À mesure que le niveau trophique s'élève, la biomasse diminue.
Les écosystèmes hautement productifs ne sont pas caractérisés par des chaînes plus longues mais par un
plus grand nombre d'espèces et donc par des réseaux alimentaires plus complexes. Les réseaux alimentaires
qui sont dans des environnements changeant (caractérisés par des variations en température, en salinité, en
pH, humidité ou autres conditions) (Ex.: forêt boréale) tendent à avoir des chaînes alimentaires plus courtes
avec moins de niveaux trophiques que les réseaux alimentaires situés dans des environnements constants
(forêt tropicale, océan).
Exemples :
Forêt boréale:
graines ⇒ rongeurs ⇒ buse
Océan:
Plancton ⇒ petit poisson ⇒ gros poisson ⇒ petit cétacé (marsouin) ⇒ gros cétacé (orque)
34
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
3.4.8 Niveau trophique
C'est un palier dans une chaîne alimentaire. (Ex.: les animaux se nourrissant de plantes, les sauterelles par
exemple, occupent un seul niveau trophique). Cependant la plupart des animaux aux niveaux supérieurs
participent à plusieurs paliers à cause de leur diète variée. Le premier niveau trophique est occupé par les
plantes, le second par les herbivores (consommateurs de premier niveau). Le troisième niveau est occupé par
les loups, par exemple.
Il y a perte d'énergie à chaque palier. C'est pour cette raison que la plupart des chaînes alimentaires n'ont pas
plus de quatre ou cinq niveaux trophiques. Ainsi, de 1000 kilocalories d'énergie de plante, seulement 100
kilocalories sont transformées en tissu d'herbivore, et 10 kilocalories sont transformées en tissu de carnivore
de premier niveau. À mesure qu'on s'élève dans les niveaux trophiques, il y a diminution de la biomasse. (Ex.:
tous les ruminants de la terre pris ensemble pèsent beaucoup moins que l'ensemble des végétaux qu'ils
consomment).
3.4.9 Interdépendance entre écosystèmes
Tous les écosystèmes sont interdépendants. En d'autres mots, des changements dans un écosystème
peuvent avoir des répercussions inattendues dans un autre écosystème qui est indépendant en apparence.
Ex.: écosystème côtier et écosystème océanique.
Écosystèmes côtier et océanique (Orque, phoques, loutres, oursins)
Une chaîne alimentaire côtière est sous contrôle des loutres (top-down)
Loutres d'Alaska ⇒ oursin ↓ ⇒ kelp ↑
Une chaîne alimentaire pélagique est sous contrôle de l'orque:
Poissons ⇒ phoque et otaries ⇒ orque
Quand il y avait beaucoup de phoques (en Alaska), l'écosystème côtier était sous le contrôle des loutres
La surpêche (écosystème pélagique) a attaqué indirectement la base de la chaîne alimentaire, le kelp.
Surpêche ⇒ poissons ↓ ⇒ phoques ↓ ⇒ orques épaulards ⇒ ↓ loutres d'Alaska ⇒ oursin↑ ⇒ kelp ↓↓
- (Science 282: 473-475. 1998)
Ainsi l'écosystème côtier a été altéré par un changement dans l'écosystème pélagique.
Écosystèmes océanique, aquatique et terrestre (Saumon et forêt)
Les forêts le long des cours d'eau sont importante pour les saumons. En effet, l'ombre produite par les arbres
protègent les cours d'eau contre le réchauffement du soleil et garde donc l'eau froide, une condition nécessaire
au frai des saumons. Les arbres procurent aussi des débris végétaux qui constituent des abris pour les
embryons de saumons et les alevins (J Helfield, R.. Haiman, Ecology sept 2001). En retour, les poissons
contribuent à la santé des forêts: ils fertilisent les plantes avec l'azote, qui est le principal nutriment limitant la
croissance des plantes dans plusieurs forêts tempérées et nordiques. Ceci expliquerait que les arbres sités
près des lits des rivières sont souvent plus gros que les arbres situés loin de ceux-ci.
L'approche traditionnelle d'ajouter des saumons dans les rivières pour préserver les stocks de cette espèce ne
fonctionnerait pas parce qu'on se concentre sur une seule espèce (Voir Biodiversité).
Niveaux trophiques et maladies « Voir Maladie de la vache folle »
Les carnivores développent rarement des maladies à partir des agents infectieux qui infectent leur proie. C'est
une barrière écologique. Par contre, ils peuvent répandre l'agent. Par exemple, coyote et Yersinia pestis,
coyote et hantavirus, coyote et tremblante. Cependant, les animaux de même niveau trophique peuvent plus
facilement développer une maladie ou de nouvelles maladies à partir d'agents infectant des espèces de même
niveau trophique (Ex.: maladie de la vache folle).
35
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
3.5 Implications directes des principes d'écologie
•
•
Consommation d'énergie par les villes, l'industrie.
Maladie de la vache folle: on a nourri un herbivore avec un autre herbivore (deux animaux de même
niveau trophique) et ce de façon industrielle.
Contamination par les composés synthétiques stables (organochlorés).
•
3.6 Régulation des populations
Les facteurs influençant la densité de populations d'animaux sauvages sont encore l'objet d'un grand débat
parmi les biologistes et les écologistes. Deux modèles intéressants de régulation de population sont proposés,
le modèle "bottom-up"et le modèle "top-down". (Curieusement, les maladies ne sont pas considérées dans ces
modèles, probablement parce que des vétérinaires ne sont pas impliqués dans ces études).
3.6.1 Modèle "bottom-up"
La densité des organismes des niveaux inférieurs contrôlerait la densité des organismes des niveaux
supérieurs (bottom-up model). Par exemple, la densité des lièvres cause l'augmentation du nombre de lynx.
Ainsi, au Québec, on capturait 27,000 lièvres au lac Saint-Jean en 1988 et 1989, l'année suivante, 18,000 puis,
à l'automne 1994, on en piégeait à peine 4,000.
Apparemment, les lièvres nombreux broutent toutes les ramilles pendant l'hiver. Celles-ci deviennent rares, les
lièvres ont faim et peu survivent à l'hiver. Au printemps, les femelles gestantes qui survivent ont moins de
petits. Par conséquent, la population de lièvres diminue. Entre-temps, les lynx sont devenus plus nombreux
parce qu'il y avait beaucoup de lièvres. Mais leur nombre commence aussi à diminuer parce que les lièvres
sont moins nombreux. À ce stade, les lièvres et les lynx sont rares. Alors, la végétation commence à
récupérerb et les lièvres recommencent à proliférer et...
En résumé, parce que les maxima de lynx surviennent après les maxima de lièvres, le nombre de lièvres
(niveau trophique inférieur) déterminerait le nombre de lynx (niveau trophique supérieur).
Un autre exemple de contrôle "bottom-up" est la prolifération de renards arctiques à l'été 1994. Cet été-là, les
renards arctiques étaient nombreux à cause du grand nombre de lemmings dans le Grand Nord les années
précédentes. Le nombre de lemmings a subitement diminué à cause de la surpopulation. Les renards, privés
de leur proie habituelle, ont mangé les oisillons des oies de neiges. Comme résultat, la chasse à l'oie de
l'automne 1994 n'a pas été bonne du tout (est-ce que le nombre de chasseurs a diminué?).
Le modèle "bottom-up" prévoit que:
1) des corrélations positives surviennent entre les changements de densité entre des niveaux trophiques
adjacents (Ex.: lièvre-lynx), 2) des changements dans la production primaire (voir Définition) affectent les
niveaux trophiques plus élevés
b
P. Gingras, La Presse, 17 déc. 1994
36
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Modèle bottom-up
Feu de forêt, sécheresse, tempête
↓ végétation
nombre d'herbivores
2) la disparition de niveaux trophiques les plus élevés ne change pas la densité des niveaux moins élevés (Ex.:
la disparition des lynx ne devrait avoir que peu d'effets sur la végétation).
3.6.2 Modèle "top-down"
On a étayé récemment le modèle "top-down", c'est-à-dire qu'un changement de densité à un niveau trophique
supérieur est causé par un changement inverse de densité dans le niveau trophique supérieur. En d'autres
mots, les niveaux trophiques supérieurs peuvent contrôler la densité des niveaux inférieurs.
Par exemple, l'Isle Royale, dans le lac Supérieur, au Michigan, est un parc national d'une superficie de 544
km2, où on a noté que chaque diminution du nombre de loups est suivie d'une augmentation du nombre
d'orignaux (due à une diminution de la mortalité des veaux). Puis, la végétation est sévèrement
endommagée par le nombre accru d'orignaux (indépendamment de la pluviosité). À l'opposé, quand le
nombre de loups augmente (suite à l'augmentation du nombre de vieux orignaux qui sont des proies faciles), le
nombre d'orignaux diminue. Noter qu'en même temps que s'effectuait cette étude, un autre groupe travaillant
indépendamment au même endroit observait une épidémie de parvovirose chez ces loups. Croyez-vous que
l'épidémie de parvovirose (fatale) peut influencer les résultats du premier groupe (publiés dans une revue
prestigieuse comme Science) ?
Modèle top-down
↑ Loups
↑ Végétation
Donc, du moins à l'Isle Royale, ce sont les niveaux supérieurs, les loups, qui contrôlent la croissance du
niveau inférieur, la végétation (top-down model ou cascade trophique)33.
37
Pathologie de la faune 2002
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4. Altération de l'environnement par l'homme
(Science 277: 494-528. 1997; Science 279:988-989, 1998)
4.1 Surface terrestre
10 à 15 % de la surface terrestre est occupée par l'agriculture ou par des constructions urbaines ou
industrielles, et un autre 6-8% est occupé par des pâturages. Tous les écosystèmes sont altérés par
l'augmentation de CO2. La plupart des écosystèmes ont subi la chasse et l'extraction de ressources naturelles.
Au total, la fraction de la surface terrestre transformée et dégradée par l'espèce humaine est entre 39 et 50
%.
La surpopulation humaine est responsable de la perte de
l'habitat des autres espèces vivantes. Cette perte est la plus
grande menace pour toutes les espèces d'animaux sauvages.
La transformation de la surface terrestre par les humains est la principale force responsable de la perte
de biodiverstié dans le monde. La transformation de la surface terrestre contribue à environ 20 % des
émissions actuelles anthropogéniques de CO2. Elle contribue encore plus à la croissance des concentrations
de méthane et oxyde nitreux, deux autres gaz importants dans l'effet de serre. La combustion associée à la
production de ces gaz change la chimie de l'atmosphère, élevant les niveaux de monoxyde de carbone et
entraînant des épisodes de pollution intense de l'air dans des endroits inhabités de l'Afrique et de l'Amérique
du sud.
4.2 Océans
La population humaine est concentrée près des côtes (environ 60 % dans une bordure de 100 km de large). Le
résultat de cette concentration est que de grandes étendues de terres humides qui font la médiation entre la
mer et la terre ont été altérées. Par exemple, 50 % des écosystèmes de palétuviers (mangroves) ont été
détruits globalement. Plusieurs pêcheries ciblent des prédateurs de niveau trophique élevé, ce qui a un effet
sur l'écosystème hors proportion avec le nombre de poissons qui est enlevé. En 1995, 22 % des pêcheries
étaient surexploitées ou déjà épuisées et 44 % étaient à la limite de l'exploitation. De plus, il y a un gaspillage
énorme. L'industrie de la pêche jette jusqu'à 27 millions de tonnes d'organismes marins non désirés par an, ce
qui est environ le tiers de la quantité totale de poissons rapportée sur terre. Les engins de pêche, tels les
chaluts, endommagent l'habitat en raclant le fonds. Au Canada, les quotas imposés aux pêcheurs rendent les
gros poissons plus payants que les petits. Quand ils ont dépassé leurs quotas, les pêcheurs rejettent à la mer
les poissons plus petits et gardent les gros avant de retourner au port, où l'inspecteur va déterminer si le poids
de la prise a atteint ou non le quota. Cette pratique a été (et est) dévastatrice pour les stocks.
Un poisson sur quatre consommé dans le monde provient de l'aquaculture. À première vue, l'aquaculture
semble être un moyen logique de diminuer la pression de la surpêche. Or, un expert de UBC (D. Pauly)
remarquait récemment que l'élevage de poissons contribue en fait à vider les océans. En effet, on élevait
traditionnellement des poissons (carpes, poissons-chats) qui se nourrissent de plantes ou de déchêts
organiques. Ce type d'élevage est remplacé par l'élevage d'animaux marins carnivores, tels que les saumons,
les crevettes, le thon et la morue, qui rapporte plus. Ce type d'élevage requiert la pêche de poissons sauvages
(la production d'une livre de aumon ou de crevette, de thon ou de morue demande 2 à 5 livres de poisson
sauvage, comme le maquereau, la sardine ou le hareng). Il recommande que l'élevage des espèces carnivores
soit délaissé en faveur de l'élevage d'espèces herbivores telles que les carpes, tilapia, poisson chat, moules.
Dans le Golfe du Mexique et dans l'océan Atlantique, entre 1976 et 1996, le nombre des éclosions (blooms *)
d'algues a augmenté 4 fois, de 74 à 329. Les mortalités massives de poissons étaient rarissimes en 1973.
Cent quarante ont été signalées en 1996. Les problèmes de santé humaine dus à l'eau des côtes (allant du
38
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
swimmer's itch à la perte de mémoire induite par Pfiesteria en allant au choléra) ont augmenté de 2 en 1966 à
118 en 1996 (Paul Epstein, Harvard Medical School 1999). L'épidémie de Pfiesteria à elle seule a coûté $ 60
millions US en pertes de pêcheries et de tourisme.
4.3 Azote
L'azote est unique parmi les éléments requis pour la vie en ceci que son cycle inclut un vaste réservoir
atmosphérique qui doit être "fixé" (=combiné avec le carbone, l'hydrogène ou l'oxygène) avant de pouvoir être
utilisé par les organismes (voir Origine de la biodiversité, Conditions primitives). Jusqu'au début du siècle,
l'azote était fixé à partir de l'atmosphère par les microbes et la foudre. Depuis, l'application des fertilisants
d'une part et la combustion de matières fossiles d'autre part (qui produit les nitrates) sont les sources
principales d'azote. Les activités humaines produisent 60% de tout l'azote déposé sur les terres chaque année.
20 % de tout l'azote va dans les rivières, et ce, peu importe l'endroit et le climat.
Les effets de l'augmentation de la fixation d'azote sont multiples:
1) Dans l'atmosphère, la quantité d'oxyde nitreux, un gaz à effet de serre, augmente globalement
2) Contribution des nitrates aux pluies acides et au smog photochimique
3) Augmentation des gaz réactifs qui contiennent de l'azote.
4) L'azote augmente la productivité des écosystèmes, mais en décroît la biodiversité.
L'azote présent sur les terres est entraîné dans les rivières et les estuaires par les pluies. Les estuaires
subissent l'eutrophication, phénomène qui survient quand les concentrations d'azote deviennent excessives et
causent la prolifération d'algues à la surface des eaux estuariennes et des côtes. Ces plantes meurent, coulent
au fond et pourrissent, privant l'eau d'oxygène, ce qui tue les poissons habitant à ces profondeurs. Le déclin de
la morue de la Baltique survenu autour de 1990 est probablement dû à ce phénomène. Les plantes pourrissant
au fond ont probablement interféré avec la reproduction de la morue. Le même phénomène a été noté dans le
Golfe du Mexique en 1997-98. Une zone hypoxique s'étendant jusqu'à 20 mètres de profondeur et de la taille
du New Jersey y est présente, à cause du déversement des eaux du Mississippi chargées de fertilisant. Les
pêcheries de crevettes du Golfe du Mexique ont été dévastées à cause de ce "trou noir" biologique.
L'azote présent sur les terres est entraîné dans les rivières et les estuaires par les pluies. Les estuaires
subissent l'eutrophication, phénomène qui survient quand les concentrations d'azote deviennent excessives et
causent la prolifération d'algues à la surface des eaux estuariennes et des côtes. Ces plantes meurent, coulent
au fond et pourrissent, privant l'eau d'oxygène, ce qui tue les poissons habitant à ces profondeurs.
• Le déclin de la morue de la Baltique survenu autour de 1990 est probablement dû à ce phénomène. Les
plantes pourrissant au fond ont probablement interféré avec la reproduction de la morue. Le même
phénomène a été noté dans le Golfe du Mexique en 1997-98. Une zone hypoxique s'étendant jusqu'à 20
mètres de profondeur et de la taille du New Jersey y est présente, à cause du déversement des eaux du
Mississippi chargées de fertilisant. Les pêcheries de crevettes du Golfe du Mexique ont été dévastées à
cause de ce "trou noir" biologique.
• L'élevage du porc en Bretagne: une grande partie du lisier produit par les nombreux élevages de porcs
est épandu dans les champs. Une grande partie de ce lisier est entraîné dans la mer par les eaux de pluie,
toute proche. Le résultat est que les plages sont couvertes à chaque marée par une couche gluante et
puante d'algues vertes de 1 mètre d'épaisseur. Cette plaie fait fuir les touristes. Or l'industrie du porc en
Bretagne génère 25 millions de francs annuellement alors que l'industrie touristique en génère 5 milliards.
Voyez-vous un parallèle avec la situation au Québec ?
Les plantes terrestres sont aussi affectées. La combustion de matières fossiles (charbon, pétrole, gaz naturel)
dégage des nitrates qui causent les pluies acides, ce qui appauvrit les sols des forêts. Les ions nitrates sont
chargés négativement et chassent les ions positifs des sols (Mg++, Ca++, H+) et les sols des forêts
deviennent déficients en ces minéraux et ions. L'azote est libéré des fertilisants en oxyde d'azote et en
ammoniaque (les fertilisants contiennent des fèces animales, riches en azote). Puis, l'azote de l'air est absorbé
par les feuilles de la végétation, ce qui fait accélérer leur croissance, mais les arbres sont déficients en
minéraux à cause des pluies acides causées par les nitrates! Les arbres deviennent alors vulnérables aux
insectes et aux fungi.
39
Pathologie de la faune 2002
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Combustion -> nitrates dans air -> pluies acides -> appauvrissement des sols
Fertilisants - > azote dans air↑ -> croissance des plantes↑- > susceptibilité aux agents pathogènes ↑
Certaines espèces végétales poussent mieux en présence de beaucoup d'azote. Ces espèces sont favorisées
au détriment d'autres espèces, d'où réduction de biodiversité.
Ex.: Certaines espèces de phytoplancton prolifèrent et étouffent les autres espèces.
Certaines espèces d'algues prolifèrent.
4.4 Carbone
- La quantité de CO2 contenue dans l'atmosphère est 33 % supérieure à ce qu'elle était
avant l'ère industrielle.
- La combustion de matière fossile par l'espèce humaine est la principale source de cette
augmentation.
- Le consensus actuel (janvier 2000) est que cette augmetnation de CO2 cause un
réchauffement de l'atmosphère.
- Les chercheurs ne s'entendent pas sur l'importance de ce réchauffement ni sur ces
effets.
Surproduction de carbone
La vie sur terre est basée sur le carbone. Le CO2 de l'atmosphère est le principal substrat de la photosynthèse.
Les plantes vertes enlèvent donc le CO2 de l'air et le remettent dans le sol. Au contraire, l'activité humaine
extrait le CO2 du sol et le libère dans l'atmosphère, par le biais de l'industrie pétrolifère (huile) et minière
(charbon) suivie de la combustion de charbon et de pétrole (combustibles fossiles, résidus de la vie des temps
passés), et en convertissant des forêts et des prairies en écosystèmes à faible biomasse, où paissent les
animaux, qui émettent le CO2 dans l'atmosphère. Le résultat des deux activités est que le carbone organique
des roches, des organismes vivants et des sols est libéré dans l'atmosphère sous forme de CO2.
La source d'énergie communément employée par l'espèce humaine est la combustion de matières fossiles,
des composés qui contiennent une grande quantité de carbone. Cette combustion génère du CO2
(Pensez aux automobiles dont le moteur fonctionne pour rien à la porte des dépanneurs pendant que l'automobiliste est parti acheter
ses... cigarettes, ou encore aux démarreurs à distance, ou aux camions dont le moteur fonctionne de longues heures à l'arrêt, pour rien).
"En 2001, les Etats-Unis font face à une crise de l'énergie. GW Bush veut permettre l'exploration et l'exploitation pétrolière de l'Arctique.
Ainsi, des puits vont être creusés dans une réserve stricte et des pipelines vont traverser des espèces naturels, tout cela pour permettre
aux véhivules à quatre roues motrices californiens qui font 14 milles/gallon de remplir leurs réservoirs" (- Vermont Public Radio mars
2001)
Le bioxyde de carbone est en grande partie responsable du réchauffement de l'atmosphère par un effet de
serre. Nous avons vu que la photosynthèse extirpe le bioxyde de carbone de l'atmosphère. La végétation
diminue donc la quantité de CO2 dans l'air, qui est un des principaux gaz à effet de serre.
Un Canadien a découvert en 1998 que les barrages hydroélectriques sont responsables de 14 % des
gaz à effet de serre relâchés dans l'atmosphère. En effet, les arbres et le sol des forêts noyées
pourrissent. Ensemble, ils libèrent du méthane et le bioxyde de carbone qui avait été fixé dans la
cellulose et les matières organiques du sol pendant des millénaires.
Les taux moyens de CO2 dans l'air ont augmenté de 315 ppm en 1957 à 362 ppm en 1997. L'augmentation de CO2 actuelle représente le
signal le mieux documenté et le plus clair de l'altération du système Terre par les humains. On a analysé des bulles d'air emprisonnées
dans la glace d'Antarctique et on a y trouvé des concentrations de 280 ppm, stables pendant des milliers d'années jusqu'en 1800. Puis,
les concentrations ont augmenté de façon exponentielle.
En résumé, le consensus scientifique est que l'activité humaine a augmenté les niveaux atmosphériques de
CO2 d'au moins un tiers.
40
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Effet de serre
Il y a 6,000 ans, le climat planétaire s'est réchauffé, puis s'est refroidi. Puis s'est réchauffé encore il y a 1,000
ans alors que les Vikings ont pu cultiver des fermes au Groenland et ont peut-être même exploré les côtes du
Labrador. Cette période a été suivie d'une petite ère glaciaire. Qui a duré jusqu'en 1850. La température s'est
réchauffée depuis cette époque, surtout entre 1900 et 1940. Après la deuxième guerre mondiale,
l'augmentation de la population humaine et l'activité industrielle ont mis des milliards de tonnes de CO2 dans
l'atmosphère, résultant surtout de la combustion de combustibles fossiles (contenant une grande quantité de
carbone). Les rayons solaires passent à travers l'atmosphère, mais sont retenus dans l'atmosphère une fois
qu'ils sont réfléchis par la surface de la terre, parce qu'ils changent de longueur d'onde à cause des gaz à
effets de serre. L'énergie solaire ainsi retenue réchauffe l'atmosphère.
Une minorité de chercheurs doutent qu'après 1940, le climat ait vraiment commencé à se réchauffer. Plusieurs chercheurs, non la
majorité, interprètent le réchauffement comme étant une période interglaciaire "normale", et non comme le résultat de l'activité humaine.
ième
ième
et 17
siècles).
Ainsi, avant le Moyen-Âge, le climat était plus chaud que maintenant (avant la mini-ère glaciaire des 16
La question est complexe. Ainsi, curieusement, le réchauffement planétaire cause une augmentation de
l'évaporation des océans, des pluies, des chutes de neige dans l'Antarctique. La neige protégerait la glace
contre les rayons du soleil, la glace fondrait moins et le niveau des mers n'augmenterait pas, ou augmenterait
moins.
Nuages et évaporation: L'évaporation accélérée des océans pourrait bien aussi augmenter l'ennuagement, ce
qui diminue la quantité de lumière parvenant au sol et donc freine le réchauffement. Par contre, la vapeur
d'eau est elle-même un gaz à effet de serre.
Les nuages bas (cumulus) reflètent les rayons du soleil dans l'espace et donc diminuent le réchauffement. À
l'opposé, les nuages en altitude (cirrus) retiennent les rayonnements solaires réflétés par la surface terrestre et
donc contribuent à l'effet de serre.
Le sujet fait encore l'objet de débats pour plusieurs raisons. Ce n'est que depuis 1979 que des satellites font des observations régulières
sur la température du globe. L'interprétation des résultats donnés par les satellites n'est pas certaine. On s'est aperçu que l'on n'avait pas
tenu compte de l'altitude des satellites (ce qui change la température qu'ils lisent de la surface de la terre). Les stations terrestres ne
donnent pas les mêmes valeurs que les satellites et que les ballons-sondes. Certains prétendent que les villes (dont la température est
plus chaude) contaminent les données des stations terrestres. Même les plus sceptiques admettent que la chaleur urbaine affecte les
températures "locales".
Malgré tout, le consensus général chez les climatologues est que le climat de la terre s'est réchauffé de 1oC
au cours du 20 ème siècle, et qu'il a, et aura, des répercussions croissantes dans le siècle qui vient.
Réchauffement global et vie marine
Ours polaires: les ours polaires sont poussés à la famine à cause de la fonte de la calotte polaire. En
effet, les ours polaires se nourrissent de phoques. Pour capturer les phoques, les ours polaires ont absolument
besoin de la glace qui leur permet de vivre au large pendant l'hiver, là où est le phoque. Dans la Baie
d'Hudson, par exemple, les ours polaires ont moins à manger parce que la saison des glaces a été réduite de
trois semaines. Les ours ont moins de temps pour la chasse, ils retournent au printemps sur la terre avec
moins de gras pour les soutenir pendant l'été et l'automne.
Corail: Le CO2 a d'autres effets inattendus. L'augmentation de CO2 dans l'air augmente la quantité de ce
gaz qui se dissout dans la mer par simple équilibre. Le CO2 dissout fait diminuer le pH de l'eau (augmenter
l'acidité de l'eau de mer). La diminution du pH fait diminuer la concentration de carbonates de l'eau de mer. La
diminution du carbonate dissout dans l'eau de mer fait que les coraux ont de la difficulté à former leur
exosquelette.
Les scientifiques s'entendent sur le fait que la terre se réchauffe. En 2001,
le consensus scientifique est que l'activité humaine en est responsable par
l'augmentation de CO2.
Niveau des mers et réchauffement global
Les scientistes s'entendent pour dire que les glaces des pôles fondent à un rythme alarmant, à un rythme de 7
41
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
% par décennie (Science, 1ere semaine de décembre 1999). La glace arctique s'est amincie de 15 % par
décennie (elle est 40 % plus mince qu'il y a 40 ans). Si la fonte continue à ce rythme, l'océan Arctique pourrait
être libre de glace en été en 2050 ou avant.
Le passage du Nord Ouest pourrait être emprunté commercialement par des navires ordinaires une partie de
l'année ou même toute l'année à partir de 2010 (GM 5 fév 2000).
En Antarctique, quelque 300 km de glace qui couvraient la mer de Ross, en bordure du continent Antarctique,
ont disparu depuis le début du siècle. (Pour atteindre le pôle sud, les explorateurs et écotouristes modernes ont maintenant
ième
300km de moins à marcher qu'Amundsen, le premier homme à se taper le Pôle Sud, au début du 20
siècle. En effet, le bateau les
dépose directement sur le continent Antarctique et non au large, sur la mer gelée comme cela avait été le cas pour Amundsen).
La glace réflète 50 % de l'énergie solaire qu'elle reçoit. Au contraire, la surface sombre de la mer l'absorbe. Si la glace polaire fond, les
océans polaires joueront absorberont comme les autres océans 80 % de l'énergie qu'elles reçoivent, et contribueront donc au
réchauffement de l'atmosphère.
Le niveau des mers était 120 m plus bas il y a 20,000 ans, il augmente depuis et il va continuer à augmenter
aussi longtemps que les glaces polaires fondent. "Si la tendance continue", le niveau de la mer va augmenter
entre 50 cm et 1 mètre au cours des prochains 100 ans. Ainsi, le pays de Tuvalu, un atoll de 9 îles dans le Pacifique, le plus
petit pays au monde, pourrait bien avoir disparu de la carte à la fin du prochain siècle (2100). 10,000 personnes y habitent sur une surface
de 10 milles Km carrés. Ce pays est à une moyenne de 91 cm au-dessus du niveau de la mer (NP oct 1999). Les plus petites îles du pays
ont disparu au cours des dix dernières années. L'eau des puits est déjà salée. Les récoltes pourrissent parce que les racines des plantes
ne supportent pas le sel. Le pays n'aime pas la réponse des pays signataires de l'accord de Kyoto (Nations-Unies).
Munich Re, une compagnie d'assurance, d'Allemagne, estime en 1999 à $ 90 milliards par an les pertes causées par les désastres liés à
de mauvaises conditions climatiques, soit 11 fois les sommes de 1980 ( $ 7/8 milliards).
Il est intéressant de noter que les compagnies d'assurances sont complètement d'accord avec les scientistes sur le fait que la planète
s'est réchauffée (elles paient pour les dommages). De leur côté, pour des raisons évidentes, les compagnies de pétrole financent souvent
des recherches tentant de démontrer que le réchauffement global n'est pas dû à l'activité humaine, hypothèse maintenant largement
rejetée.
Le rôle des océans est la principale inconnue qui empêche la prévision précise des impacts que pourrait avoir
le réchauffement global sur les continents. Par exemple, il semble que pendant les réchauffements antérieurs
que la terre a connu (comme celui d'il y a 6,000 ans) et pendant lequels la glace des pôles a fondu, la
libération d'eau douce dans l'Atlantique Nord a ralenti énormément le Gulf Stream. Ce courant apporte
normalement la chaleur de l'Équateur vers l'Europe. Le ralentissement de ce courant avait alors causé
paradoxalement le refroidissement de l'Europe et de nombreuses chutes de neige sur ce continent. Ceci
pourrait se reproduire en même temps que l'inondation de la Hollande et du sud-est asiatique.
Réchauffement global et Canada
Le Bureau de l'assurance du Canada estime en 1999 que les sommes versées par les assureurs pour les
dommages causés par les conditions climatiques extrêmes doublent chaque 5 à 10 ans. Les modèles
prédisent que les hivers plus doux seront accompagnés d'inondations (comme celle de Red River, Manitoba,
en 1998 et celle du Saguenay en 1996), parce que l'augmentation de l'évaporation cause des précipitations
plus rares mais plus importantes, de tempêtes et de sécheresse (voir inondations) qui deviendront plus
fréquentes et plus graves.
On pense que c'est El Niño (courant chaud du Pacifique) et sa jumelle la Niña (courant froid) qui sont
responsables de ces changements. Le réchauffement global aurait augmenté la fréquence et l'intensité d'El
Niño (Kevin Trenberth, National Center for Atmospheric Research, 1999)
Selon l'accord de Kyoto signé en 1998, le Canada s'est engagé à diminuer sa consommation d'énergie (pour
diminuer la production de CO2, et donc le réchauffement de la planète) de 25% d'ici l'an 2010. Environ 500
fonctionnaires canadiens (et un budget annuel de $ 100 millions de dollars) sont mandatés pour trouver
comment mener cette tâche à bien ( - NP 9 oct 1999).
Stopper le réchauffement global
Pour arrêter le réchauffement global, il est urgent de diminuer le relâchement de carbone dans
l'atmosphère et de préserver la végétation qui est probablement la plus grande "éponge" à carbone.
Pour diminuer le relâchement de carbone dans l'atmosphère, on doit d'abord diminuer la consommation
inutile d'énergie (penser par exemple à la mode des quatre roues motrices et des minivans, qui ont des
moteurs plus gros, ou encore à l'utilisation des souffleurs de feuilles motorisés, ou des motomarines, ou
des tondeuses à gazon toutes mues par des moteurs deux temps).
D'autres sources d'énergie sans carbone doivent être développées: les marées peuvent être harnachées.
42
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
(il existe une usine marémotrice en France). Plus pratique, l'énergie éolienne (le Canada et
particulièrement le Québec sont très bien pourvus en ressources éoliennes). L'usage de l'énergie nucléaire
doit être au moins débattu. Quelques compagnies développent présentement l'hydricité, par laquelle
l'électricité est produite à partir de l'hydrogène. Les "fuel cells" produisent l'électricité à partir de
l'hydrogène. L'électricité peut aussi produire de l'hydrogène par électrolyse de l'eau. On a proposé
récemment de produire de l'énergie par des moyens hybrides. Les sables de l'Athabaska sont pauvres en
hydrogène et riches en carbone. Si on se sert de ces sables de nos jours, on relâche beaucoup de
carbone dans l'atmosphère sous forme de bioxyde de carbone. Les réacteurs nucléaires canadiens
pourraient produire de la chaleur pour l'extraction de pétrole à partir des sables, de l'électricité pour les
procédés de raffinage et de l'électricité pour la production d'hydrogène à partir d'eau pour enrichir les
pétroles obtenus en hydrogène. Les sables de l'Athabaska constitueraient alors une réserve de 330
milliards de barils de pétrole comparé aux réserves saoudiennes de 33 milliards de barils (David Sanborn
Scott, directeur de l'Institute for Integrated Energy Systems, University of Victoria, dans GM Oct 6, 2001).
4.5 Eau
L'eau est essentielle à toutes les formes de vie. Par la force de gravité, la condensation et l'évaporation, elle
contribue aux cycles biogéochimiques de la Terre et au contrôle de son climat. Une très faible proportion de
l'eau sur la terre peut être utilisée par les humains. Globalement, l'espèce humaine se sert de plus de la
moitié de l'eau douce accessible. Environ 70% de l'eau utilisée sert à l'agriculture. C’est donc l’agriculture
qui sera d’abord affectée par le manque d’eau. Les terres irriguées (17 % de toutes les terres agricoles)
produisent 40 % de toutes les cultures. "Seulement" 25 % de l'eau est utilisée par l’industrie, et 25% est
absorbé par la consommation humaine et autres besoins personnels. La plus grande partie est gelée ou salée.
97 % de l’eau de la Terre est de l’eau salée, 2 % est inaccessible (gelée aux pôles). Les quelques 12,600 km3
d’eau douce accessibles pour les besoins humains sont distribués inégalement. Le Canada a 26 fois plus
d’eau par habitant que le Mexique.
Les forêts jouent le rôle d'éponge, qui ralentissent l'eau de pluie et lui permettent de pénétrer dans le
sol, au lieu de s'écouler directement vers les cours d'eau (qui deviennent plus gros et débordent) puis vers la
mer. La coupe des arbres sur les versants des montagnes fait que les eaux de pluie traversent les terres et se
jettent dans les rivières sans être ralenties par les arbres et sans être absorbées par le sol ou sans retourner
dans l'atmosphère par évaporation. Ceci entraîne les inondations et les glissements de terrain assez forts pour
détruire les routes, fermes et même les pêcheries situées en aval. (Pour éviter les inondations, certaines
régions, érigent des murs protecteurs le long des rives. Ces aménagements repoussent simplement le
problème en aval. En Allemagne, Cologne est régulièrement inondée parce que les rives de la rivière qui la
traverse ont été aménagées en amont.
Le déboisement fait que "les robinets sont ouverts" et "que les éponges sont jetées à la
poubelle". - Seth Dunn, Worldwatch Institue, Novembre 1998
(L'année 1998 fut très mauvaise en terme d'inondations: Ouragan Mitch, YangTze, Bangladesh). Pensez aussi aux inondations du
Guatemala et du Venezuela à l'automne 1999. Les mauvaises conditions climatiques ont causé des pertes de 80 milliards de dollars
pendant la décennie 1980-90 alors que les pertes dues aux inondations pendant les premiers 11 mois de 1998 ont coûté $ 130 milliards!
L’eau potable diminue aussi. Ex. : Chine : Le Yangtze est pollué par 40 millions de tonnes de déchets industriels et domestiques
par jour. Le programme de développement des Nations Unies estime que 79 % des chinois boivent de l’eau contaminée. Les médecins
chinois rapportaient que le taux de mortalité de la rivière Hei dans la province de Ahui est 30 % plus élevée que la normale nationale.
Personne dans la région n’a été qualifié pour entrer dans l’armée au cours des dernières années. En 1995, le gouvernement déclarait
soudain que l’eau de la rivière Huaihe, de laquelle la Hei est tributaire, était impropre à la consommation. Ce qui laissa 1 million de
personnes habitant les rives sans eau potable. Les militaires camionnèrent de l’eau pendant un mois avant que le gouvernement
établisse un plan. La solution : fermer les 1,111 industries de pâtes et papier et les 413 autres usines qui jetaient leurs déchets dans la
rivière.
Afrique : C’est l ‘Afrique qui affronte les plus graves problèmes en ce qui a trait à l’eau. Les taux de diarrhée sont les plus élevés en
Afrique, à cause de la piètre qualité de l’eau. En Somalie, l’accès à l’eau est devenu une mesure de la prospérité et du statut social :
«Plus tu es pauvre, plus tu dois payer : si tu es riche, tu peux investir dans un puits. Si tu es dans la classe moyenne, tu peux t’acheter un
réservoir de bonne dimension. Si tu es pauvre, tu dois acheter l’eau à la bouteille».
Pour nous procurer l'eau, nous avons altéré extensivement les rivières par des diversions de cours ou des barrages. Aux États-Unis,
seulement 2% des rivières sont "intactes" et à la fin du siècle, les 2/3 de tous les cours de la terre seront ainsi altérés (barrages ou
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
déviations).
Le Colorado, le Gange et le Nil sont utilisés de façon si extensive que très peu de leur eau rejoint la mer. De grandes étendues d'eau
intérieures ont été si réduites par des diversions pour l'agriculture que leur niveau a considérablement baissé. La réduction dramatique de
la mer Oural par exemple a causé la disparition des poissons indigènes, la perte d'une pêcherie majeure. L'exposition du fonds marin
saturé de sel à l'air cause une source majeure de tempêtes de poussières. Le climat local est devenu plus sec et plus continental (il y a
plus de températures extrêmes).
Canada.
Le Canada possède 1/200 de la population mondiale et 1/5 de l'eau fraîche planétaire. Nous recevons donc 40
fois la moyenne par habitant de la planète. Ceci explique probablement le gaspillage phénoménal de l'eau
propre à notre pays. Le Canadien moyen utilise 350 litres d'eau par jour, qu'il obtient gratuitement ou à des
tarifs ridiculement bas. L'Européen moyen utilise la moitié de cette quantité et il la paie.
Grands Lacs
Les fertilisants épandus dans les champs sont de trois types: les engrais chimiques, la boue provenant des
usines de traitement d'eau et le fumier provenant des fermes. La boue provenant des usines de traitement
d'eau contient beaucoup des métaux lourds et autres contaminants, sans compter les condoms que l'on
retrouve dans les champs ontariens et québécois. Les bactéries comptent aussi pour une bonne proportion de
la biomasse.
Une quantité de fumier équivalant aux matières fécales de 100 millions d'humains est introduit dans l'eau du
sous-sol par les fermes du Québec et de l'Ontario (2001). Ces matières organiques ont plusieurs effets: non
seulement l'odeur ou le fait que l'eau devienne verte à cause des algues qui y croissent mais elles contiennent
aussi Excherichia coli en grande quantité et les antibiotiques et leurs métabolites qui sont administrés aux
animaux comme facteurs de croissance. La Commission mixte internationale, un organisme Canada-US qui
administre les Grands Lacs se réunissait en 2001 à Montréal. Tout ce qui est introduit dans l'eau finira dans les
Grands Lacs ou le Saint-Laurent. Or, dans les derniers 20 ans, parce que les cultivateurs ont ajouté des
drains, le fumier liquéfié s'échappe de plus en plus vite dans les ruisseaux et rivières. Les scientistes se sont
intéressés aux Grands Lacs quand les algues vertes nourries par les déchêts et le fumier ont fait d'une grande
partie du lac Érié une zone morte il y a 30 ans. 30 ans plus tard, la situation n'a pas changé. Qu'on en juge par
Walkerton. En 2001, la crise du fumier est pire en fait, et la commission a fait savoir que les méthodes
actuelles de culture sont insoutenables. Les unions agricoles disent que le fumier est un moyen de fertilisation
naturel. La commissionnaire canadienne à l'environnement répond que le fumier a un impact négatif plus
grand sur l'eau sous-terraine que les engrais parce qu'il est appliqué en plus forte concentration que ceux-ci.
Un rapport de la commission a déterminé que 34 % des puits otariens et le même pourcentage de puits du
Québec ont des niveaux inacceptables de bactéries, probablement à cause du fumier. "Nous permettons aux
fermes de libérer du matériel que nous ne permettrions pas aux usines municipales de traitement d'eau de
libérer" - John Jackson ex-directeur de Great Lakes United, une organisation mixte d'organisations de
résidents autour des Grands Lacs canado-américaines.
Au terme de la loi Ontarienne, le fumier est un nutrient, simplement un type de nourriture pour les plantes.
Montréal Québec.
Les Montréalais sont les plus grands consommateurs d'eau au monde. Chaque Montréalais consomme 350 litres d'eau par jour. En
calculant le volume qui parvient à l'usine d'épuration, il s'agit en fait de 1,350 litres (dont 250 à 400 litres ont fui dans les tuyaux du
réseau). L'eau usée de Montréal n'est traitée que depuis 1995. Avant 1995, tout ce qui allait dans les toilettes ou dans les bouches
d'égout allait directement dans le fleuve, accroché plus ou moins aux algues (300,000 tonnes métriques de matières fécales, par an, des
milliers de condoms souillés, de tampons sanitaires, de lames de rasoir, du gras, de l'huile, des étuis de verre de contact, des verres de
bière en plastique, des bouteilles de lave-glace, et même des affiches (recyclables) de déneigement de la Ville de Montréal.
Composition des 1350 litres d'eau potable consommés quotidiennement par Montréalais
Eau de pluie et fonte des neiges
300 l
Consommation domestique
300 l
Fuite du réseau d'aqueduc
250 à 400 l
Hôpitaux, école, universités
40 à 70 l
Restaurants, hôtels, PME,
280 à 450 l
commerces, industries
Les industries ont des compteurs d'eau parce qu'elles paient des taxes sur l'eau qu'elles consomment. On peut donc évaluer leur
consommation d'eau
66 industries produisent 6 % du volume reçu par l'usine d'épuration de Montréal. De façon incroyable, les institutions (hôpitaux, prisons,
écoles, CEGEP, Universités) n'ont pas de compteur d'eau et donc on ne connaît pas leur consommation. En clair, cela signifie que dans
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
une école (ou hôpital ou CEGEP ou université), quand les robinets ou les toilettes coulent, personne ne court pour les réparer. On estime
que les grands hôpitaux de Montréal consomment autant qu'une industrie classée comme grande consommatrice (sans payer une cenne
de taxe). Le gouvernement du Québec n'est pas pressé d'installer des compteurs dans ses édifices car alors la CUM pourrait lui réclamer
de l'argent. Noter que les résidences privées (sauf à LaSalle) n'ont pas elles non plus de compteurs et donc le consommateur est taxé le
même montant, quelle que soit la quantité d'eau qu'il consomme. À LaSalle, on taxe lorsque la consommation dépasse une certaine
limite. Ainsi, le gaspillage a énormément diminué dans cette municipalité.
Consommation d'eau (litres) par habitant (incluant tous les types de consommation)
Montréal
Détroit
Toronto
Mexico
Américain
France, Allemagne
1,350
960
600
350
400
Moins que 200
Afrique
30
En octobre 2001, la ville de Toronto adoptait un nouveau règlement pour la prévention de la pollution de
l'eau. Ce règlement empêche la le rejet de 40 substances toxiques par les industries et les commerces de
son territoire. À Montréal, en comparaison, les règlements, datant de 1980, ont ciblé 600 compagnies
parmi les plus polluantes et on leur a émis un "droit de polluer". Selon ce programme, les compagnies
doivent selon ce programme identifier les substances qu'elles rejettent à l'égout. Celles qui rejettent les
plus grands volumes doivent payer une redevance. La stratégie était que ces compagnie diminuent ellesmêmes le volume rejeté pour diminuer la redevance. Le désavantage majeur est que l'usine d'épuration de
la CUM doit souvent rejeter des eaux non traitées chargées en métaux lourds tels le cuivre, le plomb, et le
cadmium. Le résultat est que ces substances contaminent le fleuve, surtout la rive nord du Saint-Laurent,
du bout de l'île de Montréal, jusqu'à l'embouchure du lac Saint-Pierre, 60 km en aval. Ainsi, la reprise de la
baignade et des activités aquatiques qui était un des premiers objectifs du programme d'assainissement
urbain du gouvernement du Québec qui a entraîné des dépenses de 7 milliards depuis 15 ans ne pourra
jamais être réalisé dans les circonstances actuelles (B. Bisson. La Presse 20 oct 2001)
4.6 Toxicologie environnementale
Le métabolisme des composés xénobiotiques se fait par deux systèmes enzymatiques :
le système d’oxygénation (monooxygénase phase I) et le système de conjugaison
Iphase II). Le premier favorise le deuxième. i.e. l’oxygénation favorise la conjugaison. La
conjugaison consiste à lier le polluant à une grosse molécule polaire et donc facilement
excrétable parce que soluble. Cependant, le métabolisme de phase I peut aussi activer
les polluants en compoés très réactifs, qui vont aller se lier à la première molécule
venue, qu’elle soit protéique ou pire de l’ADN. Dans ce dernier cas, l’ADN est modifié.
Si la modification de l’ADN iu.e. une mutation n’est pas réparée, et si la cellule se divise
après cette modification, les cellules filles héritent de la mutation. Si cette mutation
influence l’expression d’un oncogène ou d’un gène dit « suppresseur de tumeur », la
cellule pourra peut-être, s’il existe déjà d’autres mutations semblables, devenir
cancéreuses.
C’est al superfamille d’enzymes appelée cytochromes P450 (CYP) qui effectue la
monooxygénation des xénobiotiques. Ces enzymes métabolisent aussi les composés
endogènes, mais leur rôle pricipal est le métabolisme des composés exogènes d’origine
humaine.
En 1998, les plus gros pollueurs industriels en Amérique du Nord sont l'Ohio, le Texas, le Michigan,
l'Indiana et l'Ontario. Le Québec est en 24ième place. La massse de polluants était équivalent au poids du
nombre de minivans qui seraient alignées de pare-choc à pare-choc de Vancouver à Kingston (allerretour), soit 3.2 millions de tonnes. Les plus gros pollueurs sont les producteurs d'énergie qui utilisent le
charbon et l'huile pour produire de l'électricité. Ces compagnies étaient responsables pour lpus du quart
des émissions dans l'environnement.
Géographiquement, ces industries sont concentrées tout autour des Grands Lacs et au Texas.
La moitié des composés toxiques sont rejetés dans l'air, libérés dans l'eau et sur la terre. 30 % du total est
recyclé et le reste est brûlé.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Au Canada, les pires industries sont : la compagnie provinciale d'électricité d'Ontario (Ontario Power
Generation), à cause de polluants libérés par le charbon brûlé à Nanticoke au bord du Lac Érié; la
compagnie Inco à cause des carcinogènes libérés à Sudbury et le fabricant de produits chimiques
Celanese.
- Commission pour la Coopération environnementale dont les bureaux sont à Montréal.
Noter que ces nombres excluent la pollution produite par les 300 millions d'habitants par les automobiles
par exemple ou la contamination de l'eau, et la pollution industrielle par le Mexique.
L'influence de la pollution sur l'habitat n'est pas toujours aussi clairement illustrée que dans un cas comme la
compagnie Thioxide. Cette compagnie déversait sept (7) tonnes d'acide chlorhydrique par jour dans le fleuve
Saint-Laurent. Même dans ce cas, il a fallu près de huit ans pour emmener la compagnie en cour. Aux
dernières nouvelles, la cause est en appel. Même si la loi de Pêches et Océans Canadac est très claire, son
application est très difficile car il faut prouver que le déversement est toxique pour les poissons.
Oui, un poisson se dissout dans l'acide chlorhydrique pur!.. mais le déversement de Thioxide est dilué dans
l'eau. Alors, quel débit est acceptable, à quel endroit? etc., etc.
La FMV a déjà reçu des goélands trouvés morts en grand nombre près du terrain de cette compagnie. Beau
cas d'empoisonnement industriel? Et non! Les oiseaux sont morts de salmonellose.
"L'homme blanc doit traiter les bêtes de ce pays comme ses frères. Je suis un sauvage et je ne conçois pas d'autres façons de faire.
Qu'est-ce que l'homme sans les bêtes? Si toutes les bêtes partaient, l'homme mourrait dans une très grande solitude d'esprit"
- Le Chef indien Seattle, 1850.
4.6.1 Composés à base de chlore
L'industrie du chlore est une immense machine économique, au Canada comme aux États-Unis. En effet, le
chlore est à la base d'une multitude de produits modernes persistants dans l'environnement, tels les
biphényles polychlorés (PCBs), le DDT, les chlorofluorocarbones et le chlorure de polyvinyle (plastique PVC).
Une autre source de chlore est le traitement des eaux municipales par le chlore. Celui-ci laisse des
contaminants, tels le chloroforme. À l'heure actuelle, les organismes américains et canadiens de protection
environnementale proposent ni plus ni moins l'interdiction de l'utilisation du chlore dans l'industrie. Si on
considère les milliers d'emplois en jeu, il est surprenant que même le ministre canadien de l'Environnement,
Sheila Copps, ait soutenu ces propositions (en 1994). (Mme Copps a changé d'occupation peu après (elle est
maintenant ministre du Patrimoine)).
Le chlore a une affinité chimique élevée, c'est-à-dire qu'il attire des électrons. Il réagit donc avec des atomes
riches en électrons tel que le carbone. Les composés issus de cette réaction sont très stables. En effet,
l'affinité du chlore pour les électrons stabilise les molécules dont il fait partie. Par conséquent, ces molécules
ne se brisent pas quand elles sont libérées dans l'environnement. Parce qu'ils sont liposolubles, ces composés
s'accumulent dans les tissus adipeux des organismes vivants des niveaux trophiques supérieurs. Ils y
atteignent des concentrations très élevées. Les lipides sont mobilisés chez la femelle lors de l'allaitement. Ceci
a deux effets: 1) Le nouveau-né se contamine alors par le lait, qui devient l'équivalent d'un niveau trophique
supérieur. 2) La femelle s'intoxique de façon aiguë parce que les composés sont remis en circulation.
Le chlore seul est utilisé dans le blanchiment de la pulpe pour la fabrication du papier blanc. Son utilisation
entraîne la formation de dibenzodioxines et de dibenzofurans, deux composés carcinogènes. Étant donné la
grande consommation d'eau des papeteries, ces produits se retrouvent en grande quantité dans les effluents
de ce type d'entreprise.
Bélugas et composés organochlorés
c
Selon la loi de Pêches et Océans Canada, aucune substance pouvant nuire aux poissons ne doit être rejetée dans l'eau.
46
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Chaque béluga adulte renferme dans ses tissus une moyenne de 20 à 30 grammes de BPC pur, soit à peu
près le fond d'un pot moyen de beurre d'arachide. Un nouveau-né en contient proportionnellement
beaucoup plus parce que sa mère lui en transmet une grande quantité dans son lait. Ainsi, l'ensemble du
troupeau du Saint-Laurent est dépositaire d'une vingtaine de kilogrammes de BPC, soit presque
l'équivalent d'un seau de grosseur moyenne ou de la quantité retrouvée dans l'ensemble du cheptel bovin
canadien (20 millions de têtes)!
Il a été démontré que les bélugas du Saint-Laurent sont affectés par des lésions et des agents infectieux
compatibles avec l’immunodépression. De nombreux collaborateurs, dont les Dr P. Béland, S. De Guise,
C. Desjardins, S. Lair, D. Martineau, I. Mikaelian, R. Norstrom et L.
Shugart, ont démontré dès 1983 que ces animaux étaient contaminés par des concentrations très élevées
de composés organochlorés, une famille de composés aux puissants effets immunodépresseurs. Le Dr.
De Guise (maintenant professeur à l'Université du Connecticut) a étudié les cellules immunitaires des
bélugas du Saint-Laurent lors de ses études de doctorat dans le laboratoire du Dr Michel Fournier à
l'Université du Québec à
Montréal. Il a démontré entres autres que, in vitro, la prolifération de cellules immunitaires (splénocytes et
lymphocytes du sang) de bélugas de l'Arctique diminuait lorsque ces cellules sont exposées à des mélanges
de composés organochlorés à des concentrations semblables à celles observées dans les tissus de bélugas
du Saint-La
Effets oestrogéniques des produits à base de chlore
Les effets de la pollution sont souvent subtils: par exemple, plusieurs polluants ont des effets oestrogéniques.
Parmi ceux-ci, on compte certains composés contenus dans les plastiques et libérés dans les aliments.
Plusieurs de ces polluants oestrogéniques dérivent de la fabrication de pesticides (DDT) durant les années
1950 et 1960 et du rejet de PCB et de résidus de papetières (souvent constitués de composés chlorés). Les
biphényles polychlorés (PCBs), la dioxine et les HPA sont aussi oestrogéniques. Parmi les polluants
oestrogéniques, les organochlorés sont sans doute les plus importants à cause de leur persistance et de leur
présence massive dans l'environnement.
Normalement, les oestrogènes exercent leur effet en se liant à un récepteur dans la cellule (intra-cellulaire).
Une fois lié, le récepteur activé quitte le cytoplasme pour se diriger vers le noyau de la cellule où il module
l'expression d'une batterie de gènes (l'effet cancérigène de la dioxine opérerait par ce mécanisme (voir Effets
carcinogènes)). Les substances oestrogéniques imitent les oestrogènes naturels en se liant au récepteur
intracellulaire et stimulent ainsi la prolifération des cellules.
Aux dernières nouvelles, la lumière et les champs magnétiques seraient aussi oestrogéniques. L'illumination nocturne de nos villes
entraînerait le cerveau à produire plus de gonadotropine.
Les oestrogènes jouent un rôle très important dans le développement, la différentiation sexuelle et la
croissance des oiseaux, des reptiles et bien sûr des mammifères. Chez les oiseaux et les poissons,
l'oestrogène signale la synthèse d'une protéine de l’œuf (vitellogénine) produite normalement seulement par
les femelles. Or, en Angleterre, on a montré que les poissons mâles tenus captifs en aval de villes ou d'usines
produisent la vitellogénine. On soupçonne que les femmes prenant des contraceptifs sont à l'origine de ces
changements: l'urine de celles-ci contiendrait de l'estradiol. On parle aussi de produits de dégradation de
détergents utilisés pour usage domestique. Les anguilles de la Seine montrent des signes semblables 10.
Les problèmes de reproduction de plusieurs poissons du Pacifique ont été aussi reliés à des niveaux
tissulaires élevés de DDE, un métabolite du DDT. À des niveaux tissulaires de DDE supérieurs à 3.8 ppm de
DDE, ces poissons ne frayent pas.
