AFPP-DIXIEME CONFERENCE INTERNATIONALE SUR LE RAVAGEURS EN AGRICULTURE MONTPELLIER-22 ET 23 OCTOBRE 2014 IDENTIFICATION DES CARABIDES DANS UN CHAMP DE CEREALES SITUE EN ALGERIE N. OUCHTATI1 et S. DOUMANDJI2 1 Département d’écologie et de génie de l’environnement. Université de Guelma. Algérie 2 Institut d’agronomie, laboratoire de biologie animale, El harrach, Alger. Algérie RESUME Une étude sur le peuplement de carabidés a été réalisée durant deux cycles annuels 1998 et 1999 dans un champ de céréales (blé et orge) situé dans une région steppique au nord-est de l’Algérie. L’inventaire des carabidés a révélé la présence de 30 espèces appartenant à 3 sous-familles : Carabinae, Harpalinae et Brachininae Les espèces les plus abondantes sont respectivement : Campalita madera, Graphipterus exclamationis et Calathus mollis. La richesse spécifique et les effectifs varient d’une année à une autre. La majorité des espèces sont prédatrices ou polyphages, les phytophages sont moins nombreux. L’activité des espèces se situe essentiellement pendant la période du printemps. Mots -clés : carabidés, champs, céréales, steppique, Algérie. ABSTRACT A study of ground beetle (Carabidae) was carried out during 1998-1999 in a cereal field (wheat and barley) situated in a steppe area located in North East of Algeria. In total 30 species belonging to three sub-families: Carabinae, Harpalinae and Brachininae were observed. The most abundant species were: Campalita maderae , Graphipterus exclamationis and Calathus mollis. The species richness and the number of individuals were different between the two years. The predator species were more frequent than the polyphagous and phytophagous species. The activity of the species was mainly observed during the spring period. Keywords: ground beetle, fields, cereals, steppe, Algeria. INTRODUCTION La famille des Carabidae est un des familles de Coléoptères la plus diversifiée, plus de 40,000 espèces ont été inventoriées dans le monde (Dajoz, 2002). Ils ont colonisé tous les milieux terrestres et sont bien présents dans les agroécosystèmes. Bien que quelques espèces soient phytophages, la majorité des espèces de carabidés sont considérés comme des auxiliaires des cultures. Ils s’attaquent notamment aux mollusques (œufs ou adultes de limaces, escargots), ainsi qu’aux larves et adultes de petits insectes, tels que les taupins, les cicadelles, les chenilles ou encore les pucerons, ravageurs majeurs en grandes cultures (Viscardi, 2011). En Algérie les études concernant les peuplements de carabidés restent dans leur ensemble peu nombreux. La région de Tébessa est bien connue par l’importance de la culture de céréales, mais également par les faibles rendements dus en partie aux attaques des insectes. La protection des cultures de céréales est assurée actuellement uniquement par une lutte chimique préventive, ce qui peut engendrer l’apparition d’insectes ravageurs résistants aux pesticides, des pollutions environnementales sans oublier un impact négatif sur la faune auxiliaire. Pour développer une stratégie plus efficace de protection de ces cultures, nous nous sommes penchés sur l’étude du peuplement de carabidés dans la région de Tébessa. Notre travail a pour objectif l’identification de la faune carabique qui présente un intérêt dans les agroécosystèmes. MATERIEL ET METHODE Zone d’étude La Wilaya de Tébessa se situe à au Nord- Est de l’Algérie (35°20’ N, 8° 6’ E, Altitude 960m). Sa superficie est de l’ordre de 13,878 Km2. Elle se rattache aux steppes orientales des hautes plaines Sud-Constantinoises. La région de Tébessa appartient à l’étage bioclimatique semi-aride caractérisé par un hiver froid et un été très chaud. Les variations