CAS CLINIQUE
La Lettre du Cancérologue • Vol. XVIII - n° 2 - février 2009 | 105
tumeur dans le groupe des carcinomes. L’expression particulière
des cytokératines, sous la forme d’un amas paranucléaire, et la
positivité des marqueurs neuroendocrines, comme la synapto-
physine (figure 6), la chromogranine et le CD56, permettent
de porter le diagnostic de localisation cutanée d’un carcinome
neuroendocrine, faisant discuter alors une forme primitive
(carcinome de Merkel) ou une métastase (notamment d’origine
pulmonaire, en rapport avec un carcinome à petites cellules).
Ces résultats éliminent par ailleurs un carcinome basocellulaire
ou spinocellulaire ou annexiel indifférencié. Enfin, la positivité
nette de la cytokératine 20 (figure 7) ainsi que la négativité de
la cytokératine 7 (figure 8) et du facteur de transcription TTF-1
caractérisent un carcinome neuroendocrine cutané primitif, ou
carcinome de Merkel.
Discussion
Les carcinomes neuroendocrines cutanés sont des tumeurs rares
de l’adulte et du sujet âgé qui se développent en zone exposée,
notamment sur les membres, la tête et le cou. On considère que ces
tumeurs dérivent des cellules de Merkel, justifiant la dénomination
souvent utilisée de carcinomes à cellules de Merkel. Les carci-
nomes neuroendocrines cutanés sont parfois appelés carcinomes
à petites cellules cutanés primitifs en raison de leur ressemblance
avec les carcinomes à petites cellules du poumon, qui partagent
leur différenciation neuroendocrine. L’aspect histologique, qui est
celui d’une tumeur à cellules rondes, de localisation généralement
dermique, permet de faire le diagnostic, qui doit être confirmé par
les marqueurs immuno histochimiques. Ces derniers permettent
notamment de faire le diagnostic différentiel avec toutes les autres
tumeurs malignes à cellules rondes qui peuvent se développer
primitivement ou secondairement dans la peau.
Récemment, un nouveau virus appartenant à la famille des poly-
omavirus humains a été découvert dans le carcinome de Merkel
et baptisé
MCV
pour
Merkel carcinoma virus
. Les auteurs ont
utilisé une technique d’hybridation soustractive à partir de trans-
criptomes obtenus d’un carcinome de Merkel et de la peau saine
chez un même malade. La recherche de séquences virales était
positive dans 8 des 10 carcinomes de Merkel étudiés alors qu’elle
n’était positive que dans moins de 10% des tumeurs contrôles. Les
explorations moléculaires ont par la suite démontré l’intégration
du génome viral au génome cellulaire suggérant que l’infection ait
précédé l’expansion tumorale. Il est certain que cette découverte
qui apporte un nouveau regard sur la physiopathologie de cette
tumeur rare qui survient parfois dans les situations d’immuno-
dépression (transplantation notamment) doit être confirmée par
des études complémentaires. ■
Pour en savoir plus...
Feng H, Shuda M, Chang Y, Moore PS. Clonal integration of a polyomavirus in
human Merkel cell carcinoma. Science 2008; online.
Marqueurs neuroendocrines + :
synaptophysine (représenté en figure 6),
chromogranine et CD56
◂ Figure 6.
Le marqueur de différenciation
neuroendocrine synaptophysine
est positif dans la majorité
des cellules de la tumeur
(immunohistochimie, x 200).
Carcinome neuroendocrine
Cytokératine 7 –
TTF-1 –
Figure 7. ▸
La cytokératine 7
n’est pas exprimée
(immunohistochimie, x 400).
Cytokératine 20 +
◂ Figure 8.
La cytokératine 20
est fortement exprimée
par les cellules tumorales
(immuno histochimie, x 200)
Carcinome
neuroendocrine cutané
primitif
(tumeur de Merkel)
Cytokératines +
◂ Figure 5.
L’immunomarquage
des cytokératines
est nettement positif, avec une
expression particulière, sous la
forme d’un amas paranucléaire
(immunohistochimie, x 400).
CD45 –
PS100 –
Figure 4. ▸
L’immunomarquage de
l’antigène commun leucocytaire
(CD45) est négatif, ne montrant
que quelques lymphocytes
intratumoraux dispersés
(immunohistochimie, x 200).
Tumeur maligne
épithéliale (carcinome)