Les alligators et les tortues du lac Apopka en Floride sont démasculinisés et donc infertiles. De plus, leur
rapport œstrogène/testostérone est élevé, les femelles ont des niveaux d'oestradiol deux fois plus élevés que
normalement. Leurs ovaires sont anormaux: les follicules contiennent plus d'un œuf et les œufs contiennent
plus d'un noyau. Les mâles ont des niveaux de testostérone semblables à ceux des femelles. Le tissu
testiculaire est désorganisé et le pénis est très petit. De plus, la viabilité des œufs est faible. On pense que les
niveaux élevés de DDE dans ces lacs sont la cause de ce phénomène. Un des lacs les plus contaminés,
(Apopka) où ces phénomènes sont les plus marqués, est voisin d'une compagnie chimique qui fabriquait du
DDT6. (Louis Guillette, University of Florida).
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Certains problèmes ont été soulevés. Un endocrinologiste, Timothy Gross, un collègue du Dr Guillette, qui a collaboré à certains tests sur
les alligators affirme qu’en guise de mesure de sécurité, quand les études ont débuté, le Dr Guillette voulait que seuls les alligators plus
petits soient examinés. Évidemment les plus petits sont les plus jeunes et donc les plus immatures et donc ont les plus petits pénis. (les
alligators du lac témoin étaient aussi plus jeunes). Le Dr Gross ne doute pas cependant que les disrupteurs endocriniens nuisent à la
faune. Il cite aussi les poissons, les tortues d'eau douce et d'autres lacs où les alligators démontrent les mêmes problèmes.
Les effets néfastes des organochlorés sur la reproduction des phoques ont été assez bien documentés39. Ces
espèces animales ainsi que les autres espèces ayant une implantation retardée (vison, ours polaire) sont sans
doute plus sensibles aux effets des organochlorés sur la reproduction que les autres animaux.
Notons que des disrupteurs endocrins sont présents dans les plantes que nous mangeons (blé, patates,
avoine, riz, pommes, cerises). On a trouvé des disrupteurs dans plus de 30 plantes L'ensemble des effets
hormonaux des produits chimiques d'origine naturelle présents dans la nourriture serait 40 millions de fois plus
grand que celui des produits synthétiques. (Stephen Safe (Texas A & M )) sur un comité de la National
Academy of Sciences , NAS), dans un rapport sorti en 1999 sur les "agents actifs hormonalement" (HAA)).
Autres effets des composés à base de chlore
Effets endocriniens
Les organochlorés (PCB et DDT) causent aussi une réduction de vitamine A, une augmentation des
porphyrines, une diminution du volume de la thyroïde accompagnée d’une augmentation des niveaux sériques
de T4 et de TSH. (Normalement, la T4 devrait inhiber la production de la TSH par rétroaction négative).
En plus de se lier au récepteur estrogènes, les BPC se lient au récepteur aryl hydrocarbone. Le complexe ainsi
formé est transporté dans le noyau (translocation) et active des gènes spécifiques. Le complexe se comporte
donc comme un facteur de transcription. Parmi les gènes activés on compte les enzymes de la fonction
oxydase mixte (MFO) dont CYP1A1, le gène qui encode le cytochrome P4501A1. L'expression de CYP1A1 et
des autres gènes ainsi activés entraîne une pléiade de réponses cellulaires, dont la prolifération. (JVDI 12:477479 (2000)).
Diminution de la couche d'ozone
Les chlorofluorocarbones s'échappent des bouteilles aérosols vers la stratosphère où sous les effets du froid
intense et des rayons du soleil, ils détruisent la couche d'ozone qui protège les êtres vivants du rayonnement
ultraviolet du soleil. Les effets de cette érosion sont multiples. Entre autres, le plancton qui est à la base de
l'écosystème marin est détruit par les rayons ultraviolets lorsqu'il remonte près de la surface. Les humains et
probablement les animaux (dans les régions du corps non protégées par les poils) ont un plus grand nombre
de cancers cutanés.
4.6.2 Effets immunodépresseurs des polluants
Les hydrocarbures polycycliques aromatiques (HPA), les PCBs et la dioxine causent des problèmes
reproducteurs et pathologiques chez les oiseaux piscivores des Grands Lacs6. Les jeunes sternes caspiennes
des colonies contaminées ont des taux de survie moins élevés que les colonies moins contaminées. Les HPA
diminuent la résistance aux maladies infectieuses chez les animaux de laboratoire. Ils suppriment l'immunité à
médiation cellulaire et humorale et les effets sont les plus sévères durant l'embryogenèse et la croissance. Par
exemple, chez les oiseaux des Grands Lacs, on a noté une atrophie lymphoïde, des changements dans les
paramètres sanguins (rapport hétérophiles/lymphocytes), une diminution de la réponse au test cutané de
phytohémagglutinine (un marqueur pour l'immunité à cellules T).
Les mammifères marins sont les plus touchés par les organochlorés parce qu'ils ont de grandes quantités de
gras et sont au sommet de la chaîne alimentaire. Périodiquement, ils mobilisent leur gras et c'est alors que les
OC accumulés seraient toxiques. Chez les cétacés (baleines) et les pinnipèdes (phoques et otaries), certains
soupçonnent que les organochlorés ont favorisé le déclenchement des épidémies de morbillivirus ("distemper")
qui ont ravagé ces populations à l'échelle mondiale.
Des chercheurs hollandais ont montré qu'un groupe de phoques nourri avec des poissons naturellement contaminé par des PCBs
montrent une réduction des concentrations tissulaires de la vitamine A, une augmentation des granulocytes circulant, une diminution de
l'activité des lymphocytes "natural killers", et une diminution de la prolifération des lymphocytes T lorsqu'ils sont traités avec des antigènes
48
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
standards. Les femmes Inuits qui ingèrent du béluga et du phoque ont les concentrations de PCBs parmi les plus élevées au monde
(Environ Health Persp, Dec 1993, Pierre Ayotte, U Laval). Les maladies juvéniles chez les Inuits pourraient être reliées aux niveaux
élevés dans le lait de ces femmes.
4.6.3 Effets cancérigènes des polluants
Mutations
La plupart des composés cancérigènes produisent le cancer en altérant l'ADN, en y induisant une mutation. Le
cancer est le résultat ultime, mais rare, de mutations successives. Il survient après une longue période de
latence. Deux pour cent des cancers humains seraient dus à la pollution (Doll and Peto). Pour d'autres
auteurs, ce serait moins que 1 % sauf dans les cancers d'origine occupationnelle où le pourcentage serait
plutôt de 6 % chez les hommes et de 2 % chez les femmes (Higginson J.). Pour associer étiologiquement des
cancers survenant en nature à un contaminant environnemental cancérigène, il faut donc ou bien étudier une
très grande population (parce que le cancer est rare) ou bien étudier une population plus petite pendant une
(très) longue période de temps... comme celle des bélugas du Saint-Laurent. Encore faut-il que la
contamination soit très importante pour détecter une augmentation de cancers ..31.
Hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP)
Les HAP sont des composés de carbone dérivées de la combustio incomplète de susbstances organiques
(toute substance composée de carbone). Il sont produits en grande quantité dans les feux de forêts, dans les
éruptions volcaniques, la cigarette allumée, les barbecues, et par l'industrie métallurgique. Plusieurs de ces
composés sont très cancérigènes. Ce sont ces composés qui sont responsables du cancer du poumon chez
les fumeurs.
Les HAP ne sont pas cancérigènes en eux-mêmes. Ce sont leurs métabolites qui le sont. i.e. les HAP sont
transformés par les enzymes intra-cellulaires P450 des cellules épithéliales intestinales ou des cellules
hépatiques en epoxydiols. Les epoxydiols sont des composés très réactifs, dits "électrophiliques", qui
cherchent à se fixer à toutes les molécules qui les entourent, y compris les protéines et l'ADN. La plupart des
epoxydiols ont des demi-vies très courtes ce qui limite les dégâts, parce qu'ils deviennent inactifs avant qu'ils
n'aient eu le temps de se lier avec une molécule cellulaire. Certains ont des demi-vies plus longues parce que
leur structure est un un peu plus stable. Ce sont les plus dommageables parce qu'ils sont présents dans la
cellule plus longtemps et ont le temps d'atteindre les molécules cellulaires et de s'y lier.
A chaque fois qu'une substance organique est brûlée incomplètement, une grande variété de HAP est
produite. Parmi ceux-ci, le benzopyrène est un des plus abondants. Pour cette raison et parce que,
historiquement, c'est celui que l'on a d'abord mesuré, on l'utilise actuellement comme indicateur de la
contamination par les HAP i. e. lorsque le benzopyrène est présent, les autres HAPs, incluant les plus
carcinogènes, sont aussi présents, un peu comme Escherichia coli. E. coli est la bactérie que l'on détecte dans
les tests standards d'analyse d'eau pour évaluer la contamination de l'échantillon par les matières fécales. La
présence de E. coli reflète la présence des autres agents pathogènes associés à la contamination fécale de
l'eau, comme le virus de l'hépatite B par exemple.
• Composés mutagènes, Belugas, cancer et HAPs
Industrie. La production d'aluminium requiert avant tout beaucoup d'énergie électrique. En effet, ce métal est
extrait d'un minerai brut, la bauxite, par électrolyse. La bauxite provient d'Afrique du Sud. Une usine de
production d'aluminium doit donc avoir accès à la mer pour le transport du minerai brut par bateau. C'est pour
ces raisons, surtout pour le potentiel hydroélectrique du Québec, que les compagnies d'aluminium sont venues
s'établir très tôt au Québec. En fait, la société Alcan a construit ses propres installation hydroélectriques dès
1926, et en a ajouté depuis. Ces installations (privées) sont toujours exploitées de nos jours, soient six
installations hydroélectriques, trois dans le Saguenay et trois dans les rivières environnantes. Ces installations
produisent en 2001 près de 3,000 mégawatts, soient la puissance électrique consommée par 300,000
personnes, l'équivalent de deux villes comme Sherbrooke, ou encore la puissance de cinq centrales nucléaires
de moyenne importance. Alcan paie une redevance depuis * au gouvernement du Québec pour l'utilisation (et
la modificatio extensive) des rivières de cette province. Alcan c'est aujourd'hui 13 milliards de revenus US par
année, 53,000 employés dans 32 pays. **
De 1926 jusqu'à 1994, cette puissance électrique formidable a été utilisée pour l'électrolyse de la bauxite par le
procédé Soderberg. Il s'agit d'un procédé très polluant: il consiste à faire passer du courant dans une anode
49
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
constituée de…goudron et de dérivés de goudron. Ce goudron est brûlé dans le processus, dégageant une
quantité énorme de HAP. La quantité de goudron ainsi brûlé est un peu moins que la moitié du tonnage
d'aluminium produit et la quantité de HAP produit est de 4à 5 kg par tonne d'aluminium. Or les alumineries du
Saguenay produisent une quantité phénoménale d'aluminium, soit 708,000 tonnes métriques par année. La
quantité de goudron brûlé par les 3,000 mégwatts d'électricité est de 208,000 tonnes par an, soit un peu plus
que le poids de la population humaine de Montréal.
Les travailleurs de ces usines ont été trouvés affectés par des taux très élevés de cancers de la vessie et de
cancer su poumon. Un employé ayant passé 20 ans * près des cuves d'électrolyse avait 42 fois plus de chance
de contracter un cancer de la vessie que le Québécois moyen.
Les taux de cancer du système digestif sont plus élevés dans la population du Saguenay que dans le reste de
la population québécoise (dont les taux de cancer sont plus élevés que la moyenne canadienne).
On estime présentement que 40,000 tonnes de HAP sont déposées dans le sol et les plans d'eau du bassin
versant du Saguenay et que 30 tonnes de PAH se détachent de cette masse chaque année et et pénètre dans
l'eau du Saguenay.
Or l'eau potable de 80 % de la population du Saguenay provient d'eau de surface (par opposition à de l'eau de
puits) et est cette eau est donc contaminée par les HAP provenant des alumineries, comme le sol.
Bélugas du Saint-Laurent
Origine de la population de béluga de l'Estuaire du Saint-Laurent: Il y a 11,800 ans, une grande partie de
l'Amérique du Nord ployait sous le poids d'une épaisse couche de glace qui s'étendait vers le sud jusqu'à l'état
de New York (lui-même couvert). À mesure que le climat planétaire s'est réchauffé, la glace a commencé à
fondre, le niveau de la mer s'est élevé et l'Océan Atlantique a envahi les terres, vers l'ouest, rejoignant presque
les Grands Lacs et recouvrant les États de New York et du Vermont sur son passage. Cette immense étendue
d'eau salée, la Mer de Champlain, était limitée au nord (le Québec actuel) par une région au climat Arctique et
était peuplée par six espèces de cétacés, dont le narval et le béluga. (On retrouve encore des ossements
fossilisés de ces animaux dans les terres agricoles de l'Ontario et près de la ville de Québec, à Saint-Nicolas ).
Le climat continuant de se réchauffer, l'immense glacier recula vers le nord. Le continent, libéré du poids de la
glace, se releva au-dessus du niveau de la mer et l'Océan Atlantique retraita vers l'est, causant l'assèchement
de la mer de Champlain. L'habitat de la faune Arctique recula vers le nord, dans ses limites actuelles. En
reculant la calotte glaciaire creusa de nombreux lacs dans le Québec actuel. Une faille donna naissance au
fjord actuel du Saguenay. En remontant au-dessus du niveau de la mer, les nombreux plans d'eau et rivières
constituèrent un énorme potentiel d'énergie qui allait être exploité 10,000 ans plus tard par l'industrie de
l'aluminium.
Une population d'environ 650 bélugas est ce qui reste de ces populations ancestrales. Elle habite l'Estuaire du
Saint-Laurent, Québec, à un endroit doté de conditions hydrologiques et climatiques qui imitent de près
l'environnement arctique. L'embouchure de la rivière Saguenay est au centre de l'habitat du béluga. Le béluga
est adapté à l'Arctique comme en font foi sa couleur blanche, l'absence d'aileron dorsal (pour éviter qu'un
aileron soit endommagé par la glace, lorsque l'animal fait surface, et permettant à l'animal de briser la glace
avec son dos), et son espèce couche de tissu adipeux sous-cutanée.
On estime qu'au début du siècle, cette population comptait 5,000 baleines. Ainsi en 70 ans, 90 % de cette
population, un reliquat de l'histoire du continent nord-américain, est disparu, ce qui lui a valu de recevoir le
statut de population menacée de la part du gouvernement canadien en 1980.
Cette population habite maintenant de façon permanente un micro-environnement Arctique. Il s'agit d'un court
segment de l’Estuaire du Saint-Laurent centré approximativement sur l'embouchure de la rivière Saguenay. Le
long de la côte Nord de l'estuaire, le courant glacé du Labrador coule en rofondeur (l'eau froide est plus lourde
que l'eau chaude) à "contre-courant", c'est-à-dire vers le sud-ouest, dans les profondeurs du chenal
Laurentien. À la hauteur de Tadoussac, la profondeur du fleuve passe subitement de 10 à 300 mètres, là où la
rivière Saguenay joint le fleuve. (En amont, le fleuve Saint-Laurent est peu profond, jusqu'aux Grands Lacs).
Le courant du Labrador, se heurtant à cet endroit à une véritable falaise sous-marine, fait surface. L'eau glacée
émerge alors, créant des conditions marines quasi arctiques.
Ce courant glacial charrie aussi une quantité énorme de sédiments vers la surface, et donc une grande
quantité de matières organiques est mise ainsi en suspension dans l'eau. Ces matières organiques servent de
nourriture au plancton, qui sert de fourrage aux baleines à fanons. (En contraste avec les bélugas, les
baleines à fanons sont des visiteurs saisonniers, qui séjournent dans cette région seulement durant l'été et tôt
à l'automne). Des populations denses de poissons se nourrissent aussi de plancton et ces poissons servent à
50
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
leur tour de nourriture pour les bélugas et les autres mammifères marins de l'Estuaire. Ces circonstances
écologiques très particulières ainsi que l'adaptation physiologique et morphologique des bélugas à l'eau froide
font que cette population de bélugas est maintenant prisonnière de ce segment de l'Estuaire. (Pour en savoir
plus: http://www.qc.ec.gc.ca/csl/infogen/cenfra3.1.html).
L'Estuaire du Saint-Laurent draine maintenant le quart oriental de l’Amérique du Nord, une des régions les plus
industrialisées du monde. Le fleuve Saint-Laurent est donc contaminé depuis des décennies par les rejets
industriels de cette partie de l'Amérique du Nord. De nos jours, les herbicides et fertilisants utilisés par
l'agriculture moderne contribuent aussi à la charge polluante du fleuve.
Examens post-mortem
En 1982, D. Martineau mettait sur pied un programme d’examen post-mortem systématique des bélugas
échoués le long des côtes de l’estuaire du Saint-Laurent. Depuis 1984, tous les bélugas trouvés morts sur les
rives du Saint-Laurent dans un état de conservation raisonnable sont apportés à la salle de nécropsie de façon
systématique. Ainsi, les carcasses peuvent être examinées de manière approfondie par des vétérinaires
pathologistes. Ce programme d’autopsie est couplé à l’analyse toxicologique. De 1983 à 1998, presque la
moitié des 246 bélugas trouvés morts sur les rives du Saint-Laurent, 119 animaux, ont été examinés à la
Faculté de Médecine Vétérinaire de l’Université de Montréal par les pathologistes vétérinaires. Des carcasses
examinées, 94 carcasses (79%) ont été considérées dans un état de préservation suffisamment bon pour
permettre un diagnostic. Dix-sept bélugas (18% des carcasses préservées) sont morts du cancer.
Cancer
Un peu plus d'un adulte sur cinq (27 %) souffrait de cancer. Dans le monde occidental, le cancer cause 23 %
de toutes les morts chez l'homme, un pourcentage similaire à celui des bélugas du Saint-Laurent. Un tel
pourcentage n’avait jamais été observé chez une population d’animaux sauvages, où que ce soit dans le
monde, qu'il s'agisse d'animaux terrestres ou aquatiques (en excluant les poissons). À notre connaissance,
c'est la première fois qu'une population de mammifères sauvages est comparable à l'homme à cet égard.
Le taux de cancer chez les bélugas échoués est aussi beaucoup plus élevé que celui observé chez les autres
cétacés. Seulement 28 autres cas de cancer ont été rapportés chez les cétacés captifs et sauvages dans le
monde. Donc, les cancers observés chez les bélugas du Saint-Laurent représentent environ la moitié de tous
les cancers rapportés chez les cétacés, captifs et sauvages, dans le monde entier.
De plus, certains de ces cancers, comme les cancers de l'intestin situés près de l'estomac (intestin proximal),
sont extrêmement rares chez toutes les espèces animales, incluant l’homme. Or, nous avons observé sept
cas de cancers du petit intestin depuis 1983 dans une population de 650 animaux. Les eaux glaciales de
l'Estuaire jouent aussi un rôle important. Sans la température très froide de l'eau, la chaleur dégagée par la
fermentation cuirait littéralement la carcasse à cause de l'épaisse couche de tissu adipeux de l'hypoderme qui
emprisonne la chaleur. À cause de sa chaleur spécifique et de sa conductibilité calorifique élevées, l'eau très
froide refroidit rapidement la carcasse.
En juin 1998, les gouvernements fédéral et provincial ont contribué à la création du Parc Marin du Saguenay,
dont le centre est à l'embouchure du Saguenay dans le Saint-Laurent, une région qui constitue la partie
majeure de l'habitat du béluga. En 1996, Parcs Canada comptait 42 embarcations à moteur qui faisaient de
l'observation de baleine sur une base commerciale. En 1997, Parcs en comptait 52, une augmentation de
24 % (environ 93,600 heures d'observation). Selon Parcs, le nombre de passagers s'est accru de 20 fois dans
les dernières 15 années (de 20,000 à 421,378 de 1984 à 1998). Il s'est accru de 5 fois dans les derniers 10
ans (de 78,000 en 1988) et de 5 % de 1997 à 1998.
Aucun règlement n'existe dans le Parc marin en ce qui concerne la conduite de bateaux d'observation autour
des bélugas ou autres cétacés. Seules des directives sont émises par Parc Canada. Ces directives sont
suivies (ou non) par les bateliers (opérateurs de bateaux d'observation de baleines) sur une base strictement
volontaire. En pratique donc, les bateliers ne sont soumis actuellement à aucune réglementation ou examen.
Ils sont soumis uniquement aux règlements de sécurité de Transports Canada. Il n'y a, non plus, aucune
restriction sur le nombre de bateaux ou d'opérateurs de bateau pratiquant l'observation de baleines sur une
base commerciale.
51
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
En septembre 1999, trois collisions entre des baleines et des bateaux avaient été signalées par le public aux
autorités du Parc Marin pour l'année, excluant "l'affaire Cousteau".
Les bélugas du Saint-Laurent sont affectés par des taux élevés de cancer, particulièrement du système
digestif, et dans le système digestif par le cancer de l'intestin proximal (près de l'estomac). Ce type de cancer
est très rare chez les gens, ainsi que chez les animaux, sauf dans certaines régions d'Angleterre et d'Écosse
où il est relié à l'ingestion de carcinogènes environnementaux et à l'infection par des papillomavirus. Les
papillomavirus seuls ne causent pas le cancer du petit intestin. Pour que cette lésion apparaisse, l'ingestion de
fougère est nécessaire.
Les bélugas plongent confortablement jusqu'à au moins 400 mètres **) et sont une des rares baleines à dents
qui se nourrissent de façon significative d'invertébrés benthiques (qui habitent les sédiments). Or, alors que les
HAP sont détruits par les enzymes présents dans les cellules de mammifères, ils ne sont pas détruits une fois
absorbés par les invertébrés benthiques. Plutôt, ils sont concentrés dans les tissus de ces animaux. Nous
avons trouvé des molécules de métabolites de benzopyrène liés à l'ADN de tissu de bélugas. (ces molécules
sont nommées "adduits"). Ainsi, non seulement l'habitat du béluga est-il contaminé par les HAP, mais nous
avons aussi la preuve que les bélugas ont ingéré les HAP et que les métabolites de ces composés se sont liés
à l'ADN de ces animaux. Comme chez tous les autres vertébrés, la présence de ces adduits entraîne le risque
de causer des mutations pendant la synthèse de nouvel ADN quand la cellule affectée se divisera. Ces
mutations seront transmises aux cellules filles.
FRÉQUENCE DES CANCERS DU PETIT INTESTIN (CIOE) CHEZ LES BÉLUGAS ÉCHOUÉS DU
SAINT-LAURENT (1983-1996) COMPARÉE À CELLE DE L'HOMME ET DES ANIMAUX
DOMESTIQUES.
Espècesa
Béluga (6 cas)
Homme
Bovins
Chien
Chat
Cheval
Mouton
CARb des cancers épithéliaux
du petit intestin
92
0.7
1.9
2.7
10.8
0
Jusqu'à 2,000
CAR des cancers épithéliaux
du gros intestin
ND
28.5
0
5
3.2
1.3
ND
b
CAR: fréquence annuelle estimée sur 100,000 animaux
ND: pas déterminée
c
Les tumeurs de poissons, indicatrices de la contamination des sédiments par
les HAP
Les poissons sont de bons candidats pour détecter la présence de cancérigènes environnementaux. On peut
en étudier un grand nombre en peu de temps et plusieurs espèces, qui se nourrissent sur le fond, ont la gueule
littéralement enfouie dans les composés cancérigènes une bonne partie du temps, du moins dans certaines
régions très polluées. On retrouve donc beaucoup de papillomes oraux dans certaines populations de
poissons de fond des Grands Lacs. Les tumeurs hépatiques de poissons ont été également reliées aux
cancérigènes environnementaux. Ce sont les deux seuls types de tumeurs de poissons qui ont été reliés
étiologiquement à la contamination environnementale49 . Au cours d'une étude limitée entreprise dans la
Rivière-des-Prairies, très polluéed, et dans le fleuve à Québec, ville moins industrialisée que Montréal, nous
avons obtenu les chiffres suivants chez le meunier noir, un poisson de fond.
d
La ville de Laval ne traite pas encore ses eaux!
52
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Papillomes oraux CHEZ LES POISSONS DU QUÉBEC
Site
Prévalence de
papillomes oraux chez
les meuniers noirs
Québec
10.8%
Rivière-des- Prairies
56.3%
La prévalence de papillomes dans la Rivière des Prairies est semblable à celles rapportées dans des endroits
fortement contaminés tels que le port de Hamilton, tandis que la prévalence observée près de la ville de
Québec ressemble à celle observée dans les régions peu contaminées des Grands Lacs. Nous soupçonnons
que le benzopyrène accumulé dans les sédiments de la Rivière des Prairies est la cause de ces papillomes. La
ville de Laval (dont les égouts sont déversés dans la Rivière des Prairies) n’avait aucun traitement d’eaux
usées jusqu’à tout récemment. Les tuyaux d’échappement des automobiles sont une source abondante de
benzopyrène. Les rues sont lavées par la pluie et le benzopyrène est emporté dans la rivière.
Cependant, les virus peuvent aussi causer des tumeurs chez les poissons et c'est seulement récemment qu'on
s'est penché sur le rôle de ces agents.
De 1995 à 1997, nous avons trouvé plusieurs cancers du foie chez le corrégone à Québec. Ce poisson peut
vivre très vieux (plus de vingt ans). Les corrégones que nous avons examinés étaient 4 à 5 fois plus
contaminés que les poissons d’autres espèces collectés au même endroit. Récemment, nous avons trouvé
une accumulation de la protéine p53 dans les cellules tumorales. Cette protéine exerce normalement un effet
antiprolifératif sur les cellules. Son absence ou une p53 anormale, peut donc faciliter l'apparition d'une cellule
cancéreuse. Une mutation dans le gène de p53, causée par des produits carcinogènes, pourrait rendre cette
protéine anormale et causer l'accumulation d'une protéine non fonctionnelle.
Autres mécanismes de carcinogenèse
On pensait que les carcinogènes environnementaux causaient tous le cancer par l'induction de mutations dans
l'ADN. Récemment on a découvert que les effets oestrogéniques de plusieurs contaminants pourraient causer
certains cancers. La nouveauté de ce mécanisme réside dans le fait que la carcinogenèse se fait sans qu'il y
ait de mutation.
On savait que, chez la femme, tous les facteurs augmentant l'exposition aux oestrogènes au cours de la vie
(puberté précoce, ménopause tardive) augmentaient les risques de carcinogenèse. En effet, les oestrogènes
causent la prolifération des cellules épithéliales dans les glandes mammaires à chaque menstruation. Tout
naturellement, on s'inquiéta donc de savoir que plusieurs contaminants ont une action oestrogénique. De plus
les contaminants ayant une activité oestrogénique induisent ou causent la promotion de cancers mammaires.
Au Japon, les femmes ayant été exposées à ces produits en travaillant dans l'industrie chimique montrent des
prévalences élevées de cancers mammaires. Dans la région de Québec, les femmes qui ont des cancers du
sein répondant aux oestrogènes ont aussi des taux de DDE plus élevés dans leur tissu mammaire que les
femmes ayant des cancers ne répondant pas aux oestrogènes (trois bélugas du Saint-Laurent ont été trouvés
morts avec des cancers des glandes mammaires).
Chez les jeunes hommes, la prévalence des cancers testiculaires augmente à travers le monde (Environ Health Persp, juillet 1993) et les
comptes en spermatozoïde ont aussi diminué depuis les dernières cinquante années... on a aussi pensé aux polluants oestrogéniques.
4.6.4 Pluies acides
Certaines émanations industrielles (disulfure de soufre) acidifient la pluie. Les pluies acides seraient
indirectement à l'origine de l'amincissement des coquilles d’œufs de certains oiseaux européens. On a découvert
que dans certaines régions de Hollande, les limaces avaient disparu des sols acidifiés par la pluie. Certains passereaux, ne pouvant plus
trouver de limaces à ingérer, souffrent d'une déficience en calcium. Cette déficience entraîne l'amincissement des coquilles d’œufs, un
effet semblable aux effets du DDT dans les années 1970. Le même phénomène existerait en Amérique du Nord mais serait passé
53
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
inaperçu jusqu'à maintenant.
4.6.5 Trou dans la couche d’ozone
Les composés synthétiques qui causent des problèmes environnementaux ne sont pas nécessairement
toxiques. Ainsi, les chlorofluorocarbones sont persistants et volatiles. Ils ne sont pas toxiques et c'est pourquoi
ils sont utilisés partout dans les réfrigérateurs et dans les produits aérosols. Pourtant ces gaz endommagent
gravement la couche d'ozone stratosphérique, et y ont même fait un trou qui s'agrandit saisonnièrement et
chaque année au-dessus des pôles.
4.6.6 Métaux lourds
Les métaux lourds, dont plusieurs ont aussi des propriétés immunosuppressives, contaminent les bélugas
du Saint-Laurent. Le Dr S. De Guise a démontré in vitro que les concentrations en mercure
retrouvées dans le foie des bélugas du Saint-Laurent sont suffisantes pour diminuer la réponse
proliférative normale de cellules immunitaires (lymphocytes et splénocytes) de bélugas.
Dr Julie Gauthier, lors de son programme de doctorat (Ph.D.) chez Dr H. Dubeau de l'UQAM, a démontré que
le toxaphène (un insecticide organochloré) et le mercure fragmentent les noyaux de cellules de bélugas et ce,
aux mêmes concentrations que celles rencontrées dans les tissus de bélugas du Saint-Laurent.
(Remarquablement, la lignée cellulaire utilisée dans ces études a été développée par Dr Gauthier à partir d'un
béluga juvénile apporté à la salle de nécropsie et mort depuis plusieurs jours !). Parce que ces composés
endommagent le matériel génétique des bélugas, ils pourraient être impliqués dans l'étiologie des cancers
observés chez ces animaux.
Mercure
Le mercure est un composé toxique, sans fonctions biologiques connues, existant en nature en grandes
quantités. Pour se débarrasser du mercure, les bactéries le combinent à un groupe méthyl pour en faire du
mercure organique (le méthyl mercure). Le méthyl mercure est absorbé par les animaux, pas le mercure
inorganique. Le méthylmercure, 1,000 fois plus toxique que le mercure inorganique, est ingéré par les
poissons qui y sont peu sensibles. Les mammifères, susceptibles, ingèrent le poisson contaminé et
s’intoxiquent.
En nature, le mercure forme facilement des complexes avec des composés organiques (substances formées
de carbone) et donc, le charbon et le pétrole peuvent contenir des quantités importantes de mercure qui sont
dégagées lors de la combustion de ces substances.
Globalement, les émissions anthropogéniques comptent pour 25 à 60 % des émissions de mercure dans
l’environnement. Aux États-Unis, les usines produisant de l'énergie électrique en brûlant du charbon sont la
plus grande source d'émission aérienne de mercure. Les incinérateurs, particulièrement les incinérateurs de
produits médicaux, seraient la deuxième source la plus importante. Les usines de pâtes et papiers, de
plastique, de chlore ou de fongicides sont d’autres sources.
Québec: au Québec, on n'utilise pas la combustion du charbon pour la production d'énergie. Par contre, les
barrages hydroélectriques entraînent une forte contamination de l'eau et de ceux qui l'utilisent (autochtones et
faune aquatique) : les forêts noyées par les barrages hydroélectriques se décomposent et les matières
végétales en décomposition sont un milieu nutritif très riche dans lequel les bactéries prolifèrent.
Le mercure en provenance des régions industrielles du centre de l'Amérique a été transporté dans
l'atmosphère et s'est déposé sur et dans le sol du nord du Québec depuis les débuts de l'ère industrielle. Lors
de l'inondation des réservoirs, le mercure inorganique (non méthylé) qui était dans le sol est libéré dans l'eau.
Les bactéries très nombreuses méthylent ce mercure nouvellement libéré. Le mercure méthylé par les
bactéries, par opposition au mercure non méthylé, entre dans la chaîne alimentaire. On ne sait pas grand
chose de l'effet du mercure sur la santé des Inuits et de la faune locale, tous contaminés (Voir Drs. D. Bélanger
et N. Larivière). Pourtant, l'effet toxique du mercure sur le système nerveux mammalien a été bien documenté
en laboratoire et lors de "l'accident" tragique de Minamata au Japon.
On sait que les poissons piscivores sont plus contaminés que les poissons insectivores ou planctonivores, que
la concentration tissulaire de mercure des poissons après l’inondation est 5 fois la concentration avant
l’inondation. Les décideurs d’Hydro Québec rassurent les populations en disant que les concentrations en
54
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
mercure élevées trouvées dans les poissons et dans l'eau sont «temporaires » (les concentrations
redeviennent normales après 25 à 30 ans). Les forêts noyées sous des dizaines de mètres d'eau se
décomposent et entraînent aussi une libération très importante de CO2 et de méthane dans l'atmosphère, ce
qui contribue de façon très importante au réchauffement de l'atmosphère (voir "Réchauffement global" et CO2).
4.6.7 Déversements d'huile
Référence: rapport final Brander-Smith. Septembre 1990. "Public Review Panel on Tanker Safety and Marine Spills Response
Capability". Auteurs: un comité mandaté par le Premier ministre du Canada.
Ordre de grandeur des déversements d’huile dans le monde:
Un million de tonnes d'huile entre chaque année dans l'environnement marin à la suite d'opérations routinières.
Seulement 400,000 tonnes sont répandues par accident.
Fréquence des déversements accidentels:
Plus d'une fuite majeure/an, 10 modérées et 100 petites dans les eaux canadiennes. Une fois par 15 ans, une
fuite grave survient, surtout sur la côte Est du Canada.
Classification:
Petit déversement: moins qu'une tonne
Modéré: 1-100 tonnes.
Grave: plus que 10,000 tonnes
Exemples:
1) Nestucca: 875 t., 1988, Ile de Vancouver. Dommage environnemental significatif.
2) La fuite "Mystère". ? tonnes (beaucoup plus petite que Nestucca). 1990 18,000 oiseaux marins tués. Terre-Neuve.
3) Amoco Cadiz: 220,000 t., 1978, France.
4) Torrey Canyon: 1967: 100,000 t. Angleterre
5) Urquiola, 88,000 t. 1976, Espagne
6) Exxon Valdez, un exemple type mais relativement petit : 44,000 t. (12 millions de gallons), 1989, Bligh Reef, Alaska. et plusieurs,
plusieurs autres...
7) France: 1999
Déversements "opérationnels"
La quantité d'huile déversée dans un déversement opérationnel est moins grande que dans les déversements
accidentels mais les déversements opérationnels surviennent continuellement. Ils causent environ deux fois
plus de pollution que les accidents de pétroliers. Leur fréquence est très élevée. Les causes usuelles sont la
négligence durant le chargement et le déchargement, spécialement dans l'Arctique parce qu'il y a peu
d'installations convenables.
Les pétroliers doivent contenir de l'eau lorsqu'ils ne contiennent pas d'huile. C'est l'eau de ballast. Souvent cette eau est placée
directement dans les réservoirs d'huile vide. Elle devient évidemment très contaminée par l'huile. Et quand le ballast est vidé...
Les résidus d'huile rejetés durant le lavage des réservoirs sont une autre source de contamination. Les installations de réception en eau
canadienne ne sont pas adéquates. Certains terminaux exigent des frais calculés selon la quantité d'eau de ballast déversée.
Les amendes sont ridiculement peu élevées (moyenne : $4,700 par cas). Les pollueurs peuvent être poursuivis pour assumer les frais de
nettoyage. Alors, ils ne rapportent pas les fuites.
Déversements majeurs accidentels
Ils sont causés le plus souvent par des échouages et des collisions elles-mêmes causées par l'erreur humaine (75%-96% des accidents).
Malgré cela, les navires ont des équipages réduits, aux horaires surchargés. Les règlements ne requièrent pas un minimum d'heures de
repos. On observe souvent des périodes ininterrompues de 40 heures de travail. Malgré l'importance du facteur humain dans les
accidents, il n'y pas de marge d'erreur: Les navires n'ont que des coques simples (une seule épaisseur). Seulement 500 des 6565
pétroliers à travers le monde ont une double coque (7.6%). Les raisons pour cela sont le coût de construction plus élevé, et il y moins de
place pour la marchandise. Pourtant si l'Exxon Valdez avait eu une double coque, 75 % moins d'huile se serait écoulée.
Les facteurs physiques: les routes canadiennes intérieures et côtières sont longues, étroites et sont le site de forts courants.
Les eaux sont infestées de glace plusieurs mois par an.
Cartes: elles sont souvent désuètes (certaines sont basées sur des études menées en 1930). Même si la loi oblige les vaisseaux
étrangers à avoir des cartes canadiennes en eaux canadiennes, plusieurs n'en ont pas. Plusieurs raisons sont évoquées : les cartes
canadiennes sont difficiles à obtenir à l'étranger, des navires sont parfois vendus alors qu'ils sont déjà en route etc. etc.
Aides à la navigation : Ils ne sont pas toujours visibles. Dans le Saint-Laurent, les bouées peuvent disparaître sous la glace.
Âge des bateaux : la longévité d'un pétrolier est 20 ans. Les pétroliers canadiens sont en moyenne plus âgés que cela.
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Pathologie de la faune 2002
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Prévention
Matériel:
Les navires à double coque, la recherche et l'équipement pour le nettoyage. Le Canada a présentement 5 fois moins d'équipement que le
strict nécessaire. Cet équipement coûterait $ 800 millions à un milliard de dollars. Noter qu'Exxon a dépensé 2 milliards pour nettoyer
moins que 19 % de l'huile répandue, sans trop de succès.
Les doubles coques fournissent deux couches d'acier entre l'huile et la mer. La structure du bateau à deux coques est plus forte et le
navire échoué résiste plus longtemps (voir automne 1999, à l’Île d'Orléans et à l'Ilet Rouge (en face de Tadoussac), donc, presque dans
le Parc Marin du Saguenay, dans l'habitat du béluga du Saint-Laurent), un paquebot et un cargo se sont échoués dans la même région du
fleuve en moins de deux semaines. Le cargo s'est brisé en deux très rapidement. L'eau de ballast est séparée de l'huile. De plus, il n'y a
pas de poutres intérieures ce qui permet un nettoyage plus facile et une vidange plus rapide de l'eau de ballast. Huit pour cent des
pétroliers dans le monde ont des doubles coques. Des 31 pétroliers canadiens, un seul a une double coque. La majeure partie de l'huile
apportée au Canada l'est par des pétroliers étrangers et la plupart de ceux-ci ont une coque simple.
'' Mais vous savez qu'en tout temps, il y a un demi-pouce d'acier vieux de 20 ans qui vous sépare d'un désastre majeur''.
- Terry Pitman, pilote.
Inspection
Seulement 8 % des pétroliers étrangers entrant dans les ports canadiens sont inspectés. 25 % de ceux-ci sont déficients d'une
façon ou d'une autre. La plupart du temps, les officiers de la garde-côte se contentent de sermonner le capitaine au lieu de
détenir le bateau comme ils sont en droit de le faire (ce qui coûte des milliers de dollars par jour au propriétaire).
Effets des déversements d'huile
Les effets dépendent de l'emplacement et de la période. Les fuites détruisent le plancton, qui est la base de la chaîne alimentaire marine,
endommagent les sites de fraie des poissons et tuent directement les loutres et les oiseaux marins. Si la fuite survient durant la mue ou la
migration, des espèces entières d'oiseaux marins peuvent disparaître. Le tourisme peut être affecté pendant des années et l'eau potable
peut être polluée.
Nettoyage
Dans des conditions météo excellentes, pour de petites fuites et avec toute la technologie présentement disponible, 30 % de l'huile peut
être récupérée. Alors que la taille de la fuite augmente, le pourcentage diminue rapidement. (Exxon Valdez: 40,000 tonnes écoulées, 10%
récupérées).
Les besoins en nouvelle technologie sont donc immenses. Par exemple brûler l'huile, les inhibiteurs d'émulsion. Au Canada, l'équipement
est inadéquat. 60 % des installations inspectées ne pourraient pas contenir ou récupérer les fuites entre 15 et 30 tonnes.
Un cas typique de déversement: l'Exxon Valdez, Prince William
Sound, Alaska
Déversement accidentel de 40,000 tonnes d'huile (12 millions de gallons), un cinquième de l'huile du navire.
Sort de l'huile :
20 % de l'huile s'est évaporée (8% le premier jour). Un autre 50% s'est dégradé sur les plages, dans l'eau et les sédiments. Un autre 12
% est dans les sédiments profonds et 3 % demeure sur les côtes intertidales, en dépôt goudronneux. Les écumeurs mécaniques ont
enlevé 8 %. L'écumage a été le particulièrement décevant si on considère les efforts impliqués. Sur les plages, le lavage à l'eau chaude a
rendu brillants des rochers qui étaient noirs. Cependant, la forte pression de l'eau chaude cependant a tué les algues brunes. Cette
plante, qui constituait jusqu'à 90% de la masse totale des plantes dans le Prince William Sound, a totalement disparu en certains endroits
soumis à ce type de lavage. (Science, juillet 1992)
Impact sur les animaux
Loutres:
2,800 des 14,000 loutres résidentes sont mortes (seulement 878 carcasses ont été retrouvées). 357 loutres furent capturées et
emmenées dans des centres de réhabilitation. De celles-ci, 123 moururent en captivité, 37 des 234 survivantes furent jugées
inadéquates pour le retour à l'état sauvage et furent emmenées dans des aquariums. Les 197 survivantes restantes furent
libérées en août 1989, et 45 portaient des radios émetteurs implantés. 22 de ces 45 étaient mortes ou manquantes le
printemps suivant. Donc, 222 loutres (197 et 25 en captivité) furent capturées et réhabilitées, soient 18% du nombre minimum
contaminé (878 trouvées mortes et 357 emmenées dans les centres de réhabilitation).
Le pourcentage des loutres contaminées qui furent réhabilitées est plus faible. Premièrement,
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Pathologie de la faune 2002
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plusieurs loutres contaminées n'ont jamais été trouvées. Deuxièmement, plusieurs loutres emmenées
pour réhabilitation n'étaient pas contaminées, n'étaient que légèrement contaminées ou on ignorait
leur état de contamination (environ 70% au total).
En tout, Exxon a dépensé $ 18 millions pour les loutres, une moyenne de $ 50,420 pour chacune des 357 loutres qui sont
passées par les centres. Les sauveteurs ont demandé des bateaux au coût de $1,000 par jour, tout frais payés par Exxon.
Après que les loutres réhabilitées aient été libérées en nature, des loutres sauvages, jamais huilées
auparavant, commencèrent à mourir en grand nombre (en nature). Elles avaient été infectées par une
nouvelle souche de virus Herpès apportée par les loutres "réhabilitées". Cette souche de virus Herpès
cause des ulcères oraux et génitaux. Les lésions furent découvertes lorsque l'on transplantait des
émetteurs dans l'abdomen des loutres qui allaient être libérées. On croit présentement que les loutres
saines étaient porteuses du virus (infection latente) et que l'infection a été activée par le stress. On a
conclu que les animaux apportés pour traitement auraient dû être gardés en quarantaine pour un
certain temps, que les sauveteurs auraient dû porter des gants, autant pour leur protection que pour la
protection des loutres.
Contrairement aux cétacés et aux phoques, les loutres n'ont pas d'épaisse couche de gras souscutanée. Plutôt, elles emprisonnent de l'air dans leur fourrure. L'huile élimine l'air de leur fourrure et les
loutres huilées perdent 80 % de leur isolation. On pourrait penser que les animaux pourraient
compenser cette perte en ingérant plus de calories. Cependant, les loutres saines consomment déjà
quotidiennement 25 à 30 % de leur poids corporel en nourriture. Ainsi, elles ne peuvent pas manger
beaucoup plus pour compenser la perte de chaleur. Donc, les loutres huilées doivent être sorties de
l'eau froide sinon elles meurent. De plus, les loutres sont très sensibles à l'empoisonnement par l'huile,
empoisonnement causé par l'ingestion d'huile lorsqu'elles se lèchent le pelage et/ou par l'inhalation de
vapeurs d'hydrocarbures et par l'absorption à travers la peau.
Lésions
L'emphysème pulmonaire interstitiel était le syndrome le plus fréquent chez les loutres huilées
(73% des animaux huilés). La cause de cet emphysème reste inconnue. D'autres lésions qui
furent observées incluent des hémorragies gastriques, la lipidose hépatique et la nécrose
hépatocellulaire (manifestée par l'augmentation des enzymes hépatiques ALT, AP, GGT et la
diminution des protéines sériques). Les lésions hépatiques pourraient expliquer les
changements de comportement: cécité, stupeur, décubitus latéral ou dorsal.
L'augmentation de créatinine est due aux dommages rénaux (Rebar et al. Vet Pathol 32:346 (1995)).
Les niveaux sériques de créatinine et de cholestérol montrent la meilleure relation à
l'exposition à l'huile.
Les niveaux sériques de LDH prédisent le plus exactement le succès reproducteur après
l'exposition.
Les loutres mourant dans les centres de traitement souffraient de choc, de convulsions,
d'anorexie, d'anémie, de lymphopénie, de diarrhée, et montraient une élévation du potassium,
diminution de sodium et chlorure (à cause de la diarrhée) et de l'hypoglycémie (à cause du
choc et du jeûne).
Plusieurs animaux montraient une forte concentration d'hydrocarbures de pétrole dans leur
sang.
Traitement
Le meilleur traitement pour les loutres est :
- la fluidothérapie : les loutres ne boivent pas d'eau habituellement. Elles obtiennent l'eau
de la nourriture qu'elles ingèrent. La déshydratation fait diminuer l'appétit et un cercle
vicieux s'installe.
- antibiotiques, vitamines, supplément minéral.
Conclusion
Tout animal assez vigoureux pour se sauver devrait être laissé libre à moins que l'animal ne
se dirige vers une nappe d'huile. Et même alors, l'animal devrait être amené dans un enclos
flottant et non dans un centre de réhabilitation.
Rappel. Le déclin des loutres observé au cours de la dernière décennie (90s) (voir Régulation
des populations) ne serait pas dû au virus Herpès ou à l'huile mais bien au déclin des
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Pathologie de la faune 2002
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populations de phoques. Les orques, qui se nourrissent normalement de phoques, chassent
les loutres, la population de loutres diminue, ce qui fait augmenter les populations d'oursins et
donc diminuer la densité du kelp.
Recherche: parce que la loutre de mer méridionale est menacée, et parce qu'elle peut être
sujette à d'autres déversements d'huile, on fait maintenant de la recherche sur les effets de
l'intoxication par le pétrole en utilisant le vison, parce qu'il a plusieurs caractéristiques en
commun avec la loutre de mer (Mazet et al. AJVR 61: 1197(2000)). Comme la loutre, c'est un mustélidé, ils
ont un taux métabolique élevé, passent une bonne partie de leur temps à entretenir leur fourrure (et à ingérer les
contaminants qui y adhèrent), sont des mammifères semi-aquatiques, ont une diète variée, et sont susceptibles à
plusieurs contaminants environnementaux.
Phoques8
Le phoque commun est un des mammifères marins les plus nombreux dans le Prince Williams Sound.
Avant la fuite de pétrole, la population avait déjà subi une forte diminution (peut-être à cause de la
diminution des stocks de poissons, à cause de surpêche commerciale). En 1992, après la fuite, des
survols aériens révélèrent un déclin de la population de 34 % dans les zones huilées alors qu'un déclin
de 18 % était observé dans les zones non huilées. L'huile peut avoir doublé ou triplé la mortalité.
Depuis 1975, la population a diminué de 13,000 à 2,500 (1991).
On pensait auparavant que les phoques communs pouvaient éviter une nappe d'huile. C'était faux !
Pendant la fuite, on a observé régulièrement des phoques qui nageaient dans des nappes. Plusieurs
animaux finirent par être couverts d'un manteau noir et visqueux qui ne disparut qu'au printemps
suivant, à la mue. Ces phoques contaminés montrèrent de nombreuses anomalies de comportement
les phoques étaient léthargiques. Les animaux morts coulaient et on ne put compter exactement les
morts. 28 phoques furent tués pour être examinés. Des métabolites d'hydrocarbures étaient en
concentration 7 à 12 fois plus élevée dans la bile des phoques des régions huilées que dans la bile
des phoques du Golfe d'Alaska.
Lésions
- Enflure des gaines de myéline ressemblant aux dommages observés chez les humains
-
qui respirent de la colle ou des solvants à base d'hydrocarbures.
Cette étude étaye solidement que l'huile a tué 300 à 350 phoques communs (30 % des
phoques qui ont résidé sur les plages souillées pendant la fuite). Un peu moins bien
documenté, les cas des espèces suivantes semblent également dramatiques.
Orques épaulards
Quatorze orques épaulards ont disparu d'une bande de 36 orques qui résidait dans le Détroit de
Prince Williams alors que normalement, une bande de cette taille perd chaque année un à deux
membres. Les baleines commencèrent à disparaître 6 jours après la fuite (7 baleines). Les vétérinaires
et les biologistes n'eurent pas de carcasses à examiner.
Oiseaux
L'huile a tué un demi-million d'oiseaux dont 11 % des 11,000 pygargues à tête blanche (aigles à tête
chauve) qui habitaient le détroit. La moitié des canards arlequins dans les régions huilées furent tués
tout de suite et la plupart des survivants ne se sont pas reproduits. Un tiers des oiseaux marins
plongeurs ont été tués directement par la fuite.
Poissons
Saumon et hareng : Ces espèces continuent à frayer mais le nombre de poissons dans certaines
classes d'âge a diminué de façon dramatique et un grand nombre d'œufs morts et d'alevins souffrant
de malformations graves (écailles courbées ou absence de mâchoires) ont été observés. Les larves
fraîchement écloses dans ou près de la nappe d'huile étaient les plus touchées.
Moules
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Pathologie de la faune 2002
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Les composés les plus volatiles et généralement les plus toxiques de l'huile tendent à s'évaporer
rapidement. (En eau froide, les composés volatils persistent plus longtemps. C'est en partie pour cette raison qu'aux
Galapagos, en février 2001, l'écoulement a causé moins de dommages). À mesure que ce processus d'évaporation
continue, l'huile devient de plus en plus goudronneuse et devient biologiquement inerte. Il semble
cependant que de l'huile a échappé à ce processus de vieillissement en se cachant sous les lits de
moules. Les moules ne souffrent pas de cette contamination mais l'huile cachée là reste toxique pour
les humains et pour la faune.
Humains
Les autochtones de Prince Williams ont survécu des ressources marines pendant les derniers 7,000
ans. La chasse est à la base de la nourriture et de l'économie étant donné que les villages ne sont
accessibles que par bateau et par avion. La "National Oceanic and Atmospheric Administration"
(NOAA) a analysé les tissus de 309 poissons, 1080 mollusques, 19 canards, 16 cerfs de Virginies, 33
phoques communs, et 10 otaries. Des niveaux élevés de quelques composés aromatiques
caractéristiques de la contamination par l'huile ont été détectés.
Conclusions générales à tirer de l'Exxon
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•
Les mammifères marins morts coulent (en eaux arctiques, à cause de l'absence de prolifération
bactérienne et de la production de gaz qui l'accompagne généralement).
La plupart des mammifères marins n'évitent pas l'huile.
Le nettoyage des berges n'empêche pas les phoques de se souiller.
L'hypothermie est le facteur le plus néfaste pour les loutres.
Les composés les plus volatiles et généralement les plus toxiques de l'huile tendent à s'évaporer
rapidement. A mesure que ce processus d'évaporation continue, l'huile devient de plus en plus
goudronneuse et devient biologiquement inerte.
Huile vieillie (non volatile) Si les pinnipèdes sont souillés par des fractions d'huile non volatile ou
par de l'huile déjà vieillie, il est préférable de les laisser tranquilles.
Huile fraîche (riche en composés volatiles). L'huile fraîchement répandue produit au contraire des
effets toxiques très rapidement (en quelques heures).
Après l'accident du Exxon, la Californie a imposé une taxe environnementale sur l'huile qui rentre
dans l'état. Ce fonds est utilisé pour répondre aux urgences qui surviendront. Par exemple, un centre
de réhabilitation a été construit pour 2 millions de dollars. Des vétérinaires y travaillent (pou
renseignements, voir le Dr Jean-Martin Lapointe). Le Dr D. Jessup embauchait un vétérinaire pour y
travailler en 1998. Les Drs S. Lair et S De Guise, deux anciens du département de pathologie et
microbiologie de la FMV, se sont présentés à l'entrevue et ont obtenu mais refusé la position.
L'Alaska a obligé depuis lors les compagnies à développer un plan de protection de la faune et à
mettre sur pied un plan d'urgence pour les fuites d'huile. Le Texas a imposé aussi une taxe sur l'huile
qui servira à financer un programme de réponse pour la faune contaminée par l'huile. Et le Canada, le
Québec ?
La compagnie Irving, du Texas, a accepté de régler pour 900 millions de dollars, sans compter les
frais de nettoyage encourus.
L'affaire s'est conclue en 2001 alors que Exxon a été condamnée à verser $ 5 milliards US en
dédommagement pour négligence (le capitaine était ivre).
Pour en savoir plus, voir: http://www.ledevoir.com/ecol/2000b/ping210700.html
Référence: Marine mammals and the Exxon Valdez. Academic Press. San Diego. CA pp. 395 pp.
Unités
1 tonne = 7 barils = 244.4 gallons impériaux = 1111 litres
1 baril = 35 gallons impériaux = 159 litres
5. Protection des espèces menacées autrement
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
que par la protection d'habitat
5.1 Techniques de reproduction assistée
Les mesures les plus simples n'étaient pas mises en pratique dans les zoos ou dans les centres de
réhabilitation.
Éléphants
: On ne réalisait par exemple que seules les éléphants femelles en très bonne forme pouvaient
mener à terme une gestation de 22 mois avec un foetus de 200 livres. Ou encore que seul un personnel
attentif et entraîné peut détecter les 4 ovulations par année. En Ontario, au African Lion Safari, près de
Cambridge, on suit les profils hormonaux des femelles (oestrogènes, progestérone, LH) pour déterminer le
temps optimal de l'accouplement. On suit la gestation aux ultrasons (seulement jusqu'à un an, pas après car
le foetus est tout simplement trop gros).
Rhinocéros blancs:
le même parc Safari tente de faire reproduire le rhinocéros blanc, avec beaucoup
moins de succès. Les rhinos blancs femelles ont des cycles de 70 jours mas plus de 50 % d'entre elles n'ont
pas de cycle du tout et on ignore pourquoi. Les rhinos femelles sont affectées par des tumeurs et des kystes
du tractus génital quand elles ne sont pas accouplées à un jeune âge et ce sont elles qui n'ont pas de cycle
plus tard.
5.1.1 Insémination artificielle
Les zoos avaient l'habitude de prélever leurs spécimens à partir de l'environnement sauvage. Ceci a contribué
à l'extinction de certaines espèces. Depuis l'arrivée de l'insémination artificielle, on peut capturer et anesthésier
le mâle en nature, collecter le sperme et relâcher le mâle par la suite (Ex.: guépard).
