Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble

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Focus sur le patient :
dysfonctionnements cognitifs et
trouble dépressif majeur
Cette formation médicale continue est soutenue par un financement indépendant de Lundbeck Inc.
www.medscape.org/collection/mdd10
Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
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Cette formation médicale continue est destinée à un public international composé de professionnels de santé en dehors des
États-Unis, tout particulièrement aux psychiatres, aux médecins généralistes et aux neurologues impliqués dans la prise en charge
de patients présentant un trouble dépressif majeur (TDM).
L’objectif de cette activité est d’améliorer la connaissance des symptômes, du diagnostic et du traitement des patients souffrant de
troubles cognitifs et de trouble dépressif majeur (TDM) dans le cadre de soins primaires et spécialisés sur la base de cas patients.
Au terme de cette activité, les participants seront en mesure de :
•
•
•
Identifier des approches thérapeutiques efficaces dans le traitement des dysfonctionnements cognitifs chez les patients
souffrant de TDM
Reconnaître les comorbidités ainsi que les antécédents médicaux majeurs conduisant au diagnostic des dysfonctionnements
cognitifs en cas de TDM
Décrire l’effet des troubles cognitifs sur les activités quotidiennes du patient et les conséquences d’un diagnostic correct sur
les résultats des patients
Faculté et déclarations
WebMD Global exige de toute personne en position d’intervenir sur le contenu d’une de ses activités de formation qu’elle déclare
toutes ses relations financières pertinentes établies au cours des 12 mois précédents et susceptibles de donner naissance à un
conflit d’intérêt.
Modérateur
Pr Koen Demyttenaere
Chaire académique, centre psychiatrique universitaire ; professeur de psychiatrie, faculté de médecine, université catholique de
Louvain, Louvain, Belgique ; co-titulaire, association « Pour plus de Bonheur » (Ga voor Geluk), Belgique
Déclaration d’intérêts : le Pr Koen Demyttenaere a déclaré les relations financières pertinentes suivantes :
A travaillé en tant que conseiller ou consultant pour : Eli Lilly and Company ; Lundbeck, Inc. ; Servier
A travaillé comme conférencier ou membre du bureau des conférenciers pour : Eli Lilly and Company ; Lundbeck, Inc. ; Servier
A reçu des financements pour mener des recherches cliniques de : Eli Lilly and Company ; Lundbeck, Inc. ; Servier
Intervenants
Pr Bernhard Baune
Professeur et titulaire de la chaire de psychiatrie ; chef du service de psychiatrie, école de médecine du Royal Adelaide Hospital,
université d’Adélaïde, Adélaïde, Australie
Déclaration d’intérêts : le Pr Bernhard Baune a déclaré les relations financières pertinentes suivantes :
A travaillé en tant que conseiller ou consultant pour : Lundbeck, Inc.
A travaillé comme conférencier ou membre du bureau des conférenciers pour : AstraZeneca Pharmaceuticals LP ; Bristol-Myers
Squibb Company ; Lundbeck, Inc. ; Pfizer Inc. ; Servier ; Wyeth Pharmaceuticals Inc.
A reçu des financements pour mener des recherches cliniques de : National Health and Medical Research Council, Australie
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Sarah Bromley, MBChB
Médecin généraliste ; directrice médicale au niveau national des services de santé aux délinquants, Care UK, Royaume-Uni
Déclaration d’intérêts : Sarah Bromley, MBChB, a déclaré les relations financières pertinentes suivantes :
Intérêt commercial lié à l’employeur : Care UK
Pr Eduard Vieta
Directeur du service de psychiatrie et de psychologie, clinique hospitalière, université de Barcelone, IDIBAPS, CIBERSAM,
Barcelone, Espagne
Déclaration d’intérêts : le Pr Eduard Vieta a déclaré les relations financières pertinentes suivantes :
A travaillé en tant que conseiller ou consultant pour : Almirall Hermal GmbH ; AstraZeneca Pharmaceuticals LP ; Bristol-Myers
Squibb Company ; Dainippon Sumitomo Pharma America ; Eli Lilly and Company ; Esteve ; Ferrer ; Forest Laboratories, Inc. ;
GlaxoSmithKline ; Janssen Pharmaceuticals, Inc. ; Jazz Pharmaceuticals, Inc. ; Lundbeck, Inc. ; Merck Sharp & Dohme Corp. ; Novartis
Pharmaceuticals Corporation ; Otsuka Pharmaceutical Co., Ltd. ; Pfizer Inc. ; Pierre Fabre ; Richter Pharma AG ; Roche ; Sanofi ;
Servier ; Shire ; Solvay Pharmaceuticals, Inc. ; Sunovion Pharmaceuticals Inc. ; Takeda Pharmaceuticals North America, Inc. ; UCB
Pharma, Inc.
A reçu des financements pour mener des recherches cliniques de : Almirall Hermal GmbH ; Bristol-Myers Squibb Company ;
GlaxoSmithKline ; European 7th Framework Program : Janssen-Cilag ; NARSAD ; Novartis Pharmaceuticals Corporation ; Otsuka
Pharmaceutical Co., Ltd. ; Pfizer Inc. ; Richter Pharma AG ; Roche ; Sanofi ; Seny Foundation ; Servier ; Ministère espagnol de la
Santé (CIBERSAM) ; Ministère espagnol des sciences et de l’éducation ; Stanley Medical Research Institute ; Teva Pharmaceutical
Industries Ltd.
Éditeur
Leanne Fairley, BJ Hon, directrice scientifique, WebMD Global, LLC
Déclaration d’intérêts : Leanne Fairley, BJ Hon, n’a déclaré aucun conflit d’intérêt.
Relecteur du contenu
Robert Morris, docteur en pharmacie
Directeur clinique associé de CME
Déclaration d’intérêts : Robert Morris, docteur en pharmacie, n’a déclaré aucun conflit d’intérêt.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Focus sur le pa,ent : cas cliniques de dysfonc,onnements cogni,fs en cas de trouble dépressif majeur Pr Koen Demyttenaere : C’est un véritable plaisir de vous accueillir pour ce symposium intitulé : « Focus sur le patient : cas
cliniques de dysfonctionnements cognitifs en cas de trouble dépressif majeur. »
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Modérateur Pr Koen Demy=enaere Chaire académique Centre psychiatrique universitaire ; Professeur de psychiatrie, faculté de médecine Université catholique de Louvain Louvain, Belgique ; Co-­‐?tulaire, associa?on « Pour plus de Bonheur » (Ga voor Geluk), Belgique Je suis Koen Demyttenaere et je suis psychiatre à l’Hôpital universitaire de Louvain en Belgique. Je suis ravi d’être accompagné par
un groupe d’experts formidables.
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Groupe d’experts Experts Pr Bernhard Baune Professeur et ?tulaire de la chaire de psychiatrie ; chef du service de psychiatrie École de médecine Royal Adelaide Hospital Université d’Adélaïde Adélaïde, Australie Pr Eduard Vieta Directeur du service de psychiatrie et de psychologie, clinique hospitalière Université de Barcelone IDIBAPS, CIBERSAM Barcelone, Espagne Sarah Bromley, MBChB Médecin généraliste et directrice médicale au niveau na?onal des services de santé aux délinquants Care UK, Royaume-­‐Uni de vous présenter le Professeur Bernhard Baune. Le Professeur est d’origine allemande mais il travaille depuis 10
J’ai le plaisir
ans à Adélaïde, en Australie. Nous sommes aussi en présence du Professeur Eduard Vieta, directeur du service de psychiatrie et
de psychologie à Barcelone. À côté de lui se trouve Sarah Bromley, qui est médecin généraliste (MG) au Royaume-Uni et qui est
également la directrice médicale au niveau national des services de santé aux délinquants de Care UK. Cela signifie qu’elle travaille
en lien étroit avec un ensemble de prisons au Royaume-Uni.
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Présenta,on du programme Objec,f : Discuter des symptômes, du diagnos,c et du traitement des pa,ents souffrant de troubles cogni,fs et de TDM dans le cadre de soins primaires et spécialisés sur la base de cas pa,ents Nous visionnerons deux simula?ons de scénarios basés sur des cas pa?ents et après chaque cas : –  Un membre du groupe d’experts présentera son approche thérapeu?que –  Discussion du groupe d’experts –  Ques?ons/réponses avec l’auditoire Au cours de ce symposium, nous aborderons les symptômes, le diagnostic et le traitement des patients souffrant de troubles
cognitifs en cas de trouble dépressif majeur (TDM) dans le cadre de soins primaires et spécialisés sur la base de cas patients. C’est
pourquoi nous avons réuni un groupe d’experts varié comprenant des spécialistes et un médecin généraliste. Nous allons en effet
présenter 2 vidéos mettant en scène des scénarios de cas de patients. Après avoir visionné chaque scénario, le groupe d’experts
expliquera son approche en matière de prise en charge. Les experts auront l’occasion d’engager une discussion brève et nous
pourrons répondre aux questions de l’auditoire.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Objec,fs pédagogiques 1.  Iden?fier des approches thérapeu?ques efficaces dans le traitement des dysfonc?onnements cogni?fs chez les pa?ents souffrant de TDM 2.  Reconnaître les comorbidités ainsi que les antécédents médicaux majeurs conduisant au diagnos?c des dysfonc?onnements cogni?fs en cas de TDM 3.  Décrire l’effet des troubles cogni?fs sur les ac?vités quo?diennes du pa?ent et les conséquences d’un diagnos?c correct sur les résultats des pa?ents Les objectifs pédagogiques de ce symposium sont d’identifier des approches thérapeutiques efficaces dans le traitement des
dysfonctionnements cognitifs chez les patients souffrant de TDM ; de reconnaître les comorbidités ainsi que les antécédents
médicaux majeurs conduisant au diagnostic des dysfonctionnements cognitifs en cas de TDM ; et de décrire l’effet des troubles
cognitifs sur les activités quotidiennes du patient ainsi que les conséquences d’un diagnostic correct sur les résultats des patients.
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Introduction
Introduc,on Pr Koen Demy=enaere Chaire académique Centre psychiatrique universitaire ; Professeur de psychiatrie, faculté de médecine Université catholique de Louvain Louvain, Belgique ; Co-­‐?tulaire, associa?on « Pour plus de Bonheur » (Ga voor Geluk), Belgique Dr Demyttenaere : Je vais faire une introduction rapide avant de passer au premier scénario de cas.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Déclara,ons d’intérêt •  Pour la liste complète des déclara,ons d’intérêt, reportez-­‐vous au lien Faculté et déclara,ons figurant sur la page principale du programme. Page 10
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TDM ? Symptômes soma,ques Anxiété TDM ? Fonc,on cogni,ve Affect posi,f * Fonc?on * Qualité de vie * Vie qui a du sens Je vais commencer par dire quelques mots au sujet du TDM. Qu’est-ce que le TDM ? Le manuel diagnostique et statistique des
troubles mentaux, 5e édition (DSM-5) définit 9 critères propres à l’épisode dépressif majeur. Cela nous permet de savoir ce qu’est
la dépression, qui en souffre et qui n’en souffre pas. Nous soignons les 9 symptômes et le patient se remet complètement ;
néanmoins, je pense que c’est plus compliqué que cela. Je pense que la diapositive reflète la réalité clinique et fournit également
un résumé de l’histoire de la commercialisation des antidépresseurs depuis les années 1980. Le TDM est au centre. Très souvent,
les patients souffrant de TDM montrent aussi des symptômes d’anxiété qui ont été traités dans les années 1980 grâce aux
inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS)[1]. Nous savons que de nombreux patients souffrant de TDM montrent
aussi des symptômes somatiques, que ce soient des symptômes somatiques douloureux ou non douloureux. Ici il faut surtout
retenir les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine-noradrénaline (IRSN) et en particulier la duloxétine. Il y a également un
impact sur le plan affectif ; l’anhédonie, la perte de la capacité à ressentir le plaisir, est un critère essentiel de la dépression.
L’agomélatine a mis cela en avant [1,2]. Les symptômes cognitifs font également partie de la définition du DSM. La vortioxétine met
aussi cela en lumière et nous aide à mieux comprendre le lien entre la cognition et la dépression[3]. C’est l’aspect le plus complet et
la réalité clinique. Les patients présentent véritablement plus de 9 symptômes ou, comme le dit Stephen Stahl[4], vous souffrez de
TDM si vous présentez 13 des 9 symptômes.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Épisode dépressif majeur : défini,on du DSM-­‐5 • 
Au moins 5 des symptômes ci-­‐dessous sont présents pendant 2 semaines et représentent une modifica,on de la fonc,on antérieure ; au moins 1 des symptômes est (1) une humeur dépressive ou (2) la perte d’intérêt ou de plaisir : –  Humeur dépressive –  Diminu?on de l’intérêt/du plaisir –  Modifica?on du poids –  Troubles du sommeil –  Agita?on/ralen,ssement psychomoteur –  Fa?gue ou perte d’énergie –  Sen?ment de dévalorisa?on ou de culpabilité excessive ou inappropriée –  Diminu,on de l’ap,tude à penser ou à se concentrer ou indécision –  Pensées de mort ou idées suicidaires récurrentes • 
Détresse cliniquement significa?ve ou altéra,on du fonc,onnement social, professionnel ou dans d’autres domaines importants Comme je l’ai mentionné, les symptômes cognitifs font partie de la définition de la dépression. Le ralentissement psychomoteur
a une composante cognitive, tout comme les difficultés à réfléchir, de concentration ou l’indécision. Cela fait partie de la définition
mais les échelles standardisées que nous utilisons et qui sont imposées par les organismes réglementaires ne les représentent
pas bien.
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Troubles cogni,fs en cas de TDM Les symptômes cogni?fs du TDM se manifestent par des troubles de : •  la cogni?on sociale : –  Empathie, reconnaissance/percep?on des émo?ons, théorie de l’esprit, percep?on et connaissances sociales, biais d'ajribu?on •  des processus cogni?fs : –  Modèles explica?fs enracinés, dévalorisa?on générale, distorsions cogni?ves •  des processus neurocogni?fs : –  Ajen?on soutenue, fonc?on exécu?ve, mémoire de travail, appren?ssage verbal et mémoire, appren?ssage non verbal et mémoire, vitesse psychomotrice McIntyre RS et al. Depress Anxiety. 2013;30(6):515-­‐527. La cognition dans le cadre de la dépression est plus compliquée qu’on ne le pense. Les symptômes cognitifs de la dépression
se manifestent par des troubles dans plusieurs domaines. Il y a la cognition sociale dans le cas de la dépression, notamment :
l’empathie, la reconnaissance des émotions, la perception, la théorie de l’esprit, la perception et la connaissance sociales et le biais
d’attribution. Nous n’aborderons pas ces points au cours de ce programme. Il y a des processus cognitifs, notamment les modèles
explicatifs enracinés, la dévalorisation générale et les distorsions cognitives. Ceux-ci sont davantage liés à la psychologie cognitive
et à la thérapie cognitive. Nous n’aborderons pas non plus ces points au cours de ce programme.
