sommes pas fermés à toute forme de DPI dans des cas particuliers, mais la réglementation envisagée
va trop loin», explique Anne Durrer, porte-parole de la FEPS. «Les dérives ne sont pas certaines, mais
le risque est trop grand», note-t-elle, rappelant qu’au regard des valeurs chrétiennes, «toute vie a la
même valeur».
Les défenseurs du DPI, eux, rétorquent que cette technique s’adresse à des couples souvent déjà
confrontés eux-mêmes à la souffrance du handicap et qui aspirent légitimement à l’épargner à leur
futur enfant.
«L’argument de l’intolérance qui risquerait de s’accroître n’est pas nouveau», se rappelle Felix
Gutzwiller. On l’entendait exactement sous la même forme, se souvient l’élu, dans la bouche de ceux
qui, à l’époque, combattaient les tests prénataux effectués sur le fœtus durant la grossesse. «En vingt
ou vingt-cinq ans, personne ne peut affirmer que les discriminations des handicapés se sont accrues.
Au contraire, de nombreux progrès ont été réalisés, par exemple dans le domaine de l’assurance
invalidité.»
Le débat transcende largement les clivages traditionnels. Les organisations de défense des handicapés,
aux premières lignes, sont elles-mêmes divisées. Certaines recommandent le non le 14 juin pour
mieux combattre la loi ensuite, d’autres acceptent la révision constitutionnelle mais diront non dans le
cadre d’un futur référendum.
L’orientation très libérale de la loi finalement adoptée par le parlement a bouleversé l’approche
beaucoup plus prudente du Conseil fédéral. Par rapport au projet du gouvernement, les Chambres ont
étendu les possibilités de recourir au DPI sur deux points fondamentaux.
D’abord, la trisomie 21 fera partie des maladies qui pourront être dépistées, ce que voulait exclure le
Conseil fédéral. Ensuite, ce ne sont pas seulement les couples qui se savent porteurs d’une anomalie
génétique qui pourront y recourir, mais aussi tous ceux qui, parce qu’ils ne peuvent pas avoir
d’enfants autrement, passent par une fécondation in vitro.
Médecin, directeur des Editions Médecine et Hygiène et rédacteur en chef de la Revue médicale suisse,
Bertrand Kiefer est un partisan convaincu du DPI. Il regrette néanmoins un débat «trop polarisé», qui
risque de passer à côté de l’essentiel. «Ce n’est pas en interdisant une technique plutôt qu’une autre
que nous y répondrons, mais nous devons vraiment réfléchir à la société que nous construisons,
obsédée par le contrôle, où les êtres humains deviennent eux-mêmes objets d’un contrôle de qualité.»
Partisan «d’un discours complexe», Bertrand Kiefer en appelle à une réflexion plus vaste. «Si l’on
supprime tous les individus affectés par un facteur de risque génétique, on ignore quelles en seraient
les conséquences en termes de diversité humaine. Or c’est cette diversité qui fait la richesse de notre
destin. Le rôle de la médecine n’est pas de normaliser les êtres humains, mais de les rendre libres.»
© 2015 Le Temps SA
Diagnostiquer les maladies chez l’embryon, médecine ou eugénisme? - ... http://www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/9ed648a8-f7fc-11e4-a492-3cf...
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