5.1.2 Fertilisation in vitro
La fertilisation in vitro est utilisée pour augmenter la diversité génétique des espèces menacées. En décembre
1995, un gorille des basses-terres a donné naissance au premier gorille-éprouvette. Les pays où les gorilles
vivent en nature ont cessé d'exporter ces animaux dans les zoos américains en 1976. Plusieurs gorilles en
captivité ne produisent pas ou produisent peu de descendants. Le résultat est que le pool génétique des
gorilles en captivité s'appauvrit. Par la fertilisation in vitro, le sperme et les œufs d'animaux gardés en des
endroits (pays) différents sont prélevés pour créer des embryons qui peuvent être implantés dans une femelle
ou congelés pour usage ultérieur. Ainsi, le sperme et les œufs peuvent être importés de gorilles en liberté pour
être implantés chez des gorilles en captivité ou encore, les embryons produits peuvent être implantés chez des
gorilles en liberté. Les gorilles de basses terres pourraient être utilisés comme mères pour les embryons des
gorilles de montagnes (au Rwanda), beaucoup plus rares (il n'y a pas de gorilles de montagnes en captivité).
A date (1999), la fertilisation in vitro a été utilisée chez les chats, le babouin et les singes rhésus.
Antilopes
Au Kenya, des embryons ont été implantés du bongo, une antilope rare, chez une antilope plus commune,
l’élan.
5.1.3 Clonage
En Australie, le tigre de Tasmanie mesurait 1 m de long, il avait un long museau et une queue semblable à
celle d'un chien. Parce qu'ils attaquaient le bétail, ces animaux ont été la cible de chasseurs jusqu'à leur
extinction. Le dernier est mort au zoo de Hobart en 1936. Le clonage des animaux domestiques (Ex.: Dolly) a
suscité des espoirs de ressusciter des espèces éteintes. Ainsi, le curateur du musée Australien Michael Archer
pense cloner des tigres de Tasmanie à partir d'un nouveau-né bien conservé qui a été mis dans l'alcool en
bouteille en 1866.
Ces espoirs sont vains (pour l'instant). En effet, pour cloner un animal, il faut avoir des cellules de cet animal
en culture. Puis, on fusionne une de ces cellules avec un ovocyte vidé préalablement de son noyau. L'embryon
qui résulte de cette fusion est introduit dans l'utérus d'une femelle de la même espèce ou d'une espèce proche,
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
qui joue le rôle de récipient. (Elle ne contribue pas au matériel génétique de l'embryon). (Le processus est
donc asexué).
(On peut cloner des gènes de cellules mortes dont l'ADN n'est pas trop endommagé).
Récemment, des chercheurs voulaient essayer de cloner un mammouth congelé dans la glace de Sibérie.
Pour l'instant, il semble impossible de cloner des animaux dont on ne peut avoir de cellules vivantes parce que
les noyaux sont endommagés. Des chercheurs essaient de "reconstruire" des noyaux à partir des tissus
congelés (de mammouths par exemple) pour permettre le clonage .
Mais même si on obtient un embryon, il faut ensuite un utérus pour l'implanter (l'utérus d'une femelle de la
même espèce). Or on n'a évidemment pas de femelle d'une espèce…disparue (NP Mai 13 1999). Dans le cas
des mammouths, il est possible que les éléphants soient assez semblables pour permettre l'implantation de
l'embryon hybride (noyau de mammouth, cytoplasme d'ovule d'éléphant) dans l'utérus d'une femelle éléphant.
5.1.4 Méthodes anticonceptionnelles
Dans certains parcs, la surpopulation de certaines espèces peut devenir un problème (Ex.: les éléphants des
réserves africaines sortent des réserves pour piétiner les villages voisins). A part la chasse et la translocation
(transport d'animaux sauvages dans un nouvel habitat), il n'y avait pas beaucoup de méthodes pour régler ce
problème. On a maintenant des méthodes anticonceptionnelles, telles des implants de stéroïdes, la
stérilisation chimique ou chirurgicale, l'immunisation des femelles contre le zona pellucida (une composante de
l'œuf) (JWD 34: 539-546(1998)).
5.2 Contrôle des pestes par des virus
5.2.1 Lapin et renard australiens
Le lapin et le renard roux ont été apportés par les Européens en Australie où ils se sont multipliés de façon
incroyable. Ils sont responsables de l'extinction d'une vingtaine d'espèces de marsupiaux. On envisage de les
contrôler avec un virus fabriqué génétiquement. Un gène codant pour une protéine de spermatozoïde de lapin
serait introduit dans le virus. Le virus trafiqué serait libéré en nature où il induirait le système immunitaire des
femelles renard et lapin à attaquer le sperme du mâle.
Les dangers de cette approche sont nombreux: le virus pourrait s'attaquer à des espèces domestiques. Le
virus choisi doit donc être spécifique pour les espèces cibles. En effet, l'Australie compte une espèce de
canidé sauvage, le dingo, et le virus ne doit pas stériliser les femelles dingos ou encore les chiens
domestiques (quoique...). Pour le lapin, on a choisi le virus de la myxomatose. On n'a pas trouvé de virus
spécifique au renard5.
De plus, le lapin et le renard doivent être éliminés simultanément: si les lapins meurent avant les renards, les
renards affamés se tourneront vers les petits mammifères australiens tels que le numbat, un insectivore ayant
l'air d'un écureuil, et le wallaby, une sorte de kangourou miniature (voir orque épaulard, otarie et phoque dans
Écosystèmes).
Le virus pourrait se répandre en Europe. L'arrivée en France d'un virus stérilisateur de lapins ne serait pas
bienvenue !!! Même sans stérilisation, dans certaines régions, seules certaines femelles renards dominantes
sont fertiles. Il faut donc être sûr que la stérilisation, en détruisant l'équilibre social des renards, ne rendra pas
fécondes les femelles renards qui étaient dominées (et donc stériles) avant l'arrivée du nouveau virus.
L'approche est interdisciplinaire: elle intéresse des immunologistes, des virologistes, des éthologistes (et des
vétérinaires?).
5.2.3 Maladie hémorragique virale : calicivirus.
En 1989, les Australiens ont aussi employé un calicivirus de lapin originaire de Chine pour se débarrasser des
lapins européens qui sont une peste en Australie à cause de l'absence de prédateurs naturels. (Ce virus cause
la maladie hémorragique virale du lapin de Garenne. Elle est apparue au Royaume-Uni en 1992). 80% des
lapins sont morts en quelques jours sur une île du sud de l'Australie où on avait fait les premiers essais. Puis
l'expérience s'est détraquée: des lapins infectés se sont probablement sauvés et ont atteint la terre ferme ou
des insectes emportés par le vent ont peut-être apporté le virus sur la terre ferme. (L'hypothèse des insectes
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
est favorisée. Les insectes seraient responsables du transfert de l'infection entre lapins). Quoiqu'il en soit, on
ne voulait pas répandre le virus à cette période de l'année car les lapins ont leurs petits. Les lapereaux ne sont
pas rendus malades par l'infection. Ils pourraient donc facilement devenir immuns au virus s'ils sont infectés
trop tôt. En 1998, le virus se répandait à toute l’Australie à une vitesse de 424 km par mois au printemps (mois
chauds et humides) et de 9 km par mois pendant l'été (mois frais). (Science 270: 583. 1995)
5.3 Polymerase chain reaction (PCR)
La technique de la réaction en chaîne de la polymérase (polymerase chain reaction (PCR)) en chaîne permet
de copier des milliers de fois le même segment d'ADN. On obtient une quantité de ce bout d'ADN
suffisamment grande pour permettre son analyse détaillée. La technique connaît une foule d'usages dans tous
les domaines de la biologie. La protection des espèces menacées profite aussi de ces applications.
5.3.1 Baleines
Les baleines jouissent d'un statut privilégié. Les nations qui chassaient la baleine se sont réunies en une
association, la IWC (International Whaling Commission) qui édicte des règlements aux pays membres.
Ces nations ont convenu de renoncer à la chasse. Cependant, le Japon, un pays membre de l'IWC, a obtenu
que la chasse au petit rorqual soit maintenue mais dans un but strictement "scientifique". On savait que les
Japonais surestimaient le nombre des petits rorquals encore existants et qu'ils sous-estimaient le nombre de
leurs prises. Les autres nations membres de la IWC ont quand même toléré les excès des japonais en se
disant qu'un peu de contrôle est meilleur que pas de contrôle du tout. On se doutait aussi que les Japonais
chassaient également d'autres espèces de baleines et en revendaient la viande à l'intérieur du Japon.
Cependant on n'avait pas les moyens d'analyser la viande et de prouver son origine illégale étant donné que
les lois internationales prohibent l'exportation de spécimens d'espèces menacées et donc rendent impossible
l'analyse de tissu à l'extérieur du Japon.
Des américains sont allés au Japon pour déterminer de quelles espèces provient la viande de baleine vendue
sur le marché japonais: ils ont fait acheter de la viande sur le marché japonais avant leur départ. Dans leur
chambre d'hôtel, ils ont isolé l'ADN de la viande puis ils ont utilisé un appareil à PCR qu'ils avaient apporté
avec eux afin d'amplifier des régions spécifiques de cet ADN. Ils ont ensuite rapporté l'ADN "synthétique" aux
États-Unis où ils ont pu l'analyser en toute légalité étant donné qu'il ne s'agissait plus d'un spécimen biologique
extrait d'un animal mais bien d'une "photocopie" du matériel génétique!
Ils ont réussi à prouver que la viande de baleine étiquetée comme étant de la viande de petit rorqual tué pour
des fins scientifiques ou pour des fins de subsistance était souvent de la viande de baleine à bosse ou d'autres
espèces dont la chasse avait été interdite par la IWC.
5.3.2 Études génétiques des animaux sauvages
On étudie aussi la génétique de population à l'aide du PCR. De petits bouts d'ADN répétés à travers le
génome sont amplifiés à l'aide d'amorces qui flanquent ces courtes répétitions (mini ou micro satellites, selon
le nombre de bases). Puis on analyse le résultat de la réaction PCR sur un gel par électrophorèse, on
transfère l'ADN sur une membrane et on analyse la membrane par Southern blot en utilisant comme sonde le
mini ou microsatellite approprié. Il en résulte un patron qui est unique à chaque individu. C'est l'équivalent
d'une étiquette, mais sans capturer ou manipuler l'animal. On peut alors établir l'identité d'un individu, mais
aussi décider si une population d'animaux est génétiquement distincte, si elle est mêlée à une autre. On peut
aller dans les musées récupérer des bouts de peau ou d'os et faire des études rétrospectives. On peut
ramasser des poils en suspendant un fil rugueux au-dessus des sentiers empruntés par les animaux et on
analyse les poils restés accrochés.
L'avantage du PCR est de pouvoir d'utiliser très peu d'ADN (du tissu de la grosseur d'un ongle suffit) ou de
l'ADN endommagé (spécimen de musée, carcasses d'animaux).
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
6. MALADIES DE LA FAUNE
6.1 Pourquoi diagnostiquer les maladies de la faune?
Réf.: Le Médecin vétérinaire du Québec. Numéro spécial sur l'environnement. Juillet 1994.
Parce que:
-
-
-
La faune peut être un réservoir de maladies pouvant affecter la santé publique et les animaux
domestiques. Ex.: rage et renards, peste et rongeurs, maladie de Lyme et chevreuil, brucellose et
caribous, maladie de Newcastle et cormoran au Québec.
La faune est une sentinelle de la pollution environnementale. Les animaux sauvages sédentaires
trouvant leur nourriture dans leur entourage immédiat souffrent d'empoisonnement avant l'homme qui
partage le même milieu.
Ex.: empoisonnement au mercure (visons, poissons et Inuits au Québec et en Saskatchewan) et au
fluor (chevreuil).
La faune représente une contribution économique aux revenus publics liés aux activités récréatives
telles que la chasse, la pêche et le tourisme. Les maladies peuvent affecter cette ressource.
Les maladies doivent être connues pour guider les décisions des gestionnaires de la faune.
Ex.: En 1980, une grande zone de marécage avait été créée aux États-Unis (Kesterson Reservoir voir Zahm dans Leighton, Ann. Méd.
Vét. 138:221-227, 1994) pour offrir un habitat aux oiseaux aquatiques. On ignorait que l'eau contenait une forte concentration en
selenium, très toxique pour les oiseaux. Après avoir beaucoup investi en temps et en argent, il a fallu fermer la réserve et dissuader les
oiseaux de l'utiliser.
En Saskatchewan, certaines années, certains lacs sont des pièges à canards parce que des millions de canards y contractent le
o
botulisme et en meurent. Clostridium botulinum se multiplie bien seulement à une température supérieure à 30 C, dans des conditions
anaérobiques. Les carcasses de canards en putréfaction lui offrent donc de bonnes conditions de croissance. Les larves de mouches se
nourrissant de la carcasse concentrent la toxine botulique. Elles sont ingérées par d'autres canards qui meurent, empoisonnés par la
toxine. D'autres années, ces mêmes lacs ne causent pas la mort de canards mais sont au contraire très productifs et le nombre de
canards qu'ils hébergent avec succès est alors bien supérieur au nombre de canards produits dans d'autres lacs, qui n'ont pas d'histoire
de botulisme. D'autres lacs sont salés et les canetons meurent empoisonnés par le sel.
De plus en plus, on transporte les animaux de la faune dans des endroits où ils ne sont pas présents
naturellement. Ils peuvent introduire de nouvelles maladies à ces sites:
Ex.: Fascioloides magna introduit par l'importation de wapitis en Italie en 1865 à partir des États-Unis. Ce
parasite pourrait causer la disparition des chevreuils et des mouflons italiens.
Ex.: bisons canadiens porteurs de brucellose et de tuberculose, le transport de ratons-laveurs pour la chasse,
ce qui a propagé la rage.
-
La faune fournit des modèles de laboratoire pour étudier les maladies humaines.
Ex.:
- marmotte et hépatite B
- tatou et lèpre
- sarcome du doré et sarcome de Kaposi
-
Protection des espèces menacées.
Ex.: bélugas du Saint-Laurent, encéphalite chez la grue blanche, distemper chez le furet à pattes
noires.
L'influence des parasites sur les populations d'animaux sauvages est difficile à déterminer.
Par exemple, un animal peut très bien être infecté par un ou deux helminthes pulmonaires ou intestinaux sans
que sa santé ne soit menacée.
En général, les microparasites (virus, bactéries) causent des infections transitoires et induisent une immunité
de longue durée alors que les macroparasites (= helminthes ou "vers") produisent des infections persistantes
avec réinfection continuelle.
63
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
6.2 Microparasites
6.2.1 Transmission
En général, la transmission des petits "parasites" (virus et bactéries), appelés microparasites, est inefficace si
on la compare à la transmission des "macroparasites" (helminthes ou "vers"). Les microparasites peuvent être
considérés comme des parasites qui se multiplient rapidement dans l'hôte. Leur transmission d'un hôte à
l'autre est directe (il n'y a pas d'hôte intermédiaire). Donc, les individus infectés doivent être près les uns des
autres pour que la transmission de l'agent infectieux ait lieu.
Cette proximité physique entre les individus s'observe chez les animaux sauvages qui ont un comportement
grégaire, soit permanent soit seulement au moment de la reproduction. Les ongulés ont généralement un
comportement grégaire (ils forment de grands troupeaux) (bisons et tuberculose et brucellose en Alberta), les
oiseaux marins se rassemblent en colonies pour la reproduction, les insectes sociaux forment des
communautés complexes (par exemple, plusieurs populations d'insectes tropicaux sont régulées par des
épidémies de baculovirus et de microsporidies), et bien sûr aux troupeaux d'animaux domestiques (troupeaux
laitiers, de boucherie) et sauvages, comme les élevages de chevreuils et de wapitis. Par exemple, la densité
(nombre d'animaux par unité de surface) des populations de renards en Europe a été longtemps conditionnée
par des épidémies de rage.
6.2.2 Virulence
En général, il n'est pas avantageux pour l'agent infectieux de tuer l'hôte. Il y a des exceptions (voir rage).
L'agent est alors produit en grande quantité et doit se transmettre avant la mort de l'animal infecté pour assurer
sa transmission.
6.3 Macroparasites
Il s'agit des "parasites", au sens courant du terme, c'est-a-dire les vers ou helminthes.
6.3.1 Transmission
Contrairement à la transmission des microparasites, celle des macroparasites (helminthes "vers") est très
efficace. En effet, elle ne requiert pas de contact physique intime entre les individus. Les helminthes causent
plusieurs morts dans les populations naturelles32. Par exemple, les infections parasitaires du cerveau causent
11% à 14 % des mortalités chez le dauphin tacheté.
Un parasite des primates, Plasmodium knowlesi, est très pathogénique pour le macaque rhésus mais produit une maladie peu sévère
chez un autre macaque, M. fascicularis. Le macaque rhésus est distribué partout en Asie, où le vecteur de Plasmodium est absent. Là où
le vecteur est présent, le macaque rhésus est remplacé par M. fascicularis. Plasmodium favorise donc une espèce de macaque au
détriment d'une autre.
Dans plusieurs cas, différents macroparasites se joignent pour tuer l'hôte. Ainsi, la principale cause de mortalité chez le
mouflon bighorn (Ovis canadensis) est probablement la co-infection par deux vers du poumon, Protostrongylus stilesi et P. rushi qui
prédisposent l'animal à des pneumonies fatales.
6.3.2 Virulence
Si le macroparasite tue son hôte, alors il contrôle la densité de la population de l'hôte. Si la population-hôte
n'est pas dense, il y a peu de mortalité. Si la densité de la population-hôte augmente, il y a augmentation de la
transmission de parasites, la mortalité augmente et la densité de la population-hôte diminue.
6.3.3 Sévérité de l'infection
En pratique, le nombre moyen de parasites par hôte augmente proportionnellement avec la densité de la
population de l'hôte jusqu'à atteindre un plateau. Cette relation a été observée chez les ongulés (mouflon
bighorn par exemple) et chez les poissons marins32. Ces principes valent aussi pour les populations humaines
anciennes et pour les populations primitives actuelles.
64
Pathologie de la faune 2002
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6.4 Épidémiologie
Référence (très bon livre, bourré d'exemples pratiques et souvent ...canadiens): Wobeser, GA. Investigation and Management in Wild
Animals. Plenum Press, 1994. 265 p.
6.4.1 Prévalence
Nombre d'animaux avec la maladie à un moment défini
Nombre total d'animaux dans le groupe à ce moment
Ex.: Dans une étude sur les chevreuils de l'île Anticosti en août 1983, 180 chevreuils (sur
une population de 200,000) sont infectés par P. tenuis.
Prévalence = 0.09 %
6.4.2 Incidence
Nombre de nouveaux cas/période définie
Nombre d'animaux à risque dans le groupe pendant cette période
L'incidence est donc une mesure du nombre de nouveaux cas dans un groupe pendant une période donnée.
Les animaux qui avaient la maladie ou qui sont immunisés contre la maladie au début de l'étude ne devraient
pas être considérés, vu qu'ils n'étaient pas à risque.
La prévalence est plus facile à mesurer que l'incidence parce qu'on compte les animaux malades une seule
fois. Malgré tout, elle est difficile à mesurer car souvent on ignore le nombre total d'animaux composant une
population (les bélugas du Saint-Laurent sont une exception à cet égard).
L'incidence est peu utilisée chez les animaux sauvages parce qu'il est difficile de suivre la population dans le
temps (plusieurs observations pendant plusieurs années).
En fait les taux mesurés chez les animaux sauvages ne sont ni l'incidence ni la prévalence. On utilise le plus
souvent la proportion d'animaux infectés sur le nombre d'animaux collectés.
La proportion de caribous infectés par la brucellose dans un échantillon collecté au cours d'une année donnée
comprend en fait 1) la prévalence de la maladie au début de l'année, et 2) l'incidence (les nouveaux cas)
pendant toute l'année. Il serait donc plus pertinent de parler de "proportion", la proportion de caribous infectés
dans un échantillon collecté pendant l'année, non de prévalence ou d'incidence.
Chez les animaux sauvages, on mesure la plupart du temps la séroprévalence d'une maladie. On peut
mesurer par exemple "l'incidence" de l'exposition du faon à une infection (pas à la maladie elle-même) durant
sa première demi-année de vie en déterminant les niveaux d'anticorps présents chez les faons tués par les
chasseurs à l'automne. Pour que cette approche soit valable, il faut être sûr que:
les chevreuils ne sont pas infectés à la naissance.
l'exposition ne cause pas la mort des faons infectés (sinon on a peu de chances d'en échantillonner,
parce qu'ils sont morts).
les anticorps sont le résultat de l'exposition active (pas de la présence des anticorps maternels)
tous les animaux infectés développent des anticorps.
les anticorps persistent à des niveaux mesurables pendant 6 mois.
Le taux d'animaux séropositifs mesuré dans cette étude sous-estimerait le taux réel d'exposition parce que les
animaux récemment exposés n'ont pas eu le temps de développer des anticorps.
6.4.3 Taux reproducteur (Ro)
Après l'arrivée d'une maladie dans une population, les chances que la maladie s'établisse dans cette
population dépend presque uniquement du nombre moyen d'infections secondaires produites quand un
65
Pathologie de la faune 2002
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animal infecté est introduit dans une population où tous les hôtes sont susceptibles. C'est le taux
reproducteur ou Ro.
Par exemple, "Ro =1" signifie qu'un seul cas secondaire survient à partir de chaque cas introduit dans une
population (en moyenne). Dans ce cas, une infection est à peine capable de se maintenir à l'état enzootique.
Si Ro est plus petit que 1, l'incidence (le nombre de nouveaux cas survenant pendant un certain temps)
diminue. Une maladie se maintiendra donc dans une population seulement aussi longtemps que le taux
reproducteur de la maladie sera égal ou supérieur à 1.
Tout programme de contrôle de maladie visera donc à faire diminuer Ro sous la valeur 1. Malheureusement,
on ne connaît pas le Ro de la plupart des maladies des animaux sauvages. Des modèles ont été quand même
conçus pour estimer le seuil de la population nécessaire pour des épizooties de maladies importantes
(tuberculose, brucellose).
Ro dépend en grande partie de la densité de la population et de la durée de la maladie.
Plus la maladie est brève, plus Ro devra être élevé pour qu'une maladie donnée s'établisse dans une une
population. Si on veut arrêter une maladie, on peut donc penser à diminuer Ro en abattant des animaux, par
la chasse par exemple. On peut aussi faire diminuer la proportion des animaux susceptibles à la maladie en
vaccinant (Ex.: rage et vaccin oral). En général, la proportion "p" d'animaux qui devrait être vaccinée pour
contrôler une maladie doit excéder 1-1/Ro. Par exemple, si Ro=4, on doit vacciner plus de 75% de la
population. Si Ro=2, on doit vacciner 50% et plus. Chez l'homme, on estime le Ro de la rougeole de 14 à 18.
Donc, plus de 96% de la population doit être vaccinée pour prévenir l'établissement de la maladie.
Une fois qu'une nouvelle maladie s'est établie dans une population, elle se répand souvent comme une vague
épidémique à une vitesse qui dépend aussi de Ro, mais aussi de la lacune de génératione et de la distribution
spatiale des contacts faits par un animal infectieux avec des animaux susceptibles.
Une maladie est dite endémique si elle persiste dans une population. La possibilité qu'une maladie devienne
endémique dépend aussi de Ro mais elle dépend aussi de la disponibilité d'une population suffisamment
grande et répandue sur un espace suffisamment grand. Si une maladie est courte (par exemple, une maladie
virale grave somme le distemper chez les phoques), alors une population plus grande est requise. Si une
maladie dure longtemps (par exemple, les maladies parasitaires), elle peut s'établir même dans une petite
population.
Ces concepts semblent simples mais en pratique, la situation est compliquée: par exemple, si une maladie
mortelle fait diminuer la densité de la population affectée, les contacts entre animaux seront moins nombreux
et la maladie se répand alors plus lentement.
6.5 Impact des maladies sur la faune
6.5.1 Le passé
Les dinosaures s'éteignaient il y a 70 millions d'années. On soupçonne maintenant que leur disparition est due
à un météore qui a fait baisser la température du globe.
Plus de 130 espèces animales se sont éteintes, dont le mammouth, le mastodonte, le paresseux terrestre, et
les tigres à dent de sabre. Ces espèces se sont éteintes seulement 11,000 ans avant J.-C, et dans un laps de
temps aussi court que peut-être 400 ans. Le mammouth a survécu sur une île de Sibérie jusqu'à 4,000 ans av.
J.C. (en Égypte, on construisait alors les pyramides).
Quel rôle les maladies ont-elles joué dans ces disparitions ? (MacPhee, Ross D.E. Am. Museum of Natural History, WDA
conference, Athens, 1999; Preston Marx, Greenwood, Alex D.)
Le tigre à dents de sabre était un grand carnivore à (très) longues canines auquel les premiers Indiens ont dû
se frotter. Pourquoi a-t-il disparu ? Des chercheurs (S. O'Brien du National Cancer Institute, Frederick, Maryland. Retenir ce
nom, il reviendra) veulent utiliser la technique de PCR pour détecter (peut-être) un parvovirus ou d'autres virus
félins qui auraient causé la disparition de ces espèces. Une telle étude donnerait en même temps une idée de
l'évolution des virus dans le temps. C'est aussi O'Brien qui a découvert que. À travers le monde, les guépards sontfdes animaux
e
Generation gap: le temps requis entre l'acquisition de la maladie par un individu et la possibilité de la
transmettre.
f
Anglais: cheetahs
66
Pathologie de la faune 2002
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"monoclonaux", génétiquement presque identiques. C'est aussi le même chercheur qui a détecté le virus de l'immunodéficience acquise
des félins (FIV) chez les populations de félidés sauvages.
D'autres chercheurs (PA Marx) recherchent des herpesvirus et des rétrovirus dans les tissus des mammouths
de l'île de Wrangel (Sibérie) pour savoir pourquoi plusieurs espèces de proboscidéens (éléphants) ont disparu
pour ne laisser que l'éléphant d'Asie et d'Afrique.
6.5.2 Le présent
Il y a continuum entre santé et maladie. Il est très difficile de déterminer quand une lésion ou une anomalie
fonctionnelle n'est plus accidentelle (c'est-à-dire une anomalie trouvée lors de l'examen d'un animal sans
sligne clinique, tué par une automobile par exemple) et qu'elle devient cause de maladie, c'est-à-dire qu'elle
affecte les fonctions physiologiques de l'animal.
Exemples:
1) Tous les ratons-laveurs sauvages ont un grand nombre d'éosinophiles dans le chorion de l'intestin. Doit-on parler
de gastro-entérite éosinophilique ?
2) Les bélugas (et tous les mammifères marins en général) ont un grand nombre d'éosinophiles dans à peu près
tous les tissus. Doit-on parler de syndrome hyperéosinophilique ?
3) Certaines revues scientifiques spécialisées en faune sont remplies d'articles rapportant les niveaux d'anticorps
existant au sein d'une population d'animaux sauvages contre tel ou tel agent infectieux (séroprévalence). Il faut
se rappeler que ces études indiquent le degré d'exposition à un agent infectieux et rien d'autre. Elles n'indiquent
que rarement l'impact réel de l'agent infectieux sur la population (voir Épidémiologie).
6.5.3 Impact de la maladie et biologie de l'hôte
L'impact d'une maladie sur la dynamique de population d'une espèce dépend de la biologie de cette espèce.
Par exemple, plusieurs oiseaux aquatiques ont un seul oisillon par couvaison, s'occupent de cet oisillon
pendant une longue période, et connaissent une grande longévité et une maturité tardive. Chez ces oiseaux, la
perte d'adultes sera particulièrement dévastatrice alors que la perte d'oisillons, due à la rareté de nourriture par
exemple, est fréquente et n'a que peu de conséquence. La même situation prévaut chez les mammifères.
Chez les phoques, la mortalité massive due au distemper chez les phoques adultes de la mer Baltique a eu de
fortes répercussions, alors que par comparaison la mortalité chez les jeunes n'a eu que peu d'effets.
Bélugas du Saint-Laurent, 1982 à 1996: nous avons eu à la FMV deux femelles allaitant retrouvées mortes
avec une lacération abdominale sigmoïde. Ce genre de blessure est fait par les hélices de petites
embarcations, probablement par les embarcations servant à l'observation des baleines. La perte de deux
femelles adultes (particulièrement avec des petits) est grave pour cette petite population d'environ 600
animaux, d'autant plus que l'allaitement dure près de deux ans.
L'infection peut altérer de façon très subtile la performance reproductive des animaux et ainsi contribuer à
l'équilibre naturel entre le parasite et l'hôte.
Exemple: l'éclat du plumage du mâle chez certains oiseaux peut être influencé par la résistance génétique de
l'individu à des parasites. Les animaux avec le plus d'éclat tendent à être plus résistants aux parasites. En
choisissant ces mâles comme partenaires, les femelles élèvent une progéniture ayant les gènes codant pour la
résistance aux parasites.
Les maladies de la faune sont seulement un facteur parmi une multitude qui influencent la dynamique des
populations chez les animaux de la faune. La compétition, (Ex.: loup-coyote), la prédation (lynx-lièvre), la perte
d'habitats aux mains de l'homme, la pollution sont des facteurs tout aussi importants. Par contre, il est facile de
comprendre qu'une population dont les effectifs sont déjà réduits par la perte d'habitat est plus vulnérable à la
maladie et ce, pour une foule de raisons qui ne sont pas toujours évidentes (Ex :. Guépard, puma (panthère de
Floride)).
Les animaux sauvages morts de maladie (ou morts pour toute autre raison) sont rarement récupérés et encore
moins examinés à moins que la maladie ait foudroyé un grand nombre d'animaux en peu de temps. Autrement
les carcasses sont détruites par les prédateurs, les nécrophages (Ex. Bélugas, poulamons) ou encore elles ne
sont pas rapportées aux autorités par des témoins qui peuvent considérer les mortalités comme normales ou
même comme un bienfait.
Exemples
<
67
Certains cultivateurs empoisonnent les bernaches parce qu'elles mangent le maïs ou encore certains éleveurs de poules
empoisonnent les canards parce que ceux-ci s'ébattent dans l'étang qui sert de source d'eau potable à leur poulailler
Pathologie de la faune 2002
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(Newcastle!!).
Un pêcheur a harponné un béluga en 1983 parce qu'il croyait que Pêches et Océans Canada donnait une prime. Il téléphona à
l'auteur de ces lignes (aux bureaux de Pêches et Océans Canada) pour savoir où toucher la "prime".
Les phoques qui dérivent quelques fois dans les eaux montréalaises sont réhabilités (à grand frais) au Biodôme. Ils sont cependant
souvent abattus lorsqu'ils sont relâchés dans le Bas du Fleuve par les chasseurs locaux (Dr Dancosse, comm. personnelle).
<
6.5.4 Impact sur la reproduction
Même si une maladie ne cause pas de mortalité, elle peut causer énormément de dommages si elle diminue
l'efficacité de la reproduction dans une population d'animaux sauvages. Par exemple, une baisse de
reproduction de 10% chez une population d'oiseaux aquatiques cause plus d'effets sur cette population que ne
le ferait une maladie causant une mortalité importante mais sporadique. C'est pourquoi des polluants comme
le DDT ont été dévastateurs pour les oiseaux. Le recrutement de la population (le nombre d'oisillons) baissait
subitement à cause des bris des œufs, nombreux à cause de la minceur de la coquille. Noter que le DDT est
maintenant interdit au Canada et aux États-Unis. Il est cependant en vente libre au Mexique et dans plusieurs
autres pays.
Les bélugas du Saint-Laurent sont fortement contaminés par le DDT. On ignore l'impact de celui-ci sur leur
reproduction, qui semble moins élevée que celle des bélugas de l'Arctique.
Les anguilles migrent des Grands vers la mer des Sargasses chaque année en passant par le Saint-Laurent et
les bélugas en ingèrent alors une grande quantité. L'ingestion d'anguilles constitue la moitié de la dose
annuelle de polluants ingérée par les bélugas.
Il y a eu diminution de la pollution des Grands Lacs par le DDT mais on n'a pas vérifié si les niveaux tissulaires
de DDT ont baissé chez les anguilles
6.5.5 Récupération des carcasses
On trouve à peine le tiers des carcasses de canards dans des marécages lorsque des recherches intensives
sont entreprises.
Les bélugas du Saint-Laurent constituent un cas spécial à cet égard: un gros animal blanc dans un habitat
restreint relativement peuplé (par les humains, du moins l'été) et "patrouillé" par l'industrie de l'observation de
la baleine. Le pourcentage est probablement supérieur, mais même dans ce cas, le recouvrement est
probablement incomplet. Qu'on en juge. Nous récupérons environ 8-12 carcasses par année. Or des
biologistes ont calculé que la mortalité naturelle chez les cétacés est environ 10 %. Chez la population de
bélugas du Saint-Laurent qui compte environ 750 individus, on s'attendrait à ce qu'environ 75 individus
meurent chaque année.
Par contre, le succès de recouvrement de carcasses de bélugas morts naturellement (non de chasse) dans
l'Arctique est complètement nul. Ceci pose des problèmes quand on veut comparer les causes de mortalité
entre deux populations de bélugas, pour démontrer l'effet de polluants par exemple.
Dans le cas des maladies qui n'affectent que le succès reproducteur sans causer de mortalité, l'effet de la
maladie sur la population ne peut être mesuré à moins qu'une étude démographique détaillée ne soit
entreprise.
6.6 Maladies émergentes
6.6.1 Définition
Les maladies infectieuses émergentes sont ou des maladies causées par de nouveaux agents infectieux, ou
sont des maladies connues mais apparaissant en de nouveaux endroits, chez de nouvelles espèces, ou
encore des maladies connues dont la fréquence augmente subitement.
Des maladies dont on croyait avoir le contrôle réémergent, la tuberculose chez l'humain par exemple, causée
par des souches résistantes aux antibiotiques. L'émergence et la réémergence de maladies chez les gens sont
dues aux changements de densité de la population humaine (surpopulation), aux changements sociaux
(promiscuité sexuelle, pauvreté. Ex.: SIDA) ou sont causées elles-mêmes par de nouvelles maladies (Ex.:
tuberculose et SIDA). Les équivalents existent dans les maladies animales: on pense que la tuberculose est
apparue chez le chevreuil à l'état sauvage à cause de la surpopulation et de la densité artificiellement élevée
68
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
de chevreuils aux mangeoires au Michigan dans les années 1990. (Les gens installent des mangeoires en
hiver pour nourrir les "pauvres bêtes"). La maladie n'existait pas chez les chevreuils sauvages, même lorsque
la maladie était présente chez des bovins domestiques élevés dans la même région.
Des bactéries, virus et parasites dont l'existence même était inconnue auparavant ont affecté l’humain et les animaux domestiques de
façon dramatique durant la dernière décennie et même ces dernières années (influenza H5N1 aviaire à Hong Kong en 1998 transmis
directement de l'oiseau à l'humain, du jamais vu). Le virus causant le SIDA (VIH), la bactérie de la maladie de Lyme, les hantavirus (Sin
Nombre) en mai 1993 et évidemment le prion causant la maladie de la vache folle et une variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob
(été 1996) sont de bons exemples de micro-organismes qui ont su exploiter rapidement de nouvelles occasions (offertes par l'homme)
d'envahir de nouveaux hôtes ou simplement de prendre de l'expansion. D'autres surprises restent à venir. Signalons le West Nile virus
(septembre 1999) ou encore le virus du distemper canin que l'on soupçonne d'être à l'origine (chez l'humain) de certains cas de sclérose
en plaques. Les opportunités exploitées par ces micro-organismes sont: de nouveaux comportements, des moyens de transport rapides
et la modification de l'environnement à grande échelle.
D'autres agents moins connus, surtout viraux, sont le virus d'Ebola, le virus de Marburg, la fièvre jaune (d'abord chez les singes) la fièvre
de la vallée du Rift chez la vache, les moutons, les insectes et les moustiques. Les virus nommés ci-dessus ne dérangeaient pas
vraiment les animaux tropicaux infectés, (leurs hôtes naturels), et n'infectaient qu'occasionnellement de petites communautés humaines,
situées à la bordure des forêts. L'humain était un cul de sac et le virus n'avait pas le temps de s'adapter à ce nouvel hôte. La situation a
changé avec le grand nombre d'humains qui s'établissent dans les forêts tropicales.
L'écologie a joué un rôle très important dans l'élucidation de l'étiologie de certaines de ces maladies
(hantavirus et maladie de Lyme).
6.6.2 Causes
Les maladies émergent à cause de déséquilibre dans le triangle constitué par
• les changements environnementaux
• les agents infectieux
• les hôtes
1. Changements environnementaux
On pensait que la plupart des maladies infectieuses nouvelles se développent à partir d'agents pathogènes
inconnus23. On s'aperçoit maintenant que les nouvelles maladies apparaissent souvent à cause d'un
changement environnemental, et non à cause d'un changement de l'agent pathogène lui-même. Par
changement environnemental, nous incluons les changements sociaux, écologiques et technologiques et/ou
industriels qui bouleversent le monde actuel.
Oscillations naturelles dans le climat
•
•
•
En 1993, El Niño a entraîné des températures chaudes, des pluies abondantes, une
abondante végétation et une population très dense de rongeurs au Nouveau-Mexique. La
conjonction de ces conditions a causé l'apparition (ou la reconnaissance) de la pneumonie au
Hantavirus "Sin nombre".
En 1997, les températures anormalement chaudes du Nord Ouest du Pacifique causées
encore une fois par El Niño, ont favorisé la croissance inhabituelle de Vibrio parahaemolyticus.
Cette bactérie a été absorbées par les huîtres et le résultat final a été une épidémie de gastroentérite.
En 1988, possiblement l'épidémie d'influenza qui a frappé les phoques de la côte de NouvelleAngleterre a été due à la température chaude de l'eau qui a fait que les phoques ont passé plus
de temps sur la terre, favorisant la transmission du virus.
Réchauffement global
•
•
•
69
Insectes: l'habitat des vecteurs arboricoles (insectes) des maladies tropicales telles que la
malaria s'étend vers le nord. Il peut y avoir d'autres effets.
Par exemple, en Sibérie, le permafrost est la tombe de prisonniers politiques du temps de
Staline qui ont été victimes de la petite vérole. Qu'arrivera-t-il au dégel ?
Les mammouths sont apparus en Afrique, puis ont habité l'Europe et ses régions nordiques
telles que la Sibérie. Voici 11,000 ans, les mammouths se sont éteints subitement. Comme
causes possibles, on pense aux facteurs climatiques, à la chasse ou aux maladies. L'exhumation
de carcasses de mammouths de la glace de Sibérie comme on en a filmé au canal Discovery
récemment (en 2001) pourrait bien ramener à la vie des anciens pathogènes virulents.
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Bioterrorisme
Issu de changements socio-économiques sur un fond religieux.
Changements environnementaux spécifiques
Irrigation
Par des moyens primitifs peut causer l'émergence de nouvelles maladies :
Les cas d'encéphalite japonaise se multiplient dans les zones de culture de riz dans le sud de l'Asie.
Les oiseaux qui suivent de nouvelles routes de migration, le long des nouveaux cours d'eau fabriqués
par l'homme, peuvent véhiculer des tiques et donc des arbovirus.
Le barrage d'Abu Simbel en Égypte a créé un bassin d'eau dormante, favorable au développement des
douves Schistosoma, qui causent d'importantes maladies dans ce pays.
Des insectes tropicaux, qui servent de vecteurs aux maladies, remontent vers le nord. La malaria par exemple
progresse à travers le monde parce que son vecteur se répand.
Pour une information à date sur les nouvelles maladies, demander le bulletin à l'organisation ProMED par Internet à l'adresse:
www.promedmail.org:8070/promed/promed.home
Plastique, pneus
La nourriture est maintenant emballée dans le plastique partout dans le monde et ce plastique est jeté un
peu partout. Les vieux pneus jetés aux rebuts sont aussi un phénomène relativement nouveau. Les pneus
et le plastique séquestrent l'eau de pluie, ce qui fournit un nouvel habitat aux larves de moustiques. Cette
augmentation de moustiques mène à une augmentation de fièvre Dengue. Les piscines mal entretenues
et les barils qui recueillent les eaux de pluie ont probablement joué un rôle dans l'épisode de West Nile
virus à New York en septembre 1999.
Transfusions sanguines
Hépatite C, VIH, et récemment: la babésiose (en 2001). En 1999, une canadienne était infectée par le
protozoaire qui est habituellement transmis par les tiques, les mêmes qui transmettent la maladie de Lyme.
En 2001, la babésiose était endémique dans le nord-est et le midouest américain. Au moins 21 infections
avaient été transmises par les transfusions de sang aux Etats-Unis. Pourtant la canadienne atteinte n'avait pas
voyagé aux Etats-Unis. Elle avait été infectée par une transfusion de sang contaminé. À l'heure actuelle, il n'y
a pas de test au Canada pour le tamisage du sang pour les protozoaires transmis par les tiques (babésiose,
maladie de Chaga).
Un agent peut être introduit chez une nouvelle espèce par des facteurs technologiques tels que la
production animale industrielle, les xénotransplantations et la thérapie génique.
Production animale industrielle
Maladie de la vache folle
Il s'agit d'une maladie écologique. De la moulée destinée à un herbivore (le bovin) contenait un autre herbivore
(le mouton, infecté avec la tremblante). Les carnivores viennent en contact avec de nombreux agents
infectieux à cause de leur position dans la chaîne alimentaire. À cause de l'évolution, et de la sélection, une
barrière écologique s'est construite : les carnivores sont très rarement susceptibles aux agents infectant les
herbivores (mais ils peuvent en être porteurs, par exemple, les coyotes ne sont pas atteints par la peste
(Yersinia pestis) qui infecte pourtant (et tue) leur proie, les rongeurs). L'inverse est vrai (et évident ?): Les
herbivores sont souvent susceptibles aux agents infectieux d'autres herbivores. Les raisons pour ceci sont
peut-être pour aider certaines espèces d'herbivores à éliminer d'autres espèces d'herbivores de leur territoire
pour éliminer la compétition entre espèces différentes d'herbivores ou même à l'intérieur d'une même espèce,
quand la densité est trop grande. Ainsi, l'agent infectieux tue plusieurs animaux, empêchant ceux qui résistent
à la maladie de mourir de faim. (Ex. : l'antilope pronghorn et le ver pulmonaire Protostrongylus). C'est
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
probablement ainsi que s'explique l'origine de la maladie de la vache folle. La barrière d'espèce a été rompue
quand on a donné un herbivore à manger à un autre herbivore et ce, à une échelle industrielle.
Xénotransplantations
(Transplantations d'organes / tissus provenant d'autres espèces).
Il y a en médecine humaine un besoin énorme de donneurs d'organes. Or, les donneurs humains sont rares (il
faut que l'organe soit frais et sain, donc que le donneur soit mort dans un accident et donc la récupération des
organes dans un délai raisonnable est difficile). On s'est tourné vers les primates (voir texte). Puis vers les
porcs (on a récemment détecté des rétrovirus endogènes chez les porcs).
Par exemple, en 1992, un homme dont le foie était gravement endommagé par l'hépatite B recevait un foie de
babouin. En septembre 1999, à l'Université de Pittsburg, on trouvait dans les tissus de ce patient des bouts de
matériel génétique de rétrovirus (simian foamy virus) et de cytomégalovirus de babouin. (les cytomégalovirus
sont des virus Herpès). Environ 98 % des babouins sont infectés par les cytomégalovirus en nature et le virus
ne les rend pas malades. On croyait que la souche qui affecte les babouins est incapable d'infecter les
humains.
On ne sait pas si le virus avait répliqué dans les cellules humaines, ou s'il était produit uniquement par les
cellules du foie de babouin.
Cette question est cruciale: la capacité du virus à se répliquer dans les cellules humaines augmenterait
fortement les chances que le patient puisse infecter d'autres humains.
Quoiqu'il en soit, cette découverte affaiblit l'argument qui veut qu'on pourrait utiliser des organes de primates
de façon courante pour les transplantations chez des patients humains. Par contre, on peut toujours imaginer
des élevages de babouins sous conditions stériles, une installation qui serait très onéreuse, mais en ces temps
de clonage humain commandité par un millionnaire américain (décembre 2001), rien n'est à écarter.
Refs: (1) Allan, J.S., Broussard, S, Michaels, M., Starzl, T.E., Leighton, K.L., Commuzzie, A.G., Whitehead, E.M., Lanford, R., Leland, M.,
Switzer, W., & Heneine, W. (1998) Amplification of simian retroviral sequences from human recipients of baboon liver transplants. AIDS
Res. Human Retroviruses 14(10):819-822. (2) Heneine W, Switzer WM, Sandstrom P, et al. Identification of a human population infected
with simian foamy viruses [see comments]. Nat Med. 1998;4:403-7.
2. Agents infectieux
Un nouvel agent peut être introduit dans une espèce entièrement nouvelle par des facteurs technologiques
tels que la production animale industrielle, les xénotransplantations et la thérapie génique.
Apparition de nouveaux agents infectieux
Génétique
L'environnement et la génétique peuvent aussi agir ensemble. Un microbe, avec tellement de mutations qu'il
est "nouveau", peut profiter de changements dans l'environnement pour se répandre.
Les microbes ont une grande variabilité génétique, beaucoup plus grande que les animaux. Et leur matériel
génétique peut changer beaucoup plus vite. Les causes de cette malléabilité génétique sont variées.
1)
Le matériel génétique des microbes est généralement haploïde (il n'y en a qu'une seule copie, en
contraste avec les animaux qui ont deux copies). Donc, des mutations vont avoir un effet immédiat
parce qu'il n'y a pas de copie intacte du gène (Ex.: résistance aux antibiotiques).
2)
Le matériel génétique des microbes est directement exposé aux agents mutagènes tels que les rayons
ultraviolets. L'ADN du microbe (bactérie ou virus) exposé au soleil subit des mutations, si le microbe
n'est pas tué.
3)
Les virus à ARN montrent une grande variabilité génétique parce que l'enzyme qui synthétise l'ARN viral
ne corrige pas ses erreurs, par contraste avec les enzymes qui synthétisent l'ADN. Les virus à ARN
sont donc beaucoup plus variables que les virus à ADN. Ainsi, on retrouve des souches de VIH
différentes dans différents organes du même patient. Le même phénomène survient sans doute avec
les virus ARN animaux (Ex.: BVD).
C'est aussi pour cela que les grandes maladies virales actuelles que la vaccination n'arrive pas à vaincre sont
presque toutes dues à des virus ARN (BVD, influenza, HIV). Ces virus ne peuvent pas corriger les
nombreuses erreurs qui se glissent dans la synthèse d'ARN et ils mutent donc rapidement. Et c'est pour cela
que les premières maladies virales qui ont été éradiquées par la vaccination à l'échelle mondiale sont dues à
des virus ADN (Ex.: variole, due à un virus Pox).
71
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Les agents infectieux qui entrent dans un nouvel hôte, naïf immunologiquement, peuvent produire des graves
maladies causant des mortalités spectaculaires (Ex.: Ebola, Hantavirus). Et c'est pour cela qu'elles ne peuvent
généralement pas s'y maintenir: étant donné que le nouvel hôte meurt rapidement, l'agent ne peut se
propager. Des exceptions importantes existent. Le VIH par exemple, même s'il s'est transmis à un nouvel hôte,
l'humain, peut se maintenir dans le nouvel hôte, mais dans ce cas l'ancien hôte (le singe) n'est pas si éloigné
du nouvel hôte.
Interaction entre les agents infectieux et changements environnementaux
"Débordement" d'agents pathogènes d'animaux domestiques dans la faune
(Ex.: Distemper canin (PDV-2) et phoques du lac Baikal; M. bovis en Nouvelle-Zélande des cervidés aux
bovins ; VIH des primates "non humains" à l'humain).
"Débordement" d'agents pathogènes de la faune chez l'humain
Arbovirus
Les arbovirus sont les virus transmis par les insectes (arthropodes). Ils appartiennent à des groupes
taxonomiques entièrement différents mais leurs caractéristiques écologiques et les maladies qu'ils causent
chez les gens et les animaux sont semblables.
Puisque c'est dans la jungle tropicale qu'on rencontre la plus grande variété d'animaux (dont les insectes) (voir
biodiversité), il fallait s'attendre à ce que les arbovirus soient aussi extrêmement variés. Il fallait donc s'attendre
à ce qu'au moins certains d'entre eux posent des problèmes majeurs quand l'humain envahit la forêt tropicale.
La fièvre jaune est un exemple classique. Cette maladie a débuté lors de la construction du canal de Panama,
quand des ouvriers ont travaillé dans la jungle pendant des années pour creuser le canal. Un autre exemple
est l'encéphalite équine du Vénézuela. En 1971, le virus a traversé du Mexique au Texas. Aussi, le virus de
la rivière Ross: dans les années1980: ce virus saute d'île en île à partir de l'Australie. Il cause de l'arthrite
chez les habitants des îles Fiji et Samoa. Les arbovirus se sont propagés à cause de l'introduction de
moustiques exotiques (Aedes albopictus) aux États-Unis dans l'eau sale des vieux pneus. Plus près de nous,
le virus du Nil Occidental introduit à New York en septembre 1999 est aussi propagé par les insectes
piqueurs.
Arénavirus
En Amérique du Sud, une nouvelle maladie hémorragique apparaît environ tous les trois ans. Chacune est due
à un nouvel arénavirus infectant une espèce différente de rongeur.
3. Hôtes
Translocation (mouvement) d'hôtes ou d'agents pathogènes pour la conservation, l'agriculture ou la chasse
(ex.: raton-laveur, rage en Virginie) (fièvre aphteuse, Irlande, France en 2001)
Il y a plusieurs autres exemples, dont certains ont mené à des catastrophes environnementales :
Îles Hawaii : le moucheron vecteur de la malaria aviaire et du pox aviaire a été apporté par l'humain et
au moins 25 espèces d'oiseaux ont disparu d’Hawaii suite à cette introduction.
Ratons-laveurs transportés de la Floride en Virginie occidentale.
Rinderpest (peste bovine) en Afrique
Moule zébrée dans les Grands Lacs.
Brucellose et tuberculose dans le Parc National de Wood Buffalo
Fascioloides magna introduit par l'importation de wapitis en Italie en 1865 à partir des États-Unis.
Les animaux transportés peuvent eux-mêmes souffrir de maladies nouvelles, auxquelles ils n'étaient pas
exposés dans leur habitat naturel :
Les grues apportées dans l'est des États-Unis meurent d'encéphalite équine de l'Est.
Des caribous apportés dans le Maine à partir de Terre-Neuve venaient du seul troupeau en Amérique
du Nord infecté par Elaphostrongylus cervi (rangiferi), le "ver du muscle" européen, un parasite qui
cause une maladie du système nerveux chez les ongulés. Or, le Maine est infecté par le parasite
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Pathologie de la faune 2002
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Parelaphostrongylus tenuis, le ver des méninges du chevreuil, et les caribous sont très susceptibles à
P. tenuis. On espère que les caribous sont morts du ver des méninges avant qu'ils n'aient pu établir le
"ver du muscle" en Amérique du Nord !
Changements dans la population hôte
! Augmentation de densité de l'hôte (=surpopulation) (Ex.: la maladie de Lyme et le cerf de Virginie; le
sarcome dermique du doré).
! Augmentation du nombre d'hôtes susceptibles. Ex.: jeunes poissons et WDSV
6.6.3 Problèmes causés par les maladies émergentes
Ces nouvelles maladies requièrent que des experts dans plusieurs spécialités travaillent ensemble. (Ex.:
vétérinaires, entomologistes, écologistes, épidémiologistes, virologistes dans le cas des hantavirus et du
morbillivirus équin). Or, les agences officielles (Ex.: Santé Canada) sont cloisonnées. En Australie, les
premières études sur le morbillivirus équin ont été confiées au laboratoire de diagnostic de santé animale.
Que serait-il arrivé si la maladie avait été une zoonose facilement transmissible?
En Angleterre, le ministère de l'Agriculture n'a pas réagi rapidement à ce qui était clairement un danger pour le
bétail et toute l'industrie agricole de ce pays. En 1990, les journaux britanniques demandaient: "Est-ce que la
maladie de la vache folle pose un problème de santé publique ?". Ce à quoi le gouvernement a platement
répondu: "Il n'y a pas de problème". Les éditeurs du journal Nature ont commenté de façon très…britannique:
"Never say there is no danger. Instead, say that there is always a danger, and that the problem is to calculate
what it is… Never say that the risk is negligible unless you are sure that your listeners share your own
philosophy of life" .
Seuls les laboratoires BSL-4 permettent l'étude des virus (potentiellement ou réellement) très dangereux pour
l'homme. Il y a actuellement un seul laboratoire BSL-4 (sécurité maximum) au Canada, à Winnipeg. Il a été
ouvert en 1998. Est-ce suffisant?
6.6.4 Problèmes pratiques posés en recherche sur les
maladies émergentes chez les animaux
domestiques.
Qui peut se payer les laboratoires ?
L'USDA n'a pas pu étudier plusieurs maladies animales, dont le virus Nipah, qui a tué plus de 100 personnes
en Malaisie et a dévasté LlIndustrie du porc dans ce pays, qui représentait $400 millions en 2000. Un million
de porcs ont .é.té tués pour arrêter l'épidémie.
Pour étudier cette maladie animale et les autres maladies qui peuvent infecter l'humain (zoonoses), l'USDA a
besoin d'un laboratoire de niveau 4, où le port du scaphandre connecté à un tube apportant l'air est nécessaire
pour travailler avec les agents infectieux. En l'an 2000, les États-Unis ne possédaient pas de laboratoire de ce
type en 2000 pour travailler avec les animaux de ferme.
Les maladies strictement animales et très contagieuses, qui ne sont pas présentes aux États-Unis ou au
Canada, comme la fièvre aphteuse et la peste porcine, africaine ou classique, sont actuellement étudiées au
laboratoire de Plum Island, au coût de 14.5 millions de dollars (US) par an.
180 travailleurs dont 30 scientifiques prennent le traversier chaque jour pour travailler sur la petite île de 840
acres.
6.6.5 Maladies émergentes spécifiques
Prion. La maladie de la vache folle (Mad cow disease) et autres encéphalopathies
spongiformes
Encéphalopathies spongiformes : maladies dégénératives du système nerveux. Longue incubation : mois années. Les lésions consistent en une vacuolation souvent intense des neurones et de la neuropile, sans
inflammation.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Noms divers donnés aux encéphalopathies spongiformes :
Moutons: tremblante, scrapie (moutons)
Bovins domestiques : encéphalopathie spongiforme bovine (mad cow disease) (BSE).
Cervidés (cerf-mulet et wapiti) : encéphalopathie des cervidés (chronic wasting disease (CWD)),
encéphalopathie spongiforme chez le nyala et le gemsbok en Grande-Bretagne.
Vison: encéphalopathie transmissible.
Félidés: encéphalopathie féline spongiforme transmissible
Humain:
Maladie de Creutzfeldt-Jacob (CJ) : ces cas sont sporadiques, très rares (environ 1 individu x 10-6), et
concernent seulement les individus âgés (plus que 50 ans). Ils sont sans lien entre eux, ni géographiquement,
ni chronologiquement. Dans les années 1990, une variante est apparue en Angleterre chez de jeunes patients.
Des études épidémiologiques ont déterminé que cette variante est probablement due à l'ingestion de bœuf
infecté par l'agent infectieux de la maladie de la vache folle. En décembre 2000, la maladie avait tué un total
de 89 patients en Angleterre.
Maladie de Gerstmann-Sträussler-Scheinker (GSS): la majorité des cas surviennent dans certaines familles
distribuées aléatoirement dans le monde entier.