Nous nous intéresserons principalement au troisième groupe de symptômes cognitifs de la dépression, qui sont les processus
neurocognitifs, notamment l’attention soutenue, la fonction exécutive, la mémoire de travail, l’apprentissage verbal,
l’apprentissage non verbal et la mémoire, la vitesse psychomotrice, la facilité à s’exprimer, etc.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Fréquence des troubles cogni,fs chez les pa,ents souffrant de TDM Pa,ents (%) 100 90 Pa?ents avec TDM (n = 285) 80 Témoins (n = 907) • 
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• 
• 
70 60 50 40 30 Mémoire Vitesse psychomotrice Temps de réac?on Ajen?on complexe Flexibilité cogni?ve Un score < 70 indiquait ≥ 2 écarts types sous la moyenne 20 10 0 Performance basée sur les 5 domaines de l’évalua?on cogni?ve CNS Vital Signs (signes vitaux du SNC) : 0 1 2 3 4 5 Nombre de scores de domaines < 70 Pa?ents souffrant de TDM non traité avec un score < 70 dans 1 des domaines : 39 % Gual?eri CT, et al. J Clin Psychiatry. 2008;69:1122-­‐1130. Les symptômes cognitifs sont-ils importants ? Sont-ils fréquents chez les patients souffrant de TDM ? Il y a une étude intéressante
réalisée par Gualtieri et son équipe. Une petite différence sur l’échelle ne signifie pas nécessairement qu’elle est cliniquement
significative. Cet article a étudié les éléments cliniquement significatifs, définis par un score pour 1 des 5 domaines évalués,
notamment la mémoire, la vitesse psychomotrice, le temps de réaction, l’attention complexe et la flexibilité cognitive. Les
auteurs ont trouvé que si l’on recherche des troubles cliniquement significatifs, qui sont définis comme au moins 2 écarts types
sous la moyenne par rapport aux témoins sains, au moins 40 % des patients souffrant de TDM montraient des troubles cognitifs
cliniquement significatifs. Il existe d’autres études montrant un ratio similaire. Environ 40 % des patients souffrant de TDM
présentent des troubles de la fonction cognitive cliniquement significatifs.
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Comment iden,fier les dysfonc,onnements cogni,fs chez les pa,ents a=eints de TDM ? Deux cas pa,ents : 1. 
2. 
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Une pa,ente souffrant de TDM et d’altéra,on du fonc,onnement professionnel qui consulte un psychiatre Un pa,ent alcoolique souffrant de TDM qui consulte son médecin généraliste et l’orienta,on vers un psychiatre Quels signes et symptômes peuvent vous amener à suspecter des dysfonc?onnements cogni?fs ? Comment les dissocier des autres symptômes de la dépression ou des autres comorbidités ? Quels sont les troubles de la fonc?on que présentent les pa?ents en raison des troubles cogni?fs ? Comment prendre en charge l’élément cogni?f avec un traitement ? Qui prend en charge le pa?ent ? Le MG ? Le psychiatre ? Quelles sont les différences entre les pays et les systèmes ? Comment identifier les dysfonctionnements cognitifs chez les patients ? Il existe de nombreux tests. Il ne faut pas croire qu’un
test correspond à un type de fonction cognitive. Tous les tests couvrent de nombreuses fonctions différentes. Comment prendre
cela en compte dans le cadre de votre pratique quotidienne ? Nous aborderons cela dans notre discussion des scénarios de cas
cliniques qui seront présentés. Il peut y avoir de nombreux questionnaires et dans l’état actuel des choses, nous n’utilisons pas les
questionnaires dans la pratique quotidienne pour déceler les symptômes de la dépression. Pourquoi utiliser des tests évaluant
les symptômes cognitifs de la dépression si vous ne les utilisez pas déjà pour les symptômes de l’humeur ? Nous allons essayer de
vous expliquer pourquoi.
Nous allons vous présenter 2 scénarios mettant en scène des patients. La première patiente souffre de TDM et de dégradation du
fonctionnement professionnel et elle consulte un psychiatre. Eduard Vieta discutera de ce cas. Nous espérons ensuite en discuter
avec vous. Le second patient est un homme présentant un abus d’alcool et souffrant de TDM. Il consulte d’abord son médecin
généraliste et il est ensuite orienté vers un psychiatre. Vous verrez ensuite une séquence courte montrant l’entretien avec le
médecin généraliste ainsi qu’une autre séquence courte de l’entretien avec le psychiatre.
Je voudrais insister sur le fait que ce sont des scénarios de cas cliniques, ce qui signifie que ce sont des résumés. Nous ne pouvons
montrer l’intégralité du scénario. Vous aurez certainement de nombreuses questions concernant certains points à éclaircir. Nous
devions sélectionner quelques points essentiels afin d’assurer que ce symposium soit complet.
Il y a une série de questions dont nous discuterons ensemble et auxquelles nous répondrons. Quels signes et quels symptômes
peuvent vous amener à suspecter des dysfonctionnements cognitifs en cas de TDM ? Comment les dissocier ? C’est une question
importante, comment les dissocier des autres symptômes de la dépression ou des autres comorbidités ? Comme mentionné
précédemment, l’abus d’alcool est une comorbidité pour l’un des patients. Comment la dissocier de l’humeur ? Vous avez peutêtre entendu dire que seule une partie de l’amélioration de la fonction cognitive des patients dépressifs peut être apportée par
la modification de la symptomatologie de la dépression et que la vortioxétine a principalement un effet direct[5]. Mais ce sont des
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
statistiques. Comment est-ce reflété dans la pratique quotidienne ?
Quels sont les troubles de la fonction que présentent les patients en raison des troubles cognitifs ? Quel est le lien entre les
symptômes cognitifs et la fonction ? Comment les traiter et qui prend en charge le patient ? En particulier dans le second scénario,
est-ce le médecin généraliste ? Est-ce le psychiatre ? Enfin, il pourrait être intéressant de discuter des différences entre les pays
et les systèmes. Dans certains pays, jusqu’à 90 % des patients souffrant de TDM sont traités par un médecin généraliste, et dans
d’autres pays c’est totalement différent. Les modèles d’orientation sont différents, les seuils sont différents, etc. Cela pourrait être
une discussion intéressante.
J’espère que vous êtes prêts à visionner le premier scénario qui concerne une patiente souffrant de TDM et d’altération du
fonctionnement professionnel. Il s’agit du cas de Stella.
Cas 1 : Pa,ente souffrant de TDM et d’altéra,on du fonc,onnement professionnel Page 16
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Cas 1 : Patiente souffrant de TDM et d’altération du fonctionnement professionnel
Narrateur : Stella Roth est agent immobilier. Elle a 25 ans et un TDM lui a été diagnostiqué il y a environ 2 ans. Un ISRS lui a
alors été prescrit (l’escitalopram à 20 mg/jour). Stella a fait une rechute il y a cinq mois. À l’époque, son traitement a été modifié
pour prendre de la venlafaxine à 225 mg une fois par jour. En dehors de la dépression, Stella est en bonne santé et ne prend pas
d’autres médicaments. Cette courte séquence vidéo la met en scène lors de son entretien de suivi avec son psychiatre.
Le psychiatre : Comment allez-vous ? Comment vous sentez-vous ?
Stella : Je vais bien, je suppose.
Le psychiatre : La dernière fois que je vous ai vue remonte à un mois et vous aviez dit que vous pensiez que le médicament
était toujours efficace ?
Stella : Oui. Il a vraiment été efficace.
Le psychiatre : Mais vous ne vous sentez toujours pas comme vous le souhaiteriez ?
Stella : Pas vraiment.
Le psychiatre : Est-ce que vous prenez toujours le médicament tous les jours ?
Stella : Oui.
Le psychiatre : Et est-ce que cela vous pose problème ?
Stella : Non, ça va.
Le psychiatre : La première fois que nous nous sommes vus, je vous ai demandé comment vous vous sentiez sur une échelle
de 0 à 10, sur laquelle 0 équivaut à « Cela ne pourrait être pire » et 10 équivaut à « Meilleure santé mentale possible ». Vous aviez
indiqué être à 3.
Stella : C’est exact.
Le psychiatre : Plus récemment, vous étiez autour de 5 ou 6, ce qui est encourageant. Où pensez-vous vous situer la majeure
partie du temps à présent ?
Stella : Probablement à 7.
Le psychiatre : Il y a eu une amélioration certaine, mais il semble qu’il y ait encore un peu de chemin à parcourir.
Stella : Mon humeur générale est bien meilleure. Mon petit ami dit que j’ai l’air bien plus heureuse maintenant et que je suis
moins irascible.
Le psychiatre : Je vois. Que faudrait-il pour passer de 7 à 8 ou 9 par exemple ?
Stella : Je ne suis plus aussi triste tout le temps, mais je manque toujours d’énergie. J’ai toujours une très mauvaise mémoire. Je
continue à égarer des choses et je fais toutes sortes d’erreurs.
Le psychiatre : Pouvez-vous me donner des exemples, Stella ?
Stella : C’est vraiment une source de problèmes au travail.
Le psychiatre : Vous travaillez toujours comme agent immobilier ?
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Stella : Oui. J’ai manqué quelques rendez-vous avec des personnes qui souhaitaient acheter ou vendre une maison car j’avais
noté la mauvaise adresse ou j’ai carrément oublié les rendez-vous. Je ne sais pas ce qui cloche chez moi. J’ai ai laissé un couple
attendre dehors sous la pluie car j’étais à l’autre bout de la ville et les attendais dans la mauvaise maison. J’ai raté la vente et
maintenant ils ne veulent plus travailler avec moi.
Le psychiatre : Je vois que cela entraîne beaucoup de difficultés pour vous. Avez-vous déjà raté des rendez-vous avant de
commencer à vous sentir déprimée ?
Stella : Non, jamais.
Le psychiatre : Je vois. Vous avez dit qu’avant d’être déprimée, vous aviez l’habitude de sortir avec des amis le soir et que vous
alliez à un club de lecture toutes les semaines ?
Stella : C’est exact.
Le psychiatre : Puis vous avez arrêté de sortir et vous n’avez plus vraiment vu vos amis ou vous ne leur avez plus vraiment parlé.
Stella : Oui.
Le psychiatre : Est-ce qu’il y a eu un quelconque changement depuis que vous prenez le médicament ?
Stella : C’est vrai que je parle plus souvent à mes amis et que j’essaie de sortir avec eux, mais j’ai du mal à m’organiser pour les
voir ces temps-ci.
Le psychiatre : Est-ce que vous êtes retournée au club de lecture ?
Stella : Oui, j’y suis retournée quelquefois. Le problème c’est que j’ai essayé de lire au lit comme je le faisais avant, mais je lis
toujours la même ligne encore et encore, et puis je m’endors. J’imagine que c’est une bonne chose, puisque que je n’ai plus
d’insomnies comme avant.
Le psychiatre : C’est vrai. Le fait d’avoir une bonne nuit de sommeil est une amélioration évidente.
Stella : Je suis d’accord, mais on dirait que je n’arrive toujours pas à fonctionner normalement au travail.
Le psychiatre : Et qu’en est-il de vos relations à la maison ? Y a-t-il eu un changement au niveau du désir sexuel ?
Stella : Oh ça. Pas vraiment. Je veux dire nous avons bien des rapports sexuels, mais honnêtement je n’en ai pas vraiment envie.
Le psychiatre : Lorsque vous avez des rapports sexuels, y a-t-il une différence dans l’atteinte de l’orgasme par rapport à ce que
vous avez connu avant votre dépression ?
Stella : Non, c’est toujours bien lorsqu’on le fait. C’est juste que je n’en ai pas vraiment envie.
Le psychiatre : Bien, vous semblez véritablement montrer une amélioration grâce au médicament. Souhaitez-vous conserver ce
traitement un peu plus longtemps et voir ce qui se passe ?
Stella : Je ne sais pas. Je ne veux pas risquer de revenir en arrière et d’être triste et irascible tout le temps, mais mes revenus sont
basés sur les commissions, donc si je n’arrive pas à m’organiser au travail je n’aurai aucun revenu, et cela fera empirer les choses.
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Discussion du groupe d’experts
Ques,ons-­‐réponses avec l’auditoire 1 Stella évalue son état actuel à 7 sur 10. De son point de vue, quels sont les symptômes pour lesquels une améliora?on la rapprocherait de 10 ? 1.  Humeur 2.  Mémoire, concentra?on et fonc?on Désir sexuel 3. 
4. 
Habitudes de sommeil 5. 
Niveau d’énergie Dr Demyttenaere : Voilà, c’était le cas de Stella. Nous avons une question à vous poser, simplement afin de connaître votre avis.
Dans mon introduction, j’ai fait remarquer que nous n’avons pas l’habitude d’administrer de nombreux questionnaires. Si vous
n’avez pas recours à des questionnaires, il pourrait être utile de demander aux patients comment ils se sentent sur une échelle
de 0 à 10 et s’il y a eu un changement. Stella évalue à présent son état actuel à 7. Dans quel domaine des améliorations la
rapprocheraient-elles de 10 ? 1) Humeur ; 2) Mémoire, concentration et fonction ; 3) Désir sexuel ; 4) Habitudes de sommeil ; ou 5)
Niveau d’énergie. Nous attendons vos réponses avec impatience.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Ques,on no. 1 : résultats en direct du symposium Stella évalue son état actuel à 7 sur 10. De son point de vue, quels sont les symptômes pour lesquels une améliora?on la rapprocherait de 10 ? [VALUE]
1.  Humeur % [VALUE]
2.  Mémoire, concentra?on % et fonc?on 3.  Désir sexuel 4.  Habitudes de sommeil 5.  Niveau d’énergie [VALUE]
% [VALUE]
% [VALUE]
% 1 2 3 4 5 Dr Demyttenaere : Parmi l’auditoire, le désir sexuel a reçu le score le plus bas, alors que la mémoire, la concentration et la fonction
ont reçu presque 80 %. Dans cette vidéo, Stella parle principalement des déficits sur le plan de la mémoire, de la concentration et
de la fonction ainsi que du niveau d’énergie. C’est intéressant car ils sont probablement étroitement liés. Seulement 2 % pour le
désir sexuel. Je trouve cela un peu décevant.
Maintenant vous allez découvrir comment le Dr Vieta prendrait en charge cette patiente et je l’invite à partager cela avec nous.
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Comment prendre en charge une pa,ente souffrant de TDM et d’altéra,on du fonc,onnement professionnel Pr Eduard Vieta Directeur du service de psychiatrie et de psychologie, clinique hospitalière Université de Barcelone IDIBAPS, CIBERSAM Barcelone, Espagne Dr Eduard Vieta : Mon exposé sera principalement orienté sur la question de la prise en charge de cette patiente. Lorsque j’ai
préparé ce cas, j’ai pensé aux patients que nous voyons fréquemment dans notre pratique clinique. J’espère que vous avez
reconnu certaines des plaintes de Stella dans votre pratique quotidienne. D’après mon expérience, il est très fréquent que les
patients montrent une amélioration de certains symptômes, en particulier sur le plan de l’humeur, de l’anxiété et de l’insomnie,
mais ils se plaignent rarement d’autres symptômes. L’une des choses qui les touchent le plus dans leur vie professionnelle et en
matière de revenu est le fonctionnement professionnel qui est étroitement lié à la fonction cognitive.
