Culture et Economie Sociale et Solidaire : quels enjeux? Quelles réponses ? synthèse de l’enquête Objectifs et méthodologie Focalisée sur les structures employeuses, la synthèse publiée par la CRESS et l’ARCADE PACA en décembre 20131 met en lumière d’une part le poids du secteur culturel dans le paysage régional de l’ESS, d’autre part la proportion des structures relevant de l’ESS parmi l’ensemble des opérateurs culturels en PACA. Dans le prolongement de cette première démarche, l’enquête menée par Les Têtes de l’Art pendant l’été 2015 a pour but de permettre aux acteurs culturels d’exprimer leurs perceptions, leurs besoins et leurs attentes vis-à-vis du champ de l’économie sociale et solidaire. Notre démarche Un questionnaire en ligne ouvert entre le 19 mai et le 18 septembre 2015 adressé à un panel d’acteurs du tiers-secteur culturel de la région PACA (associations, coopératives, etc.) comprenant une centaine de questions. Des rencontres organisées entre le 12 et le 29 juin 2015 dans chaque département de la région PACA pour échanger avec les structures concernées autour des différentes thématiques abordées par l’enquête. 45 personnes représentant 35 structures (opérateurs culturels et acteurs de l’accompagnement) ont ainsi été mobilisées. Cette enquête n’a pas vocation à présenter un tableau exhaustif des pratiques de l’ESS par les acteurs artistiques et culturels. L’intérêt de cette synthèse réside dans la qualification du rapport qu’entretiennent les acteurs du tiers culturels avec l’économie sociale et solidaire. Caractérisation des répondants 94 structures ont répondu au questionnaire 94% sont des associations loi 1901 83% sont employeuses 47% d’entre elles appartiennent aux filières du spectacle vivant et de la musique Une grande diversité d’âge et de taille de structures Un nombre de répondants très inégal selon les départements Les principales limites de cet échantillon sont les disparités territoriales et la faible représentation de certaines filières d’activité2. Si ces faiblesses sont regrettables, l’échantillon reste toutefois cohérent avec la répartition territoriale et sectorielle des établissements culturels relevant de l’ESS recensés dans la région. filière d’activité des répondants Le rapport des acteurs culturels à l’ESS un besoin de compréhension renforcé par un fort sentiment de proximité Une connaissance parcellaire du paysage de l’ESS Qu’il s’agisse de la loi ESS de juillet 2014 ou des instances de représentation, les opérateurs culturels sont assez peu familiers avec le paysage institutionnel de l’économie sociale et solidaire. Ils ont en revanche une meilleure connaissance des acteurs de terrain, même s’il subsiste une relative confusion sur leur rôle : la différenciation entre les acteurs faisant partie statutairement de l’ESS et ceux faisant de l’ESS leur activité principale n’est pas toujours très claire aux yeux des répondants. êtes-vous familier avec : avez-vous besoin d’aide à la compréhension de l’ESS ? Cette connaissance parcellaire se révèle également par le nombre important de réponses incertaines tout au long de l’enquête. 39% des répondants déclarent par exemple ne pas savoir s’ils souhaitent être représentés dans les instances de l’ESS. Les acteurs formalisent d’ailleurs clairement leur besoin d’aide à la compréhension du champ et des pratiques de l’ESS. Proximité et perception positive de l’ESS à quel(s) champ(s) vous sentez-vous appartenir ? Malgré ces incertitudes, les structures interrogées font état d’un fort sentiment d’appartenance à l’économie sociale et solidaire. Cette proximité est exprimée tant à travers l’existence d’une communauté de valeurs – les grands principes de l’ESS font sens pour les acteurs culturels – que dans l’intérêt qu’ils portent à ses acteurs et à ses espaces de représentation. 50% à 70 % des répondants se reconnaissent dans les principes suivants : Primauté des personnes et de l’objet social sur le capital Utilité collective et sociale du projet Gestion et gouvernance démocratique Transparence à l’égard de ses membres / de la communauté 68% des répondants expriment un intérêt fort pour la mise en lien des acteurs culturels avec ceux de l’ESS 51% des répondants souhaitent être représentés dans les instances de l’ESS, directement ou par un tiers Des besoins formulés… aux impacts attendus Si la majorité des acteurs interrogés formule clairement un besoin d’appui à la compréhension de l’ESS, les réponses sont beaucoup plus partagées quant au soutien attendu sur la mise en œuvre de ses pratiques au sein des organisations. De la même manière, l’impact des pratiques de l’ESS sur les modèles organisationnels des répondants n’est pas toujours évident. Toutefois, les opérateurs ayant intégré des pratiques de l’économie sociale et solidaire dans leurs organisations relèvent des bénéfices sur leur gouvernance, leur modèle économique et la qualité de leurs partenariats. quels sont les critères qui vous permettent de définir votre territoire ? Territoire & coopération L’attention portée à l’ancrage territorial et les habitudes de travail en réseau sont les pratiques concrètes qui rapprochent le plus le tiers secteur culturel du champ de l’ESS. Au regard des déclarations des acteurs interrogés, ces deux éléments apparaissent par ailleurs comme intrinsèquement liés : 94% des répondants coopèrent essentiellement avec des acteurs de leur territoire tandis que pour 60% d’entre eux, les réseaux d’acteurs auxquels ils appartiennent sont un critère de définition de leur territoire d’intervention. La qualification et l’évaluation de l’impact social de leurs activités restent plus difficile à mettre en place pour les acteurs culturels : sur ce volet, les méthodes et outils développés par le champ de l’ESS peuvent constituer des ressources utiles. 