Kuru: seulement chez les femmes et enfants de la tribu Fore en Papouasie-Nouvelle-Guinée.
Agent: Prions : particules infectieuses constituées uniquement de protéines (elles ne contiennent pas d'acide
nucléique). Cette protéine, PrP, est normalement présente dans la membrane cellulaire (cytoplasmique) des
neurones. Un mutant de cette protéine apparaît spontanément ou est ingéré. La protéine altérée est résistante
aux protéinases (les enzymes cellulaires qui devraient normalement la dégrader). On l'appelle alors PrPres.
Cette protéine mutante a un patron de glycosylation anormal, différent pour les prions des différentes espèces
animales. La protéine anormale changerait la conformation de la PrP normale. La nouvelle forme de la
protéine, parce qu'elle résiste à la dégradation, s'accumule. De plus, la PrP devenue anormale change à son
tour la conformation de PrP normales (un peu comme les vampires qui mordent les gens normaux, qui
deviennent vampires à leur tour qui mordent les gens qui...).
La barrière d'espèce est définie par la résistance de la protéine normale à changer de conformation lorsqu'en
présence de la protéine anormale. Si la protéine anormale provient de la même espèce animale que la
protéine anormale, la conformation de la protéine normale change rapidement. Par contre, si la proténe
anormale provient d'une autre espèce animale, la protéine normale résiste au changement que la protéine
anormale veut lui imposer.
Le prion est très, très résistant. Les tissus fixés dans la formaline sont infectieux. Les blocs de tissus fixés
doivent être plongés dans l'acide formique pur pendant une heure avant que les sections histologiques
puissent être effectuées de façon sûre par les techniciens. On doit incinérer la formaline qui a servi à la fixation
des tissus. En examinant la carcasse, il faut prendre les mêmes précautions qu'avec la rage. Les lésions sont
situées généralement au niveau de l'obex (bout caudal du quatrième ventricule, sous le cervelet) ; on peut
l'extraire du cerveau sans ouvrir le crâne, par le foramen magnum.
Distribution. L'encéphalopathie spongiforme des cervidés affecte les cerfs-mulets (incluant le cerf à queue
noire et les hybrides cerf-mulet/cerf de Virginie).
Historique:
Etats-Unis: la maladie a été reconnue d'abord en 1967 chez le cerf-mulet à Fort Collins au Colorado gardés
dans un centre de recherche où des moutons avaient été gardés auparavant. En 1978, la maladie était
reconnue au Wyoming et était nommée encéphalopathie spongiforme transmissible Depuis lors, la maladie a
été diagnostiquée chez des wapitis et des cerfs mulets captifs et sauvages, au Colorado et dans le sud du
Wyoming.. Elle est maintenant chez le cerf mulet sauvage, le cerf de Virginie sauvage et le cerf élaphe (wapiti)
sauvage habitant le centre du Colorado.
Elle est donc une encéphalopathie unique en ce sens qu'elle affecte deux espèces de cervidés à l'état
sauvage et sympatriques (qui partagent le même habitat). Dans certaines régions du Colorado et du Wyoming,
jusqu` à 15 % des cervidés sauvages sont infectés.
En 1970, le CWD est également apparu au zoo de Toronto chez des cerfs mulets importés du zoo du
Colorado.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Canada: En 1996, le premier cas était signalé chez un wapiti d'élevage à Sedley, en Saskatchewan, importé
des É-U en 1989. En mars 1998, toujours en Saskatchewan, un wapiti mâle était atteint. C'était le troisième
animal au Canada avec cette maladie et le premier qui était né au Canada (en captivité). Depuis, 11 wapitis
ont été diagnostiqués avec la maladie. Il est maintenant interdit d'importer des cervidés sauvages des É-U. En
décembre 2000, le gouvernement fédéral décidait d'abattre 1,500 wapitis d'élevage en Saskatchewan parce
que d'autres cas étaient diagnostiqués chez des wapitis d'élevage. En 2000, le premier cas chez un cervidé
sauvage était diagnostiqué au Canada. Il s'agissait d'un cerf mulet tué par un chasseur dans le Sud-Ouest de
la Saskatchewan, près de la frontière albertaine.
En nov 2001, des 5,300 animaux abattus testés pour la maladies, la maladie était détectée chez 175 animaux,
soit 3.3 % des animaux abattus.
Élevage de wapitis. La Saskatchewan compte 25,000 wapitis d'élevage, le Québec quelques milliers. Les
bois poussent chaque année sur la tête des wapitis mâles. La forme immature des bois, le "velours", est riche
en tissu nerveux et vasculaire. Le velours récolté est broyé et vendu en Asie et au Canada pour le traitement
de l'arthrite et de l'hypertension. Il est vendu dans les pharmacies et boutiques d'aliments naturels. L'ingestion
de velours provenant de wapitis infectés par une maladie ressemblant de près à la maladie de la vache folle
est potentiellement dangereuse.
Après la déclaration de la maladie chez les wapitis de la Saskatchewan, le prix des velours a chuté de $ 120 à
$ 20 par livre. Le gouvernement fédéral dépensera $ 60 millions pour compenser les éleveurs.
Lésions. Système nerveux uniquement. Changements spongiformes de la neuropile de la matière grise,
vacuolation intraneuronale, astrocytose, absence de réaction inflammatoire. La présence de plaques
d'amyloide est possible.
Transmission. La transmission verticale (maternelle) survient mais n'est pas importante. Il semble que
la transmission latérale (d'animal à animal) est la plus importante.
Signes cliniques.
Après une incubation de 1.5 à 3 ans le wapiti infecté montre des signes cliniques. La plupart des wapitis
succombent moins de 12 mois après que les premiers signes cliniques sont apparus. Les wapitis ont d'abord
un changement de comportement, perdent du poids. À mesure que la maladie progresse, les symptômes
incluent de la polydipsie (soif excessive) et la polyurie (urination excessive). L'animal finit par mourir, très
émacié.
Il faut retenir que les premiers cas en Saskatchewan ont été diagnostiqués incorrectement comme étant
des cas de pneumonie, parce que les animaux affectés inhalent la nourriture (pneumonie par aspiration)
probablement à cause des lésions au système nerveux.
Diagnostic:
Chez le wapiti et le cerf mulet, le diagnostic est basé sur les lésions microscopiques et on utilise maintenant
l'immunohistochimie Ac monoclonal contre le PrP bovin (J Clin Microbiol. 36:1750 (1998)) ou avec des Ac
polyclonaux contre le prion de tremblante (JWD 36(4):676-690 (2000)). L'immunohistochimie détecte la
maladie avant que les lésions microscopiques et même que les signes cliniques n'apparaissent.
L'agent est détecté dans la medulla oblongata (moelle allongée), dans la région appelée l'obex.
Encéphalopathie spongiforme bovine
Distribution. Pour l'instant, l'encéphalopathie spongiforme bovine est restreinte à l'Europe. La plupart des
cas de bovins malades sont en Grande-Bretagne et en Suisse. La France et l'Allemagne ont eu leurs premiers
cas en 1999 et en 2000. La découverte de cette maladie en Allemagne a d'importantes retombées politiques
car les règlements pour la stérilisation de la farine de viande étaient plus sévères en Allemagne, ce qui a
retardé l'apparition de la maladie dans ce pays. Mais la création de la communauté européenne a énormément
facilité le commerce de la farine de viande à travers l'Europe, y compris en Allemagne.
Écologie/Épidémiologie. Toutes les formes de la maladie, à part le CJ, seraient dues à l'ingestion de viande
ovine infectée. Ces maladies seraient donc le résultat d'une grave erreur écologique : on a donné à manger
75
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
un herbivore à un herbivore. Un agent bien particulier s'est engouffré dans cette brèche faite dans la barrière
écologique.
Certains pensent que même les moutons s'infectent par voie orale, en ingérant leur placenta ou le lait. Ceci
expliquerait pourquoi l'infection semble être transmise horizontalement et verticalement chez le mouton
(seulement en apparence), et non chez les autres espèces, à l'exception du wapiti ("chronic wasting disease")
chez lequel l'épidémiologie ressemble à celle de la tremblante.
La maladie bovine survenue en Grande-Bretagne est due à un changement dans le traitement des abats de
mouton qui entraient dans la composition de la moulée donnée aux bovins. Les Britanniques avaient voulu
économiser en diminuant la température de cuisson des abats pour diminuer la quantitié de pétrole utilisé. En
même temps, ils avaient réduit la quantité de solvants pour extraire le gras.
Les Britanniques avaient proposé aux autres pays de la Communauté Européenne qu'ils fassent de même. Les Allemands avaient refusé
parce qu'ils considéraient qu'il y avait trop de risque à nourrir un herbivore avec un autre herbivore. Et puis, les Allemands trouvaient que
le grand nombre de points communs entre les encéphalopathies spongiformes affectant le mouton et l'humain était troublant. (C'est un
vétérinaire, William Hadlow, qui a d'abord noté la ressemblance frappante entre les lésions de la tremblante du mouton et la maladie de
Creutzfeldt-Jacob dans une fameuse lettre à Nature). Le résultat est que l'Allemagne (en janvier 2000) était encore exempte de BSE.
(keine Problem !)
On a décrit aussi des cas d'encéphalopathie spongiforme chez les bovins exotiques de zoo et aussi chez des chats en Angleterre. Tous
se seraient infectés par la viande de bovin dans leur nourriture (commerciale).
Le "chronic wasting disease", contrairement aux autres formes d'encéphalopathie spongiforme (à part la
tremblante), et comme la tremblante, se transmettrait latéralement (de wapitis à wapitis), par l'ingestion de
sécrétions ou excrétions contaminées (salive, fèces, urine) produites par des animaux infectés et montrant des
signes cliniques. La transmission maternelle (verticale) est aussi possible (également comme la tremblante)
(JWD 34 : 532-538 (1998)).
Lésions.
Toutes ces maladies sont caractérisées par la dégénérescence des neurones manifestée par la vacuolation,
souvent prononcée, des neurones et de la neuropile (le tissu nerveux entre les neurones) et par l'absence
d'inflammation. La vacuolation donne un aspect d'éponge au tissu nerveux d'où le terme "spongiforme".
Signes cliniques.
Chez le mouton, la maladie se nomme "Tremblante" parce que les moutons tremblent au début de la maladie,
"scrapie" parce qu'ils se grattent frénétiquement quand la maladie évolue. "Kuru" est la désignation du verbe
"trembler" en langage papou parce que les humains atteints de kuru ont aussi des tremblements.
Chez la vache, la maladie apparaît 2.5 à 8 ans après l'ingestion.
Les noms donnés à la maladie chez le mouton et l'humain reflètent les symptômes.
Espèces susceptibles.
On a réussi, en 1998, à démontrer que l'agent peut s'adapter rapidement à un nouvel hôte. On a transmis la
maladie à des furets. L'agent causait la maladie chez les furets inoculés de plus en plus rapidement avec
l'augmentation du nombre de passages. Les souches passées chez le furet pouvaient alors infecter facilement
des hamsters (alors que les souches originales isolées du tissu de wapitis ne pouvaient pas infecter les
hamsters). Il est donc possible que le prion causant le "chronic wasting disease" du wapiti se transmette en
nature à de nouveaux hôtes, dont l'humain.
Méthodes de diagnostic.
Chez la vache, jusqu'à récemment, il n'y avait pas de méthode diagnostic autre que l'examen histologique du
cerveau (ce qui n'est pas pratique) et l'inoculation de souris et de hamster avec des homogénats de cerveau
malade afin de recréer la maladie. On procède maintenant à l'immunohistochimie sur des coupes de cerveau
avec des anticorps reconnaissant le PrP de la tremblante.
Chez les humains, dans les cas de GSS, on détecte une mutation spécifique dans le gène codant la PrP. Plus
récemment, pour le diagnostic du CJ, on utilise la détection indirecte des protéines 130 et 131 dans le liquide
céphalo-rachidien. (Lancet 1996; 348:887).
Traitement.
Pas de traitement connu.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Prévention, contrôle.
On doit avoir un permis d'Agriculture Canada pour le transport des ongulés sauvages gardés en captivité.
L'importation des É-U est interdite.
Certaines compagnies européennes alimentaires exigent actuellement que tout animal destiné à la
consommation humaine n'ingère pas de protéine animale. La plupart des pays occidentaux exigent que les
bovins n'ingèrent pas d'abats d'origine ovine.
Historique de la maladie de la vache folle
1986:
détectée la première fois en Grande Bretagne. Farine d'abats de moutons mal chauffée est
soupçonnée.
1987:
le gouvernement britannique affirme que la maladie n'est pas transmissible à l'homme
1986-1996: 150,000 vaches affectées en Grande Bretagne. En mars 1996, panique en Europe! On annonce
qu'une dizaine de personnes, toutes de jeunes adultes, souvent des fermiers gardant des
vaches, sont mortes de CJ pendant cette décennie (Mai 1995: premier cas de CJD chez un
adolescent, en Angleterre).
Il est maintenant établi que les prions causant ces cas de CJD atypique (jeune âge fréquent,
longue évolution (14 mois au lieu de 4 mois), grandes plaques cérébrales et implication du
cervelet) sont les mêmes que ceux causant l'encéphalopathie spongiforme bovine. La voie
d'entrée est probablement orale (ingestion de viande de bovin infecté). Les cas de CJ chez les
jeunes sont en fait la "maladie de la vache folle" chez l'humain.
1999-2000 La Communauté Européenne (et surtout la France) veut interdire (et l'a fait) l'exportation de bœuf
de l'Angleterre. Le gouvernement anglais est irrité surtout que l'on sait maintenant que le cheptel
bovin français est aussi infecté.
Virus
Hantavirus
Nom de la maladie
En fait deux maladies différentes (connues!) sont causées par les Hantavirus
1)
Syndrome pulmonaire à Hantavirus (HPS)
2)
Fièvre hémorragique avec syndrome rénal (maladie classique)
Agent causal
Virus ARN, Genre : Hantavirus, Famille : Bunyaviridae.
1)
La plupart des cas de HPS (seulement en Amérique du Nord) ont été causés par le virus Sin Nombre
qui veut dire "sans nom" (anciennement Muerto Canyon). Certains cas ont aussi été attribués aux virus
Black Creek Canal, Bayou et Shelter Island-1.
2)
Les hantavirus causant le HFRS (seulement en Europe et Asie (Corée)) incluent le virus Hantaan,
Puumala, Dobrava et Séoul.
Historique. En avril 1993, une équipe d'écologistes étudiait des populations de rongeurs au Nouveau-Mexique, près de Santa Fe.
L'équipe assista à de fortes augmentations des populations des souris sylvestres. De fortes pluies et neiges avaient perturbé l'équilibre du
désert le printemps précédent. Il y avait maintenant une profusion de noix et d'insectes, sources de nourriture pour la souris sylvestre.
Tout d'un coup, les souris sylvestres furent partout. Les écologistes notèrent que la population de souris s'était accrue de dix fois de mai
1992 à 1993.
En mai 1993, dans une réserve indienne du Nouveau-Mexique, un patient Navajo se présentant pour un simple rhume (fièvre, douleur
musculaire) meurt rapidement d'une maladie respiratoire caractérisée par de l’œdème pulmonaire interstitiel d'origine extra-cardiaque et
une hypotension sévère se terminant en insuffisance respiratoire.
En quoi ces événements sont-ils reliés ?
Le médecin traitant avertit les autorités de l'État qui identifièrent quatre autres patients ayant connu le même sort. Tous étaient de jeunes
adultes en santé. A ce stade on pensa à la forme pulmonaire de la peste causée par Yersinia pestis, à la maladie du légionnaire
(Legionella), à des infections à Mycoplasma et au virus de l'influenza. Pendant l'été, on procéda à différents tests sans qu'on put cultiver
l'agent en cause. Le sérum de patients fut finalement testé pour la présence d'anticorps contre à peu près tous les agents pathogènes
connus. On obtint un signal contre les hantavirus du groupe Puumala. Cependant, le patron de réactivité indiqua qu'il s'agissait en fait
d'un nouveau membre de ce groupe. La nouvelle maladie fut baptisée Syndrome pulmonaire à Hantavirus. On savait que les hantavirus
sont des virus de rongeurs. On demanda donc aux écologistes ce qu'ils avaient trouvé au Nouveau-Mexique et leur histoire de la souris
sylvestre reçut immédiatement beaucoup d'attention.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Une fois que ces virus furent soupçonnés, on employa des anticorps monoclonaux identifiant d'autres membres du groupe des
hantavirus. En même temps, on employa la technique de la réaction en chaîne de la polymérase (PCR). On conçut des amorces
reconnaissant des séquences de nucléotides communes à plusieurs hantavirus. Cette méthode permit d'amplifier l'ARN spécifique aux
hantavirus dans les tissus de patients mourant de la maladie. Le 9 juin, soit un mois après les premiers cas, on connaissait la cause de la
maladie. C'était une découverte inattendue parce que ces virus n'avaient jamais causé de maladie chez l'humain en Amérique du Nord et
jamais dans le monde, ces virus n'avaient été associés avec une maladie respiratoire. Par la suite, les chercheurs ont analysé aussi les
tissus de plusieurs animaux de la faune par les mêmes techniques et aussi leur sérum par sérologie classique. Ils ont identifié la souris
sylvestre (Peromyscus maniculatus) comme réservoir du virus. Le virus a été rebaptisé Sin nombre.
Les chercheurs sont parvenus, toujours avec la méthode PCR, à cloner, séquencer et exprimer de grandes parties du génome viral
toujours à partir de tissus d'autopsie. Ils sont aussi parvenus à générer des réactifs pour le diagnostic de la maladie, tout cela sans jamais
avoir cultivé le virus en culture cellulaire. Évidemment, les militaires américains soulignent que ces progrès rapides n'auraient jamais été
possibles sans les études menées par l'armée américaine dans les années 50 en Corée.
La maladie n'est pas vraiment nouvelle. Le premier cas, diagnostiqué rétrospectivement, date de 1959. De plus, ce ne sont pas tous les
cas de pneumonie suraiguë qui sont élucidés : entre 50,000 et 150,000 personnes meurent chaque année aux États-Unis de maladie
respiratoire inexpliquée. Plusieurs de ces pneumonies ont été sans doute (et sont encore) dues au hantavirus.
Au Nouveau-Mexique, l'épidémie de 1993 s'est résorbée, sans doute à cause de la diminution de la population de souris (de 30 souris par
hectare en mai, elle baissa à 20 par hectare en juillet et à 4 par hectare en août). Les causes de cette diminution sont incertaines. On
pense aux maladies, aux prédateurs (la nourriture est encore très abondante). La première année, on craignait la venue de l'hiver: en
effet, les souris s'installent dans les maisons et ce comportement aurait pu causer de nouvelles infections.
Espèces hôtes : Ce hantavirus, ni les autres, ne se transmettent de personne à personne. On pense
actuellement que c'est la souris sylvestre (Peromyscus maniculatus, deer mouse) qui est le vecteur. C'est un
des petits mammifères les plus abondants en Amérique du Nord (cette souris est répandue dans tout l'Ouest et
le Midwest américain et dans à peu près tout le Canada, y compris au Québec). On retrouve également au
Québec la souris à pattes blanches Peromyscus leucopus, hôte de la souche Shelter Island, et le rat brun
Rattus norvegicus, hôte de la souche Séoul.
De 770 souris collectées en Arizona, Colorado et Nouveau-Mexique, 30 % étaient positives au PCR. D'autres
espèces de souris ont été trouvées positives, incluant la souris commune habitant les maisons (Mus musculus)
et même le tamias du Colorado (Tamias quadrivittatus). En 1985, les chercheurs découvraient des rats
infectés par les autres membres des hantavirus dans plusieurs grandes villes américaines.
Epidémiologie. La transmission se fait par l'inhalation du virus présent dans les aérosols provenant des fèces,
de l'urine et de la salive des rongeurs. Apparemment, le simple fait d'entrer dans un endroit fréquenté par des
rongeurs infectés serait suffisant pour contracter la maladie. L'entrée directe du virus par la conjonctive, par
une morsure de rongeur et aussi l'ingestion d'aliments ou d'eau contaminés sont d'autres sources d'infection
possibles. On se demande si des mammifères autres que des rongeurs sont infectés et pourraient jouer un
rôle dans la transmission de la maladie aux humains. En effet, les chats sont impliqués dans la transmission
de deux Hantavirus dont le type de Séoul. Un lièvre a été trouvé positif au Colorado. Les virologistes pensent
cependant que seuls les rongeurs excrètent du virus en quantité importante.
On pense que la maladie ne se transmet jamais d'humain à humain en Amérique du Nord. En Argentine, on a
rapporté la transmission de la forme pulmonaire dans au moins un épisode.
Signes cliniques de la maladie. Aucun signe de maladie n'est signalé chez les animaux.
1) HPS : La condition débute par une phase prodromale qui dure de 3 à 6 jours. Elle se caractérise par de la
fièvre et de la myalgie et parfois est accompagnée de symptômes gastro-intestinaux, de maux de tête et
d'étourdissement. Le deuxième stade de la maladie est la phase cardio-pulmonaire qui se manifeste par une
toux progressive, une respiration et un pouls rapide, de l'œdème pulmonaire (accumulation de liquide dans les
poumons) et de l'hypotension. Souvent les mortalités sont observées durant ce stade, à cause de l'œdème
pulmonaire. La phase de convalescence du HPS marque l'amélioration des fonctions hémodynamique et
d'oxygénation. La progression peut être très rapide. Les données sur le HPS sont incomplètes en ce qui a trait
aux effets à long terme du HPS mais il semblerait que la rémission du patient ayant survécu à la phase cardiopulmonaire soit totale.
2) HFRS : Cette maladie se décrit en 5 phases classiques dont la durée et la sévérité varient selon la souche
causale. Elle débute par la phase fébrile caractérisée par des maux de tête, de dos, et de ventre, une rougeur
de la figure et des pétéchies dispersées. Trois à 5 jours plus tard, la phase hypotensive suit durant laquelle le
choc survient. Ensuite, la phase oligurique apparaît et une hypertension est susceptible de se développer.
Pendant les trois premières phases, des complications hémorragiques et de la CIVD surviennent souvent.
Alors que l'insuffisance rénale et les manifestations hémorragique se résolvent, il y a déséquilibre
électrolytique : c'est la phase diurétique. La phase finale est celle de la convalescence et elle peut durer des
semaines.
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Lésions.
Humain. Le syndrome pulmonaire se caractérise par une pneumonite interstitielle et la formation de
membranes hyalines, causées probablement par l'infection de l'endothélium pulmonaire par le virus.
Souris sylvestre (P. maniculatus) : il est surprenant que l'hôte réservoir montre des lésions
pulmonaires semblables à celles de l'humain (les hôtes-réservoirs ne montrent habituellement pas de maladie)
: œdème septal des poumons infiltrats de cellules mononucléaires dans les zones portes du foie (hépatite
portale). À mesure que le virus n'est plus détectable dans le sang, l'œdème pulmonaire se résorbe. (J. Virol.
1999. 73: 588-191).
Pathogénie. Les chercheurs ont détecté des antigènes viraux dans l'endothélium des capillaires du poumon
(les antigènes des autres membres du groupe sont détectés dans les capillaires des reins). La réplication du
virus dans ces cellules, suivie de l'augmentation de perméabilité des capillaires infectés, expliquerait l’œdème
pulmonaire. Le virus est aussi présent dans l'endothélium vasculaire d'autres organes : le foie, la rate, le rein,
le pancréas et les ganglions lymphatiques (dans lesquels, les lymphocytes, macrophages et cellules
folliculaires dendritiques sont aussi infectées). Les souris ont beaucoup d'antigènes viraux dans les glomérules
rénaux au début de la maladie bien qu'il ne semble pas y avoir de lésion rénale associée. (Il y a plus
d'antigènes viraux dans les reins au début de l'infection, quand la souris a moins ou pas du tout d'anticorps).
La présence de virus dans les glomérules explique que le rongeur transmet le virus par l'urine. On a suggéré
que l'infection du rat et de la souris est causée par la puberté, qui augmente le comportement agressif.
Méthodes de diagnostic. Le diagnostic est basé sur un test sérologique qui détecte les anticorps IgM
associés au Hantavirus dans le sérum ou une augmentation par un facteur de 4 ou plus de la quantité
d'immunoglobuline G. On peut aussi détecter les antigènes de l'Hantavirus dans les tissus par
immunohistochimie et/ou par le test de réaction en chaîne à la polymérase.
Prévention. Il faut éviter les contacts entre humains et rongeurs. Attention aux chalets ou autres
habitations qui ont été laissées longtemps inoccupées. Lutter contre les rongeurs. Porter des gants de
caoutchouc pour manipuler les rongeurs morts et les déposer dans des sacs de plastique contenant du
désinfectant domestique tout usage (eau de Javel) pour bien humecter les carcasses. On doit fermer
hermétiquement le sac et s'en défaire en le brûlant ou en l'enterrant dans un trou à 1 mètre de profondeur.
Avant de retirer les gants, il faut les laver au moyen d'un désinfectant domestique tout usage (eau de Javel)
puis avec de l'eau et du savon. Tous les articles souillés par des fèces ou urine de rongeurs devraient être
aussi désinfectés. Les biologistes, vétérinaires ou techniciens de la faune travaillant dans des zones infestées
sont à haut risque et des précautions particulières sont recommandées. (Contacter Dr. H. Artsob, Ottawa, 613954-0757).
Situations américaine et canadienne
www.hc-sc.gc.ca/hpb/lcdc/publicat/ccdr/00vol26/rm2608fa.html
En 1997, 164 cas ont été rapportés dans 28 états américains avec un taux de mortalité de 45 %. En 1996, 95
% des cas sont survenus à l’ouest du Mississippi où Peromyscus maniculatus (souris sylvestre) est le principal
vecteur du virus. Les cas du sud-est des États-Unis furent associés aux virus Bayou (hôte : ?) et Black Creek
Canal (hôte : Sigmodon hispidus/ rat à queue blanche) alors que les deux cas du nord-est furent associés au
virus de New York (hôte: Peromyscus leucopus souris à pattes blanches).
Le premier cas de SPH reconnu au Canada pendant la surveillance active est survenu en 1994
en Colombie-Britannique. Par la suite, des cas ont été reconnus de façon rétrospective, et il a été établi que
les premiers remontaient à 1989 en Alberta. Au 31 décembre 1999, 32 cas confirmés en laboratoire avaient
été déclarés au Canada, et le taux de létalité s’établissait à 38 % (12/32). L’âge moyen des cas de SPH était
de 39 ans (intervalle : 15 à 62 ans) et la plupart (19/32, 60 %) étaient des hommes. Les cas ont tous été
signalés dans l’Ouest du pays. La plupart de ces cas ont été déclarés par l’Alberta (20), où ils sont le plus
souvent survenus par grappes au sud-est et au nord-ouest d’Edmonton. Les autres cas ont été recensés en
Colombie-Britannique (6), en Saskatchewan (5) et au Manitoba (1). La distribution géographique des cas de
SPH est la même au Canada qu’aux États-Unis, où les régions occidentales moins densément peuplées ont
été le plus durement frappées.
Depuis 1994, année où la surveillance active du SPH a débuté au Canada, le nombre de cas déclarés par
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
année a fluctué entre un maximum de huit en 1994 et un minimum de deux en 1999 (figure 1). Les fluctuations
annuelles sont peut-être attribuables à une plus forte densité des populations de souris infectés à cause des
hivers plus doux et d’une meilleure capacité de se reproduire(2). L’augmentation des populations de souris
accroît la probabilité d’exposition des humains aux rongeurs et à leurs excreta et donc le risque de
transmission de l’infection à hantavirus aux humains.
Tous les cas avaient des antécédents d’exposition aux souris sylvestres. ATTENTION ! La souris
sylvestre est répandue à travers tout le Canada.
Québec. Aucun cas humain n'a été rapporté à ce jour bien qu'une séroprévalence élevée (3.3 à 17.5 %) ait été
mesurée chez la souris sylvestre dans plusieurs régions du Québec. Des études ultérieures de recherche
d'acide nucléique de l'hantavirus par la réaction en chaîne de polymérisation (PCR) sur des tissus de P.
maniculatus au CDC ont démontré que deux souris séropositives du Québec étaient positives également par le
PCR. Le virus concerné serait le Monongahela Hantavirus (MONV), une variante du Sin Nombre et il peut
également causer le HPS. Il a été détecté dans l'Est des États-Unis, où il a causé trois cas de syndrome
pulmonaire.
Au 28 mai 1999, les CDC avaient confirmé 217 cas de SPH dans 30 États. De janvier à mai 1999, sept cas ont
été confirmés dans les États du Colorado, du Nouveau-Mexique, de New York et de Washington. En outre, 11
cas suspects présentant des caractéristiques cliniques et sérologiques initiales évoquant un SPH, ont été
signalés dans les États suivants : Arizona, Californie, Idaho, Iowa, Montana, Nouveau-Mexique et Washington.
Huit des cas confirmés et suspects sont survenus en Arizona, au Colorado et au Nouveau-Mexique. Chaque
année, de 1995 à 1998, au cours de la même période de 5 mois, on a dénombré dans cette région environ
deux cas en moyenne.
Source : Morbidity and Mortality Weekly Report, Vol. 48, No 24, 1999.
www.hc-sc.gc.ca/hpb/lcdc/publicat/ccdr/00vol26/rm2608fa.html
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"Morbillivirus" équin
Agent causal : Virus de Hendra (Paramyxovirus). Des études récentes de la séquence nucléotidique du virus,
le "morbillivirus" équin, indiquent qu'il ne peut être classé ni parmi les genres Paramyxovirus ou morbillivirus. Il
devrait être classé comme un nouveau genre parmi la sous-famille des Paramyxivirinae (dans la famille des
Paramyxoviridae).
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Historique: En septembre 1994, 14 chevaux sont morts à Hendra, banlieue de Brisbane en Australie. Leur
entraîneur est tombé gravement malade, apparemment de la même maladie, puis est mort. Un an plus tard, le
virus causait la mort d’un cheval et d'un éleveur à Mackay, 800 km au nord de Brisbane. L'éleveur s’était
probablement infecté l'année précédente en aidant à des nécropsies de chevaux. Le virus tue 70% des
chevaux infectés
Transmission: on a découvert que ce sont des chauves-souris (fruit bats = flying foxes, genre Pteropus) qui
véhiculent le virus. Le fait que plusieurs chauve-souris ont des anticorps et l'isolement de ces virus de liquide
utérin de ces chauves-souris suggèrent que ces animaux sont les hôtes naturels du virus. Des chauves-souris
auraient habité les étables où les chevaux étaient gardés.
Pathogénie: infection de l'endothélium qui entraîne des hémorragies et de l’œdème pulmonaires.
Note: Été 1999, un virus semblable au virus de Hedra a causé une nouvelle maladie en Malaisie. Elle a tué 95 personnes et est transmise
par le porc. On recherche présentement le réservoir à partir duquel le porc est infecté.
« Distemper » des lions
Introduction: Le "distemper" est une maladie mortelle des canidés domestiques et sauvages, des mustélidés
et des procyonidés.
Agent: Virus à ARN, le virus du distemper canin (CDV), famille des Paramyxoviridae, genre Morbillivirus.
Cette maladie affecte entre autres les renards, les ratons-laveurs et les hyènes. Récemment, elle a été aussi
diagnostiquée chez des félidés sauvages (léopards, lions). Les autres virus du genre sont
- virus de la peste bovine (Rinderpest): maladie entérique sévère des bovins - virus de la Peste des petits
ruminants - virus des oreillons (Measles virus) - morbillivirus équin. infecte et tue chevaux, humains et chats.
- virus du distemper canin (CDV): chiens, renards, ratons-laveurs, hyènes, félidés sauvages et captifs.
Transmission : La transmission se fait par inhalation, par les aérosols générés par les yeux infectés, les
cavités nasales, la salive. Les animaux infectés peuvent produire le virus pendant plusieurs semaines.
Félidés, nouveaux hôtes. Le distemper canin affecte maintenant les lions du Serengeti en Afrique ainsi que
plusieurs autres populations de félidés sauvages et captifs (Harder et al 1996). 75 % de 60 lions examinés
avaient des anticorps contre CDV-1. Le tiers de 250 lions surveillés par des chercheurs sont morts de la
maladie (la population totale est 3,000). On sait maintenant que le virus responsable est une simple souche
sauvage de morbillivirus canin (CDV-1) (Harder et al 1995)
« Distemper » des mammifères marins. Morbillivirus des mammifères
marins
Phoques
Historique. En 1987 et 1988, 18,000 phoques communs ont été trouvés morts en Europe dans la mer Baltique
et pendant la même période, quelques milliers de phoques sont morts dans le lac Baïkal en Sibérie. Un
nouveau morbillivirus distinct du distemper canin a été isolé des phoques de la Baltique et a été dénommé
"phocine distemper virus-1" (PDV-1). Un virus qu'on ne peut distinguer du CDV, dénommé PDV-2, a été isolé
de phoques du lac Baïkal morts de distemper {303}. Ce virus continue à circuler dans cette population {426}.
En 1992, de rares cas de la maladie ont été décrits chez des phoques communs. Récemment des phoques
gris ont été affectés sur les côtes canadiennes (Daoust (IPE)).
Au printemps 2000, un grand nombre de phoques caspiens (Phoca caspica) qui vivent seulement en mer
caspienne (enclavée entre l'Iran, le Turkmenistan, le Kazakstan et la Russie) sont morts aussi de distemper
causé par PDV-2. Rétrospectivement, on sait maintenant que la mortalité survenue en 1955 survenue chez les
phoques crabiers (Lobodon carcinophagus) en Antarctique a été aussi causée par PDV-2, transmis par des
chiens d'attelage.
Transmission et écologie. Du sang prélevé chez les phoques européens avant 1988 ne montrait pas
d'anticorps contre les morbillivirus alors que du sang prélevé chez des phoques canadiens et groenlandais
avant 1988 montre que ces animaux possédaient des anticorps spécifiques contre le PDV-1, et donc que
contrairement aux phoques européens, ils avaient été en contact avec ce virus avant 1988. Puisque à date, et
avant 1988, on n'avait pas rapporté d'épidémie de "distemper" chez les phoques nord-américains et
groenlandais (phoques gris: 73% pos, n=296 (J Wild Dis (1995) 31: 491), on a déduit que ces derniers ont été
en contact avec le virus longtemps avant 1988 et il est probable que les phoques nord-américains et
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
groenlandais ont transmis le PDV-1 aux phoques européens, qui n'avaient pas été en contact avec le virus
avant cette année-là. Plus spécifiquement, on soupçonne que les phoques gris sont responsables du maintien
de l'infection chez les populations de phoques canadiennes étant donné qu'aucune mortalité due au distemper
n'a été rapportée chez cette espèce {306}. La taille, le taux annuel élevé de recrutement et la résistance innée
de cette espèce au distemper clinique pourraient expliquer l'état enzootique de la maladie dans la population
de phoques gris. Il est à noter que les phoques gris ne sont que peu contaminés par les organochlorés
lorsqu'on les compare aux autres espèces.
Les effets dévastateurs de l'arrivée du PDV-1 dans la population phocine européenne, naïve par rapport au
distemper, ont été comparés aux effets des oreillons (Measles) transmis par les Européens aux populations
autochtones d'Amérique du Nord.
Cétacés
Historique. A la fin de l'année 1988, on rapporta aussi des lésions de distemper chez des marsouins
(Phocoena phocoena, harbor porpoise) échoués en Irlande. Deux ans plus tard, en 1990, le virus entrait dans
la Méditerranée où il tuait des centaines de dauphins (Stenella coeruleoalba). Les dauphins méditerranéens
atteints de distemper avaient des niveaux de PCBs significativement plus élevés que les animaux non atteints
(chez les phoques, on a rapporté des différences en Angleterre (pas partout) mais non en Scandinavie). Dans
les deux cas, les chercheurs ont suggéré que les effets immunodépresseurs des contaminants peuvent avoir
accéléré la progression de l'épidémie et avoir accru ses effets.
En 1987 et 1988, 750 dauphins ont été trouvés morts sur les plages est américaines (du New Jersey à la
Floride). Dans des conférences de presse et dans un rapport au gouvernement américain, Geraci (1989) a
suggéré que la brevitoxine, une toxine produite par une algue minuscule, serait la cause de la mortalité de ces
animaux. Ces conclusions ont été très affaiblies depuis par la mise en évidence subséquente, dans les tissus
de ces animaux, de lésions très suggestives de morbillivirus, ainsi que d'acides nucléiques et d'antigènes de
morbillivirus. D'autre part, des niveaux phénoménaux de contamination par les composés organochlorés (OCs)
étaient rapportés en annexe et faisaient l'objet d'un bref commentaire dans le rapport officiel.
Méthodes de diagnostic.
Les techniques de biologie moléculaire modernes ont permis d'étudier rapidement le génome de ces nouveaux
virus sans avoir recours aux méthodes traditionnelles de virologie, telles que la culture cellulaire qui sont
longues, fastidieuses et coûteuses. Ainsi, la technique de la réaction polymérase en chaîne (PCR) permet de
détecter le virus à partir de quelques cellules mononucléaires du sang périphérique. L'analyse moléculaire du
virus du distemper des phoques de la Baltique (PDV-1) a été pratiquée en synthétisant de l'ADN à partir de
l'ARN viral en employant la transcriptase inversée (RT) puis en amplifiant des segments restreints de l'ADN
viral complémentaire (ADNc) par PCR, puis en séquençant directement ces segments.
Cette analyse a permis de démontrer que PDV-1 est un virus distinct, inconnu auparavant, mais relié aux
autres membres du genre morbillivirus. Le virus qui a tué les phoques du lac Baïkal est le PDV-2,, qui ne peut
être distingué du virus du CDV. Le PDV-2, mais non le PDV-1, pourrait donc avoir été transmis du chien au
phoque.
Le virus responsable des mortalités de cétacés s'apparente au virus de la Peste des petits ruminants, un autre
morbillivirus. La plupart (93%) des globicéphales trouvés échoués et testés entre 1982 et 1993 sont
séropositifs aux morbillivirus. Étant donné que la maladie n'a pas été rapportée chez cette espèce, les
globicéphales pourraient jouer un rôle semblable à celui du phoque gris en regard de l'épidémiologie de la
maladie chez les cétacés. Duignan et al {312} ont rapporté que les individus de onze des 15 espèces
d'Odontocètes testées depuis 1986 étaient séropositifs aux morbillivirus.
Les différences importantes entre ces virus impliquent qu'ils ne proviennent pas des chiens, à l'exception
(importante) du PDV-2, mais plutôt qu'ils sont présents dans les populations de mammifères marins depuis
longtemps, au moins plusieurs décennies.
On pense maintenant que les phoques de la mer du Nord (en Europe) auraient contracté PDV-1 à partir de
phoques du Groenland qui auraient voyagé sur des distances anormalement longues en 1987, peut-être à
cause de changements écologiques.
RÉSUMÉ: Nouveaux morbillivirus de mammifères marins
1.
Phoques de la mer Baltique: PDV-1, apparenté mais distinct du virus du distemper canin.
Probablement contracté de phoques du Groenland
82
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
2.
Phoques du lac Baïkal: PDV-2, très proche du virus du distemper canin.
Probablement transmis à partir de chiens.
3.
Cétacés: semblable au (mais distinct du) virus de la peste des petits ruminants
Impacts possibles sur la population de bélugas du Saint-Laurent: Les morbillivirus pourraient avoir un
impact important sur des espèces déjà menacées et pourrait entraîner des échouages en masse des
Odontocètes grégaires {312}.
Grey seals:
Harbor seals:
Harp seals:
Harbor porpoise
TAXONOMIE DE QUELQUES MAMMIFÈRES MARINS CANADIENS
phoque gris
Halichoerus grypus
phoque commun
Phoca vitulina
phoque du Groenland
Phoca groenlandica
marsouin commun
Phocoena phocoena
Influenza chez le phoque
Agent: souches d'influenza, quelques fois des souches aviaires, très semblables aux souches qui infectent les
oiseaux nord-américains.
Historique: Chez l'humain, les pandémies d'influenza se répandent partout sur le globe en très peu de temps.
La prévalence de la maladie et des morts augmente alors pendant 2-3 ans. De telles pandémies sont
survenues en 1918, 1957 et en 1968. Pendant la pandémie la plus sévère, en 1918, au moins 20 millions de
personnes sont mortes, surtout dans les pays en voie de développement. Ainsi, 10 millions de personnes sont
mortes aux Indes seulement contre 500,000 aux É-U. Contrairement aux autres pandémies, où les personnes
âgées étaient le plus touchées, surtout des jeunes adultes sont morts dans l'épidémie de 1918 (souche H1N1).
En 1979 et 1980, une épidémie d'influenza avec un mycoplasme et des facteurs environnementaux non
identifiés causa de sévères mortalités chez les phoques communs (600 phoques) sur les côtes de la Nouvelle
Angleterre. Une seconde épidémie survint de juin 1982 à août 1983, due à une autre souche. Les deux
souches étaient des souches aviaires, très semblables aux souches qui infectent les oiseaux nord-américains
(hémagglutinine H3). D'autres mortalités, dues à de nouvelles souches du virus, surviennent épisodiquement
depuis ce temps (janvier 1991 et Jan. à avril 1992).
Lésions : pneumonie hémorragique ou pneumonie aiguë interstitielle avec emphysème sous cutané
Transmission: Les oiseaux auraient donc transmis l'influenza aviaire aux phoques. C'est une observation
importante parce que ces animaux appartiennent à des classes d'animaux totalement différentes. Cette
transmission survient sans doute à cause de la proximité entre les oiseaux marins et les pinnipèdes. Chez les
oiseaux, le virus se multiplie surtout dans les cellules intestinales et est rejeté à l'extérieur dans les fientes. Les
phoques s'infecteraient à partir des fientes laissées par les oiseaux dans les étangs intertidaux où les phoques
s'ébattent (c'est le même principe que pour les porcs en Chine, voir plus bas). On a suggéré que le
réchauffement du climat aurait entraîné les phoques à passer plus de temps hors de l'eau en groupes
compacts et ceci aurait facilité la transmission du virus.
D'autres transmissions d'espèces à espèces surviennent: oiseaux-porcs, phoques et humaines, porcs et
humains. On pense que les épidémies d'influenza proviendraient de la Chine et que les oiseaux transmettent
leur souche (aviaire) au porc. Ce dernier est l'éprouvette où les réassortiments des chromosomes viraux
génèrent les nouvelles souches humaines
les pandémies humaines ont commencé en Chine (à l'exception peut-être de la grippe espagnole)
les souches humaines et porcines sont à peu près les mêmes. (La pandémie de 1918 était très
semblable aux souches porcines).
les porcs sont susceptibles aux souches humaines et aviaires
les humains ont déjà contracté la maladie à partir du porc.
l'humain n'est pas susceptible aux souches aviaires, ce qui rend un hôte intermédiaire nécessaire (le
porc)
en Chine, on élève les porcs et les canards très près les uns des autres (un autre cas de perturbation
écologique!). Les canards sont placés dans des cages au-dessus des porcs et les porcs se nourrissent
83
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
en grande partie des fientes d'oiseaux. (Chez l'oiseau, le virus se réplique dans l'épithélium intestinal,
pas dans l'épithélium respiratoire, comme chez les mammifères).
Parce qu'on a trouvé plus de 4 sous-types chez le phoque, on pense maintenant que le phoque jouerait
aussi le rôle de réservoir où les réassortiments des chromosomes viraux surviennent.
En 1999, des scientifiques britanniques détectaient par RT-PCR la souche d'influenza responsable de l'épidémie de 1918-1919 a dans
des cadavres congelés de mineurs de charbon dans le Spitsberg en Norvège. On a retrouvé le virus dans les cerveaux des cadavres, ce
qui pourrait expliquer la "maladie du sommeil" ou encephalitis lethargica, ou maladie de von Economo, une maladie caractérisée par un
long coma. Cette maladie est survenue en même temps que l'épidémie d'influenza
PNEUMONIA - CHINA (GUANGDONG) (05)
**********************************
A ProMED-mail post
<http://www.promedmail.org>
ProMED-mail is a program of the
International Society for Infectious Diseases <http://www.isid.org>
Date: Thu 20 Feb 2003
From: Marianne Hopp <[email protected]>
Source: World Health Organisation (WHO), Disease Outbreaks Report, Thu 20
Feb 2003 [edited]
<http://www.who.int/csr/don/2003_2_20/en/>
Acute respiratory syndrome in China - WHO Update 3
------------------------------------------------[As of Thu 20 Feb 2003], the Ministry of Health, China, has reported that
the causal agent for the atypical pneumonia outbreak in Guangdong Province,
which affected a total of 305 cases including 5 deaths, was probably caused
by _Chlamydia pneumoniae_. Further epidemiological investigations are
underway coordinated by the Guangdong Provincial Health Department.
-Marianne Hopp
<[email protected]>
[An observation relevant to this update is included in the Moderator's
comment to the ProMED-mail post archived as: Influenza, H5N1 human case China (Hong Kong) 20030219.0428. - Mod.CP]
[see also:
Pneumonia - China (Guangdong) (02) 20030211.0369
Pneumonia - China (Guangdong) (03) 20030214.0390
Pneumonia - China (Guangdong) (04) 20030219.0427
Pneumonia - China (Guangdong): RFI
20030210.0357]
......................cp/pg/dk
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84
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
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Date: 20 Feb 2003
From: ProMED-mail <[email protected]>
Source: AFX News - Asia / XFN 19 Feb 2003
23:27 EST [edited]
Guangzhou doctors say unknown virus caused pneumonia, not chlamydia
-------------------------------------------------Doctors in Guangzhou who examined specimens from persons who died from
atypical pneumonia in the city said the disease was caused by a yet unknown
virus and not by "chlamydia," as was concluded by official institutions in
Beijing.
A doctor
Hospital
early to
bird-flu
with Guangzhou-based First Medical Military University Nanfang
who participated in the examinations told XFN that it is still too
exclude the possibility that the virus is a variation of the
virus.
"We believe the disease was caused by a virus, but further analysis and
tests are needed to identify the actual virus," the doctor, who declined to
be identified, told XFN.
A 9-year-old Hong Kong boy has been infected with the H5N1 bird flu virus
in Fujian province, which borders Guangdong province, and his father and
sister have died from pneumonia, foreign media reported.
Officials in Guangdong and Fujian have rejected claims of any bird-flu
cases, the foreign media added.
Xinhua news agency reported earlier in the week that the illness in
Guangdong province that killed 5 and affected 305 people was caused by
chlamydia, citing a research report jointly prepared by the Chinese Center
for Disease Control and Prevention and Guangdong Provincial Disease Control
and Prevention Center.
The news agency said chlamydia was found in the lungs of 2 patients who
died from atypical pneumonia.
Xinhua said chlamydia could be spread through exposure to patients or
infected birds through secretions from the respiratory tract, but it added
chlamydia is "completely preventable".
Guangdong residents earlier this month responded to reports of an unknown
disease with increased buying of Chinese herbal drinks, vinegar, rice, and
salt.
-ProMED-mail
<[email protected]>
[As a reminder, this moderator added a provocative comment with a
speculation that there might be a connection between the H5N1 human case(s)
85
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
reported from Hong Kong with history of travel to Fujian (see ProMED-mail
posting Influenza, H5N1 human case - China (Hong
Kong) 20030219.0428). Hence, this newswire seems to add more fuel to the
speculative fire. Readers should be cautioned before interpreting this as
proof, as both this moderator's comment and the above newswire's comments
are based on speculation of an observation that there was an unusual,
apparently limited outbreak of pneumonia in a province of mainland China
that is geographically located between Hong Kong and Fujian Province, where
there have now been 2 documented cases of human infection with H5N1
influenza virus. Clearly, we await further information from official
sources with results of official testing addressing the question of whether
H5N1 influenza virus was responsible for additional human cases. - Mod.MPP]
[see also:
Maladie vésiculaire des otaries de Californie: {123}
Première zoonose virale provenant de l'océan.
Agent: calicivirus
Historique: ce calicivirus a été transmis au porc par les éleveurs de porc qui nourrissaient leur élevage avec
des carcasses d'otarie. En 1932, l'infection a causé une nouvelle maladie vésiculaire chez le porc, l'exanthème
vésiculeux. Chez les otaries, la maladie a été reconnue pour la première fois en 1972. C'était le premier virus
isolé chez un pinnipède. Au moins 34 sérotypes de calicivirus proviennent de l'océan.
Lésions:
Otarie: avortement, diarrhée, vésicules orales et sur les ailerons, anorexie
Vison: pneumonie hémorragique
Veaux: pneumonie
Prévalence: prévalence élevée dans certains seaquariums chez les otaries en captivité (environ 40 %).
(JWD 36(3): 500-507 (2000)).
Écologie:
Poisson des étangs intertidaux est infecté
Larves de ver du poumon (P. decorus) infectées par virus infeste le poisson, ingéré par le phoque
Transmission
Nématode
Téléoste
Mammifère
Autres hôtes : On a isolé récemment chez des otaries une souche de calicivirus provenant des serpents.
Cette souche cause des vésicules chez les otaries, tout comme les souches d'otarie (JWD 34 : 451-456
(1998)). Les calicivirus franchissent donc la barrière mer-terre facilement et peuvent infecter des
poïkilothermes tout comme des homéothermes.
Autres virus récents de mammifères marins
Des épidémies virales beaucoup moins graves ont été signalées chez des mammifères marins :
1984: mortalité par Herpès chez des phoques en Europe, calicivirus chez des dauphins communs
(T. truncatus). D'autres virus ont été rapportés dans des cas individuels : dermatite à Herpès chez le béluga du
Saint-Laurent, des infections à Pox chez les dauphins et marsouins.
Contamination, virus, et phoque
-
2 groupes de 11 P. vitulina nourris avec hareng de la Baltique ou de l'Atlantique,
2.5 ans
Diminution de l'IMC chez groupe nourri au poisson de la Baltique.
IH: pas de changement
86
Pathologie de la faune 2002
-
Daniel Martineau
huile de ces poissons donnée à des rats
. pas de différence chez adulte.
. chez ratons: diminution de l'IMC, de la défense contre cytomégalovirus de rat.
Réf.: R de Swart et al (laboratoire de ADME Osterhaus)
Maladie hémorragique du chevreuil due à un adénovirus.
Nouvelle maladie, seulement en Californie. Elle a tué des milliers de faons (cerf de Virginie) en 1993.
Agent : adénovirus (gros virus à ADN). Beaucoup de similitude avec l'adénovirus bovin type 3. (Le
Dr JM Lapointe, maintenant à la FMV, a contribué à la caractérisation de ce virus en Californie).
Signes cliniques/lésions: Hémorragies multiples et oedème, comme le bluetongue et la maladie
hémorragique épizootique du chevreuil (dues à des orbivirus). Les hémorragies et l'oedème touchent surtout
les poumons et le tractus gastro-intestinal. Micro.: Vasculites. Dans le passé, des cas de la maladie à
adénovirus ont probablement été diagnostiqués inexactement comme étant des cas de bluetongue et de
maladie hémorragique épizootique.
Pathogénie: le virus réplique dans les cellules endothéliales; la réplication virale endommage ces cellules et
donc les vaisseaux sanguins, ce qui explique la vasculite (ce qui explique les hémorragies).
Fièvre hémorragique du virus Ebola
Filavirus (de forme filiforme)
Historique
Le virus fut d'abord découvert en 1976 quand deux épidémies de fièvre éclatèrent au Soudan et au Zaïre, sur
le bord de la rivière Ebola (318 cas, 280 morts dont 85 avaient reçu une injection dans le même hôpital). En
novembre 1994, une zoologiste étudiant une bande de chimpanzés en Afrique de l'Ouest fait une autopsie sur
un chimpanzé mort d'une maladie inconnue. Huit jours plus tard, elle était transportée dans un hôpital suisse
où on diagnostiqua une nouvelle souche du virus Ebola. Elle cause de la fièvre hémorragique chez l'homme et
le singe. C'était la première fois qu'une infection humaine par le virus Ebola était causée par une infection chez
le singe en Afrique. Le singe n'est probablement pas l'hôte habituel, considérant qu'il devient rapidement
malade lorsque infecté. Le réservoir est encore inconnu.
La nouvelle souche de 1994 transmise du singe à l'homme lors d'infection naturelle, s'ajoute à trois souches du
virus dont la souche virulente du Zaïre qui a fait les manchettes l'été 1995.
En septembre 2000, une nouvelle épidémie s'est propagée en Ouganda (cette épidémie a emporté le premier
médecin africain formé par la regrettée Dre Teasdale). En décembre 2000, l'épidémie avait emporté 160
personnes.
Transmission: contrairement à ce que laissent croire les médias, la maladie ne se transmet pas très
facilement. La transmission est prévenue en portant masque et gants de latex ou vinyl. La transmission
apparemment foudroyante du virus dans les pays touchés est due la plupart du temps aux traditions funéraires
ou à des déficiences béantes du système médical dans ces pays. Par exemple, les proches baignent et lavent
les corps des victimes. Au moins une épidémie survenue dans un hôpital est due à une grave erreur de diagnostic: le patient atteint
du virus avait été opéré à tort pour une appendicite. Lors de l'incision abdominale, le sang contaminé qui remplissait la cavité abdominale
avait aspergé abondamment le personnel chirurgical.
Virus du syndrome de l'immunodéficience acquise (VIH)
Agent: Lentivirus. Famille: retroviridae
Origine: Le VIH est le deuxième rétrovirus jamais isolé chez l'humain. Il infecte plus de 40% des humains
dans certains pays d'Afrique. Il semble que le virus infectait la population humaine de ce continent depuis
quelques centaines d'années mais il était confiné à quelques villages reculés. L'urbanisation et le
développement du réseau routier (particulièrement la construction d'une autoroute entre Kinshasa (Zaïre) et
Mombasa (Kenya)) entraînèrent la propagation du virus aux villes africaines dans les années 1970 puis de là à
l'Amérique. On savait depuis des années que le VIH 2 dérivait d'un lentivirus de singe (VIS) parce que sa
séquence était très proche de la séquence de ces lentivirus. Le VIH 1 est beaucoup plus fréquent que le VIH 2.
Les deux virus, bien qu'ils portent un nom semblable sont en fait très différents. Malgré l’importante du VIH-1,
on ignorait toujours -jusqu'en 1990- d'où venait ce virus. Sa séquence était très différente de la séquence des
lentivirus de singes connus. Ce n'est qu'en 1999, quand on a retrouvé dans un congélateur des tissus d'un
chimpanzé (Pan troglodytes troglodytes) mort dans un laboratoire américain en 1985 (il avait été capturé en
87
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
1959), qu'une chercheuse allemande a retrouvé dans ces tissus un virus très près du HIV-1, le SIVcpz. Ce virus
était le chaînon manquant. (Le chimpanzé d'origine n'était même pas mort de cette infection).
En nature, ce rétrovirus infecte un grand nombre de chimpanzés (Pan troglodytes) (indigène au Cameroun,
Gabon, Guinée équatoriale, Congo) sans les rendre malades. Ce virus se serait propagé à l'humain après la
deuxième Guerre mondiale, alors que les routes ont envahi la jungle, apportant des chasseurs qui ont chassé
les singes et en ont vendu la viande dans les villes de l'Afrique de l'ouest. Le virus s'est probablement transmis
à l'homme à partir de carcasses de singes, pendant la préparation des carcasses. (Les carcasses sont
préparées dans des conditions primitives, à la machette, sur le sol, dans une flaque de sang).