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Déclara,ons d’intérêt •  Pour la liste complète des déclara,ons d’intérêt, reportez-­‐vous au lien Faculté et déclara,ons figurant sur la page principale du programme. Page 22
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Stella •  25 ans •  Agent immobilier •  TDM diagnos?qué il y a 2 ans •  A ini?alement reçu de l’escitalopram à 20 mg/jour •  Rechute il y a 5 mois •  Modifica?on du traitement et prise de venlafaxine jusqu’à 225 mg/jour Pour résumer ce cas, Stella a 25 ans. Elle est agent immobilier et un TDM lui a été diagnostiqué il y a 2 ans. Elle a initialement reçu
de l’escitalopram à 20 mg/jour, et comme elle a présenté une rechute il y a 5 mois, son traitement a été modifié pour recevoir de la
venlafaxine à 225 mg/jour.
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Cas : points essen,els •  Améliora?on de l’humeur et du sommeil suite au traitement du TDM •  Se sent beaucoup mieux, mais n’a pas ajeint une rémission complète •  Troubles de l’énergie, de la concentra?on et des fonc?ons exécu?ves •  Perte du désir sexuel •  Problèmes financiers en raison de la dégrada?on du fonc?onnement professionnel Comme nous l’avons vu, sa situation actuelle est bien meilleure, mais elle ne se sent pas complètement bien. Elle signale un
manque d’énergie et des troubles cognitifs, en plus d’autres troubles concernant notamment le désir sexuel. Que devons-nous
faire avec cette patiente ? Devons-nous attendre ? Devons-nous modifier son traitement ? Devons-nous prescrire aussi une
psychothérapie ? C’est quelque chose dont nous devons discuter.
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Diagnos,c différen,el • 
• 
• 
• 
TDM, rémission lente TDM, rémission par?elle Troubles cogni?fs légers Autres condi?ons –  Maladie neurologique –  Hypothyroïdie –  Toxicomanie Nous devons d’abord discuter du diagnostic. Comme mentionné précédemment, il s’agit d’une vidéo résumée en raison des
contraintes de temps. Je pense qu’il est clair que Stella est en dépression, comme il s’agit d’une consultation de suivi et que le
diagnostic a été posé. Le traitement a été plus ou moins efficace. Peut-on considérer qu’il s’agit d’une rémission lente ? Devonsnous attendre que les médicaments atteignent leur effet maximal ? Ou s’agit-il d’une rémission partielle ? Devons-nous être
plus ambitieux ? Stella a également mentionné qu’elle ne veut pas perdre les améliorations acquises grâce au traitement. Elle a
connu une amélioration significative sur le plan de l’humeur, et dans une certaine mesure, de l’énergie, du sommeil et d’autres
problèmes. À présent elle sort avec des amis et elle travaille.
Nous devons effectuer le diagnostic différentiel. Nous devons toujours prendre en compte la possibilité d’autres affections. Ce
serait une erreur que de supposer qu’il s’agit simplement d’une autre rechute. Nous devons nous assurer qu’il ne s’agit pas d’une
maladie neurologique ou d’hypothyroïdie. Nous le faisons au moyen de questions que nous posons au patient, et en cas de doute,
nous devons effectuer des analyses de sang ou même une évaluation neurologique.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Diagnos,c et évalua,on •  Évalua,on médicale –  Évalua?on neurologique approfondie –  Analyses de sang adéquates (TSH, drogues) –  IRM cérébrale si nécessaire •  Évalua,on neuropsychologique et fonc,onnelle –  Test de dépistage des troubles cogni?fs (MMSE, MoCA) –  Instrument de dépistage des troubles cogni?fs afin d’évaluer la fonc?on exécu?ve, la mémoire de travail, la vitesse de traitement (p. ex. DSST, N-­‐back ou SCIP) –  Bajerie de tests neuropsychologiques complète –  Recours à une échelle d’auto-­‐évalua?on cogni?ve et fonc?onnelle –  Évalua?on fonc?onnelle (FAST, UPSA-­‐B) Cette diapositive résume les options qui semblent envisageables, bien qu’elles ne soient pas toutes nécessaires pour chaque
patient. Une évaluation neurologique est pertinente mais dépend également de l’âge du patient. Si Stella était âgée de 65 ou 70
ans, il y a certains tests que je souhaiterais effectuer, car je craindrais la possibilité de troubles cognitifs légers, ou des premiers
symptômes de la démence, ou même la maladie de Parkinson. Elle ne semble pas présenter de trouble neurologique mais je
pense qu’il est important d’effectuer une évaluation neurologique. Les analyses de sang sont aussi importantes afin d’écarter une
anémie, une hypothyroïdie, et de rechercher une éventuelle consommation de drogue et d’alcool, etc. Je ne pense pas que Stella
nécessite une IRM, mais si elle était plus âgée j’en demanderais probablement une.
Puis il y a la question de l’évaluation neurocognitive. La plupart d’entre nous n’ont pas l’habitude de la pratiquer. Les médecins
généralistes et les psychiatres peuvent avoir de nombreux patients et n’ont pas le temps et parfois pas l’expertise pour effectuer
une évaluation neuropsychologique approfondie. Elle peut être un peu fastidieuse mais je pense qu’elle est nécessaire dans
certains cas. Pour un patient chez qui vous suspectez un trouble neurologique ou une maladie neurodégénérative, vous pouvez
envisager de faire le Mini-Mental State Examination (MMSE) ou le Montreal Cognitive Assessment (MoCA). Pour les affections
psychiatriques ou générales, vous pouvez évaluer les patients à l’aide d’un outil de dépistage rapide, comme le Digit Symbol
Substitution Test (DSST), qui mesure la vitesse de traitement ainsi que des troubles de la fonction exécutive et de la mémoire.
C’est un test simple qui peut être effectué en peu de temps. Il vous aide à évaluer la présence de troubles neurologiques même
s’ils sont liés à l’affection psychiatrique. Il y a aussi le test N-back, qui est un test court et simple au cours duquel le patient doit
compter à rebours un groupe de chiffres. Il y a aussi le Screen for Cognitive Impairment in Psychiatry (SCIP) qui est un autre outil
de dépistage rapide.
Dans le contexte hospitalier, ce que je fais et que je ferais avec cette patiente, c’est une batterie de tests neuropsychologiques
complète. Cela peut être un peu plus difficile que dans le cadre ambulatoire, mais je pense que cela vaut la peine d’effectuer une
batterie de tests neuropsychologiques, en particulier si des neuropsychologues sont disponibles pour les réaliser. Il est également
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utile de demander une auto-évaluation de l’état cognitif du patient car il n’y a pas de corrélation claire entre la perception que
les patients ont de leur mémoire, de leur état cognitif et de leurs troubles objectifs. Certains patients se plaignent de troubles
de la mémoire et lorsque vous effectuez l’évaluation objective, les troubles ne se révèlent pas si importants. L’inverse se produit
également, lorsque certains patients ne se plaignent pas de troubles de la mémoire, que vous faites ensuite un test et que vous
vous rendez compte qu’ils présentent des troubles objectifs.
Enfin, il est aussi intéressant de réaliser une évaluation fonctionnelle, si possible, et en fonction du contexte. Cela signifie avoir
recours à des échelles comme le Functional Assessment Screening Tool (FAST), qui est un test simple et court, et le Brief University
of California, San Diego, Performance-Based Skills (UPSA-B), qui est davantage un test de la fonction et qui mesure la performance.
Ques,ons-­‐réponses avec l’auditoire 2 En supposant qu’un TDM soit diagnos?qué, avec rémission par?elle, quelle stratégie thérapeu?que choisiriez-­‐vous ? 1. 
Poursuivre le traitement pendant encore 1 mois 2.  Augmenter la posologie de la venlafaxine à 300 mg/jour 3.  Administrer un autre an?dépresseur 4.  Compléter le traitement actuel avec un deuxième agent 5.  Ajouter la remédia?on cogni?ve Nous souhaiterions à présent vous poser une question. Je pense que nous sommes presque tous d’accord sur le diagnostic de
TDM avec une rémission partielle. Supposons un diagnostic de TDM, avec une rémission partielle, quelle stratégie thérapeutique
préféreriez-vous pour Stella ? 1) Poursuivre le médicament pendant encore 1 mois et voir si elle passe de 7 à 8, ou même à 9 ; 2)
Augmenter la posologie de la venlafaxine jusqu’à 300 mg/jour ; peut-être que son état s’améliorera avec une quantité un peu
plus importante du médicament ; 3) Basculer sur un antidépresseur différent qui peut avoir un profil différent ; 4) Compléter le
médicament actuel avec un second agent, qui augmente les propriétés de l’antidépresseur ou ayant des effets pro-cognitifs ; ou 5)
Ajouter la remédiation cognitive ? Veuillez voter, je vous prie.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Ques,on no. 2 : résultats en direct du symposium En supposant qu’un TDM soit diagnos?qué, avec rémission par?elle, quelle stratégie thérapeu?que choisiriez-­‐vous ? 1.  Poursuivre le traitement pendant encore 1 mois [VALUE]
% [VALUE]
% 2.  Augmenter la posologie de la venlafaxine à 300 mg/jour [VALUE]
% 3.  Administrer un autre an?dépresseur 4.  Compléter le traitement actuel avec un deuxième agent [VALUE]
% [VALUE]
% 1 2 3 4 5 5.  Ajouter la remédia?on cogni?ve Dr Vieta : Je suis ravi de voir que les réponses de l’auditoire sont assez disparates. C’est une bonne nouvelle que la majeure
partie d’entre vous ne soit pas en faveur de la poursuite du traitement. La poursuite du traitement en médecine n’est pas
nécessairement une mauvaise chose, mais je pense qu’il serait trop conservateur de continuer son médicament à sa posologie
actuelle. Si je souhaitais poursuivre son traitement, j’essaierais peut-être d’augmenter la posologie. L’autre option serait de
changer son traitement pour un autre antidépresseur, ce qui a des avantages et des inconvénients. Il n’y a pas de bonne réponse.
Vous avez tous raison. Les avantages d’un autre antidépresseur seraient qu’il pourrait y avoir des médicaments avec un meilleur
profil cognitif ou pouvant améliorer les symptômes sexuels. Il pourrait y avoir un effet supplémentaire au passage à un autre
antidépresseur, mais il existe également un risque de perdre l’effet déjà obtenu avec la venlafaxine. Cela dépend un peu de votre
approche personnelle et si vous êtes proactif et si vous appréciez le changement et l’innovation. Il y a ensuite la possibilité de
le compléter. Vous pourriez avoir recours à un second antidépresseur, un antipsychotique atypique à faible dose ou même le
modafinil, par exemple, qui est un médicament pro-cognitif qui pourrait améliorer ces symptômes. Enfin, je pense que l’ajout de la
remédiation cognitive est une excellente option, bien qu’elle ne soit pas facilement disponible pour la majorité des patients.
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Objec,fs thérapeu,ques à prendre en compte lors de l’évalua,on des possibilités de traitement •  Éviter une aggrava?on sur le plan de l’humeur, de l’irritabilité et du sommeil •  Améliorer l’énergie et le désir •  Améliorer la cogni?on •  Améliorer le désir sexuel •  Rétablir la fonc?on antérieure Lorsque vous envisagez des options de traitement, l’objectif est d’éviter d’aggraver les symptômes tout en améliorant la fonction.
Nous ne pouvons nous satisfaire de ce que nous avons accompli avec cette patiente jusque-là. Sinon, il y a des chances pour
qu’elle interrompe le médicament tôt ou tard si elle ne se sent pas mieux, avec des répercussions négatives sur sa famille et sa
situation professionnelle. Nous voulons améliorer son énergie, sa cognition, son désir sexuel si possible, et rétablir sa fonction
antérieure.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Discussion du groupe d’experts
Discussion du groupe d’experts Dr Demyttenaere : Merci Eduard. Nous avons une question de l’auditoire.
Membre de l’auditoire : Je viens du Canada. C’est un excellent scénario de cas. L’une de mes questions serait de savoir si un
trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH) peut être une comorbidité dont elle pourrait souffrir ? Le TDAH n’est
pas souvent diagnostiqué chez les jeunes femmes et chez les adultes, que ce soit chez les hommes ou les femmes. Est-ce que
cela pourrait peut-être faire partie du diagnostic ? J’ajouterais le test de dépistage et d’auto-évaluation des TDAH de l’adulte à 18
questions (ASRS).
Dr Vieta : Merci pour cette question. Nous n’avons pas fourni assez d’informations concernant le TDAH pour l’écarter dans ce
scénario de cas. Néanmoins Stella ne semble pas avoir connu ces problèmes précédemment. La question essentielle pour écarter
le TDAH est de l’interroger sur son enfance et ses antécédents scolaires. Je souhaiterais poser ces questions avant d’utiliser un outil
de dépistage. Pour être honnête, je ne suis pas trop pour les outils de dépistage en l’absence d’antécédents clairs de TDAH. Vous
avez raison dans le sens où ses antécédents ne sont pas clairs dans cette partie du scénario de cas.
Dr Demyttenaere : Y a-t-il d’autres questions ?
Membre de l’auditoire : Dans ce cas...
Dr Vieta : Je vais résumer vos propos car les gens assis au fond ne vous entendent pas. Vous avez mentionné une dégradation
nette de la performance professionnelle. Vous avez aussi dit qu’il nous faut plus d’informations concernant les problèmes
rencontrés dans ce cas, c’est exact ?
Membre de l’auditoire : Oui. Si elle pouvait être en arrêt et cela pourrait être négocié...
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Dr Vieta : Je suis d’accord. Comme on vous entend difficilement, je vais dire que c’est un scénario de cas qui résume de nombreux
problèmes. Dans chaque cas, il est nécessaire de prendre en compte tous les détails concernant la patiente, ses relations et son
travail. Dans ce scénario, nous montrons dans quelle mesure les aspects cognitifs sont pertinents et qu’ils sont clairement liés à sa
fonction et à son fonctionnement professionnel.
Dr Demyttenaere : Ce qui est intéressant dans le commentaire du membre de l’auditoire, c’est qu’en cas de symptômes cognitifs
chez les patients souffrant de dépression, il y a de grandes chances pour qu’ils soient dus à la dépression. Nous devons écarter
les autres causes possibles, comme vous le verrez dans le second scénario de cas avec l’abus d’alcool. Je suis aussi d’accord avec
la suggestion de l’auditoire de vérifier la présence d’un éventuel traumatisme crânien. Comme Eduard l’a mentionné lors de son
exposé sur la prise en charge, nous devons examiner pleinement d’autres causes de symptômes cognitifs.
