8 #2 III. Végétation et pollution de l’air Les polluants atmosphériques présents en ville sont principalement liés aux véhicules, au chauffage des bâtiments résidentiels et tertiaires, et aux activités humaines. Il s’agit de polluants gazeux primaires (oxydes d’azote, composés organiques volatils, etc.), secondaires (ozone), mais aussi de particules de diamètre variable (PM10, PM2,5 voire PM1). Les interactions entre les polluants et les végétaux varient selon le type de polluant. Les polluants qui ont fait l’objet de plus de travaux publiés à ce jour sont le dioxyde d’azote (NO2) et les particules. Les polluants gazeux pénètrent majoritairement dans les feuilles via les stomates, puis se diffusent dans les espaces intercellulaires. Certains peuvent s’accumuler sur les feuilles et y pénétrer ensuite ou être dégradés par les microorganismes présents en surface. Après accumulation dans les tissus foliaires, selon leur nature, les polluants peuvent être stockés, biodégradés ou métabolisés et éventuellement exercer des effets toxiques sur les végétaux. Les particules se déposent sur les feuilles par gravité ou sous l’effet du vent. Elles peuvent être retenues en surface grâce à la texture rugueuse des feuilles, mais aussi grâce à la présence de poils et de cires sur celles-ci. Par la suite, selon leur solubilité et leur taille, certaines peuvent pénétrer à l’intérieur des feuilles via la cuticule ou des blessures foliaires. D’autres seront remises en suspension dans l’air, la végétation n’étant alors qu’un site de rétention temporaire (Voir schémas ci-contre). L’entrée des polluants gazeux comme particulaires est influencée par des paramètres environnementaux (vent, température, humidité, lumière), les propriétés physico-chimiques des polluants, ou encore les caractéristiques végétales (espèce, âge, stade physiologique, état sanitaire de la plante) qui agissent sur les stomates et la surface foliaire. Le dioxyde d’azote (NO2) Des tests de fumigation en laboratoire sur plus de 200 espèces végétales (herbacées sauvages, cultivées, arbustes et arbres) classent le magnolia de Kobé, le gommier blanc et le peuplier noir parmi les espèces à forte capacité d’assimilation pour le NO2 et, selon les auteurs, sont de ce fait adaptées pour une implantation dans les espaces verts près des routes. Par modélisation, ils ont estimé que le recouvrement des murs et des toits des bâtiments et des axes routiers du bassin de Los Angeles avec du pétunia aboutirait à l’assimilation de près de 16 000 tonnes de NO2 par an, ce qui correspond à 3,1 % des émissions annuelles liées au trafic routier dans cette zone12. De façon générale, d’après les études, les arbres à feuilles caduques auraient de plus fortes capacités d’assimilation par rapport aux espèces à feuilles pérennes, mais leur effet disparaitrait en hiver avec la chute des feuilles. Les légumineuses, dont font partie le robinier faux acacia ou le trèfle, présentent un intérêt particulier lié à leur capacité à former une symbiose avec des bactéries du sol du genre Rhizobium. En effet, cette association confère aux légumineuses la capacité de fixer l’azote de l’air au sein de nodules racinaires, les bactéries permettant de réduire l’azote atmosphérique en ammonium, directement assimilable par les plantes. Notons que dans ce cas, le piégeage se fait au niveau des racines et non des feuilles. Les toitures végétales pourraient jouer un rôle complémentaire, des travaux de modélisation ayant évalué que le recouvrement de 20 % des toitures des locaux commerciaux et industriels de Détroit avec du Sédum entraînerait une diminution des concentrations de NO2 dans l’air de près de 900 tonnes par an13. Les particules Les conifères (pin, cyprès, épicéa) apparaissent plus efficaces pour l’accumulation des particules par rapport aux feuillus, en raison de leur surface foliaire plus adhésive (cuticule plus importante) et de leur grande surface spécifique pour les récupérer14. Ceci est particulièrement vrai pour les plus grosses particules (PM10). En revanche, les résultats divergent en ce qui concerne les PM2,5 et les PM1, certaines expérimentations menées sur le terrain confirmant que le piégeage des fines particules est plus important par les conifères, d’autres ne mettant pas en évidence de différence nette entre conifères et feuillus (érable, peuplier et alisier blanc)15. L’arrangement des feuilles sur les arbres et leur quantité ont également une influence, et il a été montré qu’un feuillage dense mais restant suffisamment accessible (l’air doit pouvoir circuler) favoriserait le piégeage des particules. Ainsi, les valeurs optimales estimées sont respectivement de 0,7 à 0,85 pour la densité du couvert végétal, et de 0,25 à 0,33 pour la porosité du feuillage16. Par ailleurs, certains auteurs ont estimé que 2000 m2 d’herbes non coupées sur une toiture végétale pourraient piéger jusqu’à 4 tonnes de particules. L’efficacité de piégeage par les toitures végétalisées varie en fonction des espèces et de la croissance des plantes, mais aussi de la concentration en polluants et des conditions météorologiques. Ainsi, elle sera plus importante au moment où les feuilles des plantes seront complètement développées, et plus faible lorsque celles-ci seront recouvertes d’eau ou de neige17. Les plantes grimpantes sur les façades des bâtiments pourraient aussi jouer un rôle, comme le lierre qui est capable d’absorber les particules de diamètre inférieur à 2,5 et 1 µm avec un rendement