mensuelles des précipitations et des températures sur une période de 38 ans (1972-2010) montrent que la température moyenne est de l’ordre de 16,05°C. Les précipitations sont de l’ordre de 375 mm. La végétation de type steppique est marquée par une absence d’arbres, une abondance de plantes herbacées dominées par l’Alfa (Stipa tenacissima L.), l’Armoise et l’Atriplex. On trouve quelques montagnes peuplées de forêts très dégradées de pin d’Alep. Les terres agricoles occupent une surface importante, les principales productions sont les céréales, les fourrages et les cultures maraichères. L’étude est menée dans une parcelle de céréales (Blé et orge) de 3 ha, située à l’ouest de la ville de Tébessa à une altitude de 815 m , longitude 8°03’ et une latitude de 35°25’. Le milieu est dominé par quelques plantes spontanées telles que : Artemisia herba alba L. ; Artemisia campestris L. et Rosmarinus officnalis L. Echantillonnages Nous avons utilisé des méthodes de prélèvement par piégeage passif de type pots de Barber. Il s’agit de pots remplis d’acide acétique dilué à 30% enterrés dont le haut du piège arrose la surface du sol, interceptant les insectes terricoles, et particulièrement les coléoptères carabidés. Les pièges sont disposés à une distance de 5 mètres l’un de l’autre de façon à ce qu’il n’y ait pas interaction entre les pots. Les pièges sont disposés en 4 unités d’échantillonnage chaque unité est composée de 4 pièges placés au sommet d’un carré de 5m de côté. Les pièges sont visités chaque semaine pendant deux années successives (1998-1999), ceci à raison d’une fois par semaine. Les identifications sont effectuées jusqu’à l’espèce, par comparaison avec des références (collections du laboratoire d’entomologie du muséum d’histoire naturelle de Paris et la collection d’Antoine de l’institut scientifique de Rabat (Maroc) et l’utilisation de la littérature disponible : Bedel (1895) et Antoine (1955-1962). Les données sur le régime alimentaire des espèces ont été obtenues en consultant les ouvrages suivants : Casale et al. (1982) ; Mehenni (1993) ; Maachi (1995) et Dajoz (2002). RESULTATS Le tableau I montre les différentes sous familles et espèces de carabidés échantillonnés. Notre étude a permis de recenser 30 espèces réparties en trois sous-familles : Carabinae , Harpalinae et Brachininae. La sous-famille des harpalinae est la plus nombreuse en espèces ; elle compte 25 espèces. Les espèces qui dominent dans le milieu sont : Campalita maderae , Graphipterus exclamationis et Calathus mollis Tableau I : liste et nombre des sous-familles et des espèces capturées en 1998 et 1999 List and numbers of sub-families and species trapped in 1998 and 1999 Sous familles Carabinae Harpalinae Brachininae Espèces Macrothorax morbillosus Fabricius, 1792 Campalita maderae Fabricius, 1775 Campalita olivieri Dejean, 1831 Poecilus decipiens Waltl, 1835 Angoleus crenatus Dejean, 1828 Calathus mollis Marshamm, 1802 Pristonychus deneveui Fairmaire, 1858 Paracelia simplex Dejean, 1828 Carterus dama Rossi, 1792 Carterus debilis La Brulerie, 1873 Carterus interceptus Dejean, 1831 Ditomus sphaerocephalus Olivier, 1795 Ditomus clypeatus Rossi, 1790 Ophonus pumilio Dejean, 1829 Harpalus punctatostriatus Dejean, 1829 Harpalus lethierryi Reiche, 1859 Harpalus attenuatus Stephens, 1829 Harpalus fuscipalpis Sturm, 1818 Acinopus sabulosus Fabricius, 1792 Acinopus gutturosus Buquet, 1840 Dregus glebialis Coquerel, 1858 Parophonus hispanus Rambur, 1838 Trichochlaenius chrysocephalus Rossi, 1790 Dinodes decipiens Dufour, 1820 Licinus punctatulus Fabricius, 1792 Graphipterus exclamationis (Fabricius, 1792) Lebia cyanocephala (Linnaeus, 1758) Cymindis setifensis Lucas, 1842 Brachinus sclopeta Fabricius, 1792 Brachinus immaculicornis Dejean, 1825 Effectifs 1998 1 20 1 1 1 16 1 1 0 0 1 1 1 1 1 1 0 1 0 1 4 3 4 1 3 26 1 8 1 1 Effectifs 1999 1 4 0 0 1 6 0 0 1 2 0 0 0 1 0 0 1 1 1 1 2 3 1 1 0 7 1 0 1 1 Abondance Les effectifs sont différents en fonction des années, les valeurs les plus élevées sont enregistrées pendant l’année 1998 (figure 1). 