Puis, les deux VIH se sont probablement propagés à travers l'Afrique à cause de l'urbanisation qui a suivi la
Guerre, les guerres civiles, et la promiscuité sexuelle. La construction d'une importante autoroute a attiré les
pauvres et la prostitution le long du chantier, puis de la nouvelle voie.
HIV-1 et HIV-2 se seraient propagés séparément dans les grandes villes africaines, le premier en Afrique de
l'est et le second en Afrique de l'ouest. La propagation simultanée de deux virus différents dans le monde
entier serait due à l'exportation intense de singes de l'Afrique à l'Europe et aux États-Unis dans les années
1960. Il y a eu aussi une vague intense de vaccinations dans les pays du tiers monde (vaccin fait à partir de
cellules de singes) qui a impliqué l'usage d'aiguilles non stérilisées.
Si l'on parvient à comprendre comment/pourquoi les chimpanzés sont résistants aux effets pathogènes du
virus, on pourrait mettre au point un médicament sinon pour guérir, du moins pour soulager les sidatiques.
Ces primates sont infectés sans montrer de maladies, probablement parce qu'ils ont le virus depuis des milliers
d'années. On veut maintenant déterminer pourquoi le VIH-1 ne cause pas de maladies chez ces singes et
appliquer cette particularité au traitement du SIDA. Il y a un problème : toutes les espèces de chimpanzés sont
sur la liste des espèces en voie de disparition. Il en reste de 80,000 à 250,000.
West Nile Virus (virus du Nil Occidental)
• Agent: arbovirus. Genre: Flavivirus. Famille: Flaviviridae. Le WNFV est membre du groupe antigénique de
l'encéphalite japonaise. Tous les membres de ce groupe sont transmissibles par les moustiques et
peuvent causer une maladie grave et fatale chez l'humain. Dans ce groupe, le WNV est le plus près du
virus de l'encéphalite de Saint Louis.
Le WNFV est transmis aux humains par les moustiques. Ceux-ci contractent le virus en ingérant du sang
d'oiseaux infectés, très virémiques (ont une forte concentration de particules virales dans le sang).
Le virus a été isolé de 43 espèces de moustiques, surtout du genre Culex.
• Historique: Virus d'abord isolé en 1937 du sang d'une femme fiévreuse en Ouganda, dans le district du Nil
Occidental, puis de patients, d'oiseaux et de moustiques en Europe dans les années 1950s. Ce virus était
déjà connu comme étant le plus répandu des Flaviviridae. Il était répandu en Afrique, au Moyen-Orient, et
en Eurasie. Dans les années 50s, 40 % des Égyptiens étaient séropositifs.
! L'arrivée du virus en Amérique du Nord en juillet 1999 a causé des mortalités humaines et animales
(oiseaux et chevaux). Le virus est réapparu comme prévu au printemps 2000 avec l'arrivée des
oiseaux migrateurs et l'abondance des insectes.
! États-Unis: En août 1999, des corneilles sont trouvées paralysées et/ou mourantes au cœur de New
York, près du zoo du Bronx. Le Dr Tracey McNamara (vétérinaire pathologiste au Zoo) ramasse les
corneilles mortes à la porte du zoo, les examine et observe des lésions d'encéphalite et de myocardite
virales.
À la fin d'août, presque en même temps, des citoyens de New York montrent des symptômes d'encéphalite, et le virus responsable est
classifié temporairement comme celui qui cause l'encéphalite de Saint-Louis, un arbovirus. (Donc les premiers cas humains de WNV
dans l'hémisphère occidental datent de août 1999).
Personne parmi les autorités sanitaires de la ville ne relie ces cas aux corneilles. Pendant la fête du travail, d'autres oiseaux meurent au
zoo : (cormorans, flamands, un faisan et un aigle). Puisque les oiseaux du zoo sont morts après les corneilles, on conclut que l'infection
des corneilles ne venait pas du zoo. On soupçonnait l'encéphalite équine de l'est (EEE) comme agent de la mort des corneilles. Mc
Namara n'acceptait pas cette hypothèse car les émeus du zoo, une espèce très sensible au virus EEE, n'étaient pas malades. Elle pense
donc à un virus différent et elle suspecte que le virus est transmis par des maringouins. Elle pensait aussi que le virus était relié au virus
causant l'encéphalite chez les New Yorkais et elle commença à prendre des précautions spéciales pendant les nécropsies des oiseaux.
Elle avertit aussi les autorités sanitaires de NY et envoya des échantillons de flamands pour analyse le 9 septembre au USDA'S National
Veterinary Service Laboratory à Ames, Iowa. On lui dit que les échantillons étaient infectieux, et que l'agent n'était pas un virus aviaire
connu, et n'était pas le virus de l'encéphalite équine de l'est, de l'ouest ou du Venezuela.
Au microscope électronique, les scientistes de Ames découvrirent qu'il s'agissait d'un flavivirus (16 septembre 1999). Elle avait aussi
envoyé des échantillons au CDC et au US Army Medical Research Institute of Infectious Diseases (Fort Detrick, Maryland. A cet endroit,
on détermina qu'il s'agissait du SLE ou d'un virus très semblable, le West Nile fever virus. Mc Namara insista immédiatement auprès des
autorités sanitaires de New York pour qu'ils recherchent le même virus dans les échantillons des personnes qui étaient mortes entre-
88
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
temps de l'étrange encéphalite à New York (un homme de Toronto est mort ce mois-là après une courte visite à New York). le 22
septembre 1999, le virus était identique au WNFV. Les 24 et 25 septembre, le laboratoire d'arbovirus du CDC, à Fort Collins, Colorado
déterminait que le virus trouvé dans le cerveau des victimes (humaines) était le même que celui trouvé dans le cerveau des oiseaux
envoyés par le Dr Mc Namara. Ce virus est presque identique à une souche isolée en Israel en 1994. Cette souche avait été responsable
d'une épidémie grave chez des oies. Ceci était nouveau. On n'avait jamais isolé de souches causant la maladie chez des oiseaux
auparavant. Ceci suggère que la souche nord américaine a de nouvelles propriétés virulentes, tout comme la souche sœur d'Israel.
En mars 2000, les virologistes américains isolaient le virus de moustiques new-yorkais (Culex pipiens) et d'une
buse morte de l'infection dans l'état de New York. Cette découverte indique que le virus est maintenant établi
dans cet État et que l'infection d'humains ou d'animaux sur le continent nord-américain ne dépend plus de
l'introduction aléatoire du virus.
Pour l'année 2000, au 22 décembre 2000, l'État de New York comptait les cas positifs suivants: 14 cas
humains, 271 oiseaux morts, 360 pools de moustiques, 2 poulets sentinelles, 8 oiseaux vivants, 2 chauvesouris, 24 chevaux, 1 lapin domestique, 1 écureuil, 1 tamias rayé
<http://www.health.state.ny.us/nysdoh/westnile/update/today.gif>.
(Les cas dits "positifs" sont des animaux ou humains où l'antigène viral ou des anticorps ont été détectés. Il ne
s'agit pas nécessairement d'animaux qui ont des symptômes ou des lésions).
[email protected]
! Canada. Premier et seul cas humain au Canada en 1999 et en 2000. L'homme avait visité New
York. La maladie est entrée au Canada à l'été 2001 quand des corneilles et un géai bleu ont
été trouvées positives en Ontario.
Virulence. Modérée: de 3 à 15 % des gens qui développent une encéphalite meurent.
Écologie et transmission. Les oiseaux amplifient l'infection parce que le virus se réplique (=se multiplie)
jusqu'à de très fortes concentrations dans leur sang (= forte virémie). En d'autres mots, les oiseaux deviennent
des manufactures de virus qui servent de source d'infection pour les moustiques hématophages.
L'établissement du virus dans une région donnée nécessite des oiseaux virémiques et, du moins on le pensait,
qui ne meurent pas de l'infection, des moustiques ornithophiles = (qui "aiment" les oiseaux).
En Europe et en Afrique, les oiseaux infectés sont rarement malades (ceci était vrai jusqu'à l'isolement de la
souche israélienne en 1994). En contraste marqué et nouveau, en Amérique du Nord, les corneilles sont
malades, meurent (d'encéphalite et myocardite non suppuratives) et les carcasses contiennent une grande
quantité de particules virales. Les corneilles mortes ou malades représentent donc probablement un danger
pour la santé humaine, ce qui n'était pas le cas pour les oiseaux infectés auparavant, dans les autres parties
du monde.
On ignore comment la virulence nouvelle du virus pour l'oiseau affectera l'établissement du virus en Amérique
du Nord. Sera-t-elle négative ou positive pour l'établissement du virus ? Est-ce que cette virulence nouvelle
éliminera certaines populations d'oiseaux indigènes à l'Amérique du Nord ? Les populations de corneilles en
souffriront-elles ?
Corneilles Les corneilles sont de plus en plus abondantes en milieu urbain en Amérique du Nord. Aux ÉtatsUnis, c'est parce qu'elles constituent une espèce protégée depuis 1972. Elles n'aiment pas les forêts denses.
Elles aiment les grands champs, où elles peuvent se nourrir de grain, avec quelques arbres, où elles peuvent
se percher. Les villes offrent les mêmes caractéristiques que cet habitat, en mieux. 1) en hiver, la température
des villes peut être jusqu'à 10 0C plus élevée que la température de la campagne environnante. 2) L'éclairage
urbain aide les corneilles à échapper à leurs prédateurs naturels, le hibou et la chouette, des oiseaux
nocturnes.
Origine de l'infection. Pour l'instant on pense que l'introduction du virus aux États-Unis a été causée par
1. un oiseau déjà (ou devenu) virémique:
• Un oiseau migrateur (plusieurs espèces d'oiseaux migrent entre l'Europe et l'Afrique d'une part, et
l'Amérique du Nord d'autre part),
• ou des oiseaux déplacés par les grandes tempêtes tropicales sévissant entre août et novembre (et qui
se déplacent de l'Est vers l'Ouest)) ou 1.3). Un oiseau introduit légalement ou illégalement à l'aéroport
JF Kennedy ou LaGuardia.
2. L'hypothèse que le virus a été introduit par un immigrant est possible mais peu probable à cause du cycle
biologique du virus (oiseau virémique - insecte).
89
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
3. L'hypothèse d'un insecte contaminé apporté par un avion est aussi possible mais peu probable à cause du
trop faible nombre de particules virales emportées.
Contrôle et surveillance. Dans les régions où la présence du virus a été confirmée, il faut évidemment se
protéger des insectes piqueurs. On doit aussi éliminer tous les habitats favorables aux larves de moustiques,
comme les gouttières ou tout récipient contenant de l'eau stagnante, y compris les piscines inutilisées.
! Poulets sentinelles. En 2000, le Canada (dont le Québec) a établi des postes où sont gardés des poulets
sentinelles. Le sang de ceux-ci est prélevé régulièrement et testé pour la présence d'anticorps spécifiques
contre le WNV. (Les derniers rapports américains mentionnent que les insectes piqueurs préfèrent les
oiseaux de couleur foncée (comme la corneille). Ils mentionnent aussi que les insectes piqueurs vivant à la
hauteur du feuillage des arbres ne sont pas les mêmes que ceux qui sont vivent à "hauteur de poulet
(sentinelle)". La valeur des poulets comme sentinelle du WNV est donc remise en question pour 2001).
! Examen postmortem des oiseaux. Le principal instrument de surveillance consiste à examiner tous les
oiseaux sauvages trouvés morts. L'examen doit être fait par des pathologistes vétérinaires compétents
sous hotte à flux laminaire, en employant les précautions d'usage.
Conclusion. Pour l'instant, le WNV devrait être ajouté à la liste des arbovirus qui peuvent causer des
encéphalites chez les humains et les animaux (chevaux et, fait nouveau pour les arbovirus, chez les oiseaux)
en Amérique du Nord. (voir Arbovirus). En 1999, dans l’État de New York, sept personnes sont mortes du
virus et 62 personnes ont été très malades. En 2000, moins de persones ont été malades et une seule est
morte. Ceci est très peu si on compare à d'autres causes de mortalités comme les accidents de la route par
exemple.
Le WNV pose des risques de mortalité humaine semblables à ceux du virus de l'encéphalite de Saint-Louis.
Dans le cas de cette maladie, on combat les moustiques adultes dans les zones résidentielles seulement si on
détecte le virus dans les plans d'eau et chez les animaux sentinelles.
Référence sélectionnée:
www.cdc.gov/ncidod/eid/vol6no4/rappole.html
Bactéries
Maladie de Lyme (Borreliose)
Agent causal. Borrelia burgdorferi est une bactérie, un spirochète infectant les animaux et les humains. Les
spirochètes ont une forme ondulée et un flagelle situé entre la paroi interne et la paroi externe de la bactérie.
Borrelia ne reste pas à l'état libre. Elle transite rapidement des tiques (arthropodes hématophages) (Ixodes
scapularis) à un vertébré. Elle ne se retrouve donc pas dans l'eau, sur le sol, sur les plantes et n'est pas
transmise par aérosol ou par contamination fécale. Elle se transmet lorsque la tique infectée se nourrit de
sang.
Génome: Le génome de Borrelia est organisé d'une façon très particulière. Au lieu d'être sur une
seule molécule circulaire d'ADN, comme la plupart des bactéries, le génome de Borrelia est composé de
plusieurs chromosomes (plusieurs molécules d'ADN). (ce type de génome est dit "segmenté"). Borrelia a aussi
plusieurs plasmides (=mini chromomes).
Noter que la leptospirose, la syphilis et la fièvre ondulante sont aussi causées par des spirochètes.
Historique. En Amérique du Nord, cette maladie fut d'abord rapportée à Old Lyme, une petite ville du
Connecticut en 1975 quand plusieurs enfants développèrent de l'arthrite. On fit le rapprochement avec le
syndrome déjà décrit en Europe et dans les États américains de la côte Ouest. La maladie était déjà connue
dans les États américains de la côte Ouest bien avant que les premiers cas soient décrits sur la côte Est mais
on en ignorait la cause ; on savait tout au plus qu'elle était associée à la morsure d'une tique, I. ricinus, puis la
bactérie fut isolée d'abord des tiques, et finalement de patients.
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Daniel Martineau
La maladie a été décrite en Europe il y a plus de 80 ans. On sait maintenant que la maladie existait
probablement en Amérique du Nord avant l'arrivée des Européens et les premiers colons en furent
probablement atteints. La précarité des conditions de vie et la nature relativement bénigne de la maladie font
probablement que celle-ci passa inaperçue pour des siècles.
Des changements écologiques récents ont sans doute causé l'explosion récente de la maladie. La NouvelleAngleterre fut déboisée massivement au cours des 18ème et 19ème siècles. Le cerf de Virginie (et ses tiques)
disparurent alors presque complètement. Comme la bactérie causant la maladie dépend de la tique pour sa
propagation à l'homme, la maladie disparut aussi presque totalement. Cependant il resta des forêts comme sur
Long Island (presqu'île de New York) où les cerfs de Virginie persistèrent. Les fermes furent abandonnées
pendant la crise économique de 1928 et les champs furent remplacés par des forêts caduques. Les cerfs de
Virginie revinrent.. et avec eux, leurs tiques. En même temps, les citadins déménageaient à la campagne, où il
est courant que les chevreuils passent l'après-midi dans les cours des "bungalows" pendant que les
propriétaires sont au travail.
Écologie/Épidémiologie. Parce que la maladie se transmet par la morsure d'une tique, le risque de contracter
la maladie dépend de la densité de tiques dans une région donnée et de l'exposition à ces tiques. Les animaux
et humains confinés aux zones urbaines (habitées), même dans une région infestée, ont très peu de chances
de s'infecter. Par contre, les chiens qui prennent de l'exercice ou qui travaillent dans les zones de banlieue ou
rurales où les tiques sont endémiques courent plus de risque.
<
A date, on ne rapporte pas de transmission directe d'animal à l'homme. La bactérie est maintenue en
nature à l'intérieur d'un cycle impliquant les petits mammifères (souris) et les oiseaux. Les chevreuils
sont les hôtes favoris (mais pas obligatoires) des tiques adultes. L'infection "déborde" chez les
humains et les animaux domestiques quand ceux-ci sont mordus par la tique infectée.
<
Les larves et les nymphes de la tique s'infectent avec la bactérie en se nourrissant de sang sur
un mammifère infecté. Noter que la tique est inactive quand la température descend à moins de
5oC. Les risques de se faire mordre sont donc minimes de novembre à avril.
<
Printemps: la femelle adulte (sur le chevreuil) pond des œufs qui tombent au sol.
<
Été: les larves éclosent au début de l'été (on en trouve de mars à août sur les chevreuils). Elles
parasitent un animal ou occasionnellement l'homme. Elles ingurgitent du sang (4 jours) et peuvent
alors se contaminer si l'hôte réservoir, une souris ou un oiseau, est contaminé. Les larves deviennent
des nymphes (avril à août), ces nymphes hivernent, et elles deviennent des adultes sexués l'automne
qui suit (on trouve les adultes sur les chevreuils d'octobre à avril).
<
Automne: les nymphes infectées transmettent le spirochète à des hôtes réservoirs, en régurgitant une
partie du contenu de leur intestin. Les hôtes réservoirs sont les petits mammifères, surtout la souris à
pattes blanches, les oiseaux, rarement le chevreuil. Les nymphes infectées infectent donc l'hôte
réservoir juste avant l'arrivée des larves écloses au printemps, qui recherchent un nouvel hôte. (Les
larves peuvent se voir sur les chevreuils de mars à août). C'est donc la souris, l'hôte réservoir, qui
assure la transmission de la bactérie entre insectes, la bactérie étant très peu transmise par les
ovaires de l'insecte.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Seules les tiques adultes infestent le chevreuil (octobre à avril), et sur le chevreuil, seules les femelles adultes
s'alimentent du sang. Apparemment le chevreuil est un cul de sac pour la bactérie parce que le chevreuil
résiste à l'infection, (il n'est pas infecté ou malade) mais il est important pour la reproduction, le maintien et le
transport des tiques dans de nouvelles régions.
La souris à pattes blanches (white footed mouse) Peromyscus leucopus est très importante comme réservoir
de la bactérie partout dans l'habitat de I. scapularis mais les autres petits mammifères autant que les oiseaux
peuvent être importants localement. Plus de 25 % des nymphes et jusqu'à 50 % des adultes sont infectés dans
les régions où l'infection sévit (l'adulte s'est nourri deux fois, et a ainsi deux fois plus de chances de s'être
infecté, comme larve et comme nymphe). Les nymphes, étant très petites, peuvent transmettre la maladie sans
que les gens atteints ne se rendent compte qu'ils ont été mordus.
Plusieurs mammifères et oiseaux sont des réservoirs efficaces et sont capables d'infecter les larves avec B.
burgdorferi pendant leur repas de quatre jours. En plus d'infecter l'homme, le spirochète infecte les chiens, les
coyotes, les loups gris, les lapins, les oiseaux, et expérimentalement le tamias roux (3% des loups testés au
Minnesota et au Wisconsin avaient des anticorps). En juin 1994 la bactérie a été retrouvée dans les tiques de
lapins Haemaphysalis leporispalustris en Alberta. Ces tiques mordent rarement l'homme mais elles et leur hôte
contribuent de façon importante à la propagation de la maladie dans cette province. Les oiseaux transportent
les tiques sur des centaines de kilomètres le long de leurs voies migratoires. Ils portent des tiques infectées et
ils sont aussi infectés par B. burgdorferi. Le rouge-gorge et le troglodyte familier sont des hôtes connus de la
bactérie. En 1993, on rapportait qu'une tique commune des oiseaux marins peut être infectée. Les oiseaux
marins seraient donc une source possible de la maladie.
Les tiques servant de vecteurs à B. burgdorferi sont généralement du genre Ixodes. I. scapularis est
responsable de plus de 80% des cas de maladie de Lyme en Amérique du Nord.
Situation aux États-Unis : Environ 14,000 cas sont rapportés annuellement aux Etats-Unis. L'état du
Connecticut est le plus touché. Cette maladie est devenue la plus fréquente de toutes les maladies transmises
par des arthropodes aux États-Unis alors qu'elle était inconnue en Amérique du Nord il y a à peine 20 ans. En
France, le nombre de cas annuels est supérieur à 1,000. La place de cette maladie dans les média est
seconde seulement au SIDA. Cependant, son importance a été très exagérée. En fait, de nombreuses
personnes faussement diagnostiquées reçoivent inutilement des antibiotiques tous les ans.
Situation au Canada. Au Canada, la seule région où I. scapularis est endémique est en Ontario, autour et
dans le parc provincial de Long Point, sur la rive nord du Lac Érié, où jusqu'à 70% des tiques adultes sont
infectées par B. burgdorferi. Des 90 cas où I. scapularis a été rapportée ailleurs en Ontario sur des humains ou
des chiens, la moitié des cas ont été apportés de régions américaines endémiques ou de Long Point. Environ
un quart des cas n'ont pas d'histoire de voyage dans des régions endémiques. On croit par conséquent que
les I. scapularis ayant été trouvées sur des humains ou chiens n'ayant pas été dans des régions endémiques
ont été apportés par hasard par des oiseaux migrateurs.
En 1999, 16 cas ont été rapportés en Ontario, desquels la moitié ont été probablement acquis en dehors de la province. Sur une
période de 10 ans, le nombre de cas par 100,000 habitants est 16.6 dans la région de Long Point et 9.2 dans le Nord Ouest
ontarien.
Au Québec, on a rapporté 8 cas en 1996, tous chez des personnes ayant été aux É-U ou en Europe (aucun
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Pathologie de la faune 2002
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cas chez des personnes n'ayant pas voyagé). Cependant, ces statistiques sont plus ou moins fiables étant
donné que la maladie n'est pas à déclaration obligatoire. Des cas rapportés l'été 1995 en Estrie étaient de
fausses alarmes. La bactérie a été cultivée d'une tique ayant mordu un chien en 1995 (Ville Mercier,
Montérégie). Le chien a été traité immédiatement et est resté séronégatif (Dre. Louise Trudel, parasitologiste,
514-457-2070).
Sur environ 250 tiques reçues au laboratoire de santé publique (LSP) en 1996, 14 % étaient I. scapularis. Les
autres sont le plus souvent I. cookei, qui infeste la marmotte, et qui n'est pas un bon vecteur de Borrelia.
Toutes les I. scapularis étaient adultes. Ceci est très important. En effet, pour considérer une région
endémique, on doit y observer des nymphes et des larves pendant deux à trois ans, c'est-à-dire que la tique
doit se reproduire dans cette région. En 1999, ce n'est toujours pas le cas au Québec, c'est-à-dire la tique ne
se reproduit pas. Toutes les tiques trouvées ici auraient été "aéroportées" (tombées d'oiseaux migrateurs tel
que la sauvagine).
A l’Île du Prince Édouard, on a récemment isolé la bactérie d'un Ixodes collecté sur un chat.
Un autre Ixodes, I. pacificus, transmet la maladie sur la côte Ouest (Californie, Oregon et Washington). Alors
que I. scapularis se nourrit du sang d'oiseaux et de mammifères, I. pacificus préfère se nourrir sur les lézards,
qui ne sont pas de bons hôtes pour Borrelia.
En Asie et en Europe, la tique impliquée dans la transmission de la maladie est Ixodes ricinus.
Pathogénie. Les spirochètes sont des parasites extra-cellulaires. Elles franchissent avec aisance
l'endothélium des vaisseaux sanguins pour pénétrer dans les tissus, le cerveau par exemple. Plusieurs
semaines et même des mois après l'infection, jusqu'à 70 % des personnes infectées subissent une
bactériémie (bactéries dans la circulation). La bactérie colonise alors le cerveau, les nerfs, yeux, articulations
et le cœur. L'atteinte du système nerveux et du cœur est rarement fatale mais handicape la personne malade.
La pathogénie implique probablement une réaction immune de l'hôte. En d'autres mots, les lésions seraient
causées par la réaction de l'organisme à la bactérie et non par la bactérie elle-même.
En Europe de l'Est et en Scandinavie, la bactérie ne produit pas d'arthrite alors qu'aux États-Unis et en Europe
occidentale, l'arthrite est la manifestation courante de la maladie. On s'est aperçu que cette différence
correspond à des différences dans les séquences nucléotidiques au niveau de l'ADN génomique et de l'ARN
ribosomal.
Signes cliniques.
Faune. Chez les animaux réservoirs de la maladie, des signes cliniques sont rarement observés même si
au début de l'infection, la bactérie est dans le sang, ensuite dans les organes, dont la vessie et les oreilles.
Chez les cerfs fortement parasités par les tiques, on notera des dermatites (inflammation de la peau).
! Humains. Chez l'humain, la maladie n'est généralement pas fatale. Elle est facilement traitée avec des
antibiotiques (encore faut-il qu'elle soit diagnostiquée). Au début, la maladie imite une grippe et il y a une
tache rose sur la peau de 3 à 20 cm de diamètre centrée sur la morsure de la tique (érythème chronique
migrant), là où la tique s'est enfouie. Chez certaines personnes, des douleurs récurrentes se développent
dans les articulations (de l'arthrite se développe), au cœur (il y a inflammation du muscle cardiaque,
myocardite), et même au système nerveux si la maladie n'est pas traitée.
! Chien. Étant donné que les chiens s'infectent de tiques plus facilement que l'humain, la prévalence de
l’infection canine reflète la prévalence de l'infection chez l'humain. La borreliose canine se manifeste
généralement par un épisode aigu de fièvre, lymphadénopathie (enflure des nœuds lymphatiques), boiterie
récurrente, des articulations enflées, de la dépression (l'arthrite est le signe clinique le plus fréquent).
L'infection asymptomatique est aussi fréquente.
La forme nerveuse, fréquente chez l'homme, a été rapportée chez un seul chien. Ce chien montrait un
changement de caractère et des crises d'épilepsie.
!
La forme nerveuse serait due à l'augmentation de la perméabilité de la barrière sang-cerveau par le spirochète, puis au passage de celui-ci dans
le liquide céphalo-rachidien. Le dommage tissulaire qui s'ensuit serait la conséquence de l'infection par le spirochète mais aussi d'une réaction immunitaire de
type III : une déposition de complexes antigènes-anticorps. Le diagnostic de la forme nerveuse est basé sur la présence de concentrations d'anticorps antiB. burgdorferi dans le liquide céphalo-rachidien plus grandes que dans le sérum. Ceci implique que les anticorps ont été produits dans la thèque et que leur
présence n'est pas due une à une simple diffusion d'anticorps à partir du sérum.
Méthode de diagnostic. En clinique, on évalue les cas suspects en fonction des signes cliniques et de la
probabilité d'avoir été exposé aux morsures de tiques. On titre aussi les anticorps spécifiques par ELISA, que
l'on confirme par Western blot, moins sensible mais plus spécifique (un à 2 % des gens habitant des régions
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Pathologie de la faune 2002
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exemptes de la maladie ont des réactions faussement positives au test ELISA). La confirmation d'un diagnostic
de la maladie de Lyme reste problématique chez les humains comme chez les animaux. Les tests actuels ne
détectent pas toutes les infections et l'on note aussi de faux positifs par réaction croisée avec d'autres
organismes.
Chez les humains, le diagnostic est facile dans une région où la maladie est endémique et si la maladie
débute par des éruptions cutanées. Il est difficile dans une région où la maladie est rare et où on la croit
inexistante. Le diagnostic se complique grandement s'il n'y a pas d'éruptions cutanées (10% des cas). Les
tests de laboratoire sont alors très importants (ELISA sur le sérum pour mesurer les niveaux d'IgG antiBorrelia, c'est-à-dire les anticorps dirigés contre la bactérie). Plusieurs faux positifs sont dus à des infections
par d'autres spirochètes et aussi à des maladies auto-immunitaires, à la mononucléose (virus Herpès), à la
fièvre des Montagnes Rocheuses (Rocky Mountain spotted fever) due à une autre bactérie et à d'autres
maladies.
Chez le chien, le test ELISA n'est pas toujours fiable. Le test est négatif s'il est pratiqué au début de la maladie
parce que les niveaux d'anticorps n'augmentent que lentement pendant les 5 à 10 semaines qui suivent les
débuts des symptômes. De plus, les chiens séropositifs sont souvent asymptomatiques.
Prévention. La prévention idéale consiste à éviter les régions endémiques. Si on doit absolument aller dans
ces régions, on s'inspectera (et on inspectera son chien) régulièrement pour la présence de tiques. La tique est
petite, de la taille d'un gros grain de poivre (la femelle est de 5-10 mm de long, les nymphes peuvent être
beaucoup plus petites et peuvent passer inaperçues). On utilise une pince à épiler, on saisit la tique le plus
près possible de la peau et on tire perpendiculairement en extrayant méticuleusement les parties buccales. Il
ne faut surtout pas écraser ou perforer l'insecte. Si les symptômes de la maladie apparaissent dans les 3-4
semaines suivantes, il faut consulter un médecin et lui mentionner toute exposition possible aux tiques. On
peut soumettre les tiques pour identification, ce qui aide la surveillance épidémiologique. On met la tique dans
un tube ou petite bouteille avec une ouate mouillée et on l'expédie par courrier à :
Laboratoire de Santé Publique du Québec. 20045 chemin Sainte-Marie, Sainte-Anne de Bellevue PQ,
H9X 3R5 a/s Louise Trudel.
L'application sur la peau d'insecticides à base de DEET, le port de vêtements avec des couleurs pâles,
attacher le haut des bas sur le bas des pantalons avec du ruban gommé pour empêcher la tique de pénétrer
dans les bas, et l'usage d'insecticides sur la peau et les vêtements.
Chez le chien de compagnie, il existe des colliers et des bains contre les tiques.
Vaccin. La vaccination devrait être appliquée seulement où le risque est significatif, c'est-à-dire là où la tique
est présente en grand nombre. Chez le chien, la vaccination avec une bactérine (bactérie tuée) semble
efficace : la vaccination réduirait la prévalence de maladie cliniquement compatible avec la borreliose (1%
chez les vaccinés versus 4.7% chez les non-vaccinés) dans des régions endémiques où 40% des chiens
étaient séropositifs avant la vaccination. (Pour plus de détails sur le vaccin (Ayerst), Dre. Johanne Elsemer,
418-655-4181; 418-651-3575). Chez l'humain, le vaccin est à la base d'une protéine recombinante de la
bactérie (outer surface protein (rOspA)).
Élimination de la tique. La survie de la tique dépend de la disponibilité du cerf de Virginie. On a donc tenté
d'éliminer le cerf de Virginie dans les régions à risque. Par exemple, sur une île du Massachusetts, le nombre
de tiques a commencé à diminuer seulement quand presque tous les cerfs de Virginie ont été tués. En Sibérie,
on a employé avec succès le DDT appliqué sur de grandes régions pour contrôler une encéphalite due à des
tiques. Au Connecticut, cette approche a porté fruit, en visant les comtés à risque, mais les habitants n'aiment
évidemment pas l'épandage massif d'insecticides dans leur environnement immédiat. Le traitement saisonnier
des cerfs de Virginie serait très efficace mais on peut imaginer les problèmes. Il reste la recherche afin de
déterminer si les tiques ont des prédateurs (oiseaux, autres insectes) ou des pathogènes (virus ou très petites
bactéries) quelconques que l'on pourrait élever en laboratoire. On fait des recherches aussi sur les
phéromones synthétiques qui pourraient leurrer les tiques. Notons pour finir que la vaccination des rongeurs
sauvages n'est pas pratique étant donné la courte vie et la fécondité élevée de ces animaux.
Conclusion. L'apparition d'une nouvelle maladie aux États-Unis est la conséquence de ce que de grandes
étendues agricoles de la Nouvelle Angleterre ont été rendues à la forêt. Les cerfs de Virginie sont maintenant
aussi communs que des écureuils autour (et dans) un très grand nombre de petites villes de cette région. Les
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Pathologie de la faune 2002
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habitants de ces régions se réjouissent de cette situation. Alors ?
Note : Ixodes scapularis est aussi le vecteur de la babésiose et de l'ehrlichiose granulocytaire (rickettsie
Ehrlichia equi) chez l'humain (observée dans l'Est américain) (PNAS 93:6209-6214 (1996)). Le chevreuil ou la
souris des champs seraient le réservoir de la bactérie. L'ehrlichiose monocytaire est causée par Ehrlichia
chaffeensis, qui infecte les macrophages et les monocytes. La tique est Amblyomma americanum. Il n'y a pas
eu encore de cas au Canada.
Pour en savoir plus, voir Santé Canada: www.hc-sc.gc.ca/hpb/lcdc/publicat/ccdr/00vol26/26sup/dcc3.html
Note : Ixodes scapularis est aussi le vecteur de la babésiose et de l'ehrlichiose granulocytaire (rickettsie
Ehrlichia equi) chez l'humain (observée dans l'Est américain) (PNAS 93:6209-6214 (1996)). Le chevreuil
ou la souris des champs seraient le réservoir de la bactérie. (L'ehrlichiose monocytaire est causée par
Ehrlichia chaffeensis, qui infecte les macrophages et les monocytes. La tique est Amblyomma
americanum. Il n'y a pas eu encore de cas au Canada).
Amphibiens et maladies émergentes
Les populations d'amphibiens à travers le monde entier sont en déclin ou en voie de disparition. Ainsi, le
crapaud doré (Bufo periglenes) du Costa Rica a été déclaré en 1997 éteint peu après sa découverte. Sept
espèces d'amphibiens australiens partagent ce sort.
Jusqu'en 1997, on en connaissait très peu sur ce phénomène. Plusieurs hypothèses ont été émises :
l'augmentation du rayonnement ultraviolet (à cause de la diminution de la couche d'ozone), les pesticides et
insecticides utilisés en agriculture, la perte d'habitat, les changements climatiques et/ou les maladies. Il est
intriguant que le déclin touche aussi bien des régions qui ne sont pas touchées ou très peu touchées par les
activités humaines.
Ces dernières années, on a identifié deux causes principales de mortalité massive : la chytridiomycose et une
infection à iridovirus (ranavirus). Les deux conditions surviennent un peu partout dans le monde. Les infections
à ranavirus ne sont pas aussi clairement liées aux mortalités massives que la chytridiomycose ne l'est.
Des trématodes qui s'enkystent dans les têtards causent l'absence de membres chez l'amphibien adulte en
Amérique du Nord
Les dermatites à fongus (Basidiobolus ranarum, très semblable aux chytrides-Taylor et al JWD 35 : 58-63,
1999), à chytrides, les virémies dues à un nouvel iridovirus (Regina ranavirus) chez les salamandres de
Saskatchewan (JWD 35 : 413-429) sont des causes de mortalité dévastatrice.
Chytridiomycose
Maladie à fongus décrite en 1998 pour la première fois chez des amphibiens morts ou moribonds en Australie
et à Panama, en des endroits où des mortalités massives étaient observées. On croit que le fongus a été
introduit récemment dans ces régions.
Agent: fongi ubiquistes se développant sans hyphes et trouvés dans les habitats aquatiques, dans les sols
humides, où ils dégradent la cellulose, la chitine et la kératine. Ils peuvent infecter les plantes, les algues, les
protistes et les invertébrés. L'agent trouvé chez les amphibiens est le seul exemple d'un chytride infectant un
vertébré. L'agent n'est pas spécifique (30 espèces d'amphibiens appartenant à sept familles).
Lésions: l'épiderme se détache facilement et rarement, ulcération épidermique. Hémorragie dans la peau,
muscle, œil. Hyperhémie de la peau ventrale, et congestion des viscères. Chez le têtard, l'agent est présent
seulement dans les parties kératinisées de la bouche et ne cause pas de maladie. On pense donc que le
têtard fait office de réservoir. Le fongus peut aussi croître à l’extérieur de l'hôte pendant de courtes périodes.
La croissance est plus rapide à des températures fraîches, ce qui expliquerait pourquoi ce sont surtout les
amphibiens vivant dans des régions montagneuses qui sont touchés.
Diagnostic: identification des sporangies intracellulaires dans des foyers d'épiderme hyperplasique, dans les
couches superficielles (kératinisées).
Pathogénie: on croit que l'hyperplasie empêche la respiration normale cutanée de l'amphibien. Peut-être une
toxine fongique est-elle aussi absorbée par la peau. Ou peut-être les deux facteurs combinés.
Iridovirus
Agents: il y a cinq genres d'iridovirus. Parmi les cinq, le genre Ranavirus contient des pathogènes de
poissons, d'amphibiens, et de reptiles.
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Pathologie de la faune 2002
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Hôtes/stages de développement qui sont susceptibles: Chez les amphibiens, les têtards sont les plus
susceptibles.
Lésions: le tissu lymphoïde et hématopoïétique est nécrotique. Des infections bactériennes peuvent
compliquer le portrait clinique (on peut avoir simultanément des infections à Aeromonas hydrophila ("Red leg")
ou des ulcères cutanés dus à d'autres bactéries.
6.7 Génétique, environnement, maladies et
conservation
6.7.1 Molécules du complexe majeur d'histocompatibilité
Les molécules du complexe majeur d'histocompatibilité (MHC) forment des complexes à la surface des cellules
avec les antigènes viraux dans le but d'exhiber ceux-ci à la surface des cellules infectées. Ces complexes sont
reconnus par les lymphocytes T qui alors déclenchent la machinerie immunitaire contre la cellule infectée.
Certaines molécules du MHC ont une grande affinité pour un antigène donné alors que d'autres molécules ont
peu d'affinité. Les molécules MHC sont très diversifiées (aucun individu, homme ou animal ne possède le
même ensemble de MHC). On pense actuellement que la diversité de ces molécules assure que, à l'intérieur
d'une population donnée, au moins certains individus ont un ensemble de molécules de MHC ayant une affinité
raisonnable pour tout antigène viral. De cette façon, une population animale où les molécules de MHC sont
suffisamment variées ne peut être décimée par une épidémie virale. Cela implique que si les animaux sont
génétiquement semblables, la probabilité augmente qu'un nouveau virus ne formera pas un complexe avec les
molécules du MHC et donc, qu'il n'y aura pas réponse immunitaire contre l'agent. Si les individus sont
génétiquement identiques, la population en son entier devient vulnérable aux infections virales. Ce scénario
semble jouer dans au moins deux populations d'animaux sauvages, le puma de Floride et le guépard.
6.7.2 Guépard 3, 16, 37, 38, 48
Biologie: Il y a 37 espèces de félidés et toutes, sauf le chat domestique, sont considérées menacés ou en voie
d'extinction. Par exemple, en 1994, on estimait entre 5,000 et 7,400 le nombre de tigres appartenant aux cinq
sous-espèces restantes en nature dans le monde.
Parmi les félidés, on compte le guépardg, l'animal terrestre le plus rapide (112 km/h), et extrêmement
spécialisé. (Il a des larmiers noirs sous les yeux pour atténuer les réverbérations du soleil, comme les joueurs
de football). Il y en aurait de 9,500 à 12,000 en nature à travers le monde et ce, seulement dans le sud-est de
l'Afrique. Il n'en existe plus en Asie depuis 1951.
Compétiteurs: Le guépard est vulnérable aux changements de son environnement car il est situé presque tout
en bas de la hiérarchie de la savane. Il lui faut 1 à 3 jours pour capturer une seule proie. Quand il l'a tué, il doit
se hâter de la manger car il se la fait facilement voler par les lions, les hyènes et même par les vautours à
cause de sa légèreté, de ses crocs courts, de ses mâchoires relativement faibles. De plus, il prend une demiheure à récupérer après ses sprints.
Élevages: Les ranchers africains ont tué les lions, qui sont des compétiteurs des guépards. Ceci a permis aux
guépards de se multiplier (jusqu'à un certain point). Plusieurs espèces de gazelles ont disparu. Ces deux
facteurs font que le guépard se rabat sur le bétail. Les éleveurs tirent donc sur les guépards, qui sont
considérés comme des nuisances.
Taux de mortalité élevés: Les lions mâles tuent souvent les nouveau-nés guépards. Dans les parcs et réserves
africains, les lions sont souvent nombreux et donc la mortalité des nouveau-nés guépards augmente.
Nombre: Il y a 700 à 1,000 guépards en captivité dans le monde.
Reproduction: Des 226 guépards vivant en captivité en Amérique du Nord, seulement 26 mâles et 27 femelles
se sont reproduits au moins une fois entre 1987 et 19913. En 1971, on instaurait en Afrique du Sud un
g Le guépard est de la famille des Félidés. Il est le seul représentant du genre Acinonyx. (Le lion, le jaguar,
le léopard et le tigre sont du genre Panthera)
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Pathologie de la faune 2002
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programme de reproduction de guépards en captivité. En 1981, on notait chez les animaux une concentration
de spermatozoïde 10 fois moindre dans l`éjaculat que chez le chat domestique et 71% des spermatozoïdes
étaient anormaux (29% chez le chat). Ce taux est comparable seulement à celui des lignées de souris de
laboratoire (celles-ci sont élevées en "circuit fermé" afin d'obtenir des animaux qui sont le plus identiques
possible génétiquement).
Sur 200 isoenzymes évalués chez 55 guépards, il y a 10 à 100 fois moins de variation que chez les autres
animaux domestiques. La mortalité infantile chez les guépards est extrêmement élevée.
Génétique. L'observation la plus frappante concernant le guépard est sans nul doute le fait que tout
guépard pris au hasard peut recevoir une greffe de peau de tout autre guépard sans rejet.
La signification de cette observation est profonde: tous les guépards du monde entier sont génétiquement
identiques du moins en ce qui a trait aux molécules du complexe majeur d'histocompatibilité (MHC). Or, le
MHC classe II occupe un rôle central dans la défense antivirale. C'est la variabilité de ces molécules au sein
d'une population qui assure qu'il y a toujours au sein de cette population des individus qui sont capables de
survivre à une épidémie causée par une nouvelle souche de virus. Or, les populations de guépards gardées en
captivité ont été souvent décimées par des souches peu virulentes de virus corona causant la péritonite
infectieuse féline chez le chat domestique. L'hypothèse a été émise que c'est l'identité génétique des guépards
qui causerait cette susceptibilité élevée étant donné que tous les guépards ont théoriquement la même
susceptibilité à une souche donnée. La variation génétique rapide qui caractérise les virus à ARN s'occupe du
reste...
Le fait que tous les guépards d'Afrique et d'ailleurs sont en quelque sorte des animaux "monoclonaux" serait
dû à une diminution rapide et extrême de la population mondiale de guépards, survenue il y a 10,000 ans et
suivie de reproduction consanguine.
Dans un article plus récent, on étudiait trois populations de félins sauvages:
1)
3,000 lions des plaines de Tanzanie (une population à peu près "intacte"),
2)
100 lions isolés dans un ancien cratère de volcan, en Tanzanie, presque tous descendants d'un très petit nombre d'animaux (10
à 15 animaux, en 1962). Cette deuxième population accueille très rarement des lions immigrant de la population décrite en 1) qui
parviennent à franchir les parois du cratère.
3)
250 lions d'une population complètement isolée en Inde et dont tous les membres sont les descendants de 20 animaux ayant
survécu à la chasse excessive, au début du siècle.
Les auteurs démontraient par analyse de Southern de l'ADN génomique que le MHC classe I de la deuxième population était peu
polymorphe et que celui de la troisième population ne l'était pas du tout. De plus, les mêmes paramètres que ceux étudiés chez le
guépard étaient proportionnels à l'absence de polymorphisme. Ainsi, la variabilité des alloenzymes et le nombre de spermatozoïdes
normaux, allaient en décroissant dans les populations 1), 2) et 3) et la concentration de testostérone circulante, normale dans la première
population, était beaucoup plus faible dans les deux autres populations.
Ainsi, en plus des populations de guépards qui sont génétiquement uniformes, d'autres populations de félidés seraient maintenant aussi
génétiquement identiques et donc menacées d'être balayées par des infections virales. D'autres populations animales réduites à un petit
nombre d'individus pourraient bien souffrir des mêmes problèmes. En effet, des études récentes montrent que la population de bélugas
du Saint-Laurent est composée d'individus plus semblables génétiquement que ne le sont les individus des populations de l'Arctique
canadien.
Est-ce la fin de l'histoire? Non. Une étude montre qu'en fait les comptes de spermatozoïdes varient énormément (10 millions à 66
2
millions dans un seul éjaculat) . De plus, les guépards qui sont féconds ne sont même pas ceux qui ont les comptes de spermatozoïde
élevés. Une observation troublante est que les guépards en liberté en Afrique sont assez prolifiques et pourtant ces guépards n'ont pas
plus de variabilité génétique que les guépards en captivité. Le nombre de guépards en certaines localités africaines est même en train
d'augmenter. Par contre, là où le nombre de lions augmente, le nombre de guépards baisse. Finalement, il n'y a pas plus de mortalité
chez les guépards nés en captivité que chez les autres félidés sauvages gardés en captivité (seulement 11 anomalies congénitales sur
1500 naissances, dont 9 étaient des naissances de la même femelle ou de ses filles).
Plusieurs chercheurs pensent maintenant que ce sont en fait les conditions d'élevage dans les zoos qui sont
responsables des misères du guépard. Par exemple, les guépards sont intimidés par la présence de lions près
de leur cage/enclos. Après qu'on eut déménagé des lions plus loin, les guépards commençèrent à se
reproduire. Un autre exemple de facteur environnemental est que le guépard se reproduit en bande:
l'accouplement se fait à l'intérieur de petits groupes qui se forment très tôt dans la vie d'un individu (comme les
gorilles et les tamarins). Auparavant, on plaçait un mâle et une femelle ensemble et on espérait pour le mieux.
Dans un autre zoo, même avec des comptes de spermatozoïdes anormaux très hauts, 21 accouplements sur
23 furent couronnés de succès chez une douzaine de mâles du zoo de San Diego.
Que dit S. O'Brien? Il répond que les zoos sont très chanceux et que ces rapports, ne portant que sur un petit nombre de cas, sont
anecdotiques. D'autres chercheurs pensent maintenant que l'épidémie de PIF rapportée par O'Brien n'était pas due à la vulnérabilité des
guépards mais plutôt au fait que la population frappée, en Oregon, n'avait jamais été en contact avec le virus et qu'elle y était donc
susceptible, un peu comme les Indiens d'Amérique du Sud qui moururent massivement de la vérole quand les premiers Espagnols
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
arrivèrent sur ce continent. Très peu de guépards meurent maintenant de PIF (trois morts entre 1987 et 1991 même s'il y en a plus qui ont
été en contact avec le virus (le nombre de séropositifs a augmenté de 35 % en 1989 à 60 % en 1990). La situation semble donc
beaucoup plus complexe qu'elle ne le paraissait voilà 10 ans. Peut-être que le guépard n'a jamais montré de variabilité génétique après
tout!! Peut-être que le guépard n'est pas encore aussi mal en point que le cougouar de Floride (voir ci-dessous) mais peut-être que c'est
dans cette direction qu'il se dirige? Qu'en pensez-vous?
Maladies des guépards reliées possiblement à l'homogénéité
génétique: Les guépards captifs (aux É-U et en Afrique du Sud) souffrent souvent de maladie hépatique
veno-occlusive, de gastrite lympho-plasmocytaire (due à Helicobacter (voir maladies dus à bactéries) avec
amyloidose secondaire et de glomérulosclérose (Munson et al JZWM 30: 342-347, 1999). Il n'y a pas plus de
cancer chez les guépards (voir Cancer chez les bélugas).
6.7.3 Pumas (panthères) (couguars) de Floride. (Felis
concolor coryi).
Historique. La panthère de Floride est une des espèces animales les plus menacées au monde. C'est une
sous-espèce de puma dont l'habitat s'étendait de l'Arkansas à la Caroline du Sud et à la Floride. La perte
d'habitat et la chasse ont fait que moins de 30 individus restent et sont maintenant confinés dans une région de
5,000 milles carrés dans le Parc National des Everglades. Les animaux utilisent aussi les terres adjacentes
appartenant à des particuliers et qui sont inhabitées. Le nombre de ces propriétés diminue étant donné qu'elles
sont de plus en plus utilisées pour la construction domiciliaire et commerciale.
Comme les guépards, les animaux souffrent de consanguinité ("inbreeding"). La plupart des animaux sont
anormaux. Les vertèbres de la queue sont déformées (angle de 90o près du bout de la queue, des poils
anormaux près du dos; les mâles sont souvent cryptorchides et ont souvent un sperme anormal). Le
pourcentage de spermatozoïdes anormaux est plus élevé que chez le guépard. Les chercheurs soupçonnent
que plusieurs autres anomalies existent mais ne sont pas détectées: fécondité réduite, anomalies
congénitales, mortalité élevée chez les nouveau-nés, croissance lente, peut-être aussi les animaux sont-ils
génétiquement identiques ce qui conduirait à la susceptibilité aux infections.
On croyait que l'espèce était éteinte lorsqu'en 1973, une panthère fut trouvée et anesthésiée. En 1981, on décida d'entreprendre un
programme de réhabilitation. En 1983, une panthère mourut suite à l'anesthésie. Peu après une vétérinaire fut engagée afin de mettre sur
pied un protocole pour tranquilliser et manipuler les couguars. Le programme est maintenant sécuritaire. Pour chaque capture, il y a une
unité mobile avec l'équipement médical nécessaire: oxygène en bouteille, tubes endotrachéaux et des splints pour fractures.
Actuellement, 20 animaux portent des radio-émetteurs et sont surveillés de façon permanente. Chaque animal est régulièrement traqué
avec des chiens, anesthésié pour recevoir des vitamines et être immunisé contre les maladies affectant les félins. La vétérinaire engagée
prélève des poils, de la peau, des fèces, du sang, de la salive et du sperme pour bien surveiller l'état de santé ainsi que la génétique des
animaux.
Modélisation. On s'inquiéta aussi du futur de la population. En 1989, le US Fish and Wildlife Service passa
contrat avec l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature pour décider de la conduite à suivre. Les
chercheurs engagés entrèrent l'information disponible sur un programme d'ordinateur VORTEX fait
spécialement pour prévoir l'avenir d'une espèce menacée. Le programme donna une réponse dramatique:
sans programme de reproduction en captivité, il y avait 85% de chances que l'espèce disparaisse en 25 ans.
La moyenne calculée pour l'extinction était de 20 ans. Selon ce programme, les chances qu'une épidémie, des
changements normaux tels qu'un changement dans le rapport des sexes chez la progéniture, la transmission
aléatoire de gènes se consolident les uns les autres et créent un vortex (spirale) dans lequel la population
deviendrait sans cesse plus petite: les adultes ayant des difficultés à trouver des partenaires pour se
reproduire, la consanguinité irait en s'accentuant et la diversité génétique irait en s'appauvrissant, le cycle
s'intensifiant jusqu'à l'extinction... à moins qu'une épidémie ou un désastre naturel quelconque (feu, glissement
de terrain, tremblement de terre) raye totalement de la carte la population avant que la spirale n'aboutisse à
son résultat final.
Pour briser ce cycle, on a décidé que 130 animaux gardés en milieu naturel et/ou artificiel seront employés
pour la reproduction dès l'an 2000 et 500 dès l'an 2010. Selon VORTEX, ces buts assurent une probabilité de
95% que les félins survivront en nature pour 100 ans, et qu'ils retiendront 90 % de leur diversité génétique
actuelle. Les scientistes recueilleront et cryopréserveront le sperme des mâles.
Pendant les trois prochaines années, 50 panthères seront capturées et placées dans des zoos pour la
reproduction. Alors que quelques groupes de conservation de la nature ont appuyé ces efforts, au moins cinq
autres ont poursuivi le US Fish and Wildlife Service en justice.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Ces groupes invoquent la nécessité d'agrandir les régions sauvages et non de capturer des bêtes pour les
élever dans des milieux artificiels. Le Service décida, pour éviter les tribunaux, de ne capturer pour la première
année du programme que des chatons et aucun adulte. Après que les groupes en question eurent approuvé le
compromis, le Service captura quatre jeunes.
Mais il y a plus. Aux États-Unis, la plupart des programmes pour sauver les espèces menacées, sont sous
l'égide d'une loi fédérale, le "Endangered Species Act (p.43). La loi s'applique aux espèces et sous-espèces
"reconnues". Ces panthères, dont l'ADN a été analysé par des biologistes moléculaires, seraient en fait des
hybrides avec des couguars de l'Amérique centrale et d'Amérique du Sud. Ces couguars avaient été importés
de ces régions dans les années soixante et avaient été relâchés dans la nature, en Floride. Si les panthères ne
sont pas génétiquement "pures", devraient-elles jouir de la protection du "Endangered Species Act"? Cette loi
ne concerne pas les hybrides.
Une autre question se pose: quels animaux capturer pour le programme de reproduction, les moins hybrides
ou les plus hybrides?? D'après les analyses d'ADN et l'examen vétérinaire, les hybrides semblent moins
souffrir de l'inbreeding que les individus n'ayant pas reçu ces gènes de l'extérieur. L'analyse de l'ADN des
panthères a aussi démontré que leur diversité génétique est faible et donc que les molécules du MHC ne sont
sans doute pas diversifiées.
Le groupe de S. O'Brien a récemment démontré que 28 % des animaux ont des anticorps contre le virus de
l'immunodéficience acquise féline (FIV), un lentivirus.
6.7.4 Loups de l’Isle Royale
À l'hiver 1949, un couple de loups canadiens franchit le lac Supérieur et aboutit sur l'Île Royale (Michigan),
remplie d'orignaux. Depuis lors, cette population a été précieuse pour l'étude de l'équilibre prédateur-proie.
C'est là notamment qu'on a découvert que les loups choisissent principalement les jeunes et les vieux orignaux
comme proies et non les adultes en santé. Cet écosystème préservé a permis récemment de découvrir que
c'est la densité des loups qui détermine la croissance des plantes (top-down model) en contrôlant la densité
des orignaux (voir Isle Royale, p. 14).
La population de loups a diminué fortement depuis les années 1980. On croit que c'est à cause du virus du
distemper qui a été apporté par les bottes d'un visiteur. Encore ici, l'analyse de l'ADN des loups a révélé que
les animaux avaient la moitié de la variabilité génétique de loups normaux (ils descendraient tous de la même
femelle).
6.7.5 Baleine à bosse
Les baleines à bosse migrent plus que 10,000 km chaque année de leur habitat d'été, où elles se nourrissent,
à leur habitat d'hiver, où elles s'accouplent. La chasse a fait passer leur nombre de 125,000 à moins de 5,000,
avant que la protection internationale ne leur soit accordée en 1966. On a déterminé par analyse de l'ADN
mitochondrial que les baleines à bosse habitant les trois océans séparés par des continents ont divergé
génétiquement de 3 à 5 millions d'années auparavant. Puisqu’on peut encore discerner ces différences, on
peut dire que la diminution des stocks due à la chasse n'a pas entraîné de bottleneck comme cela a été le cas
pour le guépard (il peut y avoir eu bottleneck avant 5 millions d'années!).
