Le mix du e-marketing politique : Un nouveau concept dans un vieil

Le mix du e-marketing politique : Un nouveau concept dans un vieil embal-
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Antoine Harfouche
Maître de conférences
Université François-Rabelais de Tours
UFR de Droit, Economie et Sciences Sociales
Centre d'Etudes et de Recherche en Management de Touraine (CERMAT)
* 50, Avenue Jean Portalis 37200 TOURS, Portalis bâtiment A, étage 2, bureau A221, Email :
antoine.harfouche@univ-tours.fr, Tel : 02 47 36 11 21
Le mix du e-marketing politique : Un nouveau concept dans un vieil emballage
Résumé :
Avec la diffusion rapide du Web 2.0, les candidats et les partis politiques ont massivement eu
recours aux nouvelles techniques du e-marketing dans leurs campagnes. Mais côté
académique, les éléments théoriques portant sur ce nouveau champ d’étude qu’on nomme « e-
marketing politique » restent sans bases solides et communes. En effet, le principal courant
lancé par Kotler durant les années 70 et associant les techniques du marketing social au
marketing-mix commercial (les 4P) apporte peu de réponses quant à ce que recouvre ce
champ. Notre objectif est d’aller au-delà de cette vision réductrice pour redéfinir le e-
marketing politique. Nous utiliserons ainsi les principes de la théorisation enracinée pour
intégrer les différentes facettes d’un objet d’étude qui ne fait pas encore l’unanimité parmi les
chercheurs en marketing.
Mots-clés : e-marketing politique ; le mix e-marketing politique ; marketing social
The political e-marketing-mix: A new concept in old bottles
Abstract :
With the quick spread of Web 2.0 technique, political candidates and parties have heavily
invested in e-marketing in their political campaigns. But theoretical foundation of this new field
called Web 2.0 political marketing is still lacking. Concepts are still without solid
foundations. Introduced by Kotler in the 70s, the main school in this area limits the scope of
this field to the commercial 4 Ps. Our research aim is to move beyond this simplistic vision to
redefine our new field. We will apply the grounded theory methodology in order to integrate
the different vision of the political e-marketing.
Key-words: Web political marketing, social marketing, political e-marketing-mix.
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Le mix du e-marketing politique : Un nouveau concept dans un vieil emballage
1. Introduction
Dans leurs articles séminaux de 1969 et 1971, Kotler et Levy (1969) et Kotler et Zaltman
(1971) ont défini le marketing social comme « l'utilisation des compétences en marketing pour
aider à traduire les efforts déployés dans l'action sociale en programmes plus efficaces et ceci
dans le but de susciter une réponse du public visé. » Parmi les différentes techniques de
marketing social, ces auteurs citent explicitement le marketing politique.
Trente ans plus tard, le marketing politique est devenu un facteur central dans les campagnes
électorales. En plus, avec les nouvelles techniques du Web 2.0, la majorides hommes et des
partis politiques ont adopté le e-marketing politique dans le but de gagner les élections (Garrett
et Danzier, 2011). Ainsi, en l’espace de quelques années, le Web est devenu un espace
politique influant (Wattal et al. 2010). Aux Etats-Unis, par exemple, près de 75 millions
d’Américains se sont connectés à Internet pour suivre la campagne présidentielle de 2004
(Rainie et al. 2005) et 64 % des adultes se sont impliqués dans la campagne présidentielle de
2008 grâce au Web (Garrett et Danziger, 2011).
Alors que les premières recherches traitant de l’impact d’Internet sur le processus électoral
affirmaient que le Web n'avait pas d’effet significatif ni sur l'engagement politique ni sur le
choix des électeurs (Bimber, 2003), des études plus récentes confirment qu’aujourd’hui, cet
impact est réel et devient de plus en plus important (Wattal et al. 2010). Certains chercheurs
ont me démontré que le Web 2.0 a, aujourd’hui, plus d’impact que les anciens media (Shah
et al., 2007 ; Veenstra et Sayre, 2009). En effet, en l’espace de quelques années uniquement,
les techniques e-marketings ont évolrapidement pour proposer un large éventail de leviers
comme le référencement naturel, les campagnes emailing, les réseaux sociaux, etc.