120 Nombre d' individus 100 80 60 40 20 0 1998 1999 Figure 1 : Abondance des Carabidae dans les années 1998 et 1999 Abundance of Carabidae in 1998 and 1999 Activité des espèces L’évolution des effectifs capturés dans le temps (figure 2) montre que les captures les plus importantes ont été observées pendant le printemps. Pendant l’automne et le début d’hiver les espèces aussi peuvent être actives mais à un degré moindre Nombre d 'individus 60 1998 50 1999 40 30 20 10 0 Mois Figure 2: Evolution des effectifs de Carabidae capturés en 1998 et 1999 Time variation of numbers of Carabidae trapped in 1998 and 1999 Mode trophique Nous avons classé les espèces de Carabidae capturées en fonction de leur régime alimentaire : les prédateurs, les phytophages et les polyphages (alimentation mixte à la fois de nature animale et végétale) (Tableau 2). . La catégorie des prédateurs présente les pourcentages le plus élevés de tous les statuts trophiques des carabidés recensés. Cette catégorie comprend non seulement le nombre d’espèces le plus important mais aussi les effectifs les plus nombreux. Les polyphages occupent la deuxième position avec 9 espèces représentant 15% des effectifs capturés. Enfin, les phytophages sont classés en dernière position avec 7 espèces ne représentant que 5% des effectifs observés. Tableau II: Nombre d’espèces et effectifs des Carabidae répartis suivant les trois catégories trophiques Number of species and specimens of Carabidae displayed in the three feeding behavior categories Régime alimentaire Prédateurs Polyphages Phytophages Nombre d’espèces 15 9 7 Effectifs 109 21 7 % des espèces 48,38% 29, 03% 22,58% % des effectifs 78,98% 15,21% 5,07% Evolution des catégories trophiques dans le temps 40 35 30 25 20 15 10 5 0 Prédateurs Polyphages décembre novembre octobre septembre aôut juillet juin mai avril mars février Phytophages janvier Nombre d'individus La figure 3 indique que les prédateurs ont deux périodes d’activité, une qui commence à la fin de l’automne et se termine en hiver et l’autre au printemps où l’activité est beaucoup plus prononcée. Concernant les espèces polyphages et phytophages elles ne sont actives que pendant le printemps. Figure 3 : Evolution des catégories trophiques de Carabidae en 1998-1999 (cumulées) Time variation of feeding behaviour of Carabidae in the years 1998 -1999 (cumulated) DISCUSSION Les captures des carabidés réalisées dans une culture de céréales durant deux cycles annuels (1998/1999) ont révélé la présence de 30 espèces. La dominance des espèces campalita maderae, Graphipterus exclamationis et Calathus mollis est certainement due aux facteurs abiotiques favorables (texture et humidité du sol par exemple). Ces trois espèces sont prédatrices. Campalita maderae est une espèce qui est très liée aux milieux de cultures et l’espèce Graphipterus exclamationis est inféodée aux zones semi-arides. Quant à l’espèce Calathus mollis elle est probablement attirée par la texture du sol qui est limono-sableux. Cette espèce est reconnue psammophile. (Idrissi, 1984) Les abondances et les richesses spécifiques sont différentes entre les deux années, l’année 1998 a été la plus productive en termes d’espèces et d’individus. Ces différences interannuelles sont certainement liées aux variations des conditions climatiques de la région. Les données sur le comportement