6.8 Agents infectieux
6.8.1 VIRUS
Rage
Nom de la maladie. Rage, hydrophobie. La rage est une maladie infectieuse qui se traduit par l'inflammation
du cerveau (encéphalite) causée par un virus transmis le plus souvent par la morsure d'un animal infecté ou
par la contamination d'une plaie cutanée par de la salive infectieuse. Bien que ces modes de transmission
soient moins fréquents, la rage se transmet aussi par la voie orale, oculaire ou par les membranes
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Pathologie de la faune 2002
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muqueuses.
Agent causal : le virus de la rage appartient au genre Lyssavirus, et à la famille des Rhabdoviridae. Les
particules ont la forme d'une balle de fusil, ont environ 180 nm de long et 75 nm de diamètre avec un génome
constitué d'une molécule ARN à simple brin, de polarité négative, entouré par une enveloppe de
phospholipides. La protéine G est répartie sur la surface de l'enveloppe. C'est elle qui permet le
développement de la réaction immune. La rage classique est liée au Lyssavirus Sérotype 1 : elle est
responsable de la rage des mammifères terrestres et des chauves-souris insectivores et hématophages du
Nouveau-Monde. Les Sérotypes 2, 3 et 4 ont été isolés chez des chauves-souris de l'Ancien-Monde, des
musaraignes et occasionnellement dans des maladies ressemblant à la rage chez les animaux de compagnie
et chez l'homme en Europe et en Afrique.
On croyait qu'il s'agissait d'une seule entité. On s'aperçoit maintenant que le "virus de la rage" est en fait un
ensemble de variants très différents les uns des autres, et chaque variant persiste dans un hôte spécifique.
Distribution. Au Québec, il y a eu 2774 cas confirmés de rage animale de 1986 à 1996. Il y a eu 10 cas en
1999 et 21 en 2000. En octobre 2000, un enfant mourait à Montréal de rage suite à l'exposition au virus de
chauve-souris. C'était le premier cas humain depuis 1964. Voir la carte du Québec réalisée par le Dr François
Lagacé montrant les cas québécois en 2000 à www.amvspq.org
Au Canada, les problèmes de rage proviennent de la faune. Au Québec et en Ontario, les cas surviennent
chez le renard roux et la rage du raton-laveur a fait une entrée récente (47 ratons-laveurs en Ontario en 2000).
Au Canada, il y a eu moins de 25 cas chez l'homme depuis que l'on tient des registres à cet effet.
Dans les Territoires du Nord-Ouest, il y a des cas sporadiques chez les renards Arctiques et les chiens de
traîneau. On n'a pas rapporté de cas en Colombie-Britannique (Mars 1999).
En Alberta, on rapporte de rares cas. En Saskatchewan et au Manitoba, les cas sont surtout chez la moufette.
Le virus de la rage est détecté chez tous les mammifères et peut aussi affecter les oiseaux bien que ces
derniers ne jouent pas un rôle important dans l'épidémiologie de la maladie. La rage est observée sur tous les
continents sauf l'Australie et l'Océanie. Certains pays tels que le Royaume-Uni et l'Irlande en sont totalement
exempts. D'autres pays sont indemnes de la rage des animaux terrestres bien que des chauves-souris
enragées soient exemptes. Bien que la rage puisse affecter toutes les espèces de mammifère, pour une région
géographique donnée elle apparaît le plus souvent associée à une unique espèce. Cette espèce joue le rôle
de réservoir de la maladie et la transmet aux autres espèces. Le réservoir des régions arctiques est le renard
arctique (Lapone lagopus), le raton-laveur (Procyon lotor) l'est dans l'Est des États-Unis et en Ontario, les
vampires (et plus spécialement Desmodus rotundus) le sont en Amérique Centrale et du Sud et le Chien
(Canis familiaris) constitue le réservoir de l'Afrique et de certaines régions d'Asie. La souche présente au
Québec est celle liée au renard arctique.
Écologie / Épidémiologie : On croyait que la stratégie du virus de la rage - tuer l'hôte - n'est pas très bonne.
En fait, dans le cas de la rage, la mort de l'hôte n'est pas importante pour le virus.
La stratégie du virus est très efficace puisque la maladie resurgit constamment dans le monde entier et gagne
même du terrain (voir rage du raton-laveur). Après l'inoculation, le virus est presque indétectable. Il se rend
jusqu'au système nerveux central, où il altère le comportement de l'animal pour assurer sa transmission. Le
virus s'assure aussi que l'hôte infecté excrète une grande quantité de virus bien avant qu'il ne meure.
Les variants persistant au sein des différentes espèces ne s'adaptent pas facilement à d'autres espèces.
Attention ! Ceci ne signifie pas qu'ils ne peuvent pas infecter - et tuer - des animaux appartenant à d'autres
espèces ou l'humain; ceci signifie simplement qu'ils ne persistent pas au sein de populations animales d'autres
espèces. Par exemple, les variants des renards arctiques ne s'établissent pas au sein des populations de
ratons-laveurs, et vice-versa. Ou encore, les variants des chauves-souris ne s'établissent pas dans les
populations de ratons-laveurs ou de renards (mais peuvent occasionnellement infecter et tuer des ratonslaveurs ou des renards).
La relation qui existe entre le virus rabique et les espèces réservoir est liée à la variabilité génétique du virus.
Ainsi, un raton-laveur qui a la rage mordra surtout d'autres ratons-laveurs. Ceux-ci mordront d'autres ratonslaveurs qui en mordront d'autres. Ainsi, la période d'incubation du nouveau variant sera idéale pour permettre
au raton-laveur infecté de mordre d'autres ratons-laveurs avant que ce raton-laveur infecté ne meure.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Cette adaptation permet sans doute au virus de persister au sein d'une population animale donnée explique
ainsi la plus grande "efficacité" de l'infection virale chez l'espèce à laquelle elle est adaptée. Par exemple, pour
induire la maladie il faut administrer moins de virus de la souche du renard arctique à cette espèce qu'à une
autre espèce. De plus, l'infection qui en résulte se développe plus rapidement et la concentration de virus au
niveau de la salive est plus importante chez le renard arctique que chez les autres espèces. Ces variations
dans le virus peuvent expliquer les différences de sensibilité à l'infection que l'on observe chez certaines
espèces de mammifères.
Les variants de virus rabique sont identifiés par l'analyse moléculaire de leur homogénéité génétique ou par la
comparaison des variations mineures de l'antigène G que l'on peut détecter par des anticorps monoclonaux.
Six génotypes sont maintenant identifiés en Amérique du Nord (Emerging infectious diseases 4:429-435,
1998).
Le génotype du renard arctique affecte le renard arctique et le renard roux (Vulpes vulpes) des régions
arctiques et sub-arctiques. Au milieu des années 1950, l'aire de distribution de ce variant s'est étendue et il est
devenu endémique chez les renards roux de l'Ontario. A partir de ce nouveau foyer d'endémie, le virus se
propage régulièrement dans les régions adjacentes (Québec, Nouvelle Angleterre, New York).
Périodiquement, ce variant atteint Terre-Neuve à partir du Labrador lorsque l'océan est pris par la glace.
À part la rage des chauves-souris, le Québec connaît pour l'instant un seul variant rabique : c'est celui du
renard arctique qui, dans la vallée du Saint-Laurent, affecte le renard roux.
Le génotype du raton-laveur
Historique: apparu dans les années 1950 en Floride. Le raton-laveur s'est révélé très sensible à une variante.
Cette variante s'est étendue dans les régions voisines de la Géorgie, de l'Alabama et en Caroline du Sud. La
progression s'est longtemps heurtée à la barrière naturelle de la chaîne des Appalaches. Mais à la fin des
années 1970, des associations de trappeurs ont capturé des ratons-laveurs (probablement en phase
d'incubation) pour les transporter en Virginie (Voir Translocation). À cause de ces trappeurs, ce variant s'est
largement répandu et représente maintenant un danger majeur pour la santé publique en milieu urbain comme
en milieu rural. Il est observé presque partout en Virginie, Pennsylvanie, Delaware, Maryland, New York
(1990), Connecticut, Massachusetts. Le front rabique s'est déplacé vers le Nord et vers l'Ouest à travers l’État
de New York à la vitesse de 50 km par an depuis 1990 et se trouve à présent au Vermont, à 25 km de la
frontière du Québec (septembre 1999). Les deux premiers cas de rage du raton-laveur au Canada étaient
signalés dans l'Est de l'Ontario en juillet 1999.
Ontario: Le 14 juillet 1999, le premier cas de rage causé par une variante du virus associée aux ratons laveurs a été diagnostiqué chez
un raton laveur de l'autre coté du fleuve Saint-Laurent, en face d'Ogdensburg dans l'État de New York, dans un village au nord-ouest de
Prescott en Ontario. Un deuxième cas a été identifié le 26 juillet, 9 miles à l'ouest du premier cas. Un troisième cas a été diagnostiqué le
17 septembre à environ 9 miles au nord des 2 autres cas. Le ministère des Richesses naturelles de l'Ontario dirige des programmes de
capture-vaccination-relâche depuis un certain nombre d'années aux principaux passages de la frontière dans les régions du fleuve SaintLaurent et de Niagara afin de créer des zones défensives de ratons laveurs vaccinés en vue de minimiser la propagation de l'épizootie de
la rage. Ces premiers cas ont été décelés hors de la zone de vaccination. Un total de 880 ratons laveurs, 220 mouffettes rayées et un
renard roux capturés dans un rayon de 3 miles des deux premiers cas ont eu un résultat négatif à la réaction d'immunofluorescence
visant à déceler la rage (ministère des Richesses naturelles de l'Ontario, données non publiées, 2000). Dans un rayon d'environ 3 miles
autour du point de contrôle, les ratons laveurs et les mouffettes ont été capturés dans des pièges permettant de capturer l'animal vivant,
le vacciner avec un vaccin inactivé puis le relâcher. Les ratons laveurs atteints de la rage ont probablement traversé le Saint-Laurent par
le pont international entre Ogdensburg-Johnstown dans l'État de New York et Prescott en Ontario ou
près de ce pont.
Source: Morbidity and Mortality Weekly Report, 49(02): 2508, 21 janvier 2000
Importance: Le danger avec le raton-laveur est que son habitat, contrairement à celui du renard, chevauche
celui de l'homme (villes, aires de picnic et campings). De plus, le raton-laveur est un animal curieux qui n'a pas
très peur de l'humain naturellement.
Le Québec a décidé de se doter d'un Comité interministériel auquel participent :
- Ministère de la Santé,
- Ministère de l'environnement et de la Faune,
- Agriculture Canada,
- Agriculture Québec,
- FMV (Dr. Bélanger).
Différents scénarios ont été évalués par le Comité interministériel sur la rage en fonction de leur coût et de
leurs résultats attendus :
1 - Laisser l'épidémie arriver (et donc s'installer) en informant largement le public des risques de la rage.
Au Maryland, bien que la rage du raton-laveur soit présente depuis 13 ans et bien que de nombreux
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
traitements humains suite à des expositions aient été nécessaires, on ne note encore aucun décès
du cette maladie.
2 - Vacciner (cette intervention a été retenue en 1999). Vaccination par appâts (vaccin recombinant)
sous la forme d'une bande en avant du front de rage.
Dans le Nord-Est des Etats-Unis, le coût lié à la rage était de 4 $ par an et par personne avant qu'elle n'apparaisse et de près de 10 $ à
compter du moment où elle est devenue endémique. Le coût d'une prophylaxie post-exposition est de 400 $ par enfant et de 500 $ par
adulte. En Europe, la rage du renard est bien maîtrisée par la dispersion de vaccins recombinants dans l'environnement. En Ontario, la
dispersion de vaccins modifiés a permis de contrôler l'épidémie.
La biologie du raton-laveur rend la vaccination par appâts plus aléatoire : ne serait-ce que par son
comportement alimentaire, le raton risque de détruire la capsule contenant le vaccin au lieu de l'avaler. Il faut
donc déterminer le pourcentage de ratons protégés après la dispersion de tels appâts. Il faut aussi savoir si ce
pourcentage est suffisant pour enrayer la progression du front. (Les renards et les ratons-laveurs n'ont pas les
mêmes goûts. Pour un vaccin oral placé dans des appâts, il faut donc mettre au point un appât utilisable à la
fois sur le renard et sur le raton-laveur. C'est ce qu'on est en train de mettre au point en Ontario avec des
appâts contenant des émetteurs radio (une combinaison sucre-vanille fonctionne bien). (En Ontario, on largue
des appâts contenant du vaccin pour le renard roux à partir d'avion). (JWD 34:647-652 (1998).
Une étude en laboratoire a montré que le vaccin recombinant administré par voie orale protège 78 % des
raton-laveurs mais que seulement 43 % des animaux développent des anticorps neutralisants. De plus, la
méthode de marquage des animaux vaccinés (tétracycline) est peu fiable. Il est donc assez difficile, dans une
zone de vaccination orale, de connaître le réel statut d'un animal quant à sa protection contre la rage.
La vaccination par les appâts recombinés nécessite :
- des études pour déterminer le statut sérologique avant la vaccination,
- un plan de vaccination (dans l'espace et dans le temps),
- un plan de communication détaillé.
Un vaccin a été largué en Estrie en septembre 1999 par voie aérienne pour arrêter la progression de la rage
du raton-laveur à partir de l'État du Vermont et de l'Ontario.
Le génotype de la mouffette
Deux génotypes infectent les moufettes, le premier au centre méridional des États-Unis à l'Ouest du
Mississippi et le second dans les zones situées au Nord du Midwest et dans la région des grandes plaines
(variant nord de la mouflette). Ce dernier variant s'est répandu au Manitoba et au Saskatchewan au cours des
décades passées et il est contenu aux frontières Sud et Est de l'Alberta par un programme de surveillance. La
variant nordique de la Mouffette est aussi observé en Californie, sans doute suite au transport d'animaux en
incubation et la rage du renard gris (Urocyon cinereoargentus) au Texas est aussi causée par ce génotype. La
rage du chien et du coyote (Canis latrans) observées au Texas est issue d'une invasion à partir du Mexique et
elle est aussi due à un virus proche de celui du variant nord de la mouffette.
Le cinquième génotype est uniquement observé chez le renard gris dans le Sud-Est de l'Arizona.
Génotype de la chauve-souris: En général, l'infection provoque de faibles mortalités chez les populations de
chauves-souris sauvages, et on note de forts taux de séropositivité au sein de ces populations. Il est donc
probable que les chauves-souris développent une réaction immunitaire qui les protège de la maladie.
Il existe au moins 6 variants distincts de virus des chauves-souris insectivores, chacun de ces variants étant
associé à une espèce particulière. Bien que quelques cas de rage associés à ces variants soient
occasionnellement rapportés chez des espèces autres que les chauves-souris, les variants des chauves-souris
ne s'établissent pas de façon endémique dans les populations d'animaux terrestres. Ainsi, bien que la rage des
chauves-souris existe en Colombie Britannique et qu'un cas de rage lié à un variant chauve-souris ait été
reporté chez un cheval de cette province, la rage terrestre n'y sévit pas de façon endémique.
En Amérique du Nord, la rage se maintient de façon endémique chez la grande chauve-souris brune
(Eptesicus fuscus), la chauve-souris cendrée (Lasiurus cinereus), la chauve-souris rousse (Lasiurus borealis),
la chauve-souris mexicaine à queue libre (Choeronycteris mexicana) et peut-être chez la chauve-souris
argentée (Lasionycteris noctivagans) et la chauve-souris jaune de Floride (Lasionycteris intermedius). Chez les
autres espèces de chauves-souris et plus spécialement chez Myotis spp., la rage résulte d'une transmission
incidentelle à partir des espèces chez lesquelles elle est endémique.
La grande chauve-souris brune est l'espèce chez laquelle l'infection est la plus souvent retrouvée dans l'Ouest
du Canada et en Ontario. La chauve-souris cendrée et la chauve-souris argentée sont respectivement les
seconde et troisième espèces les plus fréquemment infectées. Dans toutes les régions, les autres espèces de
chauves-souris y compris la petite chauve-souris brune (Myotis lucifugus) sont rarement rabiques. Les
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
chauves-souris rabiques sont rares dans les Provinces Maritimes. Des 5 derniers cas de rage humaine
diagnostiqués au Canada, 3 étaient liés aux chauves-souris (Saskatchewan 1970, Nouvelle Écosse 1978,
Alberta 1985).
Au Colorado, en 1999, on a déterminé que 30 % des chauves-souris qui mordent les humains ont la rage. Cependant, aucune des
personnes mordues n'a contracté la rage (elles ont presque toutes eu le traitement prophylaxique post-exposition). La plupart du temps,
les circonstances d'une morsure sont une chauve-souris qui se dépose sur quelqu'un. Les chauves-souris qui ont des interactions avec
les humains ont en général de plus fortes chances d'être enragées.
Québec: le 20 octobre 2000. Cas de rage humaine : Québec. Le 27 septembre 2000, un enfant de 9 ans
a été admis dans un centre hospitalier de Montréal avec un syndrome rapidement évolutif compatible avec la
rage. Le diagnostic a été confirmé par un test d'immunofluorescence directe sur une biopsie cutanée et par un
test d'amplification génique
(RT/PCR) du virus de la rage sur des spécimens biologiques. Le décès est survenu le 6 octobre 2000 après
une détérioration de l'état neurologique. La caractérisation moléculaire de l'acide nucléique a permis
d'associer le virus avec une variante de la chauve-souris argentée. Trois semaines et demie avant le début
des symptômes, l'enfant et sa famille avaient séjourné dans un chalet d'une réserve faunique de la région des
Laurentides située à l'ouest de la province. Une chauve-souris trouvée par terre dans la salle de bain et qui
semblait montrer une certaine difficulté à voler fut retirée du chalet. Il n'y a pas eu de contact noté avec
l'enfant atteint. L'exposition la plus probable, survenue sans doute durant le sommeil de l'enfant, semble avoir
été une éraflure ou morsure au bras qui est passée
inaperçue à ce moment. La prophylaxie postexposition contre la rage a été offerte aux autres membres de la
famille qui avaient aussi séjourné au chalet, à un nombre limité de travailleurs de la santé qui avaient eu un
contact significatif avec la salive du patient et aux compagnons de jeux ou de classe de l'enfant atteint chez
qui on n'a pu exclure un contact de la salive avec une muqueuse ou une plaie.
Sources: Hôpital Sainte-Justine, Hôpital Maisonneuve-Rosemont, Unité Maladies infectieuses de la
Direction de la santé publique de Montréal-Centre, ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec.
Les derniers cas de rage animale au Québec (mai et juillet 1995) concernaient un bovin (Sainte-Hélène,
souche renard) et une chauve-souris d'espèce non précisée (Drummondville).
Amérique du Sud (Chili), les chauves-souris sont le principal réservoir de rage en milieu urbain (c'était le
chien, il n'y a pas bien longtemps). Dans le nord-est du Brésil, les marmousets gardés comme "pets" sont
responsables de quelques "incidents" mortels.
Pathogénie: le virus inoculé dans les tissus pénètre dans les nerfs périphériques et il est transporté de façon
centripète à la moelle épinière et au cerveau. Dans le cerveau, le virus se réplique et passe d'un neurone à
l'autre, infectant de nombreuses zones du cerveau et déclenchant une encéphalite. Le comportement anormal
est dû à l'effet de l'infection des neurones. Après avoir infecté les neurones, les virus sortent du cerveau
(migration centrifuge) par les axones des neurones infectés. Ils se disséminent par voie nerveuse (et non pas
par voie vasculaire) dans l'ensemble de l'organisme. Bien que disséminés dans de nombreux organes, c'est
dans les glandes salivaires que le virus se concentre le plus, se réplique et est excrété par la salive. Le virus
est généralement présent dans la salive au moment où les signes cliniques apparaissent.
Signes cliniques : La rage doit être suspectée chez tout animal sauvage présentant un comportement
anormal. Il faut particulièrement surveiller : perte de l'instinct de fuite, animal s'approchant des humains,
excitation, agression, observation diurne d'espèces nocturnes, dépression, incoordination, ataxie, paralysie,
convulsions, crampes, vocalisation anormale, incapacité ou difficulté à avaler, ptyalisme. Tout carnivore ayant
attaqué des porcs-épics est suspect de rage.
Chez l'homme, les signes comportent une phase prodromique d'anxiété avec parfois une sensation anormale
au site de pénétration du virus rabique. Par la suite, des signes non spécifiques tels que de la dépression, du
vertige, des maux de tête, peuvent survenir dans les premiers temps de la phase clinique. Ils sont suivis par de
l'excitabilité, de la raideur du cou, de l'hyper-réflexivité, de l'hydrophobie, des spasmes, de la paralysie et,
finalement, la mort survient suite à l’œdème cérébral ou suite aux complications de pneumonie par aspiration.
La rage clinique est toujours fatale.
Diagnostic : chez les animaux, la rage est diagnostiquée par la mise en évidence du virus dans les cellules
nerveuses par immunofluorescence (IF). Le laboratoire a besoin de l'encéphale pour établir le diagnostic : il est
donc important que l'animal suspect de rage ne soit pas sacrifié par une balle dans la tête.
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Pathologie de la faune 2002
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Si l'IF est négative et s'il y a eu contact humain, des broyats d'encéphale de l'animal suspect sont inoculés à
des cultures de neuroblastome de souris et on recherche de nouveau la présence de virus rabique par la
technique d'IF sur la culture cellulaire. Ce test est plus sensible que l'IF seule. Tous les diagnostics de rage au
Canada sont effectués par les laboratoires d'Agriculture Canada. Les encéphales d'animaux infectés par la
rage peuvent aussi être examinés à l'histologie. Cependant, les corps de Negri, des corps d'inclusion que l'on
retrouve dans les neurones infectés par le virus rabique, ne sont pas toujours présents chez les animaux
rabiques.
Prévention et contrôle. Quatre principes de base régissent la prévention de la rage :
1Vacciner les espèces domestiques qui pourraient être en contact avec des populations de virus rabique.
2Éviter tout contact avec des animaux potentiellement affectés.
3Si l'activité professionnelle conduit à exposition possible, la vaccination doit être entreprise.
4En cas d'exposition présumée, laver immédiatement la plaie ou la zone contaminée à l'aide d'eau et de
savon, désinfecter à l'aide d'un ammonium quaternaire ou d'alcool à 40 - 70 % et soigner la plaie
comme il convient. Consulter le plus tôt possible un médecin. Dans la mesure du possible, sacrifier
l'animal suspect et soumettre le cas pour diagnostic. Si le risque le justifie, le traitement comporte
l'infusion de la plaie avec de l'anti-globuline et une vaccination doit être entreprise.
Il ne faut jamais ramasser une chauve-souris morte, essayer d'enlever une chauve-souris de la gueule
d'un animal domestique.
Le contrôle de la rage dans les populations animales sauvages est basé sur la vaccination d'une proportion
suffisante des populations réservoirs afin de bloquer les épidémies et de prévenir le développement de foyers
d'endémie. On procède par la dépose (manuelle ou par voie aérienne) d'appâts.
Pour les petites populations ceci peut être réalisé par la capture, la vaccination et le relâché des animaux.
C'est le cas, par exemple, des populations de ratons-laveurs dans la région de Niagara. Pour les plus grandes
contenant un vaccin vivant modifié (renard roux en Europe, Ontario) ou recombinant pour la protéine G
(ratons-laveurs dans le Nord-Est des USA et au Canada).
Références :
Baer GM (Ed.). The natural history of rabies, 2nd Edition. CRC Press, Boca raton, Florida, 1991, 620 pp.
Beran GW. Rabies and nfecions by rabies-related viruses. In : Beran GW (ed.) Handbook of zoonoses, 2nd Edition. Section B : Viral. CRC
Press, Boca Raton, Florida, 1994, pp 307-357.
Brass DA. Rabies in bats : natural history and health implications. Livia Press, Ridgefield, Connecticut, 1994, 335 pp.
Krebs JW, TW Strine, JS Smith et al. Rabies surveillance in the United States during 1993. Journal of the American Veterinary Medical
Association 1994, 205, 1695-1709.
Pybus MJ. Rabies in insectivorous bats in western Canada. Journal of Wildlife Diseases 1986, 22, 307-313.
Rosatte RC. Bat rabies in Canada : history, epidemiology and clinical signs. Canadian Veterinary Journal 1987, 28, 754-756.
Table H, AH Corner, WA Webster et CA Casey. History and epizootiology of rabies in Canada. Canadian Veterinary Journal 1974, 15,
271-281.
Bluetongue
Agent: Virus à génome ARN segmenté (génome réparti en chromosomes comme le virus de l'influenza, ce
qui permet beaucoup de variation génétique). Genre Orbivirus.
Distribution: Cette maladie est considérée exotique au Canada. Il y a eu quelques épisodes dans une petite
région de Colombie-Britannique. La dernière épidémie remonte à 1987, en Colombie-Britannique (voir Maladie
hémorragique du cerf) alors qu'il y avait beaucoup de moucherons à cause de l'été particulièrement chaud. La
maladie n'est pas restée.
Sources: Les bovins domestiques constituent le réservoir principal. Ils ne sont pas malades mais des morts
fœtales et des malformations peuvent survenir. Les bovins assurent la survie du virus en hiver parce que celuici ne survit pas dans le moustique pendant la saison froide. Les wapitis sont comme les bovins: ils sont peu
affectés et peuvent donc jouer le rôle de réservoir.
Par contraste, les moutons, les chèvres, et les ongulés sauvages (chevreuils) sont très affectés. Les moutons
développent des érosions / ulcères et de l'œdème des muqueuses orales, et la cyanose de la langue (d'où le
nom de la maladie), des hémorragies diffuses.
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Pathologie de la faune 2002
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Signes cliniques: Cette maladie offre plusieurs ressemblances avec la maladie hémorragique épizootique du
cerf. (Attention, les deux maladies ressemblent à la maladie hémorragique à adénovirus, qui, pour le moment,
est localisée en Californie). Chez les ruminants sauvages, comme chez le mouton, on note des hémorragies
diffuses, de l’œdème et l'érosion de l'épithélium oral.
Le bluetongue peut causer des mortalités chez toutes les espèces d'ongulés sauvages en Amérique du Nord à
l'exception du wapiti.h (La maladie prend beaucoup de temps à se développer chez le wapiti. Chez les autres
ongulés sauvages, il y a de la mortalité, des avortements et des anomalies congénitales, comme chez le
mouton.
Diagnostic: Tous les ruminants (sauvages et domestiques) doivent être séronégatifs pour le Bluetongue
losrqu'importés au Canada. À une occasion, le test n'avait pas détecté des wapitis avant leur introduction. Les
anticorps furent détectés lors de tests subséquents et le troupeau fut détruit.
(Les tests sérologiques donnent une réaction croisée avec la maladie hémorragique épizootique parce que les
deux orbivirus en cause se ressemblent).
Pathogénie: La réplication virale prend place dans les cellules endothéliales. Le mécanisme principal de la
pathogénie est la coagulation intra-vasculaire disséminée induite par des changements dégénératifs et la
nécrose de l'endothélium. Le cerf de Virginie, un hôte très susceptible, montre des hémorragies dans tous les
organes et tissus. L’œdème est proéminent dans les poumons, les cavités abdominales et thoraciques et les
tissus conjonctifs. Des érosion de la muqueuse orale et digestive sont quelquefois présentes. La mortalité
survient surtout chez le cerf de Virginie mais survient aussi chez le cerf mulet et l'antilope d'Amérique (antilope
pronghorn). Le caribou et le wapiti ne sont pas susceptibles.
Maladie hémorragique épizootique du cerf (Hemorrhagic disease)
Agent: Virus à génome ARN segmenté. Genre Orbivirus. Cette maladie du cerf de Virginie est causée par un
orbivirus dont l'apparence au microscope électronique est semblable à celle du virus du Bluetongue. Les deux
virus diffèrent antigéniquement. (noter: une nouvelle maladie hémorragique du chevreuil a été décrite en Californie en 1993. Elle
est due à un adénovirus. Ne pas confondre avec la maladie hémorragique épizootique du chevreuil).
Situation au Canada La maladie est actuellement considérée exotique au Canada. Il y a eu trois épisodes au
Canada: en 1962 en Alberta, en 1987 dans la vallée de l'Okanagan et en Saskatchewan en 1988.
Situation aux États-Unis: La maladie est très répandue dans le Sud-Est et le Centre Est des États-Unis où il
y a des épidémies chaque année, à la fin de l'été et au début de l'automne.
Transmission: La maladie ne se transmet pas directement entre chevreuils infectés. Les insectes du genre
Culicoides sont nécessaires à la transmission. Les épisodes qui se produisent dans l'Ouest canadien et en
Colombie-Britannique sont dus à des moustiques apportés par le vent qui souffle de l'État de Washington,
quand les conditions météorologiques sont favorables. Le virus se réplique dans l'insecte pendant 2 à 3 jours.
Ce type de transmission explique la prévalence saisonnière (fin de l'été, début automne). D'abord à cause du
grand nombre d'insectes puis, à cause de la densité élevée de chevreuils. En effet, le cerf se concentre le long
des sources d'eau à la fin de l'été. Des épidémies sont susceptibles de survenir quand les populations
d'insectes et de chevreuils sont denses en même temps.
Pathogénie : La maladie est semblable au Bluetongue. La réplication virale prend place dans les cellules
endothéliales. Le mécanisme principal de la pathogénie est la coagulation intra-vasculaire disséminée induite
par des changements dégénératifs et la nécrose de l'endothélium. Le cerf de Virginie, un hôte très susceptible,
montre des hémorragies dans tous les organes et tissus. L’œdème est proéminent dans les poumons, les
cavités abdominales et thoraciques et les tissus conjonctifs. Des érosions de la muqueuse orale et digestive
sont quelquefois présentes.
Espèces susceptibles: La mortalité survient surtout chez le cerf de Virginie mais survient aussi chez le cerf
mulet et l'antilope d'Amérique (antilope pronghorn). Le caribou et le wapiti ne sont pas susceptibles. Les
h
Une épizootie a tué 3,200 antilocapres nord-américaines au Wyoming en Septembre Octobre 1976. Une
autre épizootie éclata en 1984 dans le même état tuant au moins 300 antilopes.
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Pathologie de la faune 2002
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espèces domestiques ne sont pas affectées, bien que la vache puisse développer des signes cliniques légers
semblables à ceux du Bluetongue.
Chez le cerf affecté, la maladie est aiguë à suraiguë. et la mort survient en quelques jours. Les populations de
cerfs de Virginie où les moustiques sont constamment présents (sud des États-Unis) acquièrent l'immunité.
Dans nos régions, où les moustiques apparaissent de façon saisonnière, les populations de cerfs de Virginie
perdent leur immunité entre les épidémies et celles-ci sont plus graves.
Par exemple, dans le Dakota du Nord, au Michigan et dans le New Jersey, des épizooties éclatent à intervalles
très irréguliers. Les populations de ces régions n'ont pas d'anticorps. Au Nebraska et dans le Dakota du Sud,
la maladie apparaît chaque année sous forme de petites épizooties. Une grande proportion des cerfs de ces
régions a des anticorps. Le Texas n'a jamais connu d'épizooties et tous les cerfs ont des anticorps.
Distemper
(voir Distemper des mammifères marins).
Espèces susceptibles Tous les canidés, tous les mustélidés (visons, moufettes, etc.), les ratons laveurs et
certaines espèces de phoques sont susceptibles au distemper canin.
Transmission: La transmission est habituellement par inhalation, c'est-à-dire par les gouttelettes aérosols des
yeux infectés, des cavités nasales, de la salive. Les animaux infectés peuvent produire des virus pendant
plusieurs semaines. Le virus ne survit pas longtemps dans l'environnement. Le mécanisme par lequel le virus
persiste dans la faune n'est pas connu.. Cependant, dans la plupart des situations, il semble que la maladie
persiste sous forme enzootique (peu d'animaux malades à la fois
Distribution: Québec: Une grave épidémie de distemper, rapportée par le Dr. A. Laperle du laboratoire
MAPAQ de l'Assomption a tué beaucoup de ratons-laveurs de l’Île de Montréal ces dernières années.
Des épizooties ont été rapportées chez le renard (gris et roux) et chez le raton-laveur dans certaines régions
des États-Unis et de l'Ontario.
Des épizooties sévères ont frappé les chiens de traîneaux dans l'Arctique. Les chiens mouraient en 24 heures.
Les plus récents épisodes auraient été causés par une augmentation du nombre des chiens de traîneau
(augmentation de la fréquence de contact) et possiblement par l'augmentation coïncidente de la population de
renards arctiques.
Prévention: En 1999, Merial a produit un vaccin recombinant (dans un vecteur Pox de canari) et donc
probablement inoffensif pour toutes les espèces de la faune.
Arbovirus (voir West Nile Virus)
West Nile Virus
Encéphalite équine de l'Ouest
Encéphalite équine de l'Est
Encéphalite de St Louis
Virus de Powassan
Snowshoe Hare Virus
Jamestown Canyon virus
Colorado Tick fever virus
Encéphalite équine de l'Ouest
-
-
Cycle: entre les passereaux et les moustiques
Distribution: du lac Supérieur à la Colombie Britannique.
Virulence: Une épidémie a frappé les provinces des Prairies en 1941 lors de laquelle 1094 personnes
furent malades. En 1937-38, 52,500 chevaux furent malades et 15,000 sont morts. La plupart des
humains infectés développent une maladie bénigne ou pas du maladie du tout. Les enfants sont les
plus touchés.
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Pathologie de la faune 2002
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Encéphalite équine de l'Est
-
-
Cycle: entre les moustiques et les oiseaux.
Distribution: Est et sud-est américain. Détecté en ON et QU.
Virulence: élevée. Le plus pathogène des arbovirus nord-américains. 33 % des personnes
développant une encéphalite meurent. Mais seulement 153 cas diagnostiqués aux Etats-Unis dans les
35 dernières années. Mortalité épidémique chez les chevaux. Cause de maladie grave chez les
oiseaux, surtout les grues.
Encéphalite de Saint Louis
Nommée d'après Saint Louis, Missouri
- Cycle: entre les moustiques et les oiseaux.
- Distribution: a causé maladie au MB (un cas en 1975), ON (66 cas en 1975) et QU (un cas dans les
années 70). Largement distrbuée aux Etats-Unis, Mexique, et l'Amérique centrale et du Sud. Est et
sud-est américain. Détecté en ON et QU.
- Virulence: Modérée. Moins de 1 % des personnes infectées développent une maladie et quand la
maladie se développe, 5 à 30 % des patients meurent. Les gens âgés courent le plus de risque de
développer une maladie grave.
Virus de Powassan
Reconnu pour la première fois à Powassan en Ontario en 1958 comme cause d' encéphalite fatale chez un
enfant.
- Cycle: entre les tiques et les mammifères sauvages (rongeurs).
- Distribution: presque partout au Canada.
-
Virulence: modérée. La maladie est rare mais 10 % des personnes malades meurent.
Snowshoe Hare Virus
Cycle: entre les moustiques et les mammifères sauvages.
Distribution: partout au Canada.
Virulence: faible. La maladie est bénigne et a été rapportée en ON, Qu, NB et NÉ. Cas de maladie non fatale
chez le cheval en SK et ON.
Jamestown Canyon virus
-
-
Agent: Virus très semblable au Snowshoe hare virusSubject: Membre du groupe des virus de
l'encéphalite de Californie ((Bunyavirus, Bunyaviridae). Transmis par les moustiques du genre
Aedes.Augmentation du nombre de cas chez les humains à cause des populations de cerfs dans le
Nord Ouest américain. (JVD 12:80-83 (2000))
Cycle: Cycle entre les moustiques et les cerfs de Virginie).
Distribution: partout au Canada. Un cas humain en ON et dans les TNO.
Virulence: modérée. De 12 cas humains signalés en 1981 au Canada, un patient est mort.
Colorado Tick fever virus
Virus très semblable au Snowshoe hare virus
- Cycle: entre les tiques, rongeurs et lagomorphes.
- Distribution: montagnes de l'Ouest et à des altitudes de 1,200 à 3,000 m. AB et CB. Rapporté chez 8
espèces de tiques, le plus important: Dermacentor andersoni.
- Virulence: faible. Aucune épidémie rapportée mais apparaît régulièrment chez les gens en contact
avec les tiques. Seulement 0.2 % des gens malades meurent.
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Pathologie de la faune 2002
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Parvovirus
Les ratons laveurs sont très susceptibles au parvovirus du vison et au parvovirus félin.
Pseudorage
Agent. Herpèsvirus porcin
Le porc est le seul hôte important pour le maintien du virus de la pseudorage. Le virus Herpès affecte le
système nerveux. Le virus n'a pas été rapporté au Canada. À peu près tous les animaux sont susceptibles à
l'infection.
Le virus de la pseudorage est très infectieux pour le porc mais l'infection ne se manifeste pas cliniquement
habituellement, sauf chez les porcelets chez qui elle est fatale. Les porcs excrètent le virus en grandes
quantités dans leurs sécrétions nasopharyngiennes et rarement dans l'urine et les fèces pendant les 2
semaines qui suivent l'exposition.
Du point de vue du virus, tous les autres hôtes sont des culs de sac, vu qu'ils meurent de l'infection. Dans les
régions où la maladie est endémique, elle cause de la mortalité chez les animaux sauvages, tels que les
ratons-laveurs qui voisinent avec des élevages de porc. Les ratons-laveurs et les bovins sont modérément
résistants à l'infection et les moutons ont une faible résistance. Quand la maladie survient, elle est
habituellement rapidement fatale chez la plupart des hôtes et le virus est excrété en petite quantité dans les
écoulements oraux peu avant la mort. La plupart des cas survenant chez les animaux sauvages sont observés
lors d'épidémies porcines. Les animaux sauvages peuvent alors servir de source d'infection à court terme.
Les animaux affectés montrent une méningoencéphalomyélite non suppurée et une ganglionévrite. Les
amygdales peuvent être nécrotiques et le foie et la rate peuvent montrer de la nécrose multifocale.
Fièvre catarrhale maligne
Maladie des bovins, chevreuils et bisons due à un virus Herpès (gamma). Très importante dans les élevages
de chevreuils partout dans le monde: Nouvelle-Zélande, Australie, Royaume-Uni et à un degré moindre au
Canada. Ces épisodes sont toujours attribués au mouton. Le stress rend les cerfs encore plus susceptibles.
Agents
Il y a deux formes de maladie: la forme qui survient en Amérique du Nord est causée par un virus herpès de
mouton (Herpès virus ovin 2 ou OHV-2). Cette forme peut devenir un problème majeur dans certains élevages
de cerfs au Canada (et au Québec).
Les deux formes de la maladie sont caractérisées par une vasculite généralisée, d'origine immunitaire affectant
les bovins et les cervidés et due à des virus Herpès. Elle affecte les artérioles et veinules ainsi que les
vaisseaux de calibre intermédiaire. On ignore le mode de transmission. Le virus est associé avec les
lymphocytes.
Forme Africaine
Forme enzootique : infection asymptomatique chez le gnou (porteur) en Afrique et dans nos zoos.
Agent: virus herpès associé avec des gnous (appelé virus herpès alcéphalin (genre Rhadinovirus genus,
sous-famille Gammaherpesvirinae, anciennement virus Herpès bovin de type. Il survient chez les bovins qui
voisinent avec des gnous (wildebeest ou Connochaetes taurins). Le virus est probablement présent chez les
antilopes dans les zoos (canadiens et autres).
Épidémiologie : Le virus peut être isolé des sécrétions nasales des jeunes gnous étant donné que la
réplication virale a lieu dans les cornets nasaux et dans la cornée. La transmission des gnous aux bovins
survient lors de la saison de reproduction des gnous. À ce moment, la mère et son veau montrent de la virémie
mais le virus n'est pas pathogénique pour cette espèce. L'infection du bovin représente un cul de sac étant
donné que le bovin (infecté et malade) n'excrète pas le virus.
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Pathologie de la faune 2002
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Forme des moutons
C'est la forme existant en Amérique du Nord (Canada) et dans plusieurs autres pays.
Agent: un virus Herpès (Herpès virus ovin 2 ou OHV-2) différent de celui qui cause la forme africaine bien que
l'agent n'ait pas été isolé. Les moutons (asymptomatiques) seraient les porteurs de la maladie et au point de
vue épidémiologie, seraient le pendant du gnou. Le bovin serait ici aussi un cul de sac mais pas les cervidés
qui excrètent le virus.
En Amérique du Nord, la maladie a été rapportée chez les cerfs de Virginie captifs et les bisons captifs. Les
manifestations cliniques sont variées mais on observe dans la plupart des cas de l'anorexie et de
l'hyperthermie sévères:
1)
La forme suraiguë est la plus fréquente chez le cerf du Père David, le cerf de Virginie et le cerf Sika. Elle
se caractérise par une gastro-entérite hémorragique avec hyperthermie marquée.
2)
La forme céphalique montre un jetage oculaire et nasal séreux à purulent, des ulcérations cutanées et
buccales et de l'opacité cornéenne bilatérale, une hypertrophie des nœuds lymphatiques. Cette forme
évolue pendant deux semaines. Elle est la plus fréquente chez les cerfs rouges et les bovins. C'est
aussi la manifestation la plus commune de la forme africaine.
3)
La forme digestive est caractérisée par de la diarrhée de la fièvre, des lésions cutanées et une
lymphadénopathie.
4)
La forme atténuée est surtout expérimentale. Elle se résout par la guérison. Récemment des cas étaient
rapportés au Québec (voir Bienvenu et al.). Les cerfs atteints étaient gardés avec des mouflons.
Chez le bison, on rapporte une cystite hémorragique et des ulcères du tractus digestif (JVDI 12:497 (2000)).
Lésions microscopiques: vasculite généralisée lympho-histiocytaire (accumulation de lymphocytes autour
des vaisseaux avec destruction de ceux-ci).
La pathogénie de la maladie implique l'hypersensibilité de type IV. Plus récemment on a émis l'hypothèse
qu'une dysfonction des lymphocytes NK serait en cause. Les deux mécanismes mènent de toute façon à une
prolifération anarchique de cellules T et à la stimulation d'une cytotoxicité anormale centrée sur les vaisseaux
sanguins et les tissus épithéliaux.
Diagnostic: 1) test immunosorbent lié à un enzyme, basé sur la compétition et l'inhibition (CI-ELISA). 2) PCR .
Prévention: pas de vaccination (en 1999). Garder les moutons (ou chèvres ou mouflons) éloignés des cerfs
(ou des bovins). (difficile pour les petits zoos et/ou les '"pet zoos").
Herpèsvirus bovin 1 (IBR)
Agent: Plusieurs virus parents du virus de l'IBR affectent les herbivores sauvages: le virus herpès cervin
(CHV-1) décrit chez le cerf rouge européen et le virus herpès rangiférin (RHV-1) décrit chez le renne
européen. Le virus herpès de l'IBR, BHV-1, est répandu chez les bovins. Les anticorps aux virus herpès ont
été détectés chez quelques espèces de ruminants sauvages canadiens. Dans le passé, on a cru que ces
anticorps résultaient de l'infection par le BHV-1. On sait maintenant qu'il s'agit probablement de réactions
croisées.
Par exemple, les cerfs de Virginie de l'Île d'Anticosti ont une forte prévalence d'anticorps contre le virus Herpès
bovin 1 (BHV-1, (IBR)). Ce virus cause expérimentalement une forme légère de IBR chez le cerf mulet. Chez
le renne, le daim et le cerf rouge, l'infection est silencieuse mais les animaux infectés excrètent le virus quand
ils sont immunodéficients. Les caribous ont aussi des anticorps (Québec). Une forte mortalité survenue chez
les cerfs de Virginie de l'Île d'Anticosti en 1985 aurait été due à une infection par ce virus40. Les femelles
gestantes étaient souvent atteintes, ce qui a fait suggérer à certains chercheurs que l’œstrus facilite la
transmission du virus en favorisant le contact entre les individus.
On connaît l'Herpèsvirus cervin (CHV-1),décrit chez le cerf rouge européen et le herpesvirus 1 rangiférin
(RHV-1) qui infecte les rennes européens.
Distribution: le BHV-1 est omniprésent chez le bovin dans le monde.
Transmission: la transmission survient directement ou par aérosol entre animaux infectés et susceptibles. Le
BHV-1 se transmet aussi par transmission vénérienne. Avec les Herpèsvirus, un thème fréquent est la
présence d'animaux porteurs (infectés, non symptomatiques).
Susceptibilité: Les wapitis et les cerfs-mulets sont susceptibles au CHV-1, le caribou au RHV-1.
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BVD-MD
Agent: genre pestivirus. Famille Flaviviridae.
Hôtes susceptibles: Le virus du BVD a été isolé chez les plusieurs cervidés. Une souche cytopathique a
été isolée à partir d'une girafe et de cervidés (roe deer) (Capreolus capreolus) (JWD 34:47-55 (1998). La
maladie a été diagnostiquée occasionnellement en Amérique du Nord chez des ruminants sauvages et
des anticorps ont été détectés (29). Le virus infecte expérimentalement le wapiti, il excrète le virus mais il
ne devient pas malade. On pense présentement que les cervidés qui ont des anticorps ont acquis
l'infection à partir de troupeaux de bovins (JWD 36(3): 584-587 (2000)).
Parainfluenza-3
Aucune pneumonie n'a été rapportée suite à l'infection par ce virus. Par contre, parainfluenza-3 a été isolé
d'écouvillons nasaux de cerfs de Virginie traités aux corticostéroïdes. Des anticorps ont été détectés chez les
cerfs de Virginie de l'Île d'Anticosti. On a suggéré que les hivers longs et la neige abondante qui caractérisent
le climat de l’Île représentent des facteurs stressants qui favoriseraient l'excrétion du virus chez les cerfs de
Virginie infectés de façon persistante. De plus la surpopulation de cerfs de Virginie a raréfié les buissons à
feuilles caduques, une nourriture importante pour le cerf. Le virus a été aussi isolé chez le mouflon et le bison.
Maladie hémorragique du lapin
Agent: calicivirus originaire de Chine, premiers cas rapportés en 1984 en Chine (mais probablement importé
en Chine bien avant, par l'arrivée de lapins importés d'Europe).
Hôtes: seulement le lapin européen (Oryctlagus cuniculus), l'espèce à laquelle appartiennent tous les lapins
commerciaux et les lapins de compagnie en Amérique du Nord. Le lièvre n'est pas susceptible.
Lésions: nécrose et hémorragie au foie, intestin, tissu lymphoïde. Les lapins meurent 6 à 24 heures après le
développement de la fièvre.
Distribution : Depuis 1984, la maladie a fortement affecté les populations de lapins sauvages en Asie,
Amérique et Europe. (Ex.: en Espagne, les populations de lapins sauvages ont diminué de 55 à 75 %).
Signalée en Amérique du Nord pour la première fois au Mexique en 1988, puis aux États-Unis en mars 2000
(virus semblable au virus européen, différent du virus néo-zélandais).
On avait introduit le virus volontairement en Australie et en Nouvelle-Zélande (voir Contrôle des pestes par les
virus).
Transmission: la transmission est fécale-orale à peu près partout sauf en Australie et Nouvelle-Zélande où
elle se fait par les insectes. Europe: les renards et les chiens jouent probablement un rôle important. Les fèces
de chiens non affectés par le virus (mais rendus porteurs parce qu'ils ont ingéré du lapin infecté) peuvent
infecter des lapins. Les renards développent des anticorps après s'être infectés en ingérant du lapin infecté (ce
qui signifie que le virus se réplique dans le renard au moins pendant une courte période).
Lésions prolifératives à Pox
Ecthyma contagieux.
Cette maladie est causée par un virus Pox appartenant au même genre que la stomatite papulaire bovine et au
pseudocowpox. C'est une zoonose. C'est typiquement une maladie du mouton domestique, de la chèvre et du
mouflon mais elle a été aussi rapportée chez les chèvres de montagne et le cerf de Virginie. L'ecthyma du cerf
de Virginie est survenu seulement en Nouvelle-Zélande. Les lésions sont surtout sur les gencives, la langue,
les pieds et le pis.
Fibromatose du lapin
Agent: virus du fibrome de Shope qui appartient au même genre (Leporipox virus) que la myxomatose.
Transmission. Comme cette dernière, le virus est probablement transmis par des arthropodes (maringouins,
puces) bien que les vecteurs naturels soient inconnus.
Hôtes. Le lapin à queue blanche (cotton tail rabbit, Sylvilagus floridanus) est l'hôte naturel du virus. Le lièvre
(Lepus americanus) et le lapin domestique européen (Oryctolagus cuniculus) sont susceptibles à l'infection
expérimentale alors que le lapin de Nuttall (Sylvilagus nuttallii) et le lièvre européen (Lepus europaeus) sont
110
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
réfractaires.
Lésions. Les lésions causées par le fibrome de Shope peuvent persister pendant des mois mais régressent
éventuellement. Les lésions sont d'abord inflammatoires mais deviennent prolifératives plus tard.
Fibromatose de l'écureuil.
Elle est causée par un virus appartenant au même genre que la myxomatose et la fibromatose du lapin
(Leporipox virus). Les tumeurs, des fibromes, ont été rapportées chez les écureuils gris et les marmottes.
Septembre 1999: Dr André Dallaire : un cas sévère à la FMV.
Tumeurs induites par les papovavirus
Fibromes et fibropapillomes des ongulés.
Les fibromes sont décrits chez les cerfs de Virginie, les cerfs mulets, les orignaux, wapitis, caribous et
antilopes d'Amérique (anciennement antilocapre nord-américaine). Ce sont les néoplasmes cutanés les plus
fréquents chez les cervidés. La prévalence chez le cerf de Virginie est d'environ 1%. Les fibromes chez les
cerfs surviennent le plus souvent chez les animaux âgés de moins de deux ans. Les papovavirus ont été
identifiés par microscopie électronique chez quelques-unes de ces espèces. Chaque espèce semble avoir son
papovavirus spécifique. Les tumeurs ne semblent pas affecter les animaux et elles semblent disparaître après
quelques mois. Les animaux qui guérissent ont des anticorps contre le virus et sont résistants à la réinfection.
Papillomatose orale des carnivores
Décrite chez les coyotes et les loups. Causée par un papovavirus observé à la microscopie électronique.
L'effet dépend de la sévérité des lésions. Celles-ci peuvent interférer avec la préhension de la nourriture. Les
papillomes de la peau n'ont pas été rapportés chez les carnivores sauvages terrestres. Chez le chien, les
papillomes oraux affectent les jeunes chiens (1 an). Les chiens adultes développent des papillomes oraux
mais sont généralement résistants à la papillomatose orale. Le papillomavirus causant la papillomatose orale
chez le chien ne réplique que dans la muqueuse orale et la muqueuse du pharynx. Ce virus est donc
probablement distinct du virus causant la papillomatose cutanée.
Lentivirus
Agent: famille retroviridae
Récemment, plus de 90 % de lions africains et asiatiques sauvages ont été trouvés séropositifs au virus félin
de l'immunodéficience, un rétrovirus proche du VIH15. L'infection se transmet horizontalement (surtout). Les
souches virales des différentes populations de lions sont très diverses génétiquement. Il ne semble pas y
avoir de maladie associée à ces infections et, par conséquent, ces nouveaux virus représenteraient un autre
exemple d'une relation lentivirus-hôte où l'hôte s'est accommodé au virus, contrairement à la relation entre le
VIH et son hôte, l'homme, mais comme la relation entre les virus VIS (Simian immunodeficiency virus) et leur
hôte, les primates non humains.
6.8.2 BACTÉRIES
Anthrax (Maladie à déclaration obligatoire)
Agent: Bacillus anthracis, bactérie Gram positive produisant des spores (très résistants) lorsqu'elle est
exposée à l'air (lorsque la carcasse d'un animal affecté est ouverte).
Historique : Cette maladie provient probablement d'Afrique et du Moyen-Orient. Elle aurait été apportée en
Amérique du Nord par les Européens.
Distribution:
Etats-Unis: la maladie est plus fréquente dans le sud de la vallée du Mississippi mais elle a été rapportée
dans tous les États.
Canada: le premier cas diagnostiqué dans la faune au Canada est survenu chez les bisons dans les
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Territoires du Nord Ouest en 1962. Environ 1100 bisons sont morts d'anthrax dans le Parc National de Buffalo
entre 1962 et 1968 et 34 autres pendant l'été de 1991. Pour réduire l'impact de l'anthrax sur la population de
bisons, un programme de vaccination impliquant la capture des animaux a débuté en 1965 et a été appliqué
de façon intermittente depuis. Ce programme a pris fin en 1977 à cause des effets adverses de la capture sur
la population et à cause de l'impossibilité de vacciner au moins 80% de la population chaque année.
Afrique: sur ce continent, la maladie cause chaque année des mortalités chez les bovins et les
humains. http://news.bbc.co.uk/hi/english/world/africa/newsid_1073000/1073566.stm
Espèces susceptibles : La maladie affecte surtout les ongulés (bovins, ovins, caprins bisons et chevreuils)
mais aussi le porc et le chien (plus résistants).
Épidémiologie : L'épidémiologie de la condition n'est pas encore comprise. La survie des spores est le facteur
le plus important et elle est déterminée par des conditions climatiques et écologiques. Bacillus anthracis se
retrouve dans les sols ayant un pH neutre ou étant alcalins (pH 6.0 à 8.5) et généralement dans les régions
connaissant des inondations et des sécheresses en alternance. La forme végétative de la bactérie est fragile
alors que le spore est très résistant. La sporulation survient après l'exposition à l'air. Les spores sont très
difficiles à détruire et c'est leur formation qu'il faut empêcher en enterrant les carcasses et en évitant d'ouvrir
les carcasses soupçonnées de contenir la bactérie.
En général, dans les sols secs, il y a moins de bactéries "normales". Il y a donc moins de compétition pour
B. anthracis et les spores persistent alors des années alors qu'au contraire, elles disparaissent en quelques
mois dans des conditions où les bactéries habitant normalement le sol sont plus nombreuses.
Les herbivores s'infecteraient en ingérant du sol ou de l'eau contaminés. Des arguments s'élèvent contre
cette hypothèse cependant: des doses élevées de spores doivent être administrées per os pour produire la
maladie et il est très difficile de cultiver l'organisme de sites présumément très contaminés.
Une autre hypothèse est que la maladie se comporterait comme certaines maladies à Clostridium,
c'est à-dire que les herbivores seraient porteurs des spores pour quelque temps dans les nœuds lymphatiques
rétro-pharyngiens. Ils développeraient la maladie plus tard, lorsqu'ils sont soumis à un stress.
Les taons pourraient transmettre la maladie aux animaux ou à l'homme à partir d'une carcasse
infectée. Les animaux qui se nourrissent en nature de charogne (goélands et vautours africains) sont
résistants à l'anthrax. Les spores passent à travers le tube digestif de ces animaux qui contribuent ainsi à les
répandre.
Méthodes de diagnostic : Les animaux qui meurent de la forme aiguë présentent un exsudat hémorragique
aux orifices et le sang n'est pas coagulé. Si jamais la carcasse est ouverte (ce qu'il faut impérativement éviter),
on observe de l’œdème sous-cutané (particulièrement au niveau du cou) et la rate est fortement augmentée de
volume, de couleur sombre et de consistance semi-fluide.