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Mais du côté académique, les éléments théoriques portant sur ce nouveau concept restent sans
bases solides (Henneberg et O’Shaughnessy, 2009). En effet, le principal courant lancé par
Kotler durant les années 70 et associant les techniques du marketing social au marketing-mix
(les 4P) apporte peu de réponses quant à ce que recouvre ce champ. D’abord, parce qu’il
n’implique pas la composante stratégique (Russmann, 2011) et ensuite parce qu’il ne prend pas
en considération plusieurs éléments primordiaux du e-marketing politique : les électeurs (les
militants, les sympathisants, les réseaux et les autres électeurs), les stratégies des candidats
adverses et leur parti politique, les groupes de pressions, les donateurs, les variables
environnementales et surtout la spécificité du web.
L’objectif de cette communication est de redéfinir ce nouveau champ. Nous utiliserons ainsi les
principes de la théorisation enracinée pour intégrer les différentes facettes de ce nouveau
champ d’étude. Ceci nous permettra d’appréhender ce nouveau champ d’une façon plus
acceptable au regard des critères scientifiques (Carmines et Zeller, 1980). L’absence de
définition claire implique que la portée des recherches en e-marketing politique restera limitée
et aura un impact limité sur le long terme (Orton, 1997 ; Pfeffer, 1995 ; Van Maanen, 1995 ;
Garreau, 2010). Cette redéfinition pourra être critiquée, modifiée, améliorée et complétée, ce
qui permettra de faire avancer la recherche autour de ce nouveau champ.
Nous utiliserons la méthode de grounded theory pour opérationnaliser le concept de e-
marketing politique. Selon Garreau (2010), la grounded theory ou la théorisation enracinée est
« une méthodologie d’analyse générale liée à la collecte et l’analyse de données, qui utilise un
jeu de méthodes systématiques pour générer une théorie inductive sur une aire substantive »
(Glaser, 1992 In Garreau, 2010). L’absence de bases théoriques consensuelles autour du
concept de e-marketing politique justifie l’utilisation de cette démarche (Locke, 2001). Nous
adopterons une posture post-positiviste et nous intégrerons ainsi le quatrième courant de la
torisation enracinée lancé récemment par Garreau (2010).
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Notre recherche repose sur onze entretiens semi-directifs centrés effectués auprès de créateurs
de plateforme Web des principaux partis politiques français ainsi qu’auprès des responsables de
e-campagnes des principaux candidats aux élections présidentielles françaises de 2012.
L’utilité de notre travail est double. Sur le plan théorique, nous refinissons un champ
académique en concevant ainsi un fondement scientifique pour les recherches futures. Enfin,
sur un plan managérial, nous proposons un mix permettant une adoption plus efficace des
techniques de e-marketing politique. Nous espérons ainsi participer à une cohérence plus
grande des prochaines recherches autour de ce champ.
Nous commencerons notre article par une comparaison du marketing commercial des 4P, du
marketing social et du e-marketing politique (2). Nous résumerons ensuite la thodologie
utilisée pour intégrer les différentes facettes du e-marketing politique (3). Ensuite, les résultats
de la théorisation enracinée seront présentés (4). Enfin, nous terminerons cette communication
par une définition pratique de ce champ qui présente les différentes facettes du e-marketing
politique.
2. Le marketing commercial des 4P, le marketing social et le e-marketing politique
Le e-marketing politique (ou en anglais « Web 2.0 political marketing », Wattal et al. 2010) est
une nouvelle discipline qui a émergé vers la fin des années 90 avec le développement d'Internet.
Récemment, nous avons assisté à une croissance en nombre d’articles professionnels et
académiques s’intéressant à ce sujet (Carlson et Standberg, 2007, Garrett et Danziger, 2011).
Mais jusqu’à aujourd'hui, il n’y a toujours pas de définition standard de ce nouveau concept
(Wattal et al. 2010). En effet, certains chercheurs considèrent l’e-marketing politique comme
une déclinaison du marketing-mix commercial qui considère les politiciens comme un service
dont les consommateurs potentiels sont les électeurs (Henneberg, 2003 ; Wring, 1997). Ils
présentent ainsi le e-marketing politique comme un ensemble de moyens utilisant les techniques
du e-marketing et visant à promouvoir un candidat ou un parti politique (Wattal et al. 2010).
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