alimentaire des espèces indiquent que le milieu d’étude est fréquenté par un nombre important d’espèces prédatrices qui peuvent être utiles aux cultures, c’est le cas de Campalita maderae qui est bien connue pour son rôle dans le contrôle des ravageurs (Viscardi, 2011). Citons également l‘espèce Brachinus sclopeta qui se nourrit de pucerons (Ctifl , 2011) et Macrothorax morbillosus et Licinus punctatulus qui sont spécialisées dans la consommation de gastéropodes, de limaces ou de vers de terre (Dajoz , 2002) Le groupe des polyphages même si il ne représente que 5% des effectifs peut aussi contribuer à la régulation des populations d’insectes nuisibles car il peut se nourrir de matière organique animale sous différentes formes. Citons par exemple les espèces Harpalus punctatosriatus, Harpalus lethiery, Acinopus gutturosus et Acinopus sabulosus. D’après Brandmayr et al. (2005), les polyphages augmentent dans les milieux perturbés tels que les cultures. Les espèces phytophages sont moins nombreuses on distingue par exemple Ditomus opacus et Ditomus clypeatus qui se nourrissent exceptionnellement de graines de plantain. L’évolution des catégories trophiques dans le temps montre que la période d’activité des espèces est probablement liée à leurs régimes alimentaires, les prédateurs et les polyphages peuvent être actifs pendant l’hiver et le printemps (les proies peuvent être disponible dans ces deux périodes )alors que les phytophages sont uniquement actifs pendant le printemps , période où la nourriture de nature végétale est la plus disponible. CONCLUSION L’étude de la diversité de carabidés réalisée au sein d’une culture de céréales au cours de deux cycles annuels nous a permis de répertorier 30 espèces. Les abondances et les richesses spécifiques ont révélé des différences interannuelles certainement dues aux variations climatiques qui règnent dans la région. Les espèces ont montré un pic d’activité au printemps ce qui semble lié à l’amélioration des conditions climatiques et l’abondance des micro-milieux pendant cette période (la végétation devenant plus dense offre des abris nombreux aux espèces). Notre inventaire compte un nombre important d’espèces prédatrices et polyphages qui peuvent être des auxiliaires de nombreux ravageurs. Ces espèces méritent donc une attention particulière dans l’optique d’assurer une gestion optimale de la diversité dans un cadre de réduction d’application de pesticides et d’un développement durable. REMERCIEMENTS Nous remercions le professeur A. Casale, du Département de Zoologie et Anthropologie, Université de Sassarie. Nous tenons à remercier aussi le professeur T. Deuve, du Muséum National Histoire Naturelle, Paris et nous sommes très reconnaissants au professeur M. Mouna qui nous a permis de consulter la collection des carabidae d’Antoine à l’institut scientifique de Rabat. BIBLIOGRAPHIE Antoine M., 1955–1962. Coléoptères Carabiques du Maroc. I-V. Mémoires de la Société de Sciences Naturelles et Physiques du Maroc, Zoologie (n.s.), Rabat , 694 p. Bedel L., 1895. Catalogue raisonné des coléoptères du Nord de l’Afrique (Maroc, Algérie, Tunisie,Tripolitaine) avec notes sur les îles de Canaries .Nabu Press ,Paris, 401p. Brandmayr P., Pizzolotto R., Zetto Brandmayr T., 2005. I coleotteri carabidi per la valutazione ambientale e la conservazione della biodiversità.-APAT, Manuali elinee guida, 34. Casale A., Sturani M ., Vigna _Taglianti A ., 1982.Fauna d‘Italia coleoptera carabide I. Introduzione , paussinae , carabinae . Edizioni Calderini ,Bologna , 379p. Dajoz R. , 2002. Les coléoptères carabidés et ténébrionidés. Ecologie et biologie.Tec & DocParis.522p. Ctifl. 2011. 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