60% des répondants appartiennent à un ou plusieurs réseaux 63% des répondants intègrent les ressources du territoire dans leur projet 47% fondent leur projet associatif dans la réponse à un besoin social 27% d’entre-eux qualifient et évaluent régulièrement leur impact social gouvernance La question de la gouvernance est celle sur laquelle les pratiques des acteurs culturels sont les plus hétérogènes et les plus éloignées des principes de l’ESS. En effet, les répondants témoignent de difficultés à ouvrir des espaces d’échanges avec leurs publics, qu’il s’agisse de les intégrer à la gouvernance ou de prendre en compte leurs expériences d’usagers. En revanche, la transparence de l’information à l’égard des parties prenantes, ainsi que l’association des salariés et des bénévoles dans les processus de définition des projets sont des priorités pour la majorité des acteurs interrogés. La rencontre avec le champ de l’économie sociale et solidaire pourrait constituer, pour les opérateurs culturels, une opportunité intéressante de réinterroger leurs modèles de gouvernance, point de fragilité souvent identifié dans ce secteur3. 69% des répondants déclarent associer les salariés et bénévoles aux processus de définition des projets, et 63% déclarent informer toutes les parties prenantes de l’organisation des décisions prises. 45% des répondants ne font pas une priorité d’intégrer les usagers / les publics dans les instances de décision de la structure et seulement 27% déclarent mettre en place des outils permettant un retour des usagers / des publics sur leurs activités. Modèle économique La consolidation des modèles économiques est la thématique sur laquelle les acteurs culturels formulent les attentes les plus nombreuses et les plus claires vis-à-vis des pratiques de l’ESS. La répartition des ressources dans le budget global des structures interrogées montre qu’elles ont déjà intégré dans leurs pratiques le principe de diversification des ressources, entre financements publics et ressources propres. Poursuivre cette diversification, y compris via des outils financiers spécifiques à l’ESS, et hybrider ses ressources par le développement des contributions non monétaires et des financements privés sont les priorités pour lesquelles les acteurs interrogés formulent un fort besoin d’appui. Quels leviers ? Quelles réponses ? Mise en connexion des réseaux sur les territoires L’accès à l’information est le principal besoin des acteurs culturels pour saisir l’intérêt du rapprochement avec le champ de l’ESS. L’enquête relève que le travail en réseau constitue à la fois la source première d’information des opérateurs culturels et une pratique commune avec l’économie sociale et solidaire. La mise en connexion des réseaux professionnels de la culture et de l’ESS sur les territoires semble donc être un levier pertinent à la mise en commun des savoirs et des pratiques. Coordination de l’appui au secteur culturel Les opérateurs culturels plébiscitent l’accompagnement comme modalité de réponse aux besoins identifiés. Ils déclarent toutefois avoir peu recours aux dispositifs d’accompagnement et manquer d’information à leur propos. 60% des répondants n’ont pas bénéficié d’accompagnement 61% d’entre eux ne disposent pas d’information sur ces dispositifs Parmi les acteurs ayant été accompagnés, une large majorité a bénéficié du Dispositif Local d’Accompagnement (58%), dispositif très sollicité par les structures culturelles4. Cette enquête montre qu’il reste un réservoir important de structures culturelles à accompagner, alors même que le secteur n’est pas / plus prioritaire dans la majorité des départements de PACA. Mobiliser l’ensemble des acteurs de l’accompagnement autour de cette question permettrait de coordonner et de diversifier l’appui au secteur culturel, et d’optimiser l’information à l’adresse des structures et porteurs de projets. Remerciements : Nous tenons à remercier les personnes ayant répondu à l’enquête, ainsi que tous les partenaires ayant relayé l’enquête dans chaque département : ARCADE PACA, Dispositifs Locaux d’Accompagnement, Réseaux Locaux d’Accompagnement, Pôles d’Appui à la Vie Associative, UDESS / UTESS. *Les données complètes de l’enquête sont accessibles sur demande : adressez vous à [email protected] Focus #2 Culture et ESS, décembre 2013, CRESS PACA Ces limites sont aussi celles des moyens de l’enquête, réalisée sur les ressources internes de l’association et grâce aux relais volontaires des acteurs de l’accompagnement dans chaque département. 3 Voir le Kit Culture DLA réalisé par Opale : http://kitculturedla.opale.asso.fr/thematiques/gouvernance/ 4 20% des structures accompagnées par le DLA en région Paca en 2013, selon l’analyse régionale DLA 2014, CRESS PACA 1 2