Si l'on suspecte une mort par anthrax, l'autopsie ne doit pas être pratiquée. On doit avertir Agriculture Canada
(au Canada). Il faut effectuer une prise de sang à partir d'un vaisseau sanguin de la carcasse sans l'ouvrir et
soumettre cet échantillon au laboratoire.
Prévention, traitement et contrôle : Chez les bovins exposés, la vaccination arrête les mortalités en 8 jours,
généralement.
Si la carcasse est laissée telle quelle et donc sans formation de spores, la décomposition se chargera
de détruire les formes végétatives de B. anthracis (le plus souvent en moins de 48 heures).
Par contre, si la carcasse est ouverte, les formes végétatives sporuleront et contamineront
l'environnement pendant des années. La carcasse non ouverte doit être entièrement brûlée sur place ou
profondément enterrée et recouverte par de la chaux vive. Si la carcasse est ouverte par inadvertance, un
prélèvement de sang doit être effectué pour confirmation du diagnostic et la carcasse doit être immédiatement
brûlée. Il est indispensable de protéger les personnes travaillant à la destruction des carcasses par l'emploi de
gants et de masques respiratoires. Les habits contaminés doivent être brûlés car il est presque impossible de
détruire la spore par les désinfectants.
Les personnes travaillant sur des cas d'anthrax confirmés peuvent être vaccinées. Tout signe clinique
et toute fatigue suivant une exposition potentielle à B. anthracis doivent être immédiatement portés à la
connaissance du médecin traitant. L'infection répond bien à l'antibiothérapie si elle est instituée en début de
maladie.
L'anthrax est une maladie à déclaration obligatoire. Agriculture Canada doit être informé de chaque cas de
112
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
sorte à s'assurer de la destruction des carcasses et à pouvoir instaurer une prophylaxie.
Anthrax et terrorisme: aux Etats-Unis le dernier cas humain d'anthrax contracté par inhalation remontait à
1976 et seulement 18 cas avaient été rapportés au cours du 20ième siècle. La plupart de ces cas étaient dus à
l'exposition aux produits animaux, principalement dans les moulins de textile et les tanneries où on traitait le
poil et les peaux de chèvre ou la laine. En 1979, à Sverlovsk, en ex-Union Soviétique, il y eut un relâchement
(accidentel ?) d'anthrax à partir d'un laboratoire militaire en pleine ville. Cet épidoe a constitué le plus important
épisode d'anthrax par inhalation du 20ième siècle.
Références :
Broughton, E. Anthrax in Wood Buffalo National Park. Can Vet J, 1992, 33, 134-135.
MacDonald, DW, SR Rawluk and VPJ Gannon. Anthrax in cattle. Can Vet J, 1992, 33, 135.
Helicobacter
Des bactéries dont l'aspect ultrastructural est compatible avec celui de Helicobacter ont été visualisées dans
l'estomac de quelques lions avec gastrite. (JWD 34: 317-324 (1998))
Maladie de Lyme (Borreliose)
Voir Maladies émergentes
Brucellose
La brucellose est une zoonose importante et affecte les organes reproducteurs et les articulations d'une
grande variété de mammifères domestiques et sauvages, entraînant surtout l'avortement, des mort-nés et la
mortinatalité.
Agent : Les espèces de Brucella se groupent en deux catégories de base selon la séquence du gène omp2.
Espèces classiques: B. abortus biovars 1 et 5., B melitensis and B. suis.
Espèces non -classiques: B. ovis, B. canis et B. neotomae.
Deux espèces de Brucella affectent la faune d'Amérique du Nord, Brucella suis type 4 et Brucella
abortus. Brucella suis biovar 1,2, et 3 ne sont pas présents au Canada.
Le gène omp2 existe en deux copies. Omp2a , la seconde copie n'est jamais exprimée. Les mutations y sont donc fréquentes et c'est
pour cela qu'on l'utilise pour différencier les isolats). La bactérie croît lentement et donc le diagnostic définitif par la culture prend du
temps.
Distribution : La brucellose des animaux de ferme est officiellement éradiquée du Canada. Elle persiste
(officiellement) seulement chez les bisons du Parc de Wood Buffalo, en Alberta et les wapitis de l'Arctique
canadiens. L'infection des ongulés sauvages par Brucella abortus est préoccupante pour le Canada et les
États-Unis puisque les deux pays visent l'éradication de cette maladie (le Canada a été déclaré exempt de
cette maladie en 1985) 44,45.
Le bison (Bison bison) du Parc National de Wood Buffalo, Alberta. La contamination de la population de bisons résulte d'une erreur
(humaine) faite en 1920 alors qu'on importa 6,673 bisons des plaines (B bison bison) infectés du Sud de la Saskatchewan dans ce Parc
(au Nord de la province). Ces bisons s'accouplèrent avec les 1,500 bisons des bois (B bison athabascae) indigènes au Parc. Cette
population pose maintenant de graves problèmes parce que :
1)
on élève maintenant des bovins tout près du Parc
2)
trois populations saines de bisons des bois récemment introduites dans le Parc s'y développent maintenant et elles sont
menacées de contamination. Les coyotes et les loups pourraient bien amplifier la transmission de la maladie en mangeant les
carcasses infectées, en avortant et en libérant de grands nombres de bactéries dans l'environnement.
Un Comité a été mis sur pied en 1989 pour déterminer la conduite à suivre face à ce problème. Parmi les options envisagées étaient les
suivantes: construire une double clôture autour du Parc (1,160 km de longueur), l'élimination complète du troupeau du Parc suivie par le
remplacement complet des bisons du Parc par les bisons des bois exempts de ces maladies. Le rapport final (1990) recommanda cette
dernière option. Cependant, quelques groupes environnementaux et aborigènes s'y opposèrent. Le Gouvernement canadien considère
maintenant une autre approche, tester les animaux et abattre les positifs.
(chez le cerf de Virginie, un seul cas a été documenté).
Brucella suis type 4 est distribuée autour de l'Arctique chez le caribou et l'orignal au Canada, en Alaska et en
113
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Russie. La maladie est maintenant très répandue parmi les troupeaux de caribous canadiens, chez le bœuf
musqué et les orignaux, dans les mêmes régions partagées avec les troupeaux de caribous.
En Russie, la brucellose existe depuis longtemps chez le renne domestique et le renne sauvage. Elle peut avoir été introduite en A. du N.
quand des rennes ont été transportés de Sibérie en Alaska en 1891. En 1970, la séroprévalence parmi les caribous nord-américains était
de 4 % à 9% chez les rennes dans le delta du Mackenzie. Une étude plus récente (1982-1984) basée sur un nombre plus petit de
caribous de la terre de Baffin révélait une séroprévalence de 35 %. La séroprévalence est aussi élevée chez les prédateurs habitant les
mêmes régions que les troupeaux infectés (loups, chiens, renards, ours). Des cas sporadiques ont été rapportés chez des
Inuits dans les Territoires du Nord-Ouest et en Alaska.
!
Mammifères marins : Brucella est fréquente chez les mammifères marins de l'héhisphère nord, y compris
au Canada, dans l'Arctique (JWD 36(3):595-598 (2000)). Les mammifères marins ont leurs propres
souches de Brucella.
Les morses, bélugas, pour en nommer quelques-uns ont été trouvés séropositifs mais ceci signifie seulement
que les animaux ont été exposés à l'agent avant le test, pas nécessairement qu'ils sont infectés au moment du
test. Plusieurs espèces de pinnipèdes et cétacés canadiens avaient des titres sérologiques positifs (1.9 % des
phoques à annelés, 4.8 % des morses, 6.5 % des narvals, 4.2 % des bélugas échantillonnés dans l'Arctique
canadien entre 1984 et 1997 (Olie Nielsen, DFO, Winnipeg). En 1995, la Brucella responsable pour ces
réactions positives était isolée des ganglions lymphatiques de phoques annelés (et seulement de cette
espèce). Chez le phoque commun, 13 % des échantillons sont positifs.
Les tests sérologiques existant pour la vache et le porc n'ont pas été validés chez les mammifères marins.
En 1999, on rapportait des avortements à Brucella chez deux dauphins (Tursiops truncatus) de la marine
américaine (Miller et al JZWM, 30:100-110, 1999). L'étiologie était confirmée par la culture des bactéries,
l'analyse génétique des bactéries (gène omp2) par PCR et la présence de la bactérie dans des lésions de
placentite. La sérologie était négative. Le profil biochimique de la bactérie ne concordait pas avec celui des
biotypes connus de Brucella. On a appelé le nouvel isolat Brucella delphini. Parce que la bactérie est présente
en grande quantité dans le placenta, comme chez la vache, parce qu'il arrive que les dauphins ingèrent le
placenta (comme chez les bovins), que les femelles allaitent souvent les jeunes d'autres femelles, pour toutes
ces raisons, on pense que la maladie se transmet fréquemment chez les dauphins en nature. Récemment,
deux bélugas du Saint-Laurent étaient séropositifs. On ignore la signification de ce résultat pour le moment.
L'ours polaire a des anticorps et cet animal s'infecterait en ingérant des phoques infectés (Sous presse Tryland
M, JWD 2001)
Signes cliniques: Les lésions sont centrées sur le tractus génital et les articulations.
Les manifestations les plus fréquentes de brucellose chez le caribou sont l'avortement (avec rétention
placentaire), la bursite/arthrite (souvent des articulations carpiennes) et l'orchite.
Lésions: La lésion la plus fréquente de brucellose chez les ongulés sauvages est l'arthrite et elle aussi affaiblit
gravement les animaux qui ne peuvent se nourrir convenablement.
Dans les cas d'avortement chez le dauphin, il y a une placentite suppurative et le placenta affecté contient une
grande quantité de bactéries.
Transmission: Aux États-Unis, les ongulés semblent ne pas être importants dans l'épidémiologie de la
brucellose bovine. Des études sérologiques ont révélé que le cerf de Virginie, le cerf mulet et l'antilope
d'Amérique ne réagissent que rarement, même dans les régions endémiques, suggérant ainsi que ces
espèces ne sont pas importantes dans l'épidémiologie de l'infection. Des résultats semblables ont été obtenus
avec l'orignal. Cette espèce représenterait un cul-de-sac dans l'infection puisque les animaux malades
meurent de la maladie à cause de la sévérité des lésions.
Des études sérologiques du wapiti ont montré une prévalence élevée seulement chez les populations
avoisinant des troupeaux de bison ou de bovins suggérant que les bovins transmettent la maladie au bison ou
au wapiti et non l'inverse. Cependant, la brucellose semble être un problème dans les troupeaux de wapitis
dans le nord-ouest du Wyoming. La brucellose est présente dans les troupeaux de bisons sauvages du parc
de Yellowstone et elle est un problème dans les troupeaux appartenant à des particuliers.
Contrôle: historiquement, le contrôle s'effectue par l'abattage des animaux infectés. On a vu avec les bisons
que cette approche est difficile dans certains cas. On a réussi récemment à produire des veaux non infectés à
partir de sperme de bison infecté, par fertilisation in vitro avec des ovules de femelles superovulées non-
114
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
infectées (JWD 34:582-289 (1998)).
Tuberculose
La tuberculose est une zoonose bactérienne due à des bactéries du genre Mycobacterium. Mycobacterium
bovis est le bacille des ruminants. On croyait que quand M. bovis était retrouvée chez des ongulés sauvages,
elle était toujours due à une infection transmise par le bétail. On sait depuis 1994 que la bactérie infecte le
chevreuil en nature (Michigan).
Agent étiologique: M. tuberculosis est le bacille de l'homme, M. avium est le bacille des oiseaux (les deux
dernières espèces peuvent aussi infecter les ruminants). M. avium cause une maladie beaucoup moins grave
et qui peut guérir spontanément, sauf chez les patients sidatiques ou les patients immunodéprimés. Le tiers de
l'humanité est infecté par M. tuberculosis, que ce soit dans les pays développés ou dans le tiers monde, mais
seulement une personne sur 10 qui sont infectées va développer la maladie durant sa vie. Dans les pays
développés, ce sont les personnes âgées qui sont le plus affectées.
M. bovis est l'agent causal de la tuberculose bovine et infecte plusieurs espèces domestiques et sauvages.
Cette bactérie qui croît lentement (2-6 semaines) et uniquement sur des milieux de culture spécifiques. Ce
sont des bacilles alcoolo-acido-résistants mis en évidence sur les coupes histologiques par la coloration de
Ziehl-Neelsen.
On croit que l'homme a acquis le bacille (M. bovis) à partir des bovins sauvages quand il a commencé à les
domestiquer, il y a des dizaines de milliers d'années. Puis M. bovis a subi plusieurs changements génétiques
pour devenir M. tuberculosis.
Distribution
Animaux domestiques: il s'agit d'une maladie distribuée mondialement mais en diminution ou en voie
d'éradication du moins chez les animaux domestiques dans certains pays (comme le Canada).
Aux Etats-Unis, le traité de libre échange commercial avec le Mexique a fait augmenter les cas de M. bovis
chez les bovins domestiques à cause de l'importation de bovins infectés par M. bovis. Des restrictions ont du
être établies en ce qui a trait à l'importation de bovins mexicains (Perumaalla et al J. Clin Microbiol 34:2066 (1996)).
Noter aussi un autre facteur qui à n'aide pas les américains, à tout le moins…: les lois américaines (fédérale et
état du Texas entre autres) interdisent la dépopulation de troupeaux de bovins de plus de 500 têtes pour ne
pas ruiner le producteur et pour … des considérations fiscales (!!).
Animaux sauvages: La plupart des cas de tuberculose de la faune sont dus à des animaux domestiques
infectés qui transmettent le bacille aux animaux sauvages. Il y a des exceptions: en Nouvelle-Zélande, Angleterre et
Irlande, la faune peut servir de réservoir d'infection pour les ruminants domestiques. Les carnivores seraient relativement résistants à la
tuberculose: on peut isoler assez souvent le tubercule à partir de loups et de coyotes qui n'ont aucune lésion (Voir "Production animale
industrielle" dans "Maladies émergentes").
En 1993, on trouvait un chevreuil (Odocoileus virginianus) infecté de tuberculose en nature au Montana. Un
élevage de wapitis de la région était probablement la source de cette infection. On pensait donc toujours que la
maladie n'existait pas seule chez le chevreuil sauvage. D'où la surprise que l'on eut quand on trouva en 1994
M. bovis chez un chevreuil sauvage au Michigan, puis chez un autre. (Il n'y avait eu qu'un cas semblable aux
É-U…en 1934). Le deuxième cas de 1994 a entraîné une enquête qui aboutit à la constatation faite en 1995
que la tuberculose était endémique chez les chevreuils sauvages dans le nord-est du Michigan.
C'était la première fois qu'on découvrait un réservoir de tuberculose aux États-Unis chez la faune et la
première fois qu'on découvrait une épidémie de tuberculose chez des chevreuils.
Actuellement, au Michigan, on trouve le bacille (M. bovis) chez 1.7 % des chevreuils abattus en nature (n=
8,800). (JWD 35: 450-457, 1999).
Récemment, on a cultivé la bactérie à partir de ganglions de coyotes de cette région (ils n'avaient pas de
lésion). Les coyotes s'infecteraient en ingérant du chevreuil infecté (JWD: 34 632-636 (1998). L'enzootie de M.
bovis chez les chevreuils sauvages au Michigan est probablement due à des circonstances exceptionnelles:
• dans les années 1950, M. bovis a infecté un très grand nombre de bovins au Michigan
• la population de chevreuils a crû de façon incontrôlée (dans certaines régions du Michigan, 19 à 23
chevreuils au km carré, i.e. plus qu'à Anticosti. Voir: Anticosti).
Les chevreuils sauvages y sont souvent nourris par des particuliers pour maintenir les chevreuils au même
endroit pour la chasse. Cette pratique a pour effet d'empêcher les migrations normales et entraîne des
contacts fréquents entre ces animaux pendant l'hiver, ce qui facilite la transmission de M. bovis par aérosol et
115
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
peut-être aussi par ingestion (M. bovis est présent dans l'urine et les fèces des chevreuils infectés).
Récemment on a établi que la bactérie passe aussi de chevreuil à chevreuil (Palmer et al AJVR 62:692 (2001).
Douze troupeaux de bovins laitiers ont été trouvés avec la maladie au Michigan après le diagnostic chez les
chevreuils. On a établi par l'analyse de l'ADN de la bactérie qu'il s'agissait du même isolat chez les bovins et
les chevreuils et donc que les bovins avaient contracté la bactérie des chevreuils. Il est regrettable qu'au
Canada, l'Agence canadienne d'inspection des aliments ne fasse pas encore d'analyse de l'ADN pour
déterminer (ou étayer) la provenance des nouveaux cas.
En Angleterre et en Irlande, les blaireaux jouent ce rôle avec les bovins. Réciproquement, les animaux
domestiques peuvent servir de source de contamination pour les animaux sauvages (bovins domestiques pour
les ongulés des Alpes, les cerfs de Virginie en Amérique du Nord).
Au Canada, chez les animaux sauvages en liberté, la tuberculose se limite (officiellement) exclusivement à
la population hybride de Bisons du Parc National Wood Buffalo, à la frontière entre l'Alberta et les Territoires
du Nord-Ouest. Le bison est la seule espèce affectée dans ce parc. Des loups ont été trouvés infectés par M.
bovis dans le Parc national de Riding Mountain, au Manitoba en 1982. Ils avaient des granulomes intestinaux
qui ont probablement causé leur mort. Remarquer qu'il n'y a pas eu d'étude au Canada sur le nombre
d'ongulés sauvages porteurs (mais si on se fie aux résultats du Michigan…).
Les ruminants sauvages (wapitis, cerfs de Virginie, cerfs rouges) gardés en captivité (en élevage ou dans les
zoos) sont à risque et peuvent servir de source d'infection pour les humains, animaux domestiques et
sauvages. Ainsi, au Québec, en 1996, un troupeau de wapitis en captivité a été détruit par Agriculture Canada
(l'éleveur songe à poursuivre le gouvernement). Avant cet épisode, des cerfs élaphes (wapitis) avaient été
positifs en Alberta et en Saskatchewan, 1990; Fanning et Edwards, 1991). Ces wapitis provenaient des
États-Unis.
Il semble donc que la prévalence pourrait être beaucoup plus élevée chez les ongulés sauvages que ce que
l'on croyait. Ceci est très important car chez la faune, la maladie représente une source possible de
contamination des animaux domestiques dans des pays dits "exempts" de tuberculose, comme le Canada et
les É-U. (Noter que le mot "exempt", qui revient souvent dans les règlements gouvernementaux, implique
toujours "chez les animaux domestiques").
En Nouvelle-Zélande, l'élevage du wapiti est extensif et ces élevages, souvent infectés, constituent une source
potentielle d'infection pour les bovins. Les animaux en captivité qui sont positifs acquièrent la tuberculose des
humains ou étaient déjà infectés lors de la capture. On ne peut pas exclure que ces animaux s'infectent à partir
de chevreuils ou à l'état sauvage.
Les personnes ayant le SIDA sont atteintes fréquemment par M. tuberculosis dans les stages précoces de la
maladie, moins fréquemment par M. bovis. Dans les stades avancés de la maladie, les sidatiques (50%) sont
affectés couramment par M. avium. Ces personnes peuvent alors communiquer la maladie, surtout M. bovis,
au bétail et aux animaux sauvages captifs (dans les zoos ou dans les élevages).
Transmission: Un animal malade peut excréter des bacilles par voie respiratoire, digestive, oculaire,
mammaire ou génito-urinaire sans présenter de signes cliniques.
La maladie est transmise par voie respiratoire (aérosols) ou par voie digestive (salive infectée dans les
aliments, l'eau). Le bacille résiste plus de 6 mois à l'extérieur, s'il est protégé des rayons du soleil. Dans le sol
ou dans la litière, il pourrait survivre plus de 4 ans. Donner des suppléments aux chevreuils en hiver peut avoir
causé la forte prévalence au Michigan en augmentant artificiellement la densité de la population de chevreuils
et en favorisant la transmission (nez à nez).
Pathogénie chez les ruminants : Le bacille tuberculeux est phagocyté par un macrophage (pulmonaire ou
d'un ganglion mésentérique). Si le macrophage ne parvient pas à détruire le bacille, le bacille se multiplie et
détruit le macrophage. Le macrophage infecté "sensibilise" des lymphocytes qui produisent à leur tour des
substances (des lymphokines) qui attirent d'autres macrophages.
Les macrophages fusionnent, formant ainsi des cellules géantes (cellules de Langhans). De la fibrose se
développe en périphérie de la lésion. La lésion augmente progressivement de taille et la nécrose des
macrophages apparaît macroscopiquement comme du caséum, un matériel à l'aspect de fromage. Le caséum
peut se minéraliser. Il a alors une consistance crayeuse. La résistance à l'infection dépend de l'immunité
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
cellulaire (T-dépendante) et elle est obtenue chez l'homme par vaccination au BCG (Bacille de Calmette et
Guérin). Chez le chevreuil, des lésions peuvent se développer dans tous les organes moins de 90 jours après
l'infection primaire.
Signes cliniques : Les signes cliniques de la tuberculose dépendent de l'animal atteint, de la souche de
bacille, de l'organe atteint, du stade de la maladie, et des maladies concomitantes. Dans toutes les formes,
l'animal atteint maigrit de façon marquée. Les formes respiratoire et digestive sont les plus courantes.
Atteinte respiratoire: toux et gène respiratoire. C'est la forme la plus souvent rencontrée chez les bisons.
Dans les cas avancés, on note une détresse respiratoire. Chez les cervidés, l'infection se caractérise
par une atteinte ganglionnaire, les poumons étant plus rarement atteints. Toujours chez les cervidés, les
ganglions ont l'aspect d'abcès contenant du pus crémeux (voir Dr. Yves Robinson, Agriculture Canada,
qui a beaucoup d'expérience dans le domaine).
Atteinte digestive: on observe de la diarrhée persistante ou intermittente qui ne présente aucun
caractère spécifique.
Tous les organes peuvent être atteints : mamelle, reins, utérus, ovaires, testicules, encéphale, muscles,
os, yeux.
Diagnostic chez les animaux de la faune : Il n'y a pas de bon test !
Le test à la tuberculine est applicable seulement chez les cervidés et les bovidés, pas chez les autres ongulés
sauvages (le lama est déclaré "non testable" par Agriculture Canada).
Bovins domestiques et test de tuberculine: Même chez les bovins domestiques le test de la tuberculine
donne des résultats décents pour diagnostiquer l'infection au niveau du troupeau. Il n'est pas fiable pour
diagnostiquer la maladie au niveau d'un animal individuel. Ainsi une étude récente montrait beaucoup de faux
positifs: de 59 vaches avec un test de tuberculine caudal positif, seulement 21 (35.6 %) avaient des lésions et des cultures
positives de M. bovis, et peut-être plus important, le test de tuberculine montre des faux négatifs: 2 vaches sur 61 (3.2 %)
avec un test de tuberculine négatif avaient des lésions tuberculeuses dans les ganglions bronchiques et des cultures
positives (Barthel et al AJVR 61:1140 (2000).
Concrètement, pour être à peu près sûr qu'un troupeau n'est pas infecté, il faut tester chaque animal d'un
tropeau donné à la tuberculine tous les ans pendant des années avant de détecter quelques animaux (pas
tous) qui montrent une réaction positive (il faut bien sûr que pendant ce temps, il n'y ait pas d'achats de
troupeaux dont on ignore le statut face à M. bovis).
En fait, les systèmes de surveillance et d'élimination de la tuberculose bovine reposent sur l'inspection des
carcasses en abattoir au Canada et aux Etats-Unis. Souvent les seuls sites inspectés sont les nœuds
lymphatiques des poumons et de la tête. Or, jusqu'à une lésion sur 5 peut être ailleurs que dans des ganglions
(AJVR 61:1140 (2000)).
Diagnostic clinique: Le diagnostic clinique est illusoire car beaucoup d'animaux affectés sont cliniquement
normaux. On peut avoir un animal qui s'amaigrit progressivement.
Du vivant de l'animal : la tuberculination intra-dermique cervicale (injection de tuberculine dans le derme du
cou) est utilisée chez les mammifères domestiques. Un vétérinaire accrédité par le gouvernement fédéral
injecte la tuberculine purifiée et on mesure l'épaisseur du pli cutané avant l'injection et 72 heures après.
Cependant chez les cervidés, comme chez les bovidés, des faux positifs sont rapportés, dus à la thélite
nodulaire (inflammation du trayon), douve, mycobactéries atypiques et aussi infections à plusieurs autres
Mycobacterium saprophytes ou non pathogènes: M avium, M. paratuberculosis, M. nonchromogenicum, M.
diernhoferi, M. gastri, M. chelonei, M. smegmatis, M. vaccae) JWD 35: 450-457, 1999)
Comme chez les bovins domestiques, il survient aussi et surtout un grand nombre de faux négatifs chez les
ongulés sauvages, même si le test est considéré "applicable" par le gouvernement fédéral chez les cervidés
sauvages et chez le bison.
Les tests d'immunostimulation des lymphocytes sont parfois utilisés et évitent d'avoir à capturer les animaux
deux fois. Par exemple, des 33 bisons adultes testés au Parc Safari en 1995, 23 avaient des lésions et tous
étaient négatifs à la tuberculine avant d'être euthanasiés.
Lésions: Chez les chevreuils sauvages du Michigan, les lésions se trouvaient le plus souvent dans le ganglion
rétropharyngien médial.
La tuberculose doit toujours être suspectée lorsqu’un ou des organes présentent des lésions nodulaires dont la
117
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
coupe révèle un matériel caséeux (= consistance de fromage caillé). Ces organes sont principalement le
poumon, le foie et la rate. Les ganglions satellites des organes atteints portent presque toujours des lésions
elles aussi nodulaires et caséeuses. Le caséum peut être remanié par une réaction inflammatoire (il apparaît
alors plus liquide), partiellement minéralisé (consistance crayeuse à la coupe), surinfecté par un autre agent
bactérien ou fibrosé. Le caséum est généralement jaune et il est entouré par du tissu fibreux dont la couleur va
du blanc au gris. Parfois, la cavité thoracique ou la cavité abdominale peuvent être atteintes : on parle alors de
pleurésie ou de péritonite tuberculeuse. Dans certains cas, la tuberculose peut être osseuse ou méningée.
Chez les bisons du Parc National Wood Buffalo, les lésions dues à M. bovis atteignaient surtout les ganglions.
Contrastant fortement avec les bovidés, chez les cervidés sauvages, les lésions ont l'aspect d'abcès
contenant du pus crémeux. Les vétérinaires anglais responsables de l'importation de chevreuils de NouvelleZélande se sont fait prendre par cet aspect trompeur: ils ont admis en Angleterre des chevreuils néo-zélandais
atteints de tuberculose en pendant que les abcès ne justifiaient pas la suspicion d'une infection à M. bovis.
De laboratoire :
Grattage de la paroi d'un tubercule : il suffit de gratter la paroi d'un tubercule avec la lame d'un scalpel
afin de détacher des cellules géantes. Le matériel détaché est coloré par la technique de Ziehl-Neelsen
qui permet de mettre en évidence les bacilles alcoolo-acido-résistants. C'est une technique rapide qui
permet d'obtenir une réponse en quelques heures.
Bactériologique:
Le bacille croît lentement (8-10 semaines) mais la culture est indispensable pour identifier et pour typer
la bactérie.
Histopathologique:
Le tubercule est typiquement une réaction granulomateuse formée d'un centre nécrotique entouré par
un anneau de cellules épithélioïdes, de lymphocytes, de polynucléaires et d'une capsule fibreuse
d'épaisseur variable. Des cellules géantes sont toujours observées chez les ruminants mais pas chez
les carnivores. A la coloration de Ziehl-Neelsen, les bacilles sont localisés dans les cellules géantes
(chez les espèces qui en possèdent) ou en périphérie de la zone de nécrose.
Conclusion :
en face d'une suspicion : Contacter les vétérinaires d'Agriculture Canada
- quelques lésions (poumon, ganglions, rate ...) au congélateur,
- quelques lésions (poumon, ganglions, rate ...) dans le formol 10 %.
- déclarer votre suspicion au vétérinaire d'Agriculture Canada.
!
Prophylaxie chez l'animal : Les animaux achetés pour l'élevage ou des zoos devraient provenir d'endroits
indemnes, devraient subir un test cervical de tuberculination (et être négatifs), et devraient être gardés en
quarantaine pendant au moins 4 mois. Pendant la quarantaine, ils devraient subir un autre test cervical. Les
préposés aux soins des animaux devraient être aussi négatifs à la tuberculine.
En pratique, Agriculture Canada recommande le test des élevages de ruminants "sauvages" gardés en
captivité aux trois ans. En ces temps de coupure budgétaire, il n'est pas sûr du tout qu'Agriculture Canada
appelle l'éleveur pour lui rappeler de faire le test.
Ceci peut être dangereux pour l'éleveur. Si le test est positif lors de la vente d'un individu, tout le troupeau du
vendeur (et des acheteurs) sera presque certainement abattu, avec une compensation symbolique. L'acheteur
pourrait aussi poursuivre le vendeur...
La vaccination n'est pas applicable: en effet, la vaccination induit le développement d'une immunité qui
interfère avec le diagnostic par réaction intradermique. La seule prophylaxie possible est la prophylaxie
sanitaire avec élimination des animaux positifs à la tuberculine.
Le traitement n'est pas réaliste chez les animaux: en effet, le bacille est très résistant et le traitement requiert
une poly-antibiothérapie prolongée. Traiter les animaux pourrait produire des souches antibiorésistantes dont
le passage à l'homme serait très dangereux. De plus, la bactérie survit plusieurs années dans le sol et donc
l'animal contaminé représente une source durable de contamination.
Transmission à l'homme: ce sont surtout les agriculteurs (contamination respiratoire avec un animal atteint
de tuberculose pulmonaire ), les vétérinaires, les biologistes, taxidermistes naturalistes (manipulation et
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
nécropsie d'animaux malades), les consommateurs de lait non pasteurisé (source majeure de contamination
avant l'éradication de la maladie chez les bovins domestiques). Les humains s'infectent par inhalation
(tuberculose respiratoire) ou par ingestion (naturalistes, buveurs de lait) de bactéries. La maladie demeurant
longtemps asymptomatique, le délai d'incubation est très variable. Les signes chez l'homme sont identiques à
ceux de l'animal : ils dépendent du (des) organe(s) atteints et se traduisent toujours par un affaiblissement
général important et de l'hyperthermie. L'immunité est T-dépendante : les sujets immunodéprimés sont
susceptibles de contracter la maladie.
Paratuberculose
Agent: Mycobacterium paratuberculosis.
C'est une maladie importante surtout chez les bovins domestiques mais elle survient occasionnellement chez
les ongulés sauvages.
Transmission. La bactérie est libérée dans les fèces et se transmet par ingestion.
Distribution. Elle est présente partout au Canada, sans que l'infection ne se soit jamais établie chez les
ruminants sauvages. La maladie est cependant sérieuse chez les élevages d'herbivores sauvages en
Nouvelle-Zélande et en Grande-Bretagne.
Leptospirose
Agent causal: il existe environ 200 sérovars de Leptospira interrogans, un spirochète de 20 mm de long et 0.1
mm de diamètre qui affecte les hommes et les animaux. Chez l'homme, la leptospirose a longtemps été
appelée fièvre des marais, fièvre des inondations ou maladie des égoutiers.
Distribution: la maladie a une répartition mondiale. Au Québec, des études de séroprévalence sont
disponibles pour l'homme et pour les ratons-laveurs (Tableau 1). Au Canada, de nombreux sérovars sont
présents chez les animaux domestiques (chevaux, porcs, bovins, ovins).
Écologie/Épidémiologie: chaque sérovar est adapté à un ou des hôtes de maintenance chez lesquels il peut
causer la maladie bien qu'il puisse aussi causer la maladie chez d'autres espèces, les hôtes accidentels. Chez
tous les hôtes, les leptospires sont localisées au niveau du tube contourné proximal (rein) et, selon la relation
bactérie-hôte, parfois au niveau de l'appareil reproducteur. L'environnement est contaminé par l'urine ou par
les écoulements utérins faisant suite à un avortement. Dans le milieu extérieur, la bactérie survit le mieux dans
les milieux humides, chauds (température optimale de 28°C), et à un pH neutre ou légèrement alcalin. Dans de
telles conditions, les leptospires peuvent survivre des mois. On comprend donc aisément que la leptospirose
est particulièrement prévalente en automne pour les climats tempérés.
De nombreuses espèces de mammifères de la faune peuvent constituer une source de leptospires (Tableau
1).
Pathogénie : les leptospires du milieu extérieur pénètrent les muqueuses (intactes) ou la peau (ramollie par
l'eau ou égratignée ou abrasée). Quatre à 10 jours après l'entrée dans l'hôte, une bactériémie s'établit et dure
quelques heures à quelques jours. Les bactéries sont disséminées et se localisent dans les organes cibles,
incluant les reins. Dans les reins, les bactéries migrent hors des vaisseaux dans le tissu interstitiel (entre les
tubules et les glomérules), puis pénètrent dans la lumière des tubules. Là elles se multiplient et sont rejetées
dans l'urine (elles causent de l'inflammation lymphoplasmocytaire - néphrite interstitielle). Elles contaminent le
milieu environnant, à partir duquel elles contaminent de nouveaux hôtes.
Des anticorps opsonisants apparaissent dès 6 jours après l'infection, ce qui a pour conséquence d'éliminer les
leptospires de l'organisme sauf au niveau des compartiments où les anticorps n'ont pas accès : tube contourné
proximal (rein), humeur vitrée (œil), liquide céphalo-rachidien (système nerveux). Pour certaines espèces et
pour les sérovars qui leur sont adaptés, les leptospires persistent au niveau de l'appareil reproducteur
(oviducte, utérus, vagin, testicule, épididyme, prostate, vésicule séminale).
Signes cliniques : chez les animaux, la plupart des infections sont sub-cliniques et se manifestent par une
néphrite interstitielle minime (inflammation du rein). Cependant, dépendant de la relation hôte-sérovar,
l'infection peut être clinique, surtout durant la phase leptospirémique. Elle se manifeste alors par une jaunisse
(hémolysine, lésions hépatiques d'origine toxique et ischémique), de la fièvre, de l'anémie hémolytique
(hémolysine, anticorps contre les antigènes leptospiraux recouvrant les érythrocytes, de l'hémoglobinurie, de la
congestion pulmonaire et parfois une méningite. Certains sérovars se localisent au niveau des reins et causent
une néphrite interstitielle suffisamment sévère pour provoquer une insuffisance rénale.
On a rapporté le premier cas contracté en nature chez un phocidé, une jeune femelle - phoque commun en
1999. (Stevens et al, JWD 35:150. 1999). Auparavant, des cas avaient été rapportés chez des phocidés dans
119
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
les centres de réhabilitation de Californie (Stamper et al JWD 34: 407-410. 1999). En 1970, on avait déjà
rapporté des avortements chez des otaries de Californie (Otaridés) à Leptospira interrogans serovar pomona.
Les signes cliniques sont très variables chez l'homme. La maladie prend l'allure d'une grippe. Les symptômes
peuvent être plus graves selon l'état immunitaire du sujet affecté et du sérovar en cause.
Méthodes de diagnostic : l'identification du sérovar repose sur l'immunofluorescence (prélèvements
congelés) ou sur la culture (prélèvement très frais ou acheminés au laboratoire sur milieu de transport
spécifique). Lors d'infection rénale, l'examen histologique montre un grand nombre de bactéries (coloration à
l'argent) dans la lumière tubulaire en plus de la néphrite. L'immunoperoxydase permet de confirmer la
présence de leptospires au niveau des tubes contournés proximaux ou du placenta. Les études sérologiques
font appel à la technique de micro-agglutination (MAT). C'est cette méthode qui est utilisée dans la plupart des
études visant à évaluer l'importance de la leptospirose chez les animaux de la faune.
Prévention, traitement et contrôle : des mesures d'hygiène simples (port de gants lors de la manipulation
des animaux ou lors de travail dans un milieu potentiellement contaminé) permettent de prévenir la
contamination de l'homme. La prévention consiste à assécher les flaques d'eau et les mares à proximité des
habitations humaines et à contrôler les populations d'animaux sauvages (rongeurs, ratons-laveurs, mouffettes)
susceptibles de contaminer ces points d'eau.
Références :
Bourque M, Higgins R. Serologic studies on brucellosis, leptospirosis and tularemia in moose (Alces alces) in
Quebec. J Wildl Dis 1994, 20, 95-99.
Crowell WA, Stuart BP, Adams WV. Renal lesions in stripped skunks (Mephitis mephitis) from Louisiana. J
Wildl Dis 1977, 13, 300-303.
Fairley RA, Schollum LM, Blackmore DK. Leptospirosis associated with serovars hardjo and pomona in red
deer calves (Cervus elaphus). N Z Vet J 1984, 32, 76-78.
Ferguson DV, Heidt GA. Survey for rabies, leptospirosis, toxoplasmosis and tularemia in stripped skunks
(Mephitis mephitis) from three public use areas in Northwestern Arkansas. J Wildl Dis 1981, 17, 515-519.
Goyal SM, Mech LD, Nelson ME. Prevalence of antibody titeres to Leptospira spp. in Minnesota white-tailed
deer. J. Wildl Dis 1992, 28, 445-448.
Khan MA, Goyal SM, Diesch SL, Mech LD, Fritts SH. Seroepidemiology of leptospirosis in Minnesota wolves. J
Wildl Dis 1991, 27, 248-253.
Kingscote BF. Leptospirosis in red foxes in Ontario. J Wildl Dis 1986, 22, 475-478.
Kingscote BF. Leptospirosis in sheep in Western Canada. Can Vet J 1985, 26, 164-168.
Kingscote BF. Leptospiral serovars in Canada. Can Vet J 1988, 29, 70-71.
Kitson-Piggot AW, Prescott JF. Leptospirosis in horses in Ontario. Can J Vet Res 1987, 51, 448-451.
Lévesque B, De Serres G' Higgins R et al. Seroepidemiologic study of three zoonoses (Leptospirosis, Q fever
and tularemia) among trappers in Québec, Canada. Clin Diagn Lab Immunol 1995, 2, 496-498.
Richardson GF, Spangler E, MacAulay EB. A serological survey of four Leptospira serovars in dairy cows on
Prince Edward Island. Can Vet J 1995, 36, 769-770.
Shotts EB, Andrews CL, Sulzer C, Greene E. Leptospirosis in cottontail and swamp rabbits of the Mississipi
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Van Til LD, Dohoo IR. A serological survey of leptospirosis in Prince Edward Island swine herds and its
association with infertility. Can J Vet Res 1991, 55, 352-355.
120
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Tableau 1 : Séroprévalence de la leptospirose chez quelques animaux de la faune.
Espèce
Sérovars
Orignal
Alces alces
grippotyphosa
Cerf élaphe
Cervus elaphus
pomona > hardjo
Cerf de Virginie
Odocoileus virginianus
Prévalence
Lieu
Référence
0.5 % (1/208)
Québec
Bourque & Higgins
1984
75 % (9/12)
NouvelleZélande
Fairley et al. 1984
pomona > bratislava
88/204 (43 %)
Minnesota
Goyal et al. 1992
Loup
Canis lupus
grippotyphosa > bratislava >
autumnalis > canicola >
pomona > ballum >
pyrogenes > hardjo >
copenhagi
11 % (52/457)
Minnesota
Khan et al. 1991
Renard roux
Vulpes vulpes
autumnalis > pomona
12 % (12/100)
Ontario
Kingscote 1986
Raton laveur
Procyon lotor
bratislava > pomona >
hardjo et grippotyphosa
28 % (7/25)
Québec
CCCSF 1995
Mouffettes
Mephitis mephitis
canicola, grippotyphosa,
hardjo,
icterohaemorrhagiae,
pomona
pomona > hyos > canicola >
ballum >
icterohaemorrhagiae
47 % (21/45)
Arkansas
Ferguson & Heidt 1981
55 % (55/100)
Crowell et al. 1977
Louisiane
Lapins
Sylvilagus floridanus
Sylvilagus aquaticus
ballum > australis >
icterohaemorrhagiae >
canicola > grippotyphosa
77 % (37/48)
Mississipi
Shotts et al. 1971
Trappeurs
bratislava > hardjo >
icterohaemorrhagiae
9.1 (15/165)
4.8 (8/165)
Québec
Lévesque et al. 1995
Contrôles
De 95 moufettes échantillonnées près d'une ferme laitière infectée avec le sérovar pomona en Alberta du sud,
40 % réagissaient. De 438 moufettes testées en d'autres endroits en Alberta du sud et dans la Saskatchewan
voisine, seulement 5.7% réagissaient. Le troupeau laitier infecté peut donc avoir joué un rôle dans la
prévalence élevée trouvée chez les moufettes de cette région.
Une étude faite sur les rats, à Détroit (1977), montre que plus de 50% des rats adultes sont infectés par ce
sérovar. La chute dans les eaux d'un égout a causé la leptospirose chez un homme qui en est mort 8 jours
plus tard. Le médecin traitant n'avait pas considéré la leptospirose dans le diagnostic et l'homme ne reçut des
antibiotiques que deux jours avant sa mort.
Septicémies des rongeurs et des lagomorphes.
Tularémie
Historique: En 1910, dans le comté de Tulare en Californie, des écureuils furent trouvés morts et on en isola
une bactérie Gram (-) que l'on prit d'abord pour un Pasteurella (tularensis). La bactérie devint plus tard
Francisella, d'après un monsieur Francis qui démontra en 1925 les organismes dans le foie de lapins.
Agent: Francisella tularensis.
Deux formes de tularémie peuvent être distinguées par leur patron épidémiologique et la virulence des isolats.
Ce sont la forme terrestre, affectant les lapins, et la forme aquatique, affectant le rat musqué. Les deux
formes se transmettent par des mécanismes complètement différents. Les deux se transmettent à l'homme,
d'où l'importance de prendre des précautions lorsqu'on manipule des animaux infectés.
121
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
En fait, la bactérie a été isolé de 100 espèces de mammifères et de très nombreux arthropodes.
1)
2)
La forme terrestre (ou néoarctique (type A)):
Animaux: Lièvres, Lapins
Distribution: elle est limitée au Nouveau Monde.
Agent: Francisella tularensis biovar tularensis (synonyme neoarctica).
Transmission: piqûres de tiques ou autres arthropodes (mouches à chevreuil, puces, maringouins).
Signes cliniques: Chez l'humain, c'est la forme la plus virulente (5-7% de mortalité si traitée) et c'est
aussi la plus fréquente. Le lapin à queue blanche ("cotton tail rabbit", Sylvilagus floridanus) est le
réservoir principal de cette forme de tularémie. Les lièvres (genre Lepus) sont aussi infectés (et
malades)
La forme aquatique (holoarctique (type B))
Animaux: rat musqué, castors.
Transmission: très différente de celle de la tularémie terrestre. Elle se transmet par l'eau contaminée ou
par contact direct avec des animaux infectés ou leurs sécrétions, le contact direct incluant même le
carnivorisme et le cannibalisme.
Agent: F. tularensis biovar palearctica (synonyme holoarctica). Elle affecte surtout les rongeurs
aquatiques (castors, rats musqués, campagnol nageur). La bactérie peut survivre 3-4 mois dans la
boue, l'eau et les carcasses en train de se décomposer. Chez les humains, elle est beaucoup moins
virulente que la souche A (moins de 1% de mortalité si non traitée) et est la source d'environ 10% des
cas de tularémie aux États-Unis. La bactérie est probablement présente la plupart du temps dans les
populations de rongeurs aquatiques mais les épizooties semblent survenir quand les animaux sont
stressés par une alimentation inadéquate, une densité de population élevée ou par d'autres facteurs. En
Suède, la tularémie animale (type B) est observée principalement chez une espèce de lièvre (Lepus
timidus). Cependant, cette espèce semble très susceptible à la maladie et est probablement seulement
un hôte accidentel. On soupçonne que le castor est le réservoir principal. Toujours en Suède, on pense
que la tularémie est transmise à l'homme et aux lièvres par les moustiques.
Prévalence
Au Québec, dans la région de Rimouski, 5 % des lièvres (n=100) avaient des anticorps (automne 1994). Des
carnivores comme les ratons-laveurs, la mouffette et le renard ont des séroprévalences encore plus élevées
mais ils ne sont pas malades.
Entre 1989 et 1994, 48 cas de tularémie humaine ont été rapportés au Québec. De 1979 à 1994, seulement
pour la Gaspésie, il y a eu 18 cas de rapportés, une enquête épidémiologique a impliqué le Lièvre d’Amérique
à 12 reprises.
En juin 2000, un mort et neuf personnes infectées et malades ont été rapportées assez près d'ici, sur l'Ile de
Martha's Vineyard, au large de Cape Cod.
Lésions
Chez les lagomorphes et les rongeurs, les lésions sont des lésions focales crayeuses dans le foie, rate et
ganglions consistant au début de neutrophiles (microabcès) puis évoluant vers une zone centrale de nécrose
caséeuse entourée de lymphocytes et macrophages (granulomes). Les bactéries sont nombreuses mais
difficiles à apercevoir dans les phagocytes entourant la lésion.
Diagnostic différentiel des "point jaunes au foie" chez les rongeurs et les lagomorphes
Peste.
Yersinia pestis. Gram (-).
Maladie de Tyzzer: Clostridium piliforme (anciennement Bacillus piliformis), Gram (-); surtout chez les souris;
nécrose multifocale au foie; nombreux organismes.
Salmonellose:
Salmonella typhimurium; Gram (-); rongeurs; accompagnée d'entérocolite.
Listériose:
Listeria monocytogenes; Gram (+); nécrose multifocale; neutrophiles plus nombreux.
Toxoplasmose:
protozoaire; les zones de nécrose sont très petites. Nécrose de coagulation, pas de
réaction inflammatoire; tachyzoïtes visibles.
Mouse pox:
Corps d'inclusion éosinophiles intracellulaires. Lésions cutanées très sévères mais pas
tout le temps. Lésions aux glandes salivaires, poumons, pancréas, et surtout aux nœuds
lymphatiques.
122
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Signes cliniques : Les premiers signes sont ceux d’une maladie fébrile généralisée (fièvre, frissons, sueurs
abondantes, maux de tête, vomissements, perte d'appétit). Ils débutent généralement de 3 à 5 jours après le
contact initial (mais peuvent survenir de 1 à 14 jours après le premier contact).
Les signes cliniques dépendent de la voie d'entrée de la bactérie.
S’il s’agit d’une infection par voie cutanée ( micro-coupure (souvent aux mains), ou morsure de tique, il peut y avoir un ulcère au site de la
coupure/ morsure puis enflure du ou des ganglions lymphatiques drainant la région affectée. S'il s'agit d'une infection orale, il y aura
inflammation du larynx et de l’intestin. Par contre, s'il s'agit d'une infection par inhalation de matériel infecté, une pneumonie peut se
développer (une pneumonie secondaire est fréquente quelle que soit la voie d'entrée).
Prévention (R. Claveau)
La prévention de la maladie chez les humains repose sur le bon sens. Il faut manipuler avec soin les
lagomorphes, les rongeurs et les autres animaux sauvages, particulièrement ceux trouvés morts. En
dépouillant ces animaux, il est bon de porter des gants de caoutchouc et de mouiller la fourrure pour éviter
l'émission de particules infectieuses aérosols. Ne pas boire d'eau non traitée. L'usage de chasse-moustiques
(DEET) et de vêtements protecteurs est recommandé pour éviter les piqûres d'arthropodes.
Maladie de Tyzzer
Agent: Clostridium piliforme forme des spores. Non transmissible à l'homme. La maladie a été rapportée chez
les rats musqués.
Transmission: C. piliforme est présent dans l'intestin des rats musqués sans causer de maladie. Les porteurs
émettent des spores dans l'environnement par les fèces. Les spores restent infectieuses longtemps dans la
boue ou dans les abris de rats musqués. Ceux-ci s'infectent en ingérant les spores. La maladie survient quand
les animaux sont stressés (malnutrition, surpeuplement, sécheresse, gel) ou quand les animaux fréquentent
des régions fortement contaminées et ingèrent un grand nombre de spores.
Historique: Décrite dans les années 1940, parce qu'elle avait causé des épizooties dans les populations de
rats musqués des marécages de l'Iowa et du Wisconsin dans les années '40. La maladie était connue alors
sous le nom de maladie de Errington.
Errington (1954) a décrit l'importance de la maladie dans la relation écologique entre le vison et les rats musqués dans certains
marécages. La maladie favoriserait la prédation des rats musqués malades par les visons (voir Régulation des populations, p. 15).
Distribution: à Montréal, le long de la Rivière des Prairies. (1993-1994), rats musqués trouvés morts avec
lésions hépatiques).
Pseudotuberculose
Agent: Yersinia pseudotuberculosis et Y. enterocolitica. La Yersiniose affecte une grande variété d'espèces
mammaliennes et aviaires et elle est zoonotique.
Transmission:Y. pseudotuberculosis est présente dans les fèces de très nombreux oiseaux et mammifères,
particulièrement des rongeurs, cliniquement normaux. Les réservoirs principaux de l'infection par Y.
pseudotuberculosis sont les rongeurs. La bactérie n'infecte pas les oiseaux. La transmission de l'infection
semble limitée à la voie orale-fécale. Les animaux susceptibles servent de réservoir en abritant la bactérie
dans leur intestin. Les infections latentes chez ces animaux se manifestent sous des conditions de stress.
La maladie est beaucoup plus chronique que la maladie de Tyzzer et que la tularémie. Les animaux sont
émaciés et les lésions consistent en des pyogranulomes de grandeur variée dans le foie, la rate, les nœuds
lymphatiques et à peu près tous les organes. Les castors et les rats musqués peuvent connaître une évolution
aiguë: les castors ont une entérite hémorragique et nécrosante. Les rats musqués affectés peuvent ne montrer
rien d'autre que des hémorragies pulmonaires.
La maladie est importante dans les élevages d'herbivores "sauvages" de Nouvelle-Zélande.
Une étude de la pseudotuberculose au Zoo de Londres a démontré une augmentation de l'incidence entre les
mois d'octobre et de mars. Les auteurs de l'étude pensent que la contamination des rongeurs est la cause de
l'augmentation de l'incidence.
L'été 1986, la Yersiniose aiguë a été diagnostiquée chez 20 bœufs musqués et soupçonnée chez plusieurs
autres bœufs musqués trouvés morts dans les Territoires du Nord-Ouest. C'était le premier cas documenté
d'une mortalité importante causée par cette maladie dans une population sauvage d'ongulés.
123
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Yersinia enterocolitica: l'infection a été rapportée chez un nombre plus petit d'hôtes que Y. pseudotuberculosis.
C'est un problème important chez les primates où les lésions sont surtout intestinales et affectent les ganglions
mésentériques.
Peste
Agent: Yersinia pestis (renommée Y. pseudotuberculosis). Elle affecte principalement les rongeurs
sauvages, incluant les rats et elle est transmise par les morsures de puces ou lors de la manipulation d'hôtes
infectés. Elle existe sur tous les continents à l'exception de l'Australie. Endémique dans les tropiques et pays
sous-tropicaux. Au Canada, on a rapporté des cas chez des rongeurs en 1940 et en Colombie-Britannique en
1988 et 1989. Les humains infectés qui ne sont pas traités (avec des antibiotiques) peuvent mourir,
généralement par la forme pneumonique.
Deux niveaux écologiques différents:
1)
Peste urbaine: rats et puces. Puces mordent humains et leur transmettent la maladie. La bactérie tue le
rat, les puces et l'homme. Les épidémies ne persistent donc pas.
2)
Peste sylvatique: Enzootique chez rongeurs sauvages (chiens de prairie, écureuils, souris, ) et leurs
puces (Ouest des États-Unis: N.M., Ari, Cal., Co).
La peste sylvatique persiste en foyers enzootiques. La persistance de ces foyers et les épizooties
intermittentes qui leur sont associées résultent d'un ensemble de facteurs: certaines espèces de puces
contribuent plus à la transmission de l'infection que d'autres. La plupart des puces de rongeurs survivent
longtemps après l'infection. Certaines abritent Y. pestis pour plus d'un an. Les puces serviraient donc non
seulement de vecteurs mais aussi de réservoirs, expliquant ainsi la persistance des foyers enzootiques. Le sol
peut aussi servir de réservoir dépendant des conditions climatiques. L'organisme peut rester infectieux
pendant plusieurs mois. L'hibernation de certains rongeurs peut expliquer aussi sa persistance. Certaines
espèces de rongeurs sont plus résistantes que d'autres à l'infection et donc peuvent être de meilleurs
réservoirs de l'infection.
La peste urbaine résulterait de l'infection de rats urbains et de leurs puces par la peste sylvatique.
La susceptibilité à l'infection peut varier au sein de différentes populations de la même espèce de rongeurs.
Les individus de certaines populations qui ont été exposés auparavant sont très résistants à la maladie. Ils
subissent cependant une bactériémie transitoire et peuvent donc infecter les puces. La grande résistance de
ces individus ne serait pas due à l'immunité mais plutôt à des changements évolutifs secondaires à la sélection
naturelle. Le stress, comme dans les autres maladies infectieuses, peut vaincre la résistance.
Lésions: Les lésions ressemblent à celles de la tularémie: nécrose multifocale dans le foie, la rate, les nœuds
lymphatiques et une rate et des nœuds lymphatiques volumineux.
Prognostic: Quand elle est rapidement diagnostiquée et traitée rapidement (avec des anitbiotiques tels que la
streptomycine et la tétracycline), la mortalité est réduite de 60% à moins de 15 %. On a signalé en 1999
l'apparition de souches de Y pestis résistantes aux anitibiotiques à Madagascar.
Nécrobacillose
Agent. Fusobacterium necrophorum
Maladie décrite chez le bison (région du périnée), cerf, le wapiti, le caribou et l'antilope d'Amérique (cavité
orale, pieds).
Quelques épizooties, chacune causant la mort de 10-40 animaux pendant une période de quelques semaines,
ont été rapportées dans le sud de la Saskatchewan à la fin de l'hiver parmi les cerfs, les cerfs mulets et
l'antilope d'Amérique.
Lésions. Ces animaux étaient en mauvais état et se nourrissaient de foin dans des cours à bestiaux. La plupart
des animaux affectés étaient trouvés morts. Le bétail par contre était en bon état de chair et ne montrait
aucune évidence de la maladie. Les lésions étaient plus fréquentes et sévères dans la cavité orale. Des
lésions étaient observées moins fréquemment dans le rumen et le réseau, le foie et les poumons. Les lésions
aux onglons étaient rares. Quelques cas impliquant les pieds ont été rapportés chez l'orignal.
Kérato-conjonctivite à Chlamydia
La kératoconjonctivite infectieuse est définie comme étant une inflammation confinée à aux structures
superficielles de l’œil et produite par un agent infectieux.
La condition survient épisodiquement chez la mule, le cerf de Virginie, l'orignal, et l'antilope d'Amérique au
124
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Wyoming. Moraxella sp. est l'organisme le plus souvent retrouvé dans les lésions.