Dr Vieta : Le commentaire sur le TDAH est également pertinent.
Dr Demyttenaere : Vous avez mentionné un autre point intéressant qui est celui de lui accorder un arrêt maladie ou non. Cela
pourrait faire l’objet d’un débat séparé et il est très intéressant d’évaluer les avantages et les inconvénients de lui accorder un arrêt
maladie.
Dr Vieta : Que feriez-vous dans ce cas, Bernhard ?
Pr Bernhard Baune : Nous avons discuté de la stratégie à adopter avec le médicament et s’il faut le compléter, le modifier ou
augmenter la posologie. On pourrait envisager l’une ou l’autre de ces options. J’approfondirais l’investigation sur le tempérament
de la patiente et les objectifs qu’elle souhaite atteindre dans un premier, deuxième et troisième temps. Si elle dit être déterminée
à augmenter sa fonction cognitive et sa fonction générale, j’envisagerais peut-être de lui administrer un autre médicament dont
l’efficacité a été prouvée dans ces domaines afin d’améliorer la cognition. Si elle hésite à le faire et qu’elle souhaite conserver ce qui
a été acquis jusqu’ici pendant encore quelques semaines, il serait alors bon d’augmenter la venlafaxine à 300 mg. Cela dépend de
cette interaction et de l’approfondissement.
Dr Demyttenaere : D’un autre côté, il peut y avoir un inconvénient à l’augmentation de la posologie de la venlafaxine à 300 mg.
Dans ce cas abrégé, nous ne savons pas si les troubles sexuels sont également dus à la prise de venlafaxine ou s’ils étaient
préexistants. Cela pourrait aussi être un indicateur afin de décider s’il serait correct de modifier ou d’augmenter la posologie de la
venlafaxine.
Dr Vieta : Les 3 questions de l’auditoire sont toutes très bonnes. La première est : « De nombreux patients se plaignent de la
cognition, mais l’évaluation neuropsychologique ne révèle aucun trouble. Les tests ne seraient-ils pas assez bons ? »
Cela est vrai, mais ce que nous trouvons parfois c’est que ces patients semblent se porter bien, mais qu’ils peuvent avoir connu
de bien meilleures performances avant leur dépression. Ils semblent parfois aller bien au regard de la norme, mais ils ont perdu
certaines capacités fonctionnelles. Les autres questions sont que la dépression peut entraîner une perte de confiance et d’énergie
dans la réalisation des tests. Cela peut fausser les performances.
Une autre question qui est liée à la précédente est : « Devons-nous mesurer les troubles cognitifs avant de démarrer le
traitement ? » Ma réponse est oui, mais je comprends que cela pose des questions pratiques notamment la façon de réaliser
ces tests. Je suis relativement pour une évaluation très rapide, aussi minutieuse que possible, car c’est une dimension qui a été
négligée jusque-là. Idéalement, au moins une évaluation subjective pouvant être auto-administrée par le patient fournit des
indications. Ce n’est pas parfait, même si vous pouvez aussi avoir recours à l’un des tests de dépistage.
Enfin, une autre question est : « Et si on complétait le traitement avec des analeptiques dans ce type de cas ? » J’ai mentionné le
modafinil, qui n’est pas nécessairement un analeptique. La question mentionne le méthylphénidate ou d’autres analeptiques. Cela
pourrait être une possibilité, bien que je ne sois pas sûr que ce soit utile. Je n’y ai pas recours habituellement, mais je n’ai pas vu de
problèmes particuliers dans les cas où il était utilisé, en particulier en cas de TDAH. S’il y a un antécédent de TDAH, c’est tout à fait
indiqué. Sinon, je ne suis pas particulièrement pour.
Dr Baune : J’aimerais commenter la stratégie visant à compléter le traitement avec du méthylphénidate. Si l’on s’intéresse aux
données concernant le traitement de la dépression avec un antidépresseur associé au méthylphénidate, il n’y a pas de bénéfice
sur la dépression[5] . Il n’y a de bénéfice que si le TDAH est la comorbidité la plus importante. En plus des médicaments, une option
était la remédiation cognitive à visée thérapeutique. Dans le cas de Stella, elle a déjà montré une amélioration du profil de ses
symptômes. Je pense qu’elle pourrait probablement tirer parti de l’apprentissage cognitif ou de la remédiation cognitive, si elle
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
peut se libérer du temps dans son emploi du temps chargé. Peut-être une association des deux, bien qu’il y ait peu de données
publiées à ce jour. En tant que cliniciens, nous devons envisager de prescrire un traitement s’il est disponible.
Dr Demyttenaere : Je souhaitais ajouter qu’il y a même quelques articles montrant qu’un traitement psychodynamique à court
terme améliore la fonction neurocognitive[6] . C’est parce que les émotions et d’autres aspects peuvent aussi contribuer aux
symptômes cognitifs. Et pas uniquement la remédiation cognitive. Nous allons prendre une dernière question avant de passer au
second scénario de cas.
Membre de l’auditoire : Ma question concerne le fait que Stella est une femme très jeune. Elle souffre de troubles cognitifs et
d’une diminution du désir sexuel. Pourquoi pas le bupropion dans ce cas ?
Dr Vieta : Le bupropion est une possibilité, évidemment. À ma connaissance, il n’y a pas d’étude montrant que le bupropion a
pour résultat principal un effet positif sur la cognition, par rapport à un placebo. Néanmoins le profil du bupropion est approprié,
et bien que théorique, il peut être une possibilité.
Cas 2 : Pa,ent souffrant de TDM avec abus de substance -­‐ 1re par,e, visite chez le MG Dr Demyttenaere : Il est temps à présent de passer au second scénario de cas qui concerne Martin. Il y a un court entretien avec
un médecin généraliste (MG) qui est d’abord très enthousiaste. Le patient est orienté vers le psychiatre et nous visionnerons cet
entretien. Intéressons-nous à la première partie du scénario 2.
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Cas 2 : Patient souffrant de TDM avec abus de substance - 1re partie, visite chez le MG
Narrateur : Martin Hammond a 52 ans et a récemment été licencié de son poste de directeur commercial export. Martin est
légèrement en surpoids, mais à part cela il est en relativement bonne santé physique. Il consulte son médecin généraliste car sa
femme s’inquiète de son humeur maussade et de l’augmentation de sa consommation d’alcool.
Le MG : M. Hammond, asseyez-vous, je vous en prie.
Martin : Merci, docteur.
Le MG : Cela fait longtemps que je vous ai vu.
Martin : Oui, ça doit faire un moment.
Le MG : Qu’est-ce qui vous amène aujourd’hui ?
Martin : Eh bien, je me sens constamment fatigué. Je ne trouve pas l’énergie de faire quoi que ce soit.
Le MG : Je vois. Pensez-vous dormir plus ou moins comme d’habitude ?
Martin : En fait, cela fait un moment que je n’arrive pas à bien dormir. Parfois je prends quelques verres pour m’aider à dormir,
mais ma femme s’inquiète, elle trouve que je bois trop.
Le MG : Pensez-vous que quelque chose en particulier puisse influencer votre sommeil ?
Martin : J’ai perdu mon emploi récemment, mais j’avais déjà du mal à dormir avant de perdre mon emploi.
Le MG : Êtes-vous d’accord avec les inquiétudes de votre femme concernant votre consommation d’alcool ? Avez-vous pensé
que vous devriez réduire votre consommation ?
Martin : Oui, je bois probablement plus qu’avant, mais ça a été dur récemment.
Le MG : Est-ce que cela vous agace que votre femme critique votre consommation d’alcool ou certaines personnes vous ontelles agacé en commentant votre consommation d’alcool ?
Martin : Je pense qu’elle en rajoute. Mon directeur m’a fait un commentaire une fois, mais je voulais juste lui dire que c’est la
pression qu’il me mettait qui me faisait boire.
Le MG : Votre travail a-t-il été à l’origine d’un stress important ?
Martin : Oui. Tous les mois, il fallait que mon département fasse de meilleures ventes. C’est impossible d’augmenter les ventes
tous les mois.
Le MG : Cela m’a tout l’air d’être une source de pression.
Martin : C’était le cas. Je veux dire, j’adorais mon travail et tous ces défis. J’étais vraiment très bon dans mon domaine. Puis toute
la pression est arrivée et je n’arrivais plus à dormir la nuit et j’étais si fatigué, j’ai remarqué que je n’arrivais plus à avoir le même
niveau d’attention lors des réunions et j’oubliais en permanence de faire le suivi.
Le MG : Cette pression a-t-elle aussi eu un effet sur votre humeur ?
Martin : J’imagine que oui.
Le MG : Pouvez-vous expliquer ce que vous avez ressenti ?
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Martin : Eh bien, j’étais probablement malheureux la plupart du temps. Ma femme dit que cela fait déjà un moment que je suis
maussade. Elle avait l’habitude de me demander comment s’était passée ma journée, mais je ne voulais pas vraiment en parler
car je commençais à me sentir nul.
Le MG : Je vois. Maintenant que vous n’êtes plus dans cet environnement, est-ce que vous ressentez la même chose ?
Martin : C’est pire maintenant, docteur. J’ai peur de ne pas retrouver un emploi mais je n’ai même pas envie de chercher et
de passer des coups de téléphone. Parfois je n’ai même pas envie de sortir du lit et de m’habiller. Le fait que je bois énerve ma
femme. Je commence à penser qu’elle serait mieux sans moi.
Le MG : Que voulez-vous dire, M. Hammond ?
Martin : Eh bien l’autre jour je cherchais quelque chose dans le garage et je suis tombé sur une corde, et j’ai commencé à me
demander ce que je ressentirais, mais j’ai pris conscience que ce serait ridicule. Mais j’ai peur du simple fait d’y avoir pensé. Tout
semble aller de mal en pis.
Le MG : D’accord, je comprends. Cela fait beaucoup de pression. Cela ressemble à une dépression, M. Hammond. Il y a de
nombreux facteurs pouvant contribuer à la fatigue permanente, donc j’aimerais bien vous faire faire des analyses de sang afin
de vérifier qu’il n’y a rien sur le plan physique que nous devrions savoir, mais je pense que la principale priorité est de vous
procurer de l’aide pour votre humeur globale et votre santé mentale.
Martin : Une dépression ? Vous êtes sûr ? Je n’ai jamais eu ça auparavant.
Le MG : La dépression peut arriver à toute étape de la vie, et il semble que vous ayez subi beaucoup de pression au travail, donc
j’aimerais vous apporter l’aide nécessaire pour vous en remettre.
Martin : D’accord.
Le MG : Vous avez fait face à de nombreuses difficultés, donc je pense que ce serait une bonne idée pour vous de discuter avec
un psychiatre.
Martin : Pensez-vous vraiment que cela soit nécessaire ?
Le MG : La dépression peut être très invalidante, M. Hammond. Il y a un certain nombre de traitements qui peuvent faire une
grande différence, mais nous devons trouver celui qui vous convient le mieux. Vous avez évoqué un certain nombre de choses
qui me font penser qu’un psychiatre serait la personne la plus appropriée. Je pense vraiment que vous êtes déprimé, mais votre
consommation d’alcool et la façon dont vous avez perdu votre emploi méritent d’être approfondies. Un psychiatre pourrait avoir
une meilleure idée de ce qui vous arrive et envisager toutes les possibilités de traitement disponibles.
Martin : Entendu. Je vais essayer.
Le MG : C’est bien. J’espère vraiment que cela vous aidera.
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Discussion du groupe d’experts
Dr Demyttenaere : Il s’agissait de la vidéo avec le médecin généraliste. Avant de passer à la deuxième partie, il serait intéressant
de demander à Sarah Bromley si elle pense qu’il est un peu tôt pour orienter ce patient immédiatement vers un psychiatre ?
Sarah Bromley, MBChB : Du point de vue du Royaume-Uni, il serait inhabituel de l’orienter après une telle consultation. C’est
évidemment la même chose que pour le dernier cas, c’est-à-dire montrer une courte scène afin d’amener le propos. Il s’agit
probablement de 3 ou 4 consultations condensées en une. Normalement nous passerions plus de temps à explorer les autres
choses dont il parle. Nous le reverrions encore après les résultats des analyses de sang. Il faut s’y intéresser avant de l’orienter
vers un psychiatre. Ceci dit, je pense qu’au Royaume-Uni, 90 % des patients souffrant de dépression sont traités dans le cadre
des soins primaires. Ceci dit, Martin montre bien des signes de détresse. Il a des idées suicidaires, il boit. Il a 52 ans et se trouve
ainsi dans la tranche d’âge pour laquelle le risque de suicide est le plus élevé. Il y a des facteurs qui me pousseraient à explorer le
risque de suicide et à chercher une aide supplémentaire. Peut-être devrions-nous envisager de l’orienter plus tôt qu’un patient ne
présentant pas ces facteurs de risque.
Dr Demyttenaere : Merci pour ce commentaire. Je pense que l’approche en matière d’orientation diffère d’un pays à l’autre. Nous
pourrons revenir là-dessus au cours de la discussion tout à l’heure. Tout d’abord, nous avons une question pour l’auditoire.
Que souhaiteriez-vous approfondir principalement chez ce patient ? 1) Sa consommation d’alcool ; 2) Son insomnie ; 3) Son
sentiment de dévalorisation ; 4) Ses difficultés au travail ; ou 5) Les résultats de ses analyses de sang ?
Ques,ons-­‐réponses avec l’auditoire 3 Que souhaiteriez-­‐vous approfondir principalement chez ce pa?ent ? 1.  Sa consomma?on d’alcool 2.  Son insomnie 3.  Son sen?ment de dévalorisa?on 4.  Ses difficultés au travail 5.  Les résultats de ses analyses de sang Page 35
Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Ques,on no. 3 : résultats en direct du symposium Que souhaiteriez-­‐vous approfondir principalement chez ce pa?ent ? [VALUE]
% 1.  Sa consomma?on d’alcool [VALUE]
2.  Son insomnie % [VALUE]
% 3.  Son sen?ment de dévalorisa?on 4.  Ses difficultés au travail 5.  Les résultats de ses analyses de sang [VALUE]
% [VALUE]
% 1 2 3 4 5 Dr Demyttenaere : Les réponses de l’auditoire sont intéressantes. Sarah, nous en avons parlé auparavant, vous avez dit que
pour ce qui est des soins psychiatriques, un patient présentant un abus d’alcool verrait sa prise en charge refusée tant que son
problème lié à l’alcool n’est pas traité.
Dr Bromley : Il y a des différences entre les systèmes dans le monde, mais au Royaume-Uni en effet, un patient toxicomane
ou alcoolique serait orienté dans une direction et un patient avec des problèmes psychiatriques serait orienté dans une autre
direction. Pour les patients comme Martin, il est très important de les évaluer dans l’ensemble. Dans le cadre de mon travail dans
le secteur pénitentiaire, je vois souvent des personnes exclues des services psychiatriques en raison de leur toxicomanie, et par
conséquent leurs troubles mentaux ne sont pas traités. C’est une tragédie.
Dr Demyttenaere : L’abus d’alcool est-il un trouble mental ou est-ce quelque chose de différent ? Je vous laisse y réfléchir.
Dans l’intervalle, Martin a pu trouver un psychiatre. Nous allons visionner la deuxième partie de ce scénario de cas, qui est
l’entretien avec le psychiatre.
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Cas 2 : Pa,ent souffrant de TDM avec abus de substance -­‐ 2e par,e, visite chez le psychiatre Page 37
Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Cas 2 : Patient souffrant de TDM avec abus de substance - 2e partie, visite chez le psychiatre
Le psychiatre : J’ai reçu une lettre de votre médecin traitant, le Dr Dawson.
Martin : Oui.
Le psychiatre : Il dit que vous avez vécu des moments difficiles récemment au travail et à la maison et que vous vous sentez
déprimé et accablé.
Martin : C’est vrai.
Le psychiatre : Comment vous sentez-vous aujourd’hui ?
Martin : Je suis très fatigué aujourd’hui, comme d’habitude. Je n’ai pas bien dormi la nuit dernière. J’ai failli ne pas venir car je ne
me sentais pas de venir. Je ne pense pas que cela aura un quelconque bénéfice, mais ma femme m’a forcé, alors...
Le psychiatre : Continuez, M. Hammond.
Martin : Je n’ai juste plus envie de faire quoi que ce soit ni d’aller nulle part. J’ai peur de ne pas retrouver de travail. La semaine
dernière, un ami m’a dit qu’une entreprise cherchait un manager avec mon expérience, mais je n’avais pas envie d’appeler, et
lorsque je me suis forcé à le faire j’avais oublié où j’avais mis les coordonnées.
Le psychiatre : Avez-vous eu des difficultés d’organisation dans le passé ?
Martin : Non, d’habitude je suis proactif et organisé. Je ne sais pas ce qui m’est arrivé.
Le psychiatre : Vous souvenez-vous quand est-ce que vous avez commencé à ressentir cela pour la première fois ?
Martin : Je suppose que c’était il y a un an. Il y avait beaucoup de pression au travail. Une nouvelle équipe de direction, des
cibles plus agressives. J’ai commencé à angoisser à l’idée d’aller travailler. Il fallait en faire tellement pour être à la hauteur, mais
je n’avais pas vraiment l’esprit à ça.
Le psychiatre : Vous oubliiez des choses et vous faisiez des erreurs ?
Martin : Oui. Et ça semblait s’aggraver encore et encore.
Le psychiatre : Pouvez-vous me donner des exemples ?
Martin : Une fois j’ai fait une erreur dans les prévisions pour mon département. Elles étaient environ 20 % plus élevées qu’elles
auraient dû l’être, et cela a causé beaucoup de problèmes.
Le psychiatre : Vous n’aviez jamais fait ça auparavant ?
Martin : Non, jamais. J’ai toujours été très méticuleux, surtout avec les chiffres.
Le psychiatre : Eh bien, on dirait que vous aviez beaucoup de responsabilités. Quelles sont les autres choses que vous avez alors
commencé à trouver plus difficiles ?
Martin : J’organisais de nombreuses réunions et certaines peuvent devenir très animées. J’ai commencé à avoir du mal à suivre
le fil de la discussion et parfois je n’étais pas bien sûr de ce qui c’était dit.
Le psychiatre : Je vois. Donc vous dites que vous avez ressenti une modification de l’humeur, que vous avez commencé à vous
sentir déprimé, approximativement en même temps que vous avez commencé à avoir des difficultés de concentration et pour
faire des tâches au travail ?
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Martin : Oui, j’imagine que c’était au même moment.
Le psychiatre : Je vois. Vous avez dit que vous étiez angoissé à l’idée d’aller travailler. Comment vous sentiez-vous en général ?
Martin : Pour être honnête, tout a commencé à sembler vide de sens. Je ne voulais plus sortir avec des amis ou inviter des gens
à dîner. Le week-end, au lieu de m’occuper du jardin, j’ai commencé à rester assis à ne rien faire. J’ai plus de temps maintenant
que lorsque je travaillais mais mon jardin n’a jamais été aussi mal entretenu.
Le psychiatre : Même si vous ne travaillez plus, vous trouvez encore que vous avez du mal à vous concentrer ?
Martin : Oui. Je ne suis même pas utile à ma femme car j’oublie de faire ce qu’elle me demande de faire. Je commence à lire le
journal, mais en général je laisse tomber après la première page, car je n’accroche pas vraiment.
Le psychiatre : Buvez-vous plus qu’avant ?
Martin : Oui.
Le psychiatre : Quand avez-vous commencé à boire, M. Hammond ?
Martin : Probablement quelques mois après que tout le reste a commencé. Je ne dormais pas bien, alors j’ai commencé à boire
avant d’aller au lit pour m’aider à dormir, et ensuite j’ai commencé à boire plus tôt. Puis c’est devenu 2 verres, puis 3.
Le psychiatre : Est-ce que vous buviez durant votre journée de travail ?
Martin : Pas au travail, mais au cours d’une sortie avec d’autres managers de l’équipe un soir j’ai trop bu. Mon directeur en a
parlé le lendemain.
Le psychiatre : Le Dr Dawson a un peu peur que vous pensiez que votre femme s’en sortirait mieux sans vous ?
Martin : Oui. Je le pense vraiment parfois, mais je ne vais pas faire de bêtise. J’y ai pensé une fois seulement et je sais qu’il y a
quelque chose qui cloche chez moi pour avoir ne serait-ce qu’envisagé de faire une telle chose, mais tout semble tellement
désespéré.
Le psychiatre : Ce que vous ressentez, M. Hammond, n’est pas inhabituel pour quelqu’un qui a subi le type de pression que
vous avez subie. Vos analyses de sang montrent qu’il n’y a pas de cause physique apparente expliquant vos symptômes. Vous
souffrez de ce que l’on appelle un trouble dépressif majeur. Ce qui est important c’est que vous sachiez que l’on peut faire
quelque chose. Il faut que vous commenciez à prendre un traitement. Vous ne verrez pas les changements en quelques jours,
mais d’ici quelques semaines vous commencerez au moins à vous sentir comme avant.
Martin : Merci, docteur. Je n’ai pas vraiment envie de continuer à me sentir comme ça.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Comment prendre en charge un pa,ent souffrant de TDM avec abus de substance ? Pr Bernhard Baune Professeur et ?tulaire de la chaire de psychiatrie ; Chef du service de psychiatrie École de médecine, Royal Adelaide Hospital Université d’Adélaïde Adélaïde, Australie Dr Demyttenaere : C’était là la deuxième partie du deuxième scénario de cas. J’ai le plaisir d’inviter Bernhard à commenter ce cas.
Comment prendre en charge un patient souffrant de TDM avec abus de substance
Dr Baune : Merci beaucoup.
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Déclara,ons d’intérêt •  Pour la liste complète des déclara,ons d’intérêt, reportez-­‐vous au lien Faculté et déclara,ons figurant sur la page principale du programme. Page 41
Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Mar,n •  Perte d’énergie, sensa?on de fa?gue, aucun désir •  Baisse de la concentra?on et des fonc?ons exécu?ves •  Triste et malheureux avec de brèves pensées suicidaires •  Retrait social •  Perte de confiance •  Problème lié à l’alcool •  Sans emploi Ce qui est particulièrement intéressant dans ce cas c’est que nous avons une vision assez compréhensive de la partie avec
le médecin généraliste complétée par la visite chez le psychiatre. Ce qui devient très clair, c’est que la visite chez le médecin
généraliste recueille les symptômes que le patient a présentés sur le plan transversal et que la visite chez le psychiatre essaie de
dissocier les causes et les effets ainsi que la période correspondant à l’apparition des symptômes et ses effets.
J’aimerais étudier cela plus en détail. Jusqu’ici, nous avons vu que le patient présentait de nombreux symptômes et dans une
multitude de domaines de symptômes. Nous avons commencé avec l’énergie, les symptômes de l’humeur, puis la fonction
cognitive a été altérée. Il ne pouvait pas très bien lire ni se concentrer. En outre, il a développé des troubles du fonctionnement
au travail, en particulier une altération des performances. Et en plus de cela, il essayé de compenser ses symptômes en utilisant
l’alcool en auto-médication, ce qui a commencé un peu plus tard. Il a aussi développé des problèmes en rapport avec cela. Par
conséquent, il ne souhaitait pas voir du monde et sa famille et sa vie sociale en ont, dans une certaine mesure, compati. Tout cela a
abouti à la perte de son emploi. Il est donc très important pour nous, avant de commencer à traiter un patient, de dissocier causes
et effets.
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Évalua,on •  Clarifier les antécédents : cause et évolu?on des symptômes –  Les troubles cogni?fs et de la fonc?on dans le cadre professionnel et personnel contribuent largement à l’appari?on et à l’évolu?on de la dépression –  Le stress et les modifica?ons des ajentes dans le cadre professionnel peuvent être la cause comme l’effet –  L’abus d’alcool est secondaire à la dépression –  Le retrait social est secondaire à la perte de la fonc?on et aux symptômes de la dépression sur le long terme –  La lassitude de l’existence et le sen?ment d’inu?lité se développent plus tard et illustrent la sévérité de l’épisode Dans la présentation du cas, Martin a dit que les problèmes avaient commencé il y a un an environ, lorsqu’il a remarqué une plus
forte pression au travail qu’il ne parvenait pas à bien gérer et qu’il a commis des erreurs. Il avait également des problèmes de
performance. À ce stade, il est difficile de dire d’où cela vient et si c’est lié au stress ou s’il s’agit d’une réponse à l’augmentation
des problèmes au travail. Des problèmes cognitifs initialement présents peuvent avoir entraîné des problèmes de performance
au travail, ainsi ce serait davantage une conséquence qu’une cause. Ensuite, lorsqu’il y a d’abord une baisse des performances au
travail, le stress augmente en raison de son incapacité à démontrer des performances. Il y a une sorte de réaction en chaîne et une
spirale descendante chez ce patient.
La consommation d’alcool est assez clairement un problème secondaire en matière de développement dans le temps.
Évidemment, nous aimerions également savoir si cet homme a consommé de l’alcool auparavant ou s’il a des antécédents de
problèmes liés à des drogues ou à l’alcool, ce que nous n’avons pas entendu ici. Ce serait des questions supplémentaires à poser
au cours d’un entretien plus approfondi.
Nous pouvons déterminer que la perte des interactions sociales est davantage une conséquence de la perte de fonction et
de confiance et de l’augmentation des symptômes de l’humeur de la dépression, du sentiment de désespoir et de la lassitude
de l’existence. Je pense que nous rencontrons souvent ce type de patients dans nos cabinets. On voit bien dans ce cas une
aggravation des symptômes au fil du temps. Ils ne sont pas arrivés soudainement. Ils sont apparus lentement au cours de l’année
précédente dans ce cas particulier.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Évalua,on (suite) •  Évalua?on de l’humeur, cogni?ve et fonc?onnelle –  Consulta?on d’un psychiatre et évalua?on de l’abus d’alcool –  Instrument de dépistage des troubles cogni?fs afin d’évaluer la fonc?on exécu?ve, la mémoire de travail, la vitesse de traitement (p. ex. DSST) –  Évalua?on clinique de la fonc?on professionnelle et sociale, des rela?ons, des loisirs –  Recours à une échelle d’auto-­‐évalua?on cogni?ve et fonc?onnelle •  Évalua?on médicale –  Vérifica?on des analyses de sang en vue de la fonc?on hépa?que en raison de l’alcoolisme et afin d’exclure d’autres causes possibles de la dépression –  TDM et/ou IRM cérébrales Il y a une dissociation dans l’évolution temporelle des symptômes sur 1 année. Ce qu’il faudrait faire dans ce cas, comme dans le
précédent, c’est approfondir l’entretien avec le psychiatre au moyen d’autres questions pertinentes, d’une évaluation du risque et
ainsi de suite. Pour ce patient, l’évaluation de l’abus d’alcool doit être approfondie afin d’exclure des antécédents de problèmes
liés à l’alcool, ainsi que des antécédents de problèmes de gestion du stress. Précédemment, lorsqu’il rencontrait des problèmes
au travail, comment les gérait-il ? Le schéma était-il similaire ou différent ? Je pense aussi que ce patient pourrait bénéficier
d’instruments ou de questions de dépistage concernant les performances cognitives, en particulier pour la fonction exécutive,
dans la mesure où il a commis une erreur dans la prévision des ventes pour son département. Cela impliquait peut-être des
problèmes de calcul. La mémoire de travail était un problème et il serait possible de faire un test comme le DSST, qui est un test
court pouvant être réalisé en 90 ou 120 secondes. Des tests de la mémoire de travail comme le test N-back peuvent être mis en
place assez facilement. Des tests de dépistage courts ont maintenant été développés et durent environ 10 ou 15 minutes en tout.
Ils associent des évaluations objectives et subjectives de la fonction cognitive. L’outil Thinc est en cours de développement et sera
probablement disponible l’année prochaine. L’objectif est de disposer d’un test court, facile et fiable pouvant être utilisé dans la
pratique clinique. Les psychiatres devraient pouvoir l’administrer eux-mêmes plutôt que d’avoir recours à un autre intervenant
pour l’évaluation cognitive approfondie.
Les questionnaires d’auto-évaluation peuvent être utilisés pour mesurer la fonction. Dans ce cas, le problème concernant le
fonctionnement professionnel était très clair. Il pourrait être évalué tout comme le fonctionnement social. Le fonctionnement
interpersonnel pourrait aussi faire l’objet d’une évaluation plus approfondie. Nous avons entendu le psychiatre dire que les
analyses de sang étaient négatives, il n’y a donc pas de problème physique. Il serait sans doute de bon sens de réaliser une TDM
ou une IRM chez cet homme en relation avec l’abus d’alcool, en fonction de la durée des problèmes liés à l’alcool, afin d’évaluer
une atrophie ou des modifications sur le plan cérébral.
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Diagnos,c différen,el •  Épisode dépressif majeur •  Abus d’alcool/dépendance •  Trouble neurologique/encéphalite ? Pour le diagnostic différentiel, en matière de hiérarchie et de priorités, je dirais qu’il s’agissait d’un épisode dépressif majeur. Et en
second lieu, il y a l’abus d’alcool et la dépendance. Un autre point important à prendre en compte, mais relativement improbable,
est un éventuel trouble neurologique tel qu’une encéphalite. Il faut garder cela à l’esprit. Les analyses de sang auraient montré des
résultats négatifs pour les marqueurs de l’inflammation, même s’il existe des types d’encéphalite non inflammatoire. Ce n’est pas
une garantie et c’est assez improbable, mais c’est un point à approfondir.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Ques,ons-­‐réponses avec l’auditoire 4 En supposant qu’un épisode dépressif majeur soit diagnos?qué, quelle approche thérapeu?que choisiriez-­‐vous ? 1. 
Traiter d’abord l’alcoolo-­‐dépendance 2.  Traiter d’abord la dépression 3.  Traiter la dépression et l’alcoolo-­‐dépendance en
même temps 4.  Traiter les symptômes cogni?fs 5.  Traiter tous les symptômes à la fois J’aimerais vous poser une question. En supposant qu’un épisode dépressif majeur soit diagnostiqué, que feriez-vous et quelle
approche thérapeutique choisiriez-vous ? 1) Traiter d’abord l’alcoolo-dépendance ; 2) Traiter d’abord la dépression ; 3) Traiter les
deux en même temps ; 4) Traiter les symptômes cognitifs ; ou 5) Traiter tous les symptômes à la fois.
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Ques,on no. 4 : résultats en direct du symposium En supposant qu’un épisode dépressif majeur soit diagnos?qué, quelle approche thérapeu?que choisiriez-­‐vous ? [VALUE]
1. 
Traiter d’abord l’alcoolo-­‐
dépendance 2. 
Traiter d’abord la dépression 3. 
Traiter la dépression et l’alcoolo-­‐
dépendance en même temps 4. 
Traiter les symptômes cogni?fs 5. 
Traiter tous les symptômes à la fois % [VALUE]
% [VALUE]
% [VALUE]
% [VALUE]
% 1 2 3 4 5 Dr Baune : Dans l’auditoire présent, 43 % des répondants traiteraient la dépression et l’alcoolo-dépendance en même temps. Cela
va légèrement à l’encontre des systèmes dans lesquels nous travaillons, comme au Royaume-Uni. D’autres systèmes de santé en
Europe ou dans le monde ne nous autoriseraient pas à le faire ou le feraient avec certaines difficultés entre les disciplines. Je serais
d’accord pour dire que c’est l’approche la plus raisonnable.
D’un autre côté, certains participants traiteraient d’abord l’alcoolo-dépendance. Il existe un argument qui appartient peut-être
à la vieille école. Si vous traitez l’alcoolo-dépendance et que la dépression persiste par la suite, il peut alors s’agir d’une véritable
dépression. C’est comme un essai thérapeutique. Il y a une certaine vérité, c’est pourquoi j’y souscris quelque peu. Vingt-trois
pour cent d’entre vous voulaient traiter d’abord la dépression et 27 % étaient pour le traitement de tous les symptômes. Le
traitement des symptômes cognitifs seul semble aussi être une minorité, ce qui est raisonnable si l’on s’intéresse davantage
aux conséquences plutôt qu’aux causes de cet épisode dépressif. Néanmoins, vous pourriez argumenter qu’en traitant tous les
symptômes à la fois, cela inclura les symptômes cognitifs.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Traitement •  Principes –  Traiter la dépression de manière efficace –  Traiter le sevrage alcoolique et l’abus d’alcool au sens large –  Avoir recours à des médicaments et à un suivi psychologique •  Envisager un an?dépresseur ayant une efficacité sur l’humeur, la fonc?on cogni?ve et les fonc?ons générales •  Envisager une classe d’an?dépresseur bien tolérée et envisager d’éventuels effets indésirables hépa?ques •  Prendre en charge les symptômes cogni?fs et fonc?onnels en étudiant des op?ons thérapeu?ques pharmacologiques et non pharmacologiques •  Envisager une orienta?on vers un programme de remédia?on cogni?ve •  Mejre en place un programme de sevrage alcoolique à long terme au-­‐
delà du traitement de désintoxica?on Ce cas montre clairement qu’il faut traiter la dépression de manière efficace. Il faut traiter le sevrage alcoolique et l’abus d’alcool
en même temps. Nous devons aussi envisager, en plus des médicaments ou des antidépresseurs, de les combiner avec des
interventions psychologiques comme la thérapie cognitivo-comportementale (TCC), la remédiation cognitive ou la thérapie
d’apprentissage cognitif. Pour ce qui est de l’association d’un médicament et de la TCC ou de la remédiation cognitive, les
approches les plus efficaces semblent être celles avec lesquelles il y a une amélioration grâce au médicament initial, et par la suite,
une fois que l’amélioration a été observée sur le plan clinique, la TCC ou la remédiation cognitive est mise en place[7]. L’association
semble être essentielle ici.
Nous devons probablement envisager l’administration d’un antidépresseur ayant démontré une efficacité dans le traitement de
la dépression et des symptômes cognitifs. Sur le plan clinique, je vois que ce patient a d’abord présenté une altération cognitive
ou une altération du fonctionnement professionnel ayant abouti à la dépression et la spirale descendante face au stress et
à l’incapacité de gérer la hausse des exigences professionnelles. Je prescrirais un médicament qui améliore véritablement la
fonction cognitive au cours des évaluations et je prendrais également en compte les changements suite au début du traitement.
Comme mentionné précédemment, il est très important de donner la possibilité d’améliorer la fonction cognitive grâce à des
programmes de remédiation cognitive, bien que ce ne soit pas facile à réaliser.
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Principes généraux de la discussion •  Rôle des symptômes cogni?fs et de la perte fonc?onnelle dans l’appari?on et l’évolu?on de la dépression •  Rôle de l’alcool sur les symptômes de la dépression et sa contribu?on aux symptômes cogni?fs de la dépression •  Évalua?on de la fonc?on cogni?ve et générale par un psychiatre •  Le traitement de l’abus d’alcool est essen?el afin d’améliorer la dépression et les symptômes cogni?fs •  Envisager des interven?ons pharmacologiques et non pharmacologiques pour traiter la dépression, l’abus d’alcool, les symptômes cogni?fs et la perte fonc?onnelle Voici quelques points généraux pour la discussion du groupe d’experts maintenant et pour vos fiches de questions. Quel peut
être le rôle des symptômes cognitifs et de la perte fonctionnelle dans l’apparition et la cause de la dépression ? Je crois que
ces scénarios de cas nous montrent une simulation, mais qu’il y a bien plus à dire. En ce qui concerne le rôle de l’alcool et de la
dépression par rapport aux symptômes, l’alcool diminue-t-il la capacité générale à ressentir des émotions, à réfléchir ? Il peut avoir
un impact négatif sur la fonction cognitive et par conséquent il contribue directement à l’augmentation des symptômes de la
dépression. Nous devons encore discuter de la façon d’évaluer certains aspects de la cognition et de la fonction générale.
Discussion du groupe d’experts
Dr Demyttenaere : Merci Bernhard. Le groupe d’experts va maintenant répondre à une ou deux questions puis nous passerons à
la présentation de Sarah sur la perspective d’un médecin généraliste.
Dr Vieta : J’ai un commentaire. Comme Sarah l’a mentionné précédemment, il y a deux façons de suivre le système dans de
nombreux pays. L’une est de suivre la voie de l’abus de substance et l’autre celle de la dépression. Mon avis dans ce cas est que
la dépression semble être prioritaire. Donc même si ma réponse à votre question était que je traiterais l’ensemble, honnêtement,
je tenterais de traiter la dépression. Je ne laisserais pas de côté les troubles cognitifs, sinon nous pourrions avoir la même chose
qu’avec Stella, une amélioration de la dépression mais pas de la cognition. Puis j’envisagerais une prise en charge psychologique
de la dépendance à l’alcool afin de voir si le patient arrêterait de boire. Je ne conseillerais pas nécessairement un expert en matière
d’abus de substance, mais plutôt un suivi psychologique tel qu’une psychothérapie visant à améliorer la dépression tout en
essayant de convaincre le patient d’arrêter de boire. Je pense que cela fonctionne souvent dans de tels cas, lorsque la dépendance
à l’alcool n’est pas installée sur le long terme.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Dr Baune : Je suis d’accord. C’est un bon argument.
Dr Bromley : Je voulais dire que pour le moment nous ne savons pas s’il est dépendant. Nous savons seulement qu’il consomme
de l’alcool et qu’il en consomme plus qu’il ne faudrait. Il ne serait donc pas dans son intérêt de suivre cette voie en supposant
d’abord qu’il est dépendant à l’alcool.
Dr Demyttenaere : Merci. J’ai le plaisir d’inviter Sarah à commenter la perspective du médecin généraliste.
Prise en charge de pa,ents souffrant de TDM et de dysfonc,onnements cogni,fs : la perspec,ve d’un médecin généraliste Sarah Bromley, MBChB Médecin généraliste Directrice médicale au niveau na?onal Services de santé aux délinquants Care UK, Royaume-­‐Uni Dr Bromley : Merci. Je vais parler un peu des soins primaires et de la façon dont on pourrait approcher la dépression.
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Déclara,ons d’intérêt •  Pour la liste complète des déclara,ons d’intérêt, reportez-­‐vous au lien Faculté et déclara,ons figurant sur la page principale du programme. Page 51
Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Rôle du MG au Royaume-­‐Uni •  L’évalua?on ini?ale du pa?ent implique une visite de 10 minutes •  Lors de l’évalua?on de la dépression avec une composante cogni?ve, nous recherchons : –  La descrip?on des pa?ents de l’incidence sur la fonc?on quo?dienne, en par?culier dans le cadre professionnel (les pa?ents ne se plaignent souvent pas directement de troubles cogni?fs) •  Nous effectuons un examen clinique de référence •  Nous traitons souvent des cas de dépression clairs sans les orienter vers un spécialiste •  Nous suivons aussi des pa?ents après un traitement psychiatrique et nous surveillons la santé physique et d’éventuels effets secondaires •  Nous visons une approche de traitement partagée avec la par?cipa?on de tous les professionnels impliqués dans les soins du pa?ent Que ferions-nous au Royaume-Uni avec des patients souffrant de dépression ? L’évaluation initiale du patient dure en général
10 minutes, bien que personnellement, je préfère qu’elle dure un peu plus longtemps quitte à être en retard. La plupart de
mes confrères en font probablement de même car ces patients peuvent être des cas très complexes et présenter également de
nombreux symptômes complexes. D’après mon expérience, ils ne viennent pas en disant : « Je souffre de tel et tel symptôme de
la dépression. » Ils viennent dire que leur vie s’effondre et que tout se passe horriblement mal. Il peut être très difficile d’essayer de
dissocier cela.
Les problèmes liés à d’éventuels facteurs comme un TADH et un traumatisme crânien ont été mentionnés précédemment. En
tant que médecin généraliste, nous sommes souvent en position privilégiée pour connaître ces antécédents et avoir une certaine
compréhension. Nous pouvons répondre à ces interrogations en connaissant les antécédents familiaux, en connaissant les
propres antécédents du patient.
Dans le contexte de la dépression, je crois que de nombreux systèmes utilisent à présent des échelles d’évaluation. La plus utilisée
au Royaume-Uni est le questionnaire sur la santé du patient à 9 items (PHQ-9). Il comporte des questions sur la concentration et la
capacité à réfléchir et à se déplacer, etc. Les patients ne se plaignent souvent pas directement de ces choses-là. Je présume que bon
nombre de mes confrères généralistes font cette évaluation sans véritablement penser à toutes les répercussions. C’est probablement
quelque chose que nous devons aborder davantage, bien que je pense que la fonction devrait aussi être étudiée dans le cadre des
soins primaires. Nous comprenons les vies de nos patients et nous travaillons avec eux lorsqu’elles se compliquent.
Un examen clinique de référence peut être très important, en particulier pour rechercher des comorbidités. Jusqu’ici nous avons
parlé de comorbidités psychiatriques, mais les patients peuvent présenter d’autres comorbidités avec l’âge. Nous avons bien
évidemment tendance à prescrire de nombreux médicaments qui peuvent avoir des conséquences sur la fonction des patients,
en particulier sur leur fonction cognitive. Il est très important d’évaluer minutieusement l’ensemble des médicaments qui leur
sont prescrits. Cela peut être très difficile à faire lorsqu’un patient prend 10 ou 15 médicaments. C’est d’autant plus vrai en cas de
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maladie cardiaque et ainsi de suite, ce qui devient un scénario fréquent. Il est très important que l’examen clinique aille plus loin
que de simples analyses de sang et qu’il étudie l’intégralité de chaque cas patient.
Comme je l’ai mentionné précédemment, au Royaume-Uni bon nombre d’entre nous traitent la dépression sans orienter le patient
vers un spécialiste. Cela dépend beaucoup du médecin généraliste et n’importe quel psychiatre avec qui j’ai travaillé pourrait me
donner la liste des médecins généralistes intéressés par la santé mentale et de ceux qui ne le sont pas. Je suis sûre que vous êtes
nombreux à en avoir fait l’expérience en travaillant avec votre médecin traitant local, mais la plupart d’entre nous la traiteraient.
L’idée de la collaboration entre les soins primaires, le psychiatre et les services de santé mentale est très importante. Le rôle des
médecins généralistes est important dans la continuité du travail avec les patients tout au long de leur traitement, en partenariat
avec les psychiatres. Je pense que nous pouvons améliorer les choses ensemble.
Orienta,on vers un spécialiste en vue d’une évalua,on •  Orienter vers une unité locale spécialisée en cas : –  de symptômes de la dépression persistants –  ayant pour conséquence une altéra?on modérée/
sévère du fonc?onnement psychologique/social/
éduca?onnel/professionnel –  de suspicion de comorbidité psychiatrique –  de préoccupa?on concernant le diagnos?c ou le traitement Nous avons parlé un peu de l’orientation des patients. Nous avons parlé du risque de suicide et du fait qu’il est un facteur de
risque important dans la décision d’orienter le patient. Les médecins généralistes auront des niveaux de tolérance variés vis-à-vis
du risque et des niveaux de confiance variés. Pour ma part, compte tenu de ma longue expérience en milieu pénitentiaire, ma
tolérance est probablement assez élevée, peut-être un peu trop. Je dois m’assurer de ne pas faire preuve de trop de complaisance
dans la mesure où l’automutilation est un problème fréquent pour la population pénitentiaire. Néanmoins certains médecins
généralistes ont un seuil très bas et orientent le patient vers un psychiatre dès le premier signe de pensée suicidaire. C’est
variable. Je pense que la plupart des médecins généralistes orientent le patient en cas de symptômes persistants. En cas de
troubles significatifs et si le patient ne fonctionne pas bien et ne montre pas d’amélioration, il faut envisager de l’orienter vers un
spécialiste. Les comorbidités psychiatriques aboutissent souvent à l’orientation du patient. Ce qui m’est venu à l’esprit plus tôt au
cours de la discussion, c’est qu’en fait, lorsque la situation des patients s’améliore mais qu’ils ont encore des affirmations comme
« La vie est nulle » lors des consultations, cela peut devenir fatiguant. Le fait que la situation des patients ne s’améliore pas alors
que c’est ce que nous attendons peut commencer à nous agacer. Je pense qu’il est parfois dans l’intérêt du patient et parfois aussi
dans notre propre intérêt de partager un peu cette charge.
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Éléments de discussion avec les pa,ents •  Approche centrée sur la personne –  Que veulent Mar?n et Stella ? –  Quels sont leurs objec?fs ? –  Qu’ajendent-­‐ils du traitement ? •  Possibilités de traitement –  An?dépresseurs –  Traitement comportemental cogni?f, ergothérapie •  Quels sont les autres besoins des pa?ents ? –  Traiter l’abus d’alcool, les facteurs liés au mode de vie comme la nutri?on et l’ac?vité physique –  Le pa?ent présente-­‐t-­‐il des comorbidités nécessitant une évalua?on/
prise en charge plus approfondie ? –  Soins préven?fs •  Un suivi psychologique est-­‐il nécessaire ? Il est de plus en plus important, pour l’ensemble de nos systèmes de santé, d’adopter des approches plus centrées sur les patients.
Nous avons discuté de ce que nous ferions en tant que praticiens. Mais que veulent véritablement Martin et Stella ? Quelles sont
les priorités principales de nos patients lorsqu’ils nous consultent ? Parfois leurs priorités principales ne sont pas du tout les nôtres,
et le fait d’étudier cela peut nous aider à comprendre un peu mieux leur éventuel désengagement et pourquoi ils ne prennent pas
les traitements que nous leurs proposons. Nous n’avons peut-être pas compris leurs besoins.
Les troubles cognitifs peuvent avoir des conséquence sur la capacité des patients à prendre les comprimés à l’heure où ils sont
supposés le faire, à venir en consultation lorsqu’ils sont censés le faire et à s’engager dans des thérapies complexes. Nos attentes
sont élevées et nous pouvons quelquefois nous fâcher lorsque les patients ne font pas ce que nous leur disons de faire. Si le TDM
peut avoir des conséquences sur la fonction cognitive des patients, nous devons nous attendre à certaines de ces choses et à nous
y adapter. Il pourrait être important de donner des informations écrites afin que le patient puisse se souvenir de ce qui lui a été dit.
Il y a aussi d’autres techniques que nous pouvons utiliser.
En ce qui concerne les possibilités de traitement, elles sont évidemment variées mais dépendent aussi de ce qui est disponible
localement. Il existe un programme de psychothérapie au Royaume-Uni depuis environ 10 ans qui a grandement facilité l’accès
à la psychologie et à la TCC en particulier, qui est le traitement de choix du gouvernement pour un grand nombre d’affections.
Cela s’est montré très bénéfique car nous disposons à présent de plus de possibilités pour orienter nos patients. Mais il y a aussi
d’autres besoins. Nous avons parlé de l’abus d’alcool, mais il peut y avoir d’autres facteurs liés au mode de vie que nous devons
mettre en avant et dont nous devons discuter. La nutrition peut être très importante. Les patients qui ne mangent pas bien se
sentiront très mal. Il pourrait être important d’envisager des options plus saines. L’activité physique est aussi importante et il faut
explorer les possibilités et disponibilités qui s’offrent aux patients localement afin qu’ils s’y engagent.
Nous avons parlé des comorbidités et du soutien psychologique. Nous avons mentionné la psychothérapie et le fait qu’il peut être
très important d’apporter un soutien aux patients, en particulier en cas d’abus de substance.
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Approche holis,que •  Fournir des informa?ons au sujet des services locaux : –  Groupes de bénévoles/de sou?en locaux •  Sites Web et applica?ons •  Informa?ons écrites au sujet de la dépression –  Diagnos?c, traitement et vivre avec la dépression •  Alimenta?on et ac?vité physique –  Alimenta?on saine et équilibrée •  Rela?ons et mécanismes de sou?en Il s’agit d’une approche holistique. Il ne s’agit pas d’un simple modèle médical selon lequel « Nous vous faisons ceci afin
d’améliorer votre situation ». Il existe de nombreuses activités de soutien au sein des communautés locales. Cela varie selon les
régions, mais les groupes de bénévoles peuvent largement contribuer à soutenir les patients à guérir de la dépression. Il existe
aussi de nombreux sites Web et des applications que les patients peuvent utiliser. Il est utile de se familiariser avec ceux-ci, afin de
pouvoir conseiller à nos patients de les utiliser.
J’ai mentionné des informations écrites et dans le contexte de la fonction cognitive, il est important que les informations que nous
fournissons aux patients soient très équilibrées. En effet ceux-ci peuvent avoir une perception négative de ce qu’ils traversent.
Toute parole négative pourrait profondément influencer nos patients et pourrait se transformer en pensée négative récurrente.
Aussi devons-nous faire très attention à leur donner un point de vue équilibré.
Nous oublions aussi souvent de penser aux relations des patients, c’est important car aucun de nous ne vit de manière isolée.
Nous avons tous des relations et même en milieu pénitentiaire, nos prisonniers tissent des relations entre eux et avec des agents
pénitentiaires, même s’ils ne peuvent entretenir des relations avec leur famille. Il est très important d’y prêter attention ainsi qu’à
l’impact que cela a sur leurs symptômes dépressifs et leur fonction.
Je vais maintenant passer à la discussion du groupe d’experts. Merci.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Discussion du groupe d’experts Dr Demyttenaere : Merci Sarah. En tant que médecin généraliste, est-il plus facile d’orienter un patient vers un psychologue ou
vers un psychiatre et est-ce que cela fait une différence ?
Dr Bromley : Au Royaume-Uni il est assez difficile pour moi d’orienter quelqu’un vers un psychologue. Dans le cadre du
programme Improving Access to Psychological Therapies (IAPT, programme instauré pour améliorer l’accès à la psychothérapie),
certaines équipes sont dirigées par des psychologues mais la majeure partie des thérapeutes qui y contribuent sont spécialisés
dans la TCC. Je suppose que c’est particulier au Royaume-Uni, où nous avons des membres de l’IAPT formés à des thérapies
spécifiques, mais peut-être pas à la psychothérapie générale comme le serait un psychologue. À l’heure actuelle, il est facile
d’orienter un patient vers une psychothérapie mais pas vers un psychologue. Il est aussi difficile de les orienter vers un psychiatre
au Royaume-Uni car il faut les orienter vers une équipe spécialisée en santé mentale. Le patient est évalué par un infirmier
spécialisé en santé mentale et l’orientation vers un psychiatre dépend de la pertinence déterminée suite à cette évaluation.
Dr Demyttenaere : Pour rappel, au Royaume-Uni, le débat sur un recours à la TCC seule se poursuit. Si vous demandez aux
étudiants en médecine quelle est la forme de psychothérapie la plus appropriée pour traiter la dépression, ils répondront la TCC ou
la psychothérapie interpersonnelle (TIP). Si vous examinez les méta-analyses publiées aux Pays-Bas par Cuijpers, un psychologue
néerlandais, il n’y a presque pas de différence entre les différents types de psychothérapie[6,8]. Il est bon de s’en souvenir.
Dr Vieta : Les différences d’un pays à l’autre sont très intéressantes. Le Royaume-Uni est un cas très spécifique. En Espagne,
et en particulier dans ma région, en Catalogne, nous avons un système que j’apprécie plutôt, selon lequel nous envoyons des
spécialistes en soins primaires pour aider les médecins généralistes à mieux sélectionner les patients devant être orientés vers le
contexte psychiatrique ou qui doivent être suivis par un spécialiste. Le Dr Cavero, qui est assise à l’avant de cet auditoire, est notre
experte à Barcelone et elle a ce rôle dans mon hôpital. Tous les jours, elle se rend dans différents endroits pour aider des médecins
généralistes à sélectionner les bons patients, sans quoi la sélection n’est pas nécessairement effectuée en fonction de ce qui est le
plus utile. Elle est basée sur ce que pense le médecin généraliste, ce qui n’est pas nécessairement la même chose.
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Dr Bromley : Je suis d’accord. J’aimerais beaucoup voir ce modèle plus fréquemment au Royaume-Uni. Nous l’avons davantage
en milieu pénitentiaire, certainement à cause de la nature du travail, mais nous ne le voyons pas tellement en soins primaires. Je
pense que c’est un excellent modèle car il est éducatif. Je comprends mieux ce que je fais si je parle à un spécialiste. De plus, il y a
des cas où le patient n’a pas besoin d’être orienté vers un spécialiste, mais j’ai seulement besoin de conseils et je peux interroger le
spécialiste. C’est un excellent modèle.
Dr Demyttenaere : J’ai une question pour Eduard et Bernhard. Je pense qu’il y a une tendance générale à rapprocher l’interaction
entre les psychologues, les médecins généralistes et les psychiatres. Cela entraînerait-il la fin de la psychothérapie dans le cadre
des tâches du psychiatre ?
Dr Baune : Je ne pense pas que ce soit le cas. En Allemagne, là où j’ai été formé, on devient psychiatre et psychothérapeute
en même temps. Par conséquent, ils jouent tous deux un rôle important dans l’éducation et la pratique clinique que ce soit à
l’hôpital universitaire ou en clinique privée. La situation de la psychothérapie en clinique privée en Allemagne est peut-être un
peu différente en raison du fait que les psychiatres en clinique privée sont mal rémunérés en Allemagne. La psychothérapie
prend du temps et n’est pas aussi intéressante financièrement qu’un traitement à court terme chez la plupart des patients.
Cependant en Australie, il y a une séparation claire entre la psychiatrie et la psychologie. Un psychiatre n’est pas supposé pratiquer
la psychothérapie. Le système australien fonctionne assez bien car un psychologue est rattaché à chaque cabinet de médecine
générale. Si un patient est orienté vers vous par un médecin généraliste et qu’en tant que psychiatre vous décidez que la
psychothérapie est nécessaire au patient mais que vous ne souhaitez pas l’effectuer vous-même (ou que vous estimez que vous ne
devez pas la faire en raison du règlement), vous pouvez le réorienter et il bénéficiera d’une psychothérapie dans les 4 à 6 semaines
environ.
Dr Vieta : Cela dépend de la définition de la psychothérapie. Je pense que nous faisons tous de la psychothérapie en quelque
sorte, même en tant que médecin généraliste, et c’est très utile. La relation que vous établissez avec le patient implique une forme
de psychothérapie. Néanmoins, il existe des formes de psychothérapie spécifiques effectuées par des psychologues, du moins
dans le secteur public. Il y a la remédiation cognitive, par exemple, qui est une intervention très spécialisée. Un psychiatre ou
un infirmier peuvent y être formés, mais ces types de psychothérapie très spécifique appartiennent davantage au domaine des
psychologues. Mis à part cela, nous faisons aussi, et nous devons faire, de la psychothérapie.
Dr Demyttenaere : Nous avons une question de l’auditoire au sujet des tests neurocognitifs. Je crois que nous y avons déjà en
partie répondu. Quelle doit être la place des tests neurocognitifs pratiqués sur nos patients ? La personne met en avant le fait qu’il
existe de nombreux tests pour le TDAH. Pour faire référence à ce que j’ai dit dans mon introduction, environ 40 % des patients
souffrant de TDM présentent des symptômes cognitifs cliniquement significatifs, et seulement la moitié d’entre eux les signale de
manière subjective[9]. Cela signifie que dans l’ensemble, un tiers a des plaintes subjectives ; un tiers n’a que des troubles objectifs,
et environ un tiers a des plaintes subjectives et troubles objectifs à la fois. Quel serait le rôle des tests neurocognitifs dans la
pratique quotidienne ?
Dr Vieta : Je pense qu’il y a 3 choses qui ont été négligées dans la dépression. Il y a d’abord les effets secondaires sexuels ;
nous n’interrogeons pas les patients à ce propos. Il y a aussi le suicide, au sujet duquel nous devons poser des questions et
nous commettons une grosse erreur si nous n’en parlons pas. Il nous faut toujours poser des questions à ce propos. Il y a enfin
la cognition et puisque c’est un domaine négligé, je pense que nous devrions évaluer la cognition à l’avenir. C’est mon avis. Je
comprends qu’il y a des nuances dans la pratique, mais je suis pour le dépistage de la cognition.
Dr Baune : Je suis tout à fait d’accord avec vous. J’irais même un peu plus loin en disant que nous devons évaluer la fonction de
nos patients de manière plus objective plutôt que de nous cantonner à leur demander comment ils vont, comment ils se sentent
et à leur poser d’autres questions générales. Je pense qu’il nous faut des évaluations de la fonction et je dirais que la cognition fait
partie de cette évaluation de la fonction, qui s’applique aussi à d’autres domaines.
Dr Demyttenaere : Si je peux revenir à ce que disait Eduard et à ce que Bernhard a déjà suggéré au cours de sa présentation, et c’est
aussi une question qui nous vient de l’auditoire : « Comment approfondir l’évaluation du risque de suicide dans le deuxième cas ? »
Dr Baune : Le risque de suicide dans le deuxième cas a été abordé rapidement uniquement afin d’indiquer l’orientation vers
le psychiatre par le médecin généraliste. Dans le cas du psychiatre, nous devons étudier s’il y a une activité aigüe, comme
la planification de tentatives de suicide. Il est important de distinguer la lassitude de l’existence d’un risque plus élevé. Il est
important de répondre à ce problème car lorsque nous démarrons un traitement et que les patients vont mieux, grâce aux
médicaments ou aux circonstances, cela peut finalement augmenter le risque de suicide. Nous devons avoir une discussion
franche avec le patient à ce sujet.
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Focus sur le patient : dysfonctionnements cognitifs et trouble dépressif majeur
Dr Demyttenaere : Je suis tout à fait d’accord. Le patient a dit qu’il pensait à la corde qu’il avait vue. D’un autre côté, il a dit avoir
peur d’avoir eu cette idée, ce qui est un point négatif. Le point positif est qu’il a dit immédiatement, et de façon spontanée, qu’il ne
ferait jamais « une bêtise ». Les deux points méritent d’être approfondis.
Dr Vieta : Nous avons préparé ce cas pour les scénarios, mais il y a en fait deux éléments inhabituels. Le patient signale de façon
spontanée qu’il boit trop et qu’il a des pensées suicidaires. Beaucoup de patients ne le font pas et c’est notre rôle de trouver si c’est
le cas.
Dr Demyttenaere : Passons maintenant aux problèmes liés aux performances professionnelles. Nous l’avons abordé et nous
aimerions avoir votre avis, et nous avons également une question de l’auditoire. Comment traiter la question de la mise en place
ou non de l’arrêt maladie ? Sarah, si vous avez un patient souffrant de dépression, en particulier avec des symptômes cognitifs de
la dépression, qu’est-ce qui vous pousserait à décider d’un congé de maladie pour un patient en particulier ?
Dr Bromley : Je pense que c’est une décision difficile à prendre. Dans ma pratique, en fin de compte, j’ai une discussion avec le
patient afin de voir ce qu’il y a de mieux pour lui. C’est souvent ce qui me guide. Pour certaines personnes, la pression au travail
est si intense, et leur est si néfaste, qu’un arrêt de travail sur une certaine période est la bonne décision, car ils doivent prendre
du recul. Mais de plus en plus, nous reconnaissons tous que le travail est bon pour la santé. Dans l’ensemble, il nous donne le
sentiment d’être utile et nous oblige à sortir, à accomplir et à faire quelque chose. Je pense que nous avons probablement agi trop
rapidement en accordant des arrêts maladie aux patients souffrant de dépression et nous devons être plus vigilants. Je connais
des patients qui ne vont plus consulter un médecin généraliste car ils ont peur d’être mis en arrêt maladie. Il y a le problème de la
stigmatisation. Il y a toujours des gens qui pensent qu’en raison d’un antécédent de diagnostic de dépression, s’ils sont absents à
cause d’un arrêt maladie, ils n’auront pas de promotion. Ils ne pourront aller de l’avant. S’ils perdent leur travail, ils n’en trouveront
pas d’autre. Je pense qu’il est bon d’explorer tout cela et de bien le comprendre avant de décider d’accorder un arrêt maladie.
Dr Baune : Je pense que nous devons créer une culture qui soutient le dialogue entre les médecins et les employeurs afin de
permettre un retour au travail progressif et de travailler à mi-temps pendant un certain temps. Nous devons discuter du fait qu’il
s’agit d’une maladie qui doit être prise en charge. Que c’est bénéfique pour le patient car il ne perd pas en productivité et que
c’est bénéfique pour l’employeur de ne pas avoir quelqu’un en arrêt maladie. En fait, c’est une situation avantageuse pour tout le
monde et je pense que nous devons mieux dialoguer et présenter la situation sur le plan culturel.
Dr Demyttenaere : Là encore il y a des différences d’un pays à l’autre. Pour toutes les personnes intéressées par ce sujet, il y a un
article de recherche clinique intéressant de Bilsker et ses collègues concernant les éléments qui doivent nous pousser à placer un
patient en arrêt maladie[10]. Je le recommande vivement.
Revenons à la question de l’alcool et de la cognition. Bernhard, pourriez-vous rapidement commenter l’effet de l’alcool sur la
cognition ?
Dr Baune : Lorsque nous buvons, nous avons une altération d’environ 0,5 d’écart type en raison des effets de l’alcool sur notre
cognition. C’est un effet. S’il y a consommation d’alcool plus chronique, comme nous pouvons le supposer dans ce cas particulier,
cela est toxique pour le cerveau. En effet l’alcool a des effets néfastes sur la matière blanche, en particulier sur les astrocytes et les
oligodendrocytes[11]. Il y a des modifications structurelles et cellulaires suite à l’abus d’alcool chronique. C’est pourquoi je pense
qu’il est très important d’explorer la contribution potentielle de l’alcool aux dysfonctionnements cognitifs à court terme et sur le
long terme. Il est aussi très important d’effectuer un suivi diagnostique avec des IRM, des TDM et d’autres examens.
Dr Demyttenaere : Nous avons une autre question de l’auditoire au sujet du traitement. Parmi les possibilités de traitement dans
le premier cas, figure le passage de l’escitalopram à la venlafaxine. Quelqu’un nous interroge sur l’utilisation de la vortioxétine.
Passeriez-vous à celle-ci, ou même, est-ce que vous l’utiliseriez comme médicament d’appoint afin d’améliorer les symptômes
cognitifs des patients qui prennent des IRSN ou des ISRS et montrent seulement une rémission partielle ou des symptômes
cognitifs résiduels ?
Dr Vieta : À ce jour, la vortioxétine a fait l’objet de 2 études cliniques principales ainsi que d’une étude sur les personnes âgées.
Elle a montré des effets positifs sur la cognition, en plus des effets antidépresseurs[3,12,13]. Il y a des études en cours qui évaluent si
le passage à la vortioxétine peut être une meilleure option dans un cas comme celui de Stella. La vortioxétine est aussi étudiée
comme traitement d’appoint en plus d’un antidépresseur. Nous devons attendre les résultats de ces études en cours.
Dr Baune : Il y a également une autre étude intéressante et pertinente dans le cas de Stella. Elle est réalisée sur des patients
qui sont dans une phase qu’on appelle rémission, dont la dépression s’est améliorée mais qui montrent toujours des troubles
cognitifs. Elle évalue si la vortioxétine atténuerait certains de ces symptômes. Je pense que c’est une question très importante.
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Dr Demyttenaere : Eduard, pouvez-vous présenter rapidement les symptômes cognitifs et si ceux-ci permettent de différencier la
dépression unipolaire de la dépression bipolaire ?
Dr Vieta : Le profil des troubles cognitifs des patients souffrant de schizophrénie, de troubles bipolaires et de dépression est
similaire. Il est différent sur le plan quantitatif, mais pas sur le plan qualitatif. La cognition est une dimension séparée et nous ne
pouvons pas baser ces diagnostics différentiels sur la cognition, bien que la cognition soit un véritable problème, non seulement
dans le cas de la schizophrénie, mais aussi pour les troubles bipolaires et la dépression. Il existe un programme de remédiation
fonctionnelle pour les troubles bipolaires et je crois qu’il est en cours d’évaluation pour la dépression unipolaire. Je pense que la
remédiation fonctionnelle et la remédiation cognitive peuvent être utiles à ce niveau.
Membre de l’auditoire : Après le début d’un traitement antidépresseur, quand évalueriez-vous le patient à nouveau et quand le
feriez-vous revenir pour une consultation de suivi ? Je me demande s’il y a une différence entre les soins primaires et la psychiatrie
en raison des risques de suicide, etc. ?
Dr Bromley : Au Royaume-Uni, nous devons suivre de près les recommandations du National Institute for Health and Care
Excellence (NICE, Institut national pour l’excellence de la santé et des soins). Elles nous indiquent que nous devons évaluer les
patients toutes les 2 semaines[14]. C’est probablement ce que font la plupart des médecins généralistes. On peut décider d’évaluer
un patient plus fréquemment en cas d’inquiétude majeure concernant le risque de suicide. Pour ma part, je reverrais le patient
toutes les 2 semaines afin de vérifier qu’il prend les comprimés et qu’il ne les a pas arrêtés en raison d’effets secondaires. Puis, je le
reverrais 4 semaines après pour voir l’effet du traitement, puis 8 semaines après. C’est ce que je ferais habituellement.
Dr Baune : En pratique clinique psychiatrique, je dirais qu’il faut réévaluer le patient après 1 ou 2 semaines.
Dr Vieta : Je dirais la même chose.
Membre de l’auditoire : Je crois que Sarah a mis le doigt dessus. Je sais qu’il s’agit d’un scénario limité, mais nous semblons être
en présence d’un abus d’alcool. Dans la prise en charge de ce cas, je considérerais que le patient pratiquait une auto-médication
car il prenait probablement de l’alcool pour traiter son insomnie. Il peut avoir été pris dans un cercle vicieux, ainsi je pense que le
traitement de l’insomnie pourrait être vital dans ce cas.
Dr Bromley : Il y a le traitement de l’insomnie et celui de la douleur, qui peut être un réel facteur dans la vie des patients. Je voulais
ajouter que les patients pratiquent une auto-médication en prenant de l’alcool et des drogues, mais nous voyons de plus en plus
de problèmes concernant l’abus de médicaments sur ordonnance. C’est un problème grandissant car les patients en prennent de
plus en plus. C’est un tout autre débat, mais c’est quelque chose que nous voyons beaucoup.
Dr Demyttenaere : Nous avons un dernier commentaire d’un membre de l’auditoire sur la personnalisation du traitement pour
chaque patient et le fait que chaque patient ait un objectif personnel de bien-être à atteindre. C’est un bon résumé.
Dr Vieta : Nous devons prendre connaissance des recommandations et les adapter afin de traiter chaque patient de manière
individuelle.
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Conclusion Pr Koen Demy=enaere Chaire académique Centre psychiatrique universitaire ; Professeur de psychiatrie, faculté de médecine Université catholique de Louvain Louvain, Belgique ; Co-­‐?tulaire, associa?on « Pour plus de Bonheur » (Ga voor Geluk), Belgique Dr Demyttenaere : Je vais maintenant conclure. Tout le symposium a été conduit en fonction des 2 scénarios de cas montrant les
symptômes cognitifs. Nous pouvons voir leur importance pour les patients et ce que couvrent les questionnaires requis par les
organismes réglementaires.
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A=entes des pa,ents vis-­‐à-­‐vis du traitement an,dépresseur Les 10 éléments les plus importants pour les pa?ents dans leur traitement contre la dépression 1. Trouvez-­‐vous que la vie a un sens ? 2. À quel point aimez-­‐vous la vie ? 3. Dans quelle mesure êtes-­‐vous sa?sfait(e) de vous-­‐même ? 4. Quelle est votre capacité de concentra?on ? 5. Sen?ments néga?fs : déprime, désespoir, anxiété 6. Sensa?on de fa?gue ou de manque d'énergie 7. Sen?ment d’être abaju(e), déprimé(e) ou désespéré(e) 8. Sen?ment de force 9. Quel est votre niveau de sa?sfac?on concernant vos rela?ons personnelles ? 10. Sen?ment d’ac?vité Demyjenaere K, et al. J Affect Disord. 2015;174:390-­‐396. Cette diapositive montre les résultats de l’une de nos études sur les attentes des patients vis-à-vis du traitement antidépresseur.
Voici les 10 plus importantes pour les patients. Je vous assure que si vous posez la même question aux médecins, vous obtiendrez
des réponses totalement différentes. Voici ce que les patients attendent du traitement contre la dépression. La première est :
« Trouvez-vous que la vie a un sens ? » Cela ne figure jamais dans les questionnaires, mais c’est important pour les patients.
Trouvent-ils que leur vie a un sens et se sentent-ils utiles aux autres ? La deuxième est : « À quel point aimez-vous la vie ? La
troisième est : « Dans quelle mesure êtes-vous satisfait(e) de vous-même ? » La quatrième : « Quelle est votre capacité de
concentration ? » Il peut être utile de savoir que ces quatre premières questions ne figurent pas dans nos échelles d’évaluation et
qu’elles sont très importantes pour les patients.
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Troubles cogni,fs en cas de TDM • 
Les troubles cogni?fs sont une composante de la dépression • 
Ils ont un impact important et une incidence sur de nombreux domaines de la vie, des rela?ons sociales au travail • 
Les troubles cogni?fs peuvent être diffus en cas de TDM, les résultats des tests des pa?ents peuvent être hétérogènes et il n’existe pas de modèle de dysfonc?onnement cohérent • 
D’autres comorbidités peuvent avoir une incidence sur la cogni?on et doivent être prises en compte pour le diagnos?c différen?el et l’évalua?on Nous avons appris aujourd’hui que les symptômes cognitifs sont une composante importante de la dépression et sont
cliniquement significatifs chez 40 % des patients souffrant de TDM[9]. Ils ont de grandes conséquences sur de nombreux domaines
de la vie, allant des relations sociales au travail, en passant par les relations plus intimes. Les troubles cognitifs peuvent être diffus
chez les patients souffrant de TDM et ils ne les signalent pas tous. Certains patients ont des troubles objectifs, d’autres des troubles
subjectifs et environ un tiers souffre des deux. Il a aussi été mis en avant que les symptômes cognitifs peuvent avoir d’autres
causes, par exemple l’âge, l’abus d’alcool, des lésions cérébrales, etc. Aussi devons-nous également penser à d’autres causes de
symptômes cognitifs chez les patients souffrant de dépression. Ils ne sont pas toujours dus à la dépression.
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Troubles cogni,fs en cas de TDM (suite) • 
Il existe des possibilités de traitement pharmacologiques et non pharmacologiques afin de prendre en charge les troubles cogni?fs des pa?ents souffrant de TDM • 
Les cliniciens doivent rechercher et reconnaître les troubles cogni?fs chez leurs pa?ents Il existe des possibilités de traitement pharmacologiques et non pharmacologiques afin de prendre en charge les troubles
cognitifs des patients souffrant de TDM. Les cliniciens doivent rechercher et reconnaître les troubles cognitifs chez ces patients,
comme cela a été démontré dans les 2 scénarios de cas que nous avons partagés avec vous.
J’aimerais remercier le groupe d’experts pour leurs excellents commentaires sur les scénarios de cas et leurs réponses
remarquables aux questions. Nous vous remercions d’avoir participé à ce programme de Medscape Education.
Cette transcription a été modifiée pour améliorer le style et la clarté.
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Références
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is associated with improvements in long-term depression outcomes in patients treated with duloxetine. BMC Psychiatry.
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Abréviations
ASRS = test de dépistage et d’auto-évaluation des TDAH de l’adulte à 18 questions
DSM-5 = manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 5e édition
DSST = Digit Symbol Substitution Test
FAST = Functional Assessment Staging
IAPT = Improving Access to Psychological Therapies (programme instauré pour améliorer l’accès à la psychothérapie)
IRM = imagerie par résonance magnétique
IRSN = inhibiteur de la recapture de la sérotonine-noradrénaline
ISRS = inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine
MG = médecin généraliste
MMSE = Mini-Mental State Examination
MoCA = Montreal Cognitive Assessment
NICE = National Institute for Health and Care Excellence (Institut national pour l’excellence de la santé et des soins)
PHQ-9 = questionnaire sur la santé du patient à 9 items
SCIP = Screen for Cognitive Impairment in Psychiatry
SNC = système nerveux central
TCC = thérapie cognitivo-comportementale
TDAH = trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité
TDM = tomodensitométrie
TDM = trouble dépressif majeur
TIP = psychothérapie interpersonnelle
TSH = thyrotrophine (de l’anglais « thyroid stimulating hormone »)
UPSA-B = Brief University of California, San Diego, Performance-Based Skills (évaluation de la performance axée sur les
compétences)
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Avis de non-responsabilité
Ce document est destiné à des fins exclusivement éducatives. Aucun crédit de formation médicale continue (FMC) ne
sera octroyé pour la lecture du contenu de ce document. Pour participer à cette activité, consultez le site
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Pour toute question sur le contenu de cette activité, veuillez contacter le responsable de cette FMC à l’adresse suivante :
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Pour obtenir de l’aide technique, veuillez nous contacter à l’adresse suivante : [email protected]
L’activité de formation présentée ci-dessus peut comporter des simulations de scénarios basés sur des cas. Les patients décrits
dans ces scénarios sont fictifs et aucune association avec des patients réels n’est voulue ou ne doit être inférée.
Le matériel présenté ici ne reflète pas nécessairement les vues de WebMD Global, LLC ou des sociétés qui financent les
programmes de formation offerts sur medscape.org. Ces documents sont susceptibles de discuter des produits thérapeutiques
dont l’utilisation n’a pas encore été autorisée en Europe par l’Agence européenne des médicaments, ainsi que de certaines
utilisations hors indications de produits autorisés. Un professionnel de santé qualifié doit être consulté avant l’utilisation de
tout produit thérapeutique ayant fait l’objet d’une discussion. Les lecteurs doivent vérifier toutes les informations et données
présentées avant d’utiliser une thérapie décrite dans cette activité de formation pour traiter des patients.
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