Chlamydia a été récemment rapportée comme étant la cause de kératoconjonctivite chez le mouflon: les
mouflons du Nord du Parc de Yellowstone ont souffert d'une épizootie de kératoconjonctivite durant l'hiver de
1981-1982. Cette épizootie aurait fait baisser les effectifs de 500 à 300 (mortalité de 60 %). Les adultes mâles
auraient souffert de la mortalité de façon disproportionnée à cause du rut qui mobilise une grande quantité
d'énergie, en plus de l'incapacité de trouver des abris et de la nourriture pendant l'hiver. La transmission de
l'infection serait favorisée par les mœurs sociales des mouflons; lors du rut les animaux se rassemblent; les
mâles se frottent les glandes préorbitales. Chlamydia cause aussi de l'arthrite et des pneumonies chez cette
population.
Complexe de la pneumonie chez le mouflon
Quelques populations de mouflons d' A. du N. ont été décimées par des épizooties de pneumonie dans les
derniers 20 ans. Dans plusieurs de ces épizooties, les problèmes de pneumonie semblaient être dus à
plusieurs facteurs comme l'interaction entre les bactéries, les virus, les vers du poumon, et les facteurs
stressants. Mannheimia (Pasteurella) hemolytica a été le facteur étiologique primaire dans plusieurs cas et le
seul identifié dans certains cas. Dans un cas, des auteurs ont émis l'hypothèse qu'un facteur prédisposant
ayant précipité l'épidémie était le stress chronique environnemental causé par la construction d'un barrage.
Deux épidémies furent associées avec la proximité de moutons domestiques.
Les amygdales des mouflons abritent leurs propres souches de Pasteurella haemolytica. Peut-être le stress ne
fait-il que précipiter l'infection. Des expériences ont montré cependant que même en l'absence de stress, ces
animaux sont très susceptibles aux souches de P. haemolytica des animaux domestiques, dont les moutons et
les bovins. L'inverse n'est pas vrai: les moutons domestiques sont très résistants aux souches de P.
haemolytica isolées des mouflons.
Pasteurella multocida
Septicémie hémorragique aiguë
Espèces: chez les animaux domestiques et sauvages (bovins, buffles d'eau)
Distribution: Asie du sud-est (sérotype de capsule B, sérotype somatique 2 (B:2)), Afrique (capsule type de
capsule E, type somatique 2 (E:2)), Moyen-Orient.
On a rapporté des cas en Amérique du Nord au Parc de Yellowstone, chez le wapiti au Wyoming, et
récemment dans des parcs au Danemark (JZWM 30: 285-292).
Lésions. Pétéchies sur les séreuses (vasculites nécritiques avec bactéries intravasculaires), œdème souscutané dans la région de la tète (cellulite avec bactéries), muqueuse du pharynx nécrotique (ulcères avec
vasculite), poumons très congestionnés et œdémateux avec ou sans pneumonie fibrino-nécrotique.
6.8.3 PROTOZOAIRES
Toxoplasmose
Toxoplasma gondii
20,21
infecte plusieurs espèces d'animaux à sang chaud, y compris l'homme. Les
Félidés sont les seuls hôtes définitifs connus. Eux seuls libèrent les oocystes. Le lynx est souvent infecté. Les
rats maintiennent l'infection en nature (leurs tissus renferment les bradyzoites). Les chatons sont très
susceptibles et leur mère les infecte en leur donnant des rongeurs qu'elle a tués. Les cerfs de Virginie peuvent
s'infecter et être à l'origine d'infections humaines lorsque la viande est consommée crue par les chasseurs.
Parce qu'il est omnivore, le raton-laveur est considéré comme un bon indicateur de la contamination
environnementale. Aux États-Unis, une étude a démontré une séroprévalence de 50 %. Ce protozoaire fait
aussi partie du différentiel des maladies du système nerveux chez cet animal (comme chez le chien et la
moufette, l'infection peut alors coïncider avec le distemper étant donné que le distemper est
immunodépresseur).
Giardiase
Agent: Giardia lamblia (duodenalis)
125
35
est un protozoaire flagellé, responsable de diarrhée chez plusieurs
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
espèces animales, dont l'homme. C'est le parasite intestinal le plus fréquent chez l'homme (3 à 4% des gens
seraient infectés (Meyer et al 1985).) Les enfants dans les garderies, les sidéens et les patients d'instituts
psychiatriques sont particulièrement à risque.
Transmission: L'infection survient souvent suite à l'ingestion d'eau contaminée. Le kyste a été trouvé dans les
eaux traitées. En 1992, 140 des 339 municipalités sur les rives du Saint-Laurent (1.35 millions d'habitants)
libéraient les eaux municipales non traitées dans le Saint-Laurent (Centre Saint-Laurent, 1996).
Le parasite est fréquent dans les fèces des animaux domestiques.
Hôtes: Le parasite est plus fréquent chez les jeunes animaux et dans les élevages.
33.9% des chiots en santé sont infectés (Californie), 1.4 à 5% des chats ont été trouvés
infectés aux États-Unis, et 8 % des castors dans le Parc des Laurentides (Faubert
1988). Récemment, Giardia était détecté dans les fèces de trois espèces de phoques de
l'Estuaire du Saint-Laurent, pas chez les cétacés (dont les bélugas) (JWD 35:779-782).
Giardia et Cryptosporidium sont très fréquents dans les rivières du Québec. Or, des 2300 réseaux d'eau du
Québec, plus que la moitié (au moins 1,400) qui desservent 650,000 personnes distribuent une eau non
traitée. Ce n'est pas pour rien qu'au Québec la Direction de la santé publique a relevé de 1989 à 1995 68
épidémies liées à la consommation d'eau, la plupart dues à Giardia et Cryptosporidium (aucune due à E. coli).
On estime que pour chaque cas signalé, il y a plus de 1000 infections qui ne le sont pas. (Commission sur la
gestion de l'eau au Québec, rapport Mai 2000)
Cycle. Il n'y a pas d'hôtes intermédiaires. L'ingestion du kyste libère les trophozoïtes dans le duodénum. Ceuxci adhèrent à la bordure en brosse grâce à une ventouse à l'extérieur de la cellule et se nourrissent là.
L'ingestion de 10 à 100 kystes est suffisante pour une infection productive chez l'homme.
Cryptosposridium.
Agent: Protozoaire.
Source: Matières fécales des animaux (rats, souris, bovins), des humains contaminant l'eau.
Les isolats trouvés chez les humains sont génétiquement distincts des isolats trouvés chez les veaux. Ceci
suggère que les infections humaines seraient dues à la contamination de l'eau potable par des matières
fécales humaines et non animales (Awas-El-Kariem et al. Parasitology research 84: 297-301 (1998))
Sarcocystis sp:
Protozoaires. 78.6 % des orignaux du Parc de La Vérendrye sont infectés. Le plus souvent non détectable à
l’œil nu. Le loup est probablement l'hôte définitif.
Anaplasmose
Agent: Anaplasma marginale (le plus pathogène chez les bovins), centrale (anémie). Protozoaire ressemblant
aux Rickettsies. Ne se transmet pas aux humains. Parasite obligatoire des globules rouges.
Transmission: tiques et mouches qui ne survivent pas à l'hiver canadien (du moins, on le pense). Aiguilles
utilisées pour la vaccination. Outils utilisés pour le décornage.
Distribution: jusqu'à récemment en Californie, dans les États de l'Ouest américain, dans les pays chauds,
tropicaux ou sub tropicaux. A été trouvé en 2000 chez 5 bisons du Parc Prince Albert ! dans le parc des bisons
du Montana, 15.7 % des bisons ont la maladie. Agriculture Canada détruira les bisons infectés dans le Parc.
Nous espérons que l'agence essaiera aussi de déterminer l'origine de la maladie. Réchauffement global ?
6.8.4 FONGI
Trichophyton verrucosum
Décrits chez le cerf mulet en Saskatchewan et en Alberta mais pas dans les régions plus au sud. Les lésions
126
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
sont généralement discrètes, situées à la face ou sur les pattes et les animaux affectés sont en bonne
condition. Des animaux débilités avec des lésions sévères ont été aussi décrits. Trichophyton verrucosum est
le seul agent qui a été isolé. La source d'infection serait les bovins domestique. La maladie n'a pas été
observée chez le cerf de Virginie bien que cette espèce partage plusieurs territoires avec le cerf mulet en
Saskatchewan et en Alberta.
Adiaspiromycose
C'est une mycose fréquente, répandue et habituellement peu sévère des mammifères causée par un fongus
dimorphique du genre Emmonsia. Il a été rapporté sur cinq continents chez au moins 124 espèces ou sousespèces de mammifères, particulièrement les rongeurs et les mustélidés. E. crescens est le plus fréquent et
est la seule espèce connue chez les mammifères canadiens. Quelques cas ont été diagnostiqués par biopsie
chez des patients souffrant de symptômes pulmonaires.
Les organismes Emmonsia produisent les plus grosses levures parmi tous les fongi pathogènes connus.
L'aleuriospore inhalé peut avoir un diamètre de 20-40 microns pour E. parva et 400-700 microns pour E.
crescens. Les organismes ne se multiplient pas dans les tissus; la sévérité de la maladie semble être
déterminée uniquement par le nombre de spores inhalées. Une réaction inflammatoire granulomateuse se
développe graduellement contre chaque sphérule. Dans le sol, les mycelia de Emmonsia feraient partie de la
mycoflore associée avec les racines de certaines plantes ligneuses. Jusqu'à 79.5% des écureuils de Franklin
(Sask.), qui fréquentent les régions occupées par ces plantes, sont infectés. L'écureuil de Richardson qui ne
fréquente pas ces régions connaît une très faible prévalence (2.5 %).
6.8.5 PARASITES
Rappels
Cestodes.
Ver plat hermaphrodite. L'adulte peut être très long et est constitué d'une chaîne d'unités reproductives
indépendantes, progressivement matures à mesure que l'on progresse postérieurement. L'extrémité antérieure
est fixée à la paroi de l'intestin de l'hôte définitif par le scolex, toujours très petit comparé au reste du corps. La
plupart des cestodes requièrent un hôte intermédiaire. L'hôte définitif est un carnivore. Donc, ne pas donner de
viande crue d'herbivore à un chien ou à un chat.
Nématodes.
La plupart n'ont pas d'hôte intermédiaire (cycle direct).
Trématodes.
Vers plats. Plusieurs hôtes intermédiaires, souvent en milieu aquatique.
Définitions
Période prépatente: temps entre l'ingestion de la forme infectante et l'apparition d'oeufs ou de larves dans les
selles ou le sang.
Cysticercoides: stade de développement d'un ver plat qui utilise un insecte utilisé comme hôte intermédiaire.
Ex.: puce et Dipylidium caninum
Cysticerque:
stade vésiculaire du développement d'un ver plat utilisant un mammifère comme hôte
intermédiaire. Une vésicule contenant un scolex. Ex.: bovin et Taenia saginata
Coenure:
stade kystique du développement d'un ver plat à la membrane duquel sont attachés
plusieurs scolices : Chacun des scolices peut se développer en un ver adulte. Ex.: Lièvre,
Coenurus serialis
Kyste hydatique: stade kystique de développement d'un ver plat à la membrane duquel sont attachés
plusieurs scolices. Plusieurs scolices flottent, libres, dans le liquide du kyste et ont une
apparence de sable ("sable hydatique"). Fréquent chez l'orignal. C'est en manipulant l'hôte
définitif que l'homme peut s'infecter. Un kyste hydatique aux dimensions importantes peut
alors se développer chez l'humain infecté. Ex.: Echinococcus granulosus
Strobilocerque: cysticerque dont le développement est déjà avancé dans l'hôte intermédiaire: il a commencé
127
Pathologie de la faune 2002
HD:
HI:
AMHD:
AMHI:
Daniel Martineau
à se segmenter et à s'allonger. Ex.: Rongeur et Cysticercus fasciolaris .
hôte définitif.
hôte intermédiaire.
apparence macroscopique chez l'hôte définitif.
apparence macroscopique chez l'hôte intermédiaire.
Herbivores
Généralités
Fascioloides magna
Parasite très important. Trématodes. Présent dans toutes les provinces excepté la Nouvelle Écosse,
l'île du Prince Édouard, le Yukon et les territoires du Nord-Ouest.
Cycle: à deux hôtes: Les parasites adultes, très gros (9 cm de long, 3 cm de large), vivent dans les
canaux biliaires, dans le foie des ongulés, où ils pondent leurs oeufs. Les oeufs sont libérés dans
l'environnement par les fèces. Dans l'eau, les oeufs éclosent. Les larves mobiles (miracidies) en
sortent. Elles pénètrent dans l'hôte intermédiaire (limace du genre Lymnaea). Elles s'y reproduisent
(multiplient) de façon asexuée pour donner naissance à un autre type de larve mobile, les cercaires,
qui sont relâchés par les escargots dans l'environnement. (métacercaires). Les métacercaires
résistent à la chaleur, à la déshydratation et à la congélation. Le cycle se complète lorsqu'un ongulé
ingère le métacercaire enkysté dans la végétation.
La douve géante a été introduite en Europe lorsqu'un wapiti a été importé en 1865 en Italie d'Amérique
du Nord.
Hôtes: Cerf de Virginie, caribou, wapiti. Les cerfs de Virginie et caribous infectés sont rarement
malades. Quand ils le sont, l'infestation se manifeste par de l'anémie. Par contre, les lésions sont
graves chez les orignaux, wapitis et cerfs à queue noire, et peuvent causer leur mort soit directement
ou indirectement (en les rendant susceptibles aux prédateurs, ou même aux collisions avec des
véhicules). Les orignaux et les bisons succombent rapidement (fibrose hépatique) (c'est peut-être à
cause de cette douve qu'il y a beaucoup de wapitis dans la région de Banff et peu d'orignaux).
L'infection est souvent mortelle pour le cerf d'Europe et donc on ne retrouve pas de cerf d'Europe dans
les régions où la douve géante sévit.
Noter que l'infection est mortelle chez le mouton domestique, parce que le parasite migre
constamment dans le foie. La vache infectée ne meurt pas mais le foie est condamné à l'abattoir à
cause de la fibrose.
Translocations: le parasite a été transporté (translocation) au moins deux fois par le wapiti. De
l'Alberta à l'Ontario, et des États-Unis à l'Italie, en 1865.
Gale sarcoptique, Cuterebra, Psoroptes, Oestres
Il s’agit de parasites rencontrés chez plusieurs espèces.
Psoroptes : les infections de l'oreille sont fréquentes chez le mouflon dans l'Ouest des États-Unis.
Oestres
Huit espèces d'oestres (dont Oestrus ovis) affectent la faune nord-américaine. Les mouches adultes
sont grosses. À l'exception d'une espèce, Oestrus ovis, les mouches sont couvertes avec des poils
denses de couleur noire, rouge, et semblent ainsi mimer les guêpes. Les larves se développent dans
les cavités nasopharyngiennes des cerfs de Virginie, caribous, mouflon, et wapiti ou dans des nodules
sous-cutanés chez le caribou et le bison.
Voici brièvement quelques unes de ces espèces dont Cephenemyia jellisoni et Oestrus ovis.
Cephenemyia jellisoni
En vol, la mouche éjecte les larves (écloses dans l'utérus) dans les narines du cerf de Virginie-hôte.
Le cerf de Virginie devient excitable et essaie de déloger les œufs en soufflant violemment. Les larves
ont été observées dans les conduits nasaux, la gorge, trachée, bronches, œsophage, estomac et
128
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
poumons. Le site normal d'attachement est dans les poches gutturales (rétropharyngiennes). C'est là
qu'elles croissent sont relâchées et éjectées par les narines à l'extérieur pour la pupe. Les signes
cliniques incluent le port bas de la tête et une décharge nasale. Les poches gutturales peuvent être
enflammées et dilatées. L'épithélium peut être ulcéré et la muqueuse œdémateuse.
Oestrus ovis.
Cet oestre infeste les moutons et les chèvres partout dans le monde. Il infeste aussi le cerf de Virginie
et le mouflon. La mouche éjecte en vol les larves qui migrent dans les sinus frontaux. Après
maturation, les larves migrent hors des narines et tombent sur le sol où elles pupent. On ignore s'il y a
des signes cliniques chez les animaux sauvages. Chez le mouton, par contre, ils sont très bien
caractérisés. Les moutons sont terrifiés par le bruit des mouches. Une fois infecté le mouton se frotte
le nez sur le sol et montre bientôt de l'écoulement nasal. Les crochets de la larve causent des
hémorragies de la muqueuse du sinus. La migration des larves à travers l'os ethmoïde cause une
méningo-encéphalite et peut causer la mort. La mort des larves dans le sinus entraîne une
inflammation sévère et peut aussi entraîner la mort.
Oedemagena tarandi: (Oestrus tarandi, Hypoderma tarandi): larve de mouche. La mouche adulte
dépose ses larves sur le poil que le caribou ingère. Très fréquent au Québec. Même cycle que les
hypodermes des bovins.
Cephenemya trompe : (Oestrus trompe): larve de mouche retrouvée dans les sinus. Cycle semblable
à celui de Oestrus ovis. Les mouches déposent les œufs dans les narines durant l'été.
Orignal
Très parasité. Surtout à cause du loup qui est l'hôte définitif de la plupart des parasites de l'orignal. La plupart
des orignaux des réserves de La Vérendrye et des Laurentides sont parasités (C. tenuicollis, C. tarandi, kyste
hydatique) à cause des loups nombreux dans ces réserves Les orignaux de la réserve de Matane sont
rarement parasités parce que le loup n'est pas présent dans cette région.
Parelaphostrongylus tenuis
Parelaphostrongylus andersoni
Elaphostrongylus rangiferi
Groupe important de nématodes
!
!
!
!
pathogènes chez les cervidés sauvages
Famille: Protostrongylidae. La larve a une épine sur le dos, à son extrémité caudale. Sous-famille
Elaphostrongylinae.
Tous les trois se servent du poumon du cervidé hôte pour l'expulsion des larves à l'extérieur.
Le diagnostic des trois nématodes se fait par le test Baermann.
Parelaphostrongylus tenuis
Important.
Agent. Nématode. Femelle 50-90 mm; mâle: 38-53 mm. Ce nématode, le ver des méninges du cerf de
Virginie, est présent chez le cerf de Virginie seulement dans l'Est du continent nord-américain (à l'Est
de la frontière entre le Manitoba et la Saskatchewan). On pense que c'est à cause de l'aridité des
plaines et de l'absence subséquente de limaces et escargots que cette barrière géographique existe.
(Elle empêcherait la survie des larves L1). L'intégrité de cette barrière est mise en danger avec
l'élevage des cervidés qui prend de l'essor partout. (translocation du parasite).
Espèces susceptibles: wapiti, cerf de Virginie.
Signes cliniques: Le cerf de Virginie ne montre pas de signe clinique. Les autres ongulés sauvages
129
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
comme l'orignal, par contre, peuvent mourir des suites de l'infection. Ce pourrait être à cause de ce
ver qu'on ne retrouve pas les orignaux et les cerfs de Virginie sur les mêmes territoires. (En général, le
nombre de cerfs de Virginie présent dans une région donnée est inversement proportionnel au nombre
d'orignaux).
Chez les cervidés (à l'exception du cerf de Virginie), on observe la claudication, l'absence de peur, la
dépression, la perte de poids, la paralysie partielle, l'ataxie, les trébuvhement, le tournis et la cécité.
(Tous ces signes peuvent être confondus avec ceux de la rage).
Le parasite est aussi pathogène chez la chèvre, le lama et les moutons. Ceux-ci représentent donc
des culs de sac pour le ver (car celui-ci ne peut pas se transmettre). Donc, le cerf de Virginie doit être
présent dans une région donnée pour que l'infection s'y maintienne.
Cycle: La femelle adulte est logée dans le système nerveux ou dans les muscles. Là elle produit des
œufs qui sont acheminés aux poumons par les veines. Les œufs éclosent dans les poumons, les
larves L1 migrent vers le pharynx, sont avalées et passent dans les fèces. Les larves ont un épine
dorsale qui leur permet de percer le pied des gastéropodes et de pénètrer activement dans le tissu de
leur pied (limaces et escargots) où elles se développent en L3. Les cerfs s'infectent en ingérant
(accidentellement) ces hôtes intermédiaires.
Distribution: Dans l'Est du Québec, 46.5 % des têtes de cerf de Virginie étaient positifs avec une
moyenne de 1 à 6 vers dans les méninges.
Diagnostic: Il n'y a pas de test sérologique. Le test de Baerman à partir des fèces n'est pas fiable.
C'est seulement à la nécropsie que l'on peut diagnostiquer la présence du nématode. (JWD 34: 334341 (1998))
Parelaphostrongylus andersoni
Agent: Nématode ayant beaucoup de parenté avec P. tenuis, Famille: Protostrongylidae. Sous-famille
Elaphostrongylinae La larve a une épine sur le dos à son extrémité caudale.
Cycle: L'adulte vit, comme celui de P. tenuis, dans les artères de fort calibre. Les larves sont ingérées
par des insectes piqueurs de la famille des Tabanidae puis se développent dans la mouche et sont
transmises à un autre ongulé lorsque la mouche se nourrit.
Lésions: Produit un grand nombre d'œufs qui éclosent dans les poumons, induisant une pneumonie
grave. Les effets sont les plus graves chez les jeunes animaux.
Nématode trouvé dans la musculature entourant les vertèbres lombaires et le haut des pattes
postérieures chez le cerf de Virginie et le caribou. Le nématode est présent autour ou dans les
vaisseaux sanguins. Le parasite ne cause pas de problème au cerf mulet. Il peut causer des lésions
aux muscles de la mastication chez le cerf de Virginie, entraînant ainsi une impaction orale. Chez
l'orignal et le wapiti, il peut causer des lésions sévères aux vaisseaux de la tête et du cou, causant de
la cécité, des dommages cérébraux, de la gangrène tissulaire à la tête et des déformations du
panache.
Distribution: chez le cerf, presque uniquement dans le sud est des Etats-Unis. (où P. tenuis est
absent). Beaucoup plus répandu chez le caribou et le cerf mulet (de Terre-Neuve à l'Alaska).
Elaphostrongylus rangiferi
Agent: Nématode ayant beaucoup de parenté avec P. tenuis. Ver fin comme un cheveu, de 4-5 cm de
long. Famille: Protostrongylidae. La larve a une épine sur le dos, à son extrémité caudale. Sousfamille: Elaphostrongylinae.
Très important car c'était un nématode exotique (seulement en Europe).
Historique: E. rangiferi a été introduit au Canada en 1908 par Sir Wilfred Grenfell qui avait acheté des
rennes infectés en Norvège pour développer l'élevage à Terre-Neuve. La plupart des troupeaux de
caribous (qui sont des rennes) de Terre-Neuve sont maintenant infectés et Terre-Neuve est la seule
région en Amérique du Nord où la maladie est endémique (on attend de voir comment la situation va
évoluer dans le Maine). Plus tard, des caribous furent importés dans le Maine à partir de Terre-Neuve.
Le Maine était déjà infesté par P. tenuis, le ver des méninges du chevreuil. Or les caribous sont très
susceptibles à P. tenuis. On espère que les caribous sont morts du ver des méninges avant qu'ils
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
n'aient pu établir le "ver du muscle" en Amérique du Nord. Il a été introduit en Ontario par des cerfs
rouges importés de Nouvelle Zélande.
Signes cliniques: Signes nerveux, comme P. tenuis. Caribous sont trouvés morts ou sont faibles,
tremblements, marchent tête basse, et trébuchent. Ne montrent pas de peur à l'égard des humains.
Émaciation. Les jeunes sont les plus affectés.
Cycle: Gastéropode comme hôte intermédiaire.
Maladie à la fin de l'automne ou à l'hiver, suite à un été chaud et humide qui favorise la prolifération
des gastéropodes et la reproduction des larves infectieuses chez les gastéropodes.
Traitement: en Norvège, les caribous sont maintenant rarement infectés grâce à l'emploi de
l'Ivermectin. Ce médicament ne tue pas tous les adultes mais réduit la production de larves.
Fascioloides magna
Taenia krabbei (Cysticercus tarandi).
AMHD: ver plat de 20 cm à 2 m de longueur dans l`intestin dl'HD, un carnivore. HD: loup coyote lynx,
ours, chien et autres carnivores. AMHI: vésicule blanchâtre 4-6 mm dans cœur et muscles de l'orignal.
Taenia hydatigena (Cysticercus tenuicollis)
AMHD:Comme T. krabbei. HD: loup, coyote, renard, lynx, chien. AMHI: vésicule jusqu'à 25 mm dans
le foie ou la cavité abdominale contenant un parasite allongé (15-20 mm de longueur). La vésicule a
une partie plus étroite imitant un cou d'où le nom "tenuicollis" .
Echinococcus granulosus (kyste hydatique)
IMPORTANT. AMHD: ver plat de 6-8 mm de longueur. AMHI: vésicule blanche, peut être de la
grosseur d'une orange, dans les poumons, foie, rein, cavité abdominale. HD loup, coyote, chien.
L'homme peut se contaminer avec l'adulte et/ou les œufs, donc seulement en manipulant les
carcasses de carnivores infestés (et non d'herbivores).
Wehrdikmansia cervipedis
Nématode dont les microfilaires sont présents dans les tissus sous-cutanés de l'orignal et causent une
dermatite. Les microfilaires sont transmis entre orignaux par les insectes suceurs ou piqueurs.
Dictyocaulus viviparus
Nématode, 10 cm de longueur, dans les bronches. Environ 3 % des orignaux infectés dans les
Réserves des Laurentides et de Matane. Peut causer une pneumonie sévère.
Elaeophora schneideri. Au Canada, seulement en Colombie Britannique.
Dermacentor albipictus
Tique "d'hiver" (arthropode). Importante parce que cause de lourdes mortalités chez l'orignal
suite à l'automutilation et l'alopécie.
Distribution: Très fréquente partout au Canada. Elle parasite surtout les orignaux, qu'elle infeste en
grand nombre. Plusieurs cas rapportés au Québec. Plus souvent rencontrée à la fin de l'hiver. On voit
alors les tiques adultes attachées à la peau des oreilles, du cou, de l'encolure, entre les pattes et
autour de l'anus.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Cycle: Après avoir pris un dernier long repas de sang en mars et avril, les tiques adultes se
reproduisent et tombent sur le sol. Elles déposent leurs œufs et meurent au début de juin. Les œufs
éclosent en juillet mais les petites larves restent au repos sur les feuilles jusqu'au début de l'automne.
En septembre et octobre, les tiques montent sur la végétation et forment des masses de plusieurs
centaines de larves de 1 à 2 mètres au-dessus du sol, juste à la hauteur des ongulés hôtes. Ces amas
sont stimulés par les animaux qui passent à proximité et s'attachent à leur pelage. Une fois que les
larves sont sur l'hôte, en septembre et octobre, elles se déplacent sur la peau et se dispersent
rapidement. Pendant les dix jours qui suivent, elles se nourrissent et muent en nymphes. Au cours de
l'hiver, les nymphes se nourrissent périodiquement et croissent lentement. En février, elles
commencent à muer en adultes.
Signes cliniques: Les hivers sans neige suivis de printemps précoce et les étés chauds favorisent la
survie des larves sur le sol. Pendant l'automne qui suit, les orignaux sont densément infestés. Puis, en
février, mars et avril, quand la tique devient adulte, l'irritation causée par l'attachement et les repas
peuvent emmener la destruction du pelage hivernal (le poil est perdu). Typiquement, l'alopécie débute
sur les épaules, puis s'étend crânialement vers le cou et caudalement le long du corps. Fréquemment,
le poil est complètement détruit, jusqu'à sa tige (le centre), qui est blanche. L'orignal est alors blanc.
L'animal très infesté se gratte et se frotte jusqu'à se causer de graves blessures, habituellement aux
flancs. L'infestation peut donc causer des mortalités, surtout à la fin de l'hiver.
Caribou
Taenia krabbei: voir orignal
Taenia hydatigena: voir orignal
Echinococcus granulosus: voir orignal
Dictyocaulus viviparus:
Parelaphostrongylus tenuis
Fascioloides magna: 48.9 % des foies positifs dans une étude par le Dr. JL Fréchette. Grosse vésicule au foie
contenant de grosses douves (4-6 cm de longueur).
Cerf de Virginie
Taenia hydatigena
Dictyocaulus viviparus
Parelaphostrongylus tenuis
Echinococcus granulosus
Dicrocoelium dendriticum (douve lancéolée du foie): 5-15 mm par 1.5-2.5 mm) dans les canaux biliaires.
Cephenemya phobifer: Oestre. Larve de mouche retrouvée dans les sinus (à partir de janvier-février). Larves
déposées durant l'été.
Wapiti
Fascioloides magna: cause de lésons graves chez wapiti (et orignaux). Parc National de Banff: 93 % des
wapitis adultes étaient infectés en 1989.
Lièvre d'Amérique
Taenia pisiformis
Taenia multiceps
Dirofilaria scapiceps
Passalurus ambiguus
Obeliscoides cuniculi
Haemaphysalis leporispalustris
Omnivores
Moufette, raton-laveur
Baylisascaris procyonis
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Pathologie de la faune 2002
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Ascaris du raton laveur, dans duodénum {2468}. Très important car zoonose.
Morphologie: mâle: 12 cm longueur, femelle: 23 cm.
Distribution: dans la région de Saint-Hyacinthe, 57 % des ratons-laveurs étaient infectés. (Travail de
Dr. Anna MacKay, Agriculture Canada, 1995). Dans les états américains du MidWest et du nord-est,
68 à 82 % des ratons-laveurs sont infectés.
Cycle: L'adulte vit dans le petit intestin du raton-laveur. Pas d'hôte intermédiaire. Quand les oeufs sont
expulsés à l'extérieur, la larve se développe dans l'oeuf et devient infectieuse en 3-4 semaines. L'oeuf
est très résistant dans l'environnement. Il reste infectieux pendant des années. Plusieurs petits
vertébrés (mammifères et oiseaux) s'infectent et deviennent porteurs en ingérant ces œufs. Les larves
migrent souvent dans le SNC de ces animaux (dont l'homme, surtout les enfants) et les rendent
malades (larva migrans).
Le raton-laveur s'infecte en ingérant l'oeuf ou la larve, à partir de fèces d'un autre raton-laveur infecté
ou par l'ingestion d'un hôte paraténique infecté (oiseaux, souris, chien, lapin, écureuil, poule et
plusieurs autres). La larve ingérée par un raton raton ne migre pas chez ce raton-laveur. Elle pénètre
la paroi intestinale, s'y développe puis retourne dans la lumière intestinale pour compléter son
développement. Il semble que seule la présence d'un très grand nombre de vers adultes dans la
lumière intestinale peut (rarement) tuer les jeunes raton-laveurs.
Période prépatente: 50 à 76 jours.
Transmission: les ratons-laveurs ont l'habitude de déféquer dans des endroits spécifiques (latrines)
fréquentés (et utilisés) par plusieurs ratons. Ces endroits, (base d'arbres, souches, base de roches)
deviennent très contaminés par les œufs. Les souris, tamias, écureuils, opossums (mammifères
granivores) visitent les latrines pour se nourrir des graines contenues dans les fèces de ratons et se
contaminent (JWD 35:4474-480, 1999).
Pathogénicité: la larve ingérée par l'humain traverse la paroi intestinale, emprunte la veine porte pour
aller au foie. Puis, elle atteint les poumons et les veines pulmonaires. De là elle migre dans les tous
les tissus. Il semble que la larve croît constamment lors de la migration, jusqu'à ce qu'elle soit arrêtée
par un granulome éosinophilique.
Symptômes et lésions : hyperthermie, leucocytose éosinophilique, hépatomégalie, pneumonie. Si les
larves atteignent le SNC: signes d'encéphalite. Si elles atteignent l'oeil: perte de vision, photophobie.
Inflammation rétinienne, de l'humeur vitrée et de la choroïde.
Prévention: interdire (...physiquement) l'accès des raton-laveurs aux carrés de sable, jardins, aux
poubelles, etc.
Crenosoma sp
bronchioles des ratons-laveurs
Capillaria plica
Vessie du raton-laveur.
Ours noir
Trichinella spiralis
IMPORTANT. Nématode infectant capable d'infecter à peu près tous les animaux à sang chaud. Les
animaux et l'homme s'infectent en ingérant des muscles infectés. Les animaux strictement carnivores
sont donc plus souvent infectés que les animaux omnivores. L'impact sur les animaux sauvages est
probablement faible. Les larves sont présentes dans les muscles de carnivores et même dans les
muscles de mammifères marins dont des cétacés. Très dangereux pour l'homme. La congélation n'est
pas efficace pour détruire les larves. Forte prévalence chez l'ours (omnivore) et aussi chez le loup
(s'infecte en mangeant le lynx, le renard roux, l'ours et même d'autres loups).
Dirofilaria ursi
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Pathologie de la faune 2002
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Nématode dont les adultes produisent des microfilaires transmis d'ours en ours par des insectes.
Femelle: 11 à 22 cm. Mâle: 5-9 cm. Retrouvé dans le tissu conjonctif péri-rénal ou le tissu sous-cutané
du cou. 57 % des carcasses positives au Québec.
Diphyllobothrium ursi
36 % des ours porteurs au Québec. L'homme et l'ours s'infestent à partir des plérocercoides contenus
dans le poisson. L'homme ne peut donc pas s'infecter en mangeant de l'ours.
Carnivores
Loups, coyotes,renards
Dirofilaria immitis (ver du cœur)
Ankylostomiase
Crenosoma vulpis
Nématode dans les bronchioles, bronches, trachée surtout chez le renard et chez le loup, coyote, et le
chien. Occasionnellement chez d'autres carnivores: ours brun, ours noir, martre, carcajou, blaireau.
Les renards plus âgés ont moins de vers, probablement parce qu'ils développent une immunité.
Cycle: hôte intermédiaire ingéré (escargots terrestres, limaces). Dans l'intestin, les larves migrent de
l'intestin vers le foie puis elles sont transportées par le sang jusqu'aux poumons. Elles s'installent dans
les bronches où elles atteignent leur maturité. 19 à 21 jours plus tard, les femelles adultes pondent
leurs œufs qui donnent naissance à des larves expectorées par la toux, puis avalées et évacuées par
les selles. Les escargots terrestres et les limaces s'infectent en se nourrissant des matières fécales
des animaux infectés. Les vers adultes peuvent vivre environ 10 mois dans les poumons de l'hôte.
Capillaria aerophila
Hôte: renard (jeune).
Site: poumons
Cycle: femelles adultes pondent œufs dans les voies respiratoires de leur hôte. Œufs libérés par
expectoration, lors de la toux. Sont avalés et sortent dans les fèces. Deviennent infectieux après 5-7
semaines de séjour à l'extérieur. Le futur hôte ingère les larves, la larve éclôt dans les intestins puis
migre aux poumons où elle devient adulte environ 40 jours plus tard. Les renards de moins de 18 mois
ont des infections sévères.
Lésions: bronchite catarrhale (production de grande quantité de mucus). Les œufs s'accumulent
probablement quand les renards emploient les mêmes terriers année après année. Pour la même
raison, l'infection se développe chez les renards d'élevage quand on laisse les selles (et donc les
œufs du parasite) s'accumuler dans les cages.
Mites
Sarcoptes scabiei
Maladie fréquente au Canada chez les renards et plus fréquente dans le Sud-Est américain (Georgie).
Le renard roux est très susceptible à l'infection et en l'absence de traitement l'animal infecté meurt en
2-3 mois. Les animaux infectés montrent de la dégénérescence testiculaire, probablement à cause de
l'hyperkératose qui cause l'hyperthermie.
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Pathologie de la faune 2002
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6.8.6 Conditions variées
Malnutrition
C'est probablement le facteur qui joue le rôle le plus important dans le contrôle de la densité de population des
ongulés sauvages dans les prairies et les Rocheuses. L'hiver, c'est une cause fréquente de mortalité chez ces
animaux, et chez les ongulés sauvages en général.
Pathogénie: Normalement, les cervidés perdent du poids pendant l'hiver. A des températures de -20oC, ils
sont dans un état d'énergie négative, c'est-à-dire qu'ils ne peuvent pas consommer assez de nourriture pour
compenser la perte d'énergie requise pour maintenir leur température corporelle. La capacité des cerfs à
survivre à l'hiver est influencée par plusieurs facteurs, dont le climat durant l'automne précédent (alors que les
réserves sont accumulées), ainsi que la sévérité et la durée de l'hiver, le sexe et l'âge des animaux. Elle
affecte surtout les faons et les animaux les plus âgés.
Susceptibilité: Les faons sont les plus vulnérables parce que leurs réserves de gras sont petites quand l'hiver
débute. Les mâles adultes sont les plus vulnérables après les faons à cause du rut qui interfère avec
l'alimentation et qui nécessite beaucoup d'énergie. Les femelles adultes sont les plus résistantes. Les hivers
rigoureux cependant peuvent entraîner la résorption fœtale ce qui a pour effet de diminuer les demandes en
énergie. La plupart des morts dues à la famine surviennent à la fin de l'hiver et tôt au printemps, quand la
neige a plus ou moins disparu mais alors que la végétation n'a pas encore poussé.
Le recours aux suppléments alimentaires donnés par l'homme aux herbivores sauvages en hiver est
problématique. D'une part, le fourrage peut entraîner l'impaction du rumen, et ne pas remplir les besoins
énergétiques de l'animal, d'autre part le grain riche en énergie peut provoquer des problèmes d'acidose parce
que les animaux sont habitués au fourrage naturel.
Par contre, les suppléments alimentaires soigneusement équilibrés peuvent diminuer la mortalité. Certains
cerfs atteignent cependant un point de non-retour dans la malnutrition même s'ils ont accès à l'alimentation
supplémentaire. Ces animaux ont de hauts niveaux de cortisol qui entraînent le catabolisme des protéines et
finalement l'insuffisance de plusieurs organes (même mécanismes que le syndrome de Cushing). Les humains
avec de l'anorexie nerveuse sont aussi hypercortisolémiques, bien qu'il ne soit pas clair si l'obsession pour la
diète vient avant la production excessive de cortisol ou si c'est l'inverse. La perte de poids précipite
l'hyperactivité de neurones hypothalamiques qui synthétisent l'hormone relâchant la corticotrophine (ACTH).
Les patients anorexiques et les cerfs affamés peuvent devenir prisonniers d'un cercle vicieux dans lequel la
perte de poids cause l'augmentation du cortisol qui entraîne à son tour la perte de poids.
Lésions: Atrophie musculaire, perte de gras (sous-cutané, autour du cœur, dans la moelle osseuse,)
dégénérescence mucoïde des gras, rumen vide ou presque, ingesta sec et dur dans l'intestin, absence
d'autres lésions.
Attrition dentaire
Il s'agit d'un phénomène normal dû au vieillissement. Chez les herbivores, il cause la mort en gênant la
mastication de la nourriture. Chez les ruminants, l'orifice réticulo-omasal agit comme un filtre à travers lequel
les particules au-dessous d'une certaine taille peuvent passer. La nourriture est mâchée, fermentée et
remâchée jusqu'à ce que la taille des particules alimentaires soit suffisamment petite. Un ruminant qui ne peut
mastiquer suffisamment la nourriture atteint un point où il ne peut transformer la nourriture assez rapidement
pour remplir ses besoins énergétiques.
Un taux accéléré d'attrition dentaire avec un désalignement dentaire secondaire a été rapporté chez certaines
population d'herbivores. Dans certains cas, cette attrition a été due à la déposition de sable sur les fourrages.
Dans d'autres cas, la surutilisation de pâturages par des populations animales trop denses a causé l'ingestion
de particules du sol.
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Surcharge gastrique (acidose)
Cette maladie a été diagnostiquée chez le cerf de Virginie et moins fréquemment chez l'antilope d'Amérique.
Cette maladie survient en hiver quand les animaux s'aventurent dans les fermes au cours d'hivers longs et
rigoureux (froid intense neige profonde).
Polioencéphalomalacie des ruminants
Étiologie Chez les animaux domestiques (bovin, mouton), cette maladie, un ramollissement et nécrose de la
substance grise du cerveau, est due à un dérangement dans le métabolisme de la vitamine B1 (thiamine).
Cette vitamine est très importante pour générer l'énergie (ATP) nécessaire au fonctionnement du cerveau. En
son absence, le cerveau enfle, la pression intracrânienne augmente, l'apport sanguin diminue et les neurones
meurent. La thiamine est produite normalement dans le rumen mais la production peut être gênée par un
changement subit de diète (beaucoup de grains), par l'ingestion d'eau contenant beaucoup de sulfates (étangs
salins, fréquents dans les Prairies canadiennes) et par l'ingestion de plantes sauvages contenant de la
thiaminase (fougères, queue de cheval (horse tail). La maladie survient chez les ongulés sauvages à l'automne
et pendant l'hiver, probablement parce que les ongulés sauvages vont se nourrir de grains dans les champs à
ces périodes de l'année.
Espèces susceptibles. Cette maladie a été diagnostiquée chez le cerf de Virginie, le cerf mulet et l'antilope
d'Amérique. Le rumen des animaux affectés contient habituellement de petites quantités de grain.
Lésions. Les lésions sont identiques à celles qui sont rencontrées chez les bovins domestiques (nécrose
laminaire du cortex cérébral, œdème cérébral). D'autres animaux ont des foyers hémorragiques dans le
thalamus et dans le bulbe rachidien.
Complexe abcès intracrânial-méningoencéphalite suppurée chez le chevreuil
4% des cerfs de Virginie soumis pour nécropsie souffraient de cette condition dans une étude américaine.
Arcanobacterium pyogenes ("anciennement"Actinomyces pyogenes) était la bactérie le plus souvent isolée et
les cas survenaient d'octobre à avril et s'observaient surtout chez des mâles. On croit que les mâles se
causent ces lésions pendant le rut en se frottant les bois contre les arbres, en affrontant d'autres mâles et
finalement peut-être à cause du stress nutritionnel propre à cette période 19.
Ostéoarthropathie dégénérative
Fréquence et distribution: Cette condition est fréquente chez plusieurs mammifères sauvages. Elle semble
être causée par le vieillissement. Chez les animaux servant de proie, elle contribue sûrement à éliminer les
animaux vieillissant. Chez le cerf de Virginie en Saskatchewan, l'ostéoarthropathie affectait le grasset
(articulation fémoro-rotulienne) chez 60 % des mâles de plus de 4 ans et chez 17 % des femelles de cette
catégorie d'âge. Des ostéophytes vertébraux (quelque fois accompagnés de spondylose ankylosante)
affectaient 50 % des mâles de plus de six ans mais pas les femelles.
Chez les orignaux de l'Isle Royale, lac Supérieur, Michigan, la maladie affecte les mâles plus que les femelles.
Au-dessus de sept ans les animaux sont affectés avec une prévalence significative et c'est précisément l'âge à
partir duquel les animaux sont le plus fréquemment victimes des loups. L'articulation coxo-fémorale est la plus
fréquemment atteinte suivie des vertèbres postérieures.
Étiologie: On croit présentement que la malnutrition chez le jeune produirait des anomalies subtiles du
cartilage qui évolueraient plus tard en ostéoarthropathie dégénérative.
Myopathie de capture
Aussi appelée rhabdomyolyse d'exercice. Elle affecte une grande variété de mammifères sauvages et
d'oiseaux mais a été observée le plus souvent chez les ongulés. Elle survient chez les animaux qui ont subi un
exercice violent, lors de la chasse ou de la capture, de la contention.
136
Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Pathogénie: provient de la contraction musculaire intense avec l'utilisation rapide du glycogène musculaire.
L'acide lactique s'accumule dans le muscle. L'acide lactique endommage le muscle et cause une acidose
métabolique sévère. Les lésions cardiaques peuvent être causées par la stimulation excessive du système
nerveux sympathique due au stress intense et aussi à l'hyperkaliémie due à la libération du potassium
intracellulaire contenu dans les fibres musculaires endommagées. L'hyperkaliémie est exacerbée par l'acidose
lactique. La surstimulation du système nerveux sympathique peut être suivie d'épuisement et de choc.
Un zèbre recevant une nutrition adéquate peut courir dans son habitat naturel pendant 20 à 30 minutes sans
épuisement. Le même animal emprisonné pendant longtemps dans un enclos ne peut courir que 2 à 3 minutes
avant de subir un stress sévère causant une myopathie sévère.
Signes cliniques: reflètent le dommage aux muscles squelettiques et au cœur. Ils peuvent survenir des
heures, des jours, des semaines après la contention. Certains animaux peuvent même mourir subitement des
séquelles de dommage cardiaque jusqu'à un mois après la capture sans montrer de signes cliniques avant la
mort.
Lésions : Les lésions macroscopiques sont plus fréquentes dans les gros muscles des membres postérieurs
(glutéaux, biceps femoris, semitendinosus, semimembranosus). Dépendant de la durée de la condition, les
muscles affectés peuvent être œdémateux ou pâles et secs. Dans les cas sévères, le muscle affecté peut se
rupturer. La rupture est accompagnée d'hémorragies sévères. La nécrose du myocarde peut être aussi
présente.
Prévention: Pour prévenir la condition, la contention des animaux doit durer un temps minimum et le stress
doit être minimisé. Les animaux ne devraient pas être confinés dans des espaces restreints. Dans ces
conditions, ils peuvent lutter continuellement et être incapables de mouvoir leurs membres et donc d'assurer
une circulation sanguine adéquate.
La capture d'ongulés sauvages pratiquée sur une grande échelle entraîne souvent des prévalences de
myopathie de capture de 2-3 %. Certaines interventions ont atteint des prévalences de 23 %. Lors de capture
de cerfs de Virginie avec des filets, la prévalence de la condition a diminué de 16 % à 6 % en aveuglant les
animaux, en augmentant la dose de tranquillisant, (xylazine) et en éliminant les bruits au site de capture.
Une déficience en vitamine E et en Selenium peut augmenter la susceptibilité d'un animal à la myopathie de
capture. Il n’y y a pas de rapport démontrant la déficience en sélénium chez les herbivores sauvages vivant
dans des régions pauvres en sélénium.
Traumas
Chevreuils
Les traumas, incluant ceux dus à la prédation, aux collisions avec les véhicules automobiles, aux projectiles
des chasseurs et aux blessures infligées par d'autres chevreuils sont la cause la plus fréquente de mort chez
les chevreuils (JWD 35:753-762 (1999).
Loups et coyotes
Les loups et les coyotes sont les prédateurs principaux en Saskatchewan du Nord et du sud, respectivement.
La plupart des lésions trouvées sur les carcasses sont dues à des combats entre les deux espèces. Dans une
étude en Saskatchewan, les lésions les plus fréquentes chez les loups sont les fractures (20 à 38% de toutes
les carcasses), et les côtes sont le plus souvent affectées. Les fractures des membres et du crâne sont moins
fréquentes. Chez le coyote, les fractures sont rares. Les blessures les plus fréquentes sont dues aux armes à
feu. A cet égard, la situation doit être semblable au Québec. Les épines de porc-épic peuvent
occasionnellement contribuer à la mort de coyotes et de loups. Chez les deux espèces, les pièges causent la
perte de quelques orteils. Ces blessures ne semblent pas porter à conséquence.
Donc, les loups se battent avec les coyotes. L'arrivée de loups sur une île par exemple mène rapidement à la
disparition des coyotes. Là où les deux espèces cohabitent, les loups sont responsables d'un pourcentage
élevé des morts de coyotes. C'est d'ailleurs pour cette raison que plusieurs éleveurs de moutons des
Appalaches sont favorables à l'introduction du loup dans cette région afin de faire diminuer la population de
coyotes.
Les coyotes, partis des Prairies, sont arrivés en Estrie dans les années 50 puis au Nouveau Brunswick (1966),
en Nouvelle-Écosse (1977) et en traversant la surface gelée du Détroit de Northumberland, à l’île du Prince
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Pathologie de la faune 2002
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Édouard (1983). La disparition du loup, le seul prédateur naturel du coyote, a contribué à l'augmentation du
nombre de coyotes. Dès 1900, le loup avait complètement disparu du Sud du Saint-Laurent, victime des
cultivateurs qui pratiquèrent l'empoisonnement sur une grande échelle.
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Pathologie de la faune 2002
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7. ANNEXES
8. Zoonoses
Maladie de Lyme
Hantavirus
Rage
Giardiase
Tuberculose
Peste
Fièvre pourprée des Montagnes Rocheuses (Rickettsia rickettsii)
Tularémie
Echinococcus
Baylisascaris
Chlamydiosis
Ecthyma contagieux
9. Maladies à connaître
Oiseaux
Cholera aviaire (P. multocida)
Peste des canards
Botulisme
Empoisonnement au plomb
Sarcocyste
Salmonellose
Maladie de Newcastle
Mammifères
Rage
Gale
Tiques
Ver du poumon
Tuberculose
Distemper
Vers plats
Tiques d'hiver
Ver des méninges et des muscles
Poissons
Tumeurs:
Lymphocystis (iridovirus)
Sarcome dermique du doré (rétrovirus)
Amphibiens
Aeromonas hydrophila (« red leg »)
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Pathologie de la faune 2002
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10. TAXONOMIE
Nom français
Nom anglais
Nom latin
Caribou des bois (en Amérique
du Nord)
("Renne" en Europe)
Orignal
Cerf de Virginie
Cerf mulet
Cerf à queue noire
Elk, red deer
Rocky mountain elk
Woodland caribou
Reindeer
Cervus elaphus
Cervus elaphus nelsoni
Rangifer tarandus
Moose
White-tailed deer
Mule deer
Black-tailed deer
Bison
Lièvre d'Amérique
Bison
Snowshoe hare
Alces alces
Odocoileus virginianus
Odocoileus hemionus
Odocoileus hemionus
colombianus
Bison bison
Lepus americana
Wapiti, cerf élaphe
Note: le renne et le caribou sont deux termes représentant le même animal. Le premier terme est utilisé en
Europe, le second en Amérique.
11. RÉFÉRENCES
Générales
-
-
Wobeser, GA. "Investigation and Management in Wild Animals". Plenum Press, 1994. 265 p. (très bon livre, bourré
d'exemples pratiques et souvent ...canadiens):
Human dominated ecosystems. Special issue. Science 277: 457-527. 1997
Revue "Emerging Infectious Diseases". L'abonnement est gratuit. Écrire à EID Editor,EID, CDC/NCID/MS C12. 1600 Clifton
Road, NE. Atlanta, GA 30333. USA. Il y a un numéro spécial sur les nouvelles maladies en sept. 98 (Vol. 4. No. 3). Aussi sur
le Net.
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Le Centre québécois sur la santé des animaux sauvages (CQSAS)
www.medvet.umontreal.ca/CQSAS/accueil_CQSAS.htm
Laboratoire de Santé Publique du Québec. 20045 chemin Sainte-Marie, Sainte-Anne de Bellevue
PQ, H9X 3R5. Louise Trudel (maladie de Lyme) Michel Couillard (Hantavirus)
Sites Web sur la pathologie médico-légale de la faune - http://www.vet.uga.edu/vpp/ia/SRP/vfp/links.html (réalisé par un étudiant
vétérinaire).
- U.S. Fish & Wildlife Forensics Laboratory in Ashland, Oregon: http://www.lab.fws.gov/
- Forensic Firearm Investigation: http://www.firearmsID.com/
-
-
Emerging infectous diseases: revue scientifique gratuite (sur le web ou en version papier)
www.cdc.gov/ncidod/eid/index.htm
Promed : cet organisme fournit des informations par courriel sur les maladies infectieuses ou
toxiques, humaines et animales, à l'échelle de la planète. Essentiel.
Pour abonnement: [email protected]
Santé Canada. Rapport de maladies infectieuses. www.hc-sc.gc.ca/hpb/lcdc/publicat/ccdr/
Centre Canadien Coopératif de la Santé de la Faune http://wildlife.usask.ca/ccwhcfr.htm
Pour des stages en faune:
Dr André Dallaire
Département de Pathologie et Microbiologie
Faculté de Médecine Vétérinaire
Saint-Hyacinthe
Dr Stéphane Lair
Département de Pathologie et Microbiologie
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Faculté de Médecine Vétérinaire
Saint-Hyacinthe
Dr Guy Fitzgerald
Faculté de Médecine Vétérinaire
Saint-Hyacinthe
Dr Linda Munson :
University of California School of Veterinary Medicine
Department VM-PMI
1126 Haring Hall, 1 Shields Ave
Davis CA 95616
Work: 530-754-7567
Fax : 530-752-3349
[email protected]
Dr. Frederic Leighton,
Department of Veterinary Pathology
Western College of Veterinary Medicine
Saskatoon, Saskatchewan
S7N OWO
Dr Elizabeth Williams
Wyoming State Veterinary Lab
University of Wyoming
1174 Snowy Range Road
Laramie WY 82070
Work: 307-742-6638
Fax: 307-721-2051
[email protected]
Dr Val Beasley, DVM, PhD, Diplomate, Am Bd Veterinary
Toxicology
Professor of Veterinary and Ecological Toxicology
Chairperson, Pharmacology and Toxicology
Director, Envirovet
Department of Veterinary Biosciences
College of Veterinary Medicine
University of Illinois at Urbana-Champaign
2001 South Lincoln Avenue
Urbana, IL 61802, USA
Phone:
217-333-9360 (office)
217-333-4756 (lab)
217-333-2506 (department office)
217-897-6209 (home)
Fax:
217-244-1652
E-mail:
[email protected]
Dre Alice HONTELA
Centre de recherche en toxicologie de l'environnement
UQÀM. 200, rue Saint-Alexandre, Local S2145
Montréal, H3C 3P8
Tel: 514 987 3000 ext6602
Fax: 514 987 4647
Email: [email protected]
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Pathologie de la faune 2002
Daniel Martineau
Dr Linda Lowenstine
I University of California School of Veterinary Medicine
Department VM-PMI
1126 Haring Hall, 1 Shields Ave
Davis CA 95616
Work: 916-752-1182
[email protected]
Quelques organismes impliqués dans la protection de
la nature
Africat: protection du guépard
Cheetah conservation Fund: protection du guépard.
Fonds mondial pour la nature (World Wildlife Fund):
Probablement le groupe le plus connu et mieux organisé. Budget $ 100 millions US par
an Va chercher des "sponsors" corporatifs tels que Canon, RCA, Toshiba, Ray Ban. Les
produits de ces compagnies sont annoncés sur le site Web de WWF. Les présidents de
ces compagnies sopnt sur les comités d'administration de WWF. Les fonds viennent
aussi des donateurs privés. Les donations sont déductibles d'impôt car contrairement à
Green peace, l'organisme est reconnu par Revenu Canada.
Greenpeace:
Organisme radical bien organisé. Coup dur en 1999: Revenu Canada ne reconnaît plus
le statut d'organisme de charité . Les donations ne sont donc pas déductibles d'impôt.
Les revenus du groupe diminuent.
Wildlife Conservation Society - New York
Administre le zoo du Bronx
-
"Le problème avec les groupes environnementaux est
qu'ils ne peuvent jamais être satisfaits de ce qui a été fait
par l'industrie ou le gouvernement. S'ils l'étaient, ils
perdraient leur raison d'être".
David Anderson, ministre de l'Environnement du Canada (